Pratiques funéraires entre le Hallstatt final et La Tène moyenne en Champagne-Ardenne : un genre de point de vue, le point de vue du genre
p. 129-153
Résumés
Les fouilles récentes d’archéologie préventive en Champagne ont livré, pour la période VIe-IIIe s. av. J.-C., un corpus de cinq cent vingt sépultures réparties dans vingt-huit occupations funéraires d’importance très variable. Une proportion notable de défunts a pu faire l’objet d’une détermination sexuelle, et le point de vue du genre a donc été retenu pour questionner ces données. Il en ressort que la pratique funéraire est extrêmement standardisée, en particulier pour La Tène ancienne, période la mieux documentée. Le traitement du corps, l’organisation de la tombe et les dépôts évoquant l’alimentation ne varient que discrètement en fonction du genre (c’est le cas par exemple de la position des membres supérieurs, de la quantité moyenne de récipients et des quartiers de viande choisis) et les variations semblent parfois localisées. Par comparaison, les fluctuations en fonction de l’âge apparaissent marquées, en particulier concernant les mobiliers d’accompagnement. Le genre est avant tout défini non par la pratique sépulcrale mais par les effets personnels, portés ou déposés (parure, accessoires vestimentaires, armes…). Quelques indices d’une évolution dans le traitement respectif des hommes et des femmes sont peut-être le témoignage d’une mutation du rôle de la femme entre le Ve siècle et le IIIe siècle avant notre ère.
An ensemble of 520 graves in twenty-eight funerary sites of variable importance of the 4th and 3rd century BC was discovered during recent rescue excavations in the Champagne. An important number of deceased have been sexually determined; therefore gender became a main factor in the analysis of the data. From this point of view, it seems that the funerary practice is extremely standardized, particularly for the Early La Tène period, which was best documented. The processing of the corpse, the organisation of the tomb and the grave goods recalling food deposits vary only discreetly according to the gender (for example in the case of the position of the upper limbs, the average quantity of deposited pottery or the chosen chunks of meat) and if differences exist, they seem to be local. In comparison, the differences depending of the age of the deceased stand out much more, particularly in the grave goods. Gender is above all defined not by the funerary practice itself but by the personal effects either worn by the deceased or deposited with him (jewellery, costume elements, weapons…). Some clues indicating a difference in the corresponding treatment of male and female graves may display a change in the role of women in the La Tène society between the 5th and 3rd century BC.
Texte intégral
1La Champagne est un gisement exceptionnel en sépultures du début du Second Âge du fer. Dans le cadre de sa thèse, Jean-Paul Demoule a fait le point sur les données disponibles avant le développement de l’archéologie préventive et a précisé la définition de la culture Aisne-Marne à travers ses productions et ses pratiques funéraires, en ouvrant aussi sur une approche plus sociale (Demoule 1999). Depuis une dizaine d’années, un nouveau corpus de vingt-huit occupations funéraires a été constitué (fig. 1). Il comprend cinq cent vingt défunts (dont cinq préalablement incinérés) inhumés au sein de sépultures parfois isolées, mais le plus souvent, appartenant à un groupe de tombes numériquement très variable, de trois à quatre-vingts sépultures. Cet échantillon peut être considéré comme représentatif puisque, contrairement aux recherches anciennes privilégiant les grandes nécropoles et les zones fortement prospectées, il provient du suivi systématique des opérations d’aménagement du territoire placées de manière aléatoire par rapport aux données archéologiques. Les différents auteurs ont exploité ce corpus en fonction des questions de leur discipline, ce qui explique des chiffres un peu différents selon les approches.
2Les sites concernés sont majoritairement installés dans la plaine crayeuse, surtout dans la Marne, mais également dans l’Aube et les Ardennes, ce qui permet d’observer les limites de l’aire culturelle Aisne-Marne.
3Au vu de la quantité des données et du degré de maturation des travaux en cours, en particulier dans le cadre d’un projet scientifique (PAS de l’Inrap), nous courions le risque d’une présentation trop synthétique, confirmant simplement les grandes tendances déjà observées et gommant la diversité que ce corpus permet de mettre en lumière. Un autre risque, a contrario, était celui d’une présentation factuelle et indigeste de données trop nombreuses. Il est donc apparu opportun de choisir un point de vue qui permette de présenter et questionner ce corpus, tout en abordant des questions sociétales. Le « genre » permet cette approche. Nous utilisons ce terme dans son acception en sciences humaines et sociales, le genre étant la construction culturelle et individuelle de l’identité « masculine » ou « féminine », qui se distingue du sexe, caractère biologique. Nous l’aborderons en suivant les quatre thématiques proposées par les organisateurs du colloque.
1. L’identité biologique des défunts (ir)
1.1. Le recrutement des nécropoles en fonction du sexe des défunts
4Sur l’ensemble des quatre-cent-vingt-cinq individus de plus de quinze ans (fig. 2), le sex-ratio apparaît proche de l’équilibre naturel, à l’image des trois grandes nécropoles de La Tène ancienne, Reims « La Neuvillette », Sarry "Les Auges" et Val-de-Vesle « Moncheux ». En revanche, la période de La Tène moyenne est représentée presque exclusivement par des petits groupes d’inhumations fouillés complètement (de un à huit défunts), montrant un déséquilibre sexuel flagrant essentiellement en faveur des femmes et, pour un cas, en faveur des hommes (Lavau "Les Corvées"). Celui-ci se situe en dehors du domaine géographique attribué à la culture Aisne-Marne, près de Troyes (Aube), tandis que les petits ensembles dominés par des femmes se trouvent dans le sud de l’Aisne-Marne. Cette prédominance féminine est-elle le reflet d’une volonté de regroupement familial ? En effet, trois de ces sites ont également accueilli un sujet immature, ainsi qu’un homme, à Perthes. Cette prépondérance pourrait aussi témoigner d’un regroupement autour d’un sujet féminin au statut particulier (aspect ostentatoire de certaines tombes). Pour la période de La Tène ancienne, la plupart des sites présentent un équilibre entre les hommes et les femmes ; quelques exceptions sont toutefois notables concernant des groupes à majorité nettement masculine que l’on pourrait caractériser comme de possibles cimetières « militaires1 » ou, par prudence, au vue de la non exhaustivité des ensembles, comme des zones de cimetière réservées. À Caurel "Le Puisard", le recrutement préférentiel est parfaitement en adéquation avec le statut militaire affiché dans les tombes. De plus, les deux seules femmes présentes se trouvent côte à côte, isolées, au milieu de l’ensemble (fig.3). La même proposition a été faite de manière assez probante en Lorraine, sur le site de Chaillon "Meaucourt" (Meuse) fouillé par l’Inrap sous la responsabilité de V. Delaugeas (Delaugeas 2003, Landolt 2005).
1.2. Rapprochement morphologique
5Le mode de fonctionnement des espaces funéraires a été abordé sous l’angle de la morphologie des squelettes à partir de l’homogénéité ou de l’hétérogénéité des caractères métriques2 et non métriques3, avec pour objectif de mettre en évidence de possibles liens avec le sexe.
6Il a déjà été discuté (Bonnabel et Paresys 2002) d’une opposition entre petits groupes de tombes à recrutement familial et nécropoles plus vastes ouvertes à différents groupes. Mais plusieurs paramètres se confondent pour ces petits groupes familiaux de La Tène moyenne où la présence des femmes domine, ce qui implique forcément une plus grande importance de caractères partagés entre les femmes. Cependant, la mise en évidence de caractères davantage partagés entre femmes, ou de femmes dont les caractères sont un carrefour de ceux d’autres défunts à Auve " Le Chemin de Ternière" et Dommartin-Lettrée "Les Coupes", pose la question d’une organisation matrilocale. Il reste pourtant nécessaire de développer l’approche statistique, en l’état encore trop faible.
7À l’opposé de l’homogénéité mise en évidence par la répétition des caractères, quelques sites montrent un brassage plus large (caractères rares et indices isolés) comme à Reims "La Neuvillette" et Loisy-sur-Marne "Grand Champ", ainsi qu’à Caurel "Le Puisard". Ce dernier, de par la particularité de son recrutement d’hommes armés renforce l’hypothèse d’un regroupement à caractère social et non pas familial (nous entendons groupe d’individus biologiquement apparentés).
1.3. À propos de l’état sanitaire
8Les différences entre homme et femme pour certains aspects de l’état sanitaire ouvrent un champ de réflexion autour du traitement des individus selon leur genre et sur la division sexuelle du travail.
9Les indicateurs non spécifiques de stress ont été envisagés à travers les cribra orbitalia (présence d’un amas de centaines de petits pertuis situés sur les parois supéro-externes des orbites ; (Zammit 1990), l’hyperostose poreuse du crâne (présence d’une porosité plus ou moins développée en épaisseur comme en superficie) et les hypoplasies linéaires de l’émail dentaire (présence d’une ou plusieurs lignes de défects linéaires affectant de façon transversale l’émail d’une ou de plusieurs dents) (Zammit 1990). Leur apparition peut, entre autres, être liée à des déficiences nutritionnelles, des infections, des fièvres éruptives, des viroses. L’analyse de la répartition de ces marqueurs osseux met en évidence une surreprésentation féminine (fig. 4). Est-ce l’effet d’une plus faible constitution de celles-ci (notamment pour les cribra orbitalia ou les hyperostoses poreuses pouvant trouver leur origine dans des carences liées à leurs fonctions reproductives) et/ou à un traitement différent des petits garçons et des petites filles en prévision de leurs futures activités ?
10L’étude des traumatismes (fig. 4) montre peu de lésions ayant laissé des traces (une fracture de l’enfance parfaitement consolidée peut passer inaperçue à l’œil nu). Est-ce par l’effet d’une faible exposition aux traumatismes et/ou d’un système d’assistance sanitaire suffisante ? Aucune différence sexuelle n’apparaît, excepté les quatre cas pouvant être associés à des violences inter-personnelles ou guerrière ne concernant que des hommes avec deux fractures de parade (Champfleury "A Mi Champs" et Reims "La Neuvillette") et deux lésions traumatiques au niveau de la voûte crânienne (Plichancourt "Les Monts" et Witry-Lès-Reims "La Comelle").
11Dans le domaine de la pathologie fonctionnelle, les spondylolyses sont présentes sur 10 % des individus observables, et touchent essentiellement des hommes (sept hommes pour trois femmes). Cette lésion est associée à une fracture de stress ou de fatigue que l’on retrouve très fréquemment chez le sportif ; elle peut être liée au port de charges et se déclare le plus souvent pendant la croissance. Le site de Reims "La Neuvillette" concentre trois cas de spondylolyse dont une chez un adolescent d’une douzaine d’années et deux des trois femmes se trouvent sur le site de Val-de-Vesle "Moncheux". La distribution sexuelle des nodules de Schmorl4, ou, hernies intra-spongieuses, dont l’apparition est également liée au soulèvement de lourdes charges, montre également une surreprésentation masculine avec trente et un hommes et quatorze femmes. Cependant, cette différence n’est pas partout représentée de la même façon, puisque les femmes de Val-de-Vesle "Moncheux" ont autant de hernies que les hommes. Les activités des vivants et le partage sexuel des tâches seraient-ils différents d’une zone à l’autre de l’Aisne-Marne ?
