Parzival/Parsifal : l’Allemagne, Wagner et la réception des héros médiévaux
p. 251-268
Texte intégral
1L’Allemagne est souvent considérée comme étant une terre de prédilection pour la réception de la mémoire des héros médiévaux. J’étudierai le parcours « mémoriel » d’un héros médiéval appartenant à la mouvance arthurienne en Allemagne depuis le Moyen Âge jusqu’à Richard Wagner : Parzival.
Parzival/Parsifal
2Parsifal est la dernière œuvre de Wagner. Cependant cette œuvre a accompagné le compositeur Wagner pendant toute sa vie, de 1845, quand il lit pour la première fois le Parzival de Wolfram von Eschenbach, jusqu’en 1882, c’est-à-dire sa création, lors du deuxième festival de Bayreuth, seul lieu où il voulait le voir représenté. C’est un drame musical, au même titre que Tristan et Isolde ou les œuvres composant l’Anneau du Nibelung, cependant un drame musical d’un type particulier, dans la mesure où, à l’inverse de Tristan et du Ring, les chœurs y jouent un rôle important.
3La source principale de Wagner est le Parzival de Wolfram von Eschenbach1 dans l’édition de Karl Lachmann et les traductions-adaptations de San Marte et de Karl Simrock ; la source secondaire est le Lohengrin avec l’introduction de Joseph Görres.
4Jusqu’en 1857, Wagner a encore une opinion positive du roman de Wolfram, une position qui va bientôt s’inverser : en effet, dans une lettre des 29 et 30 mai 1859, il écrit à Mathilde Wesendonck, qui lui avait envoyé le Parzival dans l’édition de San Marte, que Wolfram n’a rien compris à la légende, au contenu proprement dit de l’histoire. Désormais, écrit-il, sa conception du Graal est la suivante : il s’agit de la coupe de la Cène dans laquelle Joseph d’Arimathie a recueilli le sang du Christ sur la Croix, c’est le Vaisseau du Saint-Sang. Sans le dire, Wagner adopte donc la conception que Robert de Boron a du Graal (fin XIIe siècle), et après lui un certain nombre d’œuvres françaises : par exemple la première Continuation du roman inachevé de Chrétien de Troyes (avant 1190), c’est-à-dire la « Continuation Gauvain » (début du XIIIe siècle), la Queste del Saint-Graal (aux environs de 1220) et le Perlesvaus (1re moitié du XIIIe siècle), mais aussi des œuvres allemandes, tel le Nouveau Titurel d’Albrecht (2e moitié du XIIIe siècle). On sait que chez Chrétien de Troyes le Graal est un plat creux serti de pierres précieuses, dans lequel on apporte l’hostie qui, depuis quinze ans, maintient en vie un châtelain malade et que chez Wolfram von Eschenbach, c’est une pierre de forme indéterminée. Il faut souligner que ni chez Chrétien ni chez Wolfram le Graal n’est un objet sacré. C’est Robert de Boron qui, le premier a sacralisé, christianisé le Graal. Cette information, c’est très certainement l’introduction de Görres à son édition de Lohengrin qui l’a fournie à Wagner ; en effet, Görres cite dans cet ouvrage le nom de Robert de Boron2, donne cette interprétation christianisée du Graal3 ; il raconte aussi que Joseph d’Arimathie a rapporté le Graal de Palestine4. Wagner a pu lire cette explication également dans l’introduction de San Marte à l’ouvrage Lieder, Wilhelm von Orange und Titurel von Wolfram von Eschenbach und der jüngere Titurel von Albrecht in Übersetzung und im Auszuge nebst Abhandlungen über das Leben und Wirken Wolfram’s von Eschenbach und die Sage vom heiligen Gral, Magdeburg 1841 (ouvrage qu’il possédait dans sa bibliothèque de Dresde), p. 408 sqq ; il aura de même emprunté à cet ouvrage l’étymologie (fantaisiste) de « Gral » = « Sang Réal », « San (ct) Gral », qui nourrit les pieux chevaliers. Tous ces ouvrages, il les possédait dans la bibliothèque qu’il a constituée à Bayreuth : aussi pouvait-il les consulter facilement. Le 16 septembre 1872, il est fasciné par la préface de Görres sur Lohengrin qu’il relit. Il lit aussi les écrits de San Marte sur Parsifal : il s’agit, sans doute, étant donné les confusions dans la graphie, du Parzival de Wolfram. Quand il s’intéresse de nouveau au sujet, Wagner a apparemment réhabilité Wolfram dans son esprit !
Les autres sources de Wagner
5Cependant, le Moyen Âge et le Parzival de Wolfram (auquel il faut ajouter, comme on le verra, le Roman d’Alexandre) ne sont pas les seules sources de Wagner : en effet, il faut y ajouter aussi l’Introduction à l’histoire du Buddhisme5 indien d’Eugène Burnouf, ouvrage qui a fondé la véritable histoire du Bouddhisme et que Wagner, dont on connaît la passion pour l’orientalisme et la philosophie hindoue6, dit avoir lu en 18567. Cependant, comme il ressort de deux lettres (une lettre d’avril à August Röckel, une autre du 7 juin à Liszt) que le compositeur a écrites à Londres au printemps 1855 (il est arrivé à Londres le 3 mars 1855 pour une série de six concerts dont le sixième concert est prévu pour le 28 mai), il est certain qu’il a eu connaissance de l’ouvrage de Burnouf dès ce moment. Il avait emporté à Londres les Légendes indiennes de Holtzmann, en 2 volumes, parues à Stuttgart en 1854, et c’est Malwida von Meysenbug qui lui recommande la lecture de l’ouvrage capital de Burnouf.
