Les événements de 360-361 dans les Lettres de l’empereur Julien
p. 365-381
Texte intégral
1Grâce à leur grande variété de ton et de contenu, les Lettres de l’empereur Julien constituent un matériau incontournable pour étudier la personnalité de leur auteur, ses relations, ses préoccupations tant littéraires que philosophiques ou politiques, ou encore la culture de son temps. Elles ménagent en outre une voie d’accès de premier ordre à certains événements historiques du règne de Julien, évoqués ou racontés par l’épistolier. Étant donné le thème de la rencontre de Tours, il a paru intéressant d’enquêter sur la manière dont l’auteur envisage dans ses lettres la succession des faits qui l’ont porté au pouvoir suprême pendant les années 360-361.
2Commençons par un bref rappel événementiel : en 355, l’empereur chrétien Constance nomme au rang de César, pour s’occuper des affaires de la Gaule, son jeune cousin Julien, qu’il avait tenu reclus puis sous haute surveillance pendant près de dix-huit ans après avoir commandité l’assassinat, entre autres, du propre père de Julien. Ce dernier assume ses nouvelles fonctions avec dévouement, si bien que la situation de la Gaule est relativement stabilisée au début de l’année 360. Or, une nuit de février, à Paris, les soldats acclament Julien avec le titre d’Auguste, ce qui constitue, formellement, une usurpation. Quelque temps plus tard, Julien prend l’initiative d’écrire à Constance afin de lui raconter ce qui s’est passé et de lui faire part de ses intentions pacifiques. Devant le refus de Constance d’accepter la proclamation, et comme ce dernier commence à rassembler des troupes, Julien décide de faire marche vers l’Orient et quitte la Gaule au début du printemps 361 à la tête d’une armée de vingt-cinq mille hommes, résolu à l’affrontement militaire. Celui-ci n’aura jamais lieu car, à Naïssus, Julien apprend que Constance est subitement mort de maladie le 3 novembre. Seul Auguste désormais, il entre triomphalement dans Constantinople le 11 décembre.
3L’enquête part de la lecture détaillée de la lettre 17b, dans laquelle Julien raconte à Constance les événements de Paris1. Le questionnement sur la manière dont le récit historique s’insère dans le cadre épistolaire se double d’une seconde problématique, plus complexe, qui touche à la dimension autobiographique du récit, dans la mesure où l’émetteur de la lettre est lui-même au cœur des événements qu’il relate. À propos des textes qui se donnent comme le récit d’une expérience personnelle, Philippe Lejeune écrivait :
Le problème […] tient à ce que ce type de textes (qu’il s’appelle autobiographie, témoignage, document) a pour effet de créer, aussi bien au niveau du pacte de lecture que des techniques narratives employées, l’illusion de transparence : ils se présentent comme des non-textes, si bien qu’il semble oiseux d’aller voir comment ils sont faits.2
4Autrement dit, la qualité de témoin et d’acteur de Julien ne doit pas conduire à lire son exposé comme un compte rendu objectif livré sans médiation narratologique, bien au contraire : un des principaux enjeux de l’étude est de montrer comment Julien se met en scène dans son récit – car il y a bien une mise en scène –, et à quelle finalité répondent ses choix narratifs. La réflexion gagnera à prendre en compte progressivement un corpus de textes élargi : à titre de comparaison, l’enquête envisagera d’autres lettres dans lesquelles Julien évoque sa relation avec Constance ou l’épisode de la proclamation et les événements qui ont suivi, et elle s’intéressera aussi à la manière dont les historiens anciens ont narré ces mêmes événements.
Lecture analytique de la lettre 17b
5La lettre 17b, telle que nous la connaissons, est transmise de seconde main. Le texte figure en effet au chapitre VIII du livre XX d’Ammien Marcellin, lequel introduit le long document qu’il s’apprête à reproduire comme suit : Erat autem litterarum sensus huius modi, « Telle était, en substance, la teneur de la lettre :… »3 Il ne s’agit donc pas d’une reproduction littérale, mais d’une récriture comportant un certain degré d’approximation. Le texte de la lettre étant en latin, il est légitime de conjecturer que le premier élément d’approximation qu’avait en tête Ammien résidait peut-être dans l’élaboration d’une traduction à partir d’un original grec ; de fait, les deux éloges de Constance que nous avons conservés de la main de Julien sont rédigés en grec, ce qui prouve qu’il s’agissait de la langue naturellement employée entre les deux hommes4. Quoi qu’il en soit, tout en gardant à l’esprit que cette lettre n’est pas littéralement celle envoyée par Julien, nous sommes fondés à penser qu’il existe une certaine conformité par rapport à cette dernière. Dans la suite, en effet, Ammien ajoute qu’en même temps que cette lettre destinée à être lue en public, Julien en avait envoyé une seconde, personnelle, à Constance, mais qu’il n’est pas en mesure d’en parler car il n’a pas été autorisé à la consulter5. Cette précision incite à penser a contrario que sa transcription de la première lettre s’appuie sur une consultation directe de l’original. L’esprit et la structure de la lettre de Julien ont donc toutes chances d’avoir été conservés, hypothèse d’ailleurs confortée par la lecture de l’oratio 5, dont il sera question plus loin.