2. Traitement des défunts
12L’organisation de l’ensemble funéraire étant abordée en chapitre 4, dans ce paragraphe, nous nous concentrerons sur la fosse, l’organisation des différents éléments constituant la sépulture, et le traitement du corps (position, contenant funéraire). Après recollement des bases de données sur les pratiques funéraires5, nous avons extrait les individus identifiés sexuellement de manière biologique, auxquels nous avons associé ceux dont le genre est exprimé par un dépôt de mobilier très explicite (en le précisant néanmoins dans la base de données). Ceci paraissait logique dans un questionnement sur le genre et non sur le sexe. L’étude s’appuie donc sur trente-et-un défunts du Hallstatt provenant de deux occupations, deux-cent-trente-neuf de La Tène A et B issus de dix-neuf occupations et dix-neuf de La Tène C dispersés sur huit occupations.
2.1. Les fosses sépulcrales
2.1.1. Au Hallstatt
13La morphologie générale des fosses creusées pendant le Hallstatt ne paraît pas liée au genre du défunt. Les fosses des deux sites hallstattiens du corpus (Saint-Étienne-au-Temple et Plichancourt) ont pour point commun d’être majoritairement ovales. Le fond peut être en cuvette plus ou moins prononcée, voire en gouttière à Saint-Étienne-au-Temple. Si dans ce dernier site la proportion de fond plat est équivalente à celle de fond en cuvette, les fonds de fosses de Plichancourt sont le plus souvent en cuvette. Les parois sont souvent plus ou moins verticales pour les deux sites, parfois pentues à Saint-Étienne-au-Temple, mais pas à Plichancourt. Une différence dans les dimensions semble cependant perceptible (fig. 5). ÀPlichancourt, les longueurs des tombes d’adultes s’échelonnent de 190 cm à 312 cm, la moyenne est de 246 cm. La fosse la plus longue (322 cm) au centre d’un enclos carré à fossé large n’a révélé aucun ossement ni mobilier. S’agit-il d’une tombe pillée ? Les quatre tombes d’individus certainement masculins sont systématiquement plus courtes que la moyenne. Les deux tombes certainement féminines ont une valeur supérieure à la moyenne et, sur les trois tombes d’individus peu conservés mais dont les rares caractères observables indiquent plutôt des femmes, la longueur de fosse de l’une est inférieure, l’autre égale et l’autre supérieure à cette moyenne. Les femmes ayant des statures inférieures à celle des hommes, on peut considérer que les tombes féminines sont proportionnellement plus grandes que les tombes masculines.
14Sur les trois tombes masculines dont les fosses sont bien conservées, deux des défunts sont en contact avec les parois de la fosse. Dans un cas, la tombe paraît presque courte pour le défunt : l’homme dont la stature estimée (à partir du fémur) est de 171 cm est inhumé dans une fosse dont le contour en surface de décapage est de 190 cm, mais le contour du fond de fosse de 170 cm, sa tête a été contrainte par la paroi de la fosse.
15À Saint-Étienne-au-Temple (fig. 5), la moyenne des longueurs est inférieure à Plichancourt (194,66 cm) et l’écart type indique un échantillon plus resserré (35,5 contre 67,97 à Plichancourt) bien qu’encore assez dispersé. En outre, les longueurs à Plichancourt sont globalement supérieures. Si l’on considère les fosses dont la longueur est inférieure à 200 cm, seules trois fosses sur quatorze sont concernées à Plichancourt (dont deux de nourrissons) tandis que c’est le cas de onze fosses sur vingt et une à Saint-Étienne-au-Temple, donc plus de la moitié des fosses. À Saint-Étienne, hommes comme femmes peuvent être en contact avec les parois de la fosse.
16Cependant, la tendance à une taille plus grande de fosse pour les femmes se confirme à Saint-Étienne-au-Temple puisque la moyenne des longueurs des fosses féminines est supérieure de 9 cm à la moyenne de celles des fosses masculines. Deux fois, on retrouve l’impression de taille insuffisante de la fosse qui contraint dans un cas la tête et dans l’autre les jambes. Cependant, ceci est surtout dû au fait que le corps n’est pas centré en longueur (pour laisser de la place à des dépôts périssables ?). Sur ces deux sites du hallstattien, a contrario, certaines fosses paraissent démesurément longues. La St 61 de Plichancourt mesure 312 cm alors même que la défunte ne devait pas en occuper plus de 165 cm, tandis que la petite femme d’environ 140 cm de la St 8 de Saint-Étienne-au-Temple a été inhumée dans une fosse de 232 cm. Dans les deux cas, il s’agit des sépultures ayant livré la plus grande quantité de mobilier et de nature la plus variée.
17Les largeurs sont comme les longueurs, plutôt plus importantes pour les tombes féminines en moyenne, les tombes les plus larges étant les deux tombes féminines de chacun des sites ayant livré le plus de mobilier, dont des pièces exceptionnelles (cf. infra, 3.2.2.).
18Ainsi, les fosses féminines paraissent de plus grandes dimensions, ce qui peut être lié à la présence de dépôts périssables plus volumineux, ou encore à une ostentation relative de la tombe en surface.
2.1.2. À La Tène A-B
19Lors de La Tène A-B, la morphologie la plus courante est la fosse rectangulaire ou rectangulaire à angles arrondis (appelée sub-rectangulaire). Viennent ensuite les tombes dites ovales avec, en premier, celles dont les extrémités sont arrondies et les bords parallèles, puis celles qui ont également des parois concaves et qui sont plus rares. Un nombre non négligeable de sépultures présente une morphologie composite et quelques-unes sont trapézoïdales.
20Des nécropoles offrent plus de variations dans la morphologie des fosses que d’autres, c’est le cas en particulier de Brienne-sur-Aisne et de Witry-Les-Reims « La Comelle ». Dans les deux cas, il s’agit de fosses creusées dans la graveluche, horizon géologique plus meuble que la craie franche et se prêtant peut être moins à la systématisation de la forme des creusements. Cependant, à Champfleury, malgré la craie franche, les contours sont assez variés également ; ce n’est donc pas le substrat qui explique le phénomène. A contrario, à Dommartin et à Auve, la tombe rectangulaire ou sub-rectangulaire est presque exclusive, et très largement majoritaire à Val-de-Vesle et Reims « La Neuvillette ».
21Dans la très grande majorité des cas, les parois des fosses sont verticales et les fonds plats ou irréguliers. Une part des fosses présente des parois taillées en sape, leur proportion varie en fonction des ensembles funéraires ; pour l’un d’entre eux (Champfleury 2005) ces fosses à parois s’évasant vers le fond constituent la presque totalité des fosses. La taille des parois en sape peut ne pas être voulue, mais simplement résulter du mode de creusement de la fosse (outil, technique du fossoyeur) ; elle peut aussi être recherchée pour une raison d’aménagement de la fosse que nous n’expliquons pas pour l’instant. Pour ces fosses simples, aucune différence ne paraît liée au genre.
22Certaines fosses présentent des aménagements particuliers, en dehors des tombes à char qui ne seront pas abordées dans cet article. Trois catégories d’aménagements sont repérables et peuvent se combiner entre elles (fig. 6) :
encoches faites dans les parois à proximité des angles de la fosse ;
petite fosse de type « trou de poteau » ;
banquette.
23Six fosses du corpus, dont quatre à Val-de-Vesle, l’une à Auve et la dernière à Reims « La Neuvillette » (Bonnabel et Boulestin 2008) présentent des encoches comme aménagement exclusif. Les encoches, placées en général dans les angles, sont de morphologies variées. Elles peuvent être dirigées en diagonale, transversalement ou longitudinalement par rapport à la fosse. Elles peuvent être plus ou moins marquées, se prolonger jusqu’au fond ou pas, et n’ont pas toujours le même aspect en fonction des angles de la fosse. Plusieurs fois une différence apparaît entre le haut et le bas, voire entre la droite et la gauche. Elles sont toujours, lorsque l’état de conservation le permet, associées à des contenants funéraires du corps. Dans plusieurs cas, elles paraissent participer à cette structuration interne, mais en étant associées à d’autres aménagements. Elles sont plusieurs fois plus marquées en hauteur ce qui peut être liée à leur rôle dans la couverture de la structure ou dans le marquage de la tombe en surface. Nous savons par ailleurs, et notamment à cause de l’importance à cette période des sépultures installées successivement en un même point, que les tombes sont marquées. Nous avons pu montrer par l’examen de l’organisation de blocs de pierre dans les tombes, que ce marquage est dans certains cas un tumulus en partie empierré. Or, à Val-de-Vesle, ces sépultures à encoches paraissent s’organiser en un système commun avec les sépultures à tumulus pierreux, en délimitant notamment la nécropole ou des espaces sans tombe. Ces tombes à encoches, tout comme les tombes à tumulus de pierre et de terre, sont proportionnellement plus importantes pour la dernière phase d’occupation de la nécropole, caractérisée par des sépultures ostentatoires (mais l’effectif est très faible). Ces deux éléments plaideraient en faveur d’un marquage aérien plus développé que les autres. Au sein de ce corpus, ces tombes à encoches couvrent cependant l’Aisne-Marne II et III, soit La Tène A et le début de La Tène B2. Le petit nombre d’exemples répartis sur une durée très longue peut expliquer la variation dans la morphologie des creusements, à moins qu’ils ne soient tout simplement adaptés à des morphologies de pièces de bois à chaque fois particulières. Sept fois sur huit, on peut identifier le sexe du défunt, et il s’agit d’un homme dans six cas. Sur les sept cas observés en place, quatre ont livré un équipement militaire : pour trois d’entre eux, il s’agit d’armes d’hast, et pour le quatrième, ce type d’arme est associé à un poignard. Ces tombes sont donc presque exclusivement masculines et quatre des six hommes semblent assumer une fonction militaire. Les deux hommes restants sont tous deux particuliers. L’un a eu le visage découpé lors d’une intervention peu postérieure à son inhumation (Bonnabel et Boulestin 2008), le second a été inhumé avec un bracelet en bronze (ce qui est un objet généralement féminin, mais porté souvent en paire chez les femmes, cf. infra paragraphe 3.2.3.) et avec un ensemble de pendeloques constitué d’un os perforé, de deux anneaux en bronze et d’un élément de fer, tant de particularités faisant de ce personnage un individu « hors du commun ».
24Deux sépultures du corpus présentent des trous de poteau. Dans l’une, les quatre creusements sont interprétés comme accueillant les montants d’une structure de type plate-forme ou lit, dans l’autre, les trous de poteau à la tête, associés à un coffrage, ne peuvent être interprétés sur un plan architectural. La tombe à quatre trous est celle d’un homme armé ; dans la seconde, l’état de conservation du squelette ne permet pas d’identifier le sexe du défunt ; la présence d’armement est cependant notable.
25Pour La Tène A-B, une seule sépulture à banquette a été identifiée, elle a accueilli un enfant.
26Les tombes les plus complexes sont constituées de plusieurs de ces éléments, banquettes, trous de poteau (un cas à Reims « La Neuvillette ») et encoches (un exemple à Witry les Reims). Dans les deux cas, il s’agit de tombes féminines très ostentatoires et datées de l’Aisne-Marne IIIB-IIIC, La Tène B.