6Wagner est depuis longtemps passionné par les mythologies orientales et la philosophie hindoue, et la lecture de ce texte va jouer un rôle déterminant dans sa création. Le livre, paru à Paris, à l’Imprimerie royale, en 1844, est l’œuvre d’Eugène Burnouf (1801-1852), orientaliste français, ami du sanskritiste qu’est August-Wilhelm Schlegel. E. Burnouf a aussi publié en 1826 un Essai sur le pâli, langue sacrée de Sri Lanka (anciennement Ceylan) et du bouddhisme méridional, dans laquelle ont été transcrites les prédications de Buddha à partir du premier siècle de notre ère ; il déchiffre et restitue à l’aide du sanskrit la langue zend, dont il découvre les affinités avec les langues germaniques. L’Introduction à l’histoire du Buddhisme indien est fondée sur des documents sanskrits découverts peu de temps auparavant au Népal. Burnouf nous fait savoir « comment (le Bouddhisme) s’est propagé au sein du Brahmanisme, en essayant de le réformer, quels sont ses dogmes essentiels, les phases principales par lesquelles il a passé à ses débuts » et nous fait connaître « le Bouddhisme indien jusqu’au moment où il entre dans l’histoire »8. Cet ouvrage inspire à Richard Wagner, comme il le dit dans Ma Vie, un sujet nouveau de drame qu’il appelle Les Vainqueurs. Wagner esquisse ce drame vers 1856. Il reprend la légende telle que la raconte Burnouf : Prakriti, jeune fille Tchandala, s’est, dans une vie antérieure, « par orgueil et fierté »9, moquée de la douleur d’un amant éconduit. Elle veut séduire Ananda, le disciple favori de Bouddha. Celui-ci délivre Ananda et sauve Prakriti en l’intégrant à la communauté des fidèles tandis qu’« il gagne le lieu de sa rédemption ». La lecture du livre d’Eugène Burnouf a sans doute été également déterminante pour la création de sa dernière œuvre, Parsifal, que Wagner substitue au drame bouddhique qu’il voulait écrire, mais aussi pour Tristan et certaines versions du Crépuscule des dieux. Wagner avait abandonné ce drame pour lui substituer Parsifal. Mais, en 1878, il avait encore « l’illusion qu’après Parsifal, Les Vainqueurs sera encore possible. Vendredi 11 juin 1878 : “Vers midi il me dit qu’il se sent tellement bien qu’aussitôt après Parsifal il composera Les Vainqueurs, pour que ce bien-être ne s’arrête pas.” »10.
7En 1868, Wagner offre à Louis II de Bavière l’Introduction à l’histoire du Buddhisme indien11. Dans la bibliothèque qu’il a constituée à Bayreuth, on retrouve cet ouvrage, que lui a offert Blandine, fille de Cosima et de Hans von Bülow, à l’occasion de son soixantième anniversaire le 22 mai 187312. On verra là, à l’évidence, la preuve de l’intérêt du compositeur pour ce livre, qu’il avait en permanence à sa disposition pour le consulter lors de la conception du Parsifal. Richard Wagner possédait dans cette bibliothèque de Bayreuth également deux autres livres de l’auteur français : Le Lotus de la bonne Loi et Le Chant du bienheureux. En décembre 1858, il écrit à Mathilde Wesendonk qu’il est devenu bouddhiste sans l’avoir voulu13. Dans la bibliothèque de Bayreuth figurent plusieurs manuels sur le bouddhisme. Il possédait également de nombreux textes fondamentaux indiens, en particulier la traduction française du Mahâbhârata et le Rig-Veda. Wagner dispose donc d’un fonds important sur les religions indiennes et surtout le bouddhisme au moment où il travaille sur Parsifal. En fait, le Parsifal est, dans une certaine mesure, un « patchwork » de motifs médiévaux et de motifs bouddhiques14, empruntés à Burnouf et que Wagner a amalgamés à d’autres éléments d’origine indienne, mais pris ailleurs15.
Le Parsifal de Wagner et ses sources
8Richard Wagner emprunte à l’œuvre de Wolfram von Eschenbach un certain nombre d’éléments dont le plus important est l’opposition entre le monde du Graal, avec sa communauté de chevaliers voués à l’ascétisme et à la chasteté (1er et 3e actes), et le monde de Klingsor (2e acte), en apportant à cet épisode des modifications essentielles : par exemple, le personnage principal de l’épisode est chez Wolfram Gawein et chez Wagner Parsifal. Chez Wagner comme chez Wolfram, celui qui voit le Graal ne peut mourir et, comme chez Wolfram (§ 787), Amfortas demande au 3e acte qu’on le dispense de faire le service du Graal, car il aspire à la mort. C’est à ce moment qu’apparaît Parzival/ Parsifal : mais au lieu de poser la question qu’on attendait de lui (et qu’il n’avait pas posée lors de sa première visite au Graal, comme chez Wolfram), le Parsifal de Wagner touche la blessure d’Amfortas de la lance recouvrée. Comme chez Wolfram et les Continuateurs de Chrétien de Troyes, le Graal dispense chez Wagner de la nourriture, cependant il ne s’agit pas de plats variés comme dans le poème médiéval, mais simplement du pain et du vin.
9En effet, dans la scène que certains commentateurs assimilent à la scène de la Cène de la religion chrétienne, les chevaliers mangent du pain et boivent du vin. Wagner lui-même insiste avec force sur la différence essentielle existant entre la cérémonie du Graal et la Cène du Christ : il parle le 27 septembre 187716 « de cette particularité du mystère du Graal que le sang se change en vin, ce qui nous permet de nous tourner fortifiés vers la terre, alors que le changement du vin en sang nous enlève à la terre. », et Martin Gregor-Dellin ajoute que « contrairement à Cosima ou à Wolzogen, Wagner n’attachait aucune valeur à des comparaisons chrétiennes ou même religieuses. » Le 20 octobre 1878, il estime que Wolzogen est allé trop loin dans son article « Bühnenweihfestspiel » en « appelant Parsifal une image du Christ : “Je n’ai pas du tout pensé au Seigneur” »17. Pour ce qui est du christianisme de Wagner, sa « christianité », mot par lequel il entendait l’esprit de l’Occident18, il faut prendre ses propres affirmations en considération ; on peut alors dire simplement que, comme il a utilisé dans la Tétralogie la mythologie germanique et des sources scandinaves en leur donnant un tout autre contenu, il a, comme il le suggère dans son traité théorique Religion und Kunst, utilisé dans Parsifal des éléments issus du christianisme en les mêlant à d’autres éléments, essentiellement bouddhiques, et en leur donnant une interprétation personnelle.
