Chapitre III. La clôture et le monde
p. 199-320
Texte intégral
1S’il est une chose spécifique à la réalité que nous étudions, c’est la dimension de retrait. Non un retrait individuel — nous serions dans l’érémitisme —, mais un retrait vécu en groupe. La modalité du rapport au monde apparaît comme un élément clé pour la définition de la vie monastique. « La séparation du monde, dans un célibat définitif, est l’aspect le plus généralement observable de la vie monastique » affirme Pierre Miquel dans son article consacré au monachisme. L’étymologie du terme « moine » rend compte de l’esprit de solitude constitutif de la vie monacale : le moine peut désigner « celui qui vit seul (ermite ou anachorète), celui qui a renoncé à sa famille, au mariage et à ses biens, celui qui vit dans l’unité avec d’autres (cénobite), celui qui est unifié (le simple) ». Cette séparation peut être réalisée « soit au désert qui l’impose comme un fait », « soit dans la pratique de Règles qui en font un droit et un devoir », qui est la voie du cénobitisme. Ainsi, que ce soit dans l’un ou l’autre état — l’érémitisme ou le cénobitisme —, la séparation du monde constitue l’idéal commun1. Cette dimension de retrait traverse l’histoire du monachisme jusqu’à nos jours. À la question « qu’est-ce qui caractérise la vie monastique ? », Mère Rosa, présidente, en 1999, de l’Union des religieuses contemplatives(U.R.C.) de Belgique parle de « cette mise à part », qui n’est pas une fuite, mais une distance, un retrait : c’est « l’esprit de désert » que chaque ordre vit de façon différente2.
A. L’entrée en clôture
2La tradition monastique accorde une grande importance au moment de l’entrée qui fait vivre, dans un mouvement aussi ramassé qu’unique, la longue quête du détachement du monde. Les propos suivants, issus de l’expérience d’un moine, soulignent l’intensité de ce moment fondateur :
« L’énergie spirituelle qui nous remplit au moment de notre exode et qui nous mène du monde au monastère est, en fait, d’une très grande puissance. […] Cette énergie anime à elle seule la vie monastique dans son intégralité et dans sa forme la plus réussie. […] L’expérience de Dieu chez le moine dans son exode au monde, peut être considérée comme le fondement sur lequel il bâtira toutes ses expériences ultérieures de Dieu. […] S’il réussit à sortir du monde et à accomplir son exode, le moine prouve qu’il a transcendé le monde et ceci, à son tour, veut dire qu’il a acquis le pouvoir nécessaire pour attirer le monde à sa suite et le présenter à Dieu. […] C’est une puissance spirituelle majeure, dont il ne perçoit qu’une partie infime, cette violente coupure d’avec le monde et d’avec ses engagements3. »
3Dans les sources des couvents étudiés, c’est davantage la portée émotive de l’événement qui est mise en valeur. Au niveau de la rupture avec le monde, l’accent est toujours mis sur la séparation familiale. Les biographes insistent sur la traversée douloureuse qu’est le moment de l’entrée, citant volontiers Thérèse d’Avila :
« Quand je quittai la maison de mon père, j’éprouvai une douleur si excessive que l’heure de ma mort ne peut, je pense, en réserver de plus cruelle… Il me semblait sentir mes os se détacher les uns des autres4. »
1. Le jour de l’entrée et sa ritualisation
4Germaine Beckers décide de faire seule le chemin la menant de chez elle au carmel de Namur pour épargner à sa mère la douleur de la séparation :
« C’est le 1er mai 1899. […] Germaine a gardé pour le rouge son amour d’autrefois. Et la voici revêtue de sa plus belle toilette, dont le ton chaud donne de l’éclat à son teint de lis. Quoi de trop beau pour Jésus ! C’est à Lui qu’elle va, à sa Mère, à sa montagne sainte. Sa généreuse maman veut la conduire. Non ! c’est trop demander à une mère !… Le beau-frère alors… si paternel pour les jeunes orphelins ? Non encore ! Sa résolution est prise, elle partira seule… Jamais la caresse de sa Mère n’a été plus tendre, le cercle de famille plus doux. […] Germaine monta seule en wagon. […] L’image des êtres chers remplit ses yeux… et ses yeux se remplissent de larmes. Les émotions, les fatigues l’ont brisée… elle est seule, tant mieux, personne ne pourra s’attrister ou s’étonner. Mais quand la locomotive haletante la dépose dans la paisible ville, elle aussi a retrouvé son calme et son sourire. Un peu confuse de ses yeux rougis, elle sonne à la modeste porte du petit carmel. Il est 3 heures5. »
5D’une clarisse entrée en 1856, la notice rappelle son « départ simple » : « chacun sentait le sacrifice, devant le Calvaire du village on se sépara. Seule Émilie prit l’omnibus qui lentement l’amena au Haut-Pont6 ». Pour une autre, entrée en 1873, « c’est la très Sainte Vierge qui lui obtint le courage de dire adieu aux siens, surtout à sa mère qu’elle chérissait tant, il lui en coûtait de marcher sur son cœur7 ». D’autres départs sont plus pathétiques, comme celui-ci, en 1914, où Yvonne Devin doit laisser sa mère doublement meurtrie, laquelle, sous l’émotion du départ de sa fille, aurait fait une chute dans l’escalier :
« À l’heure fixée pour le départ, Yvonne rentrant de la Messe trouva sa pieuse Mère qui, anéantie par l’émotion, avait perdu pied et avait roulé jusqu’au bas de l’escalier. Le visage contusionné et baigné de sang, elle eut le courage de se ressaisir et de dire ‘Va seule, mon enfant, il ne faut plus tarder, je te confie à la garde de Dieu’. Et la future clarisse […] de partir seule, bien résolue à ne jamais rien refuser à N.S.8 »
6Marie Conrard quitte à 30 ans son village natal, après un repas triste et monotone, abandonnant son vieux papa, Bertha et le petit domestique :
« Pour faire sainte besogne
Tout elle quitta
Jusqu’au petit domestique
Qui la regretta !
C’étaient deux cœurs pacifiques
Qui s’entendaient bien là-bas
Près du vieux papa
Oui, da
Qu’il fut triste et monotone
Le dernier repas
Pris avant que l’heure sonne
En ce matin-là
Joseph fut à l’écurie
Cacher son chagrin
‘Bertha’ est là qui l’épie
Elle va pleine d’entrain
Les conduire au train
Oui, bien9… »
7En dehors de toute dramatisation, un cas d’entrée tout particulier est évoqué par une moniale de Saint-Servais. Le 25 novembre 1919, profitant de la cérémonie de prise d’habit d’une moniale, Mariette Thys « aurait ‘glissé’ pendant que la porte était ouverte10 ». Si l’épisode de la « glissade » en clôture a peut-être été exagéré, les dates d’entrée de la jeune fille et de la prise d’habit concordent bel et bien et confirment l’événement.
8Bien souvent, la famille souffre et l’entrante souffre de voir souffrir sa famille. La prieure de Floreffe, au sujet de l’entrée d’Hélène Ruidant, en février 1948, écrit : « Entrée très pénible du fait de Mme [N] qui a très fort extériorisé sa peine11 ». Monique Bauret se rappelle de ce jour de l’entrée : « C’est un vilain moment à passer ; je me souviens encore du 3 avril, comme c’était dur12 ». Marcelle Pirotte contourne le rituel de l’entrée qui oblige la famille à voir la porte se refermer sur l’entrante en allant elle-même raccompagner ses parents à la porte : « Au moment d’entrer, je me suis dit, ‘Je ne peux pas entrer’. Tous pleuraient. […] Je ne pourrai supporter de voir fermer la porte devant eux. […] J’ai donc moi-même été les raccompagner à la cour13 ». Même si elles sont rares, les entrées sans l’accord parental comportent une charge émotive supplémentaire. À Malonne, trois clarisses sont arrivées dans ces conditions. Le 13 juin 1927, les chroniques du monastère relatent l’arrivée de Paulette Tricot, parisienne, « reçue avec d’autant plus d’empressement qu’elle dut quitter furtivement la maison paternelle, car ses parents s’opposaient à son départ14 ». La notice ajoute que la jeune fille « quitta en secret l’appartement paternel avec la complicité d’une amie et du père Henry ». Une fois entrée, elle dut encore « résister aux assauts du père qui la fit rechercher par la police », et, durant quelque temps, « on dut la cacher dans une autre communauté pour déjouer les poursuites ». La réconciliation ne se fit pas, mais la clarisse surmonta l’épreuve : « Cette expérience marqua profondément l’existence de Sœur Marguerite-Marie qui, sous un dehors effacé et fragile, révélait une force de caractère étonnante15 ». Une moniale interviewée se rappelle quelques détails relatifs à cette entrée sortant de l’ordinaire : « Quand elle est arrivée ici, elle n’avait que ce qu’elle avait sur son dos et son petit sac à main, c’est tout ce qu’elle avait. Alors, on lui avait acheté des chaussures, alors elle disait ‘Je suis chiquement chaussée’, c’étaient des termes parisiens, mais elle était très très calme16 ». En août de la même année, la communauté accueille Yvonne L., de Tourcoing, « mise à la porte par ses parents courroucés de sa demande d’entrer en religion17 ». Durant son postulat, « toute sa parenté essaya de la faire réfléchir, mais elle tint bon. Voyant sa décision irrévocable, ses parents s’inclinèrent et progressivement la paix familiale fut rétablie18 ». En septembre 1931, Alice Cointrel, de Lille, arrive à Malonne, malgré la vive opposition des parents « incroyants » :
« Alice, à sa majorité, quitta alors la maison paternelle sans leur consentement, au cours d’une scène extrêmement pénible pour son amour filial, au point que sa santé en fut sérieusement ébranlée, ce qui, durant de longs mois, posa un point d’interrogation pour son admission à la profession temporaire. […] Elle avait dit au Seigneur : ‘Je veux me donner totalement à vous. Demandez-moi ce que vous voulez, mais accordez-moi la conversion de mes parents’. Selon son expression ‘Je serais passée à travers le feu pour obtenir cette grâce19’. »
9Dans une interview relatant l’épisode, la narratrice rapporte qu’« en tournant la rue », la fugitive « entendait sa maman qui hurlait20 ».
10Au carmel de Jambes, on trouve deux cas de sœurs qui agissent sans l’accord parental. Laissant une lettre d’adieu à ses parents, Hortense Thyrifays franchit, le 27 août 1886, « la clôture qui allait la séparer d’eux » : « Ce fut un acte vraiment héroïque pour cette nature plutôt timorée et craintive. Elle fut des mois à s’en remettre ainsi que des pénibles scènes de reproches endurées au parloir21 ». Esther Wedekind se passe d’annoncer son entrée à son père, irréductiblement opposé à la religion, et quitte le foyer familial en laissant une « émouvante lettre d’adieu ». Mais à sa grande surprise, ses parents se trouvent sur le quai de la gare à Bruxelles au moment du départ, « sa mère chérie contenant sa douleur pour tempérer la violence des sentiments de son mari qui déclara à sa fille qu’il n’irait jamais la voir22… » Au carmel de Floreffe, Joséphine Lacroix, dont les parents sont opposés à son projet de vie religieuse, entre à l’insu de sa mère, en 1887, à l’âge de 27 ans23. Marie Gustin passe outre de l’opposition parentale : « Prétextant un séjour chez des amis […], elle quitte la maison paternelle et entre au carmel24 ». Il faut attendre sept années pour que son père vienne la voir au couvent. À côté de la douleur de la séparation, les témoignages insistent sur l’enthousiasme et l’excitation du jour d’entrée : « Mon bonheur était intraduisible (malgré la peine du départ), j’ai dû m’arracher à l’étreinte de Papa25 ! », écrit Marie-Josèphe Verhoye entrée à Malonne en 1933. Pour Thérèse Danis, entrée en 1950, « le plus dur, ça a été de partir », mais ensuite, elle trouvait ce à quoi elle aspirait… « comme quelqu’un qui se marie ». « Est-ce que c’est dur de quitter ses parents ? Pas du tout, pas du tout26. » Certaines entrées prennent une allure festive. Malonne garde la mémoire d’une postulante tourière, dont « on eût dit qu’elle était à une fête » : « elle se hissait sur la pointe des pieds pour envoyer son affectueux bonjour au travers de la porte claustrale semblant par ses gestes confirmer qu’elle se donnait avec tout son cœur27 ». La communauté de Jambes retient l’entrée de Mélanie Petit, dont la joie d’entrer se manifeste par une embrassade générale de toutes les sœurs :
« Le carmel de Namur, recueilli et propret, l’émerveilla. Sa joie et sa reconnaissance au ciel et à la terre débordaient ; aussi le premier soir, quand les sœurs agenouillées au seuil de leur cellule, attendaient la sentence, Mélanie, dans un élan de tendresse, se précipita sur elles pour les embrasser ! C’était la première effusion ‘in osculo sancto’ qui devait si souvent exprimer pour notre bonne sœur, le naïf trop plein de sa tendresse28. »
11Chaque année, celle-ci, en mémoire de cet heureux jour, refaisait son entrée. À la fin de sa vie, à sa plus grande joie, toutes les religieuses s’associaient à ce petit jeu personnel : « Heure fortunée, que 60 ans après, notre bonne vieille sœur Marie-Thérèse célébrait ou plutôt reconstituait encore en faisant à travers nos cloîtres, émue de joie et de reconnaissance, son entrée ‘comme ce jour-là29’. »
12Les entrées joyeuses sont, à Saint-Servais, mises en chanson. Un chant relate l’entrée de Céleste Dekeyser qui passe la porte de clôture en sautillant, en riant et en chantant30. C’est suite à cet épisode qu’une moniale de Roulers écrira : « Vos petites sœurs tourières nous ont dit que quelques-unes entraient dans la clôture en dansant et chantant31 ». D’une autre, qui a longuement hésité avant d’entrer, un chant dit qu’une fois au couvent, elle exultait de bonheur en dansant :
« Jésus sur elle avait mis son veto
Enfin, elle franchit la clôture
Son cœur, de grande joie, tout aussitôt
Déborda sans aucune mesure !
Si bien qu’en arrivant, là-haut au noviciat
Elle reprit sa valse et ainsi souligna
En tournant autour de la table
Tout un bonheur réalisé
Dans sa donation irrévocable
À l’Aimé !32 »
13À l’arrivée au couvent, les postulantes sont ravies par leur « petite cellule ». Alix Dupiereux se réjouit de la clarté du couvent, « elle qui, à cause de la mystérieuse obscurité des parloirs » pensait que « tout était sombre dans le monastère ». Mais c’est surtout sa « petite cellule » qui l’enchante : « Mais je surabondais de joie surtout en entrant dans notre petite cellule. Vraiment, Jésus ne trompa pas mon espérance33. » Les sœurs se sentent dans leur élément. « ’Que je suis bien’ », dit une clarisse en entrant au petit parloir, à peine éclairé, du couventde Saint-Omer34. « Nous voilà donc en route pour aller dans le lieu de notre repos », se dit Omérine au moment du départ au couvent. Arrivée au carmel, il lui paraissait « qu’elle avait toujours vécu dans un monastère », et rien ne lui semblait difficile35. Lévina Duchêne, dans sa première lettre à ses parents, écrit : « déjà 3 jours passés et il me semble que je viens d’entrer tellement le temps me paraît court au carmel36 ». Maria Grandjean, quelques jours après son entrée, écrit à sa famille : « Je ne voudrais plus être à Liège, et pourtant j’y était si bien au milieu de toute une famille qui m’aimait ! Mais ici je suis encore mieux, je suis dans ma sphère, je suis dans un petit paradis. » Ses premières lettres disent son bonheur sans cesse renouvelé d’être au couvent : « Vous pourrez juger par vous-même, cher papa, que tout ce qu’on vous a dit de moi n’est pas exagéré. Vous verrez combien je suis heureuse ! Six mois sont déjà passés depuis que je suis ici et il me semble qu’il n’y en a à peine deux ou trois. » Elle s’étonne même d’être aussi heureuse et se demande si elle pourra gagner comme cela son salut : « Chaque jour mon bonheur s’augmente, je suis venue ici pour gagner le Ciel et ma joie, mon contentement intérieur sont si grands que j’ai presque peur de ne pas y arriver37. » Louise Ranwez passe un postulat de rêve, la vie conventuelle répondant « trop bien à ses aspirations » : « Tandis que la solitude, le silence, l’office divin faisaient ses délices, la communauté l’appréciait et s’apprêtait à lui accorder la grâce qu’elle sollicitait38. » Anne-Marie Adam affirme : « Quand je suis arrivée ici, j’avais ce que je désirais. Oui, je n’ai jamais regretté39. » Marie-France Becker dit qu’elle est « rentrée dans l’enthousiasme » et que cet enthousiasme a duré deux trois ans avant de retomber40.
14Le bonheur de l’entrée se prolonge lors des rites d’entrée, prise d’habit et profession. Pour Marcelle Pirotte, c’est la prise d’habit qui constitue le grand moment : « Pour moi, tout était fait à la prise d’habit. […] Je sentais que je me donnais au Seigneur, et que je ne pouvais plus reculer. Ça y est, c’est fait. Les autres étapes, c’était pour confirmer. Au moment où j’ai pris l’habit, c’était décisif41. » Pour Maria Grandjean, il faut attendre la profession avec l’assurance qu’elle ne pourra plus quitter le couvent pour se sentir définitivement liée. Elle écrit qu’elle en est « folle de joie ». Le jour de sa profession, qui fut selon la biographe « le plus consolant de sa vie », elle écrit encore à sa famille : « Mes bienaimés, tout est fini ! Je suis liée ! Fixée pour toujours42 ! » La carmélite Louise Ranwez écrivait, avant de faire profession : « J’espère faire profession l’année prochaine à la fête de la Purification et alors je pourrai dire que je suis au comble de mes désirs43. » Clavie Damary demandait à ses anciennes novices restées à Saint-Omer de réciter un Magnificat au lieu et à l’endroit où elle avait fait profession : « Que se passa-t-il alors entre Jésus et son épouse ? Ce que nous savons, c’est qu’elle garda de ces heureux instants une gratitude qui la suivit ici. Chaque année, elle demandait à ses anciennes novices restées à Saint-Omer, de réciter le Magnificat à cette même place où Jésus l’avait faite ‘Sienne44’. » Une correspondante de Roulers qui écrit à Saint-Servais dit chaudement le bonheur pour la novice de devenir l’épouse de Jésus : « Ce 24 nous avons eu la profession de notre bonne petite Sœur Marguerite-Marie. Elle rayonnait toute la journée et semblait la plus heureuse fiancée du monde45. »« Nous avons eu ce matin la profession de Sœur M. Bernadette qui ne sait cacher son bonheur d’être l’épouse de Jésus46. » Dans un langage plus évocateur encore, elle écrit : « Nos postulantes pour l’intérieur restent toujours dans le feu et le bon Dieu sait quand elle seront cuites47. »
15En même temps, ces rites véhiculent la charge dramatique de l’entrée vécue comme une petite mort. L’anthropologue Suzanne Campbell-Jones écrit que, jusqu’au milieu du 20e siècle, l’accent était mis sur la prise d’habit, « cérémonie dramatique où la jeune fille coupe ses cheveux, prend son nom en religion et l’habit de l’ordre48». Le jésuite G. Hoornaert, directeur spirituel d’Élisabeth De Koster, relate sa prise d’habit, le 22 octobre 1929, dans la presse catholique. Toute la cérémonie est vue sous l’angle du sacrifice : « Hier, au carmel de Jambes, un événement s’est déroulé, simple et grand. Grand, car rien n’est beau comme le sacrifice volontaire. » Sacrifice des parents, d’abord, dont il vante l’attitude stoïque : « Le père déclara : ‘Je suis fier. Quelle bénédiction pour ma famille !’ La mère, d’une pâleur qui blanchissait jusqu’à ses lèvres, dit : ’C’était ma joie ! Mais elle est à Dieu, avant d’être à moi. Et s’Il veut prendre mes autres enfants — j’en ai neuf — Il est le maître’. » Sacrifice de l’enfant ensuite : « ’Que voulez-vous ?’ ‘Le sacrifice, au carmel’ Le sacrifice ? Vous en êtes donc si assoiffée ? Et bien ! Vous allez l’avoir ! On l’a emmenée. Quand elle est revenue, elle avait la bure. […] Puis, on lui mis la corde aux reins, et dans les mains, on a déposé la petite croix de bois49. » On retrouve le même type de relation concernant l’entrée, au carmel de Floreffe, de Jane Vandersmissen en décembre 1933. Le père décrit la novice « supérieurement élégante dans cette riche robe de mariée qui représentait sa dernière parure mondaine ». Il évoque ensuite le moment poignant où elle embrasse une dernière fois sa famille et clôture l’article par l’arrêt de mort symbolique de la jeune fille : « Le temps fuyait vite et la minute est arrivée où elle devait faire le pas décisif, franchir la porte de la clôture qui la séparait du monde. Moment tragique. […] Elle a embrassé une dernière fois tous les membres de sa famille et ses amis […] Elle a disparu parmi les religieuses qui l’accueillaient comme leur sœur. La porte s’est refermée sur elle. C’était la fin. Jane était morte pour le monde50. »
2. Renoncements et nostalgies
16On trouve très peu d’évocations de renoncement de nature matérielle dans les sources conventuelles. Dans des chants biographiques humoristiques de Saint-Servais, il est par trois fois question de l’ultime bombance, du dernier gala ou d’un copieux festin avant l’entrée. De Marie-Henriette Thys, entrée à Saint-Servais en 1919, le chant rappelle : « Pour mon dernier gala Une amie me paya Selon ma fantaisie Dans une pâtisserie Un bon petit pâté Mon franc-goût, un glacé51. » Marie Famerée se fait payer un bon repas (« Des choux et de la bonne saucisse ») par son curé qui l’accompagne au couvent52. Louise Bolangier, entrée en 1925, fait, en même temps que son « ultime bombance », ses derniers pas de danse : « Notre héroïne en descendant du train, Se paya une ultime bombance, S’arrêtant dans un hôtel, en chemin, Elle y fit ses derniers tours de danse53. » Le renoncement à ses biens et ses héritages n’est qu’une seule fois évoqué, dans la notice de Rosalie Vermesche qui, le lendemain de son entrée, « alla déposer tout son pécule sur la table près de sa supérieure alors occupée : ‘tenez, voilà ma mère’, et sans attendre de réponse, retourna allègre et joyeuse à son travail54 ». Pour ce qui est de la coquetterie, le geste de Marie-Joséphine Dumont, qui se défait de son beau chapeau le jour de son entrée est resté dans la mémoire de Saint-Servais :
« Et notre héroïne arriva
Ici d’une fameuse allure
Franchit la porte de clôture
D’où au chapitre on la mena
Devant notre illustre assemblée
Son beau chapeau, elle jeta
‘Là, c’est pour les clicotes, ça !’
Nos cœurs furent gagnés d’emblée55 ! »
17On ne fait guère non plus allusion à des désirs professionnels « sacrifiés », si ce n’est pour Mélanie Petit qui avait rêvé d’être cantinière : « Trottiner, alerte et légère, Près des beaux chevaux bruns et roux, C’était son rêve de jeunesse, oyez-vous56. » Encore moins parle-t-on du sacrifice d’une relation amoureuse avec un homme, du mariage ou des enfants.
18Mais ce qui revient de façon récurrente, c’est la douleur de quitter la chaleur du foyer familial. L’entrée ne se fait qu’au prix du sacrifice « de la famille… et de tout le reste57 ». La chaleur familiale, l’affection entre parents et enfants sont largement évoquées dans les chants de jubilé de profession, soit 25 ans au moins après l’entrée :
« Entre sa maman et sa sœur
Grandit la petite Louise
Parmi ses qualités, le cœur
Vibrait d’une tendresse exquise
Cent fois le jour baisant sa mère
Disant ‘Je t’aime’, à sa manière
Son enfance coulait heureuse
Cœur d’or, bonté, humeur joyeuse aux échos lançait chaque jour les chants de son candide amour
Après Dieu, sa Mère, toujours
Fut le premier de ses amours58. »
19Gabrielle Mons « a quitté d’un pas léger les poétiques rêves qui l’ont vue naître ; elle s’est arrachée, elle, la benjamine, la choyée, aux baisers maternels, aux caresses des siens, pour se faire prisonnière59 […] ». La « petite » Mélanie Petit « Saura-t-elle immoler sa vie, Briser tant de liens si doux, Briser les cœurs et puis quitter le bon chez nous60 ? » Marie Liévens, « Au milieu de ses frères et sœurs », « goûtait le bonheur » : « Elle était belle, sa famille ! Dans sa ferme, vivant tranquille ! Et quoiqu’ils fussent tous unis, Son père était le plus chéri61. » Parfois, c’est au village tout entier que la religieuse porte un culte :
« Pour devenir pauvre clarisse
Elle élève son patelin
Sur le bûcher du sacrifice
L’immolant de sa propre main
Mais c’est si fort contre nature
Qu’avec le temps et sans erreur
On sent que le cher Nafraiture
Reste la capitale de son cœur62. »
20Qu’en est-il des religieuses qui ont contré le projet familial ? La biographe de Rosalie Vermesche, entrée malgré la volonté de ses deux tantes de la garder auprès d’elles, affirme qu’elle put « surnaturaliser » la douleur faite aux siens et que, « toute donnée dès son entrée, elle ne voulait pas de regards en arrière ». Le lendemain de son arrivée, « elle chantait sa joie jusque dans sa cellule, en rangeant ses petites affaires63 ». Esther Wedekind se réjouit de sa vocation malgré la tristesse d’avoir laissé ses parents « seuls et dans le chagrin » : « Bien des larmes ont coulé sur les manches de la roberie dont elle faisait le raccommodage. Mais des larmes de reconnaissance aussi, car elle appréciait hautement la grâce de sa vocation de contemplative, et parsemait ses journées de Laudate et de Magnificat64. » Des deux Françaises arrivées à Malonne contre la volonté de leurs parents en 1927, l’une traverse bien l’épreuve tandis que l’autre reste blessée, le confesseur proposant à la seconde de prendre modèle sur la première65.
21À Jambes, la séparation familiale reste particulièrement pénible pour Marie-Josèphe Charlier qui se demande, encore plusieurs années après, « comment elle avait pu accepter ce sacrifice ». Et « de là ses inquiétudes pendant le temps de son postulat. Entrait-elle réellement dans les desseins de Dieu66 […] ? » Quitter sa mère « mortellement atteinte » fut l’un des plus grands regrets d’Angèle Monchamps, qui la poursuivit toute sa vie conventuelle. Le chant de ses 50 ans de profession y fait encore allusion : « Quand on doit y laisser dans un mal sans pardon, Sa mère On se dit en partant qu’on ne la verra plus Sur terre Et longtemps le cœur sent l’heure qu’il vécut Amère67. »
B. Normes et réalités de la clôture
22Schématiquement, on peut dire que les règles de clôture sont là pour préserver la religieuse de deux attachements : en amont, celui qui pourrait subsister avec la famille ; en aval, celui qui pourrait se nouer avec les prêtres et les moines. Outre ces deux aspects, les règles de clôture gèrent les échanges nécessaires à la subsistance du couvent et de ses membres. Dans son article de synthèse sur la clôture des moniales des origines à nos jours, le jésuite Michel Dortel-Claudot souligne surtout, dans l’institution de la clôture, la nécessité de séparer moines et moniales : « c’est la nécessité de dresser des barrières entre les moniales et les moines qui est à l’origine de la clôture ». Jusqu’au 13e siècle, la clôture ne fait l’objet d’aucune loi générale de l’Église, elle est seulement régie par des législations et des usages particuliers. Ce n’est qu’à partir de la fin du 13e siècle que la clôture devient une institution d’Église. En 1298, Boniface VIII édite la première loi universelle de clôture. La constitution Periculosoinstitue pour les religieuses la clôture passive (aucune entrée) et active (aucune sortie) : « Toutes les moniales devront désormais demeurer dans leur monastère sous une clôture perpétuelle. […] Aucune personne […] ne peut entrer à l’intérieur du couvent. » Les clarisses d’abord, les carmélites ensuite, intégreront à leur état de vie la clôture stricte imposée par l’Église. Le concile de Trente se contente de rappeler la constitution Periculoso. C’est au 16e siècle, avec la constitution Circa pastoralis (29 mai 1566) que de nouveaux changements affectent le monde conventuel féminin en obligeant toutes les religieuses qui font des vœux solennels à adopter la clôture papale.