2.1.3. À La Tène C
27À La Tène C, notre corpus issu des fouilles récentes se rétrécit considérablement ; une seule des nécropoles de La Tène A-B fouillée récemment a livré au moins une tombe de La Tène C (Auve). Les nécropoles cèdent la place aux petit groupes de tombes mis en évidence dans le sud de l’Aisne-Marne (Bussy-Lettrée « La Basse Cour » et « En Haut les Gravelles », Perthes « Les Essarts »), auxquels on doit ajouter des tombes isolées (Perthes « Les Essarts » et « La Grande Pièce »), ou appartenant à un ensemble plus grand non appréhendé (Bussy Le Château « Le Bout des Forces »), ainsi qu’un groupe de sépultures installé dans une ancienne carrière d’extraction en dehors de l’aire culturelle de l’Aisne-Marne (Lavau « Les Corvées »). L’ensemble ne regroupe que vingt-quatre défunts. Comme nous l’avons noté en chapitre 1, ces groupes ont tous un sex ratio totalement déséquilibré, en faveur des femmes pour le sud de l’Aisne-Marne, et des hommes pour l’ensemble de Lavau.
28Le contour des fosses est plus fréquemment arrondi aux petites extrémités qu’à La Tène A-B. Sur le site de Lavau, les tombes ont des extrémités arrondies, près du corps, la seule sépulture féminine ne se distinguant pas des masculines. Au sud de la zone Aisne-Marne, une seule des seize sépultures est identifiée comme masculine à Perthes « Les Essarts » ; elle est également arrondie aux petites extrémités, mais de très petites dimensions. Le crâne, les membres supérieurs et les pieds de cet homme sont en contact avec les parois de la fosse, ce qui le distingue nettement des trois fosses féminines du site, de grandes dimensions. Les différences entre les tombes féminines et la tombe masculine (tombe masculine trop courte pour le grand corps et pas d’objet personnel ou de dépôt), couplées à certains indices biologiques mettant par ailleurs en évidence la possibilité d’un groupe apparenté, ont permis de poser la question d’une position subalterne de cet homme dans la famille (Bonnabel et Paresys 2002).
29Parmi les trois tombes à banquettes identifiées dans notre corpus de La Tène C, l’une est, comme pour l’exemple de La Tène A-B, une tombe d’enfant. Les deux autres sont féminines et, dans les deux cas, elles sont les sépultures les mieux pourvues en mobilier de leur groupe.
30Ces fosses à banquette s’inscrivent au sein de groupes sépulcraux dominés par la présence de tombes féminines présentant d’autres indices d’ostentation ou de richesse. En effet, à Bussy-Lettrée « La-Basse-Cour » et « En Haut-Les-Gravelles », à Bussy-le-Château et à Perthes, des tombes féminines peuvent être aménagées de banquette (pour les deux sites de Bussy-Lettrée) ou coffrée (Perthes), ou être creusée au sein d’un enclos carré (Bussy-Le-Château). Ces femmes portent des accessoires particuliers (rasoir, fusaïole), voire luxueux (ceinture à anneaux de bronze à Bussy-Lettrée « La Basse Cour » et Bussy-Le-Château, perles de verres). Les sépultures du groupe de Lavau, a contrario, essentiellement masculines, ne présentent aucun indice ostentatoire dans l’architecture des tombes et quasiment aucun mobilier (Durost et al, 2007). Ces sépultures expriment une rupture nette dans les pratiques funéraires et surtout dans la représentativité de la population inhumée au sein des espaces funéraires à l’entrée de La Tène C.
31La faiblesse du corpus des tombes architecturées de La Tène A à La Tène C en rend l’interprétation délicate. La répétition de certaines caractéristiques tend néanmoins à les inscrire dans la norme funéraire puisqu’elle traduit une forme de codification. Le lien entre les encoches, le genre masculin et l’affichage par le dépôt d’arme d’un statut militaire doit être souligné même si l’enrichissement du corpus est nécessaire pour l’infirmer ou le confirmer. De la même façon, il est notable que les tombes qui nous paraissent comme les plus complexes et architecturées soient féminines et appartiennent à La Tène B, précédant de peu les tombes féminines « riches », à banquette, de La Tène C. Si ces observations n’ont rien de statistique, il paraît nécessaire aujourd’hui de les mettre en exergue, quitte à en modifier la proposition au fil des prochaines opérations de fouille.
2. 2. Une apparente mise en scène de la sépulture
32Au Hallstatt, l’impression de mise en scène lors du dépôt des différents éléments n’apparaît pas de manière aussi flagrante qu’à La Tène ancienne. Les corps sont le plus souvent centrés et les fosses, nous l’avons vu, souvent étroites. En outre, les dépôts de céramique, qui font l’objet d’organisations stéréotypées lors des phases suivantes, sont exceptionnels. Dans ce corpus, les vases accompagnent les deux tombes féminines les plus ostentatoires, aux fosses surdimensionnées, de Saint-Étienne-au-Temple et Plichancourt. Un troisième cas est une des deux sépultures masculines à arme de Plichancourt. Dans ces trois cas, espace du cadavre et du vase ne se distinguent pas nettement en plan et peuvent être superposés entre eux indiquant dans ce cas soit l’existence d’un système de surélévation de type brancard, lit ou plate-forme avec vase en dessous, soit l’existence d’un couvercle avec vase au dessus. Bijoux ou accessoires vestimentaires peuvent être retirés à la trépassée et posés sur son corps (Paresys et al. 2009 p. 29) ou à ses côtés (fig. 2, n° 61), mais le plus souvent ils sont portés. Les armes peuvent être à côté de l’homme ou sur son corps, leur position ne paraissant pas non plus répondre à des règles strictes. À Saint-Étienne-au-Temple, sur cinq cas de dépôt de quartier de viande ayant laissé des os trois sont faits sur ou contre le membre supérieur droit. Ils concernent un homme, une femme et un enfant : cette disposition ne présente donc aucun lien avec le genre. À plusieurs reprises, que ce soit à St Étienne ou à Plichancourt, la faune repose dans le comblement, plus haut que les autres éléments, et paraît être, à l’origine, disposée en hauteur, éventuellement sur la couverture du contenant funéraire, mais sans distinction de genre.
33Durant La Tène A-B, les éléments qui constituent la tombe et leur disposition paraissent répondre à des règles précises : le défunt peut être décalé ou non vers un côté de la fosse, ses accessoires personnels, en fonction de leur nature, peuvent être portés (bijoux, accessoires vestimentaires, poignard qui contrairement aux autres armes peut paraître suspendu au corps) ou déposés (armement et peut-être trousse de toilette, rares outils) ; des dépôts alimentaires (vaisselle de table, quartier de viande) sont placés à ses côtés, éventuellement dans des contenants spécifiques (coffres, paniers), ou parfois sur le couvercle du contenant funéraire, notamment pour les quartiers de viande. L’organisation des différents éléments peut légèrement varier en fonction des nécropoles. En revanche, cette apparente mise en scène de la tombe, qui détermine un emplacement spécifique à chacun de ses constituants, ne paraît en aucun cas varier en fonction du genre du défunt, si ce n’est, bien entendu, le dépôt d’armes de genre masculin. Un certain nombre de tombes accueillent simultanément plusieurs morts. La disposition des trépassés entre eux peut paraître signifiante, dans certain cas : l’un des décédés semble en position centrale tandis que le second paraît disposé en fonction du premier. C’est le cas notamment d’un périnatal à Brienne-sur-Aisne « La Croizette » déposé en position naturelle, recroquevillé sur le ventre, le visage appuyé dans la zone du sein droit de la défunte. On est tenté d’y voir l’expression d’une relation mère/enfant (ne correspondant pas forcement à la réalité, cette mise en scène étant symbolique). Dans ce cas, le genre du défunt et sa fonction sociale (mère) sont signifiés par la disposition des corps. D’autres exemples a contrario mettent l’accent sur la symétrie entre les deux personnes, comme sur le même site où deux hommes sont inhumés main dans la main. Si ces différentes tombes expriment un lien social entre les décédés, en dehors de l’exemple de la « mère », le reste ne paraît pas lié au genre.
34À La Tène C, le corps est centré dans la fosse, le dépôt de céramique est à nouveau exceptionnel puisqu’il ne concerne qu’une seule des tombes, tout comme le dépôt d’arme, tandis que le dépôt de faune est absent. Cela limite donc les possibilités de mise en scène. Le seul dépôt de céramique se retrouve en partie en avant du corps d’une défunte, et suggère à nouveau, comme au Hallstatt, qu’il résulte d’une superposition. Le seul exemple d’inhumation simultanée concerne deux enfants, dont un incinéré.
35Des règles évidentes et particulièrement codifiées d’organisation dans la tombe (le ou les défunts, armement, dépôts alimentaires) sont spécifiques de La Tène A-B. Elles indiquent une organisation particulière des funérailles, où les différents éléments sont disposés successivement et en fonction les uns des autres, selon un rituel. Cette volonté d’organiser les dépôts successifs en un plan horizontal tend à indiquer la présence de personnes assistant à cette mise en scène pour elles signifiante. Les dépôts d’armes et alimentaires au Hallstatt ou de vases à La Tène C sont très rares et paraissent davantage organisés selon d’autres règles et, en particulier, une logique privilégiant la superposition à l’organisation horizontale. Ces variations ne paraissent pas liées au genre des défunts.
2.3. Position des défunts
36Au Hallstatt comme à la période suivante, la position du corps est le plus souvent très standardisée, le décédé étendu sur le dos, visage au zénith, les membres supérieurs et inférieurs en extension, les mains de part et d’autre du haut des cuisses, sans que les femmes ne paraissent se distinguer des hommes. Cependant, trois fois sur vingt-six, les mains ont été déposées en avant du pubis, et il s’agit, à chaque fois, de défunts masculins.
37Durant La Tène A-B, la position des cadavres est également fortement standardisée : ils sont étendus sur le dos, avec lorsque la position primaire du crâne est identifiable, dans la plupart des cas le visage au zénith. Les membres sont allongés, les mains en position naturelle de part et d’autre du haut des cuisses, reposant plus ou moins sur la paume et le côté. Le corpus plus important autorise le calcul de pourcentages (fig. 7).
38Le graphique présente les pourcentages par rapport à la totalité des hommes ou des femmes, et accentue ainsi la différence entre les deux genres. En effet, si ce graphique permet de montrer clairement la différence entre positions principales et position plus rares, les femmes sont systématiquement moins représentées que les hommes dans les positions dominantes car le calcul se fait en fonction de la totalité des femmes et qu’elles sont par ailleurs un peu moins nombreuses que les hommes.
39Si, pour davantage de précision, on prend en compte uniquement les femmes observables, 88 % d’entre elles (soit cinquante-quatre femmes déterminées de manière « certaine ») ont le membre supérieur droit en extension, pour 9,2 % ce membre est en position fléchie selon un angle obtus, une seule femme a ce membre fléchi selon un angle proche de 90°, et les autres positions telles que le membre fléchi selon un angle aigu ou hyper-fléchi ne sont jamais représentées. Le membre supérieur droit des hommes est encore plus fréquemment en extension, avec 94 % des hommes « certains » concernés. Le membre supérieur gauche présente davantage de variations de positions : observable cent-soixante-quinze fois, il est dans 85 % des cas en extension, pour 78 % des femmes observables et 87 % des hommes observables. Comme dans le cas précédent, les femmes paraissent légèrement plus soumises aux variations que les hommes. La position du membre fléchis selon un angle obtus est proportionnellement plus importante qu’à droite et conserne un peu plus de femmes (onze individus) que d’hommes (sept individus), et les positions aigues ou hyperfléchies, bien qu’exceptionnelles, sont observées sur ce membre supérieur gauche.
