Chapitre 8. Activités, professions, métiers
p. 161-181
Texte intégral
1A partir des registres paroissiaux et d’état civil, il est possible d’appréhender les métiers. Les actes de sépultures mentionnent parfois la profession, de plus en plus souvent au cours du XVIIIe siècle. Il en est de même des registres de baptême (profession du père) et des registres de mariages (professions des conjoints, des parents, parfois des témoins). Des relevés systématiques sont donc envisageables.
2Toutefois, il faut prendre garde et se poser la question de la fiabilité de cette source documentaire. En effet, certains métiers ne sont pratiquement jamais mentionnés alors qu’on sait pertinemment, par d’autres documents, qu’ils existaient en bon nombre, dans le même lieu à la même période. Par exemple, dans de nombreuses villes, la domesticité représentait entre 5 et 10 % de la population. Il en était ainsi à Besançon aux XVIe et XVIIe siècles ; or, dans cette même ville, les registres paroissiaux n’indiquent aucune servante, aucun serviteur, aucune chambrière, sauf exception rarissime. C’est aussi le cas de Dijon, évoqué ci-dessous.
1. Les métiers à travers les registres de baptême
Les métiers à Dijon (Bourgogne, auj. Côte-d’Or) dans la première moitié du XVIIe siècle
3Le métier que nous indiquons est tiré d’un registre de baptêmes, vers 1625 ; il s’agit donc du métier du père de l’enfant, le plus souvent. La liste est fournie dans l’ordre chronologique des actes.
4Pour les abréviations, nous avons transcrit me ou me par maître et md ou md par marchand.
maître charpentier, prêtre chapelain
maîtresse de garde de l’hôpital Saint-Jacques
huissier en la chambre des causes du Roy
marchand (à Arc-en-Barrois), praticien
fermier du moulin Saint-Etienne, maître maréchal, vigneron
recteur des escholes, marchand tanneur
maître tailleur d’habitz, maître carreleur
jardinier, marchand tailleur
vigneron, vigneron, manœuvrier, vigneron
maître carreleur, maître estassonnier,
vigneron, vigneron, blanchisseur de toiles, cuisenier
cordier, maître carreleur, huissier, vigneron
maître tissier, praticien, vigneron, vigneron
carreleur, avocat au parlement, maître carreleur
vigneron, hoste [hôtelier] du logis du Bergier
huissier, blanchisseur
maître boulanger, blanchisseur de toiles
avocat au parlement, vigneron
maître boulanger, vigneron
maître blanchisseur, marchand.
5Source : Archives municipales de Dijon : registres de la paroisse Saint-Pierre de Dijon ; B 506 (registre factice composé de plusieurs registres cousus entre eux). Je remercie les Archives municipales de Dijon qui m’ont permis exceptionnellement de travailler sur les registres originaux.
2. Les métiers à travers les registres de mariage
Les métiers et les statuts sociaux, à La Ferté-Bernard (Sarthe) au milieu du XIXe siècle
6Les registres de mariages sont très riches en informations concernant les professions, métiers ou statuts sociaux, puisqu’ils les mentionnent souvent non seulement pour les deux conjoints mais aussi pour les parents et témoins, qui peuvent être très nombreux dans l’acte.
