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Un poète-ouvrier socialiste à l’épreuve des révolutions1
p. 37-48
Texte intégral
Q : Êtes-vous l’auteur des pièces de vers trouvées chez vous ?
R : Je suis l’auteur de celle ayant pour titre Aux ci-devant dynastiques. Aux tartufes du peuple et de la liberté et de celle intitulée Février et Juin. Mais je fais observer qu’il n’y a eu de publiée que la première. Les autres pièces sont également de moi2.
I. Manuscrits inédits : contexte archivistique et sociopolitique
1« Je suis l’auteur […] » : voici, le 7 juillet 1848, la réponse fière et courageuse du Parisien de 26 ans Joseph Déjacque au commissaire de police de son quartier. Ce dernier, « informé que le nommé Déjacque s’était absenté deux jours de son domicile pendant les évènements de Juin et qu’il avait tenu contre la Garde nationale des propos outrageants, ce qui peut faire présumer qu’il a pris part à l’insurrection »3, venait de le faire arrêter dans sa chambre du sixième étage de la maison du 83 de la rue Saint-Honoré. Chambre haut perchée que, depuis le mois de novembre, ce colleur de papiers peints au chômage louait 130 francs4. S’il était probablement en plein sommeil lorsqu’à 4 heures du matin les agents firent irruption chez lui5, il semble difficile, après La nuit des prolétaires6, de ne pas imaginer assis devant son bureau de fortune pour assouvir « son goût pour l’étude » celui dont son premier patron affirmait qu’il « prend sur son sommeil pour satisfaire cette passion de la littérature qui semble le dominer »7. De l’imaginer, pourquoi pas, en train de peaufiner les vers de Février et Juin, son dernier poème. Ce que confirme en tout cas la réplique de Déjacque, c’est qu’il est l’auteur des onze manuscrits alors saisis à son domicile. Ces manuscrits, additionnés à la déposition rancunière du capitaine de sa compagnie de la Garde nationale8, lui valurent une condamnation à la déportation de laquelle une grâce le sauverait au mois de mars suivant9. Car, bien qu’ayant, comme nombre de citoyens-combattants des quartiers populaires, rejoint sa compagnie seulement le 24 juin au soir, quand la balance penchait définitivement du côté des forces de l’ordre, rien ne prouvait sa participation active aux journées que les vainqueurs qualifiaient d’insurrection10. D’autant que, son frère étant garde mobile11, cet éventuel engagement dans les combats aurait dans son cas pris une véritable tournure fratricide12. Du reste, la position de son frère explique sans doute partiellement la relative magnanimité dont son poème fait preuve envers les exécutants de la répression gouvernementale :
Plaignons ces malheureux dont surent se servir
Les meneurs patentés par tous les diadèmes
Que sur ces derniers seuls pèsent nos anathèmes
Mais ouvrons une place à tout vrai repentir.
2Là se mesure à quel point l’histoire politicosociale du peuple parisien se fonde sur sa captivité, la détresse et le malheur de ses membres vaincus. Par la féroce répression judiciaire qui les prolonge, les défaites militaropolitiques laissent davantage de traces sur ce peuple révolutionnaire que ses trop éphémères victoires. Outre le tiré à part d’Aux ci-devant dynastiques, le dossier judiciaire de Déjacque conservé aux archives du Service historique de la Défense donne à lire onze de ses textes rédigés pendant l’année précédant sa première arrestation, dont une copie d’une lettre envoyée le 28 mai 1848 au directeur du Constitutionnel et, dans la foulée, diffusée par La Commune de Paris. Cette lettre s’achève par un avertissement que la justice interpréta comme une incitation aux barricades estivales : « En face de vos calomnies, comme en face de vos janissaires, dans la presse comme dans la rue, vous nous trouverez toujours à notre poste de démocrates, la plume ou le fusil au poing »13. Depuis, deux autres de ces pièces furent publiées : une version à peine remaniée de Naître, croître, vieillir forme l’une des poésies des Lazaréennes qui, en octobre 1851, conduiront Déjacque en exil ; puis, tout récemment, Thomas Bouchet a fait paraître Du pain et du travail14. Des huit écrits encore inédits sont ici exhumés deux textes en prose portant l’un sur la fraude à la vente du pain pratiquée en 1847 par les boulangers parisiens et l’autre sur la révolution sicilienne de janvier 1848 ainsi que les trois poèmes La Misère, À Metternich et le déjà cité Février et Juin, datant respectivement de juin 1847 et de mars et début juillet 1848. Lus à la suite, ces cinq documents permettent d’interroger le rapport de leur auteur à un contexte sociopolitique national et européen en plein bouleversement. Ils offrent, surtout, l’occasion rare de mettre à l’épreuve de l’événement révolutionnaire ou, plutôt, des révolutions de 1848 la pratique scripturaire d’un poète-ouvrier éminemment parisien.