40Pour les mains, les variations sont un peu plus importantes, même si la position « de part et d’autre des cuisses » est effectivement la plus représentée. En dehors de cette position dominante, les variations paraissent cependant répondre à certains critères et, ainsi, s’inscrire également dans une norme. Il est difficile de conclure sur un échantillon aussi restreint, mais l’on peut noter que la main droite dans l’aine est observable pour cinq défunts, dont quatre femmes provenant toutes de la nécropole de Val-de-Vesle. Sur le petit ensemble de Champfleury, parmi les trois femmes inhumées, deux ont la main gauche sous les fesses. Cependant, en dehors de ces cas, ces positions rares paraissent distribuées de manière aléatoire. La main gauche pourrait là encore être davantage sujette aux variations que la droite puisque dix positions différentes sont observables contre sept pour la droite.
41La position des membres inférieurs traduit également l’existence d’une position nettement dominante, puisque 89 % des femmes observables ont le membre inférieur droit en extension contre 93 % des hommes observables, tandis que pour le membre inférieur gauche, cette proportion atteint 90,7 % pour les femmes et 95,6 % pour les hommes. Constatons là encore, que les femmes sont davantage sujettes aux variations, c’est-à-dire qu’elles ont plus souvent les membres inférieurs fléchis que les hommes.
42Lors de La Tène C, la position dominante reste la même que pour les phases précédentes. Sur un même ensemble, hommes et femmes sont difficilement comparables puisque ces ensembles sont totalement déséquilibrés. Signalons cependant que le seul homme de Perthes est le défunt dont la position sort de la règle majoritaire, tandis que la position des défunts masculins de Lavau présentent de nombreuses variations, la femme et un seul des hommes étant disposés de manière plus classique ; mais n’oublions pas que cet ensemble est extérieur à l’aire culturelle de l’Aisne-Marne.
43Ce qui frappe donc dans la position des corps, c’est l’aspect extrêmement répétitif d’une position dominante qui tolère quelques exceptions, le membre supérieur gauche, à La Tène A-B, pouvant davantage être sujet à variations de positions chez la femme peut-être davantage que chez l’homme. Cette différence entre les genres pourrait s’inverser aux périodes antérieure et postérieure. Ces résultats doivent être considérés avec prudence car dès que l’on sort du traitement majoritaire, les cas restent rares ou exceptionnels. Cette différence, cependant sensible à La Tène A-B, peut être interprétée de manières diverses. Il est possible d’y voir la nécessité pour l’homme de porter la « tradition » comme dans beaucoup de sociétés notamment patriarcales. Si ces variations sont signifiantes, l’on peut aussi proposer qu’un discours plus complexe soit élaboré pour les tombes féminines. C’est le cas par exemple des mains gauches sous les fesses, dont la disposition est très clairement intentionnelle. La volonté de distinguer deux femmes issues d’un même ensemble a probablement un sens. Les corpus du Hallstatt et de La Tène C, encore plus réduits, ne permettent pas l’élaboration d’hypothèse mais il est possible que, pour ces périodes, la position du corps des femmes réponde à des règles plus strictes que celle des hommes.
2.4. L’espace de décomposition et les contenants funéraires
44Durant le Hallstatt, le corps des défunts paraît installé en position de confort mais « maintenu ». Ils ne sont jamais « étalés », et si le haut n’est pas toujours contraint, il paraît tout au moins « contenu » (fig. 5), les humérus contre les côtes, les avant-bras contre les hanches, les mains contre les cuisses. Des indices de contenant rigide, en particulier de coffrage, et de couverture de la fosse sont également observables. Aucune différence liée au genre n’est perceptible.
45Lors de La Tène A-B, comme pour le reste de la pratique funéraire, de manière extrêmement standardisée encore, la très grande majorité des espaces de décomposition s’inscrit dans ce que nous avons défini comme un « espace intermédiaire », c’est-à-dire correspondant à un espace maintenu vide jusqu’à un certain point de la décomposition, où la sédimentation s’est faite avant la totale disparition des éléments périssables, ou encore qui s’est comblé de manière différente en fonction des endroits de la tombe (Bonnabel 1997, p. 105). Dans l’état actuel de nos travaux, il ne paraît pas y avoir de différence liée au genre. Pour ce qui est de la reconnaissance des contenants funéraires, nous avons vu plus haut que certaines architectures de la tombe pouvaient avoir un lien avec le genre ; mais en ce qui concerne les autres éléments, rien ne semble apparaître.
46La couverture de la fosse est plusieurs fois attestée, tout comme l’existence de contenant rigide éventuellement mobile, ou certainement installé dans la fosse (coffrage). Nous ne pouvons pas aujourd’hui préciser davantage la typologie de ces contenants qui peuvent être étroits ou larges. Il ne paraît pas y avoir pour l’instant de lien avec le genre.
47Les indices taphonomiques d’enveloppes souples, associés aux accessoires vestimentaires en position primaire, indiquent l’existence très systématique de l’inhumation habillée pendant toute La Tène A-B. La recherche d’indices taphonomiques en fonction du genre pouvant témoigner de vêtements différents entre homme et femme n’a pour l’instant apporté aucun résultat. Au contraire, ce qui apparaît de manière très nette, c’est un point commun entre les genres qui, au même titre que la position des corps ou le type de dépôt dans la tombe, paraît répondre à une règle répandue. En examinant de manière systématique les pieds des défunts, nous nous sommes rendues compte qu’ils étaient très souvent l’objet de contraintes. Ces contraintes peuvent être de deux types, soit limitées à chaque pied, les éléments pouvant sortir du volume des chairs mais restant au sein d’un espace limité, soit contraignant les deux pieds dans un contenant paraissant leur être spécifique, le reste du corps ne subissant aucune contrainte (fig. 8). Cette répétition de l’observation nous a conduites d’une part à proposer le port de chaussures de manière très récurrente, mais également à proposer l’existence d’un geste d’enveloppement spécifique des pieds. Il pourrait s’agir par exemple, après le dépôt du corps, de replier sur les pieds un élément souple (manteau, couverture etc…).
48Lors de La Tène C, des fibules en fer, grosses pour la plupart, accompagnent de manière très fréquente (7 /11) les tombes féminines, et peuvent être associées à des fibules en bronze. Dans un des cas où aucune fibule en fer n’est présente (Bussy-Le-Château), l’une des deux fibules en bronze est de grandes dimensions, sur le thorax. Elle est alignée à une petite fibule en bronze en avant du crâne. Ces fibules sont le plus souvent sur l’axe de la colonne vertébrale dans la zone sternale. Elles pourraient avoir servi à fermer un manteau. Cependant, l’alignement de certaines fibules dans l’axe du corps, la position de celle de Bussy-Le-Château sur le crâne, ou la proximité dans deux cas à Perthes « Les Essarts » avec membre supérieur droit contraint, pourraient également plaider en faveur d’un enveloppement de type linceul. Sur ce dernier site, les restes d’un enfant présentant des effets de contrainte sur l’épaule associés à une fibule en bronze sur l’humérus, pourraient être l’illustration de cette pratique d’enveloppement du corps.
3. Équipement et dépôts
3.1. La confrontation genre-mobilier : approche globale (CM, MS)
3.1.1. Préliminaire
49Le corpus total pris en compte pour la question du mobilier et du genre, compte quatre-cent-trente-cinq sépultures réparties en vingt espaces funéraires d’ampleur très variable (fig. 1). Ces tombes couvrent toute la période retenue, du Hallstatt D à La Tène C1. En très grande majorité, il s’agit de sépultures à inhumations, mais quatre probables incinérations se démarquent, et quatre autres sépultures sont de rite incertain.
50Le cas des tombes à char n’a pas été considéré ici. Les espaces funéraires retenus en comptent seulement six - correspondant à neuf inhumations - dont deux inexploitables pour l’étude du mobilier (une arasée et une pillée). Ces quelques sépultures d’exception représentant des cas souvent complexes, elles seront traitées ailleurs en prenant en compte les travaux déjà réalisés sur le sujet (Verger 1994).
51Sur le plan chronologique, doit-on se limiter aux tombes bien datées ce qui implique que l’on écarte les tombes sans mobilier ou ayant un mobilier d’attribution chronologique incertaine ? Ou doit-on prendre celles-ci en compte en considérant l’occupation majoritaire du site auquel elles se rattachent ? Ce dernier choix gomme sans doute quelques nuances chronologiques des ensembles hétérogènes, comme le site de Auve « Le Chemin de Ternière » occupé entre La Tène A et La Tène C, mais s’accorde bien avec une approche par grandes étapes (Hallstatt D, La Tène A-B, La Tène B2-C).
52Beaucoup de pratiques liées au dépôt de mobilier à La Tène ancienne en Champagne ont déjà été observées à travers des publications détaillées de nécropoles comme celle de Manre et Aure par J.-G. Rozoy (Rozoy 1 987), ou à travers la synthèse de J.-P. Demoule (Demoule 1999), ou encore par le biais d’expositions (Charpy et Roualet, 1991) et de travaux sur des sujets plus spécifiques comme les couteaux (Piéchaud 1981). La question du genre a, en particulier, été abordée sous l’angle de l’équipement personnel. L’objectif principal de l’étude de ces objets en relation directe avec le défunt (équipement vestimentaire, parures, armements, accessoires divers…) est donc de voir dans quelle mesure les nouveaux ensembles traités viennent conforter les tendances perçues à travers les fouilles plus anciennes et permettent de consolider la définition d’une norme et l’appréhension de variations. Grâce au nouveau corpus, la mise en relation de la vaisselle et du genre peut se faire à une échelle plus large. Par ailleurs, un objet se présente comme un élément à signification double, le couteau. Selon le cas, il se présente soit comme un objet directement lié au défunt, soit plutôt comme un objet d’accompagnement lié spatialement à l’offrande alimentaire. Il fera l’objet d’une approche particulière.
3.1.2. Conservation et fiabilité des contextes
53Les contextes les moins fiables en raison d’une mauvaise conservation du dépôt mobilier ont été éliminés. On dispose alors d’un ensemble de trois-cent-onze tombes de conservation satisfaisante pour analyser les différents aspects de la relation qui unit les éléments mobiliers et le défunt en contexte funéraire.
54Une nuance doit être apportée par ailleurs en fonction du type de dépôt. Le dépôt métallique ayant plus souffert des pratiques de pillage, un total de cinquante-neuf contextes ne peut être pris en compte pour cette approche spécifique, alors que le dépôt céramique peut être intégré à l’analyse. Inversement, neuf tombes doivent être écartées de l’étude céramique (cas d’arasement en particulier), alors que l’équipement personnel est conservé de façon satisfaisante.
3.1.3. Corpus, genre et âge
55Sur le total, deux-cent-cinq sépultures ont fait l’objet d’une détermination du genre d’après l’étude biologique (deux-cent-huit en réalité, mais on mettra à part les rares cas où cela entre en contradiction avec le mobilier déposé). Les cas où la détermination était incertaine, soit trente-quatre individus (seize femmes et dix-huit hommes), ont été retenus comme exploitables et intégrés aux comptages en testant parfois la comparaison avec les valeurs obtenues sur le seul corpus des tombes déterminées avec plus de certitude. Sur les deux-cent-cinq sépultures, on compte quatre-vingt-seize sépultures féminines dont quatre-vingt-dix adultes, cinq adolescentes et une incertaine, et cent-neuf sépultures masculines dont cent-quatre adultes, quatre adolescents et un incertain.
