Chapitre 1. La mise en place des offices de receveurs particuliers
p. 109-121
Texte intégral
1L'installation d'un nouveau régime d'administration implique nécessairement des délais en raison de la diversité des conditions qu'il faut réunir : désigner les personnes aptes à remplir les fonctions, préparer le milieu destiné à les accueillir, familiariser la population aux disciplines et aux contraintes inhérentes à l'existence d'une administration, surtout lorsqu'il s'agit de celle dont la raison d'être est le recouvrement des impôts. Cette mise en place était d'autant plus difficile à accomplir en Franche-Comté que la levée d'impôts y était exceptionnelle, que l'autorité qui s'y exerçait était lointaine, que pour l'essentiel, les revenus du domaine des comtes de Bourgogne suffisaient à pourvoir à des dépenses modérées et enfin que l'autorité se manifestait dans le cadre de seigneuries ou de communautés de villes, de bourgs, plutôt que dans celui d'une administration centralisée.
2La mise en place des offices des receveurs particuliers créés par les édits de 1692 et 1693 a été lente faute des personnes susceptibles d'en exercer les fonctions et surtout d'en payer le prix.
Création, fonctions et statut des receveurs particuliers
3La nature des fonctions des receveurs particuliers et le cadre géographique dans lequel ils auraient à les exercer ont été définis, ce qui avait pour conséquence de transposer dans le cadre de la province l'organisation existant sous des vocables divers dans le reste du royaume, avec les aménagements tenant compte des clauses des capitulations de 1668 et 1674. L'article huit de l'édit de 1692 prévoyait la création de neuf offices de conseillers, receveurs particuliers, chargés de « faire la recette et le recouvrement des impositions ordinaires et extraordinaires », le terme de taille ou de taillon en usage dans d'autres provinces étant évité. Ce recouvrement était effectué sur place par des collecteurs désignés par des syndics de paroisse ou par les autorités chargées d'effectuer « le repartement ».
4Les receveurs particuliers étaient donc appelés, dans le cadre de leur compétence géographique à « porter et voiturer » à la recette générale les deniers des impositions, « es-mains » dont l'encaissement devait donner lieu à des quittances du receveur général en fonction dans l'année. Ces quittances étaient soumises à la vérification d'un contrôleur général. Les versements effectués dans ces conditions par les receveurs particuliers étaient portés en dépenses dans leurs comptes —le mot dépense correspondant à une sortie de fonds— ainsi que les gages et charges assignés sur leurs recettes. Ces « dépenses » ne pouvaient être payées qu'en vertu d'états annuellement établis par le conseil du roi. Pour la rémunération de leur mission ils recevaient des gages s'élevant à 400 l. pour deux quartiers, rémunération à laquelle il faut adjoindre trois deniers par livre sur les recettes des impôts, les sommes ainsi recueillies étant destinées à couvrir toute taxation, frais de recouvrement, pertes et avances. En plus des gages et des taxations sur les impositions, les receveurs étaient habilités à recevoir les titres du recouvrement des deniers d'octroi soit :
- 1 s. par livre au-dessous de 3 000 l.
- 8 d. par livre entre 3 000 et 10 000 l.
- 6 d. par livre au-dessus de 10 000 l.
5L'édit prévoyait que les receveurs auraient le droit d'assister aux adjudications des deniers d'octroi et des ouvrages publics, de recevoir les cautions des adjudicataires et d'en retenir le montant. Ils participaient avec voix délibérative aux assemblées des villes et des communautés pour les affaires d'octroi, acquittaient sur mandat du maire ou des échevins « les dépenses concernant l'entretien, la réparation des murailles, ponts, portes et ouvrages publics des villes et des bourgs ». Ils devaient rendre compte de leurs opérations conjointement avec le compte des impositions mais sur un chapitre distinct.
Le statut personnel des receveurs particuliers
6L'édit définissait le statut des receveurs particuliers dont la charge était constituée « en offices formés et héréditaires », ceci impliquait que ces offices soient acquis moyennant finance, et entrent ainsi dans le patrimoine des comptables ; ceux-ci étant devenus propriétaires pouvaient en disposer soit par vente amiable, soit à titre d'héritage, de survivance et ne pouvaient en être dessaisis que dans le cadre d'une procédure judiciaire soumise au contrôle du Conseil du roi.
7L'attribution de l'office devait se conformer aux conditions prévues pour tous les autres offices, c'est-à-dire : règlement de leur contribution aux parties casuelles qui authentifiait la propriété de l'office, paiement du marc d’or, avoir atteint sauf dispense l'âge de 25 ans, dûment attesté par un extrait baptistaire, enfin certificat de bonne vie et mœurs et d'observance de la religion catholique. A ces conditions applicables à tous les offices royaux, s'ajoutaient, pour les receveurs, des conditions supplémentaires tenant à la nature de leurs fonctions et à leur responsabilité propre quant au maniement des deniers royaux lequel devait être garanti par la présentation d'une caution constituée soit par une personne responsable, soit par le versement d'une somme proportionnée au montant de leurs opérations. Les comptables des deniers royaux relevaient du régime général des offices appliqué à une multitude de fonctions allant des plus hautes, telles que celles des conseillers d'Etat, aux plus modestes qui, au cours des temps, s'étaient multipliées.