23Le code de droit canonique de 1917 ne modifie pas la législation en place, mais renforce certains points de discipline, notamment tout ce qui se rapporte à la clôture matérielle. Par exemple, pour les sorties, il faut désormais se référer au Saint-Siège et non plus à l’ordinaire dont les prérogatives se limitent aux entrées en clôture des médecins et des ouvriers. Il renforce le dispositif claustral en exigeant que « les moniales ne puissent être vues du dehors et qu’elles ne puissent voir à l’extérieur de la clôture ». Le 6 février 1924, la congrégation des religieux publie une Instruction sur la clôture des moniales à vœux solennels, « long texte précis où rien n’est laissé au hasard, où tout est prévu, expliqué jusque dans les plus menus détails ». Pour M. Dortel-Claudot, « ce document est le point d’aboutissement logique de toute une évolution tendant à parfaire de plus en plus la législation canonique sur la clôture ». L’instruction exige, conformément au principe de « ne pas voir ni être vues », que toutes les fenêtres donnant sur la voie publique ou sur des maisons voisines soient munies de vitres opaques ou de persiennes qui empêchent la vue d’un côté comme de l’autre. Les grilles du chœur devront être disposées de sorte à ce que les fidèles ne puissent voir les moniales. L’endroit où les moniales reçoivent la communion — aussi appelé le « communicatoire » — devra être fermé par une porte ou un rideau. Au parloir, les deux grilles doivent être distantes de 20 centimètres environ et scellées dans le mur — notons que l’institution de la double grille date du 19e siècle. Pour faire transiter les objets, un tour est fixé dans la muraille. L’auteur ajoute, non sans humour, que ce tour pourrait comporter une petite ouverture laissant voir les objets qu’on y introduit, « précaution à l’intention du visiteur facétieux tenté d’introduire par ce moyen-là dans la clôture un chat ou une armée de souris68 ».
1. La clôture matérielle et normative
24La caractéristique de l’édifice monastique est d’être un « espace fermé ». Le cloître est le lieu central qui donne son nom à l’ensemble de la construction. L’enceinte qui circonscrit le cloître est désignée sous le terme de ‘clôture’. Le lexique définit le cloître comme la « partie d’un monastère interdite aux profanes et fermée par une enceinte69 ». Par extension, le cloître désigne aussi le monastère dans son ensemble. La porterie qui en fait partie est ce lieu de transition entre l’‘enclos’ et le monde : « Les visiteurs ne pénètrent pas directement dans l’enclos. Ils doivent d’abord franchir un bâtiment à la fois matériel et symbolique : la porterie. » Ce lieu est, en principe, le seul accès à la maison religieuse et est surveillé en permanence par le portier ou la portière. Le sens symbolique de la porterie se traduit par des inscriptions, tirées des Écritures, qui identifient « la porte matérielle » à « la porte spirituelle de l’au-delà » : « Qui passe le seuil est donc censé franchir une étape de ce bas monde à celui du Ciel. Il entre dans ce que de vieux textes appellent les ‘encloîtres’, les lieux clos, réguliers, où se pratique la Règle et dont l’Église est le centre. » De fait, le centre du cloître est le chœur, où se récite journellement la prière de l’Église. Il est réservé aux membres de la communauté, séparés des fidèles par le jubé. À partir du 17e siècle, dans le but de masquer toujours plus la communauté aux yeux du public, le jubé est remplacé par la clôture de chœur70. L’espace clos des carmélites et des clarisses-colettines se situe, contrairement aux abbayes bénédictines et cisterciennes, dans la ville. L’habitat de ces communautés urbaines de taille plus petite diffère de celui des grandes abbayes rurales : les espaces, notamment les jardins et autres terrains, sont réduits ; les composantes matérielles de clôture matérielle sont renforcées du fait de l’insertion urbaine (vitres opaques, portes, grilles, voiles…) ; le plan traditionnel de l’abbaye est partiellement abandonné pour se conformer à celui des bâtisses urbaines.
a. Les grilles et les voiles de clôture
25En 1891, la fondatrice de Saint-Servais, à l’occasion de la fondation de Huy, demande au supérieur s’il faut remplacer la simple grille par deux grilles « séparées l’une de l’autre de 20 centimètres », comme il se fait de plus en plus dans les nouvelles fondations, mais il lui répond qu’elle peut conserver les usages de la maison71. Le couvent de Saint-Servais suivra le modèle de Roulers et le parloir n’est muni que d’une seule grille. Ce n’est qu’en 1953, lors de l’adoption de la clôture papale, que les clarisses de Saint-Servais feront installer une double grille : « Il nous restera […] à faire mettre une seconde grille au parloir afin d’être tout à fait en règle avec les Instructions anciennes de Rome sur les vœux solennels et la clôture papale72. » En revanche, l’institution de la double grille existe à Malonne dès les origines. En 1938, les constitutions rappellent que le parloir est une pièce divisée en deux par un mur et deux grilles de fer fixes, « si serrées et placées à une distance telle l’une de l’autre que rien ne puisse passer d’un côté à l’autre et que tout contact soit impossible entre les interlocuteurs73 ». Une clarisse de Malonne, entrée en 1950, se rappelle qu’après l’ouverture des rideaux, « on se passait la main » à travers les grilles. « On avait une sensibilité large, on ne se faisait pas un péché parce qu’on se passait la main, au contraire, l’abbesse elle-même le faisait, donc elle était la première74. »
26À Malonne, les constitutions de 1910 précisent qu’au parloir, « on ne tire jamais le rideau75 », alors que celles de 1938 permettent que le rideau soit « ouvert avec la permission de l’abbesse76 ». Une religieuse entrée en 1933 se rappelle qu’il y avait deux grilles, « une en fer, l’autre en bois », et un « rideau noir que l’on tirait pour les visites de nos père, mère, frère et sœur ». Mais, précise-t-elle, « en dehors de ce petit cercle, les rares visiteurs avaient droit de parler 1/4 d’heure devant le rideau fermé. On l’ouvrait le temps d’un Ave Maria77 ! » Le coutumier de 1944 règle avec précision l’ouverture du rideau :
« Le rideau du parloir sera ouvert : pour les entretiens des religieuses avec leurs père et mère, leurs frères et sœurs ; pour les entretiens de la R. Mère Abbesse ou de sa remplaçante avec les sœurs externes, et de toute la communauté avec les sœurs externes à certaines grandes fêtes de famille ; pour les entretiens de la mère abbesse, de sa vicaire et de la maîtresse des novices avec les prétendantes ; pour le médecin ou toute autre personne, dans le cas où il suffirait de tirer le rideau pour ne pas être obligé de les introduire dans la clôture ; au commencement et à la fin de tous les autres entretiens, pendant le temps d’un Ave Maria, pour saluer les personnes du dehors lorsqu’il y a raison de le faire78. »
27Chez les colettines, la séance de parloir se déroule toujours à rideaux fermés. Le coutumier stipule qu’il est permis « d’ôter ou soulever un peu le rideau au commencement de l’entretien », mais qu’il « faut le remettre aussitôt de manière que personne ne voie les sœurs en face pendant qu’elles parlent », et qu’à la fin de l’entretien, « elles pourront encore ôter ou soulever un peu le rideau pour faire leurs adieux79 ». La permission d’ouvrir le rideau avant la séance pour se montrer aux visiteurs aurait été introduite au moment où les autorités ecclésiastiques ont défendu aux religieuses de se rendre à la grille du chœur « pour se montrer » aux parents. C’est ainsi qu’il est autorisé « d’ouvrir un peu le drap en arrivant et en partant afin qu’on puisse se reconnaître et se saluer80 ». En 1936, pour marquer le jubilé des vingt-cinq ans de fondation, l’évêque autorise les moniales à recevoir une fois leurs parents à rideaux ouverts. La chroniqueuse épingle l’événement : Mgr Heylen « s’informe ensuite si nos familles ont pris part au jubilé ; sur la réponse négative, [Sa Révérence] nous accorde généreusement la faveur de recevoir une fois la visite de notre famille avec le rideau ouvert. Grande fut notre surprise, car personne d’entre nous n’avait exprimé ce désir ». Les chroniques mentionnent aussi le « privilège de recevoir sa famille à rideau découvert pendant une journée entière » pour les religieuses qui fêtent leur jubilé de vingt-cinq années de profession81.
28Au carmel, le dispositif de la double grille est prescrit et généralement adopté. Du côté visiteur, il y a une grille en fer avec des picots de cinq centimètres de longueur82. Une autre grille en bois est installée du côté de la moniale. Entre ces deux grilles, il doit y avoir une distance de quarante-cinq centimètres – elle est de trente centimètres à Floreffe – qui empêche tout contact avec les mains. Les témoignages montrent que les moniales savaient passer outre les consignes. Une carmélite entrée en 1933 raconte que sa mère passait la main à travers la double grille et « qu’elle répondait quand même », puis s’en allait dire à la supérieure : « J’ai donné la main à maman », laquelle lui répondait : « Vous avez bien fait ma petite ». Elle témoigne aussi que faire parloir à travers la double grille « donnait mal à la tête83 ». La moniale ouvre le rideau et parle « à découvert » avec la famille proche. Pour les autres visiteurs, les rideaux sont également ouverts, mais la carmélite se couvre le visage d’un long voile semi-transparent, appelé « voile de clôture ». La carmélite Louis de Gonzague, au 19e siècle, relève ce point des constitutions qui « commande de ne voir personne sans voile, si ce n’est le père, la mère et les frères ». Elle ajoute : « Voilà qui est bien rigoureux et bien austère, d’avoir toujours la face voilée afin de ne point voir et n’être point vues, c’est vraiment comme des pénitentes que l’on condamne pour quelque crime84. » Parmi les petites anecdotes amusantes autour des usages de la clôture, une carmélite âgée de cent ans s’amuse encore en racontant que « la mère prieure — tout en parlant aux visiteurs, elle travaillait sous son voile —, un jour, son voile lui est tombé sur les genoux, alors85… ». Une autre, entrée en 1960 à Floreffe, raconte qu’elle devait porter le grand voile lors des visites de ses amies : « Quand mes amies venaient me voir, j’avais le grand voile. Je voyais bien leur visage, mais elles ne me voyaient pas. […] J’ai eu des amies qui ne sont plus venues… Se trouver devant un sac de farine, ce n’est pas très agréable86. »
29Lorsqu’au cours des interviews, on questionne au sujet de la vie quotidienne, la première chose qui vient à l’esprit des sœurs a trait à la clôture matérielle. Une clarisse entrée à Malonne en 1925 résume les principales règles de clôture. Pour elle, ces mesures n’étaient pas contraignantes, elle avait choisi cette vie. La dureté du régime claustral vaut pour les visiteurs :
« Quand je suis entrée, il y avait encore des grilles à la chapelle. Alors, il y avait un rideau. […] Non, c’était pas dur. On savait qu’on avait quitté le monde et qu’on ne désirait pas être avec le monde. Moi j’étais contente […] Ah oui, j’étais portière aussi. Je pouvais ouvrir la porte ici, parce que la porte était fermée à clé […] Et puis il fallait parler à travers le rideau et à travers la grille. On l’avait choisi, mais pour les parents c’était difficile, mais moi j’avais choisi ça. Mais alors par là même, quelque fois, la supérieure venait voir les parents, alors elle ouvrait un petit peu le rideau et on pouvait passer sa main à travers la grille pour dire bonjour. […] Quand il y avait des ouvriers, on devait baisser son voile et il y avait une sœur désignée pour les accompagner. Et si une sœur devait les rencontrer, elle devait baisser son voile pour ne pas les voir87. »
30Une autre sœur affirme que les marques de séparation ne la gênaient pas : « je me disais que ça en faisait partie ». C’est lorsque cette séparation matérielle n’a plus fait sens qu’elle l’a remise en question : « C’est après que je me suis dit que ça n’avait plus de sens. Après. Mais au moment même, je n’en ai pas été… je n’en ai pas souffert puisque je n’en ai pas souvenir, je l’ai pris avec le reste88. » Les propos d’une carmélite entrée en 1946 vont dans le même sens : « Nous acceptions cela, ça faisait partie [du tout]. » Mais pour elle, c’est davantage le manque de compréhension de l’extérieur qui a suscité le changement : « On a supprimé la tierce, et puis les voiles aussi, parce que les gens faisaient des réflexions à ce sujet. Je me rappelle, les cousins cousines qui venaient me voir, ils me disaient « ‘oui mais, toi, tu nous vois, mais nous… ’ ‘C’est nous autres qui devrions avoir des voiles’. Ils me taquinaient avec ça89. »
b. Les sorties et les entrées
31Vivre en clôture signifie ne plus en sortir. Les textes rédigés pour les moniales sont clairs à ce sujet : « que les sœurs sachent qu’après leur profession, il ne leur sera jamais permis, pendant toute leur vie, de sortir de la clôture […] excepté pour cause de maladie, de transfert, de danger extérieur90 ». Sainte Colette rappelle l’obligation de clôture perpétuelle instituée par Innocent IV et supprime les sœurs choristes allant à l’extérieur, décrétant que « dorénavant, aucune sœur professe ne pourrait sortir de la clôture ». Elles « s’obligeront à l’observance de leur profession, c’est-à-dire, à garder leur forme de vie, et demeurer sous clôture perpétuelle, de manière que jamais il ne leur soit permis de sortir de la clôture avec le titre de servante ou sous quelque autre prétexte si ce n’est pour les motifs énoncés ci-dessus91 ». Ces causes légitimes de sortie sont les fondations de monastères et les cas de « péril de mort imminent ou d’autre mal très grave92 ». Par « grand dommage », précise-t-on dans le coutumier, « on doit entendre un grand incendie ou une inondation », des guerres, des « incursions d’hérétiques » ou des pillages93. Il peut aussi s’agir d’une moniale « qui serait atteinte, par exemple, d’une folie dangereuse ou d’une maladie contagieuse », et qu’il faudrait faire sortir pour « la sauvegarde de la communauté religieuse94 ». Le coutumier de 1892 va jusqu’à détailler le lieu et l’instant critiques où la moniale touche l’infranchissable : « On manquerait à la première obligation [celle de ne pas sortir de l’enceinte du couvent] en dépassant le seuil de la porte de clôture, de manière à ce qu’on pût fermer la porte sans nous pousser plus loin95 ». La clôture est prise très au sérieux au 19esiècle et dans la première moitié du 20e siècle, et les seules sorties sont liées aux cas de force majeure cités dans les constitutions : fondations, guerres, soins de santé, à quoi s’ajoutent, à partir de 1921, les élections civiles96.
1. Les guerres et l’exode de mai 1940
32Les quatre couvents sont relativement épargnés pendant la Première Guerre. Les carmélites de Jambes écrivent que la catastrophe de 1914 « eut son retentissement dans [leur] paisible carmel », mais que « la douce providence et la maternelle protection de [leur] mère du Ciel le préservèrent des périls imminents qu’il courut97 ». Le carmel de Floreffe accueille des soldats et des civils. Au sujet de Malonne, le curé écrit que les clarisses « n’ont point souffert de la guerre. Leur maison est intacte et les religieuses ont pu toujours continuer leur vie de communauté ». Elles manquent toutefois, comme d’autres communautés d’origine française, des ressources nécessaires à leur subsistance98. Chez les colettines de Saint-Servais, les chroniques précisent qu’aucun Allemand ne séjourna au couvent, alors « que les couvents environnants avaient de nombreux soldats à loger durant tout le temps de la guerre99 ».
33En revanche, la Seconde Guerre mondiale, et plus particulièrement l’épisode de panique de mai 1940, affectent les moniales. La plupart des carmélites de la province wallonne quitteront leur couvent, mais toutes les communautés, à l’exception de celle de Floreffe et d’une partie de celle de Corioûle, regagneront leur monastère dans les semaines qui suivent. Les carmélites françaises ne pourront rentrer en Belgique que beaucoup plus tard : « Il y a parmi elles des Françaises et on ne permet pas qu’elles reviennent en Belgique100. » Le 24 septembre de la même année, le provincial carme écrit : « Ni chez nous, ni en Flandre, aucun carme, aucune carmélite ne sont morts de la guerre. » À l’exception de tous les autres, le carmel de Floreffe n’est toujours pas rentré de France. Pour le reste, il affirme que « la vie religieuse se poursuit, en tenant compte des circonstances », et que les sœurs « sont généreuses101 ». En janvier 1941, il constate que les couvents de carmélites « n’ont eu jusqu’ici aucune difficulté avec l’autorité occupante » et qu’ils sont « parfaitement libres102 ». Finalement, dans une lettre de janvier 1946, seuls les dégâts matériels de la guerre sont relevés. Au total, trois couvents de moniales ont été endommagés : le carmel de Tournai qui a été entièrement détruit, obligeant les sœurs à s’installer dans un autre immeuble ; le carmel de Rochefort, « où la dernière offensive a causé assez bien de dégâts », mais « tout est en voie de réparation » ; le carmel de Jambes, dont la chapelle « a été complètement anéantie par une bombe incendiaire103 ».
34Le 10 mai 1940, les carmélites de Jambes, suivant le mouvement de panique général, quittent leur couvent. Elles ne vont pas plus loin que chez les ursulines de Namur et y restent jusqu’au 18 mai. Les mots qui viennent à la chroniqueuse pour décrire ce départ précipité sont ceux de « triste cortège de pauvres Carmélites quittant leur chère clôture ». Elle souligne cependant le calme et la résignation aux vouloirs divins, « tant de grands intérêts étaient en jeu104 ! » Le nécrologe conserve aussi la mémoire d’une moniale âgée qui, au moment du départ en exode « put tromper la longueur de l’attente par son régal favori : l’Écriture sainte » :
« Son psaume préféré : ‘Dominus regit me’ venait bien à point sur ses lèvres et elle le répétait avec attendrissement. Elle aurait pu dire là encore, sous la menace des obus, dans la cohue des gens affolés, ce que disaient les Juifs au sénat romain : ‘Notre consolation est dans les saints Livres qui sont entre nos mains’. Son calme, sa paix souriante, faisaient du bien à sa compagne et même à leur entourage105. »
35À Floreffe, les carmélites décident, le 12 mai 1940, de gagner la Normandie où elles espèrent trouver refuge à l’abbaye prémontrée de Mondaye ou au carmel de Lisieux : « Chacune fit son baluchon, avec les choses indispensables : bréviaire, missel, quelques linges, un peu de victuailles. » Les religieuses se dirigent vers la gare « avec la consigne de ne pas se séparer, quoi qu’il arrive106 ». Deux tourières restent sur place pour garder le monastère. Le lundi 13 mai, les carmélites apprennent qu’elles ne peuvent aller à Mondaye ; le train se dirige vers Montpellier, et les réfugiés ne peuvent quitter les wagons. La prieure, Magdeleine de Jésus (Marguerite Bovagnet) songe à une parente, Noémie des Garets, qui dirige le couvent du Sacré-Cœur de Montpellier. Le voyage se passe sans heurts ni malheurs. Les carmélites y voient la « main de Dieu qui prend un soin jaloux de ses petites épouses107 ». Elles arrivent à Montpellier le 16 mai et restent trois mois chez les religieuses du Sacré-Cœur. Le 1eraoût 1940, elles reçoivent une lettre de Floreffe qui leur annonce que la situation s’est normalisée. La communauté rentre en Belgique, hormis les trois religieuses de nationalité française, dont la prieure, qui regagnent Floreffe le 22 juillet 1943.
36Alors que la plupart des carmélites de la province wallonne prendront la fuite en mai 1940, J. Goulven nous apprend que les deux tiers des communautés de clarisses belges n’ont pas évacué108, « merveilleusement protégées », comme Gand, Bruxelles, Bruges, Saint-Trond, et une dizaine d’autres109. Parmi les trois communautés qui quittèrent leur monastère pour peu de temps et le retrouvèrent intact, on compte les carmélites du couvent de Saint-Servais. Deux autres communautés retrouvèrent leur couvent pillé et sali : Enghien et Ciney. Mais quatre couvents « connurent, avec des dégâts considérables, l’horreur d’une ou même deux évacuations ». Il s’agit des communautés d’Ostende, de Tournai, de Nieuport et de Beaumont, cette dernière n’ayant retrouvé un couvent entièrement rebâti que neuf années plus tard110.
37Le mouvement de fuite des Malonnais s’accentue à partir du 13 mai : « Ce fut la débandade générale. Les troupes alliées s’enfuyaient, ne sachant quelle direction prendre. Presque tous les Malonnais firent de même. […] Nos voisines, les Srs de Saint-Paul, les carmélites de Floreffe quittèrent leur couvent pour essayer de gagner la France. » C’est alors que l’abbesse, bien que « très indécise », demande aux sœurs de préparer leur bagage, les priant — détail amusant que la chroniqueuse ne manque pas de soulever — d’emporter leurs livres de chant grégorien : « Son amour pour le chant grégorien lui fit insister pour que, parmi les choses indispensables, chacune emportât ses deux antiphonaires, volumes au poids plus que respectable ! » Mais sur le conseil de plusieurs personnes, dont le curé, les frères de l’institut Saint-Berthuin, et Monsieur Massart qui remplaçait le bourgmestre, les moniales renoncent au départ, non sans anxiété, comme le décrivent les chroniques : « Mais le village devint désert, on n’entendait plus aucun bruit de circulation, sauf les cris des bêtes abandonnées errant à la recherche de leur nourriture. Quand notre Mère apprit que presque tous les Malonnais étaient partis, elle, pourtant si énergique, se mit à pleurer, craignant que les Allemands, dont les troupes avançaient dans la région, commissent les crimes et atrocités comme en Pologne, et relatées par les journaux111. »
38Les clarisses de Saint-Servais vivront les mêmes angoisses, elles qui, par un « acte héroïque d’obéissance », se résignent à rester en clôture sur le conseil de leur directeur spirituel :
« On prépare ses paquets pendant que Sr Claire va demander à Notre Rd Père si nous devons partir. Et on est tellement sûres d’une réponse affirmative qu’on ne songe qu’à compléter le petit bagage préparé depuis quelques mois mais notre bon Père, les larmes aux yeux, dit à Sr Claire : ‘Ou iriez-vous, mes enfants ? Il est trop tard, restez-ici !’ À cette nouvelle, les cœurs se serrent, on défait ses paquets ne voulant qu’une seule chose : obéir quoi qu’il puisse arriver. Mais c’est pour beaucoup, surtout pour Notre Mère qui voit déjà ses Filles entre les mains des barbares, l’occasion de faire un acte héroïque d’obéissance. »
39Le 12 mai, la panique monte et les moniales sont invitées à quitter leur couvent, mais elles préfèrent se soumettre à l’obéissance : « L’autorité a parlé, nous connaissons la volonté du Bon Dieu : ’restez ici’. En ce moment tragique, il nous faut faire appel à tout notre esprit de foi pour accepter cette divine volonté, car nous nous voyons déjà écrasées dans nos caves ou entre les mains des barbares qui approchent. » Finalement, les religieuses quitteront la bâtisse le 15 mai pour y retourner le 17. En cause, l’installation de mitrailleuses près du couvent pour « défendre la retraite des alliés ». C’est à nouveau l’obéissance au supérieur qui est déterminante dans ce choix :
« Que faire ? Rd Père a dit de ‘rester’. Il n’a pu venir ici depuis les derniers événements et impossible d’aller lui faire part de notre situation. […] Dans cette perplexité, notre Rde Mère fait appeler Mr l’Aumônier et, à genoux, devant lui, le supplie de lui dire la volonté de Dieu. Après avoir récité un Veni creator, Mr l’Aumônier joint les mains : ’Ma Rde Mère, je crois que nous pouvons croire maintenant que c’est la volonté de Dieu que nous partions’. »
40La communauté trouvera asile chez une communauté voisine de dominicaines qui, détail amusant, prennent ces colettines en fuite pour des parachutistes : « Mère Véronique, que l’on a placée à dessein à la porterie ces jours-ci, vient nous ouvrir et en voyant nos manteaux gris et nos paquets, se croit en face de parachutistes112 ! »
2. Les soins de santé
41C’est en principe le médecin qui se déplace jusqu’au couvent mais, dans les cas graves, la moniale doit parfois être hospitalisée. Ces départs en clinique sont extrêmement rares avant la Seconde Guerre mondiale, et méritent chaque fois une mention dans la chronique. À Malonne, on compte six sorties de clôture pour séjour en clinique au cours de la première moitié du siècle. Sans compter l’examen médical de Justine de la Mère du Bon-Conseil (Marthe Mouton) en 1943 qui provoque ce commentaire révélateur : « La chère Sœur dût donc monter en auto, chose inconnue ! n’étant plus sortie depuis 40 ans113 ! » À côté de ces rares sorties, on voit certaines sœurs refuser l’opération et la sortie de clôture, comme la mère Angèle de Saint-Jean (Clavies Damary) : « Le docteur ne dissimulait pas ses craintes, car il s’agissait d’une hernie irréductible étranglée. La pensée d’une opération répugnait à Notre Mère si vierge en toute sa personne ; on ne l’y obligea pas. Ce fut le Père Prédicateur Religieux Capucin qui lui administra l’Extrême Onction114. » Au carmel de Floreffe, les sorties pour soins de santé, dans la première moitié du 20e siècle, sont aussi commandées par des cas d’extrême urgence : on en compte quatre au total, dont trois se terminent par le décès hors du couvent. La sortie de clôture, même en cas d’urgence, pose problème aux moniales. En 1952, l’abbesse de Saint-Servais informe l’ordinaire de la sortie d’urgence d’une moniale115. « Vous avez eu raison », répond l’évêque, « d’autoriser le transfert immédiat de la sœur malade à la clinique puisque de l’avis du médecin, il y avait urgence116. »
42Après 1950, les sorties pour soins de santé se multiplient. De fait, la « technicisation » de l’outil médical oblige les sœurs à se rendre sur les lieux117. En juillet 1953, la Sacrée congrégation des religieux publie un indult qui donne « la permission de séjourner hors du monastère pour soigner [sa] santé, mais au maximum pendant un mois118 ». En avril 1957, un indult autorise les moniales à sortir « pour recevoir les soins médicaux qu’elles ne peuvent pas, de l’avis du médecin, recevoir en clôture ». Le même indult permet à la supérieure de « sortir de clôture pour visiter une moniale en danger de mort dans une clinique119 ». Dès lors, l’intervention chirurgicale n’est plus le seul mobile de sortie. À Floreffe, les chroniques font mention de visites chez les spécialistes (oculistes, orthopédiste, radiographie120). Mais ces sorties restent rares : une par an pour toute la communauté jusqu’en 1966121. Les rapports quinquennaux, établis à partir de 1954, permettent d’avoir un aperçu du nombre des sorties chez les clarisses de Malonne ; les sorties pour raison de santé arrivent en tête. En 1954, l’abbesse de Saint-Servais, pour les cinq années antérieures, écrit qu’il y a « eu quelques permissions de sortie pour des opérations reconnues nécessaires par les docteurs122 ». En 1959, pour le monastère de Malonne cette fois, on compte, outre les sorties pour les élections civiles, des sorties pour raisons de santé123. En 1964, les seules sorties mentionnées par le monastère de Malonne sont celles qui relèvent des soins de santé : « Pour raisons de santé : examens médicaux, opérations…, trois moniales ont dû séjourner en dehors de la clôture pour des cures de repos dans des maisons tenues par des religieuses124. »
3. Les fondations et les transferts
43Finalement, ce sont des raisons internes au développement de l’ordre qui entraînent la plus grande mobilité au sein d’une communauté. De fait, 20 % des religieuses sont amenées à sortir de leur couvent d’origine pour ces raisons. Pour les quatre maisons étudiées, on compte 11,6 % de fondatrices et 8,9 % de sœurs transférées dans un autre couvent125. Notons toutefois que les transferts pour motif d’entraide entre communautés se généralisent après 1950 seulement, pour se multiplier après le concile Vatican II, davantage pour des raisons personnelles cette fois. La mise en place de fédérations au sein des couvents de moniales est de fait un événement important qui modifiera le rapport à la clôture. La première réunion fédérale des clarisses tenue en novembre 1953 amène les abbesses accompagnées de la maîtresse des novices à sortir de leurs murs. Les chroniques du monastère de Huy relatent le voyage dans la ville des « illuminations féeriques des temps modernes » et l’amusement du chauffeur, « avec les exclamations de mère abbesse, qui n’avait plus revu le monde depuis 23 ans ! Quel changement126 ! » À Malonne, cela faisait vingt-quatre ans que l’abbesse et la vicaire n’étaient plus sorties127. De façon générale, cette réunion constitue un événement pour les cloîtrées, et le mode de transport pose question à ces spécialistes de l’immobilité :
« Mémorable réunion de moniales clarisses, vouées depuis tant d’années à la stricte clôture, n’ayant entre elles d’autres rapports que les relations épistolaires annuelles. […] Il fallait envisager le moyen de transport, en informer nos frères franciscains, très soucieux de leurs sœurs en cette première sortie. Il s’agissait d’atteindre le lieu de la rencontre ‘via recta’ après tant d’années de claustration. Certaines empruntèrent l’auto, d’autres l’autobus et le train128. »
44La généralisation des transferts de sœurs dans le but d’entraide entre monastères donne la possibilité aux membres de la communauté de sortir de clôture. La lettre d’une moniale de Malonne, transférée pour neuf mois au monastère des clarisses de Tournai en novembre 1955 — il s’agit du premier transfert au sein de la fédération —, révèle le caractère totalement neuf de cette expérience. Ce qu’on qualifierait de « simple relation au monde ambiant » devient extraordinaire et matière à raconter. La clarisse décrit ainsi la descente du train, avec l’aide d’un Monsieur « bien complaisant » qui, précise-t-elle, est « celui de la fin », car il y en a eu « 2 ». Elle détaille ensuite les retrouvailles avec les personnes sur le quai précisant lequel de chacun a été embrassé. Au sujet du trajet en voiture de la gare au couvent, elle écrit que le chauffeur « aurait voulu tricher et faire faire un grand détour, mais le brouillard et surtout la présence de Sr Marie-Joseph l’ont empêché ». Au moment du départ, le thème des embrassades attire à nouveau l’attention de la moniale : « Nous embrassons Élisabeth et Pascale 2 fois, une fois pour Sr Marie du Christ-Roi ; je dis à Élisabeth que Sr Marie du Christ-Roi m’avait dit qu’elle laissait à mon jugement si je devais embrasser Pol. Elle a ri de bon cœur129. »
4. Les entrées en clôture
45La « clôture passive » embrasse les règles qui gèrent les entrées dans le cloître. Le principe de la clôture passive est l’interdiction d’« introduire quiconque dans le monastère, si ce n’est les futures professes130 ». Comme pour les sorties, il y a des exceptions à la règle. Le confesseur, pour administrer les sacrements aux malades, les « médecins, chirurgiens et autres personnes dont le travail est nécessaire » — entendons, les ouvriers — ainsi que les supérieurs ecclésiastiques ou réguliers en vue de la visite canonique. L’entrée des médecins doit être limitée aux cas urgents, « pour une grande nécessité ou dans une maladie grave et mortelle131 ». Même pour ces entrées considérées comme légitimes, la supérieure est tenue de renouveler périodiquement ces « permissions d’entrée » auprès du responsable de la clôture, c’est-à-dire l’évêque132. Chez les clarisses de Malonne, l’abbesse envoie annuellement une lettre à l’évêque de Namur où elle demande l’autorisation de « l’entrée libre de Père Delattre lors de ses visites à l’Ave Maria » et de « l’entrée de médecins, confesseurs et ouvriers en cas de nécessité133 ».
