Chapitre 7. La progression et les ruptures d’apprentissage en langues anciennes
Atelier thématique coordonné par Alain Meurant
p. 113-134
Texte intégral
1. Petite mise en perspective historique de l’apprentissage des langues anciennes dans l’enseignement secondaire (P. Pietquin)
1Il n’est un secret pour personne que certaines pratiques pédagogiques perpétuent parfois, de façon plus ou moins inconsciente, des recettes issues d’un autre âge et sans rapport avec les finalités ou les enjeux actuels de l’enseignement de la discipline. Tel l’usage que le grand public fait encore des termes « rhétorique » (pour désigner la sixième année de l’enseignement secondaire) ou « humanités » (pour désigner l’ensemble du cursus), certains de ces atavismes pourraient éclairer en partie l’une ou l’autre des difficultés rencontrées actuellement dans le curriculum. Un petit détour par l’histoire1 ne semble donc pas inutile.
2Référons-nous au schéma de l’organisation générale des études latines aux XVIIIe et XIXe siècles en France, tel que la conçoit Christian Puren2.
CLASSES | OBJECTIF PRIORITAIRE | ACTIVITÉ PRINCIPALE | EXERCICE PRIVILÉGIÉ |
Grammaire (6e - 5e - 4e) | Apprentissage linguistique | application des règles grammaticales | composition grammaticale (thème) |
(3e - 2e) | Apprentissage culturel | lecture des auteurs | version |
Rhétorique | apprentissage de la poésie et de l’éloquence | rédaction de vers et de discours latins | composition littéraire |
3Ce tableau (dont il faut reconnaitre le caractère rudimentaire, quoiqu’il n’entre pas dans notre propos d’en discuter la pertinence) pointe d’emblée la mise en place d’un apprentissage approfondi de la grammaire préalable à la lecture des auteurs, une tradition à laquelle a largement contribué, parmi d’autres, la pédagogie mise en place dans les collèges jésuites3. Nos programmes actuels, en signalant des listes d’auteurs recommandés pour les classes supérieures4, en sont aussi les lointains héritiers. S’il est vrai que la composition littéraire, en particulier celle de vers latins, a disparu depuis longtemps, qui oserait affirmer cependant que l’étude de la grammaire dans les premières années a été complètement dépoussiérée de préceptes uniquement justifiés par leur caractère « préparatoire » ?
4On pourrait certes objecter que toute réforme met du temps à s’installer et qu’un décalage entre les pratiques et les instructions officielles est inévitable. Pourtant, les premières expériences5 faisant du latin une « option » en première année (que l’on peut abandonner par la suite, voire en cours d’année) datent de... 1957 !
Changement du contexte et des finalités
5Un simple regard rétrospectif nous livre une première évidence : autrefois pierre angulaire des « humanités anciennes », l’étude des langues classiques n’est plus désormais qu’un choix parmi d’autres, avec néanmoins ce paradoxe que, dans certains pays, il n’y a peut-être jamais eu autant de latinistes débutants, en chiffres absolus, que ces dernières années : ainsi, en France, l’accès généralisé au niveau secondaire a récemment conduit à ce que, proportionnellement minorisés, ils atteignent des effectifs records6.
6À l’inverse, au fur et à mesure que les élèves avancent en âge, ils sont de plus en plus nombreux à abandonner l’option, en particulier dans les deux dernières années, ce qui n’était guère possible autrefois, lorsque les langues anciennes étaient constitutives d’une filière. Cette tendance suscite inévitablement des questionnements : comment maintenir l’attrait pour un cours que d’aucuns quittent en estimant « en avoir fait suffisamment » après quatre ans ? Quels nouveaux objectifs prévoir dès le commencement de la formation, étant entendu que la plupart des débutants n’atteindront jamais ce qui était auparavant conçu comme le couronnement de celle-ci ? Que faire pour éviter que des élèves, nourris de grammaire, n’en arrivent jamais à lire des auteurs ?
7La question sur la place de la grammaire et la manière de l’enseigner n’est certes pas nouvelle ; chacun sait qu’on enseigna autrefois la grammaire française dans le but précis de préparer à l’étude de celle du latin7 ; que, du reste, la grammaire des langues a été pensée initialement comme une discipline universelle censée s’appliquer à toutes les langues sans distinction et que les méthodes d’apprentissage des langues vivantes ont longtemps reproduit celles qui étaient en usage pour le grec et le latin (singulièrement, la méthode communément appelée « grammaire-traduction »), avant de prendre leur autonomie et de se moderniser selon des modalités spécifiques8.
8Ce que l’on sait peut-être moins, c’est que les classes d’autrefois comptaient parfois jusqu’à cinquante, voire plus de cent élèves9. Un tel contexte mettrait sans doute à mal les instructions actuelles qui recommandent de favoriser et d’accompagner le travail personnel de l’élève.
Débats méthodologiques de toujours
9Si le recul de l’histoire peut mettre en relief les reliquats du passé qui n’ont plus de raison d’être, il est aussi l’occasion de mesurer l’ancienneté de certains questionnements méthodologiques, en définitive jamais tranchés.
10C’est ainsi que les pédagogues du passé ont proposé diverses méthodes pour déchiffrer un texte. En Angleterre, dès le XVIIe siècle, la méthode du Dr. Joseph Webbe10 avait, sans grand succès, tenté de disposer les mots latins en regard de leur traduction, de façon synoptique, par groupes de mots. Au XVIIIe siècle, en France, César Chesneau Dumarsais11 proposa de commencer l’étude du latin en replaçant les mots dans l’ordre usuel du français. Il s’attira de vives critiques de la part de l’Abbé Pluche et de Pierre Chompré, lesquels refusaient toute dislocation de la phrase originale, ce dernier argumentant comme suit :
Une phrase latine d’un auteur ancien est un petit monument d’antiquité. Si vous décomposez ce petit monument pour le faire entendre, au lieu de le construire vous le détruisez : ainsi ce que nous appelons construction, est réellement une destruction12.
11À la fin du XIXe siècle, l’américain William Gardner Hale développa pour sa part une méthode fondée sur la découverte du texte un mot après l’autre, en suivant strictement l’ordre du latin, sans aucune construction préalable13.
12Un autre grand débat qui a traversé les époques est la question de savoir s’il faut commencer l’étude d’une langue par l’apprentissage détaillé des règles de la grammaire ou, au contraire, s’il convient de privilégier une assimilation par l’usage, à l’image de ce qui se passe pour l’acquisition de la langue maternelle. C’est assurément la seconde voie qu’a privilégiée le grand pédagogue Coménius, qui recommandait que ses manuels scolaires bilingues (latin – langue maternelle), faits de courtes phrases mises en contexte, soient lus et relus à plusieurs reprises avant que soit expliquée la moindre règle grammaticale14. D’un siècle à l’autre, c’est pourtant la première méthode qui souvent s’imposa, comme en témoigne cette critique de Dumarsais15 : « Dans les Méthodes ordinaires, on apprend le latin à peu près comme ferait un homme, qui pour apprendre à parler à un enfant, commencerait par lui montrer la Mécanique des organes de la parole. »
13Le choix des textes à mettre au programme, enfin, n’a pas manqué d’offrir matière à polémique : textes authentiques ? morceaux choisis ? large parcours dans l’intégralité d’une œuvre ? La sélection des auteurs elle-même a toujours fait difficulté. Térence, apprécié d’Érasme, qui en recommandait la lecture dès les premières années, fut banni par les Jésuites et expurgé par les pédagogues de Port-Royal16. Quant aux Epistolae familiares de Cicéron, qu’on abordait généralement en même temps que Térence, Coménius17 fit remarquer fort justement qu’elles étaient écrites par des adultes pour des adultes, sur des sujets politiques qui conviennent assez mal au gout des enfants... À la fin du XIXe siècle, Jules Simon en viendra à déplorer que, faute d’une bonne connaissance de la langue, la lecture des grands chefs-d’œuvre se limite trop souvent à de pénibles traductions au mot à mot sur quelques excerpta selecta18 :
La version est un excellent exercice de style ; mais, à mon sens, elle n’est que cela. C’est par la lecture des auteurs qu’on apprend une langue, bien plus vite et bien plus surement qu’en s’attachant à déchiffrer une page isolée, qu’il faut la plupart du temps deviner comme une énigme.