Le cadre juridique
8Les offices comptables comportaient les servitudes particulières d'un encadrement à la fois contraignant et ambigu puisque ce cadre devait concilier deux éléments : la propriété personnelle d'un office héréditaire et la responsabilité financière à assumer dans le maniement des deniers royaux. Ce régime avait fait l'objet, avant le rattachement de la Franche-Comté au royaume, de deux textes fondamentaux élaborés par Colbert, qui définissaient les principes d'administration applicables aux finances royales et la responsabilité financière des comptables, c'est-à-dire l’ordonnance et l'édit d’août 1669, la première servant de règlement pour les Chambres des comptes, le second instituant l’hypothèque du roi sur leurs biens. L’expérience des receveurs comtois montrera que ces dispositions n’étaient pas théoriques et qu'elles ont reçu pour certains d’entre eux, une application entraînant des conséquences ruineuses pour eux-mêmes et leur famille.
9En effet, l’ordonnance d’août 1669 invoque d’abord le souci de rétablir l’ordre et la sécurité des finances dans le royaume et la nécessité de remettre en vigueur d’anciennes ordonnances. Dans le préambule de l’édit sur le régime des biens des comptables, il est indiqué que les officiers qui ont le maniement des deniers royaux les emploient trop souvent en acquisition de meubles, de charges, de maisons et de terres — on entrevoit l’ombre de Fouquet — et que l’exercice du privilège royal et du droit de suite et de propriété sur les biens doit se traduire par leur restitution en remédiant aux défauts des procédures antérieures utilisées pour les restitutions qui se révélaient génératrices de frais et de délais préjudiciables au Trésor. Un premier principe de l’ordonnance d’août 1669
« fait défense à toutes sortes de personnes de s'immiscer en la recette et le maniement de nos deniers sans nos lettres de provision ou commission, enregistrées en nos Chambres des comptes et sans avoir fourni les cautions nécessaires, à peine de 3 000 francs d'amende ».
10Cet article dont la portée subsiste dans son inspiration générale établit une des dispositions essentielles du droit financier, qui repose sur l'exigence d'un titre officiel pour détenir des fonds publics et par l'interdiction qui est faite aux tiers de s'immiscer dans leur gestion ; il est assorti d’un système de sanctions pour les infractions allant à l’encontre de ces deux principes.
11Une autre disposition assure le droit de préférence du roi sur tous les autres créanciers du comptable. Cette préférence s'exerce à l'encontre des biens de tous les comptables royaux, receveurs généraux ou particuliers, fermiers généraux et s'applique aux deniers qu'ils peuvent détenir, y compris ceux provenant de la vente des biens immeubles ou effets mobiliers, déduction faite toutefois des frais funéraires. Le privilège s'appliquait également au produit de la vente des offices. Il faut noter l'importance attachée au sort réservé aux biens des femmes des comptables séparées de leur mari ; pour celles-ci, il s'agit de distinguer ce qui est susceptible de leur appartenir en propre et ce qui peut être pris en charge pour garantir les intérêts du Trésor. Cette disposition était d’autant plus nécessaire qu'il était de pratique assez courante que les biens de la femme soient mentionnés dans les contrats comme garantie de la gestion du mari. La mise en œuvre de ces dispositions permettra d'éclairer certaines expériences vécues par les comptables comtois et apportera une illustration pratique de l'application donnée à ce fondement de l'administration financière, établi durablement par Colbert en 1669.
Le cadre géographique
12L'édit de 1692 définissait le cadre géographique du ressort des offices, formant ainsi une structure durable de l’administration de la province pour le recouvrement des impôts. Prévu à l'origine à raison d’un receveur pour les bailliages de Dole, de Vesoul, de Gray, de Besançon et de Pontarlier, il créait un receveur commun à Lons-Le-Saunier pour les bailliages de Montmorot et Orgelet, un à Salins unissant les bailliages de Salins et Quingey, un à Poligny pour les bailliages de Poligny et Arbois, un à Baume-les-Dames pour les bailliages de Baume et Omans. Un édit d’avril 1693 complétait ce dispositif en créant un dixième office de receveur particulier pour la terre de Saint-Claude.
13En juillet 1693 un autre édit procède au doublement du nombre de ces offices par la division de chacun d’eux en deux offices également héréditaires, désignés offices « ancien » et « alternatif », leurs propriétaires devant exercer leurs fonctions suivant un système d'alternance annuel se succédant les années paires et impaires, comme pour les receveurs généraux. Les gages et taxations de ces receveurs sont réduits à 200 l. pour deux quartiers et à trois deniers par livre pour les fonds maniés dans l’année de leur exercice. Le nombre des offices particuliers était ainsi porté à 20, les besoins d'argent résultant des guerres devaient conduire à de nouvelles créations. Un édit de février 1699 prévoit en effet l'adjonction d'offices triennaux avec les mêmes privilèges, les mêmes fonctions que les offices anciens et alternatifs, et comme ces derniers, héréditaires. Ils sont de même nature et obéissent aux mêmes règles que les receveurs en fonction. Comme eux, ils sont assujettis à des augmentations de gages ou suppléments de finance qui consistent à exiger du titulaire d'un office le versement d'une certaine somme ouvrant droit au versement d'une sorte de rente inscrite dans les états du roi dont le versement et la périodicité pouvaient être aléatoires. La même nécessité est également à l'origine d'un édit de 1712 prévoyant que les receveurs des impositions devaient obtenir la confirmation de la propriété de leurs offices moyennant un supplément de finance. Une déclaration du roi du 22 mars 1712 justifia cette mesure par le fait que la disette de l’année 1709 avait conduit à vendre les offices triennaux au-dessous de leur juste valeur et qu'il convenait, les temps étant devenus plus favorables, de réévaluer ces derniers pour les mettre en harmonie avec leur valeur réelle. Ce supplément de finance conditionnait le maintien de la propriété des offices à perpétuité, assorti de celui de tous les droits, privilèges, gages, et taxations affectés aux offices anciens et alternatifs. Pour les receveurs triennaux, cette perpétuité devait être précaire. En effet un édit de février 1729 décidait leur suppression, mais avec l’obligation pour les receveurs propriétaires des offices anciens et alternatifs de les racheter.