7s.p. = sans profession
Année 1843
Profession du mari | Profession de la femme |
boulanger | domestique |
tisserand | ouvrière |
ouvrier peignier | ouvrière au linge |
maréchal | domestique |
marchand tailleur | s.p. |
licencié en droit | s. p. |
serrurier | ouvrière en robes |
marchand libraire | s. p. |
garçon roulier | ouvrière en robes |
domestique | s. p. |
ouvrier tisserand | s. p. |
agent voyer de l’arrondissement | s.p. |
garçon boulanger | s.p. |
ouvrier chapelier | ouvrière en linge |
journalier | journalière |
journalier | journalière |
journalier | domestique |
marchand | s. p. |
tisserand | ouvrière en robes |
Année 1844
Profession du mari | Profession de la femme |
ouvrier menuisier | marchande de chapeaux |
ouvrier peignier | ouvrière en robes |
charpentier | domestique |
scieur de long | domestique |
ouvrier chapelier | domestique |
tailleur d’habits | couturière |
cafetier et marchand de bois | domestique |
marchand sabotier | domestique |
tailleur de pierre | lingère |
jardinier | domestique |
tailleur d’habits | domestique |
perruquier | s. p. |
tourneur en bois | domestique |
tisserand | ravaudeuse |
pâtissier | s. p. |
journalier | fileuse |
3. Les métiers à travers les registres de sépulture
Les métiers et les statuts sociaux, à Troyes (Champagne, auj. Aube), en 1656
8Il s’agit ici du métier ou du statut social du défunt, dans la paroisse Saints-Jean-et-Pantaleon de Troyes. Les âges ne sont pas indiqués, sauf exception.
9Maître cirier, fille, femme d’un jardinier, fille, femme, peintre, vieille fille, bourrelier, compagnon épinglier, manœuvre, vieille fille, domestique, vieux garçon tanneur, seigneur, femme d’un ouvrier en soie, maître torcheur, femme veuve, marchand chapelier, charretier, vigneron, femme d’un marchand tanneur, veuve d’un pâtissier [Nicolas Potier], fille, veuve, maître cordonnier, veuve, garçon de boutique, femme, femme d’un maître cordonnier, femme, vieille servante, maître teinturier, maistre patissier, maître teinturier, veuve, femme, femme, maître boulanger [noyé au moulin de Saint-Quentin], demoiselle, garçon aagé de quarante ans et plus, maître orfèvre, fille, vigneron.
10Source : Archives municipales de Troyes (fonds ancien conservé à la Médiathèque) : registre no 27 bis. Je remercie la direction de m’avoir permis de consulter le volume original.
La domesticité dans les établissements monastiques
11Ce jourd’hui vingt huitieme jour de janvier mil sept cent soixante et quinze le corps de Nicolas Drouhot d’Igny domestique de l’abbaÿe de Corneux décédé du jour précedent a été inhumé au cimetiere de l’abbaÿe de Corneux par moi soussigné prieur de laditte abbaÿe en presence de son frere Gaspard Drouhot et de Jean Claude Macheret son cousin tous deux d’Igny.
12Idem pour Jeanne Claude Boudot, servante commensale en 1780 de Nottey sur Saone, environ 60 ans.
13Idem pour Bernard Fretaud, du village de Solives paroisse Saint-Julien diocèse de Clermont en Auvergne, environ 19 ans, domestique.
14Source : Archives départementales de la Haute-Saône, H 824. Registre de vêtures, professions et sépultures de l’abbaye de Corneux (Ordre de Prémontré).
4. Les changements de métiers
Le changement de métier à Roubaix (Flandre wallonne, auj. Nord) aux XVIIIe et XIXe siècles
15Pierre Joseph Cheval est domicilié à Roubaix, rue Pellart. Il apparaît sous des professions différentes dans les registres paroissiaux, et dans d’autres sources contemporaines :
journalier en 1774
fabricant en 1794
lamier en 1805
journalier en 1807
tisserand en 1808
roselier en 1814
tisserand en 1815
lamier en 1815
et enfin fabricant, dans un document post mortem
16Source : Archives municipales de Roubaix, registres d’état civil ; relevés effectués par Pierre Deveugle.
5. Des activités économiques spécifiques
Les métiers dans trois paroisses de Bretagne au XVIIe siècle
17Le relevé des métiers mentionnés dans les actes paroissiaux peut mettre en évidence les caractéristiques économiques des localités. On le voit ici au Tréhou, village textile, qui compte environ 800 habitants, avec ses trèves (hameaux) vers 1667.