En guise de conclusion
14Confrontés à un défi comparable (enseigner le latin) dans des contextes variables, les pédagogues ont de tout temps rivalisé d’imagination pour développer des stratégies éducatives appropriées aux objectifs qui leur paraissaient prioritaires à leur époque. Loin de partager le pessimisme de Paul Valéry, qui affirmait : « L’histoire justifie ce que l’on veut. Elle n’enseigne rigoureusement rien, car elle contient tout et donne des exemples de tout19 », nous voulons espérer au contraire que les quelques éléments que nous venons d’esquisser seront de nature à stimuler la réflexion et l’imagination de tous ceux qui souhaitent analyser les pratiques actuelles et proposer de nouvelles pistes.
2. Quelles ruptures dans l’apprentissage des langues anciennes dans l’enseignement secondaire et à l’université ? Constats et pistes de réflexion (Gh. Viré)
15L’atelier consacré aux langues anciennes a essentiellement centré ses travaux sur la deuxième question proposée par les organisateurs du colloque, à savoir « À quels moments et à propos de quels objets se situent les ruptures et les difficultés les plus délicates ? ».
16M’inscrivant dans cette perspective, je souhaiterais, tout d’abord, rappeler deux données essentielles à mes yeux : d’une part, l’importance de la notion de rupture tout au long de l’apprentissage et, de l’autre, la place particulière que les langues anciennes occupent dans l’enseignement secondaire francophone.
17Dans l’ouvrage qu’ils ont intitulé Savoir enseigner dans le secondaire, Vincent Carette et Bernard Rey, faisant référence aux conceptions constructivistes de l’apprentissage, rappellent que toute connaissance commence par une rupture, soit avec le sens commun, soit avec des connaissances antérieures qui, dans un contexte nouveau, se révèlent inopérantes ou insuffisantes20. Ce qui rapproche cette conception et l’approche par compétences, privilégiée dans l’enseignement secondaire, c’est précisément le fait que l’une et l’autre ont pour effet de provoquer une modification de l’organisation cognitive du sujet.
18Si, pour progresser, l’apprenant doit d’abord remettre en cause et déconstruire, avec l’aide de l’enseignant, ses conceptions antérieures, avant de s’approprier de nouvelles habitudes mentales, il est nécessaire de circonscrire les apprentissages qui, dans une discipline donnée, et vu les spécificités de celle-ci, doivent être particulièrement étayés pour éviter tout risque de blocage ou de décrochage ; ce point me semble d’autant plus important pour des matières comme les langues anciennes qui font l’objet d’un choix de la part de l’apprenant tout au long de l’enseignement secondaire et qui, dès lors, peuvent être abandonnées à tout moment, sous l’effet du découragement ou de la perte de sens.
19Il est vrai que deux dangers guettent tout spécialiste chargé d’enseigner une langue à un niveau élémentaire : d’une part, ne plus percevoir le caractère ardu que peut présenter, pour un débutant, tel ou tel fait de langue qui, dans sa pratique personnelle, est devenu un automatisme ; d’autre part, ne pas expliciter les liens, évidents pour lui, unissant différents faits de langue abordés isolément, donnant de la cohérence à la langue en tant que système et permettant d’en faire émerger les principes de fonctionnement.
20Pour éviter ces écueils, l’enseignant de latin bénéficie d’un atout non négligeable, dès l’instant où, étant le seul habilité à enseigner cette discipline de la première à la sixième, il a une vue d’ensemble du cursus et peut, de ce fait, mieux moduler les apprentissages, en fonction des contraintes liées à la matière et des attentes de son public. Il lui est loisible, en recourant à l’anticipation, de fournir, à propos d’un fait de langue nouveau et complexe, les premiers éléments permettant de lever provisoirement la difficulté et de l’analyser, plus tard, de manière plus approfondie ; par ailleurs, grâce à la notion de concept intégrateur, proposée par Michel Develay21, il a la possibilité de synthétiser, au moment qu’il estime le plus propice, différents faits de langue partageant un même trait caractéristique du latin (la polyvalence ou le caractère synthétique, par exemple).
21La première rupture qui surgit se situe, bien évidemment, au tout début de l’apprentissage du latin et du grec : dans le cas du latin, il s’agit du premier – et pour beaucoup d’élèves du seul – contact avec une langue flexionnelle ; dans le cas du grec, s’y ajoutent la découverte et la pratique d’un code graphique totalement nouveau (caractères, accents, esprits, signes de ponctuation), ce qui constitue d’ailleurs, pour beaucoup, une expérience unique en son genre dans le secondaire.
22Cette première spécificité se double d’une autre, dans le cas du latin : l’élève est confronté, pour la première fois, à une langue sans locuteurs aujourd’hui, dont le fonctionnement a été reconstruit à partir d’un corps fini de textes et de documents, une langue dès lors dans laquelle il est impossible de s’immerger, ou plus modestement, avec laquelle il n’est pas possible d’avoir un contact, fût-il limité, en dehors du monde de l’école. L’enseignant ne peut donc pas compter sur l’effet d’entrainement qui, pour une langue comme l’anglais, résulte de sa présence dans les médias notamment ; la remarque n’est pas négligeable, car il s’agit d’intégrer, dans les activités proposées dans les cours, non seulement les connaissances nouvelles (déclaratives et procédurales), mais aussi l’entretien de ce qui a déjà été acquis.
23Si le latin constitue une nouveauté absolue pour eux, les apprenants ont néanmoins été familiarisés, parfois sans en avoir pleinement conscience, avec les nombreuses empreintes que la latinité a laissées dans notre culture, qu’il s’agisse des mots latins passés tels quels en français – mais dont on ne soupçonne pas toujours l’origine –, des proverbes ou des citations utilisés dans le langage courant ou encore des images véhiculées par les films ou les séries qui, ces dernières années, ont remis l’antiquité romaine au gout du jour. La tâche de l’enseignant ne s’en trouve pas facilitée pour autant, étant donné que l’étude d’une langue, quelle qu’elle soit, ne pouvant, en aucun cas, être dissociée de celle de la culture à laquelle elle a servi de véhicule, l’apprenant est confronté à une rupture supplémentaire, quand il découvre une société dont les cadres, le mode de fonctionnement et le système de valeurs se différencient du monde qu’il côtoie au quotidien. S’il est judicieux, pour éviter tout savoir désincarné, de relier les acquisitions nouvelles à ce qui est familier aux apprenants, il s’agit cependant de ne pas renforcer leur tendance naturelle aux superpositions hâtives, ce qui aurait pour conséquence, en dépit d’une volonté louable d’actualisation, de les conduire à une vision déformée, incomplète, voire inexacte du monde romain : ainsi, pour ne citer qu’un exemple, s’agit-il de préciser, dès le début, le contenu de certains termes du vocabulaire institutionnel et de concrétiser les réalités qu’ils recouvrent, si l’on veut amener l’élève à mieux comprendre, de l’intérieur, l’organisation du monde dans lequel ont vécu les Romains et à réfléchir aux continuités et discontinuités qui se font jour dans les sociétés humaines au fil des siècles.