14L'office triennal était maintenu ainsi dans le patrimoine du comptable, apparaissant sous une nouvelle dénomination, celle d'office « ancien mitriennal » et « alternatif mitriennal ».
15L'obligation de rachat des offices triennaux créés en 1709 devait être à l'origine de difficultés pour certains des receveurs particuliers de Franche-Comté. Le recours aux augmentations de gages, aux créations ou confirmations d'offices, a cessé au cours du règne de Louis XV à l’exception toutefois du rattachement aux offices des receveurs particuliers des finances, ou du receveur général des domaines et des bois, de certains offices des receveurs des eaux et forêts.
La laborieuse vente des offices de receveur particulier
16La mise en œuvre de la vénalité des charges en Franche-Comté a revêtu pour les receveurs particuliers des impositions ou des finances des particularités dont on peut penser qu'elles tiennent certes à la nature même des fonctions à exercer, mais aussi à des conditions propres à la Franche-Comté.
17L'engouement pour les charges, les honneurs ou les privilèges attachés à celles-ci, a été visiblement tempéré et ralenti par le prix des offices dans une province pauvre où le nombre des personnes aptes à en payer le prix était limité, mais aussi et surtout par les risques encourus par le comptable lui-même ainsi que sa famille en raison de la responsabilité financière inhérente à des opérations dont ils n'avaient pas la maîtrise.
18Nous verrons que cette responsabilité n’était pas une simple clause de style ni une formalité sans effet pratique et que pour certains possesseurs d'offices, ces risques ont pu être mal appréciés.
19Leur placement a sans doute également été compliqué par l'intervention d'intermédiaires dont le rôle exact est difficile à circonscrire. Ces intermédiaires pouvaient agir à des titres différents soit en tant que détenteurs de commissions royales telles que celles attribuées à Antoine Gatte et par la suite, pour les offices triennaux, à un nommé Coquillard ; soit à titre officieux comme Pierre Moreau agissant pour le compte du receveur général en l'espèce Pierre-François Durey.
20De toute façon la vente des offices a été laborieuse et a exigé des délais importants avant d'être menée à bien.
21Dans un premier stade l'entremise d'Antoine Gatte est réelle, son rôle a fait l'objet de lettres patentes ou de lettres de provision qui le chargeaient du recouvrement de la finance des offices créés. Mais son intervention a été de courte durée et il semble bien qu'elle n’ait consisté que dans l’encaissement des fonds pour le compte du Trésor et dans l'inscription, dans les états du roi destinés au receveur général des domaines et des bois, des gages des titulaires des offices, créés en application des édits de 1692 et 1693, plutôt que dans leur vente effective.
22Sa présence n'a d'ailleurs été relevée que dans un nombre restreint de cas, ceux de l'attribution à Gueugnot de l'office particulier de Besançon, à Claude-Alexis Damey de Baume-les-Dames et Omans et à Antoine Fontaine pour Salins et Quingey. A l'exception de Claude-Alexis Damey ces acquéreurs supposés n'ont pas conservé leur charge.
23La caractéristique essentielle qui a marqué l’introduction de la vénalité des charges des receveurs particuliers réside dans la part prépondérante prise par Pierre-François Durey, receveur général des finances, et sa famille, et dans le rôle de leur mandataire Pierre Moreau.
24Qualifié de bourgeois de Paris, on ne dispose que de peu de renseignements le concernant, sinon qu’il habitait rue du Roi-de-Sicile à Paris, qu'il était commis à l'extraordinaire des guerres et par conséquent qu'il agissait dans le sillage des Durey : Jean-Baptiste Durey de Vieux court et Joseph Durey de Sauroy, successivement trésoriers généraux de l'extraordinaire des guerres et qu’il a figuré dans la liste des « traitants » taxés par la Chambre de justice de 1716 pour 11 200 l.
25Présenté comme ayant détenu un certain nombre d’offices de receveur particulier de Franche-Comté et comme les ayant cédés après démission volontaire, il n'a pas exercé de fonction dans aucun d'entre eux. Son nom apparaît dans les lettres patentes ou de provision concernant les offices anciens ou alternatifs de Dole, Gray, Poligny Arbois, Pontarlier, Baume-les-Dames-Ornans et Salins-Quingey. Il apparaît également dans des actes relatifs aux augmentations de gages, de droits de quittance. Il ne réapparaîtra plus lors de l'attribution des offices triennaux.