18On note aussi le grand nombre de laboureurs à Garlan, tandis que Plouguin et Le Tréhou sont peuplés de ménagers : voir ci-dessous le paragraphe sur les noms de métiers
6. Professions, qualification, état social
19La classification socioprofessionnelle, à partir des registres paroissiaux et d’état civil, est un exercice délicat. A toutes fins utiles, on peut signaler l’existence de propositions standardisées utiles pour l’ensemble de l’Europe et dont l’application permet des comparaisons à l’échelle continentale, par exemple la classification HISCO. Voir à ce sujet : Marco Van Leeuwen, Ineke Maas et Andrew Miles, HISCO, Historical International Standard Classification of Occupations, Louvain, Leuven University Press, 2002.
Les métiers dans la cité impériale de Besançon (Franche-Comté, Doubs) au début du XVIIe siècle
20Nous avons relevé les mentions de métiers, de professions (ou de qualification, d’état social) dans tous les actes, soit 480, en 1604-1608. Dans 21 % des cas (101 actes), la profession n’est pas indiquée. Les documents originaux sont en latin, la traduction pose parfois un petit problème, qui sera spécifié ci-dessous. Rappelons qu’une même personne pourrait apparaître plusieurs fois (on peut être père en 1606 puis en 1607). On obtient la répartition suivante, qui peut faire l’objet d’une classification socio-économique.
apothicaires : 4
bouchers : 2
boulangers : 11
charpentiers : 7
chirurgiens : 2
citoyens : 5 (les citoyens sont équivalents aux bourgeois, habitants privilégiés ; ce titre honorifique est obtenu par hérédité ou peut être accordé par les gouverneurs de la ville)
cochers ou conducteurs : 2
cordonniers : 18 (la profession de cordonnier est très répandue dans toutes les villes aux XVIe et XVIIe siècles)
corroyeur : 1
cultivateur : 1
docteurs en droit : 2
docteurs en médecine : 3
écorceurs : 2 (nous avons traduit delibratoris par écorceur ; il s’agit sans doute de leveurs d’écorces pour la fabrication du tan destiné aux tanneries de la ville)
gardiens des portes de la ville : 2
gouverneurs : 4 (co-gouverneurs : personnages élus, dirigeant la cité en un collège de 14 gouverneurs élus pour un an et présidant à tour de rôle chacun pendant une semaine)
honorables : 8 (on ne connaît pas la signification exacte de ce qualificatif)
libraire : 1
marchands : 14 (dont un marchand de légumes)
maréchaux : 4
meunier : 1 (il s’agit en fait d’un minotier, les moulins locaux étant d’énormes structures pré-industrielles)
nobles : 26
notaires : 11
orfèvre : 1
peintres : 3 (il s’agit probablement de peintres en bâtiment mais rien n’est certain, il peut s’agir d’artistes-peintres dans cette ville à cette période)
polisseur : 1
prêtre : 1 ; il s’agit du curé de Bucey ; (la mention d’un prêtre peut surprendre, puisque nous relevons la profession du père dans le registre des baptêmes, mais le cas n’est pas rare à cette période)
soldats : 43
tailleurs : 15 (il s’agit de tailleurs de vêtements puisque les tailleurs de pierres sont désignés spécifiquement, voir ci-dessous)
tailleurs de pierres : 11
tanneur : 1
tisserands : 7
vignerons : 165 (nous avons traduit viticola, ae par vigneron ; voir à ce sujet le paragraphe ci-dessous sur les noms de métiers en latin)
21On remarquera que la domesticité n’apparaît pratiquement jamais (cf. l’introduction de ce chapitre).
22Source : Archives municipales de Besançon : GG 1, paroisse Saint-Jean-Baptiste.
7. Métiers par tradition familiale et groupes socio-économiques
Familles d’artisans et de marchands à Mens (Dauphiné, auj. Isère) au XVIIe siècle
23Mens est un petit centre urbain, capitale du Trièves, pays de montagne situé au sud de Grenoble, peuplé de 1216 habitants en 1698, presque tous de religion réformée. P. Bolle a utilisé les registres paroissiaux pour peindre un tableau de la société marchande et artisanale de cette localité entre 1650 et 1685.
