La démarche d’investigation : simple effet de mode ou bien nouveau mode d’enseignement des sciences ?
p. 195-220
Texte intégral
1. Introduction
1Depuis quelques années, le rôle des activités expérimentales dans l’enseignement des sciences fait l’objet d’une réflexion au niveau international entraînant une évolution des finalités de cet enseignement et l’apparition de nouveaux curricula. Ceux-ci visent le développement d’une culture scientifique donnant une image plus riche et diversifiée des démarches scientifiques. L’enjeu est de renouveler les pratiques d’enseignement des sciences et des technologies (parfois des mathématiques) en cherchant à rendre l’apprentissage plus actif et plus motivant et en proposant aux élèves des tâches plus ouvertes leur laissant plus d’autonomie (Boilevin, 2013a ; Calmettes, 2012). On passe ainsi d’activités centrées sur des apprentissages manipulatoires ou conceptuels, organisées en démarches stéréotypées, à un enseignement fondé sur des investigations ouvertes avec élaboration de questions, formulation d’hypothèses, etc.
2En France, l’expression « démarche d’investigation » a été introduite dans le projet « La main à la pâte » puis reprise dans l’enseignement primaire ainsi que dans l’enseignement secondaire. L’introduction de cette démarche s’inscrit dans le contexte international plus large de l’enseignement des sciences fondé sur l’investigation (Inquiry-Based Science Education) comme l’indiquent Boilevin (2013a, 2013b) et Venturini, Tiberghien (2012). Il apparaît dès le début des années 60 aux États-Unis sous le terme de « inquiry » (Schwab, Brandwein, 1962). Il trouve aujourd’hui sa place de façon explicite dans les curricula américains mais également dans d’autres pays : English National Science Curriculum1; Pan Canadian Science Project2. Cet enseignement diffuse aussi peu à peu dans les curricula européens comme le montre le rapport Eurydice (2006) qui recommande le développement d’un raisonnement scientifique par l’investigation. Cependant, cette démarche d’enseignement est déclinée sous des formes plus ou moins voisines sans qu’il n’existe de réel consensus pour définir l’enseignement des sciences fondé sur l’investigation (ESFI). Ces changements de curricula s’accompagnent également de réflexions et de recommandations d’origine institutionnelle sur la formation des enseignants (Académie des sciences, 2005 ; Eurydice, 2006 ; Rocard et al., 2007).
3L’introduction de ces nouvelles prescriptions en France et à l’étranger entraîne de nombreuses modifications dans les activités en classe et transforme la relation didactique. L’apparition de « la démarche d’investigation » dans les programmes de sciences français remet en cause les pratiques et questionne les connaissances professionnelles des enseignants. Par exemple : qu’est-ce que la démarche d’investigation ? S’agit-il d’une nouvelle méthode pédagogique ? Quels sont ses liens avec la démarche scientifique ? Quels sont les effets sur les enseignants et les élèves ? Quelle est son efficacité en termes d’enseignement ou d’apprentissage ? Qu’en est-il de la nouvelle relation didactique engendrée par le recours à cette pratique de classe ? Ces questions, posées par les praticiens, sont abordées par les décideurs ou bien les représentants de l’institution mais aussi par les chercheurs en éducation et plus particulièrement par la communauté des didacticiens des sciences (Blanchard et al., 2010 ; Boilevin, 2013b ; Calmettes, 2009, 2012 ; Cariou, 2011, 2013 ; Crawford, 2000 ; Grangeat, 2011, 2012 ; Marlot, Morge, 2015 ; Minner, Jurist Levy, Century, 2009).
4Mais au-delà du renouvellement des modes d’enseignement des sciences se pose la question des types d’apprentissage visés chez les élèves et les étudiants. Répondre à cette question suppose en premier lieu une réflexion épistémologique sur la science et son fonctionnement afin d’identifier, en second lieu, les « savoirs » qu’il conviendrait d’enseigner et donc de transposer. Ce dernier point est d’ailleurs l’objet de débats importants dans le champ social tout comme au sein de la communauté des chercheurs en éducation scientifique. Mais il est aussi indissociable de la question des finalités d’un enseignement des sciences. En fait, à la fois objet d’enseignement et moyen d’enseignement, la « démarche d’investigation » laisse apparaître des confusions dans les prescriptions ou dans les pratiques de classe et nécessite des clarifications dans les recherches en didactique que cette contribution tente d’apporter.
2. Les démarches d’investigation dans l’enseignement des sciences du côté de l’institution
5La place des démarches d’investigation dans l’enseignement des sciences est l’objet de réflexions institutionnelles au niveau international depuis déjà plusieurs années et plus récemment en France.
2.1. Contexte international
6Les finalités de l’enseignement des sciences évoluent notamment sous l’influence d’une perspective sociétale. L’enjeu n’est pas seulement de préparer de futurs scientifiques (chercheurs, ingénieurs) ou des enseignants mais aussi de former de futurs citoyens disposant de connaissances en sciences et sur les sciences. Les curricula s’attachent alors à développer une image de la science et de ses méthodes au même titre que les connaissances scientifiques en lien avec les évolutions techniques. Mais pour permettre ces apprentissages, il faut repenser les types de tâches à envisager dans l’enseignement. En particulier, le rôle des activités expérimentales dans l’enseignement des sciences est modifié. Méheut (2006) constate que les critiques et les propositions s’orientent vers le développement d’une culture scientifique reposant sur la construction par les élèves de représentations des activités et des démarches scientifiques. Il s’agit d’envisager de nouvelles activités délivrant une image plus riche et diversifiée des démarches scientifiques. On passe ainsi d’activités centrées sur des apprentissages manipulatoires ou conceptuels organisés en démarches stéréotypées et « directives » à des démarches ouvertes avec : « formulation, reformulation d’une question, d’un problème ; formulation d’hypothèses, planification d’expériences, amélioration d’un protocole, contrôle des facteurs, recueil et traitement des données, interprétation des données, usage de simulations, débats, etc. » (Méheut, 2006, p. 60). Ces nouvelles modalités d’enseignement favorisent l’autonomie des élèves en s’appuyant sur des tâches plus ouvertes et des activités de plus haut niveau cognitif. Par exemple, dans une séance de travaux pratiques de physique, il ne s’agit pas seulement de demander aux élèves de relever des valeurs sur un appareil de mesure mais aussi et surtout de les amener à proposer le protocole expérimental et de les laisser planifier les expériences.