6La lettre 17b est organisée en trois parties distinctes, dans lesquelles Julien envisage successivement le passé, le présent et l’avenir. Il dresse d’abord un bilan de son action en Gaule et souligne les principaux traits de caractère dont il a fait preuve : constance, loyauté, endurance, bonne volonté (§ 5-66). Il en vient ensuite au récit proprement dit de la récente proclamation, qu’il fait précéder d’une analyse des causes de cette dernière (§§ 7-10). Il adresse enfin à Constance une série de conseils, concernant successivement la manière dont il doit se comporter en apprenant les événements, puis les mesures à prendre dans un proche avenir pour rétablir la concorde (§ 11-16). En conclusion, Julien revient sur l’esprit dans lequel il a écrit cette lettre et tend la main à son destinataire (§ 17).
7Au sein de cet ensemble, le récit historique est clairement délimité. La partie narrative de la lettre s’ouvre sur une formule d’introduction : Sed bona tua uenia dixerim siquid nouatum est nunc, ut existimas, « Mais puisses-tu m’accorder la bienveillante permission de dire si quelque révolution est en cours, ainsi que tu le penses… »7 Et une formule de transition, au début du § 11, indique que l’exposé des faits est désormais achevé : Gestorum hic textus est, « Tel est l’enchaînement des faits. » Pour autant, c’est l’ensemble de la lettre qu’il faut prendre en compte pour comprendre la valeur que Julien entend donner à ces faits, car ceux-ci sont bel et bien mis en scène suivant une certaine finalité. Dans la perspective qui est la nôtre, trois éléments méritent d’être relevés et commentés : a) l’effacement du rôle de Julien dans les événements ; b) le respect et la bienveillance affichés envers Constance ; c) la mise en accusation voilée de ce dernier.
8a) Ce qui frappe d’emblée à la lecture de la lettre, c’est le rôle entièrement passif joué par Julien dans le déroulement d’événements dont il était pourtant le centre. Dans le récit proprement dit, ce sont d’autres que lui qui accomplissent toutes les actions principales et occupent la position de sujet grammatical : c’est d’abord miles, « le soldat8 » – au singulier, le recours à l’abstraction permettant à la fois de ne pas incriminer directement son armée en tant que collectif d’individus et de présenter le soulèvement comme le résultat d’un enchaînement logique, rationnellement saisissable – ; c’est ensuite un groupe pluriel indéfini, homines, « les hommes », qui est sous-entendu au moment-clé du récit :
C’est pourquoi, rendus farouches par une fureur plus grande qu’à l’accoutumée, réunis de nuit en une seule foule, ils assiègent le palais, appelant à grands cris répétés « Julien Auguste ».9
9Cette phrase est très habilement construite : sa brièveté et l’usage de l’infinitif de narration obsidere manifestent la rapidité, mais aussi la soudaineté et la spontanéité des événements. Julien n’y apparaît qu’en position d’objet, à l’accusatif, et sous la forme de son nom propre, ce qui, par rapport à l’utilisation du pronom personnel me, renforce l’impression qu’il est absent du récit, ou plutôt que le protagoniste est différent de l’émetteur de la lettre. Quand, dans la suite, Julien est sujet d’un verbe, c’est soit d’un verbe au passif10, soit d’un verbe exprimant une réaction peu glorieuse de peur et d’évitement11, soit d’un verbe dénotant des efforts et des tentatives vaines12, soit encore d’un verbe de pensée où s’exprime l’espoir, finalement déçu, de réussir à maîtriser la situation13.
10Julien se représente donc comme totalement dépassé par les événements, subissant les faits sans parvenir à interférer dans leur déroulement. Cette impression est renforcée dans l’ensemble du passage par le contraste entre la solitude de Julien et l’ampleur de la foule : de nombreux pluriels ou singuliers collectifs produisent un effet d’écrasement14. Le contraste trouve son plus haut degré d’expression dans la phrase suivante : […] progressus ante conspectum omnium steti, « M’étant avancé, je me tins debout à la vue de tous. »15 La mise en scène dramatique de ce récit tend donc à ôter à Julien toute responsabilité dans les événements, ce qui montre que le mode narratif choisi répond à une visée clairement apologétique. La seule action positive – qui n’est d’ailleurs pas vraiment une action ! – dont Julien soit le sujet est le fait de donner, à la toute fin de l’épisode, son assentiment : adsensus sum16. Encore cet assentiment intervient-il après une longue suite de circonstances indiquant qu’il a été donné sous la contrainte : la foule, excédée par les atermoiements de Julien, le menaçait de mort17. En outre, en appliquant l’adjectif libens à un autre candidat hypothétique au titre d’Auguste, Julien fait savoir que lui, au contraire, n’était pas « volontaire »18.
11b) Dans la même démarche apologétique, Julien multiplie tout au long de sa lettre les marques de respect et de loyauté à l’égard de Constance, cherchant à établir qu’il n’y a pas eu trahison de sa part. Dans la première partie de la lettre, il se dépeint comme un serviteur zélé et fidèle, qui n’a pas ménagé sa peine depuis sa nomination comme César, et ce en dépit de la difficulté de la tâche, amplement soulignée d’une manière qui confine au grandissement épique19. À travers un réseau lexical tissé dans les § 5-6, Julien insiste sur sa fidélité et sa loyauté envers Constance : fidem - fœderum - fidus.
