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    Plan

    Plan détaillé Texte intégral I. Deux fêtes nationales : le 24 février et le 4 mai II. Une administration et des citoyens exacts à leurs devoirs III. L’attitude de l’Église catholique IV. La crainte des débordements des « rouges » V. Le 15 août 1852 : un plébiscite napoléonien par le feu de joie Notes de bas de page

    La formation d’une opinion démocratique

    Ce livre est recensé par

    • Christophe Voilliot, Revue d’histoire du XIXe siècle, mis en ligne le 28 février 2020. URL : https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/rh19/6717 ; DOI : https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/rh19.6717
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    Table des matières

    3

    Commémorations officielles sous la Deuxième République (1849-1852)

    p. 63-74

    Texte intégral I. Deux fêtes nationales : le 24 février et le 4 mai II. Une administration et des citoyens exacts à leurs devoirs III. L’attitude de l’Église catholique IV. La crainte des débordements des « rouges » V. Le 15 août 1852 : un plébiscite napoléonien par le feu de joie Notes de bas de page

    Texte intégral

    1Sous le règne du roi Louis-Philippe, Heinrich Heine, le plus francophile des écrivains allemands, ironisait déjà à propos de la manie des commémorations qui agitait les Français. On observe que les Allemands ont fait de même, dans des registres variés, lors de leur histoire tragique au xxe siècle. De nos jours, alors que s’étiolent le sens et la participation que les Français accordent à leurs fêtes officielles, une fièvre récurrente de commémorations, amplifiée par les médias, s’empare du pays : couronnement d’Hugues Capet, Révolution de 1789 et baptême de Clovis, Première Guerre mondiale ont suscité un flot de publications et de polémiques. Sans aucun doute, ces commémorations sont tout autres choses que des spectacles : c’est une crise d’identité qui s’exprime à travers une crise des symboles.

    I. Deux fêtes nationales : le 24 février et le 4 mai

    2Au cours de sa brève histoire marquée par une crise économique, sociale et politique de grande ampleur, la Deuxième République a tenté, elle aussi, de se définir par des célébrations officielles bien à elle. Le 15 février 1849, l’Assemblée constituante décidait que le 4 mai serait désormais fête nationale chômée. Cette assemblée, élue en avril 1848 lors d’un scrutin mémorable au suffrage universel direct, avait, en effet, proclamé solennellement la République un an auparavant, le 4 mai 1848, cette date n’ayant d’ailleurs aucune signification historique particulière.

    3Les monarchies qui s’étaient succédé à un rythme rapide au cours de la première moitié du xixe siècle avaient, en général, retenu la fête du souverain pour leur célébration : la Saint-Napoléon (15 août), la Saint-Louis, la Saint-Charles, la Saint-Philippe (1er mai)1. L’Assemblée constituante avait voulu, au contraire, rejeter tout loyalisme envers la personne d’un monarque et célébrer la légitimité de la République. N’oublions pas que, depuis 1789, le problème de la légitimité était le problème politique fondamental de tous les régimes.

    4Mais, en même temps qu’ils prenaient connaissance de la loi, les préfets, les sous-préfets et les maires recevaient du ministre de l’Intérieur des circulaires leur demandant de fêter également la journée du 24 février qui avait chassé Louis-Philippe. Les Français étaient donc conviés à célébrer deux fêtes nationales et il fallait se hâter, car les délais étaient courts jusqu’au 24 février2 !

    5On s’étonnera certainement de ce double choix. Une réponse détaillée ne pourrait venir que d’une recherche au plan national, en particulier à travers la presse et les débats parlementaires. Nous n’étudierons ici que la réception de ces deux fêtes par les autorités locales et la population jurassienne, mais quelques hypothèses peuvent être avancées.

    6Le 4 mai avait été institué hors de toute mémoire historique précise. Il s’agissait de célébrer la République sans la Révolution, de réunir les Français dans un acte civique autour d’un concept politique : la République et la Constitution. Cette célébration sans souvenirs et sans passions était fort abstraite mais bien propre à rassurer les « républicains du lendemain », les « bleus », les « républicains parlementaires », comme l’on disait alors, et d’une manière générale les modérés de tous bords.

    7En revanche, l’adoption in extremis du 24 février devait satisfaire les « rouges », bien peu socialistes dans le Jura. Elle rappelait et légitimait la journée fondatrice de la Deuxième République, au cours de laquelle les Parisiens s’étaient soulevés à la vue du sang versé par la fusillade du boulevard des Capucines. Les honneurs funèbres étaient ainsi rendus aux victimes de Février, le peuple insurgé était exalté et les promesses du Printemps des peuples implicitement rappelées, mais toute référence à la Grande Révolution de 1789 était écartée. C’est finalement la Troisième République qui a renoué avec 1789, puisqu’elle a adopté La Marseillaise en 1879 et le 14 juillet comme fête nationale en 1880. Le choix de deux fêtes nationales reflétait sans doute les divisions des républicains, la situation de crise politique, voire les menaces de guerre civile, mais il pouvait être considéré comme un compromis.

    8Dès le printemps 1848, les républicains avaient souligné la distance qui les séparait de la Révolution de 1789, par exemple à propos de la question religieuse, de la Terreur ou du prosélytisme révolutionnaire en direction des autres nations. Leur choix traduisait à la fois le refus d’un passé révolutionnaire qui effrayait encore et la volonté de se tourner vers l’avenir avec un projet original. Comme c’est souvent le cas dans l’histoire, la construction de l’avenir s’accompagnait d’une oblitération du passé3.