7Ainsi, les évolutions des finalités de l’enseignement des sciences dans les curricula et dans les standards de formation, en modifiant le rôle des activités expérimentales, ont conduit à l’apparition de l’enseignement des sciences par l’investigation scientifique « inquiry » dans de nombreux curricula. Par exemple, aux USA, les National Science Education Standards définissent l’investigation en classe comme un processus au cours duquel les élèves, par l’expérimentation directe sur la matière et l’observation, par la consultation de livres, d’autres ressources, d’experts, et par le débat, élaborent leur propre compréhension d’idées scientifiques fondamentales, tout ceci se déroulant sous la direction du professeur (NRC, 1996). Cette pratique d’enseignement diffuse peu à peu dans les curricula européens (Eurydice, 2006 ; NESTA, 2005) et notamment en France.
2.2. Contexte français
8La situation française comporte certaines spécificités comme le montre une rapide analyse historique des prescriptions au niveau de l’enseignement primaire et secondaire (Boilevin, 2013a, 2013b).
2.2.1. Enseignement primaire
9En France, deux grands modèles pédagogiques de l’enseignement des sciences à l’école, reposant sur des repères épistémologiques et psychologiques différents, ont existé jusqu’à la fin du xxe siècle : la leçon de choses et les activités d’éveil. La leçon de choses, introduite par Marie Pape-Carpantier à la fin du xixe dans les salles d’asile, où elle est considérée comme une méthode d’enseignement, devient plus tard une discipline. Les activités d’éveil apparaissent en France à la fin des années 1960 et bouleversent le modèle en place. S’appuyant sur des points de vue antipositivistes et anti-empiristes, elles s’opposent à la vieille idée d’une progression du simple au complexe (Kahn, 2000) en donnant la priorité à la problématisation et à la prise en compte des représentations des élèves (Orange, Plé, 2000). Mais les activités d’éveil ne vivent pas longtemps et les mutations institutionnelles réintroduisent dès 1985 les découpages disciplinaires que l’éveil avait voulu mettre en cause (Kahn, 2000). Dix ans plus tard, l’institution propose à nouveau une rénovation des programmes qui se caractérise par un déplacement d’une culture des savoirs disciplinaires vers une culture des démarches d’apprentissage.
10C’est dans cette période qu’apparaît le projet de la « Main à la pâte » proposé par Charpak à partir de l’expérience menée par Lederman à Chicago (Charpak, Léna, Quéré, 2005). Cette démarche pédagogique, non théorisée au départ, prend appui peu à peu sur des références épistémologiques et didactiques ou encore sur les travaux en sciences cognitives (Charpak, Léna, Quéré, 2005 ; Léna, 2009). Elle reçoit des soutiens institutionnels, notamment de l’InterAcademy Panel3 (IAP) et elle inspire la rénovation de curricula dans de nombreux pays dont la France. Ainsi, le plan de rénovation de l’enseignement des sciences et de la technologie à l’école primaire (PRESTE) se met en place progressivement à partir de la rentrée scolaire 2000. Centré sur un enseignement s’appuyant sur une démarche d’investigation définie par les programmes, ce plan s’accompagne de multiples actions de formation des maîtres et d’un suivi par l’Inspection générale.
11Les effets positifs induits par cette méthodologie sur le comportement social et moral des élèves, sur l’amélioration de l’esprit logique et des capacités d’expression et sur l’acquisition de connaissances scientifiques sont mis en avant dans une enquête menée par l’Inspection générale (Sarmant, 1999). Cependant, ce rapport souligne l’apparition de certaines dérives (le « tout méthodologique », le « tout technologique » ou encore le « relativisme » – le savoir de référence n’étant pas pris en compte) liées à une culture scientifique et à une formation insuffisantes des enseignants. De plus, un autre rapport sur le rôle et la place des connaissances et des expériences réalisées par les élèves dans l’enseignement des sciences et de la technologie (Inspection générale, 2001) insiste lui aussi sur certaines dérives possibles comme l’empirisme (qui laisserait croire aux élèves que tout « sort » d’une expérience indépendamment d’une référence au savoir constitué) ou bien au contraire le risque de dogmatisme.
12Mais au-delà de « La main à la pâte », il ne faudrait pas oublier les efforts des mouvements pédagogiques et notamment les apports de la pédagogie Freinet à travers notamment la notion de « tâtonnement expérimental » au service d’une construction du savoir (Ternat, 2005) même si la diffusion des outils pédagogique (Bibliothèques de travail) a peut-être été limitée, ainsi que la participation de ces équipes aux premiers travaux de recherche de l’INRP sur l’enseignement scientifique (équipe de V. Host).
13Ajoutons que les programmes scolaires actuellement en vigueur pour le primaire (B.O.E.N. Hors-série n° 3 du 19 juin 2008) préconisent un « retour aux fondamentaux » et semblent mettre de côté la rénovation de l’enseignement des sciences et de la technologie. Les projets de nouveaux programmes, actuellement en discussion, vont-ils changer la donne ? L’avenir le dira.
2.2.2. Enseignement secondaire
14L’introduction de la démarche d’investigation dans les programmes du second degré en France est plus récente. Ainsi, les programmes du collège pour l’enseignement des sciences expérimentales, des mathématiques et de la technologie, applicables depuis la rentrée 2006, mettent l’accent sur la pratique d’une démarche d’investigation comme méthode d’enseignement privilégiée. Le canevas d’une séquence d’investigation proposé s’organise autour de sept moments clés (B.O.E.N. Hors-Série n° 5 du 25 août 2005, p. 6, 7) : choix d’une situation – problème par le professeur ; appropriation du problème par les élèves ; formulation de conjectures, d’hypothèses explicatives, de protocoles possibles ; investigation ou résolution de problème conduite par les élèves ; échange argumenté autour des propositions élaborées ; acquisition et structuration des connaissances ; opérationnalisation des connaissances.
15De plus, l’introduction des programmes du cycle central pour les disciplines scientifiques fait le lien explicitement avec l’école primaire où la démarche d’investigation est déjà utilisée. Cette introduction indique aussi clairement que « … cette démarche n’est pas unique. Elle n’est pas non plus exclusive et tous les objets d’étude ne se prêtent pas également à sa mise en œuvre » (B.O.E.N. Hors-Série n° 5 du 25 août 2005, p. 6). Cependant, une comparaison rapide avec le canevas proposé dans l’enseignement primaire montre une attention plus soutenue à la phase d’échanges entre élèves pour favoriser l’apprentissage de l’argumentation ainsi qu’à l’opérationnalisation des connaissances. Par contre, le choix de s’appuyer dès le départ sur une « situation-problème » semble très restrictif d’un point de vue épistémologique et d’un point de vue didactique (la démarche scientifique serait une démarche hypothético-déductive).