Les personnages
10Wagner réduit le nombre des personnages qui étaient présents chez Wolfram : il reprend au poète médiéval les principaux et, dans sa simplification de l’action, il en supprime un grand nombre. Mais il remodèle la plupart de ceux qu’il conserve en s’inspirant notamment du livre de Burnouf sur le bouddhisme. Arrêtons-nous aux personnages principaux.
11Amfortas, le roi du Graal, est l’Anfortas de Wolfram (sans doute dérivé du latin « infirmitas », en ancien français « enfermeté », « enferté »), le frère de Herzeloyde, c’est le roi Pêcheur de Chrétien ; Wagner suit Wolfram qui, dans les fragments de son œuvre inachevée, Titurel, a donné le nom de Titurel (sans nom dans le poème français) au grand-père du roi du Graal, mais, comme chez Chrétien, où le roi Pêcheur est « le fils de ce roi qui se fait servir par le graal »19, Wagner fait de Titurel le père d’Amfortas, ce qui lui permet de lui faire lancer, alors qu’au 3e acte, il est au comble de la souffrance, cette apostrophe christique : « Mein Vater », « Mon père ». Lui aussi, comme l’Anfortas de Wolfram, a été puni dans sa chair pour avoir succombé aux charmes d’une femme, et sa blessure ne peut être guérie que miraculeusement.
12Parsifal : Ce n’est qu’en 1877 que le héros éponyme se nomme Parsifal (auparavant il s’appelait Parzival comme chez Wolfram). Wagner emprunte à Görres l’étymologie « Fal Parsi » = « der reine Tor » (le fol au cœur pur). Tout au plus a-t-il prélevé chez Wolfram les traits du « nice », du fol, élevé par sa mère dans la forêt et ne sachant rien du monde, même pas son nom. Pour le reste, il l’a remodelé complètement, en lui prêtant essentiellement des traits de Bouddha. Tout d’abord fol ignorant de tout, il s’éveille peu à peu en passant « par les chemins d’errance et de douleur »20 (« Der Irrnis und der Leiden Pfade ») (Acte III), avant d’atteindre le stade d’« éveillé » (buddha). Klingsor (= Mâra) le met à l’épreuve par l’intermédiaire de Kundry, qui, en l’embrassant, lui inspire du « désir » et, devant son refus, le menace d’une errance éternelle. Il était indispensable qu’il fût mis à l’épreuve, pour réaliser sa mission, « meine Sendung », comme il le dit à l’acte II, après avoir résisté à Kundry. Là aussi on sent affleurer le bouddhisme : en effet, on lit dans une des Sûtras : p. 76 « Bhagavat (autre nom de Bouddha) fit cette réflexion : Que le religieux Ananda (le disciple favori de Çâkyamuni) soit éclairé par Mâra, le pêcheur […] Il faut que ce soit Mâra qui l’éclaire ». (Burnouf, p. 76-77) ; « et c’est quand il a traversé toutes les épreuves, accompli les devoirs les plus élevés, pénétré par la science les vérités les plus sublimes, qu’il devient Buddha. Alors il est capable de délivrer les hommes des conditions de la transmigration, en leur enseignant la charité, et en leur montrant que celui qui pratique pendant cette vie les devoirs de la morale et s’efforce d’arriver à la science, peut un jour parvenir à l’état suprême de Buddha » (Burnouf p. 110). En effet, ce n’est pas d’eux-mêmes que Bouddha et Parsifal parviennent à la connaissance, à l’illumination, à l’éveil (la bodhi) ; ils la conquièrent de haute lutte contre le seigneur des plaisirs du monde, que ce soient Mâra et ses acolytes ou Klingsor et ses alliés.
13Mais « la perfection à laquelle aspire l’ascète buddhiste ne doit pas l’élever seul, et c’est pour en faire partager le bienfait aux autres hommes, qu’il la recherche au milieu des plus difficiles épreuves » (Burnouf, p. 159). Parsifal renonce au désir qu’il sait être terrible et coupable (Acte II « das furchtbare Sehnen, das alle Sinne mir fasst und zwingt ! Oh ! – Qual der Liebe ! », « ce terrible désir qui saisit et contraint tous mes sens. Oh ! tourment de l’amour ! », V. 788-790) ; tout comme pour Tristan ou encore Walther von Stolzing, l’amour est un tourment ; mais dans Parsifal, s’ajoute une connotation en rapport avec le péché : la sexualité est « un désir coupable » (« in sündigem Verlangen », V. 792) : celui qui s’adonne à la sexualité est coupable. Au reste, presque tous les personnages de Parsifal, que ce soient les chevaliers du Graal qui « in grausen Nöten den Leib sich quälen und ertöten » (« se tourmentent et se mortifient le corps dans d’atroces souffrances », V. 878-9), ou encore Klingsor qui déplore « schrecklichster Triebe Höllendrang » (« infernale poussée des plus terribles instincts », V. 520) souffrent de la sexualité, à l’exception de Gurnemanz et de Titurel, en raison sans doute de leur grand âge. Pour le bouddhisme, en effet, le désir est l’origine de la douleur dans la mesure où il est cause de la renaissance, c’est l’une des trois racines du mal. En renonçant au désir, à la sexualité, Parsifal parvient, grâce aux épreuves traversées, à l’état de Bouddha. Il révèle à Kundry la vérité et lui fait partager la perfection à laquelle il est parvenu : il la fait monter jusqu’à lui, lui permet de mourir définitivement et la fait entrer dans le Nirvâna (?), qui n’est pas un concept clair. « Pour les théistes, écrit E. Burnouf (p. 18), (c’est) l’absorption de la vie individuelle en Dieu, et pour les athées, l’absorption de cette vie individuelle dans le néant. Mais pour les uns et pour les autres, le Nirvâna est la délivrance, c’est l’affranchissement suprême » ; pour les interprètes tibétains, en tout cas, c’est « l’affranchissement » et en particulier, comme le dit un contemporain de Burnouf, M. Schmidt21, « l’affranchissement de la loi de transmigration » (p. 19). Chez Wagner, il en est bien ainsi, Parsifal affranchit Kundry de ce que Burnouf appelle « la loi fatale de la transmigration » (p. 210) et lui permet de parvenir au salut ; alors elle peut « s’éteindre », sans renaître nulle part. Il apporte aussi le salut à Amfortas en le guérissant et la lumière à tous en permettant, en le contemplant, au Graal de s’illuminer. Il apporte de la sorte la délivrance à l’humanité, et continuera à œuvrer pour le bien des autres en tant que roi du Graal.