    9Les célébrations de la Deuxième République se situent chronologiquement à mi-chemin entre 1789 et la Troisième République. Un point retiendra particulièrement notre attention, il s’agit du lien entre les commémorations officielles et les Églises établies. En 1790 et 1791, les fêtes de la Fédération avaient requis la participation de l’Église catholique. Plus tard, les Églises avaient été écartées4, ce qui eut de très grandes conséquences, mais le serment civique, la fêtes de la Raison, les fêtes funèbres en l’honneur de Marat, le calendrier républicain, le culte de l’Être suprême s’étaient déployés sous la Première République5. En revanche, la Troisième République s’est contentée de cérémonies strictement laïques6. Ces diverses approches sont une raison supplémentaire de nous intéresser aux commémorations sous la Deuxième République, en espérant mieux saisir l’évolution politique de la France au xixe siècle7.

    II. Une administration et des citoyens exacts à leurs devoirs

    10Les préfets et les maires transmirent avec exactitude les circulaires ministérielles. Quelques maires seulement ne respectèrent pas entièrement les instructions en prenant l’initiative de reporter la fête au dimanche suivant. À Lons-le-Saunier, le préfet arrêta lui-même le programme des cérémonies : un cortège accompagné d’un piquet de troupe sera formé des fonctionnaires, des officiers de la garnison, du maire et du conseil municipal, des officiers de la Garde nationale, des membres de l’Instruction publique et des officiers en retraite. Il devait partir de l’hôtel de la préfecture et gagner l’église principale où aurait lieu un service religieux avec messe solennelle, prière publique et Te Deum8. De même, dans les villages, un cortège devait joindre la mairie9 à l’église. Il réunissait le maire et les conseillers municipaux, la Garde nationale lorsqu’elle était en état, ce qui arrivait rarement, enfin les pompiers, souvent loués pour leur belle tenue. En 1850 et 1851, des arrêtés préfectoraux semblables réglèrent ces cérémonies dont les rituels étaient conçus de manière identique pour les deux fêtes du 24 février et du 4 mai.

    11Toutes les communes du Jura – au nombre de 580 – participèrent-elles vraiment aux festivités, comme le prétend le préfet dans ses rapports ? Nous ne pouvons l’affirmer parce que la documentation ne nous a livré que 24 procès-verbaux de la célébration du 24 février et 19 de celle du 4 mai. Toutefois, aucune indication ne prouve une abstention massive et, à plus forte raison délibérée, des nombreuses petites communes rurales. Il est en outre probable que la notion même de fête nationale chômée en dehors des temps religieux, était alors peu ancrée dans les esprits.

    12On observera que ces austères « cérémonies du pouvoir » – l’expression est d’Alain Corbin – étaient orientées : elles mettaient les autorités en représentation devant le peuple et les consacraient par l’intervention de l’Église catholique. Cette procession sévèrement réglée des corps municipaux et administratifs n’était pas sans rappeler celles d’Ancien Régime.

    13Quant au peuple, il était averti de la fête la veille au soir ou tôt le matin par des affiches et des signaux sonores : sonneries de cloches, roulements de tambour et tirs de « boîtes »10. Il était invité à assister et à se réjouir : il assistait au défilé et au service religieux, il se réjouissait des distributions d’aliments aux indigents11, du spectacle des édifices publics ou privés illuminés, du bal qui achevait parfois la journée. En aucun cas le peuple n’était invité à former cortège, à chanter ou à ériger des symboles. Il n’y avait ni discours, ni serment, ni image, ni symbole, ni bannière12. Toute manifestation qui serait sortie de ce cadre aurait été strictement prohibée. L’unanimité du corps social est à ce prix13.

    14À bien des égards, nous avons là une représentation en pied de la république conservatrice, par opposition à la république démocratique et plus encore à la république démocratique et sociale. L’expérience a montré qu’un tel régime était fort instable, si le soutien de l’Église catholique lui faisait défaut, ce qui était précisément le cas.

    III. L’attitude de l’Église catholique

    15Les relations entre les Églises et l’État étant réglées par le Concordat de 1801, les circulaires du ministre de l’Intérieur et du ministre des Cultes mirent toujours en première place l’intervention de l’Église catholique dans le programme festif. La circulaire du 20 avril 1850 préparant le 4 mai précisait : « Cette fête communautaire ne répondrait pas au vœu du gouvernement et du pays si la religion n’y intervenait pour placer sous la protection divine la destinée de la France »14. Les maires étaient donc invités à s’entendre avec les curés pour l’organisation de la fête. Aucun ne se récusa, même parmi les « rouges ». L’attitude de l’administration, des municipalités et aussi des populations fut donc empreinte, dans le Jura, de beaucoup de déférence envers l’Église catholique ; la religion conservait ainsi une place essentielle dans la fête civique.

    16Or, une partie du clergé, avec à sa tête Mgr de Chamon, évêque de Saint-Claude, répondit par une mauvaise volonté caractérisée. À la veille du 24 février 1849, l’évêché s’enferma dans un silence complet, laissant les curés sans consignes, mais des trésors d’imagination furent déployés en vue de justifier l’attitude du prélat. Le sous-préfet de Poligny, Jarry-Paillet, dont nous connaissons le conservatisme, formula le 23 février une explication qui fut reprise sans changement jusqu’à la fin de la République : pas de messe solennelle, ni de prière publique, ni de Te Deum à l’occasion du 24 février parce que ce serait contraire, en temps de carême « aux rubriques de l’Église ». Seule une messe funèbre en mémoire des victimes de Février était possible. Certes, l’évêque pouvait lever l’empêchement, mais il ne le fit pas. Le résultat fut une belle confusion qu’aggravèrent des délais très courts.