26Quel a été son véritable rôle ? Il n'est pas détenteur de missions ou de commissions royales ; ses fonctions n'ont pas fait l'objet d'arrêt ou de lettres patentes les définissant. A-t-il été chargé de rechercher en Franche-Comté des candidats susceptibles de remplir ces fonctions ? C'est fort peu probable. L'intendant et ses subdélégués qui connaissent bien le milieu local, à défaut du receveur général des finances siégeant à Paris, étaient aptes à proposer les personnes qualifiées.
27Les acquéreurs potentiels d'offices n'avaient pas besoin de Moreau pour se faire connaître ; la plupart d'entre eux avaient des positions solides et reconnues dans le milieu local, Claude-Alexis Vaudrimey, à Gray, Jean-Claude Lambert et Ville vieille de l'Aurore à Dole, Antoine Le Bœuf à Pontarlier, Claude-Alexis Damey à Baume-les-Dames.
28Il n'apparaît pas non plus que Moreau puisse être un intermédiaire chargé de fournir un financement transitoire pour l'acquisition des offices en attendant que ceux-ci aient trouvé un acquéreur définitif. Il est employé dans l'extraordinaire des guerres, il est donc peu probable qu'il ait été en état de disposer de fonds que les Durey n'auraient pu fournir.
29Les attendus des arrêts relatifs aux lettres de provision ou de commission sont peu explicites quant au rôle exact de Moreau. Ils indiquent que l'office a été levé « en nos revenus casuels » par lui « lequel désire s'en démettre au profit de..., formule utilisée dans le cas choisi parmi d'autres de Jacques-Alexis Vaudrimey pour l'acquisition de l'office alternatif de Gray ; les lettres de provision font mention de l'acte de démission de Moreau mais il est clair que le mot « démission » ne peut être compris dans sa signification actuelle puisque l'intéressé n'a pas lui-même reçu de lettre de provision ou de commission et qu'il n'a pas exercé les fonctions de receveur à Gray. L'acte de vente a été passé à Paris devant le notaire Caillet. Le prix n'est pas porté dans l'acte.
30Pour l'office ancien de Gray, aux lettres patentes adressées à Louis-Antoine Vouelle, est jointe la quittance de finance signée Bertin du 19 septembre 1695 comportant la mention suivante : « j'ai reçu de Pierre Moreau la somme de 8 150 l. », reçu auquel est joint l'acte de résignation de Moreau au profit de Vouelle. L'explication la plus plausible est que Moreau n'est que le prête-nom de Pierre-François Durey et de sa famille conduits à acquérir les offices de Franche-Comté pour lesquels les acquéreurs ne se précipitaient pas.
31Mais pour quelle raison ne se portaient-ils pas directement et ouvertement comme les acquéreurs effectifs ? Sur ce point, on ne peut avancer que quelques conjectures.
32On a vu que Pierre-François Durey avait en dépit de l'édit de 1670 qui interdisait le cumul de plusieurs charges de receveur général, obtenu par dérogation l'attribution des trois charges de receveur général des finances pour la Franche-Comté.
33En ce qui concerne le cumul des charges de receveur général avec celles de receveur particulier, en Franche-Comté, il semble bien que la difficulté de les placer ait conduit à mettre en demeure le receveur général d'acquérir les offices non vendus. En décembre 1703, il lui est fait obligation de « se charger des offices de receveur particulier de Besançon, Dole, Gray, Vesoul, Poligny, pour en faire les fonctions et pour y commettre et jouir des droits y attribués ».
34Une obligation semblable était faite au receveur général des domaines et des bois pour les charges non vendues de receveurs des eaux et forêts.
35Un arrêt du Conseil dispose qu'il sera expédié des provisions à ceux qui se présentent pour acquérir les offices de receveurs particuliers anciens et alternatifs de Besançon et Poligny-Arbois « nonobstant la surannation du contrôle des quittances de finances » ; la surannation consistait dans la perte de validité d'un acte un an après son émission. Cette décision du Conseil montre bien que les mesures nécessaires étaient prises pour accélérer la vente des offices. En février 1695, Moreau paie une quittance de 5 000 l. pour l'office alternatif de Besançon et donne en septembre 1696 sa démission du même office au profit d’un nouvel acquéreur dont le nom est laissé en blanc.
36De toute façon, il est plus facile de déterminer ceux des offices qui ont été directement vendus, dès l'origine, à des tiers que de dresser un état probant de la part que les Durey ont pu prendre dans la propriété des offices de receveurs particuliers. Celle-ci est évolutive, elle est affectée par les mutations consécutives au décès de Pierre François Durey et de son épouse et les transactions intervenues entre leurs héritiers.
37Une série de documents permet d'en établir l'étendue, l'évolution et la répartition entre les membres de la famille. Il s'agit notamment :
- de l'inventaire et de la reconnaissance des biens de Jeanne Madeleine Durey après son décès en 1706 ;
- de l'inventaire du partage établi, celui-ci, le 11 septembre 1711, de la communauté de Pierre-François Durey et de son épouse à la suite de leur décès ;
- des déclarations des membres de la famille reconnus justiciables de la Chambre de justice de 1716 ;
- l'inventaire des papiers de Durey de Poligny établi après son décès en 1728 par Henri d'Ormesson, intendant des finances ;
- de certains des actes de cession intervenus, lorsqu'ils ont pu être identifiés.