14Et pourquoi ne pas voir l’explication du dernier et mystérieux vers du livret de Parsifal, chanté par les voix du niveau moyen et du niveau supérieur, et qui n’a pas encore été élucidé : « Erlösung dem Erlöser ! » (« Rédemption pour le Rédempteur ! »)22, dans ces paroles du Bouddha : « Le tout-puissant, l’omniscient […] je le suis en tout, sans une tache. J’ai tout quitté : je suis sans désir, un Délivré », « ein Erlöster » ? Parsifal a vaincu le désir, et, comme Bouddha, il est désormais sans désir, et, comme lui, il a apporté la Délivrance, la Rédemption, aux autres, à Kundry, à Amfortas et à la communauté du Graal, il est donc aussi bien que Bouddha, « ein Erlöser » qu’« ein Erlöster », un Rédempteur qu’un Rédimé.
15Klingsor. Chez Wolfram, le magicien Clinschor est un duc qui réside à Capoue. Un jour, le roi Ibert de Sicile le découvre près de son épouse, en train de dormir entre ses bras. Le roi le coupe à ras à l’entre jambes (§ 656-657)23. Clinshor a donc été châtré par un mari jaloux. Klingsor, lui, s’est châtré lui-même parce qu’il ne pouvait pas de lui-même renoncer à la sexualité. Cependant, dans le personnage de Klingsor, on reconnaît surtout Mâra, le méchant, le dieu de la mort dans le Bouddhisme, qui est en même temps « le prince de ce monde, le grand maître des plaisirs terrestres, l’ennemi de la science »24, « l’ennemi mortel du Sauveur »25. Il apparaît comme le tentateur, notamment celui de Bouddha, à qui il offre l’empire de la terre, s’il devient infidèle à sa mission de Bouddha. Buddha résiste à toutes les séductions et parvient à la connaissance. À propos de Mâra, Burnouf écrit p. 76 note n° 2 : « Mâra est le démon de l’amour, du péché et de la mort ; c’est le tentateur et l’ennemi du Buddha. Il en est souvent question dans les légendes relatives à la prédication de Çâkyamuni devenu ascète. Il joue notamment un grand rôle dans les dernières luttes que soutient Çâkya pour parvenir à l’état (p. 77) suprême de Buddha parfaitement accompli ». De plus, une fois que le tentateur a échoué dans son entreprise de détourner Buddha de sa voie, Mâra envoie ses filles, qui ont nom Concupiscence, Inquiétude et Volupté, pour reprendre le combat, mais Bouddha reste inébranlable26. Les trois filles de Mâra jouent le rôle de Kundry dans le Parsifal. Pour ce qui est de l’arme qui s’arrête en l’air au-dessus de Parsifal, on peut penser à certains récits bouddhiques selon lesquels Mâra lance une arme bien connue, le disque, qui s’arrête en l’air au-dessus du Bouddha. Le récit se trouve en particulier dans l’ouvrage de Spence Hardy, A Manual of Budhism, in its modern development27, ouvrage dont il est probable que Wagner a eu connaissance sans qu’on en ait de preuve certaine. Ensuite, de même que le château du magicien s’effondre « comme à la suite d’un tremblement de terre »28, Mâra est précipité à terre et des flammes sortent du sol. Faisant une dernière tentative désespérée pour venir à bout de Bouddha, Mâra transforme ses trois filles en six cents jeunes filles d’une très grande beauté, qui tentent à leur tour de séduire Bouddha en le flattant avant de prendre la fuite.
16On reconnaît dans ces tentatrices les Filles-Fleurs que Wagner a par ailleurs rencontrées aussi bien dans le Barlaam et Josephat de Rudolf von Ems (1re moitié du XIIIe siècle) ; il possédait ce texte dans la bibliothèque qu’il avait constituée à Dresde29 et il en avait un résumé dans l’ouvrage de Karl Goedeke, Deutsche Dichtung im Mittelalter, Dresden 187130, qu’il possédait à Bayreuth : les prêtres indiens ont recours à un magicien pour ramener à eux Josephat, devenu chrétien : le jeune homme est entouré de jolies jeunes filles qui tentent en vain de le séduire (p. 188). Le rapprochement est fascinant. Wagner ne se réfère en fait qu’à une seule source mythologique : la vie du Bouddha, mais il utilise aussi bien sa version indienne d’origine qu’il avait dans Burnouf (paru en 1844) que sa version « occidentale » qui n’est autre que la légende de Barlaam et Josaphat. [Pour mémoire, « Josaphat » est une déformation de « bodhisattva » terme qui désigne Sakyamuni avant son Éveil (bodhi) c’est-à-dire en particulier au moment de l’assaut de Mâra].
17Toutefois, compte tenu de la passion du compositeur pour Alexandre le Grand, il peut apparaître certain que, pour ses filles-fleurs, sa source principale est l’épisode des filles-fleurs dans la tradition d’Alexandre, plus particulièrement dans la version de Strasbourg de l’Alexandre allemand, qu’il possédait à Bayreuth31.