16Les programmes de sciences physiques et chimiques du lycée, applicables quant à eux depuis la rentrée 2010 pour la classe de seconde (B.O.E.N. Spécial n° 4 du 29 avril 2010), semblent distinguer la démarche pédagogique dite démarche d’investigation de la démarche scientifique et de l’approche expérimentale. En effet, plusieurs paragraphes des préambules développent les liens entre « la démarche scientifique » et « l’approche expérimentale » et leurs implications pédagogiques. Mais les programmes de Première S et de Terminale S, organisés « autour des grandes étapes de la démarche scientifique : l’observation, la modélisation, et l’action sur le réel, tout en recherchant l’adhésion et l’intérêt des élèves par des entrées et des questionnements contextualisés et modernes4 » (B.O.E.N. Spécial n° 9 du 29 septembre 2010), semblent entretenir une certaine confusion entre démarche scientifique et démarche d’investigation.
2.3. Discussion
17Depuis quelques années, une réflexion au niveau international à propos du rôle des activités expérimentales dans l’enseignement des sciences et une évolution des finalités de cet enseignement ont permis le développement de nouveaux curricula. Cependant, un certain nombre de questions n’y sont pas ou peu abordées : quels sont les positionnements épistémologiques sous-jacents ? Qu’entend-on par démarche expérimentale, démarche scientifique ? Peut-on vérifier, réfuter, valider une hypothèse par une expérience ? Qu’est-ce qu’un enseignement de sciences ? Et lorsque les réponses existent, elles sont rarement explicites. De plus, les liens avec les connaissances et les compétences scientifiques des enseignants ne sont pas du tout évoqués.
18Les tâches de type « hands’on » ou de type investigation scientifique sont alors souvent utilisées car elles semblent jouer un rôle important dans la motivation et l’intérêt pour les sciences. Mais les définitions de ce que serait « une démarche d’investigation » ne sont pas stabilisées même si elles semblent s’appuyer sur des modèles didactiques (pas toujours explicitement) de type socioconstructiviste et sur des situations de la vie réelle.
3. Du côté de la recherche en didactique des sciences
19L’Enseignement des Sciences Fondé sur l’Investigation (ESFI) fait l’objet de très nombreux travaux de recherche tant au niveau international que français comme le montrent notamment les revues de questions de Bächtold (2012), Boilevin (2013a, 2013b, ) ou Venturini et Tiberghien (2012).
3.1. Panorama des recherches sur l’ESFI
20Certaines études portent sur l’analyse des curricula et plus particulièrement sur l’explicitation du sens accordé au terme de « démarche d’investigation » en classe dans les curricula (Dell’Angelo, Coquidé, Magneron, 2012 ; Gengarelly, Abrams, 2009 ; Minner, Levy, Century, 2009 ; Park Rogers, Abell, 2008 ; Venturini, Tiberghien, 2012). D’autres travaux portent sur les représentations des enseignants sur l’ESFI (Boilevin, et al., 2015 ; Park Rogers, Abell, 2008 ; Prieur, Monod-Ansaldi, Fontanieu, 2013) ou bien encore sur les croyances et connaissances des enseignants sur la nature des sciences et leurs liens éventuels avec l’enseignement (Crawford, 2007 ; Gyllenpalm et al., 2010 ; Pélissier, Venturini, 2012). D’autres encore étudient les fondements épistémologiques, psychologiques et didactiques de ce type d’enseignement (Bächtold, 2012 ; Cariou, 2013). Cependant, les chercheurs, tout comme l’institution, ne sont pas tous d’accord sur ce qu’est ou sur ce devrait être l’ESFI. Pourtant, de nombreuses recherches s’intéressent aux conditions de mise en œuvre en classe et aux effets sur les apprentissages (Grangeat, 2011). Ainsi, Boilevin et al. (2012), Calmettes (2012) et Jameau (2015) mettent en évidence les écarts et les tensions entre les prescriptions et les connaissances professionnelles des enseignants. D’autres chercheurs s’intéressent aux effets de ce type de démarches pédagogiques sur les apprentissages des élèves (Blanchard et al., 2009 ; Minner et al., 2009 ; Windschitl, 2003). D’autres encore abordent la formation des enseignants à ces nouvelles pratiques (Blanchard et al., 2009 ; Grangeat, 2013 ; Ostermeier et al., 2009).
3.2. Un cadre théorique possible : la transposition didactique
21Pour clarifier la réflexion didactique sur l’ESFI, un cadre théorique semble nécessaire. Lorsqu’on s’intéresse à l’enseignement d’une discipline scolaire, la question de sa relation avec les disciplines scientifiques de référence se pose inévitablement. Le concept de transposition didactique semble alors très pertinent.
22Avant et au cours de son introduction dans le système didactique, le savoir subit des modifications se déployant dans une temporalité particulière (le temps didactique). Cet « apprêt » du savoir à enseigner ne peut se résumer à une « simplification ». La description de ce phénomène constitue la transposition didactique, concept devenu d’usage courant dans les diverses didactiques des disciplines et en sciences de l’éducation. Développé par Chevallard (1991) dans le champ de la didactique des mathématiques, il tient son origine dans le travail sociologique de Verret (1975) consacré à l’enseignement de la philosophie. Pour cet auteur, le phénomène de transposition porte sur les savoirs qui subissent des transformations nécessaires afin d’être transmis. Le savoir mobilisé au cours de cette transmission diffère, d’une part, du savoir mobilisé dans la transmission scientifique, et d’autre part, du savoir tel qu’il est inventé ou tel qu’il est mis en œuvre. Cette transposition est soumise à un ensemble de contraintes et obéit à des règles décrites par Chevallard (1991). Il s’agit d’un phénomène normal auquel nul ne peut échapper lorsqu’il veut transmettre un savoir. Ni « bonne », ni « mauvaise », la transposition didactique est inévitable. Elle crée un cadre nouveau, enserré dans des contraintes bien précises qu’il s’agit d’identifier pour les maîtriser.