3Articulés avec le reste des pièces de l’assez épais dossier judiciaire de Déjacque, ces cinq manuscrits dévoilent effectivement la réaction à chaud d’un homme confronté à une déchéance inextricablement sociale et politique. Les deux textes de l’hiver 1847 sur les dures conditions de vie prolétaire coïncident avec le début de la détérioration de son statut professionnel. Jusqu’à cette année, nonobstant des origines populaires, Déjacque avait été épargné grâce à une mère qui se sacrifia afin de lui offrir une éducation libérale relativement privilégiée, puis grâce à un apprentissage gratuit chez le père d’un ancien camarade de classe qui en avait durablement fait un commis de plusieurs manufacturiers de papiers peints. Stanislas Dessauces, le pénultième patron qu’en échange du logement, de la nourriture et d’un salaire annuel de 1 000 francs il servit comme « commis de magasin » jusqu’en mars 1846, déposa ainsi à son procès :
En sortant de chez moi, il a été chez M. Dubreuil où pour une cause aussi futile, mais toujours par orgueil et vanité, il s’est fait renvoyer. Comme dans notre profession les places de commis à appointements sont rares, il aurait maintenant beaucoup de peine à se placer. Aussi s’est-il fait ouvrier colleur, tandis qu’autrefois il était chargé d’inspecter et de diriger ces ouvriers. […] Il faisait beaucoup de lectures et de mauvaises lectures, il faisait quelques vers, mais alors ses essais n’étaient pas politiques15.
4Peu importe ici de savoir si ce négociant ne décelait pas l’éventuelle portée politique de ces poésies sociales malheureusement disparues, ou s’il se trompait sur la véritable raison du départ en septembre 1846 de Déjacque de chez les frères Dubreuil qui, au contraire, attestèrent de la « franchise & loyauté » de leur ancien employé16. Ce témoignage signale quoi qu’il en soit la paupérisation d’un commis toujours épris « des idées d’indépendance »17 qui, à son entrée aux Ateliers nationaux le 10 mai 184818, était depuis un an devenu « ouvrier colleur »19. Bien que prouvée par son impossibilité à payer ses termes sans l’aide d’une mère « trop bien mise »20, sa prolétarisation fut d’ailleurs questionnée par l’incrédule juge d’instruction devant qui – ce qui était alors rarissime – il assuma quelques jours plus tard de « professe[r] la Doctrine socialiste et […] souvent, soit au poste de la garde nationale soit dans d’autres réunions, de faire de la propagande et de chercher à faire des prosélytes »21 :
La véritable question à éclaircir est celle de savoir qui est, réellement, Déjacque […], se disant colleur de papier, qui n’est pas un métier et paraissant un ouvrier uniquement pour se mêler à la classe ouvrière et avoir le droit de parler et d’écrire en son nom, de s’adresser à elle, de la corrompre, de la jeter dans les voies de l’insurrection sans l’y suivre. Ce n’est pas à cause de ses vers, mais c’est à cause de sa prose et de son écriture que je me refuse à croire que cet individu si jeune a fait lui-même son éducation dans les instants de loisir que lui laissait un travail nécessaire à sa subsistance. C’est un être ayant reçu une éducation libérale que l’inconduite et quelque grand vice aura fait descendre au rang qu’il se donne, ou c’est un de ces entrepreneurs de désorganisation qui prend un masque pour se rapprocher des masses crédules dont il travaille à exploiter l’ignorance22.
5Tout en avançant une explication d’autant plus erronée que, selon son concierge et tous ses anciens patrons, Déjacque ne s’adonnait point à l’alcool, ce juge visiblement adepte d’un libéralisme capacitaire reconnaissait aux ouvriers une aptitude scripturaire qui, déployée sous une forme impeccable et avec un contenu politique, devenait louche et dangereuse. Trop rigoureuse et sulfureuse, sa plume rendait Déjacque insaisissable et, en quelque sorte, le sortait du rang prolétaire.
6Les trois textes du premier semestre 1848 illustrent, eux, parfaitement le versant politique de la dégradation de l’ouvrier Déjacque ou, plutôt, la véloce (r)évolution des espérances émancipatrices qu’il plaçait assez banalement dans le peuple parisien. En vers ou en prose, ses réflexions politiques furent bien révolutionnées par les brusques changements de la conjoncture politique parisienne. Par leur magie insurrectionnelle, les barricades de Février, de toute évidence non prévues par Déjacque, transformèrent en un puissant espoir le pessimisme originel qui, fin janvier, transparaissait dans l’avertissement adressé à ses « frères de Sicile » de ne pas se convertir, au sortir de leur « révolution légitime », « en stupide doublure du peuple de Paris », peuple depuis les Trois Glorieuses endormi. À son tour, limpidement exprimée en mars dans le poème À Metternich, cette euphorie révolutionnaire laissa néanmoins place à son amère autocritique après « La victoire de l’ordre ! ordre de cannibales ! / Victoire de brigands » que représentèrent ces terribles journées de Juin qui firent éclater « le doux mirage » de « la fraternité / Entre l’or et la pauvreté / Entre l’humble et le dignitaire » et, surtout, du « travail affranchi d’un odieux servage ». Plus subtilement, ce retour critique sur le printemps 1848 opéré par les vers de Février et Juin révèle une âme révolutionnée qui ne revenait pas exactement à son point de départ. Car, malgré sa nouvelle lucidité pessimiste, les lamentations initiales s’accompagnaient désormais d’une irréductible foi dans l’avènement, même lointain, d’un monde meilleur :
Et, relevant son front sur la foule qui clame,
Cet homme dans la foi retrempant sa belle âme
Fixe encor l’avenir […]
Afin qu’à notre tour, sur notre âge au déclin
L’enfant devenu fort nous guide et nous protège
Semons le dévouement si nous voulons un siège
Au fraternel festin.