56Parmi les tombes n’ayant pu faire l’objet d’une détermination biologique figurent celles d’enfants, trente dans le corpus et quatre sépultures dont la détermination est incertaine (enfant ou adolescent). Une sépulture de nourrisson figure en outre dans les ensembles de la fin du Premier Âge du fer. Par ailleurs, quatorze sépultures d’adolescents n’ont pas été déterminées du point de vue du genre. Le choix s’impose de traiter du cas de l’adolescence à part, comme de celui de l’enfance, et de ne croiser que ponctuellement et dans un second temps avec le genre, en observant si quelques indications ressortent d’une différence de traitement en fonction des genres entre adolescents et adultes.
57Parmi les trente-six sépultures adultes de genre indéterminé, et trois où l’hésitation existe entre adolescent et adulte, dix présentent un équipement personnel caractérisé qui permet de proposer un genre probable pour le défunt (six avec un mobilier féminin et quatre avec un mobilier masculin). Il en est de même de plusieurs tombes d’enfants (trois avec du mobilier féminin).
58Une association inhabituelle du mobilier et du genre est cependant envisageable. Elle apparaît attestée dans trois cas qui restent soumis à discussion car, dans deux d’entre eux, la détermination biologique est incertaine, et dans le troisième il s’agit d’un adolescent. Ces trois tombes seront donc traitées à part, évoquées de manière ponctuelle
3.1.4. La pratique globale du dépôt de mobilier
59Le choix de déposer ou non du mobilier est d’abord une pratique générale qui évolue au cours du temps. Si le dépôt d’équipement personnel est représenté durant toute la fourchette chronologique, le dépôt alimentaire (vaisselle, offrandes animales, couteau associé) connaît au contraire des variations extrêmes. Rare au début et à la fin de la période prise en compte, il est presque systématique dans la phase médiane, entre La Tène A récente et La Tène B1.
60Pour gommer l’impact de ces variations chronologiques dans le cas de la confrontation de la pratique et du genre, le choix a été fait de focaliser sur La Tène A-B (fig. 9). Seules les sépultures permettant la confrontation de toutes les informations ont été retenues, soit 184 au total.
61On observe alors que, quels que soient l’âge et le genre, les tombes bien conservées dépourvues de mobilier durant cette période sont très peu nombreuses. Elles apparaissent plus fréquentes dans le cas des adolescents, mais le corpus est trop réduit. Les sépultures plus courantes présentent à la fois du mobilier personnel et un dépôt évoquant l’alimentation, en général de la vaisselle associée dans plus de la moitié des sépultures à de la faune. Toutefois, les cas des enfants et des adolescents se démarquent. Ils sont plus fréquemment dotés d’une seule catégorie de mobilier. Dans le cas des enfants, les sépultures dotées seulement d’un dépôt lié à l’alimentation sont même majoritaires.
62Chez les adultes, il apparaît une légère nuance en fonction des genres. Ainsi, les hommes sont plus souvent dotés que les femmes du seul dépôt suggérant l’alimentation, et plus rarement du seul dépôt d’objets personnels ou des deux catégories de dépôt. En outre, sur les dix-sept sépultures masculines ayant reçu seulement un dépôt évoquant l’alimentation, il s’agit dans treize cas à la fois de faune et de céramique et dans quatre cas de céramique seulement. Cette fréquence plus grande de la faune dans les sépultures d’hommes contenant seulement un dépôt alimentaire donne le sentiment que l’on compensait peut-être dans une certaine mesure pour les hommes l’absence d’équipement personnel par la présence de faune, mais cela reste à aborder plus finement.
3.2. L’équipement personnel (CM)
3.2.1. Le respect d’une norme
63Entre le Hallstatt D et La Tène C, les genres masculin et féminin s’expriment très lisiblement dans les dépôts métalliques, constitués principalement d’objets personnels. De manière générale, le genre est surtout marqué par l’utilisation d’alliage cuivreux chez les femmes et les enfants (éléments de parure, accessoires vestimentaires) et de fer chez les hommes (armement entre autres). Le dépôt métallique reste une pratique usuelle, avec un peu plus de 75 % des contextes. La quantification varie selon le sexe, l’âge et la chronologie (fig. 10).
3.2.2. Genre et dotation personnelle au Hallstatt D
64Deux nécropoles appartiennent à cette phase - Saint-Étienne-au-Temple « Le Champ Henry » et Plichancourt « Les Monts » (Marne) - comptant 30 sépultures exploitables pour l’approche sur l’équipement personnel. Seulement 10 % des tombes en sont dépourvues. L’approche quantitative souligne une dotation plus fréquente des femmes, et dans une moindre mesure des enfants. Elle est constituée pour l’essentiel d’éléments de parure (nombreuses armilles, collier de perles, bracelets de perles, boucles d’oreilles…) et d’accessoires vestimentaires, mais très peu d’éléments de ceinture sont représentés dans le corpus. Le mobilier d’accompagnement masculin est caractérisé par des pièces d’armement et éléments divers (Plichancourt « Les Monts » sép. 53 ; Saint-Étienne-au-Temple « Le Champ Henry » sép. 26).
65Concernant les fibules, elles, sont fréquentes, avec dix-sept exemplaires issus pour l’essentiel de sépultures de femmes (treize contextes) et d’enfants (deux cas). Deux cas seulement se démarquent, un adolescent masculin (Saint-Étienne-au-Temple « Le Champ Henry », sép. 5) et un homme adulte (Plichancourt « Les Monts », sép. 65). La seule fibule en fer est issue d’une tombe féminine (Plichancourt « Les Monts », sép. 68) et l’exemplaire associant fer et alliage cuivreux provient d’une sépulture vraisemblablement féminine (Saint-Étienne-au-Temple « Le Champ Henry », sép. 6).
66L’absence de torque dans les ensembles retenus est à noter car des exemplaires tubulaires sont connus dans les nécropoles régionales comme à Chouilly « Les Jogasses » (Hatt et Roualet 1981, p. 21). Ce défaut de torque pourrait être corrélé à la présence de perles, exclusivement déposées là encore dans les tombes féminines (perles en or dans la tombe 61 de Plichancourt « Les Monts », en ambre, corail ou verre bleu dans les sépultures 6, 8 et 18 de Saint-Étienne-au-Temple « Le Champ Henry). Les boucles d’oreille restent rares et demeurent l’exclusive de la sphère féminine (Demoule 1999).
67Des spécificités dans l’équipement féminin existent au Hallstatt D ; elles s’illustrent dans la sépulture 61 de Plichancourt « Les Monts » : anneaux de cheville et ceinture déposés à la droite de la défunte, présence de deux perles en or, de bracelets en lignite, dépôt simultané de trois fibules en alliage cuivreux et corail composent cette dotation exceptionnelle.
3.2.3. Genre et dotation personnelle à La Tène A-B
68La dotation atteint un équilibre entre les genres dès La Tène A précoce, signalant à la fois une modification et une certaine standardisation des pratiques funéraires. La composition des dépôts mobiliers issus des contextes attribués à La Tène A-B confirment les grandes tendances esquissées à la période précédente et observées dans les nécropoles régionales (Rozoy 1987 ; Demoule 1999 ; Charpy et Roualet 1991).
69La parure féminine se compose d’un torque et d’une paire de bracelets en alliage cuivreux, portée de manière symétrique (fig. 11). Le port du torque concerne 35 % des sépultures féminines et environ 10 % des tombes d’enfants. Ces valeurs s’inscrivent au-dessus de celles observées dans le domaine Aisne-Marne (Demoule 1999). Cette surreprésentation tient en partie à la méthode qui se concentre sur les contextes correctement préservés.
70Les quarante-trois torques sont en alliage cuivreux, à l’exception de deux exemplaires en fer, dont un issu d’un contexte incertain. Ils apparaissent comme l’exclusive de la sphère féminine (Demoule 1999). Les torques issus des tombes d’enfants de plus de 5 ans (Val-de-Vesle « Moncheux », tombe 104 et 131/1 et Sarry « Les Auges » sépulture 303) sont en fer et/ ou en alliage cuivreux. Cela n’est pas sans rappeler plusieurs exemples retrouvés en contextes chronologiques similaires au sein des mêmes classes d’âge dans l’Aisne et l’Oise (Desenne et al. 2007). Ces données posent la question de l’âge auquel le genre est affiché.
71En ce qui concerne les bracelets, quatre-vint-six exemplaires ont été mis au jour dans cinquante-trois contextes, essentiellement féminins (80 %). Le port d’un bracelet unique est répertorié dans onze sépultures féminines. Le port à gauche est privilégié dans sept cas sur les neuf localisés. La prépondérance de l’alliage cuivreux, avec dix cas sur onze, confirme l’association de ce dernier à la sphère féminine. De même, les bracelets sont dans 60 % des cas portés de manière symétrique.
72Les perles et pendeloques sont présentes dans seulement deux contextes fiables. Les éléments qui paraient la défunte 166 de Saint-Memmie « 9, rue du Pont Alips » (perles en verre bleu et blanchâtre) étaient enfilés autour d’une tige en fer et associés au torque (Achard-Corompt et al. 2007).
73L’armement reste l’apanage des hommes, avec trente-six contextes à La Tène A-B (fig. 12). Ces derniers portent parfois un bracelet en exemplaire unique, généralement en fer. La parure symétrique chez les hommes est exclue. La localisation préférentielle généralement observée ne peut être confirmée ici, au regard du faible nombre de cas concernés (deux à gauche et un seul à droite). Les trois rasoirs, issus de contextes masculins, confirment la tendance générale observée dans tout le domaine Aisne-Marne.
74Comme noté dans plusieurs nécropoles régionales, le dépôt unique de fibule est la pratique la plus courante. Les fibules en fer se rencontrent plus fréquemment chez les hommes (quinze contextes) que chez les femmes (six contextes). La dotation similaire dans quatre sépultures enfantines et une d’adolescente (Brienne-sur-Aisne « La Croizette », sép. 6) pose là encore la question de l’âge de la définition du genre. À noter que le dépôt unique d’une fibule en alliage cuivreux n’est pas corrélé au genre de l’individu (cinq femmes, quatre hommes et un enfant).
75Le dépôt simultané d’une paire de fibules en alliage cuivreux s’inscrit dans la tendance observée dans la dotation féminine (trois contextes) et ne semble pas lié à l’avancement dans l’âge. L’association de fibules en fer et alliage cuivreux se rencontre à Witry-les-Reims « La Comelle », sép. 27 et Dommartin-Lettrée « Les Coupes » tombe 113, toutes deux appartenant au genre féminin. La seule paire de fibules en fer est également issue d’une sépulture féminine (Witry-les-Reims « La Comelle » tombe 22). L’association de trois fibules en alliage cuivreux reste rare (trois cas), concernant deux femmes adultes, une adolescente (Dommartin-Lettrée « Les Coupes » sép. 110-2). Il n’est pas possible en l’état actuel des données de préciser la topographie du dépôt et donc leur usage, vestimentaire ou fermeture d’une enveloppe souple. Par ailleurs, la distribution géographique, au regard du corpus, n’apparaît pas comme un élément de différenciation sexuelle lié à la mode vestimentaire.