23Nous avons déjà abordé par ailleurs les débats à propos de la transposition didactique (Boilevin, 2013a), notamment la question de la référence ainsi que les tentatives d’élargissement de ce concept. Pour Johsua (1997), quelles que soient les sources de référence caractéristiques de chaque institution, les contraintes de l’apprêt didactique conduisent à admettre l’artificialité constitutive des actes didactiques, le savoir se trouvant extrait de son environnement épistémologique. Pour Johsua et Dupin (1993) comme pour Develay (1995), ce processus crée un cadre épistémologique artificiel qui ne peut pas reproduire le cheminement historique et qui conduit finalement à la constitution d’une épistémologie des savoirs scolaires, distincte de l’épistémologie des savoirs de référence. Comme tout modèle scientifique, le concept de transposition didactique modélisant des phénomènes didactiques possède un puissant intérêt heuristique (Johsua, 1996) mais il rencontre des difficultés dans ses limites de validité. Ainsi en est-il de la place donnée à la transmission des valeurs, abordée dans un autre point de vue, celui de la sociologie du curriculum, développée notamment dans les pays anglo-saxons. De même, ce modèle semble ne pas prendre en compte les activités sociales à l’œuvre dans l’obtention et l’utilisation des savoirs comme le fait le modèle des pratiques de référence de Martinand (1986). Mais quelles que soient leur légitimité et leur sphère d’élaboration, les savoirs de référence doivent être transposés dans le système scolaire afin d’être enseignés dès lors que la décision de les transmettre a été prise.
24Au-delà des débats évoqués ci-dessus, nous retenons de la perspective anthropologique que le savoir est une production culturelle et qu’il permet à un individu d’agir dans un contexte socialement, culturellement et idéologiquement identifié. Nous partageons le point de vue de Ginestié (2008) pour qui les savoirs scolaires sont une construction particulière de circonstance. Mais nous partageons aussi l’inquiétude de certains auteurs (Bronckart, Plazaola Giger, 1998 ; Perrenoud, 1998) pour qui le savoir scolaire, séparé des traces de son enracinement originel dans des pratiques et des rapports sociaux, contribuerait à donner une image mythique des savoirs savants. Cela pourrait expliquer le décalage entre les représentations des élèves et des enseignants dans l’enseignement des sciences donnant de celles-ci une vision « désincarnée ». Ces auteurs dénoncent en fait la dépersonnalisation, à l’œuvre dans la transposition didactique, comme mythification possible de la science, contribuant ainsi à propager l’image que la science donne le plus souvent d’elle-même : celle d’un savoir neutre et objectif, chargé de dissiper les préjugés et les illusions en dévoilant la vérité (Stengers, 1997). Pour cette auteure, une autre vision de la science, plus proche de « celle qui se fait », contribuerait probablement à rapprocher les citoyens de celle-ci, en conciliant rationalité et démocratie. Parmi les savoirs savants, les outils conceptuels et les outils méthodologiques sont transposés dans les programmes scolaires mais les aspects sociaux de la pratique scientifique qui rendent vivant cette pratique ne semblent pas suffisamment pris en compte. Cette question de l’identification et de la scolarisation de la pratique est abordée dans la sociologie du curriculum. Pour Perrenoud (1994, 1998) la transformation de la culture en curriculum formel (curriculum prescrit) puis en curriculum réel (curriculum effectivement enseigné) devrait être envisagée à travers une transposition didactique élargie, qu’il s’agisse de savoirs, de compétences, de pratiques et même de normes, de valeurs ou d’attitudes. Ce cadre permet de repenser l’activité enseignante. Il s’agit de susciter des activités à travers des tâches, des situations à travers lesquelles les élèves peuvent construire des savoirs. Pour cela, il faut privilégier le processus de médiation. Perrenoud invite enfin à se servir de ce concept élargi de la transposition didactique pour interroger et repenser les programmes scolaires et la formation des maîtres.
25Finalement, nous considérons que la transposition didactique concerne des savoirs de référence qui sont choisis comme contenus à enseigner tels qu’ils sont présentés dans les curricula, les contenus effectivement enseignés, les contenus tels qu’ils sont appris par les élèves et les contenus d’apprentissage tels qu’ils sont évalués au sein du système didactique (par exemple en devoir surveillé) ou à l’extérieur dans le système d’enseignement (par exemple au baccalauréat) et dans la société d’une manière générale. Par exemple, dans le cas de l’enseignement de la physique, cela conduit à distinguer la physique du physicien, la physique à enseigner, la physique enseignée et la physique apprise par les élèves et enfin la physique évaluée par les différents systèmes. Le concept de transposition didactique permet de prendre en compte de multiples références, tout en gardant à l’esprit que le système didactique repose sur une épistémologie des savoirs scolaires différente de l’épistémologie des savoirs de référence et fonctionne donc dans un cadre épistémologique particulier. Se pose alors la question des contenus spécifiques d’enseignement s’avérant pertinents dans le cas de l’enseignement des sciences.
3.3. Enseignement des sciences fondé sur l’investigation
26Le cadre théorique de la transposition didactique permet de clarifier le positionnement didactique et d’orienter ainsi les recherches sur l’enseignement et l’apprentissage des sciences fondé sur l’investigation. En prenant en compte de multiples références comme les savoirs en sciences, le fonctionnement des sciences et les pratiques des chercheurs scientifiques, la « démarche d’investigation » apparaît ainsi comme une démarche d’enseignement des sciences entretenant des rapports avec les démarches scientifiques. Cinq niveaux en rapport avec l’investigation peuvent alors être distingués (Boilevin, 2013b) :
- Ce que font les scientifiques : les démarches scientifiques ;
- Ce qu’en disent les curricula (programmes scolaires) ;
- Ce que font les enseignants, notamment ce qu’ils font faire à leurs élèves ;
- Ce que font les élèves, ce qu’ils apprennent, comment ils l’apprennent ;
- Ce qui est évalué par les enseignants ou l’institution.
27Ces cinq niveaux permettent de définir l’enseignement et l’apprentissage scientifique fondé sur l’investigation et d’analyser en particulier la transposition entre chaque niveau.