24Le nombre relativement important des hôteliers – nous en comptons sept durant cette période – s’explique par les marchés et les foires ; de plus Mens est une étape sur la route de Die à La Mure ou sur celle de Die à Bourg d’Oisans par le col d’Ornon. Ces aubergistes sont très mal vus dans cette petite Genève : c’est chez eux que l’on boit avec plus ou moins de modération le vin du Diois et de Provence ; car celui du Trièves est d’une qualité très médiocre. C’est chez eux que l’on fait du tapage nocturne, que l’on joue aux cartes de jour et de nuit – une véritable passion ! – que l’on se dispute avec « grands jurements ». Aussi ne font-ils jamais partie du Consistoire. Les artisans, au nombre de 255, constituent près des deux tiers des gens à métier connu (66 %) et le quart de la population totale.
25Certains travaillent le fer : ce sont les plus nombreux (cent-six). Le minerai extrait de la montagne du Thaud, au nord-ouest du Vercors, à proximité des forêts de sapin. Le métal revient à Mens et permet une importante fabrication de clous : nous trouvons en effet cinquante-et-un cloutiers ; mais aussi quarante-et-un maréchaux et treize serruriers.
26Le travail du cuir rassemble soixante-quatre artisans : corroyeurs, bottiers et surtout cordonniers (cinquante-neuf), utilisent soit les peaux des moutons et des agneaux de la haute vallée, soit celles des bovins des « montagnes » environnantes.
27Enfin le textile représente la troisième activité industrielle essentielle avec cinquante artisans où dominent les cardeurs, tisserands et tailleurs d’habits. La laine des moutons qui pâturent sur les jachères, les chaumes et les friches de la cuvette permet la fabrication des « demi-draps » de pure laine et des serges de chanvre et de laine. Le troupeau local est souvent insuffisant et les toisons du Dévoluy, du Bochaîne et d’une partie du Vercors arrivent jusqu’à Mens. Mais une activité beaucoup plus importante que la draperie occupe les cardeurs et tisserands : ils utilisent la production des chènevières locales et fabriquent des toiles de chanvre qui, depuis le XIVe siècle, ont fait la renommée du Trièves.
28L’activité de ces artisans présente un caractère familial très marqué : nous avons constaté l’existence de véritables dynasties de cloutiers, de serruriers ou de cardeurs : père, fils et petit-fils, oncle et cousins travaillent dans la même spécialité. Certains ne se contentent pas de l’aide familiale : ils engagent des ouvriers. (…)
29Les marchands ne forment qu’un petit groupe social de quarante-cinq individus, soit 11,8 % des professions dénombrées. (…)
30Les actes de baptêmes attestent des nombreuses relations amicales entre parents, parrain et marraine de niveau social différent. Les nobles acceptent de parrainer des enfants d’artisans et de paysans. Inversement des enfants nobles ont des parrains et marraines roturiers. Marchands et artisans ont naturellement entre eux de nombreux liens familiaux, ayant ensemble des intérêts économiques communs. Enfin des filles de marchands épousent des notables dont la fortune est souvent née du négoce.
31Source : Extraits de l’étude de P. Bolle, « Structure sociale d’une paroisse réformée en Dauphiné au XVIIe siècle : Mens-en-Trièves (1650-1685) », Actes du 85ème congrès national des sociétés savantes, Chambéry-Annecy, 1960, p. 419-432.
8. Les migrations professionnelles
32Les registres paroissiaux et d’état civil permettent de suivre les phénomènes migratoires, notamment les artisans qui se déplaçaient d’une province à l’autre. L’extrait mortuaire ci-dessous évoque un chaudronnier d’Auvergne mort lors d’un déplacement dans le sud de la Champagne. Saint-Mary-le-Plain et Fons sont à 30 km au nord de Saint-Flour, tandis que Charmoy se situe à 30 km à l’est de Langres. Il y a presque 500 km entre Saint-Flour et Langres.