12D’autres marques de déférence émaillent la lettre : Julien « prie » Constance de recevoir sans animosité le récit des événements20 ; il implore son pardon et déclare attendre avant tout son approbation et ses ordres21 ; il affirme avoir à cœur de ne pas outrepasser son rang22. Julien espère sans doute que l’humilité affichée contribuera à sa démarche apologétique et à la pacification des relations avec Constance.
13c) Néanmoins, cette déploration ouverte des événements ne doit pas conduire à considérer qu’il s’agit de la lettre d’un couard qui souhaite se prémunir contre toutes représailles en réaffirmant sa soumission totale à son maître. Quoiqu’il se défende d’avoir voulu ce qui est arrivé, Julien a bel et bien pris acte de sa proclamation, et il entend peser sur la suite des événements.
14Derrière les déclarations auto-encomiastiques du début se font jour certaines critiques voilées, mais non moins compréhensibles, du destinataire. La toute première phrase, dans laquelle Julien proteste de sa fidélité et de sa constance de conduite et de sentiments, s’ouvre ainsi sur les mots ego quidem, qui acquièrent évidemment en contexte une tonalité polémique et suggèrent par contraste que Constance, lui, n’est pas fidèle ni – par un jeu de mots fortuit de la langue française – constant23.
15Dans la suite, l’auteur attribue deux causes à la révolte des soldats. Le second grief, le plus connu, a joué le rôle d’élément déclencheur : il s’agit de l’ordre de partir en Orient pour se battre contre les Perses, reçu par des soldats dont les habitudes de vie et les familles étaient ancrées en Gaule24. Cette injonction est exprimée dans une tournure passive : iussi, « ils ont reçu l’ordre ». Quoiqu’aucun complément d’agent ne précise l’origine de cet ordre, la mise en cause de la responsabilité de Constance est patente. Mais le premier grief est le plus intéressant : l’armée était exaspérée par le fait que celui qui avait été nommé leur général n’avait pas les moyens de les récompenser de leurs mérites25. Julien souligne à plusieurs reprises le caractère très restreint du pouvoir qui lui avait été conféré26 : il n’était même pas en mesure de distribuer un donatiuum à ses soldats ! Là encore, il s’agit d’une mise en cause directe de Constance, qui avait entouré son César d’une milice de gens chargés de le surveiller et de gérer les affaires à sa place. Cette déploration renferme selon nous un syllogisme non formulé qui résume à lui seul toute la démarche apologétique : Julien était de toute façon un fantoche en Gaule ; comment, dès lors, lui imputer la responsabilité des événements survenus, alors qu’il n’avait pas les moyens d’agir à sa guise ?
16Dans la dernière partie de la lettre, Julien prend progressivement de l’assurance, même s’il fait en sorte de tempérer celle-ci par de nouvelles protestations de respect. Le § 11 est ainsi constitué d’une suite d’adresses directes à Constance, qui parcourent successivement les différents degrés de la gamme de l’injonction : prière (quaeso atténue l’impératif accipito) ; conseil négatif (subjonctifs nec existimes… uel admittas) ; ordre à l’impératif (aduerte) ; enfin, ordre pressant exprimé à l’impératif futur (suscipito). Quoiqu’il s’en défende, Julien se sait désormais en position d’énoncer des « conditions »27. Dans les §§ 13-16, il expose même à Constance « ce qui doit être fait »28. Insensiblement, Julien se place donc sur un pied d’égalité avec Constance, au point de gommer la différence hiérarchique qu’il affirmait vouloir respecter au § 12. De fait, dans sa conclusion, il prône « la concorde entre des princes qui se font des concessions réciproques29 », le pluriel principum englobant sans plus de distinction l’émetteur et le destinataire.
Apologie et propagande
17La lecture critique de la lettre 17b fait apparaître que le récit de la proclamation ne répond pas à une visée purement informative – Constance devait d’ailleurs être déjà informé des faits30 –, mais participe d’un dessein plus vaste, qui est de nature éminemment rhétorique. La structure de la lettre est calquée sur celle d’une construction oratoire : exorde contenant une captatio benevolentiae (§§ 5-6) ; narration (§§ 7-10) ; argumentation aboutissant à une énumération de conseils et à l’élaboration d’un plan d’action pour l’avenir (§§ 11-16) ; péroraison (§ 17). Par cette missive, Julien cherche en effet moins à informer qu’à convaincre. Il entend évidemment convaincre Constance de son innocence, mais l’apologie se double d’une perspective délibérative, puisque l’émetteur prodigue des conseils en vue de « revenir à une situation meilleure » et de « découvrir par un quelconque expédient le moyen de vivre de manière prospère et heureuse31 ».
18Ainsi, le récit historique sert essentiellement à Julien de support pour la construction de son propre ἦθος, pour le dire en termes rhétoriques, de sa propre image, dirait-on dans le vocabulaire contemporain de la communication. Il entreprend de rejeter le masque de l’usurpateur, que d’aucuns seraient sans doute prompts à lui faire porter32, pour se présenter comme un prince probe, respectueux de l’empereur, soucieux du bien-être civil, et prêt à accepter les aléas du destin qui le conduisent à assumer dans la gestion de l’État une place plus importante que celle qu’il avait imaginée, mais tout cela sans animosité aucune à l’égard de Constance. L’histoire est donc bel et bien utilisée par Julien à des fins de propagande – sans connotation péjorative –, une propagande à l’attention de Constance, mais aussi et surtout des autres destinataires de la lettre, car pour saisir la dimension pragmatique exacte de cette missive, il importe de rappeler qu’elle devait être lue en public, contrairement à la seconde lettre, privée, dont il a été question plus haut.