7Au total, derrière la diversité des sentiments manifestés et des sujets abordés, tous ces textes semblent traversés par une même volonté de juger les régimes sociopolitiques à l’aune du traitement réservé aux travailleurs. Ses écrits postérieurs témoigneraient avec plus de virulence encore que, de cette épreuve révolutionnaire quarante-huitarde qui le marqua à jamais, Déjacque conclut que la démocratie ou, pour employer une expression alors en vogue, la « vraie République » ne pourrait qu’être la sociale. Bref, que la véritable révolution démocratique serait celle qui enfanterait une organisation épanouissante et égalitaire du travail. Après quelques remarques sur cette question de l’organisation du travail, la brève présentation non plus chronologique, mais thématique de ces cinq manuscrits portera successivement sur le rôle révolutionnaire octroyé au peuple parisien et sur le problème de la représentation politique.
II. Un artisan de l’émancipation du prolétariat
8Déjacque tirait ses premières considérations sociopolitiques de sa longue expérience concrète du milieu professionnel des manufactures de papiers peints. En développant dans sa prose et ses vers engagés les thématiques du chômage et de la famine, il brossait un tableau déchirant des conditions de vie des travailleurs à la fin de la monarchie de Juillet. C’est dans les deux textes rédigés en 1847, La Misère et Les Boulangers de Paris, qu’il construisit ses premiers argumentaires et qu’il fixa son vocabulaire politique. Entre la fougue de son style et la crudité de son vocabulaire, Déjacque y révélait certes ses propres fulgurances, mais témoignait aussi de la situation contemporaine des ouvriers parisiens. Dans son système de pensée et selon sa sensibilité, la primordiale question sociale se posait à partir de préoccupations d’ordre moral. En effet, les préoccupations morales qui émaillent les textes montrent que Déjacque concevait la solution au problème social comme le résultat d’une régénération du caractère et des mœurs des ouvriers sans pour autant se désintéresser des questions économiques, puisqu’il dénonça à plusieurs reprises l’organisation salariale du travail. Ainsi un intérêt conjoint pour les questions sociales et les préoccupations morales le rapprochait de la ligne défendue par les ouvriers buchéziens du journal L’Atelier23. Cependant Déjacque manifesta très vite une certaine liberté de ton. Le conduisant à essayer de nouvelles formes d’expression et à se forger un langage propre, cette liberté fit de Déjacque un médiateur original du catholicisme social. À partir de la nomination du gouvernement provisoire du 24 février et pendant les remaniements successifs du mois de mars 1848, Déjacque s’écarta de la ligne des « ateliéristes » en prenant position sur les moyens pour faire triompher les espérances révolutionnaires : « J’ai fait partie d’abord du club l’Atelier, mais son esprit ne me convenait pas et je l’ai quitté »24, répondit-il au commissaire qui l’interrogeait sur son affiliation politique.
9C’est donc la douloureuse et intime expérience de la pauvreté qui poussa Déjacque à composer en juin 1847 ses premiers vers conservés. Subissant de plein fouet les effets de la crise économique, le jeune homme semblait aussi désœuvré et livré à l’incertitude du lendemain que ses nouveaux camarades ouvriers. Les quelques sous ponctuellement récoltés pendant le printemps 1847 étaient insuffisants pour échapper à la paupérisation qui touchait l’ensemble des ouvriers des manufactures. Au moment où il rédigea les onze strophes qui composent le poème La Misère, Déjacque assistait impuissant au spectacle des conséquences de la faim et des privations sur l’état physique et mental des travailleurs. Rappelant, dans sa forme, la poésie romantique lamartinienne ou hugolienne et, par son thème, l’ouvrage d’Eugène Sue, Les Mystères de Paris25, le premier poème de Déjacque saisit le lecteur par la montée en puissance de la description de l’objet « misère ». En suivant les étapes de l’avilissement de l’homme, Déjacque illustre les tragiques conséquences du déclassement social : de la misère matérielle à la mort du corps et de l’âme, en passant par l’inévitable étape de la folie et de l’aliénation. Substituée au typique « je » du romantisme, l’utilisation du « nous » renforce l’aspect politique d’un poème qui devient une critique évidente du régime bourgeois responsable de l’exploitation des faibles. Dans ce tableau de la misère, la mort, sous ses multiples facettes, est bien le personnage principal. D’abord la pauvreté qui engendre la mort sociale, celle qui isole l’homme de la communauté des hommes et lui révèle l’hypocrisie de la nature humaine : « La misère […] / C’est la pierre de touche où l’homme vient connaître / L’or impur de ces cœurs qui semblaient lui paraître / Sans mélange ingrats » (strophes 1 à 3). Ensuite, la lente agonie du corps et de l’âme offre un terreau favorable au développement de la folie (strophes 4 à 8). Au terme de cette marche funèbre, une alternative : le suicide ou le crime (strophes 9 et 10). La onzième et dernière strophe vient rappeler l’inconditionnelle finalité mortuaire du parcours du miséreux. Pourtant cette logique d’enchaînement vers la mort est contredite par la lutte de l’homme, par le cri d’espérance que, au paroxysme de sa folie, lance ce sujet miséreux, ce mort-vivant avec « ses chairs débiles », « ses entrailles à jeun » (strophe 9). Là résidait l’enthousiasme politique de Déjacque. Physique et sociale, cette mort n’est sûrement pas politique. Le « râle » de l’espérance, par le cri de résistance de l’homme, se fraye un chemin de retour vers la dignité humaine.