24Le fait que le latin est une matière entièrement neuve n’a pas non plus pour corollaire l’absence de préconceptions chez les apprenants. L’une des plus tenaces est, sans conteste, le mouvement spontané qui consiste, pour eux, à appréhender la phrase latine comme ils ont l’habitude de le faire dans leur langue maternelle, omettant d’accorder une attention toute particulière tant à la finale des mots qu’à l’ordre dans lequel ceux-ci se présentent dans l’énoncé. Essayer de reconstituer la vision que peut avoir un élève qui n’a jamais eu de contact avec une langue flexionnelle est une tâche indispensable, mais pas toujours aisée pour l’enseignant. La pratique du latin avec les grands débutants à l’université est éclairante de ce point de vue, puisqu’elle permet de repérer, chez ces étudiants, les multiples pièges, quelquefois inattendus pour le latiniste chevronné, que recèle un texte latin pour le novice absolu, et les efforts que celui-ci doit déployer pour réussir à atteindre le seuil minimal de maitrise de la langue qui permet d’aller à ce qui est essentiel pour construire le sens d’un message. Ce qui est vrai pour un étudiant de BA1 maitrisant correctement sa langue maternelle et ayant acquis la capacité d’abstraction, l’est plus encore pour le jeune élève de première année du secondaire. Dès lors, face au latin, il n’acceptera de consentir l’investissement et les efforts nécessaires pour modifier ses habitudes mentales que si toutes les tâches qui lui sont proposées font sens. De là le difficile et subtil équilibre auquel il faut tenter de parvenir, entre les indispensables acquisitions en matière de langue et de traduction et leur nécessaire intégration dans le contexte culturel, mais aussi et surtout la nécessité de fonder le choix des faits de langue à enseigner sur des critères qui mêlent raisons linguistiques, considérations didactiques et caractère attrayant et enrichissant des contenus.
25La deuxième rupture survient au début du deuxième degré ; elle doit être mise en lien avec l’obligation pour l’élève de pénétrer dans une culture de l’écrit22, puisque c’est à partir de la troisième année que les cours font une large place à la lecture de textes, d’extraits d’auteurs, voire d’autres documents. À une époque où l’image est omniprésente, où les sources d’information sont multiples et variées, l’appropriation de l’écrit et, qui plus est, d’un écrit le plus souvent littéraire, ne va pas de soi, puisqu’elle nécessite la mise en œuvre d’une démarche spécifique : il s’agit de construire du sens et, dès lors, de faire preuve d’autres aptitudes que celles qui ont été développées précédemment, à la faveur de la lecture de phrases courtes, qu’elles soient authentiques, simplifiées ou créées de toutes pièces.
26Se forger sa propre méthode de version constitue pour l’apprenant un défi de taille : comprendre un texte, dont on ne sait à peu près rien au départ, est par définition déstabilisant sur le plan cognitif et sur le plan affectif. La multiplicité des connaissances déclaratives et procédurales qu’il s’agit d’associer accroit la difficulté, dès lors qu’elle risque de causer une surcharge de la mémoire de travail (recherche du sens des mots non connus, repérage de la structure des phrases souvent complexes et obéissant à l’emboitement des subordonnées, prise en compte des marques finales des formes déclinées et conjuguées, place des mots, principes régissant l’accord au sein des groupes, concordance ou emploi des temps, formes ou mots susceptibles d’emplois multiples, liens implicites, etc.). Le rôle assigné à l’analyse change, dès l’instant où celle-ci ne consiste plus en la décomposition systématique des formes, mais a pour objectif soit de contrôler les premières intuitions nées de la lecture globale de la phrase ou de l’extrait, soit de sélectionner, parmi plusieurs hypothèses envisageables, la seule possible dans le contexte.
27Sans doute le travail de version illustre-t-il mieux que beaucoup d’autres tâches, la nécessité de penser les apprentissages dans une perspective de mobilisation et permet-il de mesurer le défi pour l’enseignant, lorsqu’il s’agit d’amener chaque élève à mobiliser ses acquis. Faire en sorte que, au sein d’un groupe classe marqué au sceau de la diversité des profils cognitifs, chacun s’approprie de nouvelles habitudes de lecture-écriture est un des enjeux essentiels de l’apprentissage du latin. L’un des facteurs devant permettre d’y parvenir réside de toute évidence, une fois encore, dans la recherche du sens : sens du texte, avant tout, mais aussi sens de l’activité même de traduction et, au-delà de celle-ci, sens de l’étude d’une langue dite morte.
28La pratique de la version, objectif à la fois premier et ultime de l’apprentissage du latin, met en lumière une des questions, non résolues à ce jour, de l’approche par compétences. Telle qu’elle est définie dans les documents officiels, l’évaluation des compétences fixe l’idéal à atteindre au terme du troisième degré, mais ne précise nullement les niveaux intermédiaires auxquels l’apprenant est censé parvenir à la fin de chaque année.
29La dernière rupture ne concerne que ceux des élèves qui poursuivent l’étude des langues anciennes au-delà de l’enseignement secondaire. Si la transition entre l’enseignement secondaire et l’université se marque, de manière générale, par le passage du métier d’élève à celui d’étudiant, elle se concrétise, au niveau des disciplines, et plus particulièrement du latin, par une triple difficulté : tout d’abord, le changement de statut des matières qui, de branches contribuant à assurer une formation générale (intellectuelle, méthodologique et humaine), deviennent objets d’une étude spécialisée et approfondie ; ensuite, le changement de posture de l’apprenant, qui est désormais celle du professionnel et du chercheur ; enfin, l’acculturation aux discours universitaires, caractérisés par leur terminologie, leur rationalité et leur complexité. Le savoir n’est plus présenté comme un objet reconstruit, standardisé et rendu totalement explicite, comme l’était le savoir scolaire, mais intégré dans l’histoire de la discipline, pensé en termes de questions de recherche et, dès lors, susceptible d’être discuté et contredit.
30Pour me limiter à quelques exemples concrets, pour l’étudiant de BA1 l’une des principales difficultés réside, sans conteste, dans la nécessité de saisir les macrostructures de la langue, alors que précédemment l’apprentissage s’est fait – et c’est tout à fait normal – de manière incomplète, en privilégiant les faits de langue les plus fréquents, et, de plus, a été fragmenté en unités de savoir correspondant aux capacités cognitives des élèves. S’y ajoute la nécessité d’utiliser, avec rigueur, la terminologie scientifiquement fondée, conforme à ce que la recherche nous a appris de l’histoire de la langue, terminologie que les simplifications auxquelles conduit trop souvent le savoir scolaire ont quelquefois malmenée, inculquant à l’apprenti latiniste des habitudes que le futur spécialiste éprouve bien du mal à abandonner. Une autre source d’étonnement de l’étudiant de BA1 concerne le niveau de précision exigé, dans l’analyse et l’exploitation des données fournies par les textes, chez celui qui est appelé à devenir un spécialiste.
31Les constats n’ont de pertinence que s’ils débouchent sur des pistes de réflexion. Celles-ci doivent nécessairement prendre en compte les contraintes liées à l’organisation des cours de langues anciennes dans l’enseignement secondaire : ainsi, faut-il rappeler que le latin au premier degré est considéré à la fois comme objet d’étude et comme adjuvant de la maitrise du français, alors que, dans les années suivantes, il constitue une discipline à part entière.
32Par ailleurs, en tant que cours à option, il peut être abandonné à tout moment par l’élève qui, quelle que soit la longueur de son parcours, devra avoir acquis une vision la plus exacte et la plus complète possible du monde romain, tant sur le plan de la langue que sur celui de la culture.
33Ce qui peut être perçu comme un handicap représente cependant une opportunité que les enseignants se doivent de saisir : déconstruire les représentations des apprenants et les amener à réorganiser sans cesse leur univers mental demande du temps et peut sans doute être davantage mené à bien dans le cadre d’une option que dans celui d’une matière obligatoire où le temps se fait plus pressant.