38L'installation des offices de receveurs particuliers a répondu dans chaque cas à des conditions spéciales qui seront exposées par la suite dans la mesure où elles présentent une valeur d'enseignement. Le fait le plus caractéristique est la part prépondérante des Durey dans les acquisitions initiales dont le partage de la succession de Pierre-François Durey en 1711 apporte une illustration.
Le partage des offices de receveurs particuliers dans la succession de Pierre-François Durey
39Les conditions du partage de cette succession ont déjà été évoquées dans le développement concernant la dévolution de ses biens et de ceux de son épouse, la charge de receveur général des finances évaluée à 155 454 l. ayant fait l'objet d'une répartition égale entre tous ses héritiers. Mais dans l'analyse de l'installation des receveurs particuliers en Franche-Comté, on ne peut pas ne pas évoquer l'importance qu'a pu revêtir le fait que la famille du receveur général était au moment du décès encore propriétaire de la plupart des offices ainsi que des droits qui s'y trouvaient rattachés.
40Pour les offices, le partage ne pouvait être effectué de façon uniforme puisque ceux d'entre eux qui demeuraient dans la succession de Pierre-François Durey, étaient de valeur inégale et surtout peu nombreux l'intéressé n'ayant conservé au moment de son décès, en toute propriété, que l'office ancien de Poligny-Arbois. La constitution des lots ne pouvait être homogène que si le partage prenait en compte non seulement ces offices mais aussi les droits qui y étaient attachés, c'est à dire les augmentations de gages ou les droits de quittance ceux-ci attachés à la totalité des offices de receveurs particuliers.
41Ces derniers, dont le paiement avait été imposé par un édit d'octobre 1693 en y assujettissant d'une part la charge de receveur général et d'autre part celles des receveurs particuliers, pour une somme de 25 000 l. auxquelles s'ajoutaient deux sols par livre calculés suivant deux arrêts du Conseil des 22 mars et 16 avril 1695. Pour la Franche-Comté, la répartition était la suivante : Vesoul 5 600 l., Saint-Claude 1 000 l., Salins-Quingey 1 700 l., Pontarlier 1 000 l., Lons-le-Saunier-Orgelet 3 100 l., Poligny-Arbois 1 300 1., Gray 2 000 l., Dole 2 000 l., Baume-Ornans 3 6001., Besançon 2 000 l.
42Ces sommes, payées par les Durey sur leurs propres deniers, entraient donc dans la succession et dans la composition de chacun des neuf lots.
43Ce partage avait pour conséquence de définir les droits de propriété des héritiers sur les offices mais il était sans incidence sur la situation des receveurs en place. Il représentait de toute façon une étape dans la clarification de la propriété des offices.
44La répartition des offices et des droits était la suivante :
Lots | Bénéficiaires | Composition des lots |
1 | Gérard Durey de Poligny. | 1/3 de l’office alternatif de Besançon, 3 670 l. 10 s. 6 d. |
2 | Philiberte Durey ép. de Joly de Berry, Prés. à la Chbre des cptes de Dijon. | 1/3 de l'office ancien de Poligny-Arbois et des augmentations de gages : 4 415 l. |
3 | Fille et veuve d'Etienne Brunet de Montforand, Prés. au Parl. de Metz. | 1/3 de l'office alternatif de Besançon et des augmentations de gages. |
4 | Joseph Durey de Sauroy. | Un tiers alternatif de Besançon. |
5 | Louise-Madeleine Durey, ép. de J.-Maurice de Chalas, Rec. gén. d | 1/3 de l'office ancien de Poligny-Arbois ; des augmentations de gages. |
6 | Jacques-Bernard Durey de Noinville. | 1/3 de l'office ancien de Poligny-Arbois et 1/3 augmentation de gages : 4 415 l. |
7 | Jean-Baptiste Durey de Vieuxcourt. | 1/2 des droits de quittance sur les recettes de St-Claude, Lons, Orgelet, Dole, Gray |
8 | Pierre Durey d'Harnoncourt | 1/2 des droits de quittance : 4 455 l. |
9 | Jeanne-Anne Durey, épouse Chauveau | Office de contrôleur des augmentations de gages du Parl. de Paris |
Les comptables de Franche-Comté devant la Chambre de justice de 1716
45La Chambre de justice n'a pas oublié les comptables exerçant en Franche-Comté. Dans les rôles qui ont été émis en application de ses décisions, on trouve la plupart des membres des familles Brunet et Durey, et d'abord ceux des fils de Pierre-François Durey. Jean-Baptiste Durey de Vieux court est taxé pour 3 200 000 l., montant considérable résultant de sa part dans la Ferme générale et qui le conduira à vendre les parts d'office dont il était propriétaire, du moins partiellement, en Franche-Comté ; Joseph Durey de Sauroy est appelé à régler 1 000 000 de livres, l'un des deux receveurs généraux en fonction en 1716 Durey de Poligny, ne pourra pas en payer la totalité. On relève également les noms de Pierre Monnier, receveur général des domaines et des bois, pour 20 000 l., Dauzeret, receveur général des Salines, pour 10 000 l. Les receveurs particuliers titulaires de charges sont taxés avec en tête Anatoile Lyautey, pour 132 000 l., ce qui montre qu'il devait posséder d'autres charges que celle de receveur particulier, Grand maison pour 20 000 l., Ville vieille de l'Aurore pour 11 000 l., Claude-Philibert Pajot pour 10 000 l., Antoine Mollard pour 8 600 l., Etienne-Bonnaventure de Fussy pour 8 200 l., la veuve de Vaudrimey pour 8 000 l., Antoine Le Bœuf pour 6 000 l., César Lefebvre pour 2 200 l., Claude Houllier pour 8 200 l.