10Si l’aspect politique ne transparaît franchement qu’à la fin de La Misère, Déjacque se révélait dès l’été 1847 un redoutable polémiste. Indigné par la cupidité de certains boulangers parisiens, il accusait les « quatre cinquièmes » d’entre eux de frauder sur le poids du pain. Cette dénonciation virulente s’effectua dans un contexte de crise économique où le prix des denrées de première nécessité pesait de plus en plus lourd sur les budgets populaires. Cette accusation révèle avec quelle véhémence Déjacque s’en prend aux boutiquiers, ces « voleurs patentés », « ces pestiférés des bagnes dont le cœur est mort à tout sentiment de moralité », « ces marchands sans probité et sans honneur ». La violence des qualificatifs met à nu la haine que Déjacque portait à cette catégorie sociale qui, suivant son « amour effréné du gain », agissait contre le peuple. La critique des boutiquiers ou de « l’esprit de boutique » deviendra pour Déjacque un thème récurrent, voire une véritable obsession26. Le moralisme conditionne sa vision du progrès dans laquelle l’humanité perfectible tend vers une amélioration morale, intellectuelle et physique. Sa critique d’une actualité marquée par « les scandales de la concussion et de l’escroquerie, toutes ces débauches de la corruption, de la cupidité et de l’égoïsme » n’est que le résultat d’une organisation politique incapable de répondre aux exigences de cette amélioration générale de la condition de l’homme. Et cette responsabilité de l’échec politique, Déjacque l’attribue à Guizot, dissimulé sous la référence ironique à l'« apôtre de Lisieux ». C’est dans Du pain et du travail que Déjacque synthétise le mieux sa critique des boutiquiers et son analyse du chômage27. En s’en prenant au régime salarial, il défendait une autre organisation du travail qui permettrait de mettre fin aux privilèges et à l’exploitation de l’homme par l’homme. Mais, alors que la question du « droit au travail » agitait les presses ouvrières, c’est la question de l’organisation du travail qui motivait la critique de Déjacque sur l’injustice du salariat. En effet, sa revendication d’un droit au repos et aux loisirs dans À Metternich montre qu’au-delà d’une amélioration partielle du régime économique, c’est l’avènement d’une organisation du travail radicalement nouvelle qui est en cause : « L’édifice et de bronze et d’azur et de fleurs / Où siégera toujours l’austérité des mœurs / Où le père et le fils et la mère et la fille / Et le frère et la sœur au foyer de famille / Heureux, libres, unis sous un riant portail / Trouveront le repos au sortir du travail ». Bref, Déjacque incarnait un idéalisme démocratique dans lequel la non négociable liberté de l’ouvrier proviendrait d’une nouvelle organisation du travail qui, de droit, attribuerait le produit intégral du travail, c’est-à-dire le repos et le temps libre, au travailleur.
III. « Paris ce foyer pur de la Démocratie »
11À la veille de Février, Déjacque appelait d’autant plus de ses vœux cette réforme d’une organisation aliénante du travail qu’il interprétait de manière erronée cette carence comme un frein majeur à une révolution populaire parisienne :
Le peuple n’est pas mûr pour la délivrance ; […] c’est son ignorance seule qui le rend coupable et non son cœur, et nos hommes d’État dynastiques l’ont si bien compris que leurs constants efforts sont d’entretenir en lui cette ignorance en ne lui laissant pas un moment pour s’en affranchir, en le murant dans sa misère, en l’enchaînant à son travail forcé.
12S’il attribuait ainsi aux hommes de pouvoir « la responsabilité première » de cette immaturité révolutionnaire, son texte de janvier 1848 n’en constituait pas moins une surprenante charge contre un peuple parisien à l’apathie désespérante et, à ses yeux, encore bien impur. Ce « peuple hébété par l’ignorance, étiolé par l’incessant labeur et suçant dans la misère le venin de la servilité et de l’égoïsme », il le rendait responsable non seulement d’avoir – en faisant, depuis 1792, toujours « halte sur le flot de la rébellion entre le large et la côte » – successivement permis Thermidor, le 18 Brumaire, l’ouverture des portes de sa ville en 1815 et la victoire des « Judas de la liberté » en 1830. Mais encore de provoquer son éventuel suicide :
Oui ! le seul parti qui nous resterait à prendre serait, comme Caton d’universelle mémoire, de nous draper dans notre foi et nous frapper du glaive afin de nous soustraire du moins à ces tableaux hideux de bassesse et d’infamie qui partout et sans cesse épouvantent nos yeux, soulèvent de dégoût notre cœur et révoltent et désespèrent notre âme !