34La tâche de l’enseignant, pour capitale qu’elle soit, n’en est pas moins complexe et quelquefois même malaisée. Il n’est pas rare, en effet, que les outils dont il dispose soient encore trop tributaires du poids de la tradition pédagogique, fondée sur un apprentissage du latin partant du fonctionnement du français.
35S’il fallait résumer les principes de base susceptibles de régir l’action de l’enseignant, j’en proposerais trois : tout d’abord, la priorité absolue du sens23 dans toutes les activités auxquelles le cours donne lieu ; ensuite, la volonté de privilégier la capacité de mobilisation chez l’apprenant24, – mobilisation de l’énergie, mais aussi des savoirs et des démarches –, enfin, la requalification du statut de l’erreur25, conçue comme composante indissociable du processus d’apprentissage et élément déclencheur de modifications en profondeur de l’organisation mentale de l’apprenant.
36Il va sans dire que chacun de ces principes doit se décliner en actions concrètes qu’il n’est pas possible de définir toutes en quelques lignes. Ainsi, privilégier les capacités de mobilisation passe obligatoirement par le fait d’apprendre à l’élève à utiliser à bon escient ce qu’il a effectivement acquis, autrement dit à tirer le parti maximal d’un minimum de connaissances solidement maitrisées, ou à mettre en place les stratégies les plus efficaces pour oser affronter l’inconnu, ou encore à sélectionner rapidement et associer harmonieusement les connaissances de tous ordres nécessaires pour accomplir une tâche ; mais il peut s’agir, aussi, à un niveau plus concret, de faire en sorte que le latiniste débutant s’approprie – non pas en vue de la simple restitution, mais en vue d’une exploitation réfléchie – un stock de vocabulaire qui le libère, dans une large mesure, des difficultés affleurant à la surface du texte pour concentrer davantage son attention sur la construction du sens et la cohérence du message.
37Ce n’est pas par hasard que j’ai choisi d’illustrer par l’un ou l’autre exemple, le rôle fondamental de la mobilisation ; celle-ci constitue, en effet, la clé de voute de l’approche par compétences qui vise à présenter les savoirs dans leurs usages possibles. Si, dans le cas du latin, il s’agit d’un usage essentiellement interne, puisque l’élève utilise ce qu’il a acquis pour résoudre des problèmes inhérents au latin lui-même, il n’en reste pas moins que certaines des démarches développées par l’apprenant peuvent trouver un champ d’application dans des tâches portant sur d’autres domaines et il est de la responsabilité de l’enseignant de montrer, à l’aide de cas concrets, sinon les transferts, du moins les analogies possibles. Je me limiterai à citer deux exemples, empruntés à la néologie pour le premier et à la méthodologie pour le second. Tous les utilisateurs de l’ordinateur aujourd’hui se souviennent-ils encore que c’est un latiniste – Jacques Perret – qui, grâce à son bagage et à sa démarche de philologue, a créé ce terme de toutes pièces au milieu du XXe siècle ? La prise de décision, dans quelque domaine que ce soit, nécessite la prise en compte de facteurs connus et assurés et d’autres qui le sont moins26 ; les trois principes fondamentaux (risque vs précaution, fins vs moyens et action vs contexte)27 à la base de la stratégie dont Edgar Morin souligne la nécessité quand il explique comment former les jeunes à affronter les incertitudes, ne trouvent-ils leur application dans la pratique de la version ?
38Tout apprentissage passe inévitablement par un certain nombre de ruptures ; c’est en les affrontant, puis en les surmontant que chacun se construit. Gommer ces ruptures n’est dès lors, pas souhaitable, mais, au moment où se pose avec acuité la question de l’échec scolaire, il me semble indispensable de centrer prioritairement les réflexions et les actions sur les dispositifs susceptibles de permettre à chaque apprenant de franchir, une à une et sans encombre, les marches conduisant à l’autonomisation dans la résolution de tâches qui préfigurent celles auxquelles il sera confronté dans sa formation ultérieure et tout au long de sa vie professionnelle et personnelle.
39L’apprentissage du latin est jalonné de ruptures liées à ses caractéristiques intrinsèques. Transformer ces ruptures en autant de moteurs de progrès chez les apprenants est un défi supplémentaire pour l’enseignant ; ne pas le relever serait dommageable.
3. La filière des langues anciennes dans l’enseignement secondaire général de transition : un parcours jalonné de ruptures (A. Meurant)
40Comme on le sait, l’apprentissage des langues anciennes, qu’il s’agisse du grec ou du latin, est dispensé, dans le secondaire général de transition de l’enseignement que pilote la Communauté Wallonie-Bruxelles, par le biais d’une formation optionnelle (2e et 3e degrés) ou d’activités complémentaires (1er degré). Le cursus scolaire d’un élève qui s’engage sur cette voie croise dès lors naturellement et à intervalles réguliers des carrefours qui lui permettent de s’orienter dans cette direction (qu’il opte pour le latin ou pour le grec, voire pour l’étude conjointe de ces deux langues) ou de confirmer un choix posé antérieurement. C’est assez dire que ce curriculum est automatiquement soumis à une série de ruptures latentes qui, si elles se concrétisent, poussent ceux qu’elles séduisent à abandonner le domaine des langues anciennes pour lui préférer des matières souvent honorées d’un haut degré de rentabilité. Cela voudrait-il dire que les matières délaissées en seraient dépourvues ? Les choses sont bien entendu loin d’être aussi simples : la société actuelle vit sur un mode accéléré où toute activité, pour être considérée, doit se trouver profondément marquée du sceau de l’« utilitarisme » (pour rappel ce terme couvre la sphère des comportements où l’utile est le principe de toutes les valeurs, que l’on s’adresse au registre des connaissances ou à celui de l’action) ou, pour parler en termes plus économiques (autre domaine de référence dont l’emprise ne cesse d’enserrer, sinon d’étouffer, le monde d’aujourd’hui) : elle doit « rapporter gros » à ceux qui s’y adonnent, même s’il parait quelque peu indélicat d’aborder sous cet angle l’enseignement ou la formation des jeunes. Serions-nous, par un retournement assez paradoxal dont la pensée a le secret, en présence d’un de ces mythes mobilisés par une société pour étayer la structure de ses institutions28 ? Ceux-là même que dénoncent B. Merck et P.-É. Sutter qui postulent à raison
que la société capitaliste post-taylorienne occidentale s’appuie sur un certain nombre de mythes fondateurs qui contribuent à sa conservation et à l’instrumentalisation des comportements humains. […] Il s’agit de montrer de quelle manière certains groupes sociaux, au sein de cette société, contribuent à diffuser et à renforcer certains mythes pour qu’ils régulent les comportements des individus dans le sens de leur intérêt29.
41Non n’en sommes pas loin. Mais on ne choisit pas son époque, même si certains jugent profondément critiquable ce positionnement.