19Une autre pièce du corpus de Julien, l’oratio 5, intitulée Au Sénat et au peuple des Athéniens33, apporte un éclairage intéressant sur la question : l’auteur y raconte à nouveau la proclamation de Paris, selon une démarche très proche de celle de la lettre 17b. Le premier point commun entre ces deux textes réside dans leur fonction de missive : rédigée quelques mois après la lettre 17b, probablement pendant l’été 361 si l’on en croit Zosime34, l’oratio 5 constitue l’unique exemplaire conservé d’une série de discours envoyés à cette date par Julien aux grandes cités de l’Empire afin d’exposer ses motivations, ses intentions et ses objectifs. Les parallèles entre l’oratio 5 et la lettre 17b sont si nombreux qu’il serait redondant d’en proposer une lecture aussi détaillée – ce seul fait présente néanmoins l’immense intérêt, notons-le, d’étayer la crédibilité du contenu de la lettre telle qu’elle est transmise par Ammien. Qu’il suffise donc de relever les échos les plus frappants.
20Il convient de remarquer en premier lieu que nous lisons exactement la même version du déroulement des événements, et quoique l’exposé de l’enchaînement des faits ayant conduit à la révolte y soit plus détaillé35, Julien insiste de même à plusieurs reprises sur le fait qu’il est resté à l’écart de tout complot et que tout s’est tramé à son insu36, qu’il a tenté en vain de refuser la proclamation37, et que son acceptation finale est un acte de résignation38. Les mêmes éléments de mise en scène sont utilisés : l’auteur suggère la soudaineté et la rapidité des événements39, il évoque le bruit et l’atmosphère tendue40, et se peint seul, craintif, sans résistance possible face à une foule déchaînée41.
21Cet effacement de sa responsabilité va de pair, derechef, avec une protestation récurrente de respect, de dévouement et de probité. Comme dans la lettre, le récit est précédé d’un bilan de l’action du César en Gaule et de son attitude envers Constance, dans une perspective clairement apologétique42. Pendant la révolte, Julien parvient à faire épargner les émissaires et amis de Constance que les soldats, furieux de leurs menées contre Julien, voulaient exécuter43. Il insiste sur le fait qu’il a même conservé depuis lors une attitude d’une déférence irréprochable, dont voici une marque :
Jamais encore jusqu’à ce jour, dans les lettres que je lui ai adressées, je ne me suis servi du titre que m’ont décerné les dieux, mais j’ai signé « César ».44
22En revanche, dans l’oratio 5, les critiques à l’égard de Constance se font plus explicites et beaucoup plus sérieuses. Julien évoque sans retenue le meurtre des membres de sa famille et la spoliation des biens paternels par Constance45. Plus qu’il ne le faisait dans la lettre 17b, il insiste sur la situation délicate et hypocrite dans laquelle l’a placé l’empereur, en faisant de lui un César sans pouvoir ni prérogative, constamment surveillé par ses sbires46. Il énumère encore avec une amertume ironique toutes les manœuvres de Constance consécutives à sa tentative d’apaisement dont témoigne la lettre 17b :
Lui, en réponse, déchaîna contre nous les barbares, me proclama chez eux son ennemi, les paya pour exterminer la nation des Gaulois.47
23Julien trace donc le portrait d’un homme sournois, belliqueux, criminel, qu’il taxe même de « cruauté »48.
24Cette modification dans le ton prouve qu’il y a bien, derrière l’exposé des événements, une stratégie de la persuasion, susceptible de recourir à des moyens différents en fonction des moments et des destinataires. Dans ces deux textes, Julien vise à asseoir sa légitimité, et pour ce faire, tantôt il ménage Constance quand il s’adresse à lui, tantôt il l’accuse ouvertement quand il cherche à rallier les cités à sa cause49. Mais il s’agit toujours d’une construction autobiographique : Julien veut se montrer comme un prince méritant et conciliant, injustement traité par Constance, et ainsi donner de lui une image favorable, susceptible d’emporter l’adhésion.
L’histoire déformée au profit de la stratégie de propagande ?
25Une fois mise en évidence la dimension rhétorique et politique de l’utilisation de l’histoire dans la lettre 17b, quelle crédibilité peut-on légitimement accorder au récit lui-même ? Julien relate-t-il honnêtement les faits, ou récrit-il l’épisode pour livrer à ses interlocuteurs – la cour impériale dans le cas de la lettre 17b, les citoyens athéniens dans celui de l’oratio 5 – une version qui l’arrange pour l’élaboration de sa figure éthique ? Cette interrogation se ramène principalement à la question suivante : Julien répète avec insistance qu’il a été proclamé Auguste à son corps défendant, mais ce thème du « malgré soi » n’est-il pas une pure construction rhétorique ?