    17Dans les principales villes du Jura, sauf à Dole, et aussi, semble-t-il, dans de nombreux villages, les curés ignorèrent souvent, volontairement parfois, les positions de l’évêque et coopérèrent avec les maires, mais les refus furent fréquents, sans que nous puissions établir de statistiques précises. À Audelange, par exemple, le maire rapporte que « contrairement à ses confrères du voisinage », le curé a refusé de célébrer, disant qu’il « n’a point d’ordre à recevoir de M. le préfet, ni du maire […], il ne s’est pas gêné de dire en chaire que ceux qui avaient établi la République étaient de la canaille et la lie du peuple ». Le maire observe : « quand un soldat ne fait pas son devoir, il ne doit pas être salarié […], la Garde nationale et moi nous serons toujours les vrais soldats de l’ordre et de la liberté et les vrais soutiens de la République ». À Miéry, le curé « n’obéira qu’aux ordres de Mgr l’Evêque ». Le 23 au soir, il ne consent qu’à repousser la messe funèbre de 6 à 9 heures du matin. Aux Rousses, le curé ne fait rien, n’ayant pas reçu d’ordre, ce qui laisse « une singulière impression ». À Arinthod, le maire qui est loin d’être rouge, rapporte que le curé a accepté puis refusé un Te Deum :

    Je lui dis qu’en définitive, la République n’avait pas essentiellement besoin du Te Deum. On oubliera facilement le mauvais vouloir du pasteur.

    18À Morez, le docteur Regad, maire républicain, annule la commémoration, ne recevant pas de réponse positive du curé. À Chilly-le-Vignoble, le maire rapporte le refus du curé et ajoute :

    Le paysan n’a pas le temps à perdre des jours de travail et ils sont tous déconcertés […]. Ainsi, Monsieur le préfet, pas de fête dans la commune. Le deuil au lieu de la joie.

    19L’attitude des curés fut donc variée, ce qui n’est pas sans rappeler parfois le schisme de 1791, mais dans un contexte très différent. Par ailleurs, l’Église catholique sous la Deuxième République, n’était pas monolithique. On pourrait penser que la fête du 4 mai qui n’était pas dans les temps clos aurait eu un meilleur sort. Il n’en fut rien. L’évêché ne fit qu’une concession en admettant une messe solennelle avec absoute et fit de même lors du 24 février 1850 qui était un dimanche. Donc, pas de prière publique, ni de Te Deum pour la République, même conservatrice ! L’attitude de l’évêché constituait bel et bien une rupture unilatérale du concordat15.

    20En 1850, le trouble persista. À Saint-Amour, le conseil municipal décida de ne pas commémorer dans de telles conditions. À Villette-les-Arbois, le maire « rouge » ordonna à la Garde nationale d’entrer dans l’église et de chanter le Te Deum. À Arinthod encore, le maire observe que « les populations sont fort étonnées que les ordres de l’autorité supérieure ne sont pas respectés ». À Poligny, le sous-préfet signale que « les chefs démagogues se sont placés auprès du catafalque avec l’intention de chanter le Te Deum mais ils ont reculé devant l’inconvenance de cette démonstration ». Le 25 février, le préfet rapporte au ministre qu’un « service funèbre a eu lieu dans toutes les églises mais il n’a pas été suivi de Te Deum, Mgr l’évêque l’ayant interdit à MM. les curés. Ce désaccord est surtout regrettable en ce sens qu’aux yeux des populations le clergé semble être en lutte avec le gouvernement ». Cette affaire hautement symbolique touchait à la légitimité même de la République, mais elle ne fit pas grand bruit. Ni le gouvernement, ni les républicains, même les plus avancés, ni a fortiori le parti de l’Ordre ne désiraient entrer en conflit ouvert à ce sujet. En outre, l’heure n’était plus à l’anticléricalisme. Cette enquête dans un seul département n’apporte qu’une pièce au volumineux dossier des relations entre l’Église catholique et la République ; elle mériterait d’être étendue.

    21L’épilogue vint après le coup d’État du 2 décembre 1851 et les plébiscites. Le ministre de l’Intérieur et des Cultes demanda alors un Te Deum solennel et d’action de grâces qui fut accordé. Un an plus tard, Mgr Mabile, nouvel évêque de Saint-Claude, se félicita du rétablissement de l’Empire et lança un appel :

    Hâtons-nous de prier et de faire prier pour Celui qu’une élévation dans le passé n’éblouit pas et qui sait si bien comprendre l’immense réunion que le Ciel lui donne. En conséquence, il sera chanté un Te Deum. Pour la prière d’usage on reviendra au Domine salvum fac imperatorem.

    22Décidément, pour l’Église catholique, la République n’était pas un régime comme les autres.

    IV. La crainte des débordements des « rouges »

    23Nous avons également retrouvé, dans les récits des commémorations, les tensions politiques et sociales qui marquèrent la Deuxième République. Après l’écrasement de l’insurrection des ouvriers parisiens en juin 1848, une loi du 28 juillet interdit les clubs et banquets politiques, ainsi que toute réunion de plus de vingt personnes. Les réunions et les associations sont soumises à l’autorisation des maires. Cette loi fut encore renforcée après la crise de mai 1849. Un décret d’août 1848 interdisait les emblèmes « propres à propager l’esprit de rébellion ou à troubler l’ordre public », comme le drapeau rouge et le bonnet phrygien, « ces tristes symboles de sang et de deuil ». Planter un arbre de la Liberté était également interdit parce que ce geste pouvait avoir un sens provocant, voire insurrectionnel16. Le parti de l’Ordre vivait surtout dans la peur que les « rouges » utilisassent les fêtes pour se rassembler. Même animée d’une intention festive, la manifestation d’une opposition n’était pas admise.

    24Si quelques républicains avancés se réunirent parfois à titre privé pour fêter le 21 septembre, date anniversaire de la Première République, il est incontestable que tous les républicains jurassiens reconnurent le 4 mai et plus encore le 24 février comme les fêtes de la République, de leur république.