46En outre, une série de précautions sont prises afin de limiter au maximum les contacts entre l’entrant et les moniales. La règle de sainte Claire demande que « les religieuses mettent alors tout leur soin pour n’être pas vues par ceux qui entrent au monastère ». Elle ajoute que « les sœurs, comme l’abbesse, ne doivent pas parler aux visiteurs (médecins, confesseurs) si ce n’est en présence de deux sœurs discrètes134». Sainte Colette rappelle ce point en exigeant qu’« aucune sœur ne pourra parler à quelqu’un du dehors si ce n’est en présence de deux sœurs des huit discrètes, qui entendent clairement ce qu’on dit135 ». La coutume s’établit de faire précéder la personne qui entre par une sœur qui marche « toujours en avant agitant une petite clochette, afin d’avertir les sœurs par ce signe, qu’elles ont à se retirer et à se garder d’être vues136 ». Pour ne pas être vues, les sœurs « doivent donc être voilées137 », c’est-à-dire, recouvrir leur visage de leur voile. Pour les clarisses, les constitutions de Sainte Colette, de même que les Déclarations du père Marchant, précisent que trois sœurs doivent être présentes au moment de l’ouverture des portes de clôture. Deux religieuses, les « portières », sont affectées au service du tour. Elles réceptionnent les objets qui transitent par le tour, accueillent les visiteurs et les ouvriers138, et surveillent la porte de clôture tout le temps de son ouverture139. Outre les deux portières, on adjoint chaque semaine une « discrète ». Pour l’ouverture des portes, la présence des deux portières est requise. Lorsque des visiteurs sonnent à la porte, les trois sœurs sont présentes : la portière pour s’entretenir avec la personne « qui voudra parler » ; les deux autres « seront présentes pour avoir les paroles140 ».
47L’entrée du confesseur ou du médecin est généralement discrète. Celle des ouvriers, surtout pour effectuer des travaux lourds comme l’installation de l’électricité, perturbe la vie communautaire. C’est pourquoi les moniales tendent à assumer la plupart des gros travaux. Seulement lorsqu’elles n’ont pas les compétences requises, elles font appel aux hommes de métier. Dans une lettre adressée au couvent de Saint-Servais, une sœur de Roulers fait part de l’arrivée d’ouvriers pour huit jours en clôture en s’exclamant : « Nous voudrions déjà que ce soit fini avant de commencer141. » À Saint-Servais, la même année, le remplacement de l’éclairage au gaz par l’électricité entraîne la venue, pendant quinze jours, d’ouvriers dans le cloître. La chronique fait part de la désorganisation que cette présence provoque :
« Pendant plus de quinze jours, nous savons ce que c’est que d’avoir des hommes dans la maison, d’autant plus que leur travail ne leur permet pas de se tenir dans la même place. On est ballotté de l’étage au rez-de-chaussée, du réfectoire à la buanderie, du chœur au chapitre etc. etc. au chœur142. »
48Une religieuse de Malonne ayant fait un séjour chez les colettines de Hannut s’étonne de la complexité des moyens mis en œuvre pour que le principe « ne pas voir ni être vues » soit respecté. À Malonne, les religieuses évitent d’approcher les ouvriers, alors que les colettines de Hannut, comme le raconte la moniale qui y a séjourné en 1958, dressent de réelles cloisons :
« Ah oui, quand j’ai été Hannut, j’ai vu des façons de faire plus ouvertes, sauf pour la clôture, là elles étaient fort conditionnées, alors que nous, on la vivait dans un esprit plus large… Quand il y avait un ouvrier… — il était marqué dans la règle ‘pas être vue ni voir’… Alors là, elles interprétaient ça au pied de la lettre, à tel point que, elles fermaient toutes les portes, et elles mettaient des paravents. Alors moi, j’arrivais là, je voyais un paravent, je disais ‘qu’est-ce qu’il fait là ce paravent ?’ J’avais jamais vu ça chez nous. Et en plus, je tirais le paravent, et je passais… Tu vois, c’était tout bête, je ne me compliquais pas la vie : un paravent, je passe. […] C’était mère Marie-François une jeune abbesse, mais elle était assez verte dans les remarques, tu vois […] : ‘m’enfin, m’enfin, qu’est-ce que vous pensez ? Et il y a l’ouvrier là-bas, vous avez manqué à la clôture’ […] Ou alors, pas un paravent, mais si un ouvrier travaillait dans les caves, on fermait toutes les portes, ce qui fait qu’on était paralysées dans le travail, on devait conditionner tout son travail parce que le plombier était… […] On devenait folles143. »
49C’est ainsi que les religieuses de Malonne s’émeuvent lors du décès de leur « homme à tout faire depuis si longtemps » et qui « faisait tellement partie du paysage144 ». Cette relation uniquement visuelle avait marqué les religieuses. À Floreffe, les visiteurs qui pénètrent la clôture sont précédés par la tierce qui actionne une clochette : « Ce qui était vraiment drôle et qui finalement me faisait rire, c’était qu’on devait se cacher. Pour les ouvriers, il ne fallait surtout pas se montrer. Mais on voyait les sœurs plus âgées qui regardaient quand même les ouvriers sous leur voile145. »
5. Sensibilité des encloses
50La modification de la sensibilité que provoque la clôture n’a pas été investiguée comme telle, bien qu’on puisse dire que, puisqu’elle imprègne toute la vie des cloîtrées, elle se retrouve à tous les niveaux de cette étude. Nous n’avons qu’un seul témoignage explicite de cette transformation de la sensibilité, mais qui vient d’une clarisse de Bruxelles. L’intérêt de celui-ci nous engage toutefois à l’exploiter. La clarisse souligne à quel point la vie de silence aiguise l’acuité auditive et visuelle. Elle se rappelle avoir eu envie de pleurer lorsque, pour la première fois depuis son entrée au cloître, elle avait entendu de la « musique » :
« Quand même un exemple, j’étais postulante et il y avait la fête de mère abbesse, c’était un moment dans l’année, on choisissait deux trois jours. Avec des petits cadeaux etc. Et puis, on faisait toute une fête, des petites pièces. Et ce jour-là, on mettait une boîte à musique, parce qu’on n’avait absolument rien, on n’avait pas de radio, pas de TV, on n’avait rien. Et je l’ai toujours cette boîte à musique et je la mets toujours quand on a la fête de mère abbesse, de la communauté. Et on mettait ça en route, avec quatre airs différents, quatre airs d’opéra. Je me rappelle que j’avais envie de pleurer, parce que c’était la première fois depuis que j’étais là que j’entendais quelque chose qui était de la musique. »
51Toutefois, elle précise que le couvent, situé dans le quartier des Marolles à Bruxelles, n’était pas complètement coupé des bruits de la ville. Elle se rappelle des foires qui faisaient résonner les chants populaires jusqu’au sein du couvent :
« Oui parce que quand je dis qu’on n’entendait pas les bruits du dehors… On habitait les Marolles, alors rue Blaes et rue Haute, il y avait ce qu’on appelait la… une chose de quartier comme ça, c’était pas vraiment une foire, la fête du quartier, alors c’était vraiment, et c’était de la musique, de la fanfare, c’était une fois par an et ça durait une semaine, et surtout qu’on devait se lever la nuit, jusqu’aux petites heures, alors là, on ne pouvait pas dire qu’on n’entendait pas les bruits de la rue… alors ça semblait un peu drôle, un peu amusant. Surtout qu’il y avait une fameuse fanfare, mais pas très douée, et tout ce qu’elle jouait c’était ‘Auprès de ma blonde’, alors on connaissait déjà la chanson. C’était plutôt comique, mais ça nous empêchait de dormir. Mais quand c’était la semaine de la Passion, il y avait sur la place du jeu de balles, un jeu de marionnettes, du Toone, et ils jouaient la Passion avec ses marionnettes, et alors il donnait tous des airs brusselaires et des chansons à boire comme refrain… et ça on entendait de chez nous. Toutes sortes de chansonnettes populaires, c’était une fête… c’était un milieu sympathique ce quartier des Marolles. »
52Un autre souvenir est lié à la vue, lorsque, pour les nettoyages, elle montait au clocher et qu’elle voyait « tout d’un coup » la rue Blaes : « Ça me faisait un coup, je voyais des gens d’en haut dans une rue normale qui marchaient… c’était un peu bouleversant, tellement on était vraiment fort coupées. Et puis les murs étaient d’une hauteur telle… »
53Selon elle, le dispositif de clôture à l’époque contemporaine est plus radical qu’à l’époque moderne. Pour étayer son propos, elle cite Thérèse d’Avila qui se réjouissait qu’un de ses monastères ait la vue sur le port, et fait état du couvent de sainte Claire où la vue n’était pas obstruée :
« Je ne sais pas, en tous cas, une chose que nous disions toujours pour nous défendre un petit peu, parce qu’on ne pouvait pas être vues ni rien voir, c’était Thérèse d’Avila. Elle écrivait à un de ses monastères, et elle disait : ‘oh comme vous avez de la chance d’avoir vue sur le port, profitez-en bien’. Eh, bon, donc, pour elle, ça ne faisait pas de problème qu’elles aient vue sur le port. Quand on voit sainte Claire, elle avait une grille, oui, mais elle avait son petit jardinet et quand même, de ce jardinet, on avait quand même une vue… Disons que sainte Colette a certainement resserré la clôture. »
54L’ensemble du dispositif de clôture créait par moment une impression d’étouffement. Une des abbesses avait confié que la clôture, telle qu’elle était vécue, « était certainement ce qu’il y avait de plus dur ». Elle racontait qu’elle faisait le tour du monastère en se disant « voilà, maintenant, c’est ici, et ça, c’est ta prison ». La clarisse bruxelloise évoque le sentiment de claustrophobie que pouvait provoquer le verrouillage des portes et les hauts murs :
« Et parfois, on se disait, mais si je voulais m’enfuir, je ne pourrais même pas sortir, tellement les murs sont hauts. Donc ça prouve que ça venait quand même parfois à l’esprit : ’comment en sortir ?’. Bien que, il y aurait eu moyen. Mais on ne savait pas sortir soi-même. Et on ne savait pas ouvrir une porte, la porte de clôture était à deux clés et chaque sœur tenait une clé, donc il n’y avait pas moyen de sortir sans faire bouger tout un dispositif146. »
55Une carmélite entrée en 1933 témoigne de la blessure infligée par cette clôture de contrôle permanente : « Cette clôture… C’est beau le retrait du monde… […] Mais ces murs, ces grilles qui nous empêchaient de nous ouvrir un peu. On était enfermées. […] Un contact plus facile, plus libre nous aurait permis de confier certaines difficultés. On n’a pas pu le faire. Cette clôture matérielle stricte à ce point fait du mal147. »
c. Les tourières
56Pour Marie-Pascale Gounon qui étudie les clarisses, les tourières — d’abord des veuves sans charge de famille qui prendront le nom de donates, converses et enfin tourières au fur et à mesure que ce statut s’institutionnalise — ont pour mission principale de quêter pour subvenir aux nécessités des sœurs cloîtrées148. C’est le durcissement des lois de clôture qui entraîne la formation d’un groupe à statut spécifique, distinct des cloîtrées. Les constitutions des clarisses de Malonne rappellent qu’au départ, c’étaient les religieuses elles-mêmes qui servaient hors du monastère. Clarisses « à part entière », elles faisaient tous les vœux excepté celui de clôture149. Les normes ecclésiastiques sur la clôture interdisent cette pratique. De même, sainte Colette supprime les sorties des sœurs et instaure les tourières vivant séparées de la communauté. Celles-ci suivent la règle du tiers ordre, et ne peuvent entrer en clôture. Leur rôle, tel que le décrivent les statuts, est l’hospitalité envers les étrangers « surtout les ecclésiastiques et les religieux ainsi qu’envers les parents des religieuses » et les quêtes, qu’elles entreprennent toujours à deux150. Les aumônes en nature répondant bien mieux à l’idéal de l’ordre franciscain, explique J.Ancelet-Hustache, les tourières partent quêter avec une petite charrette151. Par pauvreté, les usages leur recommandent de voyager à pied ou de prendre « les moyens de transport les moins coûteux ». Elles ne peuvent loger en ville, mais bien à la campagne, et partout, dans des couvents et chez les prêtres152. La séparation entre les tourières et les cloîtrées est drastique, ce qui fait dire à J. Ancelet-Hustache, que dans les monastères où ces normes sont bien appliquées, « certaines tourières n’ont jamais aperçu le visage de leurs sœurs153 ». Certaines « coutumes immémoriales » sont toutefois conservées afin de préserver le lien entre les tourières et la communauté comme à Saint-Servais où, une fois par an, pendant une journée entière, les tourières entrent en clôture154. À Malonne, les tourières sont autorisées à entrer en clôture deux fois par an, pour la fête de l’abbesse155 ; en 1952, on passe à trois fois par an156.
57La situation est différente chez les carmélites qui vivent de leur travail, à quoi s’ajoutent, en proportions variables, les dots et les pensions des moniales. Dès lors, les carmels ne disposent généralement pas d’une communauté de tourières aussi nombreuse et organisée que chez les clarisses. Une carmélite entrée en 1946 à Jambes affirme qu’il n’y a jamais eu de sœurs tourières au couvent, et que l’accueil était pris en charge par des personnes laïques : « C’étaient des personnes laïques, […] jamais nous n’avons eu de sœurs tourières157. » Ce témoignage n’est pas exact, les sources laissant les traces du passage de tourières ou de femmes laïques chargées de l’accueil et des courses. Il révèle toutefois que cette institution est de moindre importance que dans les couvents de clarisses où toute la vie matérielle repose sur les tourières. En revanche, le carmel de Floreffe est réputé pour avoir le tour le mieux organisé de la province carmélitaine du Brabant. Sept tourières ont vécu à Floreffe, huit à Saint-Servais et dix à Malonne. Une rencontre personnelle avec certaines d’entre elles nous permettra de mieux nous figurer leur rôle au sein de l’institution conventuelle.
58D’une tourière entrée à Roulers en 1903 et venue fonder Saint-Servais en 1911, la notice rappelle qu’elle s’était dépensée sans mesure, surtout pendant la guerre 1914-1918 où « elle a fait preuve d’un dévouement sans borne, ne reculant devant aucune fatigue, aucun rebut pour procurer à la petite communauté encore inconnue dans la contrée, le supplément nécessaire à un trop maigre rationnement ». Malgré son angine de poitrine et les recommandations du docteur, sœur Françoise (Marie-Marguerite Van Nieuwenhuyse) « continuait de se fatiguer pour ses consœurs158 ». Sa compagne, sœur Colette (Caroline Aerts), entrée à Roulers en 1896 et également venue à la fondation de Saint-Servais, décède subitement, « usée jusqu’à la corde après un long labeur de 50 années de vie religieuse159 ». Un chant consacré à sœur Antoine (Marie-Sylvie Verholle), tourière depuis la fondation jusqu’en 1925 où elle est envoyée à La Louvière, dépeint une femme « forte et bien plantée, rondelette et bien potelée », qui se donne « sans compter, pleine de générosité ». Alerte, courageuse, « Son zèle toujours l’emportait, Vers de nouvelles épopées, Et de plus lointaines tournées ». Elle « roule partout » et « Célèbre est son nom dans la ville » :
« Des amis, elle en a en pile…
En voyage quand ils s’en vont
Des cartes ils adressent à son nom
De bien des pays de la terre
De la Suisse et de l’Angleterre160. »
59La communauté de Saint-Servais retient surtout le nom de la tourière sœur Marie (Yolande Brédif de Réverdy), qui passe pour être une sainte. Le jour de son enterrement, en août 1942, les « 50 à 60 de ces pauvres à qui elle avait distribué chaque semaine une ration de pommes de terre, étaient là pour voir passer l’humble cortège qui conduisait l’humble petite sœur à sa dernière demeure terrestre ». La chapelle est comble et de nombreuses personnes demandent les reliques « de celle qu’elles considèrent comme une vraie sainte161 ».
60Dans les années 1940, le couvent de Saint-Servais enregistre le décès de trois tourières. Après le décès de sœur Colette en 1947, il ne reste qu’une seule tourière. Une choriste, sœur Marie-Françoise du Précieux Sang de Jésus (Louise Famerée), est transférée au tour externe162. Toutefois, « de quête, il n’est plus question163 ! » En 1953, dans le rapport de la visite canonique, le visiteur écrit que « les deux sœurs externes ne peuvent presque plus sortir pour mendier », mais que « la Providence ne fait pas défaut à la communauté164 ».
61L’importante communauté du tour de Malonne se partage le travail de quête et d’accueil. À partir de 1932, la sœur majeure165, terme qui désigne la supérieure des tourières, est sœur Agnès de l’Annonciation (Fernande Deront), dotée d’une forte personnalité166. Elle a toujours été la portière du monastère167. Deux sœurs, Eugénie de Saint-François (Julia Rucquoy) et Marie-Angélina (Germaine Dhellemme), étaient « dehors la plupart du temps, souvent toute une semaine » pour les quêtes. La notice de Marie-Angélina, entrée en 1909, relève « son accueil souriant accompagnant son beau regard paisible168 ». Sœur Eugénie, à Malonne depuis 1912 jusqu’à son décès en 1969, laisse le souvenir d’une femme particulièrement apte au contact. Sa formation terminée, elle commence la « carrière de sœur quêteuse pour laquelle elle semblait faite ! » Sensible, elle « savait trouver les mots de réconfort et d’encouragement surnaturels auprès des personnes éprouvées qui lui confiaient leurs peines ». Sa façon de demander l’aumône, « en des termes si humbles et si polis », fait qu’elle n’essuyait pratiquement jamais de refus. Lorsqu’elle revenait, chargée du poids de dons et d’intentions de prières, elle disait avec insistance à l’abbesse : « Surtout, priez, priez beaucoup pour tous ces gens qui se privent peut-être pour nous aider, ils comptent sur nos prières. » Connue de tous dans le village, elle s’exclamait : « Les gens de Malonne, c’est ma famille169. » Une autre, Thérèse de l’Immaculée-Conception (Maria Servotte), « s’occupait de la cuisine — la leur — et de celle de nos visiteurs ». Elle passait pour un cuistot formidable : « Oh là là, elle faisait des petits plats ! Et c’était pour l’accueil170. » Une autre sœur se remémorant la « Thérèse du tour », pointe immédiatement son talent de cuisinière : « Quand elle recevait les familles, c’était des dîners de première communion ; comme on dit. Elle avait de la joie, et elle faisait des bonnes choses. Et point de vue finance, il lui fallait ça et pas autre chose. Tandis que nous [la communauté], on avait un souci d’économie171. » Sa notice nécrologique rappelle encore son service des hôtes « qu’elle savait gâter grâce à ses précieux talents culinaires172 ». Une quatrième, Marie-Françoise de l’Enfant-Jésus (Marie Bal), s’occupait de l’entretien et des nettoyages, aidée par la cuisinière qui cultivait le jardin du tour. C’est un handicap à la hanche qui l’oblige à interrompre les quêtes « trop fatigantes173 174». Elle reste toutefois très présente au niveau de la vie locale. Un chant la dépeint comme étroitement mêlée aux habitants de Malonne et à leurs vies :
« Mais, bien vite elle fut connue
Dans tout le village,
On disait ‘Avez-vous vu
Ce riant visage ?
Elle n’est sûrement pas d’Namur
Elle a… bien trop vive allure’… […]
Dans ses tournées d’commissions,
Bien des confidences
Excitent sa compassion
Prouvent la confiance.
’N’vous tracassez pas, surtout
J’ferai une bonne prière pour vous’[…]
En deux temps et trois mouvements
Elle fait visite
Aux malades et aux souffrants
Partout, on l’invite
Car sa parole enjouée
Sait si bien réconforter[…]
Elle a même raccommodé
quelques bons ménages
dont le ciel était brouillé
par de gros nuages
Et ses judicieux conseils
Ramenèrent la lune de Miel […] »
62Bernadette de l’Immaculée-Conception (Léona Delferiere), dernière tourière entrée en 1934, est chargée des travaux lourds : « Durant de longues années, elle assura dans la partie extérieure de notre couvent les travaux les plus durs et les plus fatigants, dans un total oubli d’elle-même et avec un inaltérable sourire. » Au décès de Marie-Angélina en 1961, elle accompagne sœur Eugénie dans les quêtes175. En 1968, un accident grave « la fit entrer en clôture, par ordre exprès du médecin, réalisant ainsi son rêve176 ». Elle avait, de fait, demandé la vie en clôture, mais les supérieurs l’avaient orientée vers celle du tour. À partir des années 1960, les tourières ont du mal à maintenir la vie au tour : « Les sœurs externes ne peuvent suffire à tout, étant donné leur âge : une a plus de 70 ans, une autre en est toute proche, deux autres, d’un certain âge déjà, sont souvent en route177… » Mais l’ouverture de la maison d’accueil avec la participation des moniales cloîtrées permet de faire la transition entre l’ancien et le nouveau type d’accueil.
63Au regard de ces portraits, on peut dire que la figure de la tourière contraste avec celle de la cloîtrée. La tourière est connue de tous, elle voyage, accueille, gâte, parle, chérit les hôtes ; elle donne et elle reçoit. Un témoignage met le doigt sur ce rôle presque « compensatoire » des tourières pour une communauté cloîtrée. L’inter-viewée, entrée à Malonne en 1950, explique que les enfants « aimaient mieux les sœurs externes, tout compte fait » et que les parents, logeant au couvent le soir, « faisaient soirée avec les sœurs externes ». Pour la cloîtrée, savoir que les parents étaient bien reçus « mettait un peu de baume ». Et puis, poursuit-elle, « les petites questions curieuses qu’ils n’osaient pas poser [au parloir], ils les posaient aux sœurs externes178 ».