26Sur ce point, les versions des historiens varient énormément, selon qu’ils sont plutôt admiratifs ou critiques à l’égard de Julien. Ammien Marcellin fait un exposé tout à fait conforme à la lettre qu’il reproduit ensuite : il montre un Julien qui transmet docilement aux soldats l’ordre de se rendre en Orient, une émeute qui prend le César de court et le pro clame subitement Auguste, en dépit de ses vives protestations et résistances50. Zosime, lui aussi, suit cette version51, et si l’un et l’autre ajoutent des détails qui ne figuraient pas chez Julien52, le fond du récit reste le même : ils souscrivent à la thèse d’une proclamation « malgré soi ».
27Le ton est tout autre dans les Histoire Ecclésiastique de Socrate et Sozomène53. Qu’on en juge par ce passage, en totale contradiction avec ce qui a été lu jusqu’ici :
[…] il est proclamé par eux Auguste. Sans avoir exprimé aucun refus à ce sujet comme il eût été convenable à l’égard de Constance…54
28Ainsi, les faits mêmes semblent susceptibles de varier en fonction de l’orientation partisane de l’historien : pour Sozomène, il n’y aurait eu ni protestation, ni hésitation de la part de Julien. Le thème du « malgré soi » est donc entièrement annihilé, et les faits dans leur ensemble sont présentés de manière totalement différente chez ces deux historiens chrétiens, qui n’ont pas de mots assez durs pour Julien. Sozomène consacre tout son livre V à son règne, dont il dresse un tableau chaotique. Quant à Socrate, il n’hésite pas à écrire que :
En agissant ainsi, [Julien] provoquait une guerre civile, en inventant des prétextes contre Constance.55
29C’est ici la thèse de la légitime défense qui est mise à mal, puisque les mots mêmes employés par Socrate font de Julien l’instigateur du conflit56.
30Que penser, dès lors, de la bonne foi de Julien ? Déforme-t-il volontairement la vérité dans sa lettre, afin de masquer une prise de pouvoir volontaire, et aurait-il ensuite élaboré une version officielle à son avantage, qui aurait été relayée par différents partisans, parmi lesquels, outre les historiens susmentionnés, le rhéteur Libanios, dans ses orationes 13 et 18 ? C’est en tout cas l’avis de G. W. Bowersock, qui refuse absolument la version des faits présentée par Julien, mais son argumentation, quelque ingénieuse qu’elle soit, n’est pas très convaincante57. Les autres savants modernes ont des avis plus modérés, mais néanmoins partagés, sur la question : L. Jerphagnon semble accorder crédit et valeur historique au témoignage de Julien, tandis que M. Alexandre est plus circonspecte sur le thème du « malgré soi58 ».
31Dans l’ensemble de sa correspondance, Julien n’a jamais varié sa version des événements de Paris, quelle que soit l’identité du destinataire. Écrivant au philosophe Maxime, il rejette explicitement l’idée d’un complot ou d’une usurpation volontaire, alors même que Constance vient de mourir et qu’il pourrait à la rigueur ne plus celer auprès d’un partisan une vérité autrefois gênante pour sa propagande :
Aussitôt que je devins empereur (malgré moi, comme le savent les dieux ; cela, je l’ai fait voir de la façon qui m’était permise)…59
32À vrai dire, il n’existe pas de preuve décisive pour dénier toute valeur historique au récit de Julien en raison de sa dimension autobiographique, car pour des événements de cette importance, la part de déformation susceptible d’être causée par l’enjeu autobiographique n’excède pas celle que peuvent causer des velléités partisanes. Peut-être faut-il donc accepter l’impossibilité de pouvoir jamais établir la vraie version des faits.
33En revanche, la correspondance fait apparaître que la sincérité des sentiments exprimés dans la lettre 17b à l’égard de Constance n’allait probablement pas au-delà des impératifs stratégiques liés à la situation : après la mort de celui-ci, Julien s’autorise des critiques de plus en plus vives et franches envers son prédécesseur, alors que, dans des lettres plus anciennes, il le disculpait à deux reprises de la responsabilité des débordements de son règne en les imputant à de mauvais conseillers60. Le ton change ensuite. Dans une lettre datée du printemps 362, il parle de ses relations avec Constance comme d’une « amitié de loup61 » ; quelques mois plus tard, il peint à l’attention des Bostréniens un tableau très critique du règne de son prédécesseur, marqué par des exils, des emprisonnements, des persécutions, des massacres62. Il évoque de même, dans la lettre aux Alexandrins d’octobre 362, un fait qu’il réprouve ouvertement : le bannissement de nombreux chrétiens63. Cependant, même dans ces circonstances, Julien, homme raffiné, réfléchi et maître de soi, ne néglige jamais de recourir à la titulature protocolaire μακαρίτης Κωνστάντιος, « le bienheureux Constance64 ».