13Heureusement pour Déjacque, comme il l’espérait sans grand espoir, quelques jours plus tard ce peuple contredisait ses prédictions pessimistes ; il se secouait de sa « pesante léthargie » et faisait jaillir « cette étincelle de vertu qui pétill[ait] toujours, même au fond de l’âme des plus pervertis ».
14Le contraste est grand entre cette application du « fer rouge » aux péchés du peuple parisien – à ses « fautes » et à ses « crimes » – et la glorification de son comportement sur les barricades rédemptrices de Février et Juin. Sa révolution convertit Déjacque en l’un de ses « apologistes sans contrôle » qu’il refusait justement d’être quelques jours plus tôt. Ce Paris, son Paris, s’était rappelé que, « pour se défendre », il « n’a besoin d’autres citadelles que celles de ses maisons, d’autres remparts que ceux des barricades, d’autre mitraille que le pavé de ses rues ». Fin juin, alors qu’à nouveau l’« ordre des cannibales ! […] règne à Paris !!! », « Debout sur le seuil de sa porte », comme plus tard Le Cygne de Baudelaire traversant le nouveau Carrousel, le prolétaire (de) Déjacque se remémorait mélancoliquement « les grands jours de Février / La victoire de l’ouvrier / Si morale et si magnanime » quand lui-même « était beau d’allégresse » :
C’était l’heure de la victoire
Et le peuple triomphateur
Semblait oublier sa douleur
Pour ne plus songer qu’à sa gloire
Tous ses décrets portaient le timbre de l’amour
Son cœur resplendissait au milieu des alarmes
Comme aux feux du soleil le clair acier des armes
Il avait bien souffert mais vainqueur à son tour
Il n’eut pas un instant de haine, de vengeance
Et le pardon, l’oubli, la pitié, la clémence
Furent les dieux du jour.
15Si son « œil peut se reposer » en se souvenant de ces « fastes populaires » au « contraste sublime » avec les « fastes bourgeois » de Juin, quelle interprétation peut-il proposer de cette nouvelle défaite du peuple parisien ? D’une défaite de laquelle, contrairement à celles analysées dans le manuscrit de janvier, ce peuple sortit en martyr :
C’est alors que la faim harcelant ses entrailles
La faim qui lui tramait d’horribles funérailles
Lui montre en l’irritant ses bourreaux au Pouvoir
Sa main saisit le fer et sur la barricade
Du travail ou du plomb dit-il ! Sombre croisade
Que l’on eût dû prévoir !.
16Qui se cache derrière le pronom personnel indéfini de cet énigmatique dernier vers ? S’agit-il des barricadeurs qui, cette fois, n’auraient pas fait preuve d’assez de patience ? Ou s’agit-il de Déjacque en personne qui, comme tant d’autres, en insistant sur l’hypocrisie de certains discours fraternitaires et sur le devoir révolutionnaire des travailleurs parisiens, aurait involontairement conduit ces derniers vers un suicide collectif ? Ce remords ne transparaît-il pas dans les écrits de nombreux exilés quarante-huitards ? Faudrait-il alors y repérer une manifestation du syndrome du survivant ? Ce qui apparaît plus certain, n’ayant « de triomphe en ces jours douloureux / Que pour les Réacteurs les royaux anarchistes / Êtres qui n’ont d’humain que le nom. Terroristes / blancs, tricolores ou bleus », c’est que désormais Déjacque exonérait de toute responsabilité le peuple parisien et même, en tout cas pour l’instant, ceux de ses membres qui s’adonnèrent à des « abîmes de tortures » envers leurs frères.
17Depuis Février, en effet, Paris était aux yeux de Déjacque devenue la métropole des révolutions et sa plèbe – second contraste saisissant avec ses propos du mois précédent – le moteur de l’histoire d’une émancipation de l’humanité. Il s’émerveillait en mars dans son À Metternich :
La débâcle électrique unit la Seine au Rhin ;
Elle ébranle à la fois Vienne, Munich, Berlin,
Le Tage, la Tamise, et toute l’Italie.
Paris ce pur foyer de la Démocratie
Comme un soleil de lave à la voûte des cieux
Des peuples opprimés fond l’hiver rigoureux
O rois ! arrêtez donc cette vague de tête,
Cet océan de bras, ces humaines tempêtes
Que sur vous a lancé de son souffle puissant
Le Peuple, hier esclave, aujourd’hui triomphant.
Et toi, leur grand vassal, toi Metternich : aux armes !
Hourra contre les Francs ; pousse le cri d’alarme,
Fais sonner haut la charge et marcher en avant ;
Hourra ! pour écraser ce Paris turbulent
[…] Et, nouveau Josué, te crois-tu la puissance
D’arrêter dans son cours ce soleil de la France.