    25Le 24 février 1849 fut encore quelque peu agité dans le Jura. À Arbois, par exemple, des cris ont été poussés : « Vive la république démocratique et sociale, vive Barbès et Raspail ! ». On a entendu des chants séditieux, dont La Marseillaise. Un rassemblement a même eu lieu au champ de Mars, au cours duquel le jeune Altin Vercel parla de la « république de la prêtraille ». Ce furent surtout les banquets organisés à Poligny, Salins, Saint-Claude qui inquiétèrent les autorités. Celui de Salins devait réunir 300 personnes. La brigade de gendarmerie invitée par le maire y a même participé, ce qui valut huit jours de consigne à son maréchal des logis. Le sous-préfet exerça des pressions directes et efficaces sur les chefs, tels Gagneur et Bergère, pour qu’ils ne s’y montrent pas et exigea que le libellé des toasts lui fût remis par avance. Il dut reconnaître ensuite dans son rapport que « rien ne s’y est dit qui fût contraire à nos institutions ou hostile au président de la République »17.

    26Au cours des mois et des années qui suivirent, les commémorations furent plus calmes. Était-ce l’effet d’une surveillance encore plus étroite ou d’une évolution des républicains ? Le 24 février 1850, il est noté à Arbois « une grande affluence d’assistants au service religieux. Plusieurs d’entre eux portaient une rosette tricolore où le blanc et le bleu disparaissent presque entièrement sous le rouge ».

    27Le préfet relève à Dole un projet de banquet, « réunion qui alarmerait nécessairement les gens paisibles. J’ai prescrit au sous-préfet de ne point le tolérer […], le banquet n’a pas eu lieu ». À Arbois, toujours frondeuse, des cris et des chants séditieux furent encore proférés dans les rues le 23 février 1851. Les gendarmes procédèrent à des arrestations mais, assaillis par une masse d’habitants, ils durent relâcher leurs prisonniers. Plusieurs banquets de moins de vingt personnes furent organisés à l’hôtel ou à titre privé. Le lendemain, les convives revinrent encore à l’hôtel du Cerf pour consommer les restes du festin. Nous ne sommes pas dans une société de gaspillage !

    28Dans la campagne du Vignoble, deux promenades favorites des républicains étaient étroitement surveillées, celle de l’Ermitage dominant Arbois et l’auberge des Monts-de-Vaux au-dessus de Poligny. Il y eut des tentatives en 1850 et 1851 pour réunir à l’auberge et dans les bois aux alentours des banquets de 300 à 400 personnes mais ils furent rapidement dispersés par la gendarmerie. L’aubergiste, les avocats Vuillermoz et Maubert furent condamnés à 5 F d’amende, « pénalité bien légère », soupire le sous-préfet. Des fêtes alternatives et partisanes, situées de plus hors de l’agglomération, étaient nécessairement considérées comme subversives ; le contrôle de l’espace était tout aussi important que celui du temps politique. Sur un autre plan, la municipalité « démagogue » de Salins était aussi très surveillée. Dans son programme pour la fête du 4 mai 1851, le maire Babey avait appelé les Salinois à la défense de la Constitution, au « calme et à la patience » jusqu’aux élections fixées au 13 mai 1852. Cette allusion à la situation politique était de trop pour le préfet qui prononça l’annulation du programme au motif qu’il était « de nature à jeter la division et le trouble parmi les citoyens »18.

    29Dans l’ensemble, le 4 mai a soulevé peu de passion. Pourtant le 4 mai 1851 connut à Dole et à Poligny une « grande affluence ». Il est vrai que ce jour-là était un dimanche. À Poligny, on fêtait aussi la Sainte-Croix, la fête patronale. À Arbois, la fête se termina par un bal populaire.

    30Les commémorations de la Deuxième République ont-elles sombré dans cette « indifférence profonde des populations » que le sous-préfet de Saint-Claude rapporte avec un contentement à peine dissimulé ? Cela semble inexact, du moins dans le Vignoble et la région de Dole qui furent aussi des centres de résistance au coup d’État.

    V. Le 15 août 1852 : un plébiscite napoléonien par le feu de joie

    31Le coup d’État du 2 décembre 1851 signa la mort de la République mais l’Empire ne fut proclamé qu’un an plus tard exactement. Toutefois le nouveau régime n’osa pas adopter le 2 décembre comme fête nationale ; Gambetta l’a ironiquement souligné en 1868 dans une plaidoirie célèbre en faveur de Delescluze. Dès le 16 février 1852, un décret présidentiel retenait le 15 août, anniversaire de la naissance de Napoléon Ier, comme seule fête nationale. Quatre-vingt-huit procès-verbaux de cette fête sont conservés pour 1852 aux archives départementales, ce qui sensiblement plus que lors des années précédentes. Il est vrai qu’il y avait désormais un nouveau fonctionnaire, le commissaire de police départemental, qui sollicitait aussi les rapports des maires et des commissaires cantonaux.

    32L’enthousiasme des partisans de l’Ordre, libérés des « angoisses de 1852 » est incontestable. Les dithyrambes en faveur du Prince-Président atteignirent des sommets dans la plupart des comptes rendus, venus principalement des petites communes rurales. Ainsi à Damparis : « joie folle, impossible à comprimer, accès de délire des habitants qui se sont tous amusés comme des fous et se souviendront longtemps de la fête du 15 août ». Le maire ajoute : « ma commune n’a pas dépensé un sou », le bonheur parfait donc ! Dans de nombreuses communes sont relevées la « joie la plus franche et la plus vive, la liesse, la bonne harmonie ». À Montmirey-le-Château, « toute la population est animée des meilleurs sentiments pour le prince Louis-Napoléon et son gouvernement ». À Saint-Claude, sont poussés les « cris mille fois répétés : Vive Napoléon ! L’enthousiasme est difficile à décrire ». Le « Prince chéri, Restaurateur de l’Ordre et Vainqueur de l’anarchie » est célébré à l’envi. À Supt, petite commune du plateau de Nozeroy, « la population a été admirable d’enthousiasme et de dévouement ; de mémoire d’homme, de temps immémorial ou plutôt jamais, fête nationale, ni fête quelconque n’avait offert un spectacle plus imposant, plus majestueux, plus beau et plus attrayant ».