76Certaines catégories de mobilier sont déposées indépendamment du genre du défunt. C’est le cas des nécessaires de toilette qui, bien que représentant dans le cas présent une infime partie du mobilier (moins de 3 %), se rencontre à la fois chez les hommes et chez les femmes, sans localisation préférentielle, et ce dans l’ensemble du domaine Aisne-Marne (Demoule 1999, p. 187 ; Piéchaud 1981, p. 138-152).
77La seule tombe où avec une certaine certitude sexe biologique et genre mobilier apparaissent contradictoires est celle d’un grand adolescent de sexe masculin doté d’un torque et d’une boucle d’oreille, déplacée (Witry-les-Reims « La Commelle » tombe 9). Cette association peut être mise en relation avec celle, ponctuelle, du torque et de l’armement évoqué par J.-P. Demoule (Demoule 1999, p. 189).
3.2.4. Genre et dotation personnelle à La Tène C
78La constitution des dépôts mobiliers est perceptible à travers dix contextes : un enfant, un adolescent de sexe indéterminé, trois hommes et cinq femmes. Les modifications dans la dotation reflètent les changements observés par ailleurs dans le domaine Aisne-Marne (Demoule 1999, p. 140). La raréfaction du torque est en effet perceptible à travers l’unique exemplaire mis au jour en alliage cuivreux et fer (Perthes « Les Essarts » sép. 364). Deux bracelets sont portés en exemplaire unique par un enfant et une femme. Une seule tombe a livré des perles de verre, mais la faible représentation de ces objets et des pendeloques, qui complètent parfois l’équipement à La Tène C (Demoule 1999, p. 141), tient plus au biais méthodologique qu’à un réel défaut de cette catégorie. Les accessoires vestimentaires sont encore bien présents avec des ceintures à chaînette et/ou maillons en alliage cuivreux. Les fibules (neuf en fer et huit en alliage cuivreux) sont déposées indépendamment du genre de l’individu. Toutefois, les deux contextes où il est possible d’observer un dépôt simultané de trois et cinq fibules concernent des femmes (Bussy-Lettrée « En Haut la Gravelle », sép. 121 et Bussy-le-Château « Bout des Forces », sép. 2506 avec une dotation de trois exemplaires en fer et deux en alliage cuivreux). La présence de l’armement est illustrée par la tombe d’un homme adulte (Auve « Le Chemin de Ternières », sép. 104/3), d’où sont issus des éléments de bouclier et d’épée dans son fourreau. L’unique rasoir est issu d’une sépulture féminine. Ce cas isolé ne permet de déduire une quelconque modification dans l’attribution de cette catégorie.
3.3. Le cas des couteaux (CM, MS)
79Les vingt-six couteaux du corpus validé sont issus de contextes attribués à La Tène A-B, sauf deux cas attribués au Hallstatt D. Ils sont absents du mobilier durant La Tène C. Le couteau figure dans les sépultures soit en relation directe avec le corps du défunt, éventuellement porté par lui, comme une arme et/ou un outil, soit plutôt lié spatialement à l’offrande de faune ou au dépôt de vaisselle ce qui n’exclut pas qu’il soit aussi un objet personnel (fig. 13). Dans un cas, la localisation reste à préciser. Sur le total, dix couteaux figurent comme effets personnels et quinze comme éléments du dépôt évoquant l’alimentation.
80Dans les deux sépultures du Hallstatt D, l’une masculine et l’autre féminine, les couteaux figurent comme équipement personnel. Il est à noter que cette tombe de femme, la sépulture 10 de Saint-Étienne-au-Temple, est la seule de ce genre dotée d’un couteau lié à la personne (Paresys, Moreau, Saurel et al. 2009). Cet objet est placé le long du bras et du torse, du côté opposé à l’offrande alimentaire.
81Les couteaux durant La Tène A-B sont présents dans vingt-quatre sépultures, nettement plus fréquents auprès des hommes (quinze cas) que des femmes (cinq cas). Les enfants ne sont pas exclus, avec deux couteaux recensés. Dans un cas, à Sarry, le couteau est associé à une tombe simultanée d’homme et de femme et l’attribution est impossible. Comme cela a souvent été observé, le couteau porté est exclusivement lié aux tombes masculines adultes, alors que le couteau associé aux offrandes alimentaires peut figurer dans toutes les sépultures sans distinction d’âge ou de genre (six contextes masculins, cinq féminins et deux enfants) (Piéchaud 1981, p. 73).
82Toutefois, parmi les huit nécropoles où le dépôt de couteau est représenté, des spécificités se dégagent, si l’on compare en particulier deux ensembles précoces remontant à La Tène A. A Val-de-Vesle « Moncheux », les couteaux sont issus de tombes masculines et identifiés comme équipement personnel, alors que les couteaux mis au jour dans la nécropole de Sarry « Les Auges » sont a contrario exclusivement associés au dépôt alimentaire quel que soit le genre et l’âge du défunt (cinq femmes, trois hommes, un enfant). Par ailleurs, l’exemple de Sarry conforte une observation déjà faite sur la fréquence du dépôt des couteaux dans les environs de Châlons-en-Champagne (Demoule 1999, p. 186). La pratique locale apparaît dans ce domaine très marquée.
3.4. Le dépôt de vaisselle (MS)
3.4.1. Une pratique variable dans le temps, le cas du Hallstatt D
83Pour aborder la question du genre, il est nécessaire de prendre en compte au préalable la tendance générale. Pour le Hallstatt D et pour La Tène C, le dépôt de vaisselle est un acte rare (sauf si la vaisselle est en matériau périssable) (Saurel 2009, p. 248). À la fin du Premier Âge du fer, les dépôts de vaisselle se démarquent non seulement par leur rareté (10-15 %), mais aussi par le petit nombre de vases, leur taille réduite et le type de récipient déposé. Les cas sont si peu nombreux qu’il est difficile de proposer une confrontation au genre de l’inhumé. Si, à Saint-Étienne-au-Temple, les trois tombes dotées de céramique sont une tombe d’enfant, une de femme adulte et une autre d’un adulte peut-être aussi de genre féminin - ce qui pourrait induire une éventuelle relation locale au genre et à l’âge - à Plichancourt, il s’agit d’une tombe d’homme et d’une de femme (Paresys, Moreau, Saurel 2009). Durant cette période, le dépôt d’accompagnement suggérant l’alimentation peut se présenter sous la forme exclusive d’offrandes animales, ce qui sera rarissime par la suite, le dépôt de vaisselle devenant quasi systématique. Si l’on prend en compte tous les éléments évoquant l’alimentation, cela semble confirmer la tendance d’une relation entre tombe féminine et dépôt alimentaire à Saint-Étienne-au-Temple (trois tombes avec faune et deux avec céramique sur dix tombes de femmes et une seule tombe avec faune sur six tombes d’hommes). À Chouilly "Les Jogasses" (Marne), au Hallstatt D, des céramiques sont représentées dans des tombes à armes, comme dans des tombes à parure féminine et aucun type céramique ne paraît ressortir comme spécifique d’un genre (Hatt et Roualet 1976).
3.4.2. Approche quantitative à La Tène A-B
84Environ 10 % des tombes d’adultes sont dépourvues de vaisselle, mais la proportion est légèrement inférieure pour les hommes (fig. 14). Par ailleurs, la proportion de sépultures sans dépôt céramique est un peu plus élevée pour les enfants et les adolescents. La distinction se marque non seulement par le fait du dépôt mais aussi par le nombre de récipients, avec pour les enfants et les adolescents environ 60 % de tombes pourvues de un ou deux récipients seulement.
85Une approche de la norme générale concernant le nombre de récipients dans les sépultures des adultes a permis de mettre en valeur une rupture à partir de quatre vases et plus, les tombes ainsi nanties étant plus rares (Saurel 2009, p. 249). La différence alors envisagée dans le traitement des hommes et des femmes se confirme par la confrontation directe avec le genre. Ainsi, les trois-quarts des femmes adultes pourvues de vaisselle ont reçu un dépôt de un à trois vases, alors que pour les hommes, la majorité se situe entre un et quatre vases. La rupture se situe donc bien à partir de quatre récipients pour les femmes, mais pour les hommes, c’est à partir de cinq récipients (même si le dépôt de trois récipients est prédominant) ce qui traduit une dotation en moyenne plus élevée.
86Cette vision est à nuancer car quels que soient le sexe et l’âge, les tombes à cinq vases et plus (jusque dix) représentent environ 15 % des sépultures avec céramique, un peu plus chez les femmes ce qui pourrait témoigner d’un rôle légèrement plus fort de marqueur social de la vaisselle pour les sépultures féminines. Toutefois, le recoupement avec les autres indicateurs, en particulier l’équipement personnel, est nécessaire pour interpréter plus avant ces valeurs. On peut signaler que les tombes à char non prises en compte ici figurent dans cette catégorie à plus de cinq récipients.
3.4.3. Genre, âge et morphologie des vases
87Pour La Tène A-B, les vases de formes haute et moyenne (formes fermées ou ouvertes profondes) peuvent être répartis dans quelques classes morphologiques simples en fonction du profil, ouvert ou fermé, de la forme du corps, arrondi ou anguleux, et de la présence ou non d’un col bien marqué (Demoule 1999). Une catégorie un peu particulière à fond large et forme arrondie (piriforme) a été dissociée des cinq grands ensembles : carénés à col, carénés sans col (situles), arrondis à col, arrondis sans col et formes simples ouvertes et profondes (tulipiformes…).
88Le croisement de ces formes avec le genre et l’âge des individus donne des résultats significatifs en intégrant l’ensemble du corpus (fig. 15). Globalement, les vases à col, anguleux ou arrondis, sont sensiblement plus fréquents dans les tombes féminines et les formes simples ouvertes ou plus fermées (arrondies sans col) sont mieux représentées dans les tombes masculines. Si l’on compare les ensembles de Sarry "Les Auges" et de Val-de-Vesle "Les Moncheux", en restant prudent étant donné les corpus plus limités, on retrouve cette tendance, mais avec des nuances. À Val-de-Vesle, les tombes de femmes ont un peu moins de formes carénées à col et plus de formes carénées sans col. Pour les formes arrondies ou les formes simples ouvertes, la différence reste très marquée avec une très grande majorité de formes simples dans les tombes d’hommes, alors que les formes arrondies sans col ne sont que peu représentées dans cette nécropole et plutôt attestées dans des sépultures de femmes. À Sarry, les céramiques carénées, en particulier à col, sont globalement très présentes, mais encore une fois, les formes à col sont encore plus fréquentes pour les femmes. Il en est de même pour les vases arrondis.
89En ce qui concerne les adolescents, le corpus est réduit. Les différentes classes morphologiques sont représentées comme pour les adultes. Val-de-Vesle est le corpus le plus important de tombes d’adolescents. Les formes à épaulement anguleux y apparaissent nettement prédominantes. Toutefois, les quelques déterminations sexuelles indiquent une tendance assez similaire à celle des adultes en fonction des genres. Il y aurait à la fois une tendance liée à l’âge et une liée au sexe. En ce qui concerne les tombes d’enfants, seules quatre classes sont représentées et aucune tombe ne présente de forme arrondie sans col (toutefois il y a parfois proximité morphologique entre ces profils et les formes simples ouvertes curvilignes). Ce qui domine pour les enfants, c’est la surreprésentation des récipients situliformes - huit sur vingt-six vases, soit plus du quart - qui se retrouve dans les deux nécropoles illustrées.