3.3.1. Des démarches scientifiques à la démarche d’enseignement par investigation prescrite : orientations curriculaires
28Cette première étape nécessite tout d’abord une importante clarification des positions épistémologiques sur la notion de démarche scientifique en précisant notamment la place de l’expérience et de la théorie, la place des modèles dans la pratique scientifique, la définition et le rôle du problème en science, la définition et le rôle de l’hypothèse, etc. Il s’agit ensuite de clarifier la définition de la démarche d’enseignement par investigation car au-delà des expressions différentes utilisées (Inquiry based instruction, Inquiry based science education, Inquiry based science teaching), il s’agit de voir si les idées développées sont les mêmes. La majorité des auteurs (Gengarelly, Abrams, 2009 ; Jorde, 2009 ; Minner et al., 2009 ; Park Rogers, Abell, 2008) note que la pratique scientifique d’investigation ne doit pas être confondue avec l’apprentissage par investigation et l’enseignement par investigation. La définition de la pratique scientifique développée par les National Science Education Standards (NRC, 1996) est souvent citée à l’appui dans ces discussions. Elle repose sur l’idée que cette pratique représente les diverses manières que les scientifiques ont d’étudier le monde qui nous entoure et de proposer des explications basées sur des preuves tirées de leur travail. Certaines études distinguent différents niveaux d’investigation à partir de l’analyse du type de tâche proposée aux élèves (Minner et al., 2009 ; Park Rogers, Abell, 2008) ou des rôles respectifs de l’enseignant et des élèves (Gengarelly, Abrams, 2009).
29Mais nous avons évoqué précédemment le risque de mythification des savoirs scientifiques si les pratiques afférentes à l’activité scientifique ne sont pas prises en compte dans l’enseignement. Le risque est grand de donner une image restreinte de la pratique scientifique. En effet, les positions épistémologiques pilotent en partie les types de tâche scolaire préconisée ou prescrite et la variété des démarches à l’œuvre dans l’activité scientifique risque d’être absente dans les curricula si les orientations des prescripteurs s’avèrent trop restreintes comme le montrent les études de Mathé et al. (2008) ou de Coquidé, Fortin, Rumelhard (2009) concernant la situation française. Il s’agit donc de concevoir la pratique d’investigation en classe suffisamment ouverte pour éviter cet écueil. Par ailleurs, utiliser la démarche d’investigation au sens d’enquête et de recherche d’indices risque de donner une image erronée de la science en la présentant comme une activité de découverte de lois cachées dans la nature.
30Les curricula abordent aussi l’intérêt du recours à une telle pratique d’enseignement et d’apprentissage des sciences. L’enjeu principal évoqué est d’améliorer la compréhension des concepts scientifiques ainsi que la compréhension du fonctionnement de la science. A terme, cela doit encourager les élèves à poursuivre des études scientifiques. Il convient alors d’étudier comment les enseignants s’emparent de ces nouvelles prescriptions concernant leurs pratiques car les modifications à mettre en œuvre semblent radicales.
3.3.2. De la démarche d’enseignement par investigation prescrite aux pratiques de classe
31Cette deuxième étape de la transposition didactique est essentielle à étudier car la manière de faire des enseignants permet de caractériser les pratiques de classe comme appartenant ou non à l’enseignement des sciences fondé sur l’investigation.
32Certains travaux montrent le rôle des conceptions des enseignants sur la nature et sur le fonctionnement de la science (Crawford, 2007 ; Jones, Eick, 2007 ; Luft, 2001). Mais la situation est d’autant plus complexe que les conceptions épistémologiques sur la science et son enseignement se mêlent à celles concernant la manière d’enseigner et la manière d’apprendre (Abd-El-Khalick, Lederman, 2000 ; Crawford, 2007 ; Park Rogers, Abell, 2008 ; Pélissier, Venturini, 2012 ; Roletto, 1998).
33D’autres recherches s’intéressent à ce que disent les enseignants sur leur propre pratique en lien avec l’enseignement fondé sur l’investigation (Boilevin, et al., 2015 ; Kim et al., 2013 ; Monod-Ansaldi, Prieur, 2011). Certaines études visent l’objectivation des pratiques enseignantes dans ce type d’activité en classe (Calmettes, 2010, 2012 ; Crawford, 2000 ; Furtak, 2006 ; Morge, Boilevin, 2007 ; Venturini, Tiberghien, 2012). Cependant, d’autres travaux mettent en évidence les difficultés rencontrées par les enseignants pour opérationnaliser ces nouvelles pratiques (Calmettes, 2007, 2008, 2009 ; Gyllenpalm et al., 2010 ; Jameau, 2015 ; Vlassis et al., 2002 ; Venturini, Tiberghien, 2012). Finalement, les nouveaux curricula introduisant l’enseignement des sciences fondé sur l’investigation se traduisent par des modifications importantes des pratiques enseignantes et les résultats des recherches montrent les nombreuses difficultés auxquelles sont confrontés les enseignants pour mettre en œuvre ces changements. Le besoin de formation apparaît évident.
3.3.3. De la démarche d’investigation en classe aux apprentissages
34Cette troisième étape de la transposition didactique est prise en compte dans plusieurs études récentes mais, comme le soulignent Bressoux (2013), ou encore Calmettes et Boilevin (2014), le bien fondé des démarches d’investigation est fortement discuté par certaines publications et donnent lieu à de véritables controverses (par exemple, Kirschner et al. (2006) vs Cobern et al. (2010) ou Hmelo-Siver et al. (2007)). Cependant, les recherches actuelles, réalisées dans le champ de la didactique des sciences, montrent qu’une méthode d’enseignement reposant sur l’investigation scientifique permet un certain nombre d’apprentissages chez élèves. S’appuyant le plus souvent sur des études de cas, elles montrent tous les bénéfices que les élèves peuvent tirer d’un apprentissage des sciences par investigation, d’une part, en termes d’acquisition de connaissances scientifiques, de compétences pour le raisonnement scientifique ou sur l’exploitation de données dans des activités d’investigation (Blanchard et al., 2010 ; Hofstein et al., 2005 ; Lin, Hong et Cheng, 2008 ; Minner et al., 2009 ; Toplis, 2007 ; Wu, Hsieh, 2006) et, d’autre part, en termes d’attitudes plus positives envers la science (Gibson, Chase, 2002 ; Lin et al., 2008). Même si certains travaux insistent sur le temps dont les élèves ont besoin pour s’adapter à ce nouveau type de méthode d’enseignement (Flammang, Forget, 2002 ; Holbrook, Kolodner, 2000), les effets à long terme semblent plutôt bénéfiques quant à l’intérêt pour les sciences (Gibson, Chase, 2002). Enfin, plusieurs études montrent que le type de tâches proposées aux élèves est un facteur conditionnant le type d’apprentissage réalisé (Minner et al., 2009 ; Rudolph, 2005 ; Windschitl, 2003).