18Ainsi, usant à l’envi des ordinaires comparaisons avec des phénomènes naturels qui, se jouant des artificielles frontières politiques, conviennent à un discours prétendument universaliste, le poète accordait assez classiquement une mission civilisatrice à la France et, notamment, au peuple de sa capitale. Non seulement il se réjouissait que, dans un « fraternel accord » avec leur exemplaire homologue parisien, les peuples européens fissent contre leurs monarques « de la France [leur] choix ». Mais, à cette France, il réservait encore une place privilégiée dans la future république universelle que bâtirait bientôt la sainte-alliance des peuples européens :
Napoléon, les yeux fixés sur l’avenir,
Fit entendre, dit-on, d’un accent prophétique
Cet arrêt solennel : l’Europe en république
[…] Et l’Europe aujourd’hui répond par ses fanfares !
[…] Et le jour est prochain où sur la terre entière
Les Peuples triomphants planteront leur bannière,
[…] Et formant à leur tour une sainte alliance
Les peuples n’ayant plus qu’une même croyance,
celle du dévouement, de la fraternité
De leurs chaînons épars referont l’unité ;
Et dans un cri d’amour et de reconnaissance
Nommant tout à la fois Dieu, le Christ et la France
Pour présider la diète et pour la protéger,
Pour imposer son vote et pour le diriger
[…] Où, citoyens du monde et de la République,
Chacun, du fond du cœur comme un divin cantique,
Élèvera sa voix pour bénir l’Éternel
De nous avoir sur terre ouvert un coin de ciel !
19En faisant de Paris, de la France ou, à la limite, de l’Europe le foyer d’une prochaine émancipation mondiale, cette vision de l’histoire s’inscrivait dans une tradition républicaine qui, en dépit de ses aspirations universalistes, restait en définitive foncièrement patriotique et eurocentrée. Alors s’explique, de la part d’un homme profondément républicain en mars 1848, son silence sur l’expérience historique d’un continent américain majoritairement républicanisé où, pourtant, il chercherait bientôt refuge.
IV. Germes libertaires : une croisade contre les pouvoirs bourgeois
20Après la colère, l’indignation et l’appel à l’espérance, c’est la joie qui, au lendemain de la révolution de Février, envahissait celui qui défendait la cause du peuple souffrant. Cette joie, Déjacque l’exprima rapidement dans un « chant patriotique » intitulé La Proclamation de la République28. S’inscrivant dans la tradition littéraire socialiste et républicaine, il chantait l’avènement de la nouvelle république en faisant revivre l’histoire et les figures mythiques de la légende romaine29. Alors que son écriture prenait un souffle nouveau en se nourrissant de l’espérance révolutionnaire, son enthousiasme était déjà entaché de l’appréhension de voir la réaction royaliste s’assurer le contrôle de la nouvelle république :
Nous devons sans délai nous serrer en faisceau
Nous autres montagnards autour du saint drapeau
Et toujours sur la brèche où luit notre principe
Combattre incessamment les archers de Philippe
Tous ces vils fédérés de la Réaction
Qui voudraient écraser la Révolution30.
21L’appel de Déjacque à la vigilance du peuple parisien face à « ces faux frères », « ces roués de la veille et des présentes heures », fait écho à la mise en garde qu’il avait déjà exprimée aux citoyens Siciliens, les invitant à ne pas se laisser voler la révolution par de faux révolutionnaires :
Que va faire l’insurrection maîtresse du sol ? Va-t-elle décréter la déchéance de la royauté, la proscription du trône ou à l’exemple de la France ne va-t-elle pas plutôt faire aussi sa révolution de Juillet ; et comme la grenouille de la fable ne va-t-elle pas restaurer de ses mains ce trône que ses balles ont meurtri, et, avec un nom nouveau sous un masque différent mais qui abrite toujours le même visage, la même pensée, visage de fourbe, pensée d’oppression et de tyrannie, ne va-t-elle pas réédifier sur son fauteuil remis à neuf la vieille royauté rajeunie du mensonge constitutionnel.
22La crainte d’assister à l’échec de la nouvelle république se transforma alors en colère. Les nominations des membres du gouvernement provisoire excitèrent l’amertume d’un Déjacque qui voyait définitivement mourir les espérances révolutionnaires. Écrit en mars 1848, son poème Aux tartufes du peuple et de la liberté s’en prenait directement aux figures du nouveau gouvernement31. Sans concessions, il y dénonçait dans une adresse sans équivoque l’égoïsme et l’hypocrisie de Lamartine, Ledru-Rollin, Guizot, Thiers ou encore Barrot :
Misérables valets de vos ambitions,
On vous voit chaque jour par votre polémique
Chercher à désunir de notre République
Les meilleurs citoyens, les glorieux tribuns.
Vous louez par ici, vous caressez les uns,
Vous jouez la terreur, l’alarme avec les autres.
Disciple du passé, de l’égoïsme apôtres,
Non, vous n’avez au cœur nul élan généreux.
23De Février à Juin, la colère de Déjacque ne cessait de s’enraciner et germait en lui une réflexion sur les modes d’action politique et un rejet de la démocratie parlementaire.