33L’an mil sept cents soixante deux, le dix du mois de février, j’ai soussigné prêtre et vicaire de Charmoy, inhumé au cimetière de l’église dudit lieu le corps de Pierre Soulier, vivant chaudronier, âgé d’environ cinquante ans décédé d’hier après avoir reçu les sacrements de l’Eglise, qui s’est dit du village de Fons, diocèse de Saint-Flour dans la Haute-Auvergne, au convoy et enterrement duquel ont assisté Jean Massain laboureur, Nicolas Drouot laboureur, Clément Colon laboureur, Jean Muthus couvreur, tous de cette paroisse soussignés, de ce interpellés, et Antoine Derieux son associé qui a déclaré ne sçavoir signer. Signé à la minutte, Jean Massin, Droüot, Clément Colon, J. Muthus, Surjet prêtre vicaire de Charmoy.
34Je soussigné certifie a qui il appartiendra avoir reçu l’extrait cy dessus et l’avoir coppié mot à mot et que foy doit y être ajoutée, en foy de ce ai signé ce 21e septembre 1762, Pagès, curé de la paroisse de Saint-Mary-le-Plain.
35Source : Archives départementales du Puy-de-Dôme : C 3511. Transcrit et publié par Abel Poitrineau, Remues d’hommes. Les migrations montagnardes en France, XVIIe -XVIIIe siècles, Paris, Aubier, 1983, p. 304.
9. Du village paysan à la cité industrielle
Les métiers à Mouvaux (Nord) en 1793
36Le registre de l ‘ année 1793 comporte un recensement de population (incomplet) du village, situé près de Roubaix et Tourcoing. Pour chaque chef de famille, il indique la profession. On obtient la liste suivante :
1 barbier
2 bouchers
1 boulanger
2 cabaretiers
2 charpentiers
1 chirurgien
1 clerc
2 couvreurs
3 employés
1 fabricant
18 fermiers
4 fileuses
8 journaliers
1 maçon
4 marchands
4 marchands de veaux
1 marchand de toile
1 mercier
4 peigneurs (de laine)
2 rentiers
1 sergent
1 tailleur
71 tisserands
1 tisserand-peigneur
1 tonnelier
37et trois personnes pour lesquelles il n’y a pas de profession indiquée.
38Source : Archives municipales de Mouvaux, registre d’état civil de 1793 consulté à la mairie.
Les métiers à Tourcoing (Flandre, auj. Nord) au XVIIIe siècle
39Nous avons relevé les mentions de métiers à Tourcoing, ville spécialisée dans le peignage de la laine, dans les registres paroissiaux des années 1737-1742, 1775, 1780, 1785 et 1790.
accoucheuses : 2
berger : 1
bouchers : 12
boulangers : 14
boutiquière : 1
boutonniers : 2
brasseurs : 4
brouteurs (transporteurs à brouette) : 3
bûcherons : 12
cabaretières : 12
carioleur : 1
censiers (fermiers) : 85
chapeliers : 2
charbonnier : 1
charpentiers : 22
charron : 1
chartiers (charretiers) : 6
chaudronniers : 3
cordier : 1
cordonniers : 23
corroyeur : 1
couteliers : 2
couturières : 5
couvreurs : 2
domestiques : 8
épicières : 2
employés des Etats : 2
ermite : 1
fabricant : 1
fabricante : 1
fermiers : 9
fileurs : 21
fileuses : 761
gardien : 1
graissiers : 2
graissières : 2
horloger : 1
jardinier : 1
journaliers : 27
laboureurs : 103
laveuse : 1
licenciés en médecine : 4
lingères : 5
maçons : 6
manœuvres : 7
marchands : 159
maréchaux (ferrants) : 5
mendiants : 2
menuisiers : 2
messagers : 2
meuniers : 2
meunière : 1
négociant : 1
oilieur (fabricant d’huile) : 1
orfèvre : 1
ouvrier : 1
peigneurs (de laine) : 312 ; ce grand nombre de peigneurs confirme que la main-d’œuvre textile de cette ville se compose principalement de peigneurs. Il s’agit du peignage de la laine.