42Et ce que l’on pourrait qualifier sans exagération aucune d’idéologie ambiante ne laisse pas d’infiltrer en doses massives l’univers de l’école. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres : l’emprise de cette approche signifie-t-elle que toutes les matières dispensées en cours de scolarité et, dans nombre de celles-ci, que toutes les données enseignées, soient toujours enduites d’un fort niveau d’utilité. Poser la question, c’est en quelque sorte y répondre : il serait facile de pointer ici, hors du registre échu au latin et au grec, un large éventail de connaissances distillées par l’enseignement secondaire dont les apprenants auront fort peu d’usage dans leur quotidien présent ou à venir. Sont-elles pour autant inutiles : que chacun en juge30 ! Si le reproche d’inanité est plus facilement et plus volontiers lancé aux langues anciennes, c’est que celles-ci – outre qu’elles ne sont plus parlées aujourd’hui – pèchent encore, pour certains, de voir leur point d’ancrage enfoui dans un passé à jamais révolu. C’est oublier un peu vite que ces langues ne sont pas étudiées pour elles-mêmes, mais parce qu’elles véhiculent des cultures qui sont à la racine des civilisations occidentales dont elles ne cessent de nourrir, parfois inconsciemment pour ceux qui bénéficient de cet apport, l’évolution et le développement. Et ces cultures aujourd’hui disparues, mais toujours vivantes dans les structures mentales, anthropologiques, politiques et juridiques au milieu desquelles se meut l’homme d’aujourd’hui, ne cessent, par un subtil mouvement de ressac, de venir l’interpeller aux moments où il s’y attend le moins. Qu’il suffise de penser à la notion de « démocratie » dont les pénibles maux financiers qui accablent en ces temps agités la Grèce contemporaine font soudain ressurgir, dans l’esprit de certains journalistes ou responsables politiques, des références au cadre lointain, mais soudain redevenu si proche, qui vit fleurir ce système de gouvernement qui demeure encore et toujours le moins bon, à l’exception de tous les autres déjà essayés par le passé comme l’estimait, dans un aphorisme resté fameux, sir Winston Churchill. Et de voir, pour l’occasion, médias et autorités de toutes sortes, sortir des emballages de l’accessoire qui la figure de Lycurgue, qui celles de Platon ou d’Aristote.
43Ce grief de l’inutilité des langues anciennes se greffe à une accusation peut-être plus lourde, parce que mieux affutée, plutôt sournoise, parce que plus insidieuse : celle d’être des branches élitistes, destinées à un public privilégié que séparerait du commun des mortels une capacité de supériorité intellectuelle qui l’autoriserait à gouter le suc d’un savoir à lui seul réservé. Que tel ait été le cas à une certaine époque, c’est-à-dire avant l’omnivalence des diplômes (nous sommes alors en 1964)31, il serait vain de le nier. Mais est-ce encore le cas actuellement ? Les adversaires du latin et du grec ne leur adressent-ils pas des reproches obsolètes, sinon surannés, souvent guidés par les souvenirs (déformés ?) que ceux qui les propagent ont gardé de leur scolarité, tout en oubliant que la didactique des langues anciennes a considérablement évolué et que ces disciplines ne sont plus enseignées aujourd’hui comme en ces périodes désormais révolues. Pourquoi continuer à lire le présent avec des lunettes ajustées sur le passé ? Sans doute, parce que certains y trouvent une situation dont ils croient (mais sur quelles bases ?) qu’elle ne diffère guère du vécu des classes actuelles.
44Plus clairement, la volonté des différentes instances qui chapeautent aujourd’hui l’apprentissage des langues anciennes dans l’enseignement secondaire veille avant tout à ce que ces matières soient enseignées au public le plus large, partant du principe que tout élève, quels que soient son milieu et son origine, est apte à les gouter et à les maitriser. Mieux même, l’orientation actuelle cherche à faire du latin un facteur d’intégration sociale pour des élèves issus de l’immigration (dans les classes de D+ plus particulièrement, mais pas uniquement), partant notamment – mais pas seulement – du postulat que nombreux sont les pays qui nouent de fortes attaches avec les traces plus ou moins importantes laissées par les civilisations de l’antiquité qui les ont fréquentés. Il est dès lors pertinent de pouvoir éclairer ces vestiges par le phare d’une culture partagée avec les contrées où ces apprenants ont été amenés à vivre. Il existe donc un socle de références communes où le point de vue des uns et des autres peut s’échanger sur des objets partagés. D’autant que, dans les premières années de formation, tous les apprenants, quelle que soit leur provenance, se trouve sur un strict pied d’égalité. Il s’agit en effet de disciplines qui n’ont pas été pratiquées dans le cursus de l’enseignement fondamental. Ce qui signifie que tous les élèves les abordent sans passé, ni passif. Ce qui, on le reconnaitra aisément, est loin d’être le cas dans d’autres domaines où des déficits, des carences, des difficultés ont inséré une première hiérarchie, et donc un clivage délétère, au sein des classes. Elles ont aussi généré des appétits ou des répulsions envers l’une ou l’autre matière. Pour le néophyte, commencer l’étude des langues anciennes c’est, avant toute chose, se retrouver sur un terrain neuf, vierge de toute expérience positive ou négative. Cette virginité permet aussi à l’enseignant en langues anciennes de poser sur ses élèves un regard particulier, judicieux et par essence différent de celui que jetteront sur eux les autres membres d’un conseil de classe. Ici perce une première rupture qu’on qualifiera de « positive » parce qu’elle permet de transporter l’élève novice en langues anciennes au sein d’un environnement « neutre », dans la mesure où il n’y est en rien tributaire de son parcours antérieur et où s’ouvre avec lui le champ de tous les possibles. Elle inaugure une série d’étapes où ce débutant, devenu plus aguerri, pourra poursuivre, approfondir ou abandonner l’option qu’il avait jusqu’alors privilégiée. Dans ce dernier cas, on parlera plus volontiers de rupture « négative ».
45Ce sont ces ruptures, positives et négatives, qui jalonnent l’itinéraire scolaire des élèves en langues anciennes qui seront ici rapidement passées en revue pour tenter de déterminer comment les perçoivent et les négocient les différents acteurs impliqués dans leur traitement, les enseignants et les enseignés.
Au premier degré
46Comme nous l’indiquions, l’élève qui, dès son entrée en humanités (pour le latin) ou à une étape postérieure de son curriculum (pour le grec), entame une formation en langues anciennes se trouve dans une situation toute particulière. Si ces disciplines lui offrent l’attrait et le charme inhérents à bien des nouveautés, elles recèlent surtout l’immense avantage de l’introduire dans un contexte inédit où chacun s’élance d’une ligne de départ commune (on mettra ici bien évidemment à part d’éventuels redoublants). Ce constat contribue à le mettre dans une situation relativement confortable pour entamer un apprentissage qui, depuis la réforme du premier degré, est appelé à mieux asseoir l’acquisition des compétences de base en français. Il ne peut, à ce titre, constituer un quelconque pré-requis à l’accession d’une option offerte au deuxième degré, pas plus qu’il ne peut contribuer à présélectionner les élèves vers des orientations frappées, à bon escient ou non, d’un label de haute compétitivité.
47Ce prescrit légal fournit à l’enseignant en langues anciennes un formidable terrain d’observation pour analyser, décortiquer et jauger les attitudes et comportements des élèves confrontés à une matière que tous découvrent au même degré de captation. C’est aussi l’occasion pour lui de rectifier certaines dérives ou de remédier à certaines carences dont l’éradication permettra d’atteindre plus rapidement l’objectif visé : l’intégration, au meilleur niveau d’excellence de chacun, des compétences de base du français. L’enseignement du latin au premier degré – car à ce niveau c’est essentiellement de lui qu’il s’agit – permet également de briser le carcan de l’utilitarisme ambiant qui enferme le jeune dans le périmètre restreint du monde actuel pour lui faire découvrir le riche potentiel d’une civilisation certes disparue, mais dont l’actualité demeure intacte. Pour s’en rendre compte, il suffit d’épingler le nombre de films, de feuilletons ou de docu-réalités qui s’intéressent aux grandes figures ou aux évènements marquants de l’antiquité. Un simple test contribuera à renforcer ce constat : les rayons de nos librairies croulent sous une montagne de publications dont les pages, ouvertes au hasard, abondent de références ou d’allusions à une figure, un concept, une légende, un mythe ou une œuvre d’art produits par l’antiquité. C’est assez dire combien l’héritage des ères grecque et romaine irrigue encore et toujours, et avec une forte intensité, l’environnement culturel dont se dotent nos sociétés contemporaines. Comme l’affirme P. Veyne : « Mieux vaudrait reconnaitre que toute connaissance est intéressante et que vérités et intérêts sont deux mots différents pour une même chose, car la pratique pense ce qu’elle fait32 ». Et on sait le succès que connait chez les élèves plus jeunes – tout comme chez leurs ainés et un très grand nombre d’adultes – une plongée dans l’univers féerique, extraordinaire et envoutant de la mythologie gréco-latine. Pour apprécier l’ampleur du phénomène et en prendre toute la mesure, un rapide survol des différents volumes de J.K. Rowling permet de constater l’important tribut que paient ceux-ci à ce vaste gisement d’images et de thématiques d’une indéniable permanence33.