    33Il y a cependant quelques ombres sur cette liesse. On notera la réticence de l’évêque de Saint-Claude devant une fête qui concurrençait le culte marial, alors en plein développement : « pour répondre aux désirs du Prince-Président de la République qui a choisi pour sa fête patronale l’Assomption de la Très Sainte Vierge [écrit-il aux curés] vous voudrez bien faire chanter dans votre église un Te Deum ». Mais il est souvent souligné que « cette double fête nationale »19 place la France sous la protection de la Vierge.

    34Le danger principal vient encore des « rouges ». À Damparis, « une vingtaine d’individus se tiennent toujours à l’écart depuis le 2 décembre ». À Gevry, « les mauvais esprits, s’il s’en trouve, cachent leur dépit sous une apparence de gaieté qui les empêche d’être remarqués, ils savent bien qu’ils seraient écrasés à la moindre démonstration ». À Poligny, à Lons-le-Saunier, les nombreuses maisons non illuminées sont notées. À Salins, un placard écrit à la main par les « ennemis de l’ordre » rappelle que « la fête annoncée doit être entièrement étrangère aux républicains qui respecteront la fête de Notre-Dame, comme d’habitude ». La situation économique difficile, un été pluvieux et venteux sont invoqués pour expliquer des célébrations moroses. Ainsi à Bréry, résidence de Wladimir Gagneur, alors en exil, l’absence d’une partie de la population serait due « à la grande misère publique et à l’influence hostile aux idées de convenance et de soumission à toute autorité ». À Arinthod, « la population est profondément attristée des pertes de récoltes. La population aisée a dû respecter ce sentiment de tristesse et contenir les manipulations [sic] d’une joie trop bruyante ». À Salins, on invoque aussi « la pauvreté qui règne dans le canton par suite des mauvaises récoltes […]. Si les travaux du chemin de fer avaient commencé il en eût été autrement. L’espoir d’être occupé eût relevé le moral de ce qu’il y a de bon parmi nos ouvriers ».

    35L’organisation de la fête du 15 août ne différa guère des célébrations de la Deuxième République. Elle prévoyait aussi un cortège de fonctionnaires de la mairie à l’église, une messe, la prière publique, le Te Deum, la revue des pompiers, toujours très sollicités. La Garde nationale était, en revanche, oubliée. Certains curés revêtus de vêtements sacerdotaux prononcèrent une allocution très favorable au prince ; celui de Larnaud bénit la pompe à incendie ornée de drapeaux tricolores frappés des aigles. Presque partout des distributions aux pauvres, un banquet libre de toute surveillance, des jeux et même des salves de coups de fusil agrémentèrent la fête, ce qui eût été impensable un an plus tôt.

    36Une innovation remarquable retiendra toutefois notre attention car elle devait être, à la nuit tombée, le clou de la fête du 15 août napoléonien : l’idée avait en effet germé dans les bureaux du ministère d’inviter les municipalités à couper un arbre de leur forêt, de l’ériger en un endroit remarquable, puis de le brûler dans un feu de joie. Plusieurs symboliques fort anciennes et bien connues des historiens, folkloristes et ethnologues se mêlaient de manière ambiguë dans cette entreprise ; la coutume de l’arbre de mai devenu l’arbre de la Liberté sous la Révolution ; celle de la purification, de sinistre mémoire ; celle, enfin, des feux de la Saint-Jean au solstice d’été.

    37Une question vient à l’esprit : cet arbre qui devait mourir parce que coupé et brûlé debout, était-ce l’arbre de la Liberté ? Nous n’en avons pas trouvé la preuve explicite, comme si un recul sacré retenait le parti de l’Ordre devant un tel acte. Il est certain, toutefois, que bien avant le coup d’État, les autorités invitaient les municipalités à détruire les arbres de la Liberté20. En fait, le régime reprenait à son compte des coutumes anciennes, tout en pratiquant symboliquement une inversion de la cérémonie de plantation de l’arbre. Il semble, en outre, que le brûlement de l’arbre ait été en 1852 un phénomène exclusivement rural car nous n’en avons pas rencontré la mention dans les villes et les bourgs les plus importants.

    38Matériellement, l’idée de brûler un arbre n’était pas facile à mettre en œuvre21. Beaucoup de communes rurales n’avaient pas de bois. Si elles en avaient, il fallait choisir l’arbre avec le garde forestier, puis le couper et le transporter grâce au concours de la population et des pompiers, ce qui permet de mesurer un enthousiasme plus ou moins grand. Il fallait ensuite l’ériger. La place du village fut généralement écartée car il y avait grand vent et l’on craignait les incendies22. Conformément aux instructions et à la symbolique, ce fut un point culminant23 qui s’imposa, les paysages vallonnés du Jura s’y prêtant assez bien, mais mettre le feu à un arbre vert, par temps humide, n’est pas chose aisée. On requit donc la générosité des habitants qui apportèrent des fagots de bois sec que l’on amoncela en bûcher au pied de l’arbre. Cette générosité fut-elle enthousiaste ? On note parfois le refus d’une partie de la population. À Tavaux, tandis que le maire et les pompiers s’échinent à dresser l’arbre sur la place, quelques républicains s’esclaffent dans le café d’en face. Furieux, le maire leur inflige un procès-verbal. À Poisoux, petite commune pauvre du Revermont, personne n’a voulu suivre l’instituteur-secrétaire de mairie. « Qu’ai-je fait ? [écrit celui-ci]. Moi-même j’ai pris une demi-douzaine de fagots de notre bois, je me suis transporté sur une montagne élevée et j’ai fait mon feu de joie, je me suis diverti tout seul et j’ai tout remercié ». Mais faut-il voir des aspects politiques derrière tant d’indifférence ?