peignerons (fabricants de peignes à laine) : 2
perruquiers : 5
poissonnier : 1
prêtres : 4
receveur des fermes du roi : 1
rentières : 19
repasseuse : 1
retordeur : 1
sabotiers : 2
savetier : 1
scieurs : 4
sergent : 1
serrurier : 1
soldats : 3
tailleurs : 16
teinturiers : 3
tisserands : 16
tonnelier : 1
tordeur d’huile : 1
tourneurs : 9
travailleur aux serges : 1
trésorier de l’église : 1
valet de brasseur : 1
valets de maçon : 2
voiturières : 2
voyageur : 1
Il faut y ajouter :
enfants : 1526
statut non précisé : 246
40Source : Registres paroissiaux ; relevés effectués par Nathalie Boutrou, Sépultures et funérailles à Tourcoing au XVIIIe siècle (1737-1790), Mémoire de maîtrise sous la direction d’Alain Lottin et Paul Delsalle, Université de Lille III, 1992, tome 2, p. 276-280.
10. A propos des noms de métiers : quelques pièges
41Certes, le sens de nombreux termes est clair. Toutefois, il n’est pas inutile d’attirer l’attention sur un certain nombre de mots, qui désignent des métiers, où se cachent parfois des pièges. La définition peut varier d’un lieu à un autre, une époque à une autre. On saisit alors qu’il est très important de tenir compte du contexte local.
apothicaire : sorte de pharmacien ; l’apothicaire vend toutes sortes de produits, drogues ou denrées, y compris des épices ou des marchandises de Carême (harengs saurs, par exemple)
blanchisseur : le terme ne désigne pas toujours celui qui blanchit les toiles ; il peut correspondre à un plâtrier, comme nous l’avons constaté à Gray (Haute-Saône) au milieu du XVIe siècle
carlier : brasseur ; charron ; il semble bien que dans la plupart des cas un carlier corresponde à un charron ; terme fréquent dans les régions du Nord
charpentier : le charpentier ne se contente pas de confectionner des charpentes ; il peut participer aussi, selon les régions et les types de bâtiments, à l’édification de l’ensemble de l’armature de la maison
chirurgien : la distinction entre barbier et chirurgien s’opère à partir du XVIe siècle ; en règle général, le médecin se situe au-dessus du chirurgien dans la hiérarchie professionnelle et sociale jusqu’au XVIIIe siècle
cordonnier : certains cordonniers peuvent vendre autre chose que des souliers, pour compléter leur salaire ; c’est ainsi que Symon Bory, cordonnier à Dole (Jura), est autorisé à vendre des chandelles, de l’huile, des marrons et même des harengs, en 1599
fruitier : selon le contexte local, le terme désigne un producteur de fruits, un vendeur ou marchand de fruits, ou encore (comme dans le massif jurassien franco-suisse) un fromager (qui travaille pour une « fruitière » fromagère, sorte de coopérative
journalier : attention au terme de journalier, qui n’est pas forcément synonyme d’ouvrier agricole ; c’est ainsi que Dominique Gremion est journalier puis laboureur la même année, en 1792
magnan, magnier, magnin : dans la plupart des lieux, ces mots (nombreuses orthographes) signifient étameur, réparateur de chaudrons ; en Chalonnais et en Franche-Comté, il signifie châtreur de bétail ; en Picardie, ce terme désigne un meunier
ménager : dans la plupart des lieux, ménager signifie petit paysan, tout petit propriétaire dépendant d’un autre paysan assez souvent ; en Normandie, c’est un petit fermier ; voir ci-dessus le tableau sur les métiers dans trois paroisses de Bretagne
paysan : le terme est peu utilisé avant le XVIIIe siècle ; dans le Jura, à Nozeroy, il est mentionné pour la première fois en 1697, pour désigner Jean-Nicolas Nicod, alors que les registres existent depuis 1533
praticien : selon le contexte, soit un juriste (du simple greffier à l’avocat ou au procureur), soit un médecin (rarement), soit un vétérinaire (encore plus rare) ; parfois écrivain public ; la plupart du temps le praticien est un homme de loi chargé de conseiller les plaideurs
recouvreur : couvreur
relieur : selon le contexte, soit un relieur de livres (en ville), soit un réparateur de tonneaux (dans les pays de vignoble)
tailleur : en général, il s’agit d’un tailleur de vêtement, surtout si la paroisse est urbaine ; sinon il peut s’agir d’un tailleur de pierre ; observons, une fois de plus, que le latin lève toute ambiguïté à ce sujet
taicier, tessier, texier, tisserand, tisseur, tissier, tixier : il y a parfois, dans un même lieu à un même moment, des tisseurs et des tisserands, ou des tissiers et des tisseurs ; il est difficile de dire si ces mots sont synonymes ; il faut une étude précise des registres paroissiaux de la région étudiée pour tirer des conclusions qui ne soient pas fragiles
vigneron : beaucoup de vignerons ont une autre activité durant les saisons creuses ; ils sont alors employés à la journée, travaillent dans la construction, le bâtiment, les carrières, etc.