48Entre la première et la deuxième année du secondaire, la rupture est plus nettement négative puisque qu’un pourcentage variable d’élèves a préféré poursuivre sa scolarité en privilégiant d’autres centres d’intérêt. Pour tenter de limiter cet essaimage – qu’il se produise là, en fin de deuxième ou de quatrième année – il n’est peut-être pas inutile de montrer très vite aux élèves tous les services rendus par une bonne connaissance du latin et du grec dans l’apprentissage des langues modernes. Prenons ici quelques échantillons significatifs. Tout d’abord celui du verbe (très courant en) latin stare (« être debout ») qui, au gré des fluctuations des différentes familles de l’aire indo-européenne, trouve écho aussi bien en néerlandais (staan) qu’en anglais (to stand), allemand (stehen), italien (stare), espagnol (estar), grec (ἵστημι)… ou français (stable). Les élèves qui connaissent ou étudie(ro)nt le portugais retrouveront leur indicatif imparfait du verbe « être » (era) dans le latin erat et ceux qui penchent pour l’espagnol constateront avec surprise qu’une forme verbale comme señalaba récupère le suffixe qui marque l’indicatif imparfait régulier actif du latin. Cela demande bien évidemment à l’enseignant latiniste d’investiguer des langues qui ne lui sont pas directement familières ou coutumières, mais il me semble que le jeu (sinon l’enjeu) en vaut largement la chandelle.
Aux deuxième et troisième degrés
49En général, le passage de deuxième en troisième année (qu’un glissement ou non s’opère en faveur du grec) s’effectue dans les mêmes conditions que celles qui prévalaient lors de la transition première/deuxième. Ce n’est pas à cet endroit que se situe le nœud (gordien !) du problème, mais – comme on le sait bien – en fin de quatrième année où la perte d’effectifs est beaucoup plus sensible en dépit des efforts déployés par les responsables pédagogiques pour proposer aux enseignants des textes innovants ou des stratégies dépoussiérées et renouvelées. La cause de cette désertion est parfaitement ciblée : l’ouverture, au troisième degré, d’un éventail d’options dont l’attrait exerce sur les adolescents un attrait marqué. Une solution pour endiguer le phénomène réside peut-être dans l’introduction d’une rupture « positive », de nature différente de celle évoquée ci-dessus, parce que pédagogique et donc située, cette fois, au plan du professeur. Même s’ils le font déjà avec talent, il serait bon que les enseignants en langues anciennes proposent chaque année des approches toujours plus innovantes (et pas seulement dans le choix des textes) pour empêcher les élèves de se complaire dans une certaine routine qui pourrait indument leur inculquer le sentiment que chaque année scolaire passée en compagnie d’une langue ancienne n’est que la répétition, certes modulée et approfondie sur bien des points, de la précédente. Bien sûr, ce n’est pas du tout le cas puisque les auteurs, les thématiques et les approches changent et s’enrichissent, mais la succession des séquences traductions/commentaires peut contribuer à injecter ce sentiment aussi fallacieux que venimeux à une certaine frange du public concerné. Et l’argumentation peut, de plus, être utilisée par toutes les sirènes dont les chants s’emploient à pousser les élèves des filières gréco-latines vers des cieux plus propices à distiller des connaissances jugées plus rentables (on y revient toujours).
50À titre de suggestion, on pourrait, en guise d’illustration, baser l’enseignement d’une année sur les moyens proposés par TICE34. De nombreuses ressources de qualité permettent en effet d’aborder aujourd’hui l’étude du latin et du grec par le vecteur de l’informatique. Le contenu est bien entendu identique, mais l’emballage radicalement différent. Et l’on connait l’importance du marketing dans notre quotidien. Qu’on nous comprenne bien. Il ne s’agit nullement de dévaloriser, de diminuer ou de niveler par le bas la qualité de nos enseignements ou de sacrifier à des effets de mode, mais plutôt de les inscrire dans une présentation plus proche de ce que les élèves côtoient dans la vie de tous les jours. Il ne s’agit pas plus de généraliser ce type d’approche à tous les niveaux du cours de langues anciennes : on s’embarquerait alors dans une autre banalisation des inconvénients que nous tentons d’esquiver ici. On pourrait aussi imaginer d’instaurer à certains moments une pédagogie à « géométrie variable » qui verrait l’élève poser des choix dans la construction de son année : prenons l’exemple des familles de tâches 2 et 3. Rien n’empêche – surtout dans les écoles qui pratiquent le TFE – de proposer aux élèves qui le souhaitent de développer, disons au cours du deuxième semestre de la cinquième, les travaux liés à la maitrise des compétences dévolues à la troisième famille de tâches. Celles-là seules seraient évaluées lors de l’examen de juin ; celles associées à la deuxième famille de tâches étant validées tout au long du semestre. Si des difficultés devaient subsister à ce niveau, une partie de l’examen pourrait être consacrée à lever les manquements enregistrés. L’essentiel est que l’élève acquière le sentiment de pouvoir piloter son année en fonction de ses intérêts. Ceux que la démarche ne motiverait pas passeraient bien entendu l’examen final dans sa formule traditionnelle, sans que le professeur ne pose, cela va de soi, de jugement de valeur sur le choix opéré.
Pour ouvrir les horizons
51Quoi qu’il en soit, même si le parcours scolaire de l’élève en langues anciennes doit composer avec une série de ruptures, que celles-ci soient positives ou négatives, il reste que, sur le terrain, la proportion de la population scolaire qui se dirige vers ces options ne se réduit pas à la portion congrue, comme on tente parfois de le faire croire. Si le grec est en retrait (mais se maintient bien, sinon se développe, dans certains bastions), le latin demeure – selon une fourchette de chiffres récents35 – la deuxième option empruntée au deuxième degré de l’enseignement général de transition et la troisième au troisième degré. Sans compter les quelque 30.000 élèves qui y touchent de près ou de loin par le biais des activités complémentaires du premier cycle.
52Cette vitalité doit beaucoup à la volonté des concepteurs de programmes et d’outils d’accompagnement, des autorités pédagogiques et des enseignants de terrain de travailler au maximum sur des textes anciens authentiques, en excluant tant que faire se peut de confronter leurs élèves à du latin ou à du grec artificiels, recomposés. Le contact avec les écrits des Anciens, parfois même dans une démarche qui s’apparente à celle de l’immersion actuellement en vogue du côté des langues modernes36, est une condition indispensable et non négociable à une plongée pertinente dans les différents secteurs du monde antique. On l’aura donc compris, il n’est nullement question de réduire ces branches à des cours de français bis où l’on pourrait aisément faire l’économie des textes dans leur formulation originelle. La formulation de la deuxième compétence des derniers programmes de latin et de grec à destination du troisième degré est à cet égard on ne peut plus limpide :
- Présenter, par écrit ou oralement, une approche originale de textes latins travaillés en classe ou inconnus, en appuyant chaque articulation de sa démarche tant sur des éléments textuels précis que sur toute autre information disponible (pour le latin [c’est nous qui soulignons]).
- Présenter une analyse de texte qui se fonde sur la morphologie, le fonctionnement linguistique et le style, sur la compréhension du contenu du passage proposé et qui met en évidence les idées essentielles de l’extrait en les comparant, si possible, à d’autres textes anciens et contemporains qui traitent du même sujet (pour le grec [c’est nous qui soulignons]).