18Les Filles-fleurs
19Comme le suggère Claude Lévi-Strauss dans « De Chrétien de Troyes à Richard Wagner »32, Wagner a pu s’inspirer pour la scène des filles-fleurs, au deuxième acte de son œuvre, de légendes bouddhiques, notamment celle où le Sage, méditant au pied de l’arbre, résiste aux assauts séducteurs des filles du démon du mal (les flèches tirées par ce dernier se changent en fleurs). Une autre source indirecte de Parsifal est sans doute aussi le ballet des nonnes maudites du troisième acte de Robert le Diable (1831) de Meyerbeer et Scribe : la façon dont ces âmes damnées revenues de l’au-delà tentent de séduire un chevalier innocent en l’entourant de leurs danses, puis leur disparition subite lorsque celui-ci leur résiste, annoncent de manière étonnante la scène des Filles-Fleurs. En revanche, la musique de Wagner ne rappelle en rien celle de Meyerbeer. Si l’on peut parler d’influence, on doit se référer à la dramaturgie de Scribe33.
20Il semble cependant que Wagner ait eu aussi connaissance de l’épisode des filles-fleurs dans la tradition d’Alexandre. C’est dans le Roman d’Alexandre de Paris34 (v. 3333-3387, 3457-3550, 147 vers), mais aussi dans la version de Venise du Roman d’Alexandre35 (laisses 357-368), que ces êtres à la sexualité débridée, sans doute d’origine orientale36, apparaissent pour la première fois37, pendant le voyage en Orient du conquérant macédonien.
21Le roman allemand d’Alexandre, dans la version de Strasbourg38, les mentionne aussi (5157-5358). Alexandre et ses hommes entrent dans une splendide forêt où ils entendent chants délicieux et doux accents de lyre et de harpe qui, comme la clochette du petit chien magique Petitcriu dans le Tristan de Gottfried (15845-15873), font oublier à Alexandre et à ses hommes tous leurs soucis et toutes leurs peines et leur ôtent toute affliction et toute tristesse. Là-dessus, le poète explique ce phénomène étonnant. Au début de l’été, quand la nature reverdit, poussent dans la forêt des fleurs belles et lumineuses, rouges et blanches, dont sortent, quand elles s’ouvrent, des jeunes filles d’une beauté sans pareille. Comme dans le texte français, elles doivent rester à l’ombre des arbres, sinon elles ne peuvent demeurer en vie. Telles les sirènes, les filles-fleurs attirent les hommes par leurs chants délicieux si bien qu’Alexandre et ses soldats goûtent l’amour avec elles. Jamais dans leur vie, ils n’ont éprouvé une telle joie amoureuse, souligne le poète (v. 5307 ; v. 5317- 5325). Ils restent là trois mois et douze jours, et ils connaissent avec les jeunes filles une joie sans mélange. Mais à l’automne, alors que les arbres perdent leur feuillage et que les oiseaux s’arrêtent de chanter, les fleurs se flétrissent et les belles femmes meurent (v. 5343- 5347). Alors que dans le texte français le cycle recommence, « sur le modèle de l’éternel retour des saisons »39, dans le texte de Strasbourg la situation est irréversible comme dans le Parsifal de Wagner.
22Chez Wagner elles disent elles-mêmes qu’elles sont des fleurs que « le Maître » cueille au printemps, qu’elles fleurissent voluptueuses, et qu’elles se fanent et meurent si on ne les remplit pas d’amour40. Quand Parsifal a vaincu Klingsor, le jardin se dessèche et devient un désert et les jeunes filles gisent éparses sur le sol comme des fleurs fanées. Nous avons donc là une très grande similitude avec le Roman d’Alexandre dans sa version de Strasbourg. L’intérêt de Wagner pour Alexandre et la présence dans son œuvre comme dans les textes médiévaux de filles-fleurs comparables incite à penser qu’il a puisé ce motif dans la tradition médiévale41. Au reste, Richard Wagner disposait dans sa bibliothèque de Bayreuth d’un exemplaire de l’Alexanderlied allemand42. Ainsi, les sources médiévales et bouddhiques se rejoignent dans une synthèse toute wagnérienne.
23Kundry. Mais c’est surtout pour le personnage de Kundry que Wagner témoigne d’un remarquable syncrétisme. Il fond pour la créer plusieurs personnages : la messagère du Graal du nom de « Cundrie la sorcière » chez Wolfram, la « laide demoiselle » ou la « demoiselle à la mule » chez Chrétien qui ne la nomme pas ; la cousine de Perceval/ Parzival qui, chez Chrétien et Wolfram, comme Kundry chez Wagner, connaît tout de Parzival et lui révèle son nom ; Orgeluse (l’Orgueilleuse de Logres, ou la Mauvaise pucelle chez Chrétien) qui, chez Wolfram, a séduit Anfortas, le roi du Graal (celui-ci n’avait le droit d’aimer que celle qui était désignée par une inscription parue sur le Graal), et provoque sa blessure ; mais aussi le personnage biblique de Marie-Madeleine, la pécheresse convertie, que Wagner avait déjà mise en scène dans le scénario détaillé de son Jésus de Nazareth qu’il avait commencé fin mars 1849 après une relecture intensive des Évangiles.
24Enfin, dans le personnage de Kundry, on reconnaît, à côté des filles de Mâra, celui de Prakriti43 ; on pourrait également lui appliquer ce que le critique dit de Buddha lui-même : « Le Buddha avait, ainsi que tous les êtres, roulé dans le cercle éternellement mobile de la transmigration ; il avait traversé plusieurs existences dans les corps d’animaux, de damnés, d’hommes et de Dieux, tour à tour vertueux et criminel, récompensé et puni, mais accumulant peu à peu les mérites qui devaient le rendre agréable aux Buddhas sous lesquels il vivait, et lui assurer leur bénédiction. »44 ; ou encore45 « la loi fatale de la transmigration attache […] des récompenses aux bonnes actions et des peines aux mauvaises ; elle établit même la compensation des unes par les autres, en offrant au coupable le moyen de se relever par la pratique de la vertu. Là est l’origine de l’expiation. » Kundry, elle, aurait d’un coup été récompensée, après avoir péché dans ses vies antérieures. Elle a aussi servi la communauté du Graal, ce qui compense ses mauvaises actions. De fait, Kundry a vécu toute une série d’existences en s’éveillant toujours de nouveau à la vie selon la loi bouddhique de la réincarnation, pour expier une faute commise dans une de ses existences passées. C’est ce que dit Gurnemanz à l’acte I : « Elle est peut-être une maudite. Elle vit ici, maintenant – peut-être, pour expier encore une faute d’une vie antérieure, qui ne lui a, là-bas, pas encore été pardonnée. »46 Elle fut Hérodiade (que Wagner, comme tous les artistes de la fin du siècle, assimile à Salomé), Gundryggia, Kundry, et aurait été punie parce que, devant le Christ en croix, elle aurait éclaté de rire, au lieu d’être prise de compassion (le rire de Kundry est indubitablement celui de Prakriti dans l’esquisse des Vainqueurs).