90Un premier test réalisé sur la taille des récipients donne quelques résultats à préciser en prenant en compte les contenances précises. Les vases des tombes féminines sont en grande majorité des formes de taille petite ou moyenne, parfois très petite, plus rarement grande ou très grande. Les récipients des sépultures masculines ont un éventail de taille plus large et les vases de grande et très grande taille y sont mieux représentés. Inversement, dans les sépultures d’enfants, les petits vases sont nettement majoritaires. La dimension moyenne des récipients est clairement inférieure à celle des sépultures féminines. Pour les tombes d’adolescents, la tendance n’est pas clairement marquée, mais les grands récipients y sont exceptionnels.
3.4.4. La question des vases décorés
91La proportion des vases décorés n’a été évaluée que pour les formes hautes et moyennes (fig. 16) car les formes basses ne sont que très exceptionnellement ornées. Cette représentation varie d’abord en fonction des nécropoles. La comparaison avait déjà été faite et elle apparaît ici aussi par la mise en parallèle de Sarry et de Val-de-Vesle (Saurel 2009, p. 256). Les vases décorés sont ainsi beaucoup plus fréquents à Sarry qu’à Val-de-Vesle et diverses hypothèses peuvent être retenues, l’argument chronologique paraissant improbable pour ces deux nécropoles précoces : choix local, statut et richesse de la nécropole… La variation en fonction du sexe et de l’âge est donc surtout parlante à l’échelle de chaque nécropole. Dans l’ensemble, les tombes d’enfants présentent une proportion non négligeable de vases décorés. Dans la mesure où l’enfant bénéficie d’une sépulture et d’un dépôt de vaisselle, il n’est doté que de peu de récipients mais une attention particulière semble apportée au choix des vases.
92En ce qui concerne la confrontation hommes/femmes, une part un peu supérieure de vases ornementés figure dans les sépultures féminines au niveau général. Cela ne reflète pas la réalité pour toutes les nécropoles. À Sarry "Les Auges", on rencontre une plus grande proportion de vases décorés dans les tombes d’hommes.
93Une dizaine de vases peints en rouge, dont sept à décor rouge et noir, ont été retrouvés dans la zone rémoise à Reims « La Neuvillette » et à Witry-lès-Reims « Le Village, la Comelle ». Ils sont plus nombreux dans des tombes féminines (sept vases), que masculines, (trois vases). Toutefois si l’on ne prend en compte que les nombres de contextes, ils figurent dans trois tombes masculines et quatre tombes féminines dont une de détermination sexuelle incertaine. Le lien avec le genre est possible, mais non systématique et non assuré. Ces vases représentent donc plutôt un niveau de richesse car ils sont en général associés, comme on peut le voir à Witry dans la tombe 108 (fig. 12), à des tombes à l’équipement personnel abondant. Le nombre de vases, réduit dans cette sépulture, n’est donc qu’un indicateur à combiner avec la qualité des récipients.
3.5. Zoom sur la nécropole de Sarry "Les Auges" (cm, ms)
94À Sarry, un lien a priori contradictoire unit l’équipement métallique du défunt et le dépôt céramique : les tombes féminines dites « à parures complètes », torques et bracelets, présentent souvent un dépôt céramique d’apparence très modeste, en particulier une situle non décorée, voire grossière, ou un ou deux vases carénés de tailles réduites et dépourvus de décors (fig. 11). Les tombes masculines à armes, fers de lance pour l’essentiel, montrent de même des dépôts très modestes voire absents. À l’inverse, deux tombes d’homme livrent des services céramiques avec situles ornementés et ne sont que faiblement dotées de métal, un couteau pour l’une d’entre elles. Une tombe d’enfant présente de même un service de vaisselle riche et un couteau. Le statut, dans ce groupe, semble s’affirmer soit par l’équipement personnel, soit par le dépôt suggérant l’alimentation au sens large et ce dernier caractériserait plus couramment les tombes masculines. Cette dernière observation rencontre la tendance générale. On peut évoquer la possibilité que ces différences de traitement, en particulier dans les tombes masculines, reflètent différentes fonctions dans la société, mais cela reste à démontrer.
3.6 Les dépôts de quartiers de viandes (G.A.)
95Le dépôt d’offrande animale ne caractérise pas la totalité des tombes. Celles qui en contiennent sont inégalement réparties entre les nécropoles et relativement mal conservées. Ainsi, disposons-nous d’une petite soixantaine d’occurrences pour mener cette analyse.
96Il ressort une tendance affirmée de l’association préférentielle entre le mouton et les femmes d’une part, entre le porc et les hommes d’autre part (fig. 17). Certaines exclusions sont aussi apparues, telle que celle du bœuf seul et des femmes et l’exclusion de certaines associations d’espèces suivant les sexes comme les couples porc/bœuf et porc/mouton eux aussi jamais présents dans les tombes féminines. Dans l’ensemble, les cas d’associations d’espèces sont plutôt rares et représentent 14 % des occurrences.
97Les pièces de viande sont principalement l’épaule et le jambon tous mammifères confondus et l’on observe une association préférentielle des épaules avec les hommes et des jambons avec les femmes. Dans quatre cas seulement, les deux morceaux sont associés.
4. Implantation et organisation des sites
98L’implantation des sites de La Tène a fait l’objet d’une première approche dans un article récent et ne sera pas abordée ici (Desbrosse dans Bonnabel et al 2009).
99Les deux nécropoles du Hallsatt final du corpus présentent une organisation très différente l’une de l’autre. Plichancourt est structuré par un maillage souple s’appuyant sur des enclos carrés individuels (Bonnabel et Koehler 2001), Saint-Étienne-au-Temple plutôt en concentration et alignement de sépultures peut-être regroupées en enclos collectifs (Paresys et al. 2009, p. 154). Nous avons noté supra que les tombes les plus riches de ces deux sites sont celles de femmes inhumées dans des fosses surdimensionnées. Celle de Plichancourt occupe le plus grand des enclos carrés (Bonnabel et Koehler 2001 p. 96) tandis que celle de Saint-Étienne-au-Temple dessine la limite d’un regroupement de tombes qui s’inscrit dans un carré, ce qui permet, au vu de l’arasement des fossés d’enclos conservés, de proposer l’existence d’un enclos carré ceignant ces tombes. Ce dernier groupe de sépultures est fortement dominé par les femmes qui représentent six des neuf individus pour lesquels une détermination sexuelle a été avancée. La proportion importante des tombes féminines pour cette période a déjà été observée (Rozoy, 1981) tandis que la proposition d’une alternance entre organisation selon le genre au Hallstatt, puis familiale durant La Tène a déjà été émise à plusieurs reprises (Demoule 1999), cette oscillation n’étant pas systématiquement chronologique et dépassant le domaine de l’Aisne-Marne (Lorenz 1978 cité par Demoule 1999). Dans notre corpus, un déséquilibre dans le recrutement n’est pas vraiment perceptible, surtout si l’on prend en compte que les individus déterminés de manière « certaine ». En revanche, l’ostentation particulière de certaines tombes féminines est notable. La proposition d’un rôle prépondérant des femmes durant le Hallstatt (ou plutôt « une importance sociale grandissante des hommes lors du passage à la civilisation de La Tène », Rozoy 1981, p. 206) a déjà été émise à plusieurs reprises également.
100À La Tène ancienne, nous avons pu proposer déjà (Bonnabel et al 2009) que l’organisation des nécropoles paraît concilier deux niveaux de décision, l’un structurant les petits groupes et l’autre structurant l’ensemble de l’espace commun, tous deux prenant plus ou moins d’importance l’un par rapport à l’autre en fonction des ensembles et produisant ainsi des nécropoles dont la structure globale est plus ou moins facilement identifiable. Nous avions alors proposé également que certaines sépultures tiennent un rôle particulier dans la structuration de l’espace commun. Pour la nécropole de Reims « La Neuvillette », dont l’occupation est très étendue (soixante-quatorze sépultures réparties sur 3 hectares), l’organisation générale, correspondant au niveau « supérieur » de décision est dessinée par des tombes isolées (qui peuvent regrouper plusieurs défunts successifs) ou monumentales qui s’alignent à longue distance, limitent la nécropole, paraissent initier des espaces préservés ou structurer l’installation d’autres tombes. Le niveau des groupes quant à lui se traduit par des grappes de tombes agglomérées organisées les unes par rapport aux autres selon un système d’orientations similaires ou à 90° comme pour s’inscrire dans un espace restreint. Ces espaces regroupant de trois à sept fosses sépulcrales accueillent jusqu’à dix défunts sont au nombre de quatre et occupent une surface au sol de 14 à 73 m2. Le plus important de ces groupes est constitué de femmes, d’hommes et d’enfants tandis que les trois autres pourraient indiquer un sex ratio déséquilibré : pour un groupe de neuf défunts, trois sont des hommes, quatre des enfants mais deux adultes de sexe indéterminé interdisent toute certitude. Pour les deux petits groupes de trois défunts, l’un est constitué de deux hommes et d’un enfant et il est situé non loin du groupe de neuf tandis que l’autre, tout proche du groupe de dix, est constitué de deux femmes et d’un individu au sexe indéterminé. Le rassemblement volontaire d’hommes et d’enfants est éventuel à La Neuvillette mais impossible à prouver en l’état. À Val-de-Vesle, un groupe de tombes dont les seuls individus sexuellement identifiables sont masculins concentre d’autres particularités comme celle d’associer trois des quatre sépultures à encoches du site. Ce dernier exemple établit que les regroupements peuvent avoir un sens social autre que la parentèle et ne pas dessiner l’image d’une famille où les deux genres et les enfants seraient représentés.
101Si la volonté de regrouper les défunts en un espace organisé est notable, l’intention de réunir dans une grande proximité certains individus en particulier est couramment exprimée. Sur les deux-cent-trente-neuf tombes, soixante-sept défunts sont associés en un même point de manière simultanée ou successive (soit 28 %), vingt-neuf femmes (25 % des femmes) et trente-huit hommes (30 % des hommes). Si l’on ne prend en compte que les individus sexués de manière plus certaine, ce sont vingt-trois femmes et trente-et-un hommes qui sont concernés. Cette pratique semble donc davantage impliquer des hommes. Sur soixante-sept défunts, vingt-deux sont des premiers inhumés, trente-et-un des inhumés postérieurs et quatorze des inhumés simultanés (un défunt peut à la fois être postérieur à l’un et simultané à un autre). Le premier inhumé est dans dix cas une femme et douze fois un homme : les femmes sont donc proportionnellement plus souvent première inhumée que les hommes. Les femmes sont inhumées de manière postérieure dans quatorze cas et simultanée dans sept autres ; quant aux hommes, ils sont respectivement dix-sept et sept. Si l’on sort du corpus des individus sexués retenus pour ce travail pour considérer les sépultures d’immatures de l’ensemble (jusqu’à 16/18 ans), il apparaît que vingt-trois des cinquante-quatre immatures sont dans une tombe associée, dont sept en premier inhumé, sept en inhumé suivant et huit en inhumé simultanément. Cet équilibre entre les trois catégories différencie clairement les tombes d’immatures dont la moitié est inhumée dans une sépulture associée.