34L’on peut admettre que Julien se soit efforcé, pendant une période de sa vie, de masquer ses véritables sentiments à l’égard du meurtrier de ses plus proches parents. Pour autant, si les sentiments d’amitié affichés dans la lettre 17b n’étaient probablement que de convention, à l’instar des compliments et éloges du discours En l’honneur de Constance65, il n’est pas de raison décisive de douter de la sincérité de ses intentions, par exemple quand il écrit à son oncle Julien peu après la mort de Constance :
M’en soient témoins le Soleil […] et avec lui Zeus-Roi : jamais je n’ai souhaité de tuer Constance ; j’ai plutôt souhaité le contraire.66
35Chez un être aussi pieux que Julien, la forme du serment divin ne peut se réduire à une pure convention d’écriture, et nous sommes convaincu qu’en marchant contre Constance à travers l’Europe, Julien voulait sincèrement se contenter de lui « faire peur67 ». Celui qui se pensait d’abord comme un philosophe ne cherchait pas la vengeance ni la violence, comme il en fit la preuve dans sa politique envers les chrétiens. Il semble par conséquent inapproprié de remettre en cause totalement le récit fait par Julien et de lui substituer la théorie d’un complot visant à une prise de pouvoir violente.
36L’étude fait apparaître que l’histoire est indéniablement utilisée par Julien à des fins de propagande, ce qui pose légitimement la question de la crédibilité du récit des événements. Nous avons cependant essayé de montrer que, même si Julien se met en scène de manière à mettre certains aspects en exergue (son caractère respectueux et bienveillant, sa proclamation « malgré soi »), il n’est pas de raison sérieuse de douter de sa version du déroulement des faits. De fait, la question de la sincérité de Julien est absolument indissociable de celle de sa vision religieuse, et même mystique du monde. À maintes reprises, Julien affirme ne voir dans ce qui lui arrive aucune récompense d’un mérite personnel, mais l’accomplissement d’un dessein divin : il n’est rien d’autre qu’un instrument de la providence, un maillon dans le processus naturel de rétablissement du paganisme, seul univers envisageable. Ainsi Julien se remet-il entièrement entre les mains des dieux à la fin de l’oratio 5 :
Puissent les dieux, maîtres de l’univers, nous accorder jusqu’au bout leur assistance, comme ils l’ont promis !68
37À ses yeux, tout ce qui arrive résulte d’une volonté divine, et en fin de compte, comme il ne cesse de le répéter, il est totalement étranger à la succession des événements de 360-361 : dans un extrait déjà lu, il affirme que le titre d’Auguste lui a été « décerné par les dieux69 » ; semblablement, ce sont les dieux qui ont rappelé Constance à eux, ainsi que l’écrit Julien aux Alexandrins en décembre 361 :
Mais puisqu’il lui est advenu, par la volonté des dieux, d’accomplir le voyage fatal d’ici vers l’au-delà…70
38Derrière de tels propos, il convient de voir, selon nous, non les déclarations ironiques ou hypocrites d’un intrigant, mais les pensées sincères d’un homme estimant que les dieux étaient à l’œuvre, à travers lui, pour rétablir un univers ordonné.
Notes de bas de page
1 Pour les lettres de Julien, nous suivons comme édition de référence L’empereur Julien. Œuvres complètes, I, 2 : Lettres et fragments, Bidez J. éd., Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1924 ; la lettre 17b occupe les p. 23-26. Quoique plus ancien, Imp. Caesaris Flavii Claudii Juliani Epistulae, Leges, Poematia, Fragmenta, Varia, Bidez J. et Cumont F. éd., Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1922, rend encore des services appréciables, notamment pour ce qui touche à l’origine des textes rassemblés.
2 Ph. Lejeune, 1980, p. 205.
3 Ammien Marcellin. Histoire, t. III : livres xx-xxii, Fontaine J., Frézouls E., Berger J.-D. éd., Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1996, p. 25. [Toutes les traductions sont nôtres.]
4 Cf. or. 1 et 3.
5 Cf. XX, VIII, 18, ed. cit., p. 28 : quarum seriem nec scrutari licuit, nec, si licuisset, proferre decebat in publicum.
6 La numérotation des sections au sein de la lettre reproduit celle des paragraphes du chapitre d’Ammien ; c’est pourquoi la lettre débute au § 5.
7 § 7, p. 24.
8 Ibid.
9 § 8, ibid. : Unde solito saeuius efferati, nocte in unum collecti, palatium obsidere, Augustum Iulianum uocibus magnis appellantes et crebris.
10 Cf. § 10, ibid. : uictus ; confosso me.
11 Cf. § 9, ibid. : cohorrui, fateor, et secessi.
12 Ibid. : quaeritabam – § 10, ibid. : conabar.
13 Cf. les deux occurrences du participe apposé ratus dans les § 9-10, p. 24.
14 Cf. § 8 : uocibus magnis […] et crebris. – § 9 : omnium ; tumultum. – § 10 : contiguis adsultibus ; uim armatam (p. 24).
15 § 9, ibid.
16 § 10, ibid.
17 Cf. ibid. : Exarsere mirum in modum, eo usque prouecti ut, quoniam precibus uincere pertinaciam conabar, instanter mortem contiguis adsultibus intentarent.
18 Ibid.
19 Cf. § 6, p. 23 : pugnarum horrendis fragoribus ; periculis meis ; in laboribus.
20 Cf. § 11, p. 24 : Gestorum hic textus est, quem mente quaeso accipito placida.
21 Cf. § 12, p. 24-25 : Ignosce enim † … † quae cum ratione poscuntur non tam fieri cupio, quam a te utilia probari et recta, auide tua praecepta deinde quoque suscepturus.