3.3.4. Des apprentissages aux évaluations
35Concernant cette dernière étape de la transposition didactique, les recherches (Hume, Coll, 2008 ; Lyon et al., 2012) commencent seulement à s’intéresser aux pratiques d’évaluation et aux contenus de ces dernières que ce soit dans les prescriptions institutionnelles ou chez les enseignants eux-mêmes. La question est d’importance car on peut penser en effet que si les évaluations, notamment certificatives, ne prennent pas en compte les nouveaux apprentissages en jeu, les pratiques enseignantes risquent fort de ne pas changer. Le risque de viser uniquement l’apprentissage de procédures au détriment des aspects conceptuels est donc important. Ces questions sont au cœur du projet européen Assist-me (Assess Inquiry in Science, Technology and Mathematics Education) développé actuellement (Bernholt et al., 2013).
3.4. Apprentissage des sciences fondé sur l’investigation en classe
36Si l’on considère que les enjeux d’apprentissage des sciences sont centrés sur une meilleure compréhension des sciences par le citoyen et la formation de scientifiques, trois dimensions sont à développer : apprendre des sciences, apprendre sur les sciences et faire des sciences. L’enseignement des sciences fondé sur l’investigation semble un bon candidat pour mettre en œuvre ces principes. Mais ce type d’enseignement doit remplir certaines conditions pour permettre ces apprentissages. Il doit amener les élèves à s’engager dans des contenus scientifiques, proposer des tâches ou des problèmes à résoudre requérant des activités cognitives et/ou expérimentales. Il doit permettre des discussions argumentatives et des communications entre élèves. Il doit enfin prévoir une structuration des connaissances. De plus, suivant le degré d’ouverture des tâches proposées aux élèves et le niveau d’intervention de l’enseignant, on peut alors distinguer des investigations plus ou moins complètes.
37En tenant compte de tous les éléments avancés précédemment, il semble possible de définir des conditions pour que se réalise un apprentissage fondé sur l’investigation en classe de sciences :
- Présence de contenus scientifiques ;
- Des tâches ou des problèmes à résoudre requérant des activités cognitives et expérimentales ;
- Des discussions argumentatives et des communications entre pairs ;
- Une structuration des connaissances.
38L’ambition de ce nouveau mode d’enseignement serait de faire évoluer l’image des sciences à l’école. Mais des clarifications sont nécessaires d’un point de vue épistémologique et didactique pour préciser les objectifs d’apprentissage visés par cette forme d’enseignement des sciences et plus généralement pour expliciter les finalités d’un enseignement des sciences.
4. Discussion : les finalités d’un enseignement des sciences
39Aborder les finalités de l’enseignement des sciences suppose en premier lieu une réflexion épistémologique sur la science et son fonctionnement afin d’identifier, en second lieu, les « savoirs » qu’il conviendrait d’enseigner et donc de transposer.
4.1. Quelques éléments des débats épistémologiques
40Parmi les facteurs influençant l’enseignement des sciences, les exigences spécifiques de la pensée scientifique tiennent une place importante. En effet, comme le rappellent Johsua, Dupin (1993), les discours scientifiques se distinguent d’autres types de discours rationnels par un certain nombre de caractéristiques. De plus, les connaissances scientifiques sont définies au sein d’une communauté scientifique et elles ne sont validées qu’à un moment donné de l’histoire de cette communauté. Finalement, le discours scientifique n’existe que s’il est reconnu comme tel par la communauté partageant les mêmes critères de rationalité et de preuves, les mêmes exigences méthodologiques, etc. Pourtant, les débats concernant la définition, la fonction de la science et l’élaboration des savoirs scientifiques sont nombreux et complexes (par ex. Chalmers, 1987 ; Fourez, 1992).
41L’étude des rapports entre théorie et faits d’observation (Hacking, 1989) montre deux principales options contradictoires. Pour les uns, les théories résultent de l’observation et de l’expérience première alors que, pour les autres, la construction de l’expérience et la conduite de celle-ci se font à partir d’un questionnement et à l’intérieur d’un cadre théorique initial. Les questions de la validation des théories (par ex. le falsificationnisme de Popper), de l’objectivité scientifique (par ex. les paradigmes de Kuhn et le rôle des communautés scientifiques dans les changements de théorie), de l’universalité de la méthode scientifique (par ex. Feyerabend) font aussi parties des éléments de discussion. Par ailleurs, la fonction de la science est-elle de nous dévoiler la réalité, de nous expliquer le pourquoi des phénomènes ou bien de décrire simplement le comment ? En fait, les rapports entre théorie et réalité font l’objet de nombreux débats (Cartwright, 1983 ; Chalmers, 1987 ; Fourez, 1992). Ainsi, Fourez (2003, 2006) considère que deux positions se dégagent. Pour la première, « les sciences sont centrées sur la recherche des connaissances du monde tel qu’il serait en lui-même. Les réponses à chercher sont uniques » (Fourez, 2006, p. 5). Le second courant de pensée distingue les théories scientifiques des propriétés du monde. Ce point de vue actuel considère les théories non pas comme des découvertes mais comme des inventions, produits de l’activité humaine (Halbwachs, 1974). L’idée d’une réalité objective du « monde » dévoilée par la science est alors abandonnée. La science est vue comme un processus collectif de construction d’une représentation de la réalité empirique. Le concept d’intersubjectivité remplace alors celui d’objectivité (Désautels, 1987, cité par Robardet, Guillaud, 1997).
42Cependant, l’approche sociologique (Latour, Woolgar, 1988) modifie la définition de la science. Celle-ci est ici considérée comme un ensemble de connaissances produites par des activités s’appuyant sur des méthodes, des techniques et des instruments. Ce point de vue insiste sur la pratique scientifique menée au sein d’une communauté régie par des normes, des règles et des usages, des rapports de pouvoir, des systèmes d’évaluation, des modes de financement, etc. Cette approche nous apparaît comme une position trop extrême puisque l’abandon de tout présupposé concernant la validité des contenus scientifiques amène à confondre théorie et croyance et remet en cause l’idée d’universalité des connaissances scientifiques et conduit ainsi au relativisme épistémologique. Mais l’introduction de l’idée de pratiques sociales, et donc d’autres critères (partage de conventions, de normes, de valeurs) à côté de ceux de la rationalité (cohérence, non contradiction, calculabilité, etc.) semble pertinente à prendre en compte.