102Les tombes structurant l’espace commun peuvent être féminines ou masculines, comme à Reims « La Neuvillette ». À Caurel, partie de nécropole dominée par les hommes comme nous l’avons noté plus haut, la sépulture à char qui marque l’angle de la nécropole est masculine. Cette domination des tombes masculines est par ailleurs organisée spatialement puisque les deux seules tombes féminines sont côte à côte et au cœur de la nécropole (fig. 3). À Brienne-sur-Aisne, les trois sépultures monumentales qui limitent l’espace funéraire sont toutes féminines et se sont installées tout au long de l’occupation. Hors de notre corpus, dans la nécropole de Bussy-le-long (Desenne et al. 2007), le rôle de fermeture de l’espace funéraire semble également être tenu par trois des quatre tombes monumentales féminines.
103À Val-de-Vesle, à une exception près qui n’a livré que cinq blocs de pierre, toutes les tombes recouvertes d’un tumulus empierré ont accueilli des femmes (4 cas) ou des enfants (2 cas). Les tombes à encoches (fig. 6) qui peuvent avoir un marquage de surface comme nous nous l’avons noté plus haut, pourraient être le « pendant » masculin des sépultures féminines sous tumulus. En effet, ces deux types de tombes sont placés en limite de la nécropole ou le long d’un espace allongé vide de tombe qui traverse la nécropole et que nous interprétons comme lieu de circulation et d’accueil de pratiques péri-sépulcrales (Bonnabel et al. 2009, p. 55-56). Cependant, le regroupement de trois de ces sépultures à encoches indique probablement que cette architecture était réservée à un statut social spécifique au-delà d’un marquage lié au genre.
104Des différences sont observables dans les orientations, en fonction du genre dans le cas de Val-de-Vesle, Toutefois, si des différences peuvent exister entre les orientations masculines ou féminines des autres sites du corpus, il n’est pas possible pour l’heure d’en révéler une constante.
5. Conclusion
105Si des informations ressortent de l’approche selon le genre, permettant d’approfondir la vision déjà obtenue à partir de différents travaux sur la culture Aisne-Marne, il est souvent difficile de leur donner du sens. Cela demandera encore un approfondissement de certains points, une discrimination plus poussée entre les traits locaux et la norme générale et une phase supplémentaire de recoupement entre les différents domaines abordés.
106L’étude du squelette a permis de mettre en valeur une atteinte plus traumatisante pour les colonnes vertébrales des hommes, elle traduit sans doute une division sexuelle des tâches. Mais, au-delà de cette tendance, des nuances dont la signification reste à préciser, s’observent en fonction des sites et illustrent peut-être une variation dans les modes de vie en fonction des lieux.
107À la fin du Premier Âge du fer et à La Tène A-B, les sites funéraires, quelle que soit leur ampleur, accueillent des hommes et des femmes de manière équilibrée. Au long de cette période, on observe la coexistence d’organisations spatiales par genre ou de genre mélangé. Plus tard, à La Tène C, le recrutement apparaît, au contraire, totalement déséquilibré. Les indices biologiques indiquent par ailleurs des nécropoles plutôt « familiales » ou au contraire très ouvertes. Les petits groupes féminin de La Tène C paraissent accueillir des défuntes apparentées et dans un cas sans doute avec un homme. Dans plusieurs ensembles de La Tène A-B, comme à Auve et Champfleury, les femmes se trouvent davantage concernées par les ressemblances ce qui pourrait indiquer une organisation de type matrilocal. Certains cimetières de la même période ou au moinsdeszonesréservées (Caurel) accueillentpréférentiellement des tombes masculines affichant, par le dépôt d’arme, un statut militaire.
108Les gestes entourant les défunts, tout particulièrement durant La Tène A-B, paraissent répondre à un ensemble de règles très précises pour la position du corps, le maintien d’un espace vide, l’enveloppement des pieds et la conservation de certains objets personnels sur le corps ou en dépôt. Ces normes générales sont respectées quel que soit le sexe du défunt. Les variations restent toujours très minoritaires. Elles sont donc difficiles à identifier et leur origine délicate à interpréter.
109Le cas des sépultures architecturées de La Tène A-B traduit ces difficultés d’interprétation en prenant en compte toutes les variables. Le type « à encoche » pourrait apparaître plutôt masculin et militaire, tout comme le type « à trou de poteau », tandis que le type « complexe avec poteau, encoche et banquette » serait féminin. Cependant, ces tombes féminines très ostentatoires appartiennent à l’extrême fin de La Tène B et peuvent annoncer les tombes féminines riches, dont certaines à banquette, de La Tène C.
110L’expression du genre ne se marque fortement que dans les effets personnels, féminin, par la relation alliage cuivreux-bijoux et masculin, par la relation fer-armes. Cette différence n’est pas à mettre au compte de la « pratique funéraire » puisqu’il s’agit des objets des vivants, et c’est donc bien leur identité qui est exprimée jusque dans leur tombe, tandis que les gestes funéraires eux-mêmes ne paraissent pas radicalement différents. Entre autres, dans la culture Aisne-Marne, le torque reste, sauf exception, l’exclusivité du genre féminin et l’armement, celle du masculin. Dans les sépultures d’enfants, on observe à plusieurs reprises une dotation personnelle évoquant le genre féminin (torque et bracelets). Cela renvoie sans doute à un marquage précoce de ce genre, au sein de la société, dans le costume porté par les filles. Certaines catégories sont déposées indépendamment du genre, comme les nécessaires de toilettes ou les fibules. Le couteau illustre bien la différence entre la signification de l’objet porté et de l’objet disposé en relation avec le dépôt suggérant l’alimentation. Comme objet intégré dans l’équipement personnel, arme et/ou outil, le couteau est seulement présent dans les tombes d’hommes. Comme objet lié au dépôt "alimentaire", il apparaît dans les tombes sans distinction de sexe ou d’âge.
111À La Tène A-B, période la mieux documentée, la pratique du dépôt de vaisselle est représentée de façon à peu près équivalente pour les hommes et les femmes adultes, mais le nombre moyen de récipients est plus élevé pour les hommes. Les grandes classes morphologiques principales apparaissent associées tant aux femmes qu’aux hommes. Une différence sensible apparaît cependant dans l’association privilégiée des formes à col, anguleuses ou arrondies, avec les tombes féminines, alors que les formes simples profondes sont mieux représentées dans les tombes masculines. En ce qui concerne les vases décorés, la variation est d’abord locale, et si globalement, les vases décorés apparaissent plus souvent dans les tombes féminines, cela ne se vérifie pas dans toutes les nécropoles. Le traitement des enfants paraît tout à fait particulier : si la proportion de dépôts est équivalente, il s’agit plus souvent d’une seule catégorie de mobilier, en particulier de la vaisselle, d’un nombre réduit de récipients, eux-mêmes de tailles réduites et de types morphologiques moins diversifiés (en particulier les situles). Une présence sensible de vases décorés indiquant une attention particulière au choix du récipient est notable. La plus faible contenance des vases est-elle en rapport avec l’âge ? Cela correspond-il ainsi à la « part du mort », pour un repas funéraire ou le voyage dans l’au-delà ? Pour les adolescents, malgré un corpus réduit, il semble que le traitement soit apparenté à celui des enfants, avec souvent une seule catégorie de mobilier et un nombre réduit de récipients, mais les formes et les tailles des vases sont plus proches de ceux offerts aux adultes. Cela confirmerait-il que le dépôt alimentaire est destiné au défunt en fonction de son identité, et, notamment, en fonction de la quantité de nourriture dont il a « besoin » ?
112Outre dans le dépôt de vaisselle, des différences sensibles se rencontrent encore dans la nature des dépôts de viande. Ces différences entre hommes et femmes reflètent-elles une différence dans les pratiques alimentaires, notamment en certaines circonstances ? Ou renvoient-elles à des aspects de la personnalité du défunt, à sa fonction sociale, voire à son physique ? De même, si la position du corps est extrêmement standardisée, les variations dans la position des membres et des mains paraissent peut-être davantage concerner les femmes ce qui pourrait indiquer qu’elles sont moins soumises à certaines normes ou que leur corps renvoie à des réalités plus complexes (la position particulière d’une main peut-elle être signifiante et symbolique ?).
113Par ailleurs, une accumulation d’indices de prestige apparaît dans des tombes féminines à la fin du Premier Âge du fer. Ce phénomène semble se prolonger, mais de manière plus discrète et uniquement sur certains sites pour La Tène A-B, alors qu’à La Tène C, on observe une représentation sensible des tombes féminines à fosses complexes et à mobilier « riche » dans un contexte de quasi absence de tombes masculines et de désertion des nécropoles. Si des indices biologiques pourraient être interprétés en faveur d’un système matrimonial matrilocal dès La Tène A, ces groupes de tombes féminines de La Tène C évoqueraient, en outre, un lien particulier entre la femme et le territoire. Le groupe d’hommes de Lavau, à l’extérieur du domaine Aisne-Marne pourrait exprimer une autre organisation.
114Ainsi, ce travail ouvre des pistes de réflexion. Reste l’évidente difficulté de passer de l’image de terrain à la compréhension des pratiques funéraires, de leur signification et des informations qu’elles nous donnent sur la société des vivants. Cependant, des tendances se dégagent et il semblerait que cette approche nous ait permis en particulier d’illustrer une fluctuation historique du rôle de la femme, voire de son pouvoir, entre le VIe et le IIIe siècle av. notre ère.
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10.3406/bmsap.1990.1753 :Zammit J., 1990, Nouvelles perspectives en anthropologie des populations anciennes : paléoépidémiologie et approche de l’état sanitaire, Bulletins et mémoires de la Société d’anthropologie de Paris, n.s., 2, 3-4, p. 149-158.
Notes de bas de page
1 Le terme militaire est utilisé par commodité même si l’on ne peut certifier avoir affaire à une armée au fonctionnement centralisé et si le terme guerrier pourrait être également choisi.
2 À partir du périmètre claviculaire, des longueurs et périmètre du fémur, des aplatissements de l’humérus, du tibia et du fémur.
3 À partir de vingt caractères crâniens (Hauser et De Stephano 1989), trois caractères mandibulaires et six post-crâniens (Saunders 1977).
4 « Variété de hernie discale dans laquelle le nucleus pulposus, expulsé en avant, se loge dans le corps vertébral. » (Garnier et al. 1999).
5 Durant plus de 10 ans, les sépultures fouillées en Champagne-Ardenne ont bénéficié d’un traitement systématique à partir d’un protocole appliqué par une même équipe. Il en résulte des milliers de fiches concernant les pratiques funéraires et les différents champs de l’anthropologie biologique qui peuvent être recollées entre elles par période chronologique. La mise en place de la concurrence commerciale a mis fin à cette expérience.
Auteurs
Inrap Grand Est Nord, Champagne-Ardenne. UMR 7041 ArScAn. lola.bonnabel@wanadoo.fr
Inrap Grand Ouest, Pays-de-Loire
Inrap Grand Est Nord, Champagne-Ardenne. UMR 8546
Inrap Grand Est Nord, Champagne-Ardenne.
Inrap Nord Picardie, Picardie. UMR 7041 ArScAn.
Inrap Grand Est Nord, Champagne-Ardenne.
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