    39Les rapports des maires détaillent ces difficultés et les mérites déployés par chacun pour les surmonter. Ils décrivent le maire et l’adjoint ceints de l’écharpe tricolore, précédés des torches, du tambour, du drapeau et conduisant la population du village vers le feu de joie. Tous s’y mêlent, jeunes gens, femmes, enfants, vieux soldats des guerres napoléoniennes, très à l’honneur24. À Coisia, petite commune du canton d’Arinthod, la presque totalité de la population, à l’exclusion de quelques rouges exaltés s’est portée sur un monticule qui domine toute la campagne […]. Les échos des montagnes redisaient les cris. Une immense ronde, de danseurs seulement, car les femmes étaient demeurées à quelques mètres, s’est formée autour de l’arbre et dansaient et sautaient pleins de joie et d’allégresse.

    40Le résultat fut une sorte de fédération de feux de joie. À Saint-Cyr, près d’Arbois, les spectateurs purent compter dans la nuit les quarante feux des villages voisins qui, avec les fusées et les feux d’artifice, donnaient « un inexprimable effet ». À Coisia, encore, on rentra au village aux cris de « Vive Napoléon ! » et en chantant des « hymnes guerriers qui rappelaient les souvenirs glorieux et les hauts faits de l’Empereur ». L’arbre de la Liberté avait été brûlé, déjà se profilait le temps des nationalismes. Mais laissons l’Empire à son populisme rustique. Il a été avancé que le système politique de la Deuxième République aurait été proche de celui que les Américains achevaient de mettre au point25, reposant entre autres, sur l’institution présidentielle et une sorte de « religion civique ». En étudiant les commémorations sous la Deuxième République nous avons pu constater combien la situation des deux pays était différente. Il y avait en France deux structures de pouvoir autoritaires, organisées verticalement et hiérarchiquement : l’État centralisé hérité de la monarchie absolue bureaucratique et de Napoléon d’une part, l’Église catholique nostalgique de sa prééminence au temps des monarques de droit divin de l’autre. Toutes deux refusaient la pluralité, la publicité et la concurrence des opinions, du moins sur le plan politique, car la pluralité religieuse était inscrite dans la loi depuis 1789 ; l’unité n’était plus la norme en matière religieuse, mais ce n’était pas encore le cas en politique26.

    41La Grande Révolution avait rejeté les inégalités et les complexités de l’Ancien Régime jugé oppressif, obscurantiste, attentatoire à la raison. Le siècle qui suivit rechercha la « réunion des citoyens », selon l’expression de Mona Ozouf, au moyen du serment, de la proclamation de la patrie en danger, de la levée en masse, de la Terreur, de la fête révolutionnaire, des plébiscites napoléoniens, du code civil, des préfets, de l’école. Les commémorations sous la Deuxième République illustrent parfaitement cet effort.

    42Des fractures restaient cependant ouvertes, ce qui conduisit les quarante-huitards à jeter un voile sur la Révolution de 1789, à choisir deux fêtes commémoratives et à essuyer les rebuffades de l’Église catholique. D’autres fractures s’ouvraient, ainsi la question sociale ou la montée des nationalismes, à la suite de l’échec du Printemps des peuples. Ce sont les républicains de la Troisième République qui, après 1879, placèrent la pluralité politique au centre de l’État de droit et firent en sorte, par les « lois de liberté » que le citoyen puisse s’en servir et devenir ainsi acteur politique. Quant aux célébrations républicaines, juge Olivier Ihl, ils les élaborèrent à partir d’une « reconquête » de la mémoire de la Révolution française, c’est-à-dire de leur généalogie politique et aussi à la suite d’une réflexion sur les acquis, les illusions et les échecs de la Deuxième République.

    Notes de bas de page

    1 La monarchie de Juillet a, au moins à ses débuts, célébré aussi les Trois Glorieuses et la mémoire des citoyens tombés pour la liberté en 1830.

    2 La documentation utilisée pour cette étude est tirée presque exclusivement de la liasse M 3951, Fêtes nationales, aux archives départementales du Jura.

    3 Saillard Denis, 1995, La mémoire de la Révolution en Franche-Comté 1815-1914, thèse de doctorat, Paris, Université Paris 1.

    4 D’après Lalanne Ernest, 1887, Les fêtes de la Révolution, Paris, Société d’édition et de publications, la fête du 27 août 1792 en l’honneur des victimes du 10 août fut la première fois où l’Église ne fut pas appelée à prier sur le cénotaphe des morts. Le baptême civique fut adopté par la Fédération de Strasbourg en 1790.

    5 Ozouf Mona, 1976, La fête révolutionnaire (1789-1799), Paris, Gallimard.

    6 Ihl Olivier, 1995, La fête républicaine, Paris, Gallimard.

    7 Corbin Alain (dir.), 1994, Les usages politiques des fêtes aux xixe-xxe siècles, actes du colloque des 22 et 23 novembre 1990, Paris, Publications de la Sorbonne.

    8 Seul le corps judiciaire devait rejoindre directement l’église depuis le palais de justice. Ce cérémonial était déjà celui qu’avait adopté la monarchie de Juillet, à l’occasion de la Saint-Philippe.