L’action
25Comme on l’a vu, le compositeur dit lui-même dans sa lettre du 30 mai 1859 à Mathilde Wesendonk qu’il veut condenser l’action en trois moments forts pour que le sens apparaisse clairement. Wagner supprime donc les aventures de Gauvain et concentre l’action en trois situations principales, qui sont les deux scènes où apparaît le Graal, deux scènes antithétiques, puisque dans la première Parsifal, comme chez Wolfram, n’accomplit pas ce qu’on attend de lui (le motif de la question, jugé par Wagner inepte et insignifiant47, a été supprimé ; il doit éprouver de la com-passion : « durch Mitleid wissend » : « par la pitié parvenu au savoir »48), alors que dans la seconde le héros, qui a réussi son épreuve, guérit Amfortas ; entre les deux, il y a la scène où Parsifal résiste à l’ensorcellement des filles-fleurs et à la séduction tentée, sur l’ordre de Klingsor, par Kundry. C’est lors de cette deuxième scène que, par un baiser donné par Kundry, Parsifal apprend à connaître le désir, « la soif (de l’existence) qui conduit de renaissance en renaissance, accompagnée du plaisir et de la convoitise, qui trouve çà et là son plaisir : la soif de plaisirs, la soif d’existence, la soif de puissance »49, comme l’écrit Burnouf50, il faut l’expulser totalement afin de supprimer la douleur et le malheur. Parsifal apprend à connaître par là, la souffrance d’Amfortas ; placé dans la même situation que connut naguère le roi, il reconnaît que, comme le désir pour le bouddhisme, Éros est la cause de toute souffrance humaine. Parsifal ressent, sans être blessé lui-même, les mêmes souffrances que celles qu’Amfortas blessé a ressenties, il souffre avec lui : er leidet mit. Ce sentiment est déjà en germe chez Wolfram, chez qui la question que doit poser Parzival « suppose un sentiment de charité et la volonté de participer au malheur d’autrui »51. Par la com-passion, qui abolit la frontière entre Amfortas et Parsifal, Parsifal s’identifie à Amfortas et il ne fait plus qu’un avec lui ; en effet, comme l’enseigne Buddha, par notre compassion (« Mitleiden »), nous ne faisons plus qu’un avec tout le vivant52, et nous pouvons jouer, comme les « Grands Bodhisattvas », un rôle de sauveur. En ne faisant plus qu’un avec Amfortas, Parsifal comprend que Kundry est sur le point de le séduire, comme elle avait séduit le roi pécheur, il est en mesure de lui résister (ce dont ce dernier était incapable), et la repousse à jamais. L’acte décisif est accompli : Parsifal triomphe de Klingsor, peut ainsi récupérer la lance et anéantir le monde du magicien. La lance est, chez Wagner, la lance de Longin comme dans le texte de Robert de Boron et bien d’autres après lui ; Wagner a emprunté ce trait sans doute à l’ouvrage de San Marte. Klingsor a ravi cette lance à Amfortas alors que celui-ci succombait aux charmes de Kundry, puis il en a blessé le roi du Graal au flanc (alors que chez Wolfram, Anfortas53 est blessé aux testicules, la partie par laquelle il a péché). En même temps, comme Prakriti reconnaît dans sa propre souffrance grâce à la com-passion, ou Grande Compassion54, la souffrance du monde (« Weltleiden »)55, Parsifal, par la com-passion, sent dans son corps les souffrances de l’humanité tout entière, la souffrance universelle et la considère comme sienne. Il est alors sauvé : il retrouvera le chemin du Graal et pourra rédimer Amfortas, ainsi que Kundry et tous les chevaliers du Graal. Il apportera le salut universel à l’humanité tout entière.
26Notons un autre élément très présent dans Burnouf et dans le scénario des Vainqueurs : la lutte contre les structures sociales officielles, contre les castes, thème que Wagner avait déjà traité dans Jésus de Nazareth et auquel il semble tenir beaucoup. Bouddha doit affronter la réprobation des Brahmanes exactement dans les mêmes conditions où Parsifal affronte les chevaliers du Graal. Le salut vient de l’homme seul, pas de l’Église, qui perpétue par ses lois des choix humains porteurs de conflits, de contradictions et d’égoïsme.
27Notons enfin un point essentiel : pour Wagner bouddhisme et musique sont liés. En 1868, il note dans son Carnet brun : « La musique du monde de Brahma est comme un souvenir du paradis : elle conduit à la vérité. […] La musique, tournée vers le Sansara, devient poésie. »56 En outre, si on prend pour argent comptant ce qu’écrit Wagner dans son autobiographie, (« Mon choix avait été déterminé, outre la beauté profonde du sujet tout simple, par le rapport particulier de celui-ci avec le procédé musical, qui, dès lors, avait mûri en moi. En effet, chaque rencontre d’un être avec le Bouddha fait surgir en l’esprit de ce dernier aussi bien le présent que le rappel des diverses incarnations de cet humain dans le passé. L’histoire toute simple recevait sa signification par le fait même que cette vie passée des personnages principaux souffrant se mêlait en tant que présent immédiat à la nouvelle phase de la vie. »57), on constate que Wagner prend conscience en lisant Burnouf de l’importance psychologique du « procédé musical » qu’il a élaboré. Le phénomène de la réincarnation, qui le fascine parce qu’il est le palimpseste des temps, des sentiments, des situations, peut être rendu par la superposition des motifs musicaux. Le bouddhisme a ainsi aussi une répercussion musicale.