2. Les rapports avec la famille
64Les manuels normatifs insistent particulièrement, en ce qui concerne les relations avec l’extérieur, sur le détachement envers les parents. Dans le coutumier en usage à Saint-Servais, il est écrit qu’il faut « étouffer même cette affection déréglée pour les parents qui est un des grands obstacles aux communications de la grâce ». L’« abnégation » pour les parents permet d’élever l’attachement naturel « à la hauteur d’un amour surnaturel ». La nouvelle famille est entièrement spirituelle : car, rappellent les usages, « nous avons choisi Jésus-Christ pour nous tenir lieu de père, de mère, de frère et de sœur179 ». Thérèse d’Avila, dans l’ouvrage de référence qu’est Le chemin de la perfection, est catégorique quant à la nuisance de l’attachement familial. « Oh ! si nous, religieuses, comprenions combien il nous est nuisible de beaucoup fréquenter nos parents, comme nous les fuirions ! », écrit-elle. Plus loin, elle reprend :
« Je suis effrayée du mal que fait la fréquentation des parents, il faut en avoir l’expérience pour y croire. Et comme cette perfection semble oubliée dans les Ordres religieux aujourd’hui ! Je ne sais ce que nous abandonnons du monde, nous qui disons tout quitter pour Dieu, si nous ne nous écartons pas de l’essentiel, qui sont les parents. »
65Elle affirme que dans ses peines, ce sont ses parents qui l’ont le moins aidée. Et enfin, que si « quitter le pays » peut aider au détachement, il importe que la fuite soit davantage une fuite de l’esprit que du corps180. Malgré ces recommandations, les sources traduisent l’importance persistante de la famille dans la vie sentimentale des moniales.
a. Le parloir
66La coutume, chez les clarisses, est d’accorder à la famille quatre visites par an qui ne dépassent pas trois quarts d’heure. « Pour cela, on priera la famille de venir ensemble autant que possible » précise le coutumier utilisé à Saint-Servais181. Le coutumier rédigé en 1944 pour les clarisses de Malonne témoigne de plus de largesse : « Les entretiens ne dépasseront pas : une demi-heure avec les étrangers ; une heure par mois avec les parents182. » Au carmel, les professes peuvent recevoir leur famille une fois par mois, pendant deux heures, à l’exception du temps de l’Avent et du carême, et pendant les jours fériés. Contrairement aux clarisses, les parloirs peuvent avoir lieu le dimanche183. Si les temps de parloirs sont plus nombreux, cette séance comporte une contrainte qui n’apparaît pas chez les clarisses : les carmélites ne peuvent rester oisives pendant ce temps de conversation et doivent s’occuper à un ouvrage de couture. Les nombreuses prescriptions qui entourent le parloir, terme qui désigne autant le lieu que la rencontre avec les visiteurs, montrent qu’il s’agit d’un point sensible de la vie conventuelle. Le parloir, lieu de rencontre, est aussi le lieu où les signes de la clôture matérielle sont les plus apparents : mur de séparation, doubles grilles, rideaux et châssis, voiles de clôture, système de la « tierce ».
67La règle de sainte Claire exige la présence de deux sœurs « qui entendent ce qui s’y dira ». La portière qui reçoit les visiteurs doit toujours passer par la supérieure pour demander la permission avant d’aller avertir la sœur. Ainsi, les constitutions précisent que « l’abbesse donne sa permission ou pas, sans que la sœur n’en soit avertie ». Les textes normatifs engagent la moniale qui va au parloir à ne pas faire de longs discours, à éviter « les choses du monde » : « Que les sœurs communiquant avec les séculiers les entretiennent de choses pieuses, de Dieu et de la vertu, et qu’elles se gardent d’interroger sur ce qui se passe dans le monde. » Il leur est recommandé de ne pas trop parler et « d’apporter toujours dans leurs paroles et dans leurs gestes, la modestie et la gravité qui conviennent aux vierges consacrées à Dieu et que les séculiers eux-mêmes s’attendent à trouver dans les moniales ». De même, elles « garderont un profond secret sur tout ce qui regarde la communauté ou les moniales, même sur ce qui leur paraîtrait indifférent, à moins que ce ne soit des choses édifiantes184 ». Enfin, en revenant du parloir, « elles ne s’occuperont plus […] de ce qu’elles y auront entendu et feront surtout attention de ne jamais en parler dans le monastère185 ».
68Si les constitutions des clarisses exigent la présence de deux tierces au parloir, les témoignages de sœurs entrées à Malonne à partir de 1925 n’en mentionnent jamais qu’une seule. Ils minimisent aussi l’impact de cette tierce, qu’elle soit âgée, sourde ou bienveillante. Lorsque les sœurs se disent gênées par cette présence, c’est toujours vis-à-vis des visiteurs. Une clarisse entrée en 1933 à Malonne écrit :
« Il y avait une sœur écoutante qui se tenait derrière le tour, ce procédé gênait les parents, mais je les rassurais en disant qu’elle était sourde, ce qui était vrai. Ce fut un événement quand on la supprima et mon frère a averti les parents qui nous suivaient : ‘Il n’y a plus d’écoutante, car on n’entend plus tomber les ciseaux’. Car notre sœur Marie-Céline cousait toujours186. »
69En revanche, certaines carmélites de Floreffe se disent très gênées par l’usage de la tierce. La mère Marie-Cécile de Jésus (Madeleine Michel) reconnaît que la tierce la faisait « beaucoup souffrir » : « Cette pratique m’a beaucoup coûté, mais surtout pour les parents. Mon père, quand il arrivait, disait : ‘Tierce, quarte ?’ […] C’était inhumain à mon avis. Quand j’étais tierce, je me sauvais. J’allais dire à la mère prieure — parce qu’on prenait son travail, on était cachée — : ‘Ma mère, j’ai oublié mon dé […], et je causais un peu avec la mère prieure187’. »
70Ce sont surtout les religieuses entrées après les années 1950 qui sont perturbées par la tierce. Une carmélite entrée à Floreffe en 1960 raconte que lorsque la tierce était la maîtresse des novices, « c’était plus facile », mais qu’un jour, elle a eu « quelqu’un d’autre », et que là, elle était « vraiment coincée188 ». Une autre se sentait tellement menacée par cet usage qu’elle en pleurait :
« La tierce personne, c’est quelque chose que j’ai très difficilement accepté. J’ai pleuré pour ne pas aller au parloir. On ne pouvait rien se dire. […] J’éprouvais un manque de confiance. C’était artificiel, le parloir. […] Si la sœur avait été à côté de moi, ce n’était pas le même effet. […] Parce qu’elle avait l’air d’être une surveillante189. »
71En 1966, la tierce est supprimée dans la communauté de Floreffe, à la joie d’une jeune religieuse qui écrit :
« Nous nous réjouissons de la suppression de la tierce. […] Au nom du respect de la personne, on ne pouvait plus imposer ce contrôle humiliant aux religieuses, ni surtout à leurs familles, ni aux autres visiteurs. Aucun n’admettait cette sorte d’intrusion dans sa vie intime et tous en souffraient beaucoup. D’autant plus que les visites sont rares190. »
72Une clarisse originaire de France et entrée à Malonne en 1933 se rappelle qu’elle avait deux parloirs par an. En principe, pour les visiteurs venant de loin, les quatre parloirs d’une demi-heure se transformaient en une journée de parloir complète annuelle. Mais les parents de cette clarisse avaient obtenu d’avoir deux demi-journées sur l’an : « Mes parents avaient supplié comme ils n’avaient que moi comme fille. » Toutefois, elle se rappelle de la frustration de ceux-ci qui devaient subir une longue attente entre leur annonce au parloir et l’arrivée de leur fille. En cause : la nécessité de se plier à l’usage de demander la permission de parloir à l’abbesse, puis ensuite d’aller chercher la portière pour l’ouverture des portes. La religieuse s’étonne encore aujourd’hui de ce que l’abbesse n’avait pas le souci de rester disponible à ce moment afin d’écourter ce processus d’usage. Entendons-la :
« Et, la supérieure était très bonne, mais elle n’avait pas eu de vie de famille — sa mère était morte très jeune — et elle était en pension. […] Et par là-même […], elle ne saisissait pas certaines choses. Par exemple, […], nous avions parloir à neuf heures, donc, il fallait aller demander la permission, mais à ce moment-là — est-ce qu’elle le faisait exprès, je ne sais pas —, elle était toujours dans le jardin très loin pour dire son office, l’office de la Sainte-Vierge. […] Donc, pour avoir la permission, il fallait courir là-bas au loin. […] Et, pendant cela, mes parents attendaient. Et puis, il y avait aussi… demander des portières. Elles étaient deux portières. La portière pour la porte, qui était toujours fermée à clé, elle n’était pas toujours à la porterie. […] Parfois maman disait : ’Il y a dix minutes qu’on est ici, qu’on attend, et qu’on a si peu de parloir’. Vous voyez, la supérieure ne comprenait pas. […] Une autre, je crois qu’elle serait restée dans son bureau à attendre191… »
73Une autre clarisse de Malonne venue de France et entrée en 1950 précise qu’elle recevait la visite de sa nombreuse parenté une fois par an. Elle évoque davantage que sa consœur les effets paralysants de la clôture, mais à nouveau, plus pour la famille :
« On était contente de les voir, ils étaient contents de nous voir, mais il y avait une souffrance des deux côtés. […] Mais en fait, on sentait que pour eux, qu’est-ce qu’ils avaient, ils nous voyaient, oui, et ‘ça va ?’, ils nous racontaient les petites nouvelles etc. mais les vrais problèmes qui peuvent exister […] Ah, on était toujours contente de recevoir la famille. Je dis bien, c’était plus une souffrance pour eux192. »
74Elle ne se sentait pas menacée par la tierce car elle la sentait « discrète, comme ne voulant pas du tout intervenir ni même faire une réflexion après ». Toutefois, elle confie qu’elle se gardait de parler de « tout ce qui était difficile », car, dit-elle, « je ne voulais pas qu’ils partent avec une image où c’était difficile, ni même que je craquais un peu. Non, je surveillais bien mon petit ‘je’. Tout allait bien Madame la Marquise ». La religieuse entend par là qu’elle se gardait bien de se plaindre des aspects difficiles de sa vie. Pour elle comme pour la majorité, le parloir est l’occasion de demander « plutôt des nouvelles » de la famille193.
75À Floreffe, une religieuse entrée en 1960 se rappelle qu’il avait été prescrit de ne pas parler « des choses secrètes de la maison » au parloir : « On disait qu’il ne fallait pas parler de choses de communauté, par exemple, les élections. On ne parlait guère de la nourriture, ni du vêtement. Tout ce qui était vie privée, on n’en parlait pas. […] On parlait plutôt de la famille, de choses fort extérieures au carmel. » Finalement, en dépit des usages contraignants de la clôture, la visite des parents « faisait du bien » : « Ça faisait une aération, surtout au temps où nous avions peu de nouvelles. Avoir des nouvelles de la famille, c’était une joie, malgré l’austérité du parloir194. »
b. La correspondance
76La correspondance est gérée selon le principe général qu’il n’y a jamais de contact direct entre la moniale et l’extérieur. « Tout, ce qui est reçu dans l’enceinte, comme ce qui en sort, doit transiter par la supérieure » stipule la règle de sainte Claire. Ainsi, l’abbesse doit prendre connaissance de tout le courrier entrant comme sortant. « Quand quelqu’un enverra quelque lettre à une sœur, l’abbesse l’ouvrira et prendra connaissance de tout ce qu’il y a aura d’écrit et de contenu dans cette lettre avant qu’on puisse la donner à la sœur », lit-on dans les Déclarations du père Marchant195. Sainte Colette pousse le système à son extrême en exigeant que les lettres de l’abbesse soit aussi lues par une tierce : « Qu’aucune abbesse ne lise la lettre qui lui est adressée, ni n’envoie hors du couvent celle qu’elle a écrite ou fait écrire, avant que cette lettre n’ait été présentée à une des sœurs discrètes assignée à cet effet par les autres discrètes196. » Il est toutefois une exception à cette censure générale : les lettres reçues et envoyées aux supérieurs, réguliers ou ecclésiastiques, sont exemptes de contrôle. Comme pour le parloir, le temps de l’Avent et du carême sont impropres à la correspondance. Les recommandations quant au contenu des lettres ressemblent à celles qui orientent la séance du parloir. Les religieuses ne doivent écrire que dans « le but unique d’édification et d’apostolat197 », le plus rarement possible, et uniquement à leurs parents198.
77Le coutumier de Malonne précise que « celles qui, dans le courant de l’année, ne reçoivent pas la visite de leurs parents, pourront écrire six fois par an ; les autres, quatre fois ; à leurs frères et sœurs, deux fois ; aux oncles et tantes, une fois par an ». Il ajoute que les sœurs qui ont perdu leurs père et mère pourront écrire « six ou quatre fois par an, à l’un ou l’autre de leurs frères et sœurs199 ». Il est rare que les religieuses conservent des amis et amies :
« Alors les amis, c’était fini. Écrire, si, c’était quatre jours par an qu’on écrivait aux parents, on limitait le courrier. Et les amis, je crois que je leur ai dit que je n’écrirai plus, je ne sais pas comment j’ai fait, mais… on a laissé venir le premier… et puis est-ce qu’on répondait ? oui… mais voilà, ça faisait un peu partie du plan total, tu vois ? […] Au noviciat, on demande quand même de mettre une certaine distance, parce qu’aussi non, on n’y arrivera jamais… Pour qu’ils ne soient pas trop envahissants200. »
78À Floreffe, les Usages réguliers tendent à limiter la correspondance autant que possible afin de « mieux conserver le recueillement et vivre dans l’oubli du monde201 ». Une moniale entrée en 1946 se rappelle qu’« ici, on était plutôt strict en matière d’écriture202 ». Il ne fallait pas « écrire trop » : « on répondait. À la nouvelle année, on laissait libre, mais il ne fallait pas abuser ». Le courrier qui transite est contrôlé par la prieure, ce dont se rappelle une moniale qui témoigne : « La lecture par la prieure, c’était pénible. […] On recevait tout son courrier ouvert. […] Certaines nouvelles étaient déjà sues par les sœurs avant moi. Alors, ça faisait mal. » Elle se rappelle que sa famille recevait de lettres « avec des ajouts de la mère prieure qui corrigeait » ce qu’elle disait203. Les moniales sont surtout embarrassées envers leurs correspondants : « Les lettres ouvertes, c’était quelque chose. […] Pas mes lettres, mais celles qu’on nous écrivait204… »
79Malgré ces limites réglementaires apportées à la communication écrite, on verra que, chez les carmélites tout particulièrement, la correspondance conserve une place de choix dans la vie affective des moniales. Dans les années 1930, les sœurs Aline et Céline Germain, toutes deux entrées au carmel de Floreffe (en 1917 et en 1918) et transférées en mai 1933 au carmel de Ciney pour la première et au carmel de Jambes pour la seconde, échangent une correspondance qui traduit, sur le vif, leurs préoccupations, leurs intérêts et leurs sentiments205. Nous n’avons disposé que des lettres de l’aînée, Aline (Marie de Saint-Joseph), envoyées à sa sœur Céline (Marguerite du Sacré-Cœur) et conservées au carmel de Jambes. Cette collection d’une vingtaine de lettres révèle à chaud l’intérêt des moniales pour leur famille : près du quart du contenu de ces missives qui s’étalent sur une période allant de 1933 à 1960 ont trait à la famille « terrestre ». Les moniales prennent part à tous les événements familiaux : deuils, maladies, mariages, études. Elles s’alarment lorsqu’elles restent longtemps sans nouvelle de leurs proches. La correspondante de Ciney s’inquiète :
« Je suis sans nouvelles d’Angèle et du résultat de la proposition faite à Léa. J’ai écrit à la maison mais sans faire semblant que j’étais au courant. Où les choses en sont-elles ? Il y a du pour et du contre. Je prie le Bon Dieu d’arranger les choses pour le plus grand bien de cette chère sœur dont l’avenir me préoccupe. Le jour de N.D. du M.C. j’ai eu la visite de Charles, Maria et les enfants Léa et Émilie. Ils étaient tous bien portants, Maria avait une mine excellente206. […] »
80En 1934, regrettant avoir eu si peu de visite, elle constate son attachement encore « trop naturel » à sa famille : « Parlons un peu des chers nôtres. J’ai eu tellement peu de visites et de lettres depuis un an que je disais souvent à notre si bonne Mère : ‘mais ils doivent être tous morts’. Je les aimais encore trop humainement sans doute, enfin, on offre cela pour eux voilà tout207 !! » Dans une autre lettre, elle réconforte sa sœur : « J’en arrive tout de suite à ce qui vous peine : le silence d’Yvonne. Rassurez-vous, ma bien chère sœur, j’ai reçu sa visite dernièrement. Elle accompagnait Lucie et les enfants, elles venaient de Corioûle. »
81On note aussi que les parloirs ne permettent pas toujours de faire les confidences désirées : « Je n’ai rien dit à Lucie, d’ailleurs, avec les enfants, c’est impossible. J’ai cependant pu dire à Yvonne, ‘j’espère que c’est bien fini, qu’on ne parle plus de rien’. » Plus que le dispositif de clôture, c’est le nombre des visiteurs qui empêche les échanges intimes : « J’ai eu aussi la visite de Maria, Léa et les petites, ainsi que celle de Tante avec Berthe, mais on dit si peu de choses (de sérieux du moins) quand ils sont si nombreux208. » Les sœurs se penchent principalement sur les blessés, les souffrants, les « déviants » : « Le pauvre René décourageant, il ne faut pas l’abandonner, mais il ignore, je pense, les premiers éléments de la religion. Je ne l’oublie pas dans mes prières209 » ; « Parlons maintenant de notre second deuil. J’ai vu pour la dernière fois ce pauvre Alphonse avec Tante Catherine fin novembre dernier. […] Nous avons tant prié pour Lui ! Quel vide sa mort doit causer là-bas ! Il était l’âme de cette grande maison. Dans quelle désolation ils doivent être tous les cinq. J’ai écrit longuement à Marie et à la pauvre tante Catherine pour qui c’est un coup bien douloureux210. » Signalons, dans cette famille Germain, la révolte d’une des sœurs, frappée par les décès successifs de son mari et de ses deux grands garçons qui venaient à peine de terminer leurs études universitaires. La carmélite jamboise écrit qu’elle perd la foi et, « dans un tel état d’irritation contre le bon Dieu », qu’elle ne veut plus voir ses « trois sœurs carmélites » qui ne lui attirent, dit-elle, « que des malheurs211 ».
c. Différences de sensibilité entre carmélites et clarisses
82L’affection naturelle pour la famille est moins dévalorisée à l’époque contemporaine que sous l’Ancien régime, surtout au carmel qui s’appuie sur l’exemple de Thérèse de Lisieux, laquelle exprimait librement son affection pour sa famille. De celle qui fut prieure de 1919 à 1951 à Floreffe, la notice rapporte qu’elle aimait à reprendre à son compte les mots de Thérèse de Lisieux : « J’aime ma famille, je ne comprends pas les Saints qui n’aiment pas leur famille212. » D’une autre carmélite floreffoise, on lit dans la notice que, « comme la Petite Thérèse, elle aimait beaucoup sa famille213 ». Marie-Germaine de Jésus (Germaine Beckers) est, dans sa notice, systématiquement comparée à la sainte de Lisieux, notamment pour l’amour qu’elle portait à sa famille : « Thérèse ne comprenait pas les saints qui n’aimaient pas leur famille. Comme Germaine la rejoignait là encore » ; elle témoignait d’une vénération pour toute sa famille, « mais le centre des affections familiales reste à la mère214 ». Comme nous l’avons vu dans le chapitre sur le recrutement, le théologien et psychanalyste E. Drewermann note que les religieux et religieuses qui ont fui la maison maternelle sont pris ensuite par des envies régressives de retour au foyer. Dès que la clôture se desserre, on assiste à une explosion des sentiments de nostalgie enfouis depuis des décennies215. Dans les notices, la nature des relations avec la famille est plus diversifiée. Divers types de rapports se dégagent : la religieuse qui prie pour la conversion des siens ; celle qui souffre de leur manque de visite ou d’intérêt ; celle qui pleure les décès de ses parents proches jusqu’à en mourir elle-même ; enfin, celle qui se distingue par son détachement.
83Marie du Saint-Sacrement (Catherine Schrols), entrée en 1843 au carmel de Namur à l’âge de 16 ans, « restait profondément attachée » au foyer paternel, et eut bien à souffrir des rares visites que lui firent les siens216. La converse Marie-Stéphanie des Apôtres (Marie Reder), entrée en 1880 au même couvent, souffre de n’avoir revu, pendant dix-sept ans, « aucun membre de sa famille qu’elle chérissait cependant beaucoup ». Lorsqu’il lui arrivait de recevoir une lettre, elle prolongeait volontairement l’attente de quelques jours avant d’en prendre connaissance. Sans nouvelle de son frère, elle entame une neuvaine en sa faveur et reçoit quelques jours plus tard « une lettre aussi consolante qu’édifiante de ce frère bien-aimé », « la comblant de joie ainsi que toute la communauté qui avait vivement partagé sa peine217 ». Marie-Cécile des Saints-Anges (Maria Grandjean) n’hésite pas à faire de « doux reproches » à sa famille qui vient trop peu lui rendre visite. Elle écrit : « Au premier beau jour du printemps, si nous vivons encore, venez avec René et n’attendez pas toujours l’un après l’autre, selon l’habitude de la famille. […] Pour les voyages, je puis dire que vous n’avez ni l’un ni l’autre l’esprit du siècle, mais vous êtes arriérés de deux cents ans au moins… Ce n’est pas une mauvaise note, mais avouez que votre petite carmélite ne vous voit guère. » Peu avant son décès, elle connaît la déception d’une promesse de visite non tenue218.
84D’une carmélite entrée à Namur en 1881, la notice rappelle cette visite cruellement manquée par suite de l’oubli de la portière :
« Nous savons déjà combien elle aimait son oncle trappiste. Celui-ci ayant dû se rendre à Cîteaux, pour assister à un chapitre général de l’ordre, avait disposé de telle sorte son voyage de retour qu’il put sans perdre de temps faire une courte visite à sa nièce. Descendu à Namur, il vint dans ce but sonner à notre carmel de la rue Saint-Aubain. Notre tourière qui l’avait introduit au parloir oublia malheureusement de l’annoncer et le saint religieux eut tout le temps de prier, d’attendre patiemment. L’heure allant s’écoulant et se voyant près d’aller reprendre son train, il retourna près de notre portière qui dût lui avouer son oubli… On se hâta d’avertir Sr Thérèse de la présence de son oncle, mais les moments étaient comptés dès lors, et après quelques paroles échangées, il ne lui resta plus que la consolation de recevoir la bénédiction de celui à qui elle aurait tant voulu ouvrir son âme… elle avait tant à lui dire, à se dire plutôt l’un l’autre… De quel côté fut plus méritoire ce contre-temps si parfaitement accepté, nous ne saurions le dire, ce dont nous sommes persuadés, c’est que ce sacrifice imposé inconsciemment à son oncle, et auquel elle se soumit de tout son cœur, sans proférer une parole de simple regret, lui coûta énormément et montra la maîtrise qu’elle avait acquise sur elle-même219. »
85Une autre carmélite namuroise s’appliquait à « être fidèle aux coutumes établies pour le parloir » et, pendant les rares visites de ses parents venant de France, « ses yeux ne se détachaient pour ainsi dire pas de son ouvrage » et « toujours elle était prête à sortir pour arriver à temps à l’oraison ». Son « cœur si affectueux aurait aimé de revoir plus souvent les siens, mais elle ne leur en exprimait pas le désir, bien plus pour en faire un sacrifice que pour leur épargner de trop fortes dépenses »220.
86Marie-Élie du Sacré-Cœur de Jésus (Marie Anciaux), entrée à Namur en 1859, vit douloureusement les morts qui frappent sa famille et ne se remettra jamais de l’assassinat d’un parent en 1918221. De même, Marie-Julienne de Jésus (Marie Müller), entrée en 1908, se meurt de n’avoir de nouvelles des siens pendant la Première Guerre mondiale, et surtout de son jeune frère, « le plus aimé peut-être ». Elle décède en 1916, à 37 ans. Elle avait demandé à la prieure de pouvoir s’offrir en holocauste pour la fin de la guerre, mais celle-ci avait refusé222. La pratique de s’offrir en holocauste en échange d’une « demande » s’inscrit dans le courant de la spiritualité victimale. Comme nous le voyons ici, les membres de la famille peuvent être les « bénéficiaires » de ce système d’échange de vies. D’une sœur de Saint-Servais décédée en 1939, la notice dit qu’elle « avait offert sa vie pour sauver celle de ses deux neveux prêtres qui allaient peut-être devoir prendre les armes223 ». On sent aussi l’importance de la famille dans la vie de Marie-Madeleine du saint Enfant-Jésus (Marie Dewert). L’épreuve du décès de sa sœur est compensée par la joie de voir ses deux neveux embrasser l’état sacerdotal. Toutefois, la santé précaire de l’un deux, et le décès prématuré de sa seconde sœur, marque la moniale, pour laquelle la biographe écrit : « Cette mort qui lui enlevait sa dernière sœur, fut une date dans la vie de notre chère sœur Madeleine224. »
87La notice de Térésa-Joseph du Saint-Cœur de Marie (Angèle Monchamps) accorde plus de poids encore à la famille, donnant l’impression que cette moniale n’a jamais admis la séparation familiale. La coupure avec le milieu familial, selon la biographe, est le terrain sur lequel « elle eut le plus à combattre ». Elle souligne la différence entre la vie d’Angèle à Liège, dans une famille qui « tient une place honorable », avec un frère, vicaire général de Liège et prélat domestique du pape, et une sœur directrice de l’école normale des Filles de la Croix, et son arrivée au carmel de Namur, où « les Monchamps sont inconnus et leurs visites seront plutôt rares ». À cela s’ajoutent plusieurs décès dans la famille, dont celui de sa mère qu’elle a dû quitter mourante pour réaliser son projet d’entrée au couvent :
« Angèle a, par sa mère, du sang espagnol dans les veines ; son tempérament sanguin a les réflexes facilement visibles… ses luttes, ses petites défaites en seront d’autant plus remarquées, trop remarquées peut-être. Nos yeux humains jugent souvent du niveau des âmes par quelques aspérités qui émergent et ils ne voient pas le nivellement laborieux des couches profondes que poursuit dans le secret la bonne volonté soutenue de la grâce225. »
88En revanche, Thérèse de Jésus (Lucia Bouillon) voit sa mère puis son père décéder peu après son entrée au couvent en 1890, mais sa biographe écrit que cette épreuve, « ne fit qu’affermir » sa vocation « au lieu de l’ébranler ». La mère, âgée de 47 ans, succombe d’une pneumonie quelques semaines après l’entrée de sa fille : « Ce coup terrible frappa au cœur notre sœur Thérèse de Jésus, elle le reçut cependant avec un calme et une mission dignes des saints226. » Un an plus tard, c’est le père qui décède, seconde épreuve que la novice accepte encore « avec une grandeur d’âme admirable ». Elle reportera toute son affection sur sa sœur et son frère demeurés seuls : « sa sœur Jeanne depuis ce moment devint comme une autre elle-même, pour la gloire de Notre-Seigneur227 ». De même, Marie-Agnès de Jésus (Gabrielle Mons), entrée à Namur en 1902, est évoquée pour son détachement lors des décès qui frappent successivement sa famille, elle qui y voit « la volonté de Dieu pour s’établir de suite dans un dégagement plus complet de ce qui lui était le plus cher228 ».
89Une autre façon de prolonger les liens familiaux est de prier pour les siens. La veuve Janssens, entrée en 1885 à Namur pour fonder à Marche en 1887, était torturée par « l’inconduite de ses fils » et restait des nuits au chœur pour implorer leur conversion qui « lui fut apparemment refusée229 ». Marie-Thérèse du Sacré-Cœur (Mélanie Petit), entrée en 1880, se livre au même combat, la prière pour la conversion des siens : « Pendant plusieurs années, elle passa par une épreuve intérieure très sensible : la vue de tant d’âmes obstinément rebelles à l’amour de Dieu, surtout jusqu’en sa propre famille, lui était un tourment continuel. Elle ne cessait de prier et de se mortifier230. » Marie-Alphonse de Sainte-Thérèse (Marie Gilbert), qui conserve une « profonde affection pour sa famille » priant « sans cesse pour le salut de tous ses membres », a la joie de voir « trois de ses sœurs entrer chez les sœurs de la Providence, plus tard une nièce chez les sœurs de Sainte-Marie ». « Le plus intime de ses désirs », qu’un de ses neveux embrasse la vie sacerdotale, se réalise quelques mois après son décès231.