53C’est tout au contraire on se frottant à ces langues et à leur haut patrimoine culturel que les élèves du secondaire pourront acquérir les outils et les méthodologies qui leur permettront d’aborder avec les meilleures chances de réussite les exigences des études supérieures, qu’ils les envisagent selon un type long ou court.
54Car c’est là tout l’enjeu : si les langues anciennes ne sont pas toujours, comme le voudrait l’air du temps où prime le culte de l’instant, immédiatement rentables, elles le sont indéniablement sur une échéance plus étendue. Les statistiques montrent en effet qu’être armé de telles ressources facilite grandement l’acclimatation à des approches qui nécessitent un vocabulaire, des facultés et des aptitudes particulières. Or, c’est le propre de l’adolescent de vivre dans l’immédiat, sans avoir déjà la capacité psychologique de se projeter dans l’avenir. Déjà difficile pour ce qui concerne des échéances relativement proches, cette anticipation l’est davantage encore pour des termes plus éloignés. Dès lors, lui parler à quatorze ans de ce qui lui sera utile quelque quatre ans plus tard, tient de la gageure. Et pourtant, c’est un discours qu’il faut lui tenir, car refermer prématurément sa palette d’options revient à circuler dans un magasin de grande distribution en se voyant interdire l’accès à certains rayons dont, sur le tard, l’intérêt pourrait soudain lui sauter aux yeux. Il est bien sûr toujours loisible de commencer l’étude du latin en troisième, voire en cinquième année. Mais on reconnaitra que ce choix est loin d’être majoritaire et qu’il concerne pour l’essentiel des élèves particulièrement motivés.
55C’est l’occasion ici de redire toute l’importance de la découverte du latin dans les années du premier cycle du secondaire. C’est alors que l’esprit des plus jeunes s’avère véritablement le plus apte à jongler avec les mécanismes des déclinaisons qui, dans une approche bien dosée et avec des stratégies didactiques appropriées, peuvent s’assimiler aux rouages d’un jeu dont le déroulement correspond moins à la psychologie des années ultérieures. Ce qui ne signifie nullement que les grands adolescents sont incapables de relever ce défi, mais – point de vue moins radical – que le terreau s’avère plus favorable dans le premier cycle.
Conclusion
56Toute rupture est un choix et tout choix un renoncement. Mais à chaque rupture s’attache une facture, un prix à payer. Nombreux sont les élèves qui abandonnent ainsi le latin ou le grec non par aversion, mais pour s’ouvrir à des domaines qu’ils ne peuvent combiner, en terme de nombre d’heures, avec ce qu’ils avaient antérieurement privilégié. Il ne s’agit alors ni d’un désaveu ou d’un désamour, plutôt d’un renoncement et parfois d’un arrachement qui, souvent, ne se fait pas sans douleur : l’appel à la raison prime alors sur l’élan du cœur. Toutefois de la fracture à la facture, il n’y a qu’une seule petite lettre, mais combien lourde de sens : car le mot « facture » s’il désigne une somme à honorer, s’attache aussi à décrire la manière ou le style d’une œuvre d’art. Si tant est que l’être humain en soit une, alors sa réalisation que modèlent pouce après pouce les orientations données à son existence relève bien de ce substantif : il se construit lentement et progressivement en honorant le prix nécessaire pour franchir chaque palier, tout en espérant que le résultat confine à l’émulsion de ses espérances.
Notes de bas de page
1 Pour un rapide aperçu de l’histoire de la pédagogie des langues anciennes, on consultera les chapitres ad hoc dans Caravolas, J.-A. (1995). Le point sur l’histoire de la pédagogie des langues (-3000-1950), Québec, Anjou, CEC.
2 Puren, C. (1988). Histoire des méthodologies de l’enseignement des langues, Paris, Nathan-CLE, p. 30. L’auteur nuance : « En réalité, [...] l’explication des textes fut constamment négligée par les professeurs de latin, et même l’exercice de version auquel cette explication tendait à se réduire, l’apprentissage culturel se retrouvant comme laminé en amont par la poursuite de l’apprentissage linguistique et en aval par la préparation précoce à la composition littéraire ».
3 Sur ce sujet, cf. de Dainville, F. (1978). L’éducation des jésuites : XVIe-XVIIIe siècles. Textes réunis et présentés par Marie-Madeleine Compère, Paris, Minuit.
4 Ministère de la Communauté française (2000). Programme d’études du cours et de l’option de base simple : latin (48/2000/240), pp. 20-21 ; FESeC, Programme. Latin. 2e et 3e degrés de Transition, p. 14.
5 Beckers, J. (1998). « Les politiques scolaires de l’égalité des chances et de l’égalité des acquis dans l’enseignement secondaire (après 1945) », in D. Grootaers, Histoire de l’Enseignement en Belgique, Bruxelles, CRISP, pp. 310-311.
6 Cibois, P. (2009), L’enseignement du latin en France, une socio-histoire, disponible sur internet : http://cibois.pagesperso-orange.fr/EnseignementLatinCibois.pdf, pp. 2-3.
7 Pour s’en convaincre, il n’est que de lire petit opuscule de Chompré, P. (1774). Introduction à la langue latine par la voie de la traduction, ou Feuilles élémentaires qui contiennent les premières notions de la grammaire française et le rudiment latin [...], Paris, Tutot, p. 15 : « Déclinaisons françaises des noms. De la manière de décliner en Français. [...] Nominatif La Porte, ou une Porte | Génitif de la Porte, ou d’une Porte | Datif à la Porte, ou à une Porte | Accusatif la Porte, ou une Porte [...] ».
8 Cf. Puren, C. (1988). Op. cit., pp. 24 et s.
9 Dans La réforme de l’enseignement secondaire (Paris, Hachette, 1874, pp. 329 et s.), J. Simon met en scène la visite dans une classe de rhétorique de son temps et déplore : « En réalité, six élèves seulement sur cinquante ont eu un rôle actif pendant la leçon. » En 1643, au Collège de Clermont (Paris), certaines classes pouvaient accueillir jusqu’à trois cents écoliers (cf. Dupont-Ferrier, G. (1921). Du Collège de Clermont au Lycée Louis-le-Grand, 1563-1920. La vie quotidienne d’un collège parisien pendant plus de trois cent cinquante ans, Paris, de Boccard, vol. 1., p. 198).
10 Caravolas, J.-A. (1995). Op cit., pp. 68-69.
11 La polémique qui opposa Dumarsais à l’abbé Pluche et à Pierre Chompré est remise en contexte et analysée par Mercier, D. (1995). L’épreuve de la représentation : l’enseignement des langues étrangères et la pratique de la traduction en France aux XVIIe et XVIIIe siècles, Paris, Les Belles Lettres, Annales littéraires de l’Université de Besançon, 589, pp. 63 et s. (en particulier pp. 87 et s.).
12 Cité par Beauzée, N. (1765), in Diderot et d’Alembert (dir.), L’Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers (1751-1772), Paris, t. 8, article « Inversion », p. 860.
13 Hale, W.G. (1887). The Art of Reading Latin : How to Teach It, Boston, Ginn & Co.
14 Caravolas, J.-A. (1994). La didactique des langues. Précis d’histoire I, Montréal, Presses de l’Université, pp. 339 et s.
15 Dumarsais, C.-C. (1772). Exposition d’une méthode raisonnée pour apprendre la langue latine, Paris, p. 2.
16 Barnard, H.C. (1922). The French Tradition in Education, Cambridge, 1922, p. 210. Cf. Érasme, Epistolae, 115, 33 : Rursum inter Latinos quis utilior loquendi auctor quam Terentius ? ; Ratio studiorum, 4, 14, 2, note d. : Si omnino purgari non poterunt, quemadmodum Terentius, potius non legantur.