28Disons, pour finir, que les points les plus importants que le compositeur a empruntés au bouddhisme sont :
29la renaissance, la métempsycose, ou « loi de transmigration »58, dont la cause est le désir, « la soif (de l’existence) qui conduit de renaissance en renaissance, accompagnée du plaisir et de la convoitise, qui trouve çà et là son plaisir : la soif de plaisirs, la soif d’existence, la soif de puissance »59 ;
30la compassion universelle avec tout être vivant ;
31et « l’abandon complet, le rejet absolu, l’expulsion […] de ce désir qui renaît sans cesse, qui est accompagné d’amour et de jouissance et qui se satisfait çà et là »60, afin de supprimer la douleur et le malheur.
32On le voit, il est vraisemblable que Burnouf est, à côté des apports médiévaux, une source essentielle de Wagner. Il est certain que ce dernier a lu Schopenhauer qui, lui aussi, a emprunté certains éléments de sa philosophie au bouddhisme et a pu approfondir ainsi ses connaissances sur le bouddhisme. Cependant on remarque des nuances importantes, voire des dissonances entre les deux philosophies : c’est ainsi qu’au contraire de la philosophie de Schopenhauer, le bouddhisme ne prône pas la négation du vouloir-vivre. Comme l’écrit Roger-Pol Droit61, « Le Bouddha chirurgien entend guérir la vie (alors que Schopenhauer veut) guérir de la vie […] Vivre sans désirer n’est pas souffrir… mais pour Schopenhauer, ce n’est pas vivre ». Ici Wagner est plus proche du bouddhisme que de Schopenhauer.
33En partant d’une source médiévale, le Parzival de Wolfram von Eschenbach, Richard Wagner a donné au mythe un sens personnel, nouveau parce qu’il opère la synthèse entre le bouddhisme tel qu’il l’a lu et médité dans Burnouf et le christianisme dont le message l’obsède comme en témoignent son esquisse sur Jésus de Nazareth et, comme on l’a vu précédemment, son traité théorique de Kunst und Religion. Ni Jésus, ni Bouddha, Parsifal est une figure totalement originale.
Notes de bas de page
1 Wolfram von Eschenbach, Parzival. Traduction française du texte intégral par Danielle Buschinger et Jean-Marc Pastré. Paris, Champion, 2010.
2 Lohengrin, ein altteutsches Gedicht, nach der Abschrift des Vaticanischen Manuscriptes von Ferdinand Gloekle. Herausgegeben von J. Görres. Heidelberg 1813, p. XIII. Cet ouvrage se trouve dans la bibliothèque que Wagner a constituée à Dresde entre 1842 et 1849 (depuis 1975 à la villa Wahnfried de Bayreuth).
3 Lohengrin…, op. cit., p. XVI.
4 Lohengrin…, op. cit., p. XLV.
5 Buddhisme est la graphie adoptée par Burnouf.
6 Cf. notamment Jacques Chailley, Parsifal de Richard Wagner. Opéra initiatique. Paris 1979, p. 51 sqq.
7 Richard Wagner, Ma Vie (Mein Leben). Textes français et notes de Martial Hulot avec la collaboration de Christiane et Melchior de Lisle. Paris, Éditions Buchet/Chastel. 1983, p. 331.
8 J. Barthélemy-Saint Hilaire, Eugène Burnouf. Ses travaux et sa correspondance. Paris, 1891, p. 42.
9 Richard Wagner, Les Vainqueurs, traduction de Philippe Godefroid, in Les Opéras imaginaires. Paris 1989, p. 585.
10 Cité par Martin Gregor-Dellin, Richard Wagner. Sa vie. Son œuvre. Son siècle. Traduit de l’allemand par Odile Demange, Jean-Jacques Becquet, Élisabeth Bouillon, Pierre Cadiot. Paris 1981, p. 763.
11 Voir la lettre adressée par Wagner au roi de Bavière le 31 mai 1868.
12 Cosima Wagner, Journal. II 1873-1877. Texte établi, préfacé et commenté par Martin Gregor-Dellin et Dietrich Mack. Traduit de l’allemand par Michel-François Demet. Paris, Gallimard, 1977, p. 82.
13 Richard Wagner, Sämtliche Briefe. Band 10 : 17. August 1858 bis 31. März 1859. Herausgegeben von Andreas Mielke. Redaktionelle Mitarbeit Isabel Kraft. Wiesbaden-Leipzig-Paris 2000, p. 209.
14 D’autres avant moi ont abordé ce problème, par exemple Karl Heckel, « Jesus von Nazareth – Buddha (“Die Sieger”) – Parsifal » (article paru en 1891 dans les Bayreuther Blätter (Vierzehnter Jahrgang) 1891, p. 5-19), ou Curt Rich. Hohberger Die Entstehungsgeschichte von Wagners « Parsifal » auf philologisch-historischer Grundlage dans son ouvrage paru à Leipzig en 1914. Ou encore plus récemment Oswald Panagl, « Wege und Umwege eines musikalischen Entwurfs : Die Sieger und Parsifal » in Ulrich Müller/Oswald Panagl ; Ring und Gral. Texte, Kommentare und Interpretationen zu Richard Wagners « Der Ring des Nibelungen », « Tristan und Isolde », « Die Meistersinger von Nürnberg » und « Parsifal ». Würzburg, 2002, p. 246-260.
15 Par exemple, le roman médiéval Barlaam und Josaphat (1220-1230), de Rudolf von Ems.
16 Cité par Martin Gregor-Dellin, Richard Wagner… ., op. cit., p. 728.
17 Ibid.
18 Ibid., p. 729.
19 Vers 6417 sqq. Chrétien de Troyes, Perceval ou le Conte du graal. Traduction inédite et présentation de Jean Dufournet. Paris, GF Flammarion, 1997, p. 359.