Les offices de Vesoul
46L’office de Vesoul correspondant au bailliage d'Amont sera, jusqu'à la Révolution, le plus important quant au volume de ses opérations. Après l'attribution, peut-être fictive et en tout cas éphémère de cet office par lettre de provision du 23 mars 1693, moyennant quittance de 28 000 l., à Jean Carlier, bourgeois de Paris, intéressé dans les fermes royales. L'office ancien avait été attribué à Nicolas Tavaux par des lettres de provision délivrées le 26 mars 1694, moyennant une quittance de finance de 14 400 l. à laquelle s'ajoutaient 1 440 l. au titre de la taxe des deux sols pour livre.
47Nicolas Tavaux, également désigné pour l'office de Besançon, après avoir réglé sa « quittance de finance » pour l’office de Vesoul avait dû faire face aux multiples et fréquentes charges imposées aux gens de finances à la fin du règne de Louis XIV, soit 3 705 l. en 1707, au titre du supplément de finance des receveurs particuliers, auxquelles s'ajoutaient 4 516 l. 1 s. 3 d. au titre de la réunion des offices des commissaires de la subvention du bailliage de Vesoul, rattachés à l'office des receveurs particuliers.
48La reddition de ses comptes de receveur particulier ayant conduit à constater un déficit de 24 535 l. dont il se trouvait débiteur envers le receveur général, Nicolas Tavaux avait dû céder son office en compensation de sa dette à Pierre-François Durey.
49En raison de ses difficultés financières, Nicolas Tavaux avait été amené à se dessaisir de l'office ancien. L'office alternatif sans doute possédé jusqu'alors par les Durey avait été acquis le 3 juin 1699 par Claude-Antoine Lyautey, qui appartenait à une importante famille de Vesoul possédant les ressources nécessaires pour faire face à cette acquisition. Les lettres de provision font mention d'une quittance de finance de 14 535 l. pour le principal, auquel s'ajoutent 1 453 l. pour les deux sols par livre.
50Comme Nicolas Tavaux, en 1700, Claude-Antoine Lyautey a dû payer 3 200 l. pour le principal du supplément de finance imposé aux receveurs particuliers et 320 l. pour les deux sols par livre, enfin, le 28 août 1704, 4 516 l. pour la réunion des offices des commissaires à la « subvention » de Vesoul.
51La famille Lyautey entrait donc dans la propriété des offices de Vesoul qu'elle devait conserver jusqu'à la Révolution. L'office ancien sera acquis le 28 mai 1711 par Anatoile Lyautey, neveu de Claude-François, conjointement avec l'office alternatif, après le décès de son oncle pour la somme de 38 000 l. représentant le prix des offices particuliers de Vesoul.
52Le cas des Lyautey est singulier car il présente la réunion dans une même famille à l'origine propriétaire de charges royales, apothicaire, notaire, d'offices de finances et de seigneuries susceptibles de leur conférer la noblesse. En outre, Anatoile Lyautey fera l'achat en 1713, auprès de Ferdinand de Grammont, de la seigneurie de Colombe-lès-Vesoul avec haute, moyenne et basse justice ; Claude-Joseph son petit-fils deviendra en 1764 seigneur de Genevreuille et Anatoile-Joseph, autre petit-fils se rendra titulaire du fief d'Essernay proche de Colombe relevant de la seigneurie de Faucogney.
L'office de Pontarlier
53Le 9 janvier 1694, Antoine Le Bœuf recevait les « commissions » pour les deux offices de receveur particulier de Pontarlier pour lesquels il avait été invité à fournir une caution. Le 15 octobre 1699, des lettres de provision lui sont délivrées pour l'office alternatif et le 8 décembre 1700 pour l'office ancien, le prix de l’une et l'autre charge étant fixé à 7 088 l. La délivrance des lettres de provision ne signifiait pas que leur bénéficiaire soit devenu propriétaire des deux offices.
54Ce ne sera qu'en avril 1714 qu'il en acquerra la propriété suivant deux actes passés, l'un le 12 avril 1714 devant Bavelet, notaire de Pontarlier, l'autre le 14 avril 1714 devant Caillet notaire à Paris ; l’acte de Pontarlier fait mention de la présence d'Antoine Le Boeuf et de sa femme Jeanne-Françoise Sordet ; il indique qu'il est pourvu des offices ancien et alternatif et que l'acte signé devant le notaire de Pontarlier a pour objet de constituer leur fils, Claude-François Le Bœuf, comme leur procureur pour passer l'acte d’acquisition définitif devant le notaire Caillet de Paris. Cet acte précise que les charges des receveurs du bailliage de Pontarlier dont la propriété appartient au sieur Durey ainsi que les gages, augmentations des gages, taxation, remise, droits de quittance et d'octroi, sont cédés au prix de 40 000 l. payables, 20 000 l. comptant et les autres 20 000 l. en cinq ans, à compter du 1er janvier 1715 avec les intérêts.