43D’autres travaux en sociologie des sciences analysent les rapports entre science et société. Ainsi, Nowotny, Scott et Gibbons (2003) distinguent deux modes de production de la science, l’un prolongeant l’autre. A côté du mode traditionnel, s’appuyant sur l’apprentissage de la recherche au sein de disciplines universitaires spécialisées, figure le mode multidisciplinaire, désormais prépondérant selon ces auteurs. Cette inscription de la société dans les affaires de la science amène ces derniers à parler de contextualisation de la science et à analyser la coévolution de la science et de la société.
4.2. Finalités d’un enseignement des sciences
44La question des finalités d’un enseignement des sciences physiques est abordée au sein de la « noosphère » et dans la profession enseignante5 mais aussi dans les recherches en éducation scientifique notamment dans le cadre des études curriculaires. Cette question apparait d’importance car « les finalités sont des options qui explicitent les valeurs privilégiées et qui fondent l’organisation du système éducatif » (Lenoir, Lebeaume, Hasni, 2006, p. 251).
45Ainsi, dans la préface d’un rapport comparant les réglementations et les recommandations officielles relatives à l’enseignement des sciences au primaire et au secondaire inférieur en Europe (Eurydice, 2006), le commissaire européen en charge de l’éducation, de la formation, de la culture et du multilinguisme, Jan Figel, évoque les finalités des sciences et de son enseignement :
- La science donne des outils pour mieux comprendre le monde qui nous entoure ; il s’agit d’encourager la curiosité et l’esprit critique et de développer les relations entre l’homme et la nature en rappelant notamment que les ressources naturelles ne sont pas inépuisables ;
- La science est au cœur de la société actuelle à travers ses applications ; la culture scientifique est nécessaire pour comprendre et évaluer les discours « experts » sur des sujets d’intérêt général (changement climatique, OGM, ressources naturelles, etc.) ;
- L’Europe a besoin de jeunes scientifiques capables d’innovation ; il s’agit d’accroître les recrutements dans les filières scientifiques et techniques (processus de Lisbonne).
46L’introduction du rapport précise que « la manière dont les sciences sont enseignées dans les écoles dépend de nombreux facteurs : formation reçue par les enseignants, contenu des programmes scolaires, contenu des tests ou des examens standardisés. Ils influencent, directement ou non, les contenus, les approches et les activités scientifiques organisées en classe » (p. 7).
47Selon l’OCDE (1999), l’enseignement scientifique devrait permettre aux élèves :
- de saisir les grandes lignes de pensée qui permettent de comprendre des aspects du monde qui les entoure, qu’ils soient naturels ou résultent des applications de la science ;
- de comprendre, de façon élémentaire, ce qu’est la science, « comment ça marche », quels sont ses points forts et ses limites ;
- de développer ses capacités à communiquer les expériences et les idées en sciences ;
- d’être capables de continuer à apprendre.
48En fait, les différents intervenants au sein de la « noosphère » sont toujours actifs et les débats sur les finalités de l’enseignement des sciences peuvent être vifs suivant les périodes comme le montre une mise en perspective historique de la situation française (Boilevin, 2013a) alors que la période actuelle montre par contre la naissance d’un certain consensus autour de la dimension culturelle du savoir scientifique.
4.3. Culture scientifique ou littéracie scientifique
49Étudiant les contenus des très nombreux rapports publiés au sujet du phénomène de désaffection pour les études scientifiques, Boilevin (2014) note qu’ils parlent tous de culture scientifique mais le plus souvent sans jamais préciser le sens accordé à cette expression, ce qui ne facilite pas les comparaisons et les analyses, sans parler des difficultés liées aux traductions puisqu’on trouve dans la littérature des termes comme culture scientifique, alphabétisation scientifique ou encore littéracie scientifique. Par exemple, le cycle PISA 2006 emploie le terme de culture scientifique (ou littéracie scientifique) qui est défini comme suit (OCDE, 2006, p. 25) :
- « Les connaissances scientifiques de l’individu et sa capacité d’utiliser ces connaissances pour identifier les questions auxquelles la science peut apporter une réponse, pour acquérir de nouvelles connaissances, pour expliquer des phénomènes scientifiques et pour tirer des conclusions fondées sur des faits à propos de questions à caractère scientifique ;
- La compréhension des éléments caractéristiques de la science en tant que forme de recherche et de connaissance humaine ;
- La conscience du rôle de la science et de la technologie dans la constitution de notre environnement matériel, intellectuel et culturel ;
- La volonté de s’engager en qualité de citoyen réfléchi à propos de problèmes à caractère scientifique et touchant à des notions relatives à la science ».
50Notons que les trois derniers points ne semblent pas vraiment développés dans les programmes français actuels.
51Par ailleurs, Harlen et Allende (2009) estiment que les trois premiers objectifs énoncés par l’OCDE (1999) peuvent se résumer par « développer la culture scientifique ». Ces auteurs précisent que « dans ce contexte, le terme de culture désigne la capacité de s’engager efficacement dans certains aspects de la vie moderne, de disposer des connaissances et des compétences nécessaires à chacun d’eux – qui ne sont pas celles des futurs spécialistes ou des individus qui en feront un usage professionnel dans un domaine scientifique. Il signifie que l’on est au fait des grands domaines et orientations de la science, de sa nature et de ses limites, de ce qu’est la démarche scientifique, mais aussi que l’on est capable de mettre à profit ces connaissances pour prendre des décisions en tant que citoyen éclairé et impliqué » (Harlen, Allende, 2009, p. 5).
52Comme l’avancent Johsua et Dupin (1993), il n’est pas question de trancher définitivement la question du positionnement épistémologique mais de choisir un cadre de réflexion cohérent, d’une part, avec l’image des sciences physiques que l’on souhaite donner dans l’enseignement, et d’autre part, avec les impératifs didactiques. De nombreux didacticiens des sciences se sont intéressés à ces questions et ont essayé de clarifier les positionnements possibles quant à la pratique scientifique, à la place des modèles, aux liens entre expérience et théorie et au rôle du problème dans l’éducation scientifique. De son côté, Albe (2007) analyse les débats en épistémologie, histoire et sociologie des sciences pour saisir la nature des sciences et des pratiques de sciences. Elle considère que « l’activité des sciences est à la fois intersubjective et une confrontation renouvelée avec le monde matériel » (p. 212). Elle prend alors position « en faveur d’une inscription sociale de la production des savoirs » et elle considère qu’une « conception des sciences en tant que pratiques sociales contextuelles rejoint une perspective socioconstructiviste de la cognition » (p. 213). Ce positionnement lui permet de soutenir l’introduction dans l’éducation scientifique à l’école de questions scientifiques socialement vives.