    9 On notera l’importance prise par la mairie dans la géographie du village depuis la monarchie de Juillet.

    10 Les « boîtes » étaient de petits mortiers. La quantité de poudre nécessaire était étroitement contrôlée par les maires et les sous-préfets (ADJ, MP 221, Poudres à feu 1848-1875).

    11 Distribution d’aliments (pain, viande, vin) aux indigents. Établies sur les ressources communales et considérées comme des actes de charité et de bienfaisance, elles se retrouvent sous tous les régimes. Bien peu de communes s’y refusaient, sauf celles qui n’avaient aucune ressource pour cela. Le préfet précisait toujours qu’elles devaient être réglées dans les limites des ressources communales et que tout devait se passer « dignement et convenablement ». Le nombre de familles pauvres paraît parfois élevé : 95 à Arinthod, 22 dans la petite commune de Miéry. Pourtant quelques communes affirment ne pas avoir de pauvres. Les ressources des petites communes étaient très limitées et étroitement contrôlées par le préfet. Celle du Franois, par exemple, demandait l’autorisation préfectorale pour une dépense imprévue de 8 F.

    12 Le drapeau tricolore est rarement signalé. On n’en est pas encore à la débauche de tricolore qui marqua la fête des Drapeaux du 30 juin 1878.

    13 Mona Ozouf note également sous la Grande Révolution : « la peur du rassemblement […] Le peuple n’est qu’un public » (op. cit., p. 247). Ihl Olivier : « Rien à voir avec le plan horizontal d’une citoyenneté dépourvue de référent religieux. Il est tout entier celui, vertical, d’une transcendance ordonnée par l’institution ecclésiale » (op. cit., p. 65).

    14 Circulaire du 20 avril 1850, ADJ, M 3951, Fêtes nationales.

    15 Une attitude semblable du clergé a été relevée quelquefois sous la monarchie de Juillet (cf. Corbin Alain, op. cit.).

    16 Ozouf Mona, op. cit., p. 303.

    17 Le médecin Lupicin Paget, gérant du journal républicain de Salins, La Démocratie jurassienne, s’est lancé dans des considérations antisémites, isolées, semble-t-il : cf. Lebrasseur Paule, 1972, Un journal républicain sous la Seconde République, La Démocratie jurassienne, mémoire de maîtrise, Besançon, Université de Franche-Comté.

    18 ADJ, M 69.

    19 L’expression ne manque pas de saveur, ni de signification politique : on passe de deux fêtes à une fête, mais dont l’intensité est pour ainsi dire redoublée et, de plus, sanctifiée.

    20 En 1851, le maire de Cogna, près de Clairvaux, demande l’autorisation de remplacer l’arbre de la Liberté qui est sec par un arbre sapin (l’expression « arbre sapin » était courante à l’époque dans la région) pris dans la forêt communale. Réponse du préfet : « défense absolue dans l’intérêt de la commune ». À Condes, le maire demande de pouvoir couper l’arbre de la Liberté, un arbre sapin, pour réparer l’église. Autorisation du préfet. Le 15 août 1852, on plante à Jouhe une charmille en l’honneur du Prince-Président. À Villers-Farlay, on dresse pour la première fois un mât de cocagne, mais il s’agit de l’arbre d’Honneur, signe de joie et de bienveillance, car le symbolisme de l’arbre est ambivalent. L’arbre est l’enjeu d’une guerre des symboles.

    21 Elle fut abandonnée, semble-t-il, dès 1853.

    22 À Balaiseau et Petit-Noir près de Dole, la plupart des maisons sont encore couvertes de chaume. Une vague d’incendies, parfois criminels, avait secoué la région en 1851 et 1852 (cf. l’affaire de l’instituteur Pierre Vaux, de Longepierre en Saône-et-Loire).

    23 Les points culminants acquièrent au xixe siècle une importance pratique et symbolique nouvelle : télégraphe optique, ascensions, édifices religieux, monuments nationaux.

    24 Les curés ne participent pas, semble-t-il, à ces réjouissances nocturnes.

    25 Non sans une terrible guerre civile, la guerre de Sécession.

    26 « Il n’était pas permis de se dire républicain là où il l’était de se dire athée », écrivait Louis Blanc sous la monarchie de Juillet (cité par Castries [le duc de], 1983, Monsieur Thiers, Paris, Perrin, p. ?). Sous la Deuxième République la situation n’avait guère changé.

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    1 La monarchie de Juillet a, au moins à ses débuts, célébré aussi les Trois Glorieuses et la mémoire des citoyens tombés pour la liberté en 1830.

    2 La documentation utilisée pour cette étude est tirée presque exclusivement de la liasse M 3951, Fêtes nationales, aux archives départementales du Jura.

    3 Saillard Denis, 1995, La mémoire de la Révolution en Franche-Comté 1815-1914, thèse de doctorat, Paris, Université Paris 1.

    4 D’après Lalanne Ernest, 1887, Les fêtes de la Révolution, Paris, Société d’édition et de publications, la fête du 27 août 1792 en l’honneur des victimes du 10 août fut la première fois où l’Église ne fut pas appelée à prier sur le cénotaphe des morts. Le baptême civique fut adopté par la Fédération de Strasbourg en 1790.

    5 Ozouf Mona, 1976, La fête révolutionnaire (1789-1799), Paris, Gallimard.

    6 Ihl Olivier, 1995, La fête républicaine, Paris, Gallimard.

    7 Corbin Alain (dir.), 1994, Les usages politiques des fêtes aux xixe-xxe siècles, actes du colloque des 22 et 23 novembre 1990, Paris, Publications de la Sorbonne.