17 Coménius (1649). Novissima Linguarum Methodus, VII, 15 : Ciceronis enim Epistolae, quanquam familiares dicantur, scriptae tamen sunt a Viris ad Viros, plerunque de Reipublicae negotiis : quid aetatulae puerili cum talibus ?
18 Simon, J. (1874). Op. cit., p. 351.
19 Valéry, P. (1960). Regards sur le Monde Actuel, « De l’histoire », dans Œuvres, Gallimard, La Pléiade, t. II, p. 935.
20 Carette, V. & Rey, B. (2010). Savoir enseigner dans le secondaire, Bruxelles, De Boeck, pp. 10- 11.
21 Develay, M. (1992). De l’apprentissage à l’enseignement, Paris, ESF, pp. 40-41.
22 Barré de Miniac, C. (2000). Le rapport à l’écriture. Aspects théoriques et didactiques, Lille, Presses universitaires du Septentrion, pp. 82-85. Judet de La Combe, P. & Wismann, H. (2004). L’avenir des langues. Repenser les humanités, Paris, Cerf, pp. 111-113.
23 Develay, M. (1996). Donner du sens à l’école, Paris, ESF, pp. 99-116.
24 Carette, V. & Rey, B. (2010). Op. cit., pp. 84-86.
25 Reuter, Y. (1984). « Pour une autre pratique de l’erreur », in Pratiques, 44, pp. 125-126.
26 Judet de La Combe, P. & Wismann, H. (2004). Op. cit., pp. 226-227.
27 Morin, E. (2000). Les sept savoirs nécessaires à l’éducation du futur, Paris, Seuil, pp. 95-102.
28 Herzberg, F. (1971). Le travail et la nature de l’homme, Paris, L’entreprise et l’homme, p. 147.
29 Merck, B. & Sutter, P.-É. (2009). Gestion des compétences, la grande illusion. Pour un new-deal « compétences ». Préface de H. Landier, Bruxelles, De Boeck, coll. Manager RH, p. 93. (Compléments en ligne).
30 Pour ne pas faire long et se limiter à un exemple probant, Claire Verly, présidente de l’Acfla et enseignante de latin à l’Athénée royal de Koekelbergh se posait récemment la question, dans un article du journal Le Soir daté du 28 septembre 2011, à propos de la loi d’Ohm en physique.
31 Jusqu’alors le diplôme d’humanités (gréco-)latines était obligatoire pour pouvoir entamer des études de médecine, de droit et d’autres filières aussi nobles : voir Léonard, A. (1997). « Manuels scolaires et objectifs de l’enseignement des langues anciennes », in St. Ratti (dir.), Les manuels scolaires de langues anciennes, Besançon, Annales littéraires de l’Université de Besançon, 654 (Institut Gaffiot n. 16), Actes du colloque international de Besançon, 21-22 septembre 1996, pp. 103-106.
32 Veyne, P. (1983). Les Grecs ont-ils cru à leurs mythes ? Essai sur l’imagination constituante, Paris, Seuil, coll. Des Travaux, p. 95.
33 On relèvera avec curiosité et intérêt que l’œuvre a fait elle-même l’objet d’une traduction en latin et en grec ancien !!! Pourquoi prendre une telle initiative et un tel risque commercial si, dans le difficile contexte du monde de l’édition contemporaine, il n’existait un public pour ce genre de lectures ? Voir par exemple Rowling J.K. Harrius Potter et Philisophi Lapis, Londres ; Ead. Harrius Potter et camera secretorum, Londres ; et Ead. Harry Potter and the Philosopher’s Stone, translated into Ancient Greek by A. Wilson (2004). London, dont on trouvera un compte rendu scientifique dans la très sérieuse Bryn Mawr Classical Review à l’adresse : http://bmcr.brynmawr.edu/2005/2005-08-07.html. Voir aussi Warnier-Salmon B. (2003). « Harry Potter et l’Antiquité », in Latinter, 4, pp. 57-64 (disponible sur internet : http://itinera.fltr.ucl.ac.be/latinter/Harry-Potter.htm).
34 Meurant, A., Poucet, J. & Schumacher, J. (2000). « Outils électroniques et études classiques à Louvain-la-Neuve (Belgique) », in A. Cristofori, C. Salvaterra & U. Schmitzer (dir.), La rete di Arachne-Arachnes Retz. Beiträge zu Antike, EDV und Internet im Rahmen des Projekts « Telemachos ». Contributi su nuove tecnologie, didattica ed antichità classica nel ambito del progetto « Telemaco », Stuttgart, Palingenesia, t. 71, pp. 81-100 ; Meurant, A. (2003). « L’apport des NTIC pour l’apprentissage du latin dans l’enseignement secondaire et à l’université », in Actes du IIe Congrès des chercheurs en éducation, L’école dans quel(s) sens ?, Bruxelles, pp. 229-231 ; Id. « Une palette d’outils électroniques au service de l’apprentissage interactif de la langue latine », in les Actes du Ve Colloque Cyber-Langues, Orléans, 24-26 aout 2004, disponible sur internet : http://cyberlangues.online.fr/2004/actes/alainmeurant.doc) ; Id. (2004). « La traduction interactive de textes latins au moyen d’outils informatiques on line », in Actes du IVe Colloque International, Stratégie(s) de la Traduction. Les enjeux économiques de la traduction, in Al-mutargim. Revue de Traduction et d’Interprétariat. Journal of Translation Studies, 9, pp. 69-89 ; Id. (2006) . « Acquérir et enseigner les langues anciennes avec les TIC. Les stratégies pédagogiques du projet “Hélios” », in M. Frenay, B. Raucent & P. Wouters (dir.), Actes du IVe colloque, Questions de pédagogies dans l’enseignement supérieur. Les pédagogies actives : enjeux et conditions, Louvain-la-Neuve, Presses universitaires de Louvain, vol. 1., pp. 312-322 ; Id. (2010). « “Helios” : un serveur pédagogique interactif pour l’enseignement des langues anciennes à distance », in J.-L. Dufays, M.-L. De Keersmaecker & A. Meurant (dir.), Quelles pratiques didactiques pour favoriser la transition secondaire-université ? Gros plan sur les programmes du 3e degré de l’enseignement secondaire de transition, Louvain-la-Neuve, Presses universitaires de Louvain, coll. Recherches en formation des enseignants et en didactique, pp. 148-154.
35 En 2004-2005, l’enseignement secondaire organisé par la Communauté Wallonie-Bruxelles comptait 117.000 élèves aux 2e et 3e degrés. Sur l’ensemble des deux niveaux, 23.096 d’entre eux avaient opté pour le latin, ce qui place cette discipline derrière les sciences (36.014 inscrits), mais devant les mathématiques (22.880 inscrits) et les sciences économiques (16.156 inscrits) : voir Bulletin d’information de la FPGL, 182, novembre-décembre 2011, p. 13.
36 Pour se faire une idée plus précise de la démarche suivie on renverra à Debrux, Th. & Dewez, Fr. (2004), Argo 1. Livre cahier, Wavre-Wommelgem, Van In + 1 CD Rom ; Debrux, Th. & Dewez, Fr. & Massillon, Fr.(2005), Argo 2. Livre cahier, Wavre-Wommelgem, Van In ; et pour les grands débutants à Meurant, A. & Boxus, A.-M. (2012), “Ad honorem per ardorem”. Manuel de latin à l’usage des grands débutants, Bruxelles, Safran, Langues et cultures anciennes, 18 ; et Id. (2012), “Ad honorem per ardorem”. Exercices de latin à l’usage des grands débutants, Bruxelles, Safran, Langues et cultures anciennes, 19.
Auteurs
Professeur de latin en première année de bachelier et de didactique des langues anciennes à l’Université catholique de Louvain et professeur de latin en 5e secondaire au Collège du Sacré-Cœur de Ganshoren.
Service de didactique en langues et littératures classiques, Université de Liège.
Professeure à Université libre de Bruxelles.
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