24Rapidement, cette colère suscita de violentes résolutions, comme la menace déjà citée que Déjacque adressa en mai au quotidien modéré Le Constitutionnel qui venait de publier un article où, selon un mode d’association alors classique, les Ateliers nationaux étaient décrits comme un repaire de criminels. Cette réaction qu’il juge défensive, il la réitère sous l’effet du traumatisme de la sanglante répression des journées de Juin. Ces journées affectent l’acte d’écriture de Déjacque. La trahison des dirigeants politiques, ces « bourreaux au Pouvoir » et « meneurs patentés par tous les diadèmes », nourrit sa colère d’une ironie qui rend sa plume encore plus acerbe. Le poème Février et Juin est sans doute celui qui permet de cerner davantage la personnalité du jeune Déjacque et de mesurer la profondeur de sa déception. D’abord, c’est la première fois qu’il utilise cette disposition : onze strophes de onze vers, lesquelles sont organisés en quatrains suivis d’un septain. Rappelant certains poèmes hugoliens32, cette disposition originale produit l’effet d’une accélération métrique ; elle rend compte de l’énergie particulière de l’acte d’écriture chez Déjacque. Dans ce poème qui reprend ses leitmotivs, comme la dénonciation de l’esclavage du prolétaire ou la cupidité des boutiquiers, il dénonce la trahison des dirigeants politiques qui en trompant le peuple sont parvenus à détourner la révolution à leur bénéfice. Le peuple est incarné par un homme, ce prolétaire qui, en juin encore, est enivré de ses illusions de Février. Les caractéristiques de ce prolétaire qui « Croyait à la fraternité / Entre l’or et la pauvreté » correspondent étrangement à la personnalité de son auteur qui est incapable d’oublier les sacrifices des combattants tombés pour la liberté, les martyrs de Juin. En effet, un jeu de miroir s’observe entre le « il » mis en scène et le « je » de l’auteur. Cette affirmation paraît d’autant plus certaine que l’écriture de Déjacque est motivée par l’expérience dont il cherche à traduire les sensations. À travers le regard ouvrier, il souhaite faire apparaître la vérité en insistant sur la violence politique de l’État, responsable de la féroce répression et du massacre du prolétariat par les forces républicaines de la bourgeoisie :
Il voit dans une horrible orgie
La veine du peuple couler
Les cadavres s’amonceler
Sur la dalle de sang rougie
Et passant en revue avec les yeux du cœur
Février et Juin les fastes populaires
Et les fastes bourgeois d’un côté les colères
Des forcenés de l’ordre enivrés de fureur
Les vaincus égorgés malgré le cri des mères
Le viol de l’enfant sous l’œil mourant des pères.
25Surtout, certains éléments permettent de déterminer ce que Déjacque pense de l’organisation de la République et de la démocratie. Il dénonce en effet la victoire des traîtres à la vraie république, ces républicains modérés issus de milieux bourgeois qui, en arrivant au pouvoir, s’allièrent naturellement aux autres défenseurs d’un vieux monde. L’ordre, mais en réalité l’inégalité désordonnée, désorganisatrice et donc inévitablement répressive, voilà le mot de passe commun de ce camp conservateur faussement multicolore, qui vise à préserver la hiérarchie des classes sociales. Il n’est donc plus question de penser une conciliation entre le prolétariat et la bourgeoisie, les événements ayant prouvé que l’antagonisme était indépassable et les intérêts de classe inconciliables. Fermement décidé à lutter contre une victoire de l’Ordre, Déjacque s’était comme bien d’autres investi pendant les élections locales des officiers et sous-officiers de la Garde nationale afin d’élire des hommes résolus à combattre pour la seule vraie république, la république démocratique et sociale. L’origine révolutionnaire de la nouvelle Garde nationale33 : c’est ce qui, aux yeux de Déjacque, justifiait qu’elle devrait prendre les armes contre un gouvernement ou une assemblée qui ne soutiendrait pas la révolution :
Aux élections de la Garde nationale – souligne à propos de lui le commissaire de police de son quartier –, il s’est montré violent et excessivement avancé, il a parlé de la nécessité de marcher sur l’Assemblée nationale34.
26Si les journées de Juin infléchirent son républicanisme dans un sens résolument socialiste, ses mois de détention sur les pontons renforcèrent ses principes démocratiques et sa méfiance à l’égard de toute forme de représentation politique, y compris républicaine. Dans ses textes ultérieurs, plus connus, Déjacque s’érige encore et toujours en défenseur inconditionnel de la liberté, en pourfendeur de l’autorité. Une liberté qu’il défend désormais non plus uniquement contre l’autoritarisme des traditionnelles têtes couronnées, mais surtout contre les représentants autoproclamés de la République. Durant son exil à Londres et Jersey, il n’a pas de mots assez durs contre les républicains bourgeois, contre les tenants d’une république représentative. Hugo s’en souviendra longtemps… C’est dans ce glissement rapide – rendu possible par une intense et instruite sensibilité de classe – de l’enthousiasme républicain pour le peuple parisien à la critique de la république bourgeoise que réside l’intérêt des premiers textes de Déjacque.
Notes de bas de page
1 À Miguel Abensour, qui nous a malheureusement quittés trop tôt pour découvrir ces manuscrits inédits.