11. Des noms de métiers peu connus
42Dans les registres paroissiaux et d’état civil, le chercheur est confronté à une multitude de noms de métiers. Certains sont peu connus, n’existant que dans telle ou telle région. Nous en donnons ici quelques exemples.
admodiateur : amodiateur, locataire (ce n’est donc pas une profession)
affaneur : journalier, manœuvre (principalement dans la région de Lyon)
badestamier : ouvrier qui fabrique des bas de laine d’estame (laine peignée)
bailli : administrateur des biens d’un seigneur ; officier à la tête d’un bailliage
banselier, bansteleur, banstelier : fabricant de paniers
barralier : tavernier et ayguadier c’est-à-dire porteur et marchand d’eau ; typique de la région d’Arles
bochier : bûcheron
bocquillon : bûcheron
chasse-marée : voiturier qui apporte la marée, poissonnier ambulant
coutre : employé de la paroisse chargé de régler les cérémonies
crassier : fabricant d’huile, suif, chandelles
drousseur : ouvrier textile, cardeur de laine
escandalier : épicier qui vend de l’huile et du vin à la petite mesure (dans les provinces du Midi)
escarpier : cordonnier
escrignier : menuisier fabricant des coffres
faivre : forgeron
feuillardier : homme des bois, préparant les feuillards (cercles des tonneaux, perches, etc.)
febvre : forgeron
granger, grangier : paysan qui cultive une « grange », une exploitation agricole ; ouvrier de ferme (de la Bourgogne au Dauphiné) ; maître-valet (en Provence, dans le Var)
hottelin : fabricant de hottes en osier
hotteur : vendangeur
hottier : porteur de harengs (à Dieppe)
houardeux : berger (en Champagne)
houpier ou houppier : préparateur et vendeur de toisons
laboureuse : le terme est rare
labourier : laboureur
lamier : ouvrier qui prépare des lames d’or ou d’argent pour les étoffes
mandelier ou mannelier : fabricant de paniers
marguillier : administrateur des biens temporels de la paroisse (ce n’est donc pas une profession, simplement une responsabilité)
navieur : batelier
paulmier : tenancier d’un jeu de paume
roselier : fabricant de peignes (pour peigner la laine)
saiteur, sayetteur, sayteur : en Picardie, en Flandre, ouvrier qui travaille la sayette, c’est-à-dire le fil de laine peignée et filée au petit rouet
sonneulx de vez : joueur de cornemuse ; exemple : Jehan Bidault est « sonneulx de vez » en 1545 à Saint-Aubin-du-Pavoil (auj. Maine-et-Loire)
terminaire : prédicateur ou quêteur d’un ordre religieux mendiant
12. Les noms de métiers (ou de statuts social) en latin
43Les noms en latin de métiers, de professions, de statut social, d’état, de titres, se retrouvent fréquemment dans les registres paroissiaux. Nous avons mis en gras les termes qui posent un problème de traduction et d’interprétation.