90La converse Marie-Christine de Saint-Joseph (Lévina Duchêne), entrée au carmel de Jambes en 1905, se distingue aussi par « ses affections familiales si vives ». Pendant la Seconde Guerre mondiale, on la voit d’abord compatir, avec ses compagnes polonaises, au sort de la Pologne. Lorsque la guerre est déclarée en Belgique, c’est de sa famille qu’elle a le plus souci et, dans ses lettres, elle s’emploie à donner confiance aux mères, filles et épouses séparées de leurs hommes. À la fin de l’année 1940, elle écrit : « Je ne discontinue pas les neuvaines et j’ai la plus grande confiance que la sainte Vierge les protège et les ramènera en bonne santé. Je voudrais vous faire partager cette assurance en la puissante protection de notre Mère du Ciel afin que vous dormiez en paix sur vos deux oreilles. » Sa confiance et ses désirs seuls importent pour influer la situation : « Hâtons par nos désirs et nos prières leur retour [des hommes] puisque les saints de l’Ancien testament ont mérité de faire naître N.S. plutôt par leurs désirs, le bon Dieu est toujours le même, demandons le Lui avec la confiance la plus filiale et la plus entière. Les âmes confiantes sont les voleuses de mes grâces232. » Elle a le bonheur de recevoir, peu avant sa mort le 27 septembre 1943, une lettre d’un de ses parents qui souligne son intérêt continuel pour la famille. La biographe raconte que la moniale, trop faible pour lire la lettre, en écouta la lectureet que ce fut pour elle une « douce joie pour son cœur » : « […] cette voix de la terre lui apportait un dernier écho des joies terrestres les plus pures s’harmonisant si bien avec les joies éternelles dont elle était si proche, et où l’on retrouve en Dieu tout ce qu’on a aimé en Lui ici-bas. C’est là que notre chère sœur attend tous ceux dont elle était la joie et l’appui233 […] »
91Touchant est ce geste de la converse Bernadette de l’Immaculée Conception (Stéfanie Doudriack), qui se prépare à la mort (qui survient en 1968), et écrit à ses proches une lettre d’adieu, mais qui n’arrivera pas à destination : « Avec soin, elle prépare ses lettres d’adieu. Une longue missive pour ses sœurs de Pologne (tout entière de sa main) qu’elles se passeraient, disait-elle, car la force lui manquait pour écrire à chacune, et toute heureuse elle y joignait sa dernière photo ‘où elle n’avait pas l’air malade’. Hélas, le bel envoi n’arriva jamais à destination et le temps a passé… elle n’écrivit plus ! Jésus lui a demandé ce dernier sacrifice, lui dit-on, et avec un beau regard de lumière et de joie, elle dit dans un beau sourire ‘Oui234’ ! » Signalons que cette religieuse s’était distinguée par un long détachement par rapport à son pays d’origine, la Pologne, et par rapport aux siens. La curiosité et l’intérêt pour les choses du monde étaient bannis « de son univers mental », lit-on dans sa notice. Ce n’est qu’à la fin de sa vie qu’elle s’est laissée allée à exprimer ses attaches patriotiques et familiales.
92On perçoit aussi, dans les interviews, la prégnance de l’univers familial qui poursuit les carmélites jusque dans leurs vieux jours. Une centenaire, entrée à Jambes en 1923, terminait l’entretien par le thème de la mort, mais surtout, des retrouvailles avec les siens : « Quand je pense que toute ma famille est là, papa, maman, mes frères et sœurs sont là, depuis longtemps déjà. Et le premier, c’est le petit Léon. Être sur la terre en entrant dans le Ciel, mais quand on est persuadé que le Ciel est au bout du chemin, et de notre chemin, eh bien, c’est une richesse, parce qu’on peut en vivre toujours235. » La journaliste Mariapia Bonanate, dans son livre consacré aux religieuses cloîtrées, rapporte les propos d’une trappistine qui souligne l’intensité du vécu familial en religion : « Ici, ce qui se passe dans la famille est vécu de façon particulièrement intense236. »
93Chez les clarisses, on note une volonté de séparation plus marquée qu’elles expliquent par la pauvreté. En 1924, la fondatrice de Saint-Servais, Marie des Anges Dewilde, se réjouit d’avoir « tout quitté par amour pour Jésus », et de ne plus être touchée par les deuils qui frappent les gens du monde237. D’une clarisse de Malonne entrée en 1896 à Saint-Omer, la notice rappelle son souci de vivre concrètement cette rupture avec la famille en demandant parfois « de supprimer une visite238 ». Une clarisse entrée en 1927 sans l’accord parental et « privée elle-même de visite familiale durant 23 ans », affirmait « avec une sérénité pleine de foi : ‘je suis tout à Lui’ [au Seigneur239] ». Mais toutes n’ont pas cette capacité, puisqu’une autre entrée au même moment dans des circonstances analogues souffrit toujours, rapporte la notice, de ces peines familiales, et « cet état douloureux la rendait parfois ombrageuse et susceptible240 ». Les décès brutaux causés par les guerres sont toujours intensément ressentis par les moniales. L’une d’elles devient mélancolique lorsqu’elle apprend, en 1914, « la mort de sa chère maman qu’elle aimait tant, et dont elle espérait bientôt la visite ». Cette clarisse se caractérisait par « une tendre affection pour les siens » et par « quelque chose de si candide dans sa façon de s’exprimer ou de prier pour eux241 ».
94Dans un autre registre, les entrées pour la conversion d’un membre de la famille sont aussi relevées. Une clarisse entre en 1892 « pour obtenir que ses chers parents meurent dans l’amitié du bon Dieu ». Elle fut « exaucée », selon la biographe, puisque peu avant sa mort, elle reçoit une lettre de son père « qui la bénissait et la remerciait de sa vocation, en lui donnant l’espoir d’être bientôt réunis au ciel242 ». Une autre entre en 1931, « entre autres », pour la conversion de ses parents243. Parmi les fondatrices de Saint-Servais, en 1911, l’ostendaise Marie-Anna vouait aux siens un culte qui « la suivit dans la solitude », sans pour autant la déstabiliser comme relate ce chant à l’occasion de son jubilé :
« Pourtant son culte pour les siens
La suivit dans la solitude
De tous, elle s’inquiète bien
Avec sainte sollicitude.
Mais ces sentiments ne vont pas
Jusqu’à ce ‘regard en arrière’
Que notre maître réprouva
Lors de sa terrestre carrière244.
95Mais en général, l’univers familial est moins présent chez les clarisses que chez les carmélites. C’est un élément important qui distingue les deux familles monastiques et qui va de pair avec une organisation socio-économique différente ; l’une repose sur la mendicité, l’autre, sur les dots et le capital familial. Ces différences modifient de façon sensible la physionomie et la vie spirituelle de ces deux ordres.
3. L’économie conventuelle
96Jusqu’à la loi belge de 1921 sur les associations sans but lucratif, la situation juridique et financière des communautés religieuses est fragile. Si les communautés religieuses profitent de la liberté d’association inscrite dans la constitution, elles ne jouissent pas de la personnalité juridique et ne peuvent acquérir, posséder ou aliéner des biens. En 1857, un projet de loi sur la bienfaisance tente d’obtenir pour l’Église « le droit de disposer de biens légués dans des buts charitables et d’en disposer de manière perpétuelle », c’est-à-dire, la possibilité d’octroyer la personnalité civile aux associations de bienfaisance. Mais ce projet, rebaptisé « loi des couvents », se heurte à une réaction libérale très forte et n’aboutit pas. Paul Wynants passe en revue les procédés semi-légaux auxquels auront recours les communautés religieuses. Certaines choisissent de remettre leur patrimoine à un seul membre (le supérieur par exemple) ou encore à une personne externe de confiance (le prête-nom). Dans ce dernier cas, « les biens sont nominalement la propriété de laïcs ou d’ecclésiastiques de confiance, les religieuses se chargeant de rembourser les droits de succession à chaque mutation ». Cette situation présente des inconvénients : le propriétaire « légal » pourrait se prendre pour le propriétaire réel ; de plus, en cas de faillite, le patrimoine confié peut être liquidé également — c’est ce qui se passe pour les carmélites de Charleroi en 1882. L’autre possibilité est le système de la société civile ou de la tontine : « Il s’agit d’associations de personnes — généralement cinq ou six — qui possèdent des biens en commun. Les associées passent un acte par lequel elles cèdent l’entièreté de leurs droits aux survivantes, lesquelles veilleront à compléter la société par l’adjonction de nouveaux membres. » Mais cette formule, outre le fait qu’elle n’est pas toujours acceptée par les tribunaux, oblige les religieux à posséder personnellement, ce qui est contraire au droit canon selon lequel celui qui prononce les vœux solennels n’a pas le droit de posséder individuellement. Les autorités ecclésiastiques sont donc amenées à faire des dérogations pour que « les réguliers puissent posséder des biens meubles et immeubles en toute sûreté de conscience ».
97La loi sur les associations sans but lucratif du 27 juin 1921 permet aux communautés de posséder un patrimoine, moyennant le paiement d’une taxe annuelle qui compense l’absence de droits de succession (en 1921, cette taxe annuelle est de dix centimes pour 100 francs sur la masse des biens possédés). En mai 1923, le carmel de Floreffe crée une a.s.b.l. comprenant la prieure, la sous-prieure et les trois conseillères ; l’administrateur délégué est le directeur spirituel. La même année, la communauté de Saint-Servais se constitue également en a.s.b.l. Les couvents qui ne régularisent pas leur situation sont exposés aux déroutes. Paul Wynants signale que le carmel du Potay de Liège, qui avait tardé à se constituer en a.s.b.l., a été exproprié à la suite d’un procès en héritage qui s’est soldé par la vente publique du couvent245, fait d’autant plus regrettable que le carmel du Potay était le seul, en Belgique, qui subsistait encore dans ses murs d’Ancien régime.
a. La dot et l’apport des familles
98Sous l’Ancien régime, la dot constitue l’une des principales pressions qui s’exercent sur le recrutement246. Pour les bénédictines et les cisterciennes, la « famille doit fournir une dot importante et l’intégralité du trousseau247 ». Chez les capucines de l’Ancien régime, l’admission d’une religieuse était soumise à l’apport d’une dot assez considérable248. On sait qu’en 1891, l’évêque de Tilburg estime, pour un couvent de contemplatives, que la dot doit être de 6.000 à 8.000 francs249.
99Les Pauvres claires se distinguent parmi les autres ordres en ce que ni pension ni dot ne sont exigées à l’entrée. Si la postulante est acceptée, on lui dira la parole de l’Évangile, « à savoir qu’elle aille, qu’elle vende tout ce qu’elle possède et qu’elle tâche d’en distribuer le produit aux pauvres ». Les constitutions ajoutent que l’abbesse et les sœurs ne doivent en aucun cas s’occuper des affaires temporelles de la postulante, « afin qu’elle puisse en disposer librement, comme Notre-Seigneur le lui inspirera ». Avant de prononcer ses vœux, celle-ci doit avoir renoncé « complètement à ses biens et héritages » et les avoir distribués aux pauvres. Le caractère radical de cette dépossession est toutefois atténué par deux commentaires : d’une part, le monastère, de même que les parents de la candidate, peuvent être rangés parmi les pauvres ; d’autre part, la distribution aux pauvres sera évitée si elle devait provoquer « haines et disputes250 ». Dès lors, on s’étonnera moins de voir les clarisses de Malonne poser la question suivante : « Est-ce que le monastère peut sans contrevenir à la pauvreté séraphique, accepter d’une moniale qui est sur le point de prononcer ses vœux perpétuels, ses biens en tout ou en partie ? » Ainsi, la possibilité de recevoir une dot est envisageable. Le père spirituel de la communauté, Adrien Vanderhoven251, fait part dans une lettre substantielle de toutes les subtilités de ce point délicat qu’est la dot. Il répond que, « du point de vue de Saint François, il est clair qu’il faille se déposséder de tout » et que, dans la même optique, « Sainte Claire lutta toute sa vie pour obtenir le privilège de pauvreté » qui vise « la pauvreté du monastère et non seulement la pauvreté de chacune de celles qui l’habitent ». Il insiste sur la spécificité des clarisses, qui ne font pas de testament mais un acte notarié de renonciation aux biens, « puisque le testament n’obtient son effet que par la mort du testateur », ce qui priverait les clarisses du privilège de pauvreté252. Mais il rappelle également les prescriptions du concile de Trente qui exigent que la remise des biens ait lieu non à l’entrée de la postulante, mais lors de sa profession solennelle253.
100À la question épineuse de savoir si les sœurs peuvent considérer le monastère parmi les « pauvres », le père Adrien répond que le monastère peut être considéré comme pauvre « s’il est vraiment pauvre et si ce qu’elle donnera doit servir à un usage immédiat et répond à un besoin réel ». Il s’appuie sur les Déclarations du père Marchant qui stipulent : entre les pauvres est compris le monastère. Les filles peuvent, « de leur propre mouvement, lui donner quelque somme ou lui laisser quelque legs pieux sous forme d’aumône ». En outre, il insiste pour que « cette aumône » se fasse « soit en aliments, soit en vêtements, soit en ornements de la chapelle, soit en réparation, aménagement ou même agrandissement des bâtiments etc. », et toujours selon l’esprit de pauvreté, c’est-à-dire, « aucune propriété si ce n’est le jardin, vivre par le travail et les aumônes254 ». Les témoignages confirment le recours à ce procédé. Marie-Joseph de Jésus (Marie-Josèphe Verhoye) raconte que sa part d’héritage a été acceptée par le couvent considéré comme « pauvre » :
« Alors, quand papa est mort, j’ai eu ma part, notre règle dit qu’on doit donner aux pauvres ce qu’on reçoit, on ne doit rien garder. Mais à ce moment-là, nous étions tellement pauvres, que notre confesseur, a dit ‘vous êtes vraiment des pauvres, vous pouvez employer l’argent qu’on vous donne si vraiment vous en avez besoin’. Alors, j’ai eu ma part et, avec une partie, on a acheté une machine [à laver], on ne devait plus tourner à la main255. »
101Par ailleurs, les archives contiennent les actes de donation de Marie de Saint-François (Suzanne Borry) qui lègue, en 1936, une bonne partie de son avoir à la communauté malonnaise. Au total, 100.000 francs français sont attribués au monastère :
« Je laisse trente mil francs français (30.000) pour les besoins actuels de la communauté (ceci est réglé). Je destine soixante-dix mille francs français (70.000) à utiliser en cas de fondation, construction ou autres besoins urgents et particuliers qui pourraient se présenter à la disposition de ma supérieure. […] Ces dons sont faits en l’honneur de tous mes chers défunts (présents et à venir) spécialement papa et maman, pour qu’ils aient part à perpétuité aux prières faites pour les bienfaiteurs256. »
102Cette somme permet d’installer l’électricité au couvent : « Il y avait une sœur qui avait hérité de ses parents. Ses parents étaient assez fortunés. Le père Adrien a dit, comme il a dit pour moi : ‘vous êtes les premiers pauvres. Il faut absolument installer l’électricité. C’est plus à faire un système comme vous faites257’. »
103Les colettines sont particulièrement attachées au « privilège de pauvreté » qui leur permet de recevoir des postulantes sans dot. Marie des Anges, fondatrice de Saint-Servais, est très intransigeante quant à ce point de la règle et refuse catégoriquement de se soumettre, pour la fondation de Tilburg en 1889, aux exigences de l’ordinaire du lieu qui estime nécessaire de fixer une dot. Elle écrit alors une lettre au général franciscain pour obtenir son soutien : « Jamais, au grand jamais nous ne nous conformerons au désir de Sa Grandeur […] puisque les aumônes ordinaires suffisent amplement à tous ces besoins. […] C’est pourquoi en cas où il ne nous serait pas permis de faire une concession pour la dot, nous voudrions prier un autre ordre contemplatif d’accepter la fondation258. » Pour la fondation de Huy, en 1892, la même fondatrice sollicite auprès du pape Léon XIII « la faveur de pouvoir agir dans la réception des postulantes selon l’esprit primitif de notre sainte Règle, c.à.d. de ne pouvoir être forcée, par qui que ce soit, d’exiger aucune dot259 ». Elle refuse la dot « obligatoire » imposée par l’Église, ce qui ne veut pas dire que la communauté n’accepte pas la dot. En 1925, on apprend que deux professes ont renoncé à leur héritage pour la somme de « 10 mille francs à verser 3 mille à l’entrée et le reste à l’émission des vœux perpétuels260 ». Conformément au droit canon, ces dots restent à disposition des religieuses jusqu’à leur décès : « les dots restent à la disposition des religieuses, tant qu’elles vivent, c’est à leur mort qu’elles deviennent définitivement propriété du monastère261 ». Dans une lettre adressée à Saint-Servais, une sœur de Roulers conseille de ne s’occuper en rien de ce que la postulante fait de ses biens, « puisque nous avons un point de la sainte règle qui dit que nous ne devons pas nous inquiéter des biens temporels de la postulante mais que ce soit elle-même qui en fasse en toute liberté ce que le Seigneur lui inspirera262 ». En 1924, l’abbesse de Saint-Servais interroge la fondatrice au sujet de la dot, cette dernière lui conseillant de s’en remettre complètement au père syndic — chez les clarisses et les colettines, le syndic est le responsable de l’administration temporelle du monastère. Toutefois, si rien n’est exigé, il est « permis de recevoir une somme modique, selon les besoins du monastère263 ». En outre, les constitutions font état de frais pour le postulat : 800 francs en 1892, et 1.000 francs en 1933264.
104En revanche, au carmel, les dots représentent une des sources principales de revenus. Ainsi, au carmel de Floreffe, le poste « rentes, dots et pensions » constitue la principale source de revenus jusqu’en 1914 (79 % en 1900 ; 97,6 % en 1905 ; 96,7 % en 1910). Mais après l’affaire Béguin265, ce poste se réduit considérablement. En 1915, il ne représente plus que 19,9 % de la recette totale. Si dans l’entre-deux-guerres, il rapporte encore 17,3 % du montant annuel, après la Seconde Guerre mondiale, il chute à 1,5 %. Entre 1945 et 1982, les revenus sur le capital ne rapportent plus, en moyenne, que 4,2 % de la recette totale. Ce poste est principalement alimenté par les dots et les pensions versées par les familles. Le montant de la dot, mentionné dans les testaments des moniales conservés au monastère, varie au fil du siècle : en 1910, 10.000 francs ; entre 1920 et 1934, la dot varie entre 25.000 francs et 30.000 francs ; en 1943, 35.000 francs ; en 1946, 40.000 francs ; en 1963, 50.000 francs ; en 1970, 60.000 francs. La dot doit être remise au monastère avant la prise d’habit. Toutefois, l’absence de dot ne doit pas être un obstacle à l’entrée, Thérèse d’Avila ayant insisté sur ce point dans ses constitutions. Les « dispenses » ne sont donc pas rares, même si elles concernent surtout des jeunes filles de bonne famille qui ont passé outre l’autorisation parentale pour entrer au cloître266. De leur côté, les supérieurs réguliers sont plus soucieux de la régularité et du paiement des dots afin d’assurer le confort financier des communautés de contemplatives267.
105À partir de 1921, les carmélites remettent leurs biens, par testament, à l’a.s.b.l. du carmel de Floreffe, soixante jours avant la profession perpétuelle268. Généralement, elles lèguent la moitié de leur fortune à la famille, l’autre moitié au couvent. Les dots sont placées après la profession temporaire et ne peuvent en aucun cas être utilisées avant la mort de la sœur269. Elles sont acquises au monastère au décès de la religieuse. Si une moniale quitte le monastère, pour quelque raison que ce soit, la communauté doit lui rendre intégralement sa dot. Cela s’est confirmé à deux reprises (en 1901, lorsque Marie de la Croix (Marie Gilles), malade, ne peut suivre la communauté en exil ; en 1950 lors du départ de Fernande Gofette. Il semble qu’avant la réintroduction des vœux solennels à partir de 1921, les moniales qui avaient une petite fortune pouvaient la gérer personnellement jusqu’à leur décès. On voit, jusqu’au début du 20e siècle, des carmélites fortunées, telle Marie-Thérèse-Josèphe de Jésus-Hostie (Rosa Gillibert) du carmel de Montélimar-Floreffe270, traiter avec le notaire de la gestion de leur patrimoine271.
b. Bienfaiteurs et syndics chez les clarisses et les colettines
106Qu’il n’existe pas de livres de comptes à Saint-Servais n’est pas étonnant. La tenue d’un registre de comptes, aux yeux des colettines, semble incompatible avec un abandon complet à la providence. Lorsqu’il est question, au début des années 1920, de se constituer en a.s.b.l.272, la fondatrice de Saint-Servais, la mère Marie des Anges de Roulers, écrit à ses filles :
« Pour ce qui regarde la société sans but lucratif et le compte à rendre, je n’en connais absolument rien. Notre Très Révérend Père nous a dit que cela ne nous regardait pas et nous vivons comme avant au jour le jour sans nous soucier de rien, nous abandonnant complètement à la divine Providence, notre bonne et tendre mère273. »
107En 1951, à la suite de la demande par l’évêché des comptes de la communauté, l’abbesse de Saint-Servais écrit : « Nous ne tenons aucun autre compte, puisant dans la bourse de la providence au fur et à mesure de nos besoins274. » En 1959, la communauté est à nouveau interrogée, par la Congrégation des Religieux cette fois, sur ses sources de revenus. Elle affirme ne connaître aucune difficulté économique. À la rubrique « travaux rémunérés », elle inscrit la « lessive et le repassage de six églises ». Mais à la question suivante : « Dans quelle proportion aident-ils votre subsistance ? », l’abbesse répond simplement : « Impossible d’évaluer approximativement. Nous tiendrons un compte pour la prochaine fois275. » Mais de quoi vivent ces colettines ? Les moniales se déchargent de toute leur administration financière au profit du père syndic, à l’époque, le chanoine Bouchat276 : « […] Nous vivons au jour le jour de la charité des anges de la Sainte Providence. Ma bonne mère Abbesse, laissez-votre bon guide et Père syndic disposer de tout à la plus grande gloire de Dieu et des pauvres âmes. Cela nous rend si heureuses277. » Ainsi, les colettines se démettent volontairement de toute responsabilité en matière de gestion financière, leur principal recours, en cas de besoins, étant l’invocation à Saint-Joseph. En 1925, lors de la fondation de La Louvière, la communauté accroche un petit sac de terre au cou de la statue du saint ; lorsque le terrain est acheté, la terre est remplacée par un dessin du couvent à bâtir :
« L’entreprise fut confiée à saint Joseph qui s’entend mieux que personne aux affaires temporelles aussi bien qu’aux spirituelles […]. Un petit sac de terre fut suspendu au cou du bon saint jusqu’après l’achat du terrain [pour le couvent de La Louvière] ; le sac fut alors remplacé par une pancarte portant d’un côté le croquis du couvent et de la chapelle, de l’autre une supplique au bon saint ; le tout était tracé par la main de la fondatrice elle-même278. »
108Cette façon de déléguer la gestion économique du couvent à une personne extérieure, ici, le syndic, fait partie du système général où l’obéissance, dans le monachisme féminin, tient le premier rôle. Que ce soit pour le spirituel, pour la clôture ou pour la gestion matérielle, il faut que les moniales s’en remettent à des pouvoirs masculins extérieurs qui leur permettent de mettre en place une relation d’obéissance.
109Sans avoir plus de précisions sur les sources de revenus du couvent de Saint-Servais, on peut dire que celui-ci traverse le 20e siècle sans difficulté économique. En 1934, au moment de la crise économique, la chroniqueuse de Saint-Servais est heureuse de pouvoir écrire que la communauté n’a « jamais manqué de rien » :
« Cependant, disons-le bien haut à la louange de la divine providence, malgré la pénurie des sujets et la santé toujours si précaire de quelques sœurs tourières, malgré les dépenses énormes causées par la fondation de La Louvière, au milieu d’une crise économique vraiment mondiale qui sévit depuis plusieurs années, jamais nous n’avons manqué de rien et il en sera toujours ainsi, nous en avons la douce espérance, si nous restons fidèles à la recommandation de notre divin Sauveur : ‘Cherchez avant tout le royaume de Dieu et sa justice et tout le reste vous sera donné par surcroît279’. »
110Dans un rapport adressé à Rome en 1954, la communauté de Saint-Servais mentionne, comme moyens de subsistance, « le travail dans une petite proportion, les aumônes et les dons spontanés dans une proportion plus large ». Le travail « se borne à l’entretien d’un jardin, verger et de linge d’églises ». Les aumônes sont obtenues par le moyen de quêtes à domicile prises en charge par les tourières. Mais la communauté remarque que la quête « ne se fait plus que rarement faute de sœurs tourières ». Elle peut cependant écrire que « le monastère se suffit à lui-même à tous points de vue280 ». En 1953, le visiteur canonique confirme : « Les deux sœurs externes ne peuvent presque plus sortir pour mendier », tout en affirmant que « la Providence ne fait pas défaut à la communauté281 […] ». En 1965, les aumônes semblent toujours constituer la principale source de revenus, et le visiteur ne voit pas comment on pourrait développer le travail rémunéré : « Moyens de subsistance : aumônes ; un peu de travail rémunéré. On ne voit pas assez clair pour l’organiser282. »
111Les bienfaiteurs tiennent donc une place centrale dans l’économie des ordres mendiants. Au moment de la fondation, un bienfaiteur est désigné « syndic », c’est-à-dire protecteur de la communauté. À Malonne, Joseph Waelkens, ancien élève à l’institut des Frères des écoles chrétiennes à Malonne et à la tête d’une usine textile à Thielt, est syndic du couvent de 1926 à 1958. Son premier geste, après sa nomination, est de renflouer la communauté : « Mr Waelkens se mit aussitôt à la pratique, en réglant les comptes de la communauté en déficit283. » Tout en donnant de l’argent, le syndic demande que la communauté prie pour la réussite de ses affaires284. Les sources témoignent de la relation affective qui se noue entre la famille du syndic et les moniales. Joseph Waelkens appelle les religieuses « ses petits oiseaux » et celles-ci, « papa Waelkens », ou « bon papa ». Lors de la visite annuelle, la famille Waelkens a le privilège d’entrer en clôture. Le bienfaiteur, assis sur un banc au milieu des sœurs et à côté de la doyenne, s’en dit « le grand garçon285 ». En 1929, il se moque gentiment de ces clarisses qui ne parviennent pas à demander ce dont elles ont besoin :
« Nous avons eu une bonne année d’affaire et nous espérons que nous pourrons payer nos dettes de charité, voire même, que sœur Véronique y trouvera sa balustrade, et sœur Justine, ses carreaux et ses « etc. » qui sont toujours obscurs comme une nuit d’orage. Quand mère Abbesse a mal aux yeux, sœur Justine a mal aux doigts, car ceux-ci sont incapables d’écrire clairement ce qu’elle désire, ou simplement ce dont elle a besoin. Ainsi, sœur Justine, aurez-vous du charbon pour l’hiver, et seulement de la farine286 ! »
112Toutefois, touché par la crise économique, le syndic aura de plus en plus de mal à approvisionner la caisse de son couvent. En 1934, on apprend qu’il ne peut plus fournir aux moniales que les stocks de tissus non écoulés de son entreprise : « C’est la seule manière de nous aider, car les finances sont en mauvais état, dit Papa Waelkens, on sent la souffrance d’un bon cœur qui voudrait donner, et… forcé de restreindre vu les circonstances287. » En 1937, sa venue est motivée par la pauvreté de la communauté qu’il dépanne par des réparations du bâtiment et un don de tissus288. Une moniale entrée en 1933 avoue que la communauté n’osait pas trop demander : « Monsieur Waelkens. […] On n’osait pas toujours lui demander. Je me rappelle qu’une fois, il était venu nous voir et on lui avait parlé de la toiture. Et il disait ‘Ça peut encore attendre’. Je pense que ses affaires ne marchaient pas. Ils étaient trois frères associés dans un atelier de tissage. Ils étaient en déficit, ils étaient ruinés289. »
113Parmi les autres bienfaiteurs, on retrouve, au premier rang, les Frères des écoles chrétiennes de Malonne, qui fournissent surtout de la nourriture. Les déchets de cuisine de l’institut Saint-Berthuin arrivaient par seaux au couvent de Malonne290. Les chroniques mentionnent aussi les noms de bienfaiteurs particuliers, des femmes le plus souvent. En échange de diverses « choses » offertes par une bienfaitrice bruxelloise au moment de la fondation (« morceau de mérinos, oignons blancs, citrons, macaronis, fromage, chocolat, papier à lettres, ficelles, couteaux dont un grand pour le pain etc. »), les moniales lui promettent « un millier d’Ave Maria ». Les bienfaitrices demandent des prières, en échange de quoi, elles font des dons : « ô Divine Bonté, […] notre Mère reçoit l’annonce qu’on est exaucé, les 1.000 fr. sont à nous : notre Seigneur répondait ainsi aux pieux désirs de sa servante291. » Les intentions concernent les grands événements de la vie : fiançailles, mariages, maladie, mort. Le rôle des notables est aussi important, notamment celui du médecin attitré, qui soigne gratuitement les moniales. À Malonne, c’est le docteur Goreux qui, pendant 29 ans, de 1924 à 1953, offre ses services « pour l’amour de Dieu », dans un dévouement « de jour et de nuit, demeurant parfois deux heures au chevet d’une malade292 ».