55Il est précisé que les paiements de ces sommes pourront être effectués soit à Besançon entre les mains de Charles La Grange, commis à la recette générale à Besançon, soit à Paris. L'acte établi à Pontarlier prévoit que BClaude-François retirera auprès de Durey les provisions scellées et expédiées, déduction faite des quittances des finances et de deux sols par livre payées par les Durey ; le prix des offices s'élève à 39 406 l. 13 s. 8 d. ; la différence par rapport aux 40 000 l. représentant les frais de provision et de réception réglés par les Durey.
56Il est également indiqué que le contrat de vente stipulera que la somme de 4 408 l. de taxations au denier vingt, susceptible d'être attribuée à l'office et correspondant à des impôts non encore levés, restera acquise à Antoine Le Boeuf.
57L'acte de Pontarlier est signé par Antoine Lebœuf et sa femme assistés de deux témoins ; le deuxième acte, celui du 14 avril 1714, devant le notaire Caillet est signé par Durey de Poligny, Durey d'Harnoncourt et Claude-François Le Bœuf, lequel déclarait être logé à Paris rue Galande près de la place Maubert, (paroisse Saint Severin), dans la maison du sieur Raffin ayant pour enseigne Les quatre Fils Aymon. L'acte reprend les dispositions concernant le prix précisé par l'acte de Pontarlier, soit 40 000 l. payables à raison de 20 000 l. comptant et 20 000 l. en cinq ans.
58Vingt ans s'étaient donc écoulés entre l'attribution de la commission à Antoine Le Bœuf et l’acquisition de la charge en toute propriété. Mais l'intérêt des actes passés à Pontarlier et à Paris réside également dans l'explication qui peut être donnée de la différence des prix des deux charges, 7 088 l. pour chacune d'elles soit en tout 14 176 l. et le prix de 40 000 l. réglé en 1715.
59D'où venait donc une différence aussi importante ? L'acte établi par le notaire Caillet est accompagné d'un état justificatif de cette différence et en donne la décomposition, elle apporte une illustration supplémentaire des charges imposées aux comptables des deniers royaux pendant cette période de la fin du règne de Louis XIV.
60Le prix initial des deux offices, soit 14 176 l. est bien repris mais il s’y ajoute les sommes versées à titre de supplément de finances : 2 500 l. exigées en 1700, 4 800 l. pour les augmentations de gages en 1705, 3 651 l. 6 s. 10 d. pour le paiement des offices de commissaires aux subventions supprimés en août 1704 et annexés aux offices de receveurs particuliers, 1 000 l. pour les droits de quittance imposés sur les offices en octobre 1695, 10 666 l. 3 s. 4 d. pour les augmentations de gages instituées le 15 juillet 1710, à raison de 5 333 l. 6 s. 4 d. pour chacun des deux offices. Toutes ces sommes sont accrues de la taxe de deux sols par livre. Cet état est validé par les signatures des deux receveurs généraux Durey de Poligny et Durey d'Harnoncourt et celle de François Le Bœuf.
Les offices de Besançon : une propriété de famille
61L'exemple des offices de Besançon est caractéristique des difficultés rencontrées pour leur placement en raison du nombre de leurs titulaires sur une période brève et des incertitudes de leur situation quant à leur propriété. En effet, une distinction doit être faite entre les notions de « commission », de « provision » et de « propriété » pour caractériser les différents états de leurs détenteurs.
62Par lettre du 9 mai 1693, une commission de receveur particulier de Besançon était attribuée à Michel Gueugnot, directeur des postes. Ces lettres étaient délivrées en application de l'édit de 1693 désignant Antoine Gatte comme chargé du recouvrement des deniers provenant de la vente des offices. L'envoi en possession était ordonné moyennant bonne et suffisante caution, laquelle n'était autre que les biens de l’épouse de l’intéressé. Aucune mention n'était faite quant au prix de l’office puisqu'il ne s'agissait que d'une autorisation pour exercer les fonctions, non de l'attribution de sa propriété. Le 28 mai 1694, une autre commission de receveur des impositions était délivrée à Nicolas Tavaux ; elle rappelle que le receveur général des finances qui a reçu mission d'assurer le recouvrement des impositions avait « très humblement demandé l’agrément de Nicolas Tavaux pour recouvrer par commission la recette des impositions ordinaires et extraordinaires de Besançon, ainsi que des deniers communs et d'octroi, ceci en attendant que l'office ait été pourvu ».
63Le 8 août 1695, une nouvelle commission est délivrée à Simon de Maizière, commis à la recette générale, toujours sur la proposition de Pierre-François Durey, eu égard au fait « que l’intéressé remplit les conditions d'âge, de religion, d’expérience et de capacité ». Cette désignation de Simon de Maizière montre qu'il n'existait pas de titulaire pour la recette de Besançon. Les lettres patentes qui avaient désigné Nicolas Tavaux en le dispensant de caution et l'acte passé devant les notaires Morland et Caillet à Paris indiquent que Pierre-François Durey est « propriétaire » des deux offices créés à Besançon, l'ancien et l'alternatif, à la suite de la vente qui lui en avait été faite par Antoine Gatte le 21 juin 1693, ce qui montre que l'attribution initiale à Gueugnot était demeurée sans suite, de même que celle de Nicolas Tavaux.