    8 Seul le corps judiciaire devait rejoindre directement l’église depuis le palais de justice. Ce cérémonial était déjà celui qu’avait adopté la monarchie de Juillet, à l’occasion de la Saint-Philippe.

    9 On notera l’importance prise par la mairie dans la géographie du village depuis la monarchie de Juillet.

    10 Les « boîtes » étaient de petits mortiers. La quantité de poudre nécessaire était étroitement contrôlée par les maires et les sous-préfets (ADJ, MP 221, Poudres à feu 1848-1875).

    11 Distribution d’aliments (pain, viande, vin) aux indigents. Établies sur les ressources communales et considérées comme des actes de charité et de bienfaisance, elles se retrouvent sous tous les régimes. Bien peu de communes s’y refusaient, sauf celles qui n’avaient aucune ressource pour cela. Le préfet précisait toujours qu’elles devaient être réglées dans les limites des ressources communales et que tout devait se passer « dignement et convenablement ». Le nombre de familles pauvres paraît parfois élevé : 95 à Arinthod, 22 dans la petite commune de Miéry. Pourtant quelques communes affirment ne pas avoir de pauvres. Les ressources des petites communes étaient très limitées et étroitement contrôlées par le préfet. Celle du Franois, par exemple, demandait l’autorisation préfectorale pour une dépense imprévue de 8 F.

    12 Le drapeau tricolore est rarement signalé. On n’en est pas encore à la débauche de tricolore qui marqua la fête des Drapeaux du 30 juin 1878.

    13 Mona Ozouf note également sous la Grande Révolution : « la peur du rassemblement […] Le peuple n’est qu’un public » (op. cit., p. 247). Ihl Olivier : « Rien à voir avec le plan horizontal d’une citoyenneté dépourvue de référent religieux. Il est tout entier celui, vertical, d’une transcendance ordonnée par l’institution ecclésiale » (op. cit., p. 65).

    14 Circulaire du 20 avril 1850, ADJ, M 3951, Fêtes nationales.

    15 Une attitude semblable du clergé a été relevée quelquefois sous la monarchie de Juillet (cf. Corbin Alain, op. cit.).

    16 Ozouf Mona, op. cit., p. 303.

    17 Le médecin Lupicin Paget, gérant du journal républicain de Salins, La Démocratie jurassienne, s’est lancé dans des considérations antisémites, isolées, semble-t-il : cf. Lebrasseur Paule, 1972, Un journal républicain sous la Seconde République, La Démocratie jurassienne, mémoire de maîtrise, Besançon, Université de Franche-Comté.

    18 ADJ, M 69.

    19 L’expression ne manque pas de saveur, ni de signification politique : on passe de deux fêtes à une fête, mais dont l’intensité est pour ainsi dire redoublée et, de plus, sanctifiée.

    20 En 1851, le maire de Cogna, près de Clairvaux, demande l’autorisation de remplacer l’arbre de la Liberté qui est sec par un arbre sapin (l’expression « arbre sapin » était courante à l’époque dans la région) pris dans la forêt communale. Réponse du préfet : « défense absolue dans l’intérêt de la commune ». À Condes, le maire demande de pouvoir couper l’arbre de la Liberté, un arbre sapin, pour réparer l’église. Autorisation du préfet. Le 15 août 1852, on plante à Jouhe une charmille en l’honneur du Prince-Président. À Villers-Farlay, on dresse pour la première fois un mât de cocagne, mais il s’agit de l’arbre d’Honneur, signe de joie et de bienveillance, car le symbolisme de l’arbre est ambivalent. L’arbre est l’enjeu d’une guerre des symboles.

    21 Elle fut abandonnée, semble-t-il, dès 1853.

    22 À Balaiseau et Petit-Noir près de Dole, la plupart des maisons sont encore couvertes de chaume. Une vague d’incendies, parfois criminels, avait secoué la région en 1851 et 1852 (cf. l’affaire de l’instituteur Pierre Vaux, de Longepierre en Saône-et-Loire).

    23 Les points culminants acquièrent au xixe siècle une importance pratique et symbolique nouvelle : télégraphe optique, ascensions, édifices religieux, monuments nationaux.

    24 Les curés ne participent pas, semble-t-il, à ces réjouissances nocturnes.

    25 Non sans une terrible guerre civile, la guerre de Sécession.

    26 « Il n’était pas permis de se dire républicain là où il l’était de se dire athée », écrivait Louis Blanc sous la monarchie de Juillet (cité par Castries [le duc de], 1983, Monsieur Thiers, Paris, Perrin, p. ?). Sous la Deuxième République la situation n’avait guère changé.

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    Ce livre est cité par

    • Castleton, Edward. (2018) Untimely Meditations on the Revolution of 1848 in France. Opera Historica, 19. DOI: 10.32725/oph.2018.021

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    Merlin, P. (2017). Commémorations officielles sous la Deuxième République (1849-1852). In La formation d’une opinion démocratique (1‑). Presses universitaires de Franche-Comté. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pufc.5512
    Merlin, Pierre. « Commémorations officielles sous la Deuxième République (1849-1852) ». In La formation d’une opinion démocratique. Besançon: Presses universitaires de Franche-Comté, 2017. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pufc.5512.
    Merlin, Pierre. « Commémorations officielles sous la Deuxième République (1849-1852) ». La formation d’une opinion démocratique, Presses universitaires de Franche-Comté, 2017, https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pufc.5512.

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    Merlin, P. (2017). La formation d’une opinion démocratique (1‑). Presses universitaires de Franche-Comté. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pufc.5487
    Merlin, Pierre. La formation d’une opinion démocratique. Besançon: Presses universitaires de Franche-Comté, 2017. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pufc.5487.
    Merlin, Pierre. La formation d’une opinion démocratique. Presses universitaires de Franche-Comté, 2017, https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pufc.5487.
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