114On pourrait analyser plus avant les logiques mises en œuvre dans le rapport entre moniales et bienfaiteurs. On voit fonctionner la mentalité du « donnant-donnant », où les dons en argent ont pour but d’obtenir des faveurs matérielles : bonne marche des affaires, santé etc. Si ces échanges peuvent se situer dans une démarche propitiatoire, ils peuvent aussi se rapprocher de l’esprit magique (je donne et automatiquement les moniales, par leurs prières, transforment mon don en avantages) ou même de la simonie, qui est la volonté d’acheter par un prix matériel des biens spirituels. Dans cette pluralité de possibilités, comment se situent les moniales ? Exploitent-elles ces mécanismes, consciemment ou non ? Ce qui est certain, c’est qu’il y a un lien direct entre l’insertion socio-économique et la spiritualité conventuelle. Les clarisses, plus que les carmélites, sont perméables aux « dévotions populaires », et pratiquent un apostolat plus « concret ». Les demandes des bienfaiteurs sont respectées, au risque de voir les moniales crouler sous la somme de prières à réciter. Les prières vocales prennent une place plus importante chez les clarisses que chez les carmélites. Une religieuse explique que les clarisses s’acquittaient journellement de toutes les prières (neuvaines surtout) demandées par l’extérieur : « Il y avait beaucoup de neuvaines parce que les gens demandaient des neuvaines et qu’elles croyaient qu’elles devaient s’acquitter de tout cela293. »
c. Vivre de mendicité : le cas des clarisses de Malonne
115Contrairement aux colettines de Saint-Servais, les clarisses de Malonne mêlent abandon à la providence et gestion méticuleuse des ressources à travers la tenue de comptes quotidiens, mensuels et annuels. L’esprit général face aux biens matériels est bien celui de la confiance et de l’abandon. En 1924, on lit dans la chronique au sujet de la construction d’une grotte dans le jardin : « il suffit d’être pauvres volontaires pour ne manquer de rien ; car les pierres ainsi que les charrois sont dus à la Providence et la statue est le fruit de la quête de nos sœurs294 !… » Toutefois, en raison du déracinement familial et social consécutif à l’exil du début du 20e siècle, cette communauté est, plus que les autres, menacée par la pauvreté réelle qui basculera dans la précarité lors des deux guerres mondiales. La communauté conserve un souvenir douloureux de la Première Guerre mondiale. La supérieure, qui avait obligé deux novices à sortir de clôture pour mendier la nourriture, se voit destituée de son poste et renvoyée à Saint-Omer. Remémorant cet épisode, une moniale s’étonne de nos jours de ce que cette supérieure ait été « disqualifiée » parce qu’elle « envoyait deux novices quêter dans les environs pour ne pas faire mourir de faim les sœurs en clôture ». Elle pointe la mauvaise conscience des novices et la culpabilité de la vicaire ; elle stigmatise le fait de « faire de la clôture un absolu qui tue les gens moralement et physiquement295 ». De fait, on sent que l’impératif de la « confiance » peut alimenter une culpabilité latente, comme le révèle cet extrait des chroniques où le vol des provisions du couvent en 1917 est interprété comme une « punition » face au manque d’esprit surnaturel de cette supérieure : « Peut-être voulait-Il [Dieu] punir un manque de confiance de vues surnaturelles de la part de la Vicaire. » L’abbesse Marie-Antoinette de Jésus (Marie Dubuis), qui succède à la supérieure déchargée en 1919, témoignera d’une confiance inébranlable dans les crises successives rencontrées par la communauté. En mars 1928, les chroniques rapportent : « Saint Joseph nous montra sa puissante bonté d’une manière remarquable. Notre Mère était en déficit devant la provision de charbon, farine et autres ; elle promit une messe à saint Joseph pour chaque millier qui lui arriverait. » Quatre mille francs affluèrent peu après. Le 31 décembre 1929, la communauté termine l’année avec 10.000 francs de dettes « occasionnées par achat d’étoffes pour habits, provision de charbon, farine, comestibles ». « Comment sortir de cette impasse ennuyeuse ? » s’interroge la chroniqueuse. À nouveau, on évoque la foi de la supérieure qui recourt à saint Joseph296. Même en situation de pauvreté extrême, il est bon de faire des dons pour s’attirer la faveur divine : « Un jour, écrivant à nos chères sœurs d’Assise, notre Mère offre 50F pour secourir leur ‘indigence’ par notre ‘pauvreté’, se disant en elle-même : ‘qui donne aux pauvres prête à Dieu’, qui sait si je ne recevrais en retour 500F ou même 5000F. Trois jours après, Mr Waelkens envoyait 5.000F297 ». En octobre 1936, la communauté se trouve à nouveau confrontée à des problèmes d’argent, toujours résolus par la confiance et la providence : « Durant le mois d’octobre [1936], notre mère se vit très gênée, vu la crise se prolongeant et les notes augmentant. Mais la Providence récompensa sa confiance invincible, et, de droite et de gauche arrivèrent des secours inattendus et puissants298. »
116Une clarisse entrée en 1933 évoque la pauvreté de Malonne, la faim, l’impossibilité de nourrir les sœurs, l’incapacité de payer les factures, et les moments de joie lorsque, « providentiellement », l’argent arrivait :
« Nous étions très très pauvres, nous ne mangions pas toujours à notre faim. ‘Je ne pourrais pas acheter un peu de fromage, pour les sœurs, pour leur souper, pour les sœurs qui travaillent au jardin ?’. […] ‘Je ne peux pas, ma fille, je n’ai pas d’argent.’ […] Et je me rappelle que j’étais avec la première portière et il y avait le meunier qui apportait la farine, et alors, elle disait : ‘Monsieur Massart, saint Joseph n’est pas encore passé.’ Ce qui voulait dire qu’elle n’avait pas de quoi payer. Alors, il lui a répondu — en riant, c’était un brave homme — : ‘Ma sœur, je veux bien, mais c’est la quatrième facture que vous me devez.’ Et alors, elle allait trouver la supérieure. Et la supérieure dit : ‘Je n’ai pas d’argent.’ Alors une fois, nous devions 7.000F. C’était juste avant la guerre. À ce moment-là, c’était énorme. Et elle n’avait pas d’argent. Alors nous avons fait une neuvaine à saint Joseph. Elle avait mis toutes les factures — nous avions une statue de saint Joseph à la chapelle —, elle avait relié les factures, elle les avait mises accrochées au cou de saint Joseph et nous avons commencé une neuvaine. Et c’est au cours de la neuvaine, pendant la messe, on nous appelle à la porte pour signer. Le facteur attendait sa signature. Et c’était 7.000 francs299. Alors elle est arrivée à la fin de la messe, mère Marie-Antoinette, elle a été directement à saint Joseph et elle a enlevé les factures, et elle s’est mise à chanter : ‘Qu’il est bon, ah ! qu’il est bon, qu’il est bon le Bon Dieu.’ Et elle pleurait. Alors, vous pensez, notre joie, on a dit le Magnificat. Ah ! c’était une affaire. »
117On peut s’interroger sur cette gestion autant affective que spirituelle de l’argent, et sur ses conséquences. Le même témoignage souligne les soucis causés par la situation économique précaire. L’abbesse Marie-Antoinette serait morte de ne pas pouvoir nourrir ses filles, ce qui est en contradiction avec l’attitude de confiance et d’insouciance préconisée par les manuels normatifs : « Et pour dire à quel point nous étions pauvres. Et notre supérieure, Mère Marie-Antoinette, s’est usée, elle est morte, c’est ça qui l’a fait mourir, de tracas pour les…, des factures à régler qu’elle n’avait pas de quoi300. »
118La précarité économique du couvent de Malonne est également relevée dans les rapports des fédérations, en 1959 et encore en 1964. Parmi tous les couvents fédérés, le monastère de Malonne est le seul à connaître des difficultés matérielles : « Un monastère, celui de Malonne, rencontre des difficultés économiques par suite de ressources insuffisantes ; de son propre avis, ‘il arrive à vivre parce qu’il a été aidé grandement par la fédération’ (aide pécuniaire et en nature, alimentaire, matériel etc.301) ». En 1964, il est toujours mention de l’exception malonnaise : « Un monastère, celui de Malonne, rencontre des difficultés économiques par suite de ressources insuffisantes et du grand nombre des religieuses (30). […] Aucun monastère n’est en difficulté [économique] sauf le monastère de Malonne302. » Il est intéressant de remarquer que les monastères de la fédération avaient d’abord pensé que Malonne, non colettin, était « moins pauvre » que les autres couvents. Lorsque la présidente fédérale flamande avait vu Malonne pour la première fois, elle s’est étonnée : « ‘C’est ça Malonne ?’, dans le sens ‘ben c’est encore plus pauvre que nous303’. »
119C’est en 1953 que, pour la première fois, le bilan de la communauté n’est pas négatif. En 1954, la communauté entame l’année avec un reliquat de 24.988 francs, ce qui est une première. La raison de cette embellie est l’aide apportée par les fédérations, mais aussi la politique active de l’Église qui pousse les moniales à développer le travail rémunéré et à supprimer les quêtes. En 1964, la supérieure écrit dans un rapport adressé à Rome :
« [Que l’on] pourvoit aux nécessités du monastère avant tout par du travail rémunérateur. Il y a une ‘maison d’accueil’ pour retraites et récollections. De plus, les moniales s’occupent de travaux de couture : confection de cravates pour une firme ; entretien du linge d’autel ; travaux de couture, de broderie, de tricots. Quand le travail ne suffit pas, alors seulement, on recourt à la ‘table du Seigneur’, selon l’expression de saint François, par quelques quêtes à domicile ou sollicitations par correspondance304. »
120En 1965, le visiteur canonique écrit au sujet de Malonne : « Travail bien organisé, on travaille plus, on quête moins305. » Pourquoi supprimer les quêtes, et pourquoi la mendicité, perçue comme un signe positif de sainteté, devient-elle un signe négatif associé au parasitisme ? Cette évolution doit être mise en rapport avec la nouvelle conception, qui se fait jour dans les années 1950, de la pauvreté et surtout du pauvre au 20e siècle qui n’est plus le « mendiant » mais l’ouvrier306.
121Toutefois, malgré la volonté d’investir dans le travail rémunéré, les travaux de couture et la maison d’accueil ne suffisent pas, comme le montre l’analyse des comptes. Pour les années 1948-1978, les recettes des travaux de couture et d’artisanat ne dépassent pas 6 % du budget global. De fait, et de façon structurelle, l’essentiel des revenus des clarisses de Malonne, jusqu’au milieu des années 1960, est constitué par les aumônes et les quêtes à domicile, ces dernières étant réalisées par les tourières. En 1950, les quêtes à domicile (34 %) et les aumônes (53 %) représentent 87 % des revenus. En 1964, l’apport des quêtes est réduit de moitié et, à partir de 1968, les quêtes à domicile sont supprimées. La disparition de cette source de revenus est compensée par la recrudescence des revenus du travail (13 % en 1970) et l’ouverture d’une maison d’accueil. En 1978, la maison d’accueil (17,5 %) et les travaux de couture (5,7 %) représentent 23,3 % des revenus du couvent.
122L’arrivée des pensions de l’État pour les sœurs âgées provoque un réel changement dans le mode de vie. Sœur Thérèse (Danis), économe de 1961 à 1969 puis de 1988 à nos jours, raconte « qu’après les pensions », elles ont pu manger mieux, se chauffer mieux et suivre des sessions de formation307. En 1978, les pensions et les aumônes rapportent 73,58 %, et le travail, 23,3 %. À partir de 1961, les moniales bénéficient des pensions de l’État. Celles-ci, d’abord insérées dans le poste « divers », font, en 1978, l’objet d’un poste séparé qui représente 45,9 % des revenus globaux. Dès 1970, les moniales écrivent dans les chroniques que leur « principale source de revenus est actuellement l’appui des pensions » pour les sœurs âgées. L’une d’elles témoigne : « Et c’est comme ça qu’on a eu les pensions de vieillesse. […] Tous les mois. Moi, j’ai 22.000 francs je pense, parce que je suis handicapée. […] Les autres ont beaucoup moins que moi, je crois que c’est 14000 francs308 ». La communauté, composée de deux tiers de Françaises, avait d’abord hésité à faire la demande à l’État belge. Mais en vertu d’un accord contrat entre l’État français et l’État belge, leur demande a été acceptée309. Récemment, une nouvelle loi réduit le droit aux pensions pour les personnes vivant en habitat groupé, ce qui pourrait être un obstacle à la poursuite de la vie communautaire310.
123Les deux postes de dépenses les plus importants sont la nourriture et l’entretien du bâtiment (réparation, chauffage et électricité). Au total, pour les années 1948-1978, ils représentent 76 % du budget global (38 % chacun). Le poste ‘alimentation’ subit une forte évolution dans le dernier quart du 20e siècle. En 1950, il absorbe 59 % du budget total, alors qu’en 1978, il descend à 25,5 %. Parallèlement, les dépenses pour le bâtiment augmentent : plus ou moins stables jusqu’en 1975, avec quelques variations correspondant aux travaux d’agrandissement ou d’aménagement du couvent, elles représentent 52 % du budget en 1975 et 43,66 % en 1978. Les frais de chauffage seraient en grande partie la cause de cette augmentation. Les postes « pharmacie/divers » et « divers/impôts » sont à mettre en relation : de fait, à partir de 1970, les soins de santé, pris en charge par la mutuelle, sont classés dans la catégorie « divers et impôts ». En 1978, ils constituent à nouveau une rubrique séparée qui représente 10,62 % des dépenses. Une autre évolution est à souligner, celle du poste « bibliothèque-formation » qui, tout en restant assez réduit, passe de 1 % en 1965 à 5,98 % en 1979. Enfin, notons la création, en 1978, d’une nouvelle rubrique : les dons faits par la communauté, qui d’emblée représentent une part non négligeable du budget, avec 9,13 %. On peut se demander, en raison de l’effet « vase-communiquant » observé entre les deux postes « Divers et impôts » et « Dons », si les dons n’étaient pas compris, avant 1978, dans les « divers ».
d. Rentières puis ouvrières : le cas des carmélites de Floreffe
124À l’aube de la Première Guerre mondiale, en février 1914, la communauté floreffoise perd tout son avoir qui avait été confié à un agent de change, nommé Béguin : « C’est à cette époque que, par une fatale imprudence, [la prieure Marie de la Trinité (Émilie Monin)] remit à un agent de change 220.000 francs belges, tout l’avoir de la communauté qui fut perdu sans retour311 ». Ce montant représente une somme importante pour l’époque312. Elle a été constituée par les dots et les rentes des familles fortunées des carmélites entrées à Montélimar au 19e siècle. Car en dépit de la consigne édictée par Thérèse d’Avila de ne pas vivre de rentes mais bien du travail manuel, le poste des rentes, dots et pensions représente, en 1900, 79 % du budget global du carmel de Montélimar-Floreffe. La perte de ce capital est une réelle épreuve pour la communauté, doublée de celle de la Première Guerre. La communauté atteint son seuil de pauvreté le plus critique en 1916. Pour survivre, elle envoie ses tourières quêter aux alentours313. L’entre-deux-guerres reste une période difficile pour le carmel qui traverse « une grande crise de pauvreté » : « On vivait de peu, dans la privation et la pauvreté, aimées assurément, mais non moins alarmantes à certaines heures314. » En 1926, le général du carmel, qui reçoit un cadeau de Floreffe, se dit d’autant plus touché « que le carmel traverse une crise d’extrême pauvreté315 ». C’est à ce moment que la communauté développe l’activité rémunératrice de la fabrication des hosties qui deviendra, à partir des années 1930, la principale source de revenus de la communauté316.
125Même si, en principe, les carmélites ne peuvent quêter, le poste « dons et aumônes » représente une part importante des revenus. La moyenne, pour le 20e siècle, est de 13,2 %. Avant de quitter la France, les aumônes rapportent 11,6 % des revenus. Pendant les années d’exil, de septembre 1901 à octobre 1908 (date de la prise de possession du nouveau couvent), les aumônes sont très réduites. La cause est l’interdiction des évêques belges, pour les communautés exilées, de quêter dans le diocèse, mesure prise pour ne pas concurrencer les maisons belges. En outre, les religieuses connaissent encore peu de monde dans le pays d’accueil. Les aumônes proviennent uniquement des familles françaises. Après la catastrophe financière de février 1914 et pendant la Première Guerre mondiale, les carmélites bénéficient d’un secours considérable de l’extérieur. En 1915, 42 % des maigres recettes viennent des dons et aumônes. Depuis la fin de la guerre jusqu’en 1930, pendant la « crise de pauvreté », le poste « dons et aumônes » continue de soutenir la communauté, avec une moyenne de 27,25 % des revenus. Après quoi, le poste est en régression, pour devenir à nouveau important pendant la Seconde Guerre mondiale. De 1945 à 1970, les aumônes deviennent plus rares ; elles ne rapportent plus qu’en moyenne 8,5 % des revenus annuels. Une augmentation de ce poste se manifeste à nouveau dans les années 1970, probablement due à la plus grande ouverture sur le monde.
126Le développement d’une activité rémunérée lucrative est spécifique au carmel de Floreffe. Dans les rapports du visiteur carme, on apprend que Floreffe est, du point de vue du travail rémunéré, le carmel le mieux organisé de la province belge du Brabant et même de la province de Paris. Son chiffre d’affaire est parmi les plus élevés : « Le travail rapportant à peu près 600.000 francs sur une dépense de 771.171 francs, c’est une des meilleures proportions pour la France et la Belgique. […] Les finances sont donc saines, le chiffre d’affaires est parmi les plus forts du Brabant et même de la Province de Paris317. » Cette situation contraste avec le carmel de Jambes dont la somme produite par le travail, en 1966, est l’une des plus basses de Belgique et de France : « Le travail, qui est d’environ 20.000 (francs), est évidemment insuffisant. C’est le chiffre le plus bas des carmels de la province et l’un des plus bas que je connaisse pour la France. » En revanche, les aumônes sont importantes, ce qui explique, selon le visiteur, que le travail rémunéré n’ait pas été organisé318.
127Les deux principaux postes de dépenses sont le poste ‘alimentation’ et le poste ‘bâtiment’ qui, chacun, absorbe un tiers des dépenses. Plus la communauté est pauvre, plus le poste ‘alimentation’ prend une place importante dans le budget et plus le poste ‘bâtiment’ décroît. Par exemple, en 1915, le poste alimentation est de 51,2 % et le poste ‘bâtiment’ (sans tenir compte des frais de chauffage et d’eau) est nul. En outre, le poste ‘alimentation’ prend de moins en moins d’importante au cours du 20e siècle : entre 1900 et 1940, il représente 46,2 % des dépenses ; entre 1945 et 1980, il descend à 20,1 % (en 1980, il n’est plus qu’à 13,3 %). La fabrication des hosties comme activité lucrative débute en 1915. À Montélimar, les religieuses produisaient, en petite quantité, des pains d’autel, mais cette occupation est abandonnée avec l’exil. C’est la prieure Magdeleine de Jésus (Marguerite Bovagnet) qui la relance en 1915, à la suite de l’affaire Béguin, et sur le conseil de la prieure du carmel de Riom (Puy-de-Dôme, France). Mère Magdeleine choisit le travail des hosties, car cette activité conviendrait à « toutes les aptitudes ». Au départ, l’équipement est précaire : « un petit four alimenté au pétrole », qui ne produit que quelques petites feuilles de pâte à la fois319. À production limitée, main-d’œuvre limitée : une converse assume à elle seule la production, depuis la cuisson jusqu’à l’emballage. En octobre 1925, un nouveau matériel de fabrication remplace l’équipement archaïque de 1914. D’un four à pétrole, on passe à plusieurs fours électriques et la communauté acquiert des découpoirs mécaniques l’année suivante. « Nous pûmes songer dès lors à étendre notre clientèle », poursuivent les chroniques. Parallèlement, il faut multiplier le nombre d’ouvrières : ce sont les converses et les tourières qui sont principalement recrutées. Elles assurent la cuisson, le « revenage » (travail d’humidification des plaques avant le coupage) et le découpage. Deux choristes (novices) sont affectées à l’expédition :
« Une sœur du voile blanc fut attachée à la cuisson, elle manie très aisément ses trois fers simultanément ; une autre fut chargée de les retourner à la cave. […] Les sœurs tourières eurent la mission de couper toutes les hosties et une sœur de chœur fut chargée du « pliage » en paquets de 100, tandis qu’une autre (au début, la tourière) faisait les expéditionsau dehors320. »
128En 1940, le travail des hosties rapporte 51.859 francs par an ; en 1945, 180.807 francs et en 1950, 520.167 francs. Après la Seconde Guerre mondiale, les choristes sont de plus en plus impliquées dans la production des hosties qui finira par absorber « la majeure partie de la communauté ». La choriste Marie de la Croix (Marie Duculot) apparaît comme le moteur de l’industrie : « Sous l’impulsion de son dévouement persévérant, la petite industrie communautaire prit l’essor et le développement suffisants pour devenir ce travail rémunérateur pourvoyeur de la subsistance de toutes321. »
129Toutefois, ces succès ont leurs revers. Mère Marie-Cécile de Jésus affirme qu’au carmel de Floreffe, « les sœurs ont beaucoup travaillé », et que « tout cela était un peu excessif322 ». Les notices nécrologiques font part de moniales veillant la nuit pour terminer dans les délais le travail demandé par l’extérieur323. Les « petites chroniques » attestent de la réalité de ces heures supplémentaires, surtout en période de fêtes : « messe de minuit. […] on s’est couchée de suite, parce que plusieurs sœurs avaient veillé la nuit précédente pour achever l’ornement324 ». L’insertion dans le circuit économique a ses contraintes : « Nous remarquons qu’en effet, le travail et ses rapports avec l’extérieur (commandes téléphoniques) créent des obligations onéreuses parfois (pendant les offices, l’oraison325). » En 1968 une jeune professe écrit : « Quoi qu’on puisse dire ou penser, l’activisme et la tension nerveuse nous guettent, car le travail est urgent parfois, comme il l’est pour tous nos frères326. »
e. 1950 : la promotion du travail rémunéré par l’Église
130Après la Seconde Guerre mondiale, l’Église manifeste activement sa volonté de voir les moniales se prendre en charge financièrement par leur travail327. Les aumônes et la quête organisée ne sont plus encouragées. À Malonne, en 1947, le franciscain Adrien Vanderhoven, confesseur et père spirituel de la communauté depuis 1930, fait un rapport sur l’organisation du travail dans le but de promouvoir le travail rémunéré. Le rapporteur affirme que le travail y est déjà abondant, voire « trop abondant » au dire de quelques religieuses. Il fait état de deux religieuses chargées des gros travaux d’intérieur, surchargées de besogne, ainsi que de trois jardinières « dont le travail serait trop dur pour des femmes ». En revanche, le travail rémunéré n’est pas suffisant, « les offres ne manquent pas, mais peu de religieuses s’adonnent à ces travaux, et y consacrent peu de temps par journée ». En tenant compte du peu de temps consacré au travail rémunéré, on peut dire, affirme le père Adrien, que celui-ci est bien rétribué, contrairement à « l’impression que produit l’examen des comptes financiers du monastère ». Le travail pour l’extérieur consiste « dans le lavage et le raccommodage du linge d’église pour la paroisse et le pensionnat ; dans le stoppage et le reprisage, le ravaudage, la confection de tricots ». Le rapporteur observe que la demande de travail provient des personnes du village, qui ne paient pas au-delà de ce qui est dû, sauf quelques exceptions. Il estime que « demander plus que ce qui est actuellement exigé exposerait le monastère à perdre une partie de sa clientèle » — il fait remarquer que le « travail-heure » fourni par les carmélites de Floreffe est moins rémunéré que celui fourni par les clarisses de Malonne. L’unique solution entrevue pour favoriser le travail rémunéré est d’y accorder plus de temps. Le père Adrien conseille donc de prendre trois quarts d’heure sur le temps consacré à l’oraison328. Finalement, les deux temps d’oraison restent saufs, et c’est le petit office de Sainte-Vierge329, récité tous les matins de 8h15 à 9h15, qui est supprimé afin de ménager plus de temps au travail rémunéré330.