22 Cf. § 17, p. 25 : ne quid sublatius dicam <quam> cum imperio congruit.
23 Cf. § 5, p. 23.
24 Cf. § 8, p. 24.
25 Cf. § 7, ibid.
26 Cf. § 6, p. 23 : potestate delata contentus ; § 7, p. 24 : secundi loci rectorem ; nullas sibi uices a Caesare […] rependi posse.
27 § 11, p. 24 : condicionum.
28 § 13, p. 25 : quae necesse sit fieri.
29 § 17, p. 26 : concordia uicissim sibi cedentium principum.
30 Cf. Ammien, XX, VIII, 4, p. 25.
31 § 17, p. 26 : meliorem reuocauit in statum ; fortunate beateque uiuendi repperire quodam modo uiam.
32 Cf. § 11, p. 24 : Nec […] uel susurrantes perniciosa malignos admittas, ad conpendia sua excitare secessiones principum adsuetos.
33 Ἀθηναίων τῇ βουλῇ καὶ τῷ δήmῳ ; dans L’empereur Julien. Œuvres complètes, I, 1 : Discours de Julien César, Bidez J. éd., Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1932, p. 213-235.
34 Cf. III, 10, 3-4 ; dans Zosime. Histoire nouvelle, t. II (1) : livre iii, Paschoud F. éd., Paris, Les Belles Lettres, CUF, 1979, p. 23-24.
35 Cf. or. 5, 10-11, p. 229-233.
36 Cf. § 11, 284b, p. 231 : […] οὐδὲ ἐγγὺς ἀϕίκετό µού τις τοιαύτη ὑπόνοια ἄχϱι δείλης αὐτῆς, « Pas le moindre soupçon de cette sorte ne m’effleura avant que ce fût le soir. »
37 Cf. § 11, 284d, p. 232 : […] οὐκ εἶξα ἑτοίµως, ἀλλ’ἀντέσχον εἰς ὅσον ἠδυνάµην, καὶ οὔτε τὴν πϱόσϱησιν οὔτε τὸν στέϕανον πϱοσιέµην, « Loin de m’empresser de céder, je résistai autant que je le pus, et je n’acceptais ni le titre ni la couronne. »
38 Cf. ibid. : […] καὶ ἦλθον εἰς τὰ βασίλεια […], ὠς ἴσασιν οἱ θεοί, στένων τῆς καϱδίας, « Et je pénétrai dans le palais, comme le savent les dieux, en poussant de sincères gémissements. »
39 Cf. § 11, 284b, p. 231 : ὀψίας δὲ ἤδη πεϱὶ ἡλίου δυσmὰς ἐµηνύθη µοι, καὶ αὐτίκα -τὰ βασίλεια πεϱιείληπτο, « Mais c’est seulement le soir, au coucher du soleil, qu’on me prévint, et aussitôt le palais était encerclé. » – Le plus-que-parfait de l’indicatif, avec sa valeur d’accompli, joue dans la mise en scène narrative une fonction analogue à celle de l’infinitif de narration obsidere dans la lettre 17b.
40 Cf. § 11, 284b, p. 231 : καὶ ἐβόων πάντες, « et tous criaient » ; 284c : γενοµένης δὲ ἔτι µείζονος τῆς βοῆς καὶ θοϱυβουµένων πάντων ἐν τοῖς βασιλείοις, « alors que les cris augmentaient encore et qu’une agitation générale régnait dans le palais… »
41 Cf. notamment § 11, 284d, p. 232 : ᾿Επεὶ δὲ οὐδὲ εἷς τῶν πολλῶν ἠδυνάµην κϱατεῖν,… « Mais comme je n’étais absolument pas en mesure de dominer la foule à moi seul,… »
42 Cf. § 8-9, p. 225-229.
43 Cf. § 11, p. 231-233.
44 § 12, 285d, p. 233 : Οὔπω καὶ τήµεϱον <ἐν> ταῖς πϱὸς αὐτὸν ἐπιστολαῖς τῇ δοθείσῃ µοι παϱὰ τῶν θεῶν ἐπωνυµίᾳ κέχϱηµαι, Καίσαϱα δὲ ἐµαυτὸν ἔγϱαψα.
45 Cf. respectivement § 3, 270c-d, p. 215, et § 4, 273b, p. 218-219.
46 Cf. § 7, en particulier 277d, p. 223-224 : […] ἔστειλε […] οὐκ ἄϱχοντα µᾶλλον τῶν ἐκεῖσε στϱατοπέδων ἢ τοῖς ἐκεῖσε στϱατηγοῖς ὑπακούσοντα. Γεγϱάπτο γὰϱ αὐτοῖς καὶ ἐνετέταλτο διαϱϱήδην οὐ τοὺς πολεµίους µᾶλλον ἢ ἐµὲ παϱαϕυλάττειν, ὡς ἂν µὴ νεώτεϱόν τι πράξαιµι.
47 § 12, 286a, p. 233 : ὁ δὲ ἀντὶ τούτων ἐπέβαλεν ἡµῖν τοὺς βαϱβάϱους, ἐχθρὸν δὲ ἀνηγόϱευσέ µε παϱ’ἐκείνοις, καὶ µισθοὺς ἐτέλεσεν, ὅπως τὸ Γαλλιῶν ἔθνοςποϱθηθείη, γϱάϕων δὲ τοῖς ἐν ᾿Ιταλίᾳ παϱαϕυλάττειν τοὺς ἐκ τῶν Γαλλιῶν παϱεκελεύετο…
48 § 12, 286d : πικϱίαν, p. 234.