20 Avant-Scène Opéra, n° 38-39, janv. Fév. 1982, Wagner, Parsifal, p. 98.
21 Tibet. Deutsch. Wörterbuch, p. 270, col. 1 et p. 423, col. 1, cité par Burnouf, p. 19 (note n° 3).
22 Avant-Scène Opéra, op. cit., p. 109.
23 Parzival, op. cit., p. 244.
24 H. Oldenberg, Le Bouddha, op. cit., p. 56.
25 Ibid., p. 53.
26 Ibid., p. 86-87.
27 A Manual of Budhism in its Modern Development, translated from Singhalese Mss. by R. Spence Hardy. London 1853, p. 176.
28 Avant-Scène Opéra, n° 38-39, janv. fév. 1982, Wagner, Parsifal, op. cit., p. 93.
29 Cf. Curt von Westernhagen, Richard Wagners Dresdener Bibliothek. 1842 bis 1849, Wiesbaden 1966, p. 85.
30 Karl Goedeke, Deutsche Dichtung im Mittelalter. – Zweite Ausgabe, verm. um Buch XIII : Niederdeutsche Dichtung v. Hermann Oesterley, Dresden, 1871.
31 Lamprecht der Pfaffe. Hrsg. von Heinrich Weismann. Urtext und Übersetzung nebst geschichtlichen und sprachlichen Erläuterungen, sowie der vollständigen Übersetzung des Pseudo-Kallisthenes und umfassenden Auszügen aus den lateinischen, französischen, englischen, persischen und türkischen Alexanderliedern, Frankfurt am Main, Literarische Anstalt, 1850. (1. Bd. : Urtext und Übersetzung nebst historischer und sprachlicher Einleitungen und Erläuterungen. 2. Bd. : Übersetzung des Pseudo-Kallisthenes nebst den Auszügen).
32 « De Chrétien de Troyes à Richard Wagner » in Avant-Scène, n° 38-39, janv. fév. 1982, Wagner, Parsifal, p. 8-15.
33 Cf. Jean-François Candoni, La Genèse du drame musical wagnérien. Mythe, politique et histoire dans les œuvres dramatiques de Richard Wagner entre 1833 et 1850, Berne/ Berlin/ Frankurt am Main/ New York, Paris, Vienne, 1998, p. 211.
34 Alexandre de Paris, Le Roman d’Alexandre. Traduction, présentation et notes de Laurence Harf-Lancner (avec de texte édité par E.C. Armstrong et al.), Paris, le Livre de Poche, 1994.
35 The Medieval French “Roman d’Alexandre”. Volume I : Text of the Arsenal and Venice Versions prepared with an Introduction and a Commentary by Milan S. La Du. Princeton/ Paris 1937 (Elliott Monographs. Ed. by E.C. Armstrong 36).
36 Cf. Paul Meyer, Alexandre le Grand dans la littérature française du Moyen Âge, Paris 1862, T. 2, p. 182.
37 Voir à leur propos l’article de Philippe Ménard, « Femmes séduisantes et femmes malfaisantes » in Bien dire et bien aprandre. Autour d’Alexandre, n° 7 (1989), p. 5-17.
38 Lamprechts Alexander. Hg. und erklärt von Karl Kinzel. Halle, 1885.
39 Catherine Gaullier-Bougassas, Les Romans d’Alexandre. Aux frontières de l’épique et du romanesque. Paris 1998 (Nouvelle Bibliothèque du Moyen Âge), p. 451-452.
40 Op. cit., p. 135 et 137.
41 Déjà Hans von Wolzogen (« Tristan und Parsifal » in Bayreuther Blätter, Neunter Jahrgang, 1886, p. 47) a émis cette idée, mais il n’en avait aucune preuve.
42 Il s’agit de Lamprecht der Pfaffe, ouvrage que nous avons déjà cité.
43 Voir Burnouf, p. 205-06.
44 Ibid., p. 135.
45 Ibid., p. 299.
46 Traduction, sauf pour le premier vers, de Georges Pucher dans Avant-Scène Opéra, op. cit., p. 46.
47 Lettre à Mathilde du 30 mai 1859 (op. cit., p. 164).
48 Richard Wagner, Parsifal…, p. 68-69.
49 H. Oldenberg, Le Bouddha, op. cit., p. 226.
50 Op. cit., p. 508.
51 « De Chrétien de Troyes à… », édit. cit., p. 14.
52 Wagner écrit à son ami August Röckel en avril 1855 : « Wie herrlich sind Buddha’s Lehren, die uns durch unser Mitleiden Eins mit allem Lebenden machen ! » (in Wagner, Richard, Sämtliche Briefe. Éd. par H.J. Bauer et J. Forner. Band VII : März 1855-März 1856. Leipzig 1988, p. 130).
53 Telle est la graphie du nom chez Wolfram.
54 Le Dictionnaire du Bouddhisme, Paris 1999, p. 330-331.
55 Voir la lettre du 5 octobre 1858 à Mathilde Wesendonk.
56 Wagner, Richard, Das Braune Buch. Tagebuchaufzeichnungen, Zürich / Freiburg im Breisgau, 1975, p. 178.
57 « Außer der tiefsinnigen Schönheit des einfachen Stoffes bestimmte mich zu seiner Wahl alsbald ein eigentüliches Verhältnis desselben zu dem in mir seitdem ausgebildeten musikalischen Verfahren. Vor dem Geiste des Buddha liegt nämlich das vergangene Leben in früheren Geburten jedes ihm begegnenden Wesens offen, wie die Gegenwart selbst, da. Die einfache Geschichte erhielt nun ihre Bedeutung dadurch, dass dieses vergangene Leben der leidenden Hauptfiguren als unmittelbare Gegenwart in die neue Lebensphase hineinspielte. », Mein Leben, p. 542.
58 Burnouf, p. 19.
59 H. Oldenberg, Le Bouddha, op. cit., p. 226.
60 Burnouf, p. 508.
61 Roger-Pol Droit, « Schopenhauer et le bouddhisme : une admirable concordance ? » in Eric von der Luft, Schopenhauer. New Essays in Honor of His 200th Birthday. Lewiston-Queenston-Lampeter, 1988, p. 132.
Auteur
Université d’Amiens
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