131À la suite de ce rapport, les clarisses se mettent à développer les travaux de couture :
« À partir du moment où on a eu Sponsa christi — parce que Rome a constaté que des monastères avaient faim — on a refait un peu des horaires, et on a fait des travaux, des sœurs qui faisaient du tissage, du stoppage, c’est-à-dire pour les trous331. »
132Mais chez les clarisses de Malonne, le travail ne permet pas de suffire aux besoins :
« Moyens de subsistance : une maison d’accueil, une bibliothèque tournante […], de multiples travaux d’entretien et de couture […]. Ces travaux ne nous permettent pas de vivre par nos propres moyens pour différentes raisons : la maison d’accueil suffit péniblement à elle-même ; la ‘tournante’ est peu rétribuée, quant aux autres travaux, ils sont plutôt occasionnels et ne sont pas un débouché suffisant332. »
133Dans les années 1960, la communauté de Malonne est à nouveau amenée à réfléchir sur le travail rémunéré. Dans un rapport établi en 1969 sur cette question, on peut lire que la durée journalière de travail par sœur est de 4 heures et demi, cinq jours et demi par semaine. Les différents travaux sont : la maison d’accueil (17 lits, 13 chambres) ; l’enregistrement et la diffusion auprès des religieuses des conférences de l’U.S.M.333 ; l’entretien du linge d’Église (trois paroisses). À cela s’ajoutent les travaux occasionnels de couture, de polycopie et de broderie. Le lavage et le repassage du linge d’église sont de faible rendement « à cause du manque de matériel de repassage ». Par ailleurs, la communauté ne dispose « d’aucun local susceptible de convenir à un travail suivi ». La salle communautaire « est l’unique salle de travail utilisée pour les travaux de couture. Les autres travaux se font en cellule, faute d’autres locaux ». L’idéal, aux yeux des sœurs, serait de trouver « un travail très rentable n’utilisant à temps plein qu’une ou deux sœurs afin de pouvoir continuer la marche ordinaire du monastère et assurer le service d’accueil et celui de la tournante qui semblent tous deux répondre à un service334 ». En 1967 déjà, la perspective « d’utiliser » les compétences des sœurs diplômées avait germé dans les esprits : « il n’est pas exclu que, plus tard, nous puissions repenser une autre organisation de travail, par exemple, en tirant parti des diplômes de nos jeunes335 ». Finalement, ce sont les pensions d’État qui vont apporter à la communauté le complément nécessaire à sa subsistance, les projets de travail à l’extérieur n’ayant pas abouti. En 1989, les chroniques précisent : « La communauté vit en majeure partie avec les revenus garantis (pensions) des sœurs de plus de 60 ans, quelques petits travaux rémunérés, l’accueil et les dons envoyés par la providence336. »
134En revanche, le carmel de Floreffe continue dans sa lancée, modernisant régulièrement l’industrie des hosties. En 1968, 1970 et 1974, les mères renouvellent successivement les fers à cuire et les emporte-pièces. Malgré ces transformations, le travail des hosties reste très prenant. Une moniale écrit en 1970 : « Je suis devenue sacristine […]. C’est une charge en plus des hosties, qui me prenait déjà toute la journée. Espérons que j’en sortirai, car il y a en plus les raccommodages, du repassage etc. Très peu de temps337. » En novembre 1988, l’achat d’une machine très perfectionnée pour la cuisson des hosties modifie considérablement l’industrie conventuelle. Alors qu’il fallait une semaine de cuisson pour fournir les plaques de pâte nécessaires à une semaine de découpage et de comptage, un jour de cuisson suffit depuis lors. Une composition récréative exprime l’émerveillement des sœurs face à l’automatisation :
« Douze fers, montés sur chaîne, dans un mouvement de rotation continuel, chacun reçoit à son tour un peu de pâte préparée au mixer et, lorsqu’il revient au point de départ, il s’ouvre automatiquement pour délivrer une plaque bien lisse, qui sera ensuite découpée en hosties de toutes dimensions dans les découpoirs non moins perfectionnés. Il suffit pour les sœurs d’actionner quelques manettes et d’avoir l’œil vigilant. Ah, le progrès technique, ma sœur, c’est époustouflant338. »
135Autre étape dans la modernisation du travail : l’informatisation des commandes. L’ordinateur « permet de dire en 4 minutes le nom de tous les clients, le montant de leurs factures, le nombre d’hosties fabriquées pendant l’année. Bref, le chiffre d’affaires ! »
136Entrer dans le monde du travail « salarié », comme les ouvriers, est une étape centrale de ce nouveau mode de pauvreté promu par l’Église. Fini le travail de ménagère, les heures passées à entretenir le mobilier et repriser les vêtements. Le sens du ménage, de l’ordre et de l’entretien dans les couvents fait l’objet de critiques voilées ou directes : « Il faut savoir sacrifier un peu la propreté pour épargner temps et force, car nous ne sommes pas des ménagères qui ont la fierté de leur maison339 » ; « nous ne devons pas viser seulement à l’ordre, au sage rangement de toutes choses, mais au détachement de toutes choses. Et il est bon pour cela de renoncer à des formes d’ordre ou à des manies de rangement auxquelles on tient340 ». Pour limiter au maximum le temps consacré aux tâches ménagères, il ne faut pas hésiter à recourir aux techniques modernes : « supprimer les besognes inutiles ; être équipées pratiquement, ne rester jamais oisives, même en récréation341 ». De façon générale, le souci de la rentabilité pénètre les cloîtres : « Il nous faudra envisager d’épargner la main-d’œuvre nécessaire aux travaux intérieurs du monastère et cela, en utilisant — encore une fois d’après nos ressources — des adaptations modernes342. » Certaines besognes apparaissent comme « minutieuses » et indignes des pauvres : « il y a des besognes ménagères minutieuses qui sont un luxe pour les pauvres », comme le récurage du plancher « qui préoccupe beaucoup les monastères » et qui gagnerait à être recouvert d’un enduit afin de pouvoir être savonné343. Les travaux d’art décoratif et la broderie sont jugés comme inutiles et superflus : « Ce sont les riches qui ont le temps de travailler à leur aise et à la perfection, c’est leur luxe344. » Les mères déconseillent d’offrir aux familles et amis « de petits cadeaux faits par les sœurs » : « ils peuvent être mal jugés, les gens se disent : ‘Elles ont le temps de faire ces futilités345’ ». Elles engagent les supérieures, dans la répartition du travail communautaire, à « supprimer ce qui rebute parce que paraissant vieux jeu, mesquin, parce que paraissant entraîner perte de temps et déperditions de force346». L’U.R.C. préconise également la simplification des « travaux d’entretien, en utilisant le matériel moderne approprié » et l’abandon des « ouvrages futiles347 ».
137La question des pensions d’État pour religieux se pose dès les années 1920. À cette époque, les supérieurs ecclésiastiques déconseillent de faire des « versements pour la pension », trouvant qu’il serait mal vu que « des centaines de couvents retirent beaucoup d’argent de la caisse de pension348 ». En 1943, le vicaire général de Malines estime que les « pensions sont à peine ou pas conciliables avec le vœu de pauvreté349 ». Dans les années 1960 au contraire, il est bien vu de s’affilier au système de sécurité sociale. Ainsi, à la question « Les clarisses peuvent-elles accepter les secours de la sécurité sociale, tels les pensions d’assurance-maladie ou de vieillesse ? », le bulletin de liaison des clarisses, Pro monialibus, répond par l’affirmative, recommandant aux religieux et religieuses de se « soumettre aux lois des avantages sociaux et des pensions ». Il ne faut pas confondre, selon les auteurs de l’article, « revenus stables » et « avantages sociaux » qui « laissent une marge d’insécurité » et qui permettent l’exercice de la charité : « une attitude opposée ou une position négative vis-à-vis de l’insertion dans la société serait incomprise et ne témoignerait pas efficacement de la pauvreté350 ». Pour l’U.R.C., vivre la pauvreté « aujourd’hui », signifie « ne pas s’installer, s’affilier aux assurances sociales-mutuelles, être homme simplement comme les autres351 ».
138Le développement du travail rémunéré, exigé par Sponsa christi, est pris très au sérieux par les fédérations qui promeuvent toutes les formes de travail « pour l’extérieur ». En avril 1956, le conseil fédéral décrète que « l’orientation vers le travail rémunéré donnée par le S. Père demande de simplifier les besognes ménagères et d’adopter les perfectionnements modernes diminuant la main-d’œuvre352 ». En mai 1956, les responsables fédérales réitèrent la nécessité d’organiser le travail rémunéré, faisant référence à l’« universelle obligation du travail » : « À l’heure actuelle, le travail rémunéré doit être envisagé : c’est le désir du Saint-Père et il y aura de plus en plus nécessité de s’y livrer parce que les aumônes iront en diminuant, et d’autre part parce que le monde ne conçoit plus une communauté en marge de l’universelle obligation du travail353. » Sur le modèle des congrégations nouvelles qui ont le vent en poupe, on voit même poindre, chez les moniales, l’idée d’un travail salarié hors du monastère : « Mais il viendra un temps où l’organisation du travail s’imposera — travail rémunérateur qui nous mettra dans la situation des ouvriers actuels et répond aux exigences de la jeunesse moderne, par exemple, chez les Frères de Foucauld, ressources par le travail d’usine354. » En prévision de cette nouvelle organisation du travail, les responsables estiment qu’il faudrait assurer « une formation professionnelle » aux moniales355. L’U.R.C. engage les couvents de cloîtrées à créer « des communautés de travail » et à s’insérer « dans les grands circuits économiques356 ».
139Avec succès ? Dès le départ, les rapports de la fédération attirent l’attention sur le fait que les forces de travail dans les communautés vieillissantes suffisent à peine pour les tâches domestiques :
« Quand chaque monastère a soustrait de son nombre les moniales âgées, handicapées ou malades, puis les moniales nécessaires pour assurer, même en les simplifiant au maximum, les tâches domestiques et autres indispensables à la marche normale et équilibrée de la communauté, il ne reste guère ni de bras ni de temps pour entreprendre d’autres travaux. D’autre part, les moniales, selon la tradition de l’ordre et sa pauvreté, font elles-mêmes beaucoup de travaux qu’il est ailleurs d’usage de confier à des ouvriers spécialisés (menuiserie, maçonnerie, peinture et autres travaux d’entretien des bâtiments) ce qui représente souvent un sérieux équivalent du ‘travail rémunéré357’. »
140Un autre obstacle au développement du travail rémunéré est que les activités proposées par les moniales — couture et lessives — sont « de peu de rapport ». La fédération estime que les prix demandés par les monastères pour les lessives de linge de paroisse sont « insuffisants » pour couvrir les frais d’électricité et de savon. Elle fournit une liste des tarifs pour la lessive du linge de paroisse qui peut servir de base à tous les monastères fédérés, ajoutant : « Il sera bon de faire part à messieurs les curés de ces modifications de prix358. » La plupart des travaux rémunérés sont en rapport avec la confection, la réparation et l’entretien de linge, le plus souvent, le linge d’autel : « Le travail rémunéré des moniales se cantonne dans : entretien, lessivage, repassage de linge d’autel. Confection ou entretien d’ornements liturgiques. Travaux de couture divers, selon les demandes, broderie, etc. » À cela s’ajoutent des « travaux d’écriture ou d’échantillonnage pour papeteries ou autres firmes » et enfin, « la confection de pains d’autel ». Seule la confection d’hosties est lucrative359, mais il faut tenir compte des autres monastères de cloîtrées qui s’y consacrent déjà, principalement les carmélites. Dès les années 1950, et encore plus dans les années 1960, la fédération Sainte-Claire, puis l’U.R.C. invitent les moniales à utiliser la technique : « Quant au travail, tout le monde admet que nous devons l’accomplir à l’aide de la technique moderne360. » En 1955, il apparaît que la majorité des monastères de la Fédération Sainte-Claire ne ressentent pas le besoin de développer le travail rémunéré361. En 1959, le rapport fédéral signale que deux monastères seulement « pourvoient par le travail rémunéré à 50 % de leurs dépenses ». Dans les autres cas, la part du travail rémunéré varie entre 7 % et 30 %. La plupart des monastères vivent « de la charité spontanée des fidèles, des aumônes suffisantes pour la subsistance de la communauté, de telle sorte que la quête n’y est pas nécessaire362 ». En 1964, la Fédération Sainte-Claire reconnaît que « aucun monastère ne peut subsister par le travail seul », cela non à cause du « manque de travail rémunéré », mais à cause « du nombre restreint de religieuses » pouvant y être affectées. Les activités exercées par les couvents se répartissent entre : la fabrication du pain d’autel (3 monastères) ; l’entretien du linge d’église (4 monastères), la confection (1 monastère), la dactylographie (1 monastère). Le rapport précise que ce sont les dons, envoyés spontanément par les « bienfaiteurs et amis du monastère », qui pourvoient aux dépenses ordinaires, les dépenses exceptionnelles étant couvertes par des quêtes « par écrit et par correspondance363 ». Finalement, le phénomène de « crise des vocations » aidant, on peut conclure à un échec de la transformation des couvents de cloîtrées en cellules de travail rentables.
141Chez les carmélites, les rapports des visites canoniques montrent que le produit du travail rémunéré ne dépasse pas le tiers des revenus, exception faite de deux couvents : celui de Floreffe et celui de Rochefort. Le succès du carmel de Floreffe a été rendu possible par la précocité de la mise en œuvre du travail rémunéré, dès 1914, ce qui a permis au couvent d’augmenter progressivement la production et de se créer une part de marché stable. Dans les années 1950 déjà, alors que les autres couvents se mettent lentement au travail rémunéré, au carmel de Floreffe, la confection des hosties constitue une véritable petite entreprise qui assure 80 % des revenus. En 1964, le visiteur écrit que « le travail rapporte à peu près 600.000 frs sur une dépense de 777.171 frs, c’est une des meilleures proportions, pour la France et la Belgique364 ». En 1968, la fabrication des hosties rapporte « plus de 800.000 frs, ce qui est une des proportions optimales des moniales de France et de Belgique365 ». Quant au carmel de Rochefort, le visiteur canonique affirme que le travail y est « fort bien organisé ». L’industrie des images fournit près de 500.000 frs, soit plus de la moitié des recettes, et, au dire du visiteur, est « une des mieux réussies au point de vue financier de France et de Belgique366 ». En 1968, le chiffre d’affaires baisse légèrement, le visiteur notant : « Le travail des images, jusqu’ici très florissant, tend à subir une baisse qui est générale en cette sorte d’industrie367. »
142Dans les autres carmels de la province, les couvents vivent de leur capital et des aumônes, à quoi s’ajouteront les pensions d’État. En 1965, à Jambes, le visiteur fait part des aumônes « assez fortes, ce qui a moins obligé la communauté à organiser son travail, qui ne fait que le tiers des recettes368 ». Un an plus tard, le visiteur s’inquiète quand même du produit dérisoire du travail au carmel de Jambes : « La somme produite par le travail, qui est d’environ 20.000 fr., est évidemment insuffisante. C’est le chiffre le plus bas des carmels de la province et l’un des plus bas que je connaisse pour la France369 ». Pour le carmel de Matagne, des « maigres recettes », celles du travail représentent moins d’un tiers370. Au carmel de Marche-en-Famenne, le « chiffre du travail est ridiculement bas, représentant 10 % des recettes quand cela devrait être aux environs du 50 % ». Heureusement, poursuit le visiteur, « qu’il y a un chiffre assez fort d’aumônes371 ». En 1968, pour le même couvent, le produit du travail reste « l’un des chiffres les plus faibles, à peine 10 % du chiffre d’affaires372 ». Pour le carmel de Ciney, l’apport du travail représente également 10 % seulement de la recette globale : « le travail représente 70.555 fr. sur 700.000, ce qui n’est pas suffisant en soi, mais ce carmel a d’autres moyens pour vivre. Il n’est pas nécessaire de l’ennuyer de ce côté pour le moment373 ». À Virton, les recettes du travail sont « assez basses », avec « 185.203 sur 619.918, donc, pas même le tiers374 ». À partir de 1965, le visiteur mentionne le soutien des pensions d’État, comme à Marche où l’apport du travail est dérisoire, mais la situation budgétaire, saine, grâce aux pensions : « la situation est saine, car les pensions y pourvoient375 ».
143Si l’on peut conclure à l’échec de la conversion des couvents de clarisses et de carmélites en entreprises économiques rentables, les abbayes bénédictines et cisterciennes, masculines surtout, mais également féminines, semblent avoir davantage réussi en ce domaine. Après la Seconde Guerre mondiale, l’abbaye bénédictine de Maredsous « passe d’une économie de type fermé, marquée par le nombre important de convers (1872-1945) à une économie de type ouvert (tourisme, bière, fromagerie) ». Chez les femmes, l’abbaye de Maredret, qui vivait de l’exploitation de sa propre ferme, dispose aujourd’hui d’un atelier d’images et de céramique. La communauté d’Ermeton-sur-Biert, qui avait « un atelier de confection de vêtements liturgiques », effectue aujourd’hui des « travaux de dactylographie et de polycopie, mais surtout possède « un excellent atelier de reliure équipé de façon très moderne ». Les cisterciennes de Soleilmont vivent de leur boulangerie et de la production de leurs viviers. Les abbayes ont dû abandonner le secteur primaire, qui n’est plus rentable sinon dans des exploitations vastes et modernes, pour le secondaire (fabrication de produits) et/ou le tertiaire (leur commercialisation). Ces nécessités économiques débouchent sur une intégration sociale et économique beaucoup plus poussée376.
C. Sens et imaginaire claustral
144Étymologiquement, écrit Antoine Vergote, le saint est celui qui est séparé. La nécessité de séparation repose sur la distinction archaïque entre le pur et l’impur. D’ailleurs, le terme latin sanctus est traduit comme « souverainement pur, parfait377 ». Au départ, l’impur est l’informe, le mélange (le diable est femme et homme, humain et animal) — le pur signifiant littéralement « sans mélange ». La proximité avec Dieu serait impossible si l’homme ne se sentait pas d’abord pur : « Le purification est le geste symbolique qui permet à l’homme de se rendre présent à Dieu tout en maintenant l’altérité ». Les constructions théologiques qui cherchent à ‘matérialiser’ cet impur en font une substance matérielle transmise lors de la procréation. L’acte sexuel devient souvent le lieu de l’impureté378. Ainsi, le retrait associé à la chasteté et à la purification, tels que proposés en système monastique, sont intrinsèquement liés. Les sociologues ont également développé le concept « d’esprit de caste » pour caractériser l’ordre monastique. Cet esprit de caste s’enracine dans le conseil : « sois séparé ». Il isole les membres de la communauté, soit physiquement, soit psychologiquement. Mais, précise M.Hill, à la différence de la secte, il n’y pas d’indifférence au monde. L’ordre monastique n’est, dans son fondement, ni dualiste ni manichéen, ne rejette ni l’Église ni la société, mais le « mal » qui y est présent : « Tandis que la secte dénigre à la fois le reste de la chrétienté et le reste de l’humanité, l’ordre ne dénigre que le mal ». Ainsi, « comme la secte, on peut dire que l’ordre religieux se considère comme séparé du monde, bien qu’en un autre sens, il estime prendre sa part de responsabilités dans le destin de ce monde379 ». L’abbesse de Saint-Servais exprime bien cette appartenance des moniales à la communauté humaine :
« Nous sommes solidaires en un sens du bien et du mal ; c’est un besoin pour nous qui faisons partie de l’humanité, de prendre sur nous ses besoins, ses aspirations, ses péchés. […]. Ce que nous apportons, mais nous ne le voyons pas ! Nous croyons seulement à l’efficacité de notre prière, de notre louange, de notre adoration, de notre prière de mendiantes aussi. Puis notre présence même de priantes témoigne au monde qu’il y a d’autres valeurs que celles de la vie matérielle380. »
145Il est important de saisir ce paradoxe de la vie monastique et claustrale : le moine ou la moniale qui quitte le monde n’en sort pas pour autant. Il ou elle reste en rapport avec le monde, mais dans cette modalité particulière qu’est le retrait. Le désir de conversion personnelle et collective est exprimé de l’intérieur par le moine Matthieu le Pauvre qui insiste sur la séparation au monde comme spécifique au monachisme, une séparation qui n’est toutefois pas tant séparation du monde qu’entrée en Dieu en faisant suivre le monde : « un moine ne sort pas du monde, même s’il lui semble agir ainsi, mais en réalité, il fait sortir le monde à sa suite pour le mener vers Dieu. Dans son exode, le moine ne se retire pas loin des hommes, mais loin de lui-même, afin de pouvoir les attirer tous vers Dieu381 ». L’anthropologue J.-P.Albert soutient que l’apostolat de la sainteté est le meilleur exemple du « sens social » du christianisme. « Même s’ils s’en soucient, les saints pensent […] moins à leur propre salut qu’à celui de leurs proches ou à celui de tous » écrit-il. Dans ses analyses de biographies de saintes, il trouve de nombreux témoignages de femmes qui « portent l’Église, leur famille, les pécheurs ». Ces « tran-sactions spirituelles » à travers les hommes a été, comme il l’explique, rationalisée par l’Église à travers la notion de communion des saints. Pour l’auteur, l’apostolat est ce qu’ont en commun tous les modèles de sainteté chrétienne. L’apostolat comporte une dimension « virile, extérieure et combattante » et une « face secrète, féminine et patiente, l’apport spirituel de l’ascétisme des couvents ». Il implique « de faire exister en actes une communion des saints unissant en un même corps mystique les morts et les vivants, les pécheurs et les justes, l’Église militante et l’Église triomphante ». Pour J.-P. Albert, les personnes qui y ont recours ne rentrent pas seulement dans un simple échange, mais « s’insèrent dans ce monde transcendant de la communauté des saints ». L’offrande du demandeur sert « à une plus grande cause que celle pour laquelle on la verse, à savoir, souvent, un problème personnel à résoudre382 ».
1. Clôture expiatrice et anthropologie angélique
146Certains sociologues ont défini le monachisme comme un mouvement protestataire au sein de l’Église et de la société. L’ordre religieux constituerait le versant « révolutionnaire » de l’Église universelle. Toutefois, l’approbation nécessaire de la règle par la hiérarchie ecclésiastique montre que l’ordre reconnaît une autorité qui lui est extérieure. Une fois reconnu par l’institution, le monachisme quitte le lieu de l’utopie : il devient une « contre-société institutionnalisée » selon les termes de J.Seguy383. Les chercheurs montrent que le rapport entre l’ordre religieux et l’Église est étroitement lié à celui que cette dernière entretient avec la société. Une Église forte, institutionnalisée, provoque des réactions en son sein et la « réaction » monastique. Une Église faible, persécutée amène les ordres religieux à prendre sa défense contre la société : « À partir du moment où l’Église entre en ‘protestation’ face à la société, la vie religieuse devient protestatrice non plus face à l’Église, mais face au monde », affirme J. Seguy. En même temps, chaque fois que l’Église est persécutée, la spiritualité du martyre reprend vigueur. En monachisme, la réalité du martyre est remplacée par le désir du martyre384. Au fur et à mesure que politique et religion se dissocient, l’Église se pose de plus en plus comme « société antithétique de la société globale ». J. Seguy situe historiquement ce passage au 16esiècle. La période révolutionnaire française et ses suites lancent définitivement l’Église dans une lutte contre la société moderne et ses idéaux385. Dans une société laïcisée, les congrégations religieuses se retrouvent culturellement et mentalement coupées du monde et c’est pourquoi, explique É. Lopez, la « spiritualité de la réparation peut prendre un tel développement dans les cloîtres386 ».
147Les colettines sont marquées dès les origines par la spiritualité expiatrice impulsée par la fondatrice, Colette de Corbie. Sa vision pessimiste du monde s’explique en partie par le contexte, celui de la peste et du grand schisme des 14e et début 15e siècles. Le sens du sacrifice, de l’expiation et de la réparation se traduit par une séries d’images. Sainte Colette compare le cloître au tombeau. Dans une écriture de style apocalyptique, elle invite les sœurs à quitter le monde « de tout [leur] cœur » et « de garder fidèlement les vœux » sans quoi elles mériteraient « la damnation éternelle ». Elle insiste essentiellement sur la vocation pénitentielle de la cloîtrée qui s’extrait du monde corrompu pour réparer ses péchés par une vie d’expiation. La clôture est comparée à « l’enfermement du Christ pendant quarante heure dans le tombeau ». Les moniales, elles, y passeront quarante ans, voire plus. Mais dans l’esprit de Colette, ce lieu d’expiation dans les plaies du Christ est déjà et aussi celui de la béatitude :
« Vous êtes donc déjà dans votre tombeau de pierre par ce vœu de clôture. Ô Bienheureuse clôture ! Qui vous éloigne des vices et des occasions du péché et vous enferme en sûreté de mérites et de nobles vertus. Ô noble château ! Fortifié par le Roi tout-puissant, qui ne redoute pas l’assaut du monde, de la chair ni du démon. […]. Ô bienheureuse clôture ! Être toujours enfermées dans les précieuses plaies de Notre Seigneur ! Ô bienheureuses cloîtrées, volant au-dessus des cieux, entendant chanter en esprit les neuf chœurs des Anges387. »
148La vision pessimiste du monde est compensée par la perspective eschatologique. Le contraste entre l’agitation du monde et la paix du couvent est exprimé par le père spirituel de Colette de Corbie, Henri de Baume388, dont quelques écrits figurent également dans les constitutions colettines : « Le monde est dans une agitation perpétuelle, il flotte toujours entre le plaisir et le chagrin, entre la crainte et l’espérance ; on ne s’y donne de mouvements et de soins que pour les biens périssables ; à la faveur de votre clôture, vous jouissez […] d’un calme perpétuel, vous n’éprouvez aucune fâcheuse alternative389. » Est soulignée ici la dimension eschatologique de la vie monastique qui la situe hors du temps et de l’espace. Ce trait lui confère une apparence d’intemporalité et d’immobilité, explique C. Friedlander, qui mettrait la vie conventuelle hors des changements de civilisation :
« De par sa nature même, la vie monastique et contemplative a une orientation eschatologique ; moines et moniales cherchent à s’établir au-delà de ce monde qui passe, dans la réalité qui ne passera pas. Par ailleurs, elle n’est pas affectée de manière aussi immédiatement visible que la vie apostolique par les changements de civilisation. Ces deux facteurs lui confèrent une certaine apparence d’intemporalité, apparence illusoire, certes, car on n’échappe au temps ici-bas, mais qui frappe profondément l’imagination390. »
149Au 19e siècle, à la suite de la Révolution, la coloration pénitentielle de la clôture, chez les colettines tout particulièrement, s’accentue. Les clarisses « sont considérées par le peuple chrétien comme des ‘enterrées vivantes391’ ». Marie-Pascale Gounon dresse un portrait général de la spiritualité du 19e siècle qu’elle considère entièrement marquée par la volonté de se séparer d’un monde perverti depuis la Révolution. Elle tisse des liens entre volonté de coupure salvatrice, ascèse et piété. Pour prendre le contre-pied d’un monde à la recherche du confort, la pauvreté est avant tout dénuement, presque misère. La prière d’adoration et le culte eucharistique sont motivés par la réparation, par la dette d’un monde qui a abandonné Dieu. Tout le système conventuel reposerait, selon elle, sur la culpabilité et la réparation : « Depuis la Révolution, par réaction aux doctrines néfastes des philosophes et des républicains, le monde est perçu comme foncièrement mauvais. […]. La fuite du monde et la séparation seront les plus radicales possible. Même en communauté, l’idéal de la sainteté est de vivre retirée de tout, ne s’occupant de rien d’autre que de son devoir du jour dicté par l’abbesse392. » Si l’anthropologie angélique paraît moins sanglante, elle ne véhicule pas moins une vision « négative » du monde. Elle se réfère au courant du contemptus mundi, analysé par R. Bultot393. Dans cette optique, l’immuabilité de la Création et de Dieu sont en opposition avec le caractère changeant et périssable de la vie terrestre :
« Presque tous les caractères spécifiques de la condition terrestre dont nous avons l’expérience étaient décrétés être des conséquences désastreuses du péché originel. […]. La présence de l’âme dans le corps actuel — c’est-à-dire mortel — et dans le monde matériel était souvent regardée comme une aliénation ; le temps et l’action comme des contraintes dues à l’événement catastrophique de la faute originelle. La mort était censée permettre à l’âme de retourner à la pureté de sa nature et à la condition qui lui est propre. »
150Ce modèle de la vie angélique est l’idéal des moines qui « sont considérés comme les seuls chrétiens cohérents ». Face à eux se trouvent les laïcs « qui restent attachés à des choses terrestres, manquent d’intelligence et de volonté : ils sont illogiques, ce sont des faibles ». Renoncer à la création de Dieu est la seule façon de l’honorer. Les créatures sont limitées, partielles et ne peuvent satisfaire pleinement. « En d’autres termes, l’action profane est, durant une vie et collectivement au long de l’histoire, un fourvoiement. Ce que l’homme cherche au fond, c’est le repos, et le repos, il ne le trouvera que dans l’union contemplative à Dieu. »
151Dans nos sources, l’anthropologie angélique apparaît particulièrement dans les écrits de la première moitié du 19e siècle de la carmélite française exilée à Namur, la mère Louis de Gonzague. Plus que pénitentes, les carmélites sont des anges. Voiles, « murailles », grilles sont autant de points qui doivent rappeler aux moniales qu’elles ne doivent « plus tenir à la terre que par les pieds ». Leurs langues, leurs regards, leurs soupirs, leurs désirs ne doivent plus être que pour leur ciel, « dont nous n’avons pour ainsi dire plus que la vue, puisque nos murs doivent être si hauts, qu’ils ne nous laissent plus rien entrevoir de ce qui se trouve ici bas ». Dieu a donc placé les carmélites « entre le ciel et la terre » et veut « que nous commencions la vie des anges, il veut que nous apprenions à y chanter ses louanges394 ». La clôture matérielle fait que les carmélites ne voient « plus rien de ce qui existe » et peuvent s’appliquer entièrement à « contempler l’invisible pour lequel nous devons seulement vivre395 ». La prieure se réfère aussi aux premiers solitaires du carmel qui s’isolaient dans des grottes et des cavernes : « Nous sommes mes sœurs des religieuses carmélites qui descendons des prophètes Élie et Élisée puis des pères solitaires qui vivaient dans des cavernes, dans des lieux souterrains pour ne plus s’occuper qu’à la contemplation des choses célestes. » La cellule doit être comme une « grotte » et « le fond de l’intérieur », comme un désert, c’est-à-dire vide de ce qui fait courir l’esprit et l’imagination.