49 Sur le lien entre apologie et accusation dans l’oratio 5, cf. les remarques de M. Alexandre, 1993, p. 289-290.
50 Cf. XX, IV, 12-18, p. 11-13.
51 Cf. III, VIII, 4 - IX, 4, p. 20-22.
52 Ammien ajoute que, le soir de la proclamation, Julien avait offert un dîner aux officiers de ses troupes (XX, IV, 13). En plus du dîner, Zosime fait état d’un complot fomenté par les émissaires de Constance et visant purement et simplement à supprimer Julien ; les officiers auraient alors fait circuler des libelles (toujours à l’insu de Julien) parmi les soldats afin de les inciter à la révolte (III, IX, 1-2).
53 Cf. respectivement Socrate de Constantinople, Histoire ecclésiastique III, 1, 27-42, Sources Chrétiennes 493, Périchon P. et Maraval P. éd., Paris, Éditions du Cerf, 2005 et Sozomène, Histoire ecclésiastique V, Sources Chrétiennes 495, Festugière A.-J., Grillet B., Sabbah G. éd., Paris, Éditions du Cerf, 2005.
54 Sozomène, Histoire ecclésiastique V, 1, 1-2, p. 78-80 : […] ἀναγοϱεύεται πϱὸς αὐτῶν Σεβαστός. Μηδὲν δὲ πεϱὶ τούτου ὡς εἰκὸς πϱὸς Κωνστάντιον παϱαιτησάmενος…
55 III, 1, 40, p. 256 : Καὶ ταῦτα ποιῶν πόλεmον ἐmϕύλιον ἀνεϱϱίπιζεν, κατὰ Κωνστάντιον ποιούµενος τὰς ἀϕοϱµάς.
56 Sur les nombreuses déformations que Socrate a fait subir au récit de Libanios, sa source principale, et sur le parti-pris qui motiverait ces déformations, cf. D. F. Buck, 2003.
57 Cf. Bowersock, 2008, p. 70-78. Pour rejeter le récit de Julien, l’auteur s’appuie notamment sur le texte d’Eutrope, X, 15 (dont il donne une référence erronée, p. 71), arguant que le syntagme consensu militum indique que l’initiative de la proclamation n’est pas à porter au compte des soldats, qui se seraient contentés de se rallier (Neque multo post, cum Germaniciani exercitus a Galliarum praesidio tollerentur, consensu militum Iulianus factus Augustus est, interiectoque anno ad Illyricum obtinendum profectus Constantio Parthicis proeliis occupato ; dans Eutropii Breviarium ab Urbe condita, Santini C. éd., Stuttgart-Leipzig, B. G. Teubner, 1992). Il s’agit cependant d’une interprétation abusive : le substantif consensus ne véhicule qu’une seule valeur sémantique : l’unanimité des soldats ; il n’est susceptible de rien indiquer concernant l’initiative ou un ralliement après coup.
58 Cf. L. Jerphagnon, 1986 et 2002 ; M. Alexandre, 1993, p. 285-303.
59 Ep. 26, 414b, ed. cit., p. 52 : ῾Ως πϱῶτον αὐτοκϱάτωϱ ἐγενόmην (ἄκων, ὡς ἴσασιν οἱ θεοί · καὶ τοῦτο † αὐτοῖς εἰ † καταϕανὲς ὃν ἐνεδέχετο τϱόπον ἐποίησα)…
60 Cf. ep. 33, 389d-390a, p. 61 ; ep. 60, 379b, p. 70.
61 Ep. 40, p. 64 : λυκοϕιλία.
62 Cf. ep. 114, notamment 435d-436a, p. 193.
63 Cf. ep. 110, 398d, p. 187 ; et aussi, à propos du même type de fait, le début de l’ep. 46, p. 65-66.
64 Cf. ep. 40, 46, 59, 60, 79, 110.
65 Oratio 1.
66 Ep. 28, 382b, p. 55 : µάϱτυς δὲ ὁ ῞Ηλιος […] καὶ ὁ βασιλεὺς Ζεύς, ὡς οὐπώποτε ηὐξάµην ἀποκτεῖναι Κωνστάντιον, µᾶλλον δὲ ἀπηυξάµην.
67 Ibid. : ϕοβῆσαι.
68 § 13, 287d, p. 235 : Θεοὶ δὲ οἱ πάντων κύϱιοι συµµαχίαν ἡµῖν τὴν ἑαυτῶν, ὥσπερ ὑπέστησαν, εἰς τέλος δοῖεν.
69 Or. 5, 12, 285d, p. 233 : τῇ δοθείσῃ µοι παϱὰ τῶν θεῶν ἐπωνυµίᾳ.
70 Ep. 59, 443b, p. 67 : […] ἐπεὶ δὲ ἐκείνῳ συνέβη θεῶν ἐθελόντων ἐνθένδε ἐκεῖσε ποϱευθῆναι τὴν εἱμαϱμένην ποϱείαν…
Auteur
Université de Paris Ouest-Nanterre La Défense
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Les écritures de la douleur dans l’épistolaire de l’Antiquité à nos jours
Patrick Laurence et François Guillaumont (dir.)
2010