2 Interrogatoire devant le commissaire du quartier Saint-Honoré, 7 juillet 1848, SHD/6J139/10189/Déjacque, Joseph.
3 Ibid.
4 Déposition de J.-B. Berger, concierge, 6 septembre 1848, ibid.
5 Interrogatoire devant le juge d’instruction, s. d. [septembre 1848], ibid.
6 Rancière Jacques, 1981, La nuit des prolétaires. Archives du rêve ouvrier, Paris, Fayard.
7 Lettre de Messener, manufacturier de papiers peints et veloutés, 5 septembre 1848, SHD/6J139/10189/Déjacque, Joseph.
8 Déposition de P. E. Dager, propriétaire et capitaine de la Garde nationale, 22 août 1848, ibid.
9 AN/f7*/2585, numéro d’ordre 3101.
10 Sur cette citoyenneté combattante, voir : Hincker Louis, 2008, Citoyens-combattants à Paris, 1848-1851, Villeneuve d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion.
11 Lettre de Riess fils, 17 septembre 1848, SHD/6J139/10189/Déjacque, Joseph.
12 Plus largement, sur l’idée contestable d’une guerre intrapopulaire incarnée par l’affrontement entre, d’une part, les Ateliers nationaux dont Déjacque est membre et, d’autre part, la Garde mobile dont fait partie son frère, voir : Traugott Mark, 1985, Armies of the Poor. Determinants of Working-Class Participation in the Parisian Insurrection of June 1848, Princeton (New Jersey), Princeton University Press.
13 Lettre au rédacteur du Constitutionnel, 28 mai 1848, SHD/6J139/10189/Déjacque, Joseph ; La Commune de Paris, n° 79, 31 mai 1848, p. 4.
14 Déjacque Joseph, 1851, Les Lazaréennes : fables et poésies sociales, Paris, chez l’auteur ; id. [présentation et notes de Thomas Bouchet], 2016, À bas les chefs ! Écrits libertaires (1847-1863), Paris, La Fabrique, p. 31-32.
15 Déposition de S. Dessauces, négociant en papiers peints, 6 septembre 1848, SHD/6J139/10189/Déjacque, Joseph.
16 Certificat des frères Dubreuil, 8 juillet 1848, ibid.
17 Déposition d’E. H. Maigret, négociant en papiers peints, 6 septembre 1848, ibid.
18 Interrogatoire devant le juge d’instruction, s. d. [septembre 1848], ibid.
19 Certificat de [Legné ?], 9 juillet 1848, ibid.
20 Déposition de J.-B. Berger, concierge, 6 septembre 1848, ibid.
21 Interrogatoire devant le juge d’instruction, s. d. [septembre 1848], ibid.
22 Lettre [du juge d’instruction] au commissaire du quartier Saint-Honoré, 21 août 1848, ibid.
23 Déjacque signe en février 1848 l'appel « Aux ouvriers ! » rédigé à l’initiative des ateliéristes et visant à lutter contre le bris de machines.
24 Interrogatoire devant le commissaire du quartier Saint-Honoré, 7 juillet 1848, SHD/6J139/10189/Déjacque, Joseph.
25 Sue Eugène, 1850 [1842-1843], Les Mystères de Paris, Paris, J. A. Beaucé, chap. xviii, « Misère », p. 115. Le projet de Déjacque semble faire écho à celui de Sue qui expliquait vouloir « peindre dans son effroyable nudité » la misère.
26 Cette critique se fait d'autant plus acerbe lorsque dans son poème Février et Juin Déjacque accuse « la boutiquière engeance » de se ranger du côté de l'Ordre contre le peuple parisien.
27 Déjacque Joseph [présentation et notes de Thomas Bouchet], À bas les chefs !, op. cit., p. 31-32.
28 Déjacque Joseph [présentation et notes de Thomas Bouchet], À bas les chefs !, op. cit., p. 33-38.
29 À ce propos et sur le « spartaquisme historiographique » de la littérature socialiste du xixe siècle, voir : Rignol Loïc, 2014, Les hiéroglyphes de la Nature. Le socialisme scientifique en France dans le premier xixe siècle, Dijon, Les Presses du réel.
30 « Au peuple », s. d. [mars 1848], SHD/6J139/10189/Déjacque, Joseph.
31 Le texte est sur Gallica [En ligne] : http://0-gallica-bnf-fr.catalogue.libraries.london.ac.uk/ark:/12148/bpt6k5512649d.
32 En particulier le poème Marche turque du recueil Les Orientales (1829).
33 Sur l'affrontement des deux représentations du rôle de la Garde nationale : Hayat Samuel, 2014, Quand la République était révolutionnaire. Citoyenneté et représentation en 1848, Paris, Seuil, p. 130-141.
34 Lettre du commissaire du quartier Saint-Honoré, 3 septembre 1848, SHD/6J139/10189/Déjacque, Joseph.
Auteurs
Tatiana Fauconnet est doctorante en science politique à l’École normale supérieure de Lyon. Sa thèse porte sur les représentants ouvriers pendant la Deuxième République française et plus particulièrement sur l’affirmation et la reconnaissance de cette identité minoritaire dans le champ politique. Elle anime également sur la plateforme Hypothèses, le carnet de recherche en ligne « 1848, une histoire métallique », dédié à l’iconographie politique des médailles et jetons de la Deuxième République française.
Alexandre Frondizi est postdoctorant FNS à l’université de Neuchâtel où il collabore à un projet de recherche sur les républicanismes en Amérique et en Europe méridionales au tournant des xviiie et xixe siècles.
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