acicularius : aiguilleur, fabricant d’aiguilles
advena : étranger
advocatus fiscalis : avocat fiscal
agricola : cultivateur, paysan, agriculteur
apparitor : intendant, administrateur d’un domaine
artifex : artisan
aurifaber : orfèvre
auriga : cocher, conducteur
bibliopola : libraire
caementarius : tailleur de pierres
calcari faber : faiseur de calcaire (pierres)
canonicus : chanoine
cappellanus : chapelain
capitanus : capitaine
captivus : prisonnier
caupo : aubergiste
cellarius (on trouve aussi écrit cenarius) : sommelier, chargé du cellier et l’approvisionnement de la table
chirurgus : chirurgien
civis : citoyen
clavis sartor : fabricant (ou réparateur) de fermetures, de serrures, de clefs
clerus : clerc
cogobernator : co-gouverneur
coriarius : tanneur, corroyeur
crispator crinium : perruquier
culterarius : coutelier
custos : gardien portier
delibrator : écorceur
doctor medicina : docteur en médecine
dolabrarius : faiseur de haches
doliarus : tonnelier
dominus, i : seigneur
ensifactor : faiseur d’épées
eques, equitis : chevalier
faber ferrarius, fabri ferrarri : forgeron
faber lignarius, fabri lignarii : charpentier
famula : servante
forestarius : forestier
hortulanus : jardinier
hospes, hospitis : hôtelier, aubergiste
judex : juge
jur. doct. ; mis pour : juris doctor : docteur en droit
J.V.D. = Juris utrius[que] doctor[is] :
honorabilis : honorable
laborator : journalier, laboureur
laniger : travailleur de la laine
lanius : boucher
lapicida : tailleur de pierres
lapidarius : tailleur de pierres
laterarius : briquetier
latomus : carrier, travailleur dans une carrière de pierres ; peut aussi signifier maçon
legumentarius : marchand de légumes
librarius : libraire
lignarius : menuisier ou charpentier
ludimagister : maître d’école
ludimoderator : maître d’école
magister : maître
magister saltationum : maître de danse
marechalis : maréchal ferrand
medicus : médecin
medicinae doctor : docteur en médecine
mercator : marchand
mercator farinae : marchand de farine (= marchand de grains ?)
mercenarius : commerçant mais aussi journalier, voire mercenaire
miles : soldat, mercenaire
molitor : meunier
monachus : moine
murarius : maçon ?
negociator : négociant
nobilis : noble
notarii : notaire, tabellion
nuntius : messager
obstetrix : sage-femme
operarius : ouvrier
opifex : artisan
pannarius : toilier
pellipecarii : tanneur, peaussier, préparateur de peaux
pharmacopolae : apothicaire, pharmacien
pictor : peintre (selon le contexte, peintre en bâtiment ou artiste-peintre)
pileolum artifex : fabricant de bonnets de feutre
piscator : poissonnier ou pêcheur
pistor : boulanger, panetier
plaustrarius : charron ou charretier, voiturier
politor : polisseur
presbiter : prêtre
procurator : procureur
sapientis : sage
sartor : tailleur, racommodeur
satelles : garde, garde du corps
scolasticus : écolâtre, maître d’école
scriba : scribe, greffier
scriniarius : bibliothécaire, archiviste
scutifer : écuyer
secretarius : greffier, scribe, secrétaire
sericarius : marchand de soierie
stamni fictilis : potier de terre
sutor : cordonnier
tabernae praepositus : tavernier, serveur d’auberge
tector mis au lieu de textor : tisserand
tegularius : tuilier
textor : tisserand
textor tibilarium : fabricant de chausses
tibicen : joueur de flûte
tonsor pannorum : tondeur de draps
tornator : potier
vietor : vannier
villicus : fermier
vinitor : vigneron, viticulteur, parfois vendangeur ; dans les registres paroissiaux de Besançon, ville où la moitié de la population s’occupait de viticulture, ce terme est rarement employé, à la différence de viticola, ae ; on serait donc tenté de le traduire par vendangeur mais ce n’est pas un métier, juste une occupation saisonnière ; alors pourquoi le curé utilise-t-il ce terme ?
viticola : vigneron ; cf. vinitor, vinitoris
vitriarius : vitrier, faiseur de verre
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