64La commission de Maizière est prévue pour durer ad libitum jusqu'à sa révocation. En 1695, Maizière est également chargé de la recette générale qu'il conservera jusqu'en 1711. La recette de Besançon a donc appartenu à Pierre-François Durey depuis juin 1693, les fonctions effectives de receveur particulier étant exercées par le commis de la recette générale. Le terme de lettres de provision pour la désignation d'un receveur particulier de Besançon n'apparaîtra que plus tard, à l’occasion de la nomination d'un autre commis de la recette générale, Charles de La Grange en décembre 1700.
65L’arrêt précise que ces deux offices n'ont pas été pourvus, mais que les quittances de finance de 5 000 l. ont été payées par Pierre Moreau qui s'est volontairement démis en faveur de La Grange, le 26 mars 1695. Une justification du délai qui sépare les deux dates de 1695 et de 1700 peut résider dans le fait que Charles de La Grange exerçait les fonctions de commis de la recette générale à Paris et non à Besançon. De toute façon, il est prévu qu'il recevra les gages et taxations afférentes aux deux offices. La vente de Moreau à Charles de La Grange est donc fictive et Moreau n'est qu'un prête-nom de Pierre-François Durey. L'inventaire après décès de Gérard Durey de Poligny fait d'ailleurs référence à un acte par lequel La Grange « ne prétend rien » faisant état de ce que l'office appartenait au sieur de Vieuxcourt auquel « il ne fait que prêter son nom ». Une autre déclaration du 15 mars 1707 confirme l'ambiguïté qui prévaut en ce qui concerne la propriété de l'office de Besançon en indiquant que le supplément de finance exigé pour cet office a été payé par Pierre-François Durey.
66Charles de La Grange meurt le 20janvier 1719. Son successeur pour les recettes particulières de Besançon, également commis de la recette générale, est Jean Ramaille, avocat au Parlement, qui reçoit des lettres patentes pour les deux offices, ancien et alternatif, le 5 mai 1719. Ces lettres indiquent que Gérard Durey de Poligny et Pierre Durey d'Harnoncourt sont propriétaires des deux offices. Avant le décès de La Grange, cinq receveurs s'étaient donc succédés sans en être les propriétaires.
67Avec Jean Ramaille, la situation va changer sans que les offices sortent du giron de la famille ; il a épousé une Brunet, mais comme pour d'autres offices de la province, ils ont donné lieu à des transactions entre les membres de cette famille.
68En 1711, la succession de Pierre-François Durey, a été répartie en neuf lots attribués aux neuf enfants conformément au partage déjà mentionné. L'office de Besançon a alors été attribué par tiers entre trois des héritiers : Durey de Poligny, Etienne Brunet de Montforand et Joseph Durey de Sauroy. Mais, par un traité ultérieur du 15 septembre, Durey de Vieuxcourt vend la part dans les offices de Besançon qu'il détenait avant même le décès de son père.
69Cet acte précise que les offices de Besançon comprennent outre le prix de l’office lui-même, le prix des augmentations de gages et des droits de quittance, dont le montant total s'élève à 18 541 l. payés comptant par Durey de Poligny et Durey d'Harnoncourt, les receveurs généraux alors en fonction. Les offices demeurent au sein de la famille Durey.
70Il faudra attendre le règlement de la succession de Gérard Durey de Poligny, en 1728, pour que Ramaille se porte acquéreur des deux offices de receveur particulier de Besançon pour la somme de 33 000 l. suivant un acte passé le 30 décembre 1729 devant le notaire Doyen, à Paris.
71Les vendeurs sont d’une part les héritiers de Durey de Poligny pour leur part dans la succession, c'est-à-dire le président Durey de Vieuxcourt, Joseph Durey de Sauroy, Pierre Durey d’Harnoncourt, Durey de Noinville, les dames de Chalas, Joly de Berry et d'Esquelbeck.
72Le prix de 33 300 l. est réparti en raison de 21 800 l. pour l'office ancien et 11 500 l. pour l’office alternatif. L'acte de vente procède au partage de ces sommes au prorata de la part des héritiers dans la succession et de la propriété directe de certains d'entre eux dans l'un ou l'autre des deux offices.
73C’est ainsi que pour l'office ancien, Durey de Sauroy reçoit 10 900 l., Durey d'Harnoncourt et la dame d’Esquelbeck chacun 5 450 l. ; et, pour l'office alternatif, les 11 500 l. sont réparties à raison de 3 833 l. 6 s. 8 d. entre Durey de Sauroy, Durey d'Harnoncourt et la dame d'Esquelbeck.
74Jean Ramaille deviendra donc propriétaire de la totalité des offices de Besançon, dix ans après sa prise de fonction de receveur particulier. Mais ces offices ne sortiront définitivement de la famille des Durey-Brunet qu'en 1741 après la démission de Jean Ramaille et leur vente à Jean Ganivot de Manioche en décembre de la même année. Les offices de receveurs particuliers de Besançon seront donc restés au sein des familles Brunet et Durey pendant plus d'un demi-siècle.
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