53De leur côté, Abd-El-Khalick et Lederman (2000) pensent qu’une bonne compréhension de la nature de la science est un axe central de la littéracie scientifique. La nature de la science fait référence à l’épistémologie des sciences mais ces auteurs ajoutent qu’il n’existe pas de consensus actuellement entre les philosophes des sciences, les historiens des sciences, les scientifiques et les éducateurs scientifiques sur une définition précise. La place de la nature de la science (« nature of science » ou NOS) dans l’éducation scientifique concerne un vaste champ de recherche dans le monde anglo-saxon (Abd-El-Khalik, Lederman, 2000 ; Lederman, 1992) alors que cette question commence seulement à être abordée dans le monde francophone (Maurines, Beaufils, 2012).
54Pour Duit (2007), la littéracie scientifique comprend quatre éléments : les concepts et les principes scientifiques, les méthodes scientifiques, des points de vue sur la nature de la science, des points de vue sur les relations entre science, société et technologie.
55En fait, comme le signalent Albe et Ruel (2008), le concept de « scientific literacy » est ancien dans les pays anglophones mais aussi controversé. Reprenant des idées de Roberts (2007), ces auteurs distinguent deux visions extrêmes : « looking inward to science itself » ; « looking inward from situations to science ». « L’une conçoit la culture scientifique à partir des produits et procédés des sciences et exclut la prise en compte de considérations sociales et des dimensions morales et politiques et des valeurs en sciences. L’autre considère ces éléments et appréhende la culture scientifique à partir des situations impliquant une dimension scientifique que les élèves peuvent rencontrer en tant que citoyens » (Albe, Ruel, 2008, p. 122).
56On s’aperçoit finalement que le développement d’une culture scientifique est lié aux finalités poursuivies par l’enseignement des sciences. Diverses visions s’affrontent, se justifiant par différents types d’arguments (Albe, Ruel, 2008 ; Barma, Guilbert, 2006 ; Vander Borght, 2002) : économiques, utilitaires, humanistes, démocratiques ou éthiques. La vision économique ou technocratique considère l’élève comme un futur scientifique. Cette finalité de l’enseignement des sciences se justifie par un besoin de préparer la relève scientifique et par une préparation à l’emploi. La vision humaniste ou culturelle et sociale considère la science comme un élément de culture au même titre que les sciences humaines. La vision utilitaire est centrée sur le développement de compétences utiles dans la vie quotidienne. La vision démocratique, quant à elle, est liée à l’éducation à la citoyenneté. L’enjeu de l’éducation scientifique est ici d’amener l’élève à mieux comprendre les choix de société et leurs conséquences. Enfin, la finalité éthique vise l’explicitation des valeurs de la science.
5. Conclusion
57Si l’on considère que les enjeux d’apprentissage des sciences sont centrés sur une meilleure compréhension des sciences par le citoyen et la formation de scientifiques, trois dimensions nous semblent devoir être développées : apprendre des sciences, apprendre sur les sciences et faire des sciences.
58Au-delà des phénomènes de mode, l’enseignement des sciences fondé sur l’investigation semble un bon candidat pour mettre en œuvre ces principes. Mais ce type d’enseignement doit remplir certaines conditions pour permettre ces apprentissages. Il doit amener les élèves à s’engager dans des contenus scientifiques, proposer des tâches ou des problèmes à résoudre requérant des activités cognitives et/ou expérimentales. Il doit permettre des discussions argumentatives et des communications entre élèves. Il doit enfin prévoir une structuration des connaissances. De plus, suivant le degré d’ouverture des tâches proposées aux élèves (autonomie des élèves) et le niveau d’intervention de l’enseignant, on peut alors distinguer des investigations plus ou moins complètes.
59Cependant, l’enseignement des sciences fondé sur l’investigation n’est pas le seul moyen permettant de modifier le regard des élèves sur la science. D’autres dispositifs institutionnels existent. Par exemple, l’approche transversale des sciences comme le proposent les nouveaux programmes du collège français à travers les thèmes de convergence (thèmes pour lesquels les enseignants de plusieurs disciplines doivent travailler ensemble à la conception de projets de séquences de classe) ou encore l’enseignement intégré de science et de technologie mis en œuvre dans certains établissements.
60Mais au-delà de ces nouvelles prescriptions et de leur mise en œuvre, on voit que se dessinent la question des contenus d’enseignement et celle de leur transmission-appropriation et, en arrière-plan, celle de la définition d’une culture scientifique et technologique et les enjeux de son acquisition. Un vaste champ de recherches s’ouvre donc en didactique des sciences concernant ces organisations sociales institutionnelles. Mais il ne faudrait pas limiter le champ de recherche en didactique des sciences à ces seules prescriptions institutionnelles pour ne pas se priver d’un autre regard sur d’autres organisations possibles pour envisager des solutions concernant notamment la question de la désaffection pour les sciences et pour les études scientifiques.
61On voit ainsi qu’avant d’envisager d’étudier l’efficacité éventuelle de ces nouvelles pratiques sur les apprentissages visés chez les élèves par rapport à des méthodes plus classiques, il reste beaucoup de chemin à parcourir.
62Ces recherches permettraient probablement de lever les obstacles rencontrés par les systèmes éducatifs pour mettre en œuvre certaines préconisations comme la résistance des enseignants à adopter des modèles didactiques d’origine socioconstructiviste. Il restera cependant à convaincre les décideurs de l’intérêt de ces travaux car la recherche en éducation n’est pas, en général, considérée comme pertinente par ceux-ci.
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 http://curriculum.qca.org.uk/.
2 http://www.cmec.ca/science/.
3 http://www.interacademies.net/.
4 En gras dans le texte original.
5 Par exemple, la revue Cahiers Pédagogiques consacre un dossier spécial coordonné par Giordan (2006) au thème de la culture scientifique et un autre à l’enseignement des sciences physiques et chimiques (Chevigny, 2009).
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