152L’anthropologie angélique, c’est ainsi avoir des ailes pour s’élever au-dessus des choses de la terre. Ainsi, la mère Louis de Gonzague identifie les carmélites à de la volaille : « belle image du ciel qui peut nous faire obtenir les ailes de la volaille pour nous élever au-dessus des choses de la terre et contempler plus à loisir les vérités éternelles ». La vision angélique véhicule, comme la spiritualité expiatrice, un profond rejet du créé, qui va du retrait à la mort au monde. « Que faisons-nous à nous amuser à regarder les choses d’ici-bas ? », interroge la prieure. « Nous ne devons les voir que pour les mépriser », poursuit-elle. Pour elle, Dieu a délaissé ses créatures, et « comme Dieu les a délaissées, je veux comme lui être libre pour marcher où me conduira son Esprit ». Elle préfère ses quatre murailles aux « palais des grands », « parce qu’au moins, ne pouvant encore jouir de la vue de Dieu, elle [la carmélite] peut du moins cacher à ses yeux les objets distrayants et bruyants de cette malheureuse Babylone, ce chaos de crimes qui renferme tant de déplaisirs, tant de chagrins, et d’ennuis ». Ainsi, la carmélite vole déjà en esprit dans la vie éternelle et si elle pouvait, affirme la mère, quitterait « cette région de morts pour vivre avec [ses] amis de l’autre vie ». Elle est « morte au monde », cette carmélite qui s’exclame : « Je ne veux plus être en vie et je suis déjà morte, plus de moi sur la terre, que l’on me cherche au Ciel, c’est mon pays où je vis396. »
153L’esprit de clôture se traduit souvent par l’expression de « fermer les yeux sur le monde ». Cette image forte imprègne le discours de la carmélite Louis de Gonzague sur le thème de la clôture :
« Le troisième chapitre de nos constitutions nous commande de ne voir personne sans voile, si ce n’est le père, la mère et les frères, voilà qui est bien rigoureux et bien austère, d’avoir toujours la face voilée afin de ne point voir et n’être point vues, c’est vraiment comme des pénitentes que l’on condamne pour quelque crime. […] elles doivent vivre dans un si grand détachement et dépouillement qu’elles ferment les yeux à tout ce qui est créé pour ouvrir seulement l’œil intérieur qui doit être fixé sur Jésus-Christ […] c’est pour cette fin que nous sommes cloîtrées entre quatre murailles et que là nous trouvant amoureusement forcées de ne plus savoir s’il y a encore un monde397 […] »
154Le thème de « fermer les yeux sur le monde » est courant au 19e siècle et au début du 20e et apparaît fréquemment dans les cantiques398.
2. Vision socio-politique des cloîtrées et apostolat
155Jacques Maître, analysant la vision politique de Thérèse de Lisieux, avance que celle-ci est marquée par l’idéologie du catholicisme contemporain, avec ses sentiments patriotiques et son enthousiasme pour le colonialisme. Mais en même temps, le sociologue souligne que les « enjeux politiques sont étrangers à la spiritualité de Thérèse », en prenant l’exemple de la dévotion au Sacré-Cœur que la sainte conçoit seulement dans sa dimension mystique399. Il distingue la mystique thérésienne de la mystique « prophétique » qui lutte pour la restauration d’un régime de chrétienté sous la forme d’une monarchie chrétienne ou même d’une théocratie avec le pape à son sommet. Nous pensons que ces deux courants, l’un à visée uniquement mystique, et l’autre à visée politique, se retrouvent dans le monachisme contemporain. Notons par ailleurs que l’information socio-politique est assez pauvre dans les cloîtres jusque dans les années 1960. Les parloirs et les informations données par la supérieure lors des récréations constituent les premières sources d’information pour des moniales qui n’ont pas accès aux journaux et aux médias. Une carmélite de Floreffe entrée en 1960 rapporte : « Nous n’avions droit à aucune revue. Les journaux étaient réservés à la Mère Prieure qui était au courant de tout. Parfois, un petit article choisi était lu à la ‘récré’ par la Mère Prieure ou l’article en question circulait entre les sœurs, le reste étant évidemment exclu. Nous restions sur notre faim400. » La sélection de la prieure délaisse généralement les sujets politiques et sociaux au profit de nouvelles religieuses, régionales ou sensationnelles. Il semblait, raconte une moniale, que la « Mère Prieure devait savoir les choses et ça suffisait », « et les sœurs n’avaient pas besoin de savoir401 ». C’est surtout la génération des années 1960 qui se formalise de ne pas être mise au courant de l’actualité, politique et sociale surtout. Une sœur entrée en 1933 rappelle son étonnement de voir une religieuse, entrée en 1961, indignée de n’avoir pas été mise au courant du décès d’un homme politique célèbre : « Je me rappelle, sœur Marie-Bernard, on ne t’avait pas prévenue de la mort d’un personnage politique important et tu étais presque scandalisée. Ça m’a fort frappée de voir ton indignation, car moi, j’étais déjà habituée de ne pas savoir402. »
156Ainsi, les moniales ne développent guère de conception politico-sociale originale. On les voit adhérer à la vision de la majorité des catholiques de leur époque. Le chapitre sur les fondations de couvents l’a montré, la franc-maçonnerie et le libéralisme sont dénoncés comme l’incarnation du mal dans la seconde moitié du 19e siècle et au début du 20e siècle. Lorsque les moniales sont appelées aux urnes, c’est sans discourir pour donner leurs voix au parti catholique. Leur soutien à la royauté est inconditionnel. Au milieu du 19esiècle, les religieuses s’engagent ainsi dans un combat contre les « ennemis de la foi catholique » : infidèles, athées, protestants, juifs… Une converse de la première génération du carmel de Namur priait ainsi : « Ô Mon Dieu, qu’il n’y ait plus de pécheurs, qu’il n’y ait plus de Juifs, qu’il n’y ait plus d’infidèles, qu’il n’y ait plus d’hérétiques, mais que tous les hommes vous connaissent et vous aiment403 ! » Une carmélite entrée en 1837 dédiait ses prières à la conversion des anglicans et des juifs : « elle aurait voulu voir revenir dans le sein de l’Église toute sa chère Angleterre, convertir les Juifs à la conversion desquels sa sœur se dévouait à Paris, chez les Dames de Sion404 ». Entrée en 1880 à Namur toujours, une sœur était obsédée par la conversion des incroyants : « Dans ses angoisses pour les âmes qui se perdent, comme elle suppliait parfois en récréation qu’on l’aide à les ramener au bon Dieu. » Sa notice rapporte ce fait qui égayait la communauté. Elle aurait entendu « à longueur de journée un voisin qui dressait son chien, répéter inlassablement ‘Donne-moi la patte’. Elle en était navrée et disait avec un accent pénétré : ‘Au lieu de dire son chapelet405’ ». La lutte en faveur de la chrétienté se concrétise aussi par le soutien au parti catholique. Une carmélite namuroise, entrée en 1862, vivait intensément le moment des élections : « Et quelle ardeur pour les intérêts de sa gloire qu’on apercevait surtout dans les luttes électorales de notre pays. Comme elle se mortifiait alors406 ! »
157Un jeu dévot composé par une carmélite de Jambes en janvier 1924 énumère les maux de la terre et les remèdes carmélitains407. Pour le baptême des noirs, la carmélite peut offrir sa foi ; pour contrer les cris de guerre, les conflits, la haine et le fiel, elle vivra l’âme en paix ; elle partagera le labeur du missionnaire en Inde pour alléger son fardeau ; elle expiera pour la « vieille Europe qui chancelle Au souffle des révolutions » et offrira la « rose empourprée » de son sang ; elle jettera la lumière de son cœur contre Bouddha et ses « sectateurs » ; elle soutiendra le « saint ermite », le père de Foucauld, et sa fondation des « petits frères du Sacré-Cœur » pour le pays des Touaregs et l’Islamisme qu’il faut tenir en échec ; elle se fera dans le silence, l’ange gardien des « anthropophages, lépreux et nomades errants » ; aux côtés de la Belgique et pour ce pays catholique, elle se fera soldat pour que souverains, hommes d’États, œuvres et écoles reposent sur ses bras408. En 1937, le communisme est évoqué dans une pièce écrite par une carmélite de Jambes. Elle raconte l’histoire d’un soldat qui, d’abord tenté par les promesses socialistes et communistes, se ravise grâce à la personnalité de l’aumônier militaire. Le communisme est présenté comme un courant porteur d’illusion, la vraie recette du bonheur étant d’être chrétien. Plus originale est la mise en scène de l’action apostolique des cloîtrées. Les carmélites déploient leurs efforts de guerre à travers une puissante « machine » qu’est la prière. Elles se présentent alors comme des « crânes femmes » qui, par leurs mortifications, leurs prières, leur amour des âmes, font marcher « droit » les soldats :
« Y paraît qu’ça marche comme une T.S.F. ; moi, j’suis en train d’flancher ici ; à Bruxelles, au petit château et vl’a qu’y a quelqu’un là-bas perdu au diable je n’sais où, qui a comme qui dirait un petit appareil qui vous redresse et vous remet du cœur au ventre. Tous les copains et moi en étions épatés. Y en a même qui ont dit : m’sieur l’aumônier, faut vous faire breveter. Mais qui ça est-il qui fait fonctionner cette machine là ? Et il nous l’a dit le lendemain. C’est tout des femmes mais des crânes femmes qui se serrent la ceinture quand tout le monde fait ripaille, qui n’ont peur ni du froid ni du chaud, et qui restent avec des livres en mains à l’heure où nous ronflons sur la paillasse ou que le monde est au dancing. Et à ce qui paraît, faut expliquer les choses, c’est justement comme cela qu’elles font marcher l’appareil. Ah ben, là, si c’est comme ça qu’elles font marcher droit les soldats du gouvernement, il doit leur payer de gras appointements ! Pas un centime a dit l’aumônier. Tout juste parce qu’elles aiment vos âmes. Ah fouchtre ça vous met d’la moutarde au nez d’pareilles déclarations. […]. Notre aumônier a fait son rapport comme quoi le régiment des femmes fait du bien au nôtre, que l’appareil est maintenu en parfait état comme qui dirait le matériel de guerre, que le service se fait par les soins du clairon, et le roi a décidé ce qui suit (il lit) : Par ordonnance ministérielle du 5 janvier 1937, octroyons pour services rendus à l’armée, la médaille militaire de 1re classe à la communauté de Jambes qui se signale entre toutes les autres et ce en particulier au clairon de 1er ordre qui a bien mérité du pays. Signé Léopold III roi des belges409. […] »
158Un autre chant, composé en 1944, traite de la conversion de l’Afrique. Il met en scène les trois rois mages, sortis de leur sommeil bienheureux par sainte Thérèse de Lisieux qui s’émeut des vicissitudes de la terre où « il y a tant d’ouvrage… ». Alors, le roi Gaspard confie le songe qu’il faisait : il voyait arriver à la porte du ciel des Éthiopiens convertis. Mais ce n’est qu’un songe, et Thérèse de Lisieux invite le roi Gaspard à aller le transmettre aux carmélites qui pourront, par leur sang et par leurs prières, le faire devenir réalité410.
159La prière apostolique puise dans les désirs, les souhaits et les besoins des moniales qui — caractéristique des cloîtrées — prennent surtout en charge les désirs et les besoins des autres. Un des aliments importants de la prière des moniales est le monde extérieur. Soit que les moniales répondent aux demandes de prières, soit qu’elles désirent convertir ou changer le monde. Mais les religieuses sont aussi mues (et émues) de l’intérieur par les « souffrances » du monde. La clarisse de Malonne Marie de Saint-Jean (Lucienne Ramart) disait : « que de souffrances, comme il faut prier411 ». Une converse du même monastère, lorsque la vieillesse l’empêche de marcher, remplace ses pèlerinages mariaux par des « tours du monde » en prière, invoquant successivement tous les besoins dont elle avait connaissance : « Elle suppléait à ses pèlerinages mariaux par une longue série de prières particulières, ‘vrai tour du monde’, comme elle disait naïvement : besoins de la Sainte Église, de la Communauté, Parents, bienfaiteurs et amis, chacun avait son mot spécial de pieux memento412. » Une autre converse, « âme apostolique », « priait toujours » et surtout en faveur des ouvriers et « contre les francs-maçons ». Une compagne ayant un jour surpris sa prière au chœur raconte qu’elle en fut touchée jusqu’aux larmes, se rappelant de ce quart d’heure comme « l’un des plus beaux » de sa vie :
« Se croyant seule au chœur, elle jetait en priant de petits cris, disant à Jésus ‘Mais, ô Jésus, qu’il n’y ait donc plus de francs-maçons ! non ! Qu’il n’y en ait plus un seul. Allons donc, Seigneur, faites que tous les cœurs vous aiment ! Pauvre Jésus, vous n’êtes pas connu ! Bon Jésus, on ne vous aime pas !’ et elle pleurait et sanglotait413. »
160La notice d’une converse raconte que sa foi en la prière était si grande qu’on « était assuré d’être exaucé » lorsqu’elle prenait en charge une intention quelconque414. Une autre converse, flamande également, avait une grande dévotion à saint Joseph et le priait avec tant de foi qu’elle disait « naïvement », lorsqu’elle n’était pas exaucée : « C’est un vrai miracle que ze [sic] ne suis pas encore exaucée415. » Ce type de prière plus combative, plus affirmée, renvoie à la façon dont les religieuses conçoivent leur action dans le monde. Ainsi, l’attitude d’abandon va de pair avec une position active et engagée « contre » tout ce qui n’est pas voulu par Dieu… ou par celle qui est en communion privilégiée avec lui.
161Si la règle est l’apostolat de la prière, celui-ci peut aussi prendre des formes plus concrètes, comme le parloir ou la correspondance. La tradition spirituelle laisse aussi l’exemple de plusieurs contemplatives qui ont prié ou écrit des lettres à des condamnés à mort. On conserve ainsi la lettre de sainte Catherine de Bologne (15e siècle) envoyée à un condamné à mort où elle l’enjoint à s’identifier au Christ dans son supplice416. La figure du condamné à mort joue un rôle important dans la conversion de Thérèse de Lisieux417. Le condamné à mort, pour lequel les religieuses éprouvent plus de compassion que de mépris, rejoue le drame de la mise à mort du Christ. Au carmel de Floreffe, Thérèse de Jésus (Marie Binon) entretient des relations épistolaires avec des prisonniers. D’une carmélite de Jambes, un chant apprend qu’elle était souvent « au téléphone pour les isolées, les esseulées », et « au parloir pour les jeunes gens du voisinage418 ».
162L’idée que la guerre et les fléaux sont des châtiments de Dieu est largement répandue au carmel de Jambes. En témoignent les extraits de lettres de la converse Marie-Christine de Saint-Joseph (Lévina Duchêne), reproduits dans sa notice nécrologique. Si le monde va mal, c’est parce qu’il a renié Dieu. Les souffrances font partie « du plan de Dieu » pour la sanctification du monde. Seule la prière, « une arme plus puissante que tous les engins de guerre les plus perfectionnés », peut permettre de vaincre le mal419. La conception du châtiment divin, associée à la demande de pardon portée par les moniales, se retrouve également sous la plume d’une carmélite qui compose, en 1944, une pièce intitulée : « Cœurs sacrés, sauvez-nous ». La dévotion au Sacré-Cœur de Jésus, développée au 17e siècle par la visitandine Marguerite-Marie Alacoque, et la dévotion au Cœur de Marie, popularisée par l’apparition de la Vierge à Fatima en 1917, se rejoignent dans un dialogue entre la visitandine et le Sacré-Cœur. La guerre apparaît d’abord comme une vengeance divine. Se découvre l’image d’un Dieu blessé qui punit le monde rebelle à son amour, mais aussi celle d’un Dieu souffrant qui revit les « affres de Gethsémani ». Le mal est nommé : orgueil, volupté, plaisirs, iniquité, « perverse liberté ». La visitandine plaide alors pour obtenir réparation et pardon. Mais le Sacré-Cœur réclame « le poids de [s]a justice » qui sert de « trône » à sa gloire et sa sainteté. « Un amour méconnu en devient redoutable, Ma fille, tu sais bien ce que j’ai fait pour eux… » poursuit-il. « Votre tendresse exquise N’a-t-elle pas des droits sur la sévérité ? » implore la visitandine, mais qui déjà se sent impuissante, et prostrée, se met à pleurer sur les âmes perdues. C’est alors qu’intervient le Cœur de Marie qui, précise la rédactrice, sera « vêtue genre Fatima ». Vierge de Tendresse, elle affirme que le châtiment n’aura pas le dernier mot car « Dieu frappe pour guérir, même les plus coupables ». Son cœur de mère, « faible cœur de femme et de fragile chair », est la source de la victoire et du retour de l’amour. L’espoir illumine la fin de la composition : la visitandine se réjouit du « nouveau plan » divin, où l’intervention de la Vierge vient mettre fin au tragique, et cette dernière encourage le pardon divin en faisant voir « ce courant de ferveur généreuse et profonde, Dans les cloîtres surtout », pour Fatima420. D’une composition plus récente intitulée « Le monde en désarroi a besoin d’être bercé », se dégage surtout la composante sensible et mystique des moniales, qui offrent leur tendresse maternelle au monde en souffrance. Elles veulent rappeler « aux frères du monde entier, que Dieu est un tendre père, dont ils sont follement aimés », les bercer dans les « bras maternels de Dieu » et « le monde ainsi, bercé sans répit, comme un tout petit, qui s’est endormi, dans les bras de Dieu son père, se trouvera tout assagi421 ». Il semble d’ailleurs que l’une des grandes caractéristiques de l’apostolat des cloîtrées est cette indifférence idéologique, avec la volonté que tous soient sauvés, « bons et méchants422 ». Un autre exemple d’indifférence idéologique se retrouve dans un chant composé en 1958 où la moniale demande à Marie de prendre dans son sein le monde entier, chefs d’États communistes, capitalistes, papes et autres encore :
« Voilà tout pêle-mêle devant toi
Est-il besoin de T’énumérer tout ce qu’il y a dans le monde ?
Prends tout, Vierge Marie
Ceux qui aiment et ceux qui font la guerre
Ceux qui souffrent persécution et ceux qui meurent de misère et de faim
Les pauvres et les riches
Les petits et les grands qui doivent devenir petits
Prends Kroutchev, Vierge Marie !
Et Mao Tsé Toung, et Kennedy
Et prends le Saint-Père, Vierge Marie, et le concile
Et les saints de toute l’Église, et nos frères séparés423. »
163Cette tendresse de l’apostolat des cloîtrées, qui se dirige vers la souffrance où qu’elle soit, renvoie au sens de l’espérance qui apparaît comme un des ferments spirituels des cloîtrées. L’espoir de « pouvoir changer les choses » envers et contre tout a été mis en valeur comme un des traits caractéristiques de l’engagement politique des mystiques424. Ainsi, Marco Bartoli insiste sur le sens aigu de la responsabilité qui meut les figures de Claire et de François d’Assise. De façon paradoxale, ce sentiment de responsabilité politique s’appuie sur une forme de faiblesse : Claire, femme malade et sans pouvoir dans son cloître, se sent en même temps « puissante », appelée à agir en faveur de la paix dans le monde. Son mode d’action est la prière d’intercession, prière qui devient un ordre en cas de faiblesse extrême : « Seigneur, garde tes servantes, parce que moi je ne peux les garder ». Il y aurait donc un rapport entre la prière et la faiblesse, souligne Bartoli. Dans d’autres circonstances, la prière pour la paix est accompagnée par le jeûne et par des liturgies pénitentielles, comme l’application de cendres sur les têtes dévoilées de ses sœurs. C’est, pour Bartoli, la conscience de pouvoir changer les choses, d’avoir prise sur la façon dont le monde tourne, malgré l’impuissance réelle, qui est le signe de l’engagement politique mystique. Claire et François se sentent responsables d’agir alors que tous les deux sont dans des situations de faiblesse du point de vue socio-politique425.
3. La clôture en images
164À la frontière entre le sens donné à la séparation et l’imaginaire de celle-ci, reprenons les observations d’une artiste contemporaine qui a travaillé sur de petites boîtes de bois ou de carton vitrées représentant des scènes édifiantes. Réalisées aux 18e et 19e siècles dans les couvents de cloîtrées, on les dénomme les « beatiho » ou « paradis ». Elles représentent les « traits immuables de la vie religieuse », le plus souvent, la religieuse priant seule en cellule. L’artiste souligne que la caractéristique de ces compositions est l’enfermement : « L’enfermement est tel que certaines cellules sont représentées sans fenêtre, tandis que d’autres n’ont ni baie ni porte ». « Est-il possible qu’elles aient été oubliées ? Peut-être n’étaient-elles plus utiles, dès lors que le choix de cette existence ne devait pas être remis en cause ? » s’interroge-t-elle426. La cellule est parfois remplacée par un œuf, image symbolique qui évoque la membrane utérine et l’enfouissement dans le sein maternel. É. Lopez relève que le « fait que la femme soit enfermée est symboliquement très riche427 ». Assez semblables aux « Paradis », les « Jardins Clos », reliquaires sous verre, sont analysés par Paul Vandenbroeck. La clôture est ce signe qui renvoie la femme au monde du « dedans » et cette image mentale est à la base de la création des « Jardins Clos ». Pour lui, ils constituent « des autoportraits spirituels des religieuses428 ».
165Clôture et chasteté sont, en monachisme, intrinsèquement liées. « Si notre sainte Mère l’Église et la sainte règle mettent tant de sollicitude et prescrivent tant de précautions pour que la clôture régulière ne soit point violée, c’est surtout pour que les moniales unies au Christ, Époux des vierges, par le lien du vœu, puissent à jamais garder en toute sûreté le trésor sacré et précieux de la chasteté enfermé dans des vases fragiles429». Dans la pratique, esprit de clôture et de chasteté convergent. Pour « préserver » ou « conserver » la chasteté, il est conseillé de « veiller continuellement sur tous nos sens, et particulièrement sur celui de la vue ; tenir nos yeux habituellement baissés, quoique sans affectation et sans contrainte ; garder dans tout notre maintien une modestie angélique et n’arrêter jamais nos regards sur des personnes de sexe différent. Ne jamais parler des amusements du monde, des établissements mondains, ou d’autres choses semblables430 ». Les usages, qui modèlent surtout l’extérieur, font de la chasteté une attitude de « modestie religieuse » dans le maintien, et de respect des préceptes en matière de clôture431. « Pourquoi faut-il vous séparer de tout ? », lit-on dans le catéchisme à l’usage des clarisses-colettines. « Parce qu’étant l’Épouse de Jésus, je dois ne chercher que lui, et éviter les rapports avec le dehors, qui, sans être de nature à me séparer de lui, sont cependant propres à m’en distraire et à m’empêcher de goûter les douceurs de mon union avec Lui432. »
166Dans les constitutions colettines, Henri de Baume parle de la chasteté comme de la seule vertu par laquelle on approche Jésus de près : « par les autres vertus, on n’approche de Jésus-Christ que de loin, par celle-ci, on l’approche de si près qu’on le touche tout à fait, on repose sur son sein comme saint Jean l’évangéliste, on entre dans ses plus grands secrets, on participe à ses plus grandes faveurs ». La chasteté permet qu’il n’y ait « rien entre vous et Dieu et que vous êtes sur la terre comme les anges du ciel. Rien ne les empêche de voir Dieu et de lui parler ; aucune image grossière ne peut vous empêcher de voir ce soleil de justice, de lui communiquer vos besoins, de lui parler à cœur ouvert et de lui faire même d’amoureuses plaintes433 ». La chasteté, liée à la clôture qui sépare, est en même temps cet état qui permet à la moniale de « toucher » son Dieu. Dans le chapitre consacré à la relation à Dieu, on approfondira ce lien amoureux qui unit la moniale à son Dieu. É. Lopez parle de ces « âmes brûlantes » qui « ont trouvé des accents uniques pour chanter leur expérience de l’amour où, d’ailleurs, la frontière entre mystique et sensualité est parfois malaisée à définir434 ». Le discours sur la chasteté, qui semble à première vue peu développé dans les écrits, se situe à cheval entre la clôture et la relation à Dieu. Dans son corps enfermé, la femme fait l’expérience d’une mort radicale et, telle une chrysalide, renaît dans sa relation à Dieu, explique É.Lopez en reprenant le style imagé de Thérèse d’Avila. Les chants, les dessins, les poésies témoignent de la richesse, voire du paradoxe de l’imaginaire de la clôture. En même temps qu’ils accentuent l’enfermement, jusqu’à mettre une moniale dans un œuf, ils traduisent le dépassement des frontières spatiales et temporelles par l’amour spirituel.
D. La clôture après 1950
167C’est toute la façon de se positionner par rapport au monde qui se trouve remise en question dans le monde catholique au cours du 20e siècle, question vaste et complexe que nous n’aborderons que par un fil emprunté à l’article de R. Bultot Aux sources du divorce entre l’Église et le monde moderne : la doctrine du mépris du monde. Pour témoigner du changement des mentalités qui touche le monde catholique au 20e siècle, il reprend les propos de J. Maritain qui, en 1966, fait état de « l’espèce d’invasion de manichéisme pratique qui affectait surtout les procédures de l’éducation et de la piété » et qui « imposait une attitude toute négativiste à l’égard du monde ». Le deuxième concile Vatican II serait venu mettre fin à cette « aberration de nature manichéenne’, ‘fruit vénéneux’ d’une longue équivoque, à ce ‘mépris quasi manichéen du monde professé dans le ghetto chrétien435’ ». Nous avons vu, pour les cloîtrées, qu’il y avait coexistence de deux attitudes : l’une plus idéologique, et « manichéenne » ; l’autre mystique, et unitive. La cistercienne C.Friedlander va dans le même sens lorsqu’elle affirme qu’une forte évolution s’est produite au 20esiècle, qui établit un fossé entre toute la spiritualité jusque Thérèse de Lisieux inclusivement et l’époque actuelle :
« En effet, cette tradition ne voit dans la vie présente qu’un passage, sans consistance ni valeur propres. Or, la vie religieuse et tout particulièrement la vie monastique est née et s’est développée dans cette tradition-là ; elle en représente même à certains égards l’expression la plus achevée436. »
168Pour la cistercienne-chercheuse, présenter la clôture comme une participation à l’anéantissement du Christ et donc une ‘expiation’ renvoie à une théologie correspondant « à l’image d’un Dieu qu’on a fort bien dit pervers437». Si ces analyses rencontrent le système de croyances de la vie monastique, notre étude montre toutefois qu’il est assumé différemment au niveau personnel. Quoi qu’il en soit, la remise en question du sens de la clôture par le monde catholique et par l’Église bouscule les assises de la vie cloîtrée.
1. La législation générale
169L’évolution de la législation sur la clôture s’opère en deux temps. Chez les clarisses, c’est la mise en place des fédérations promue par l’Église au début des années 1950 qui crée des ouvertures aptes à une remise en question du système claustral. Chez les carmélites, il faut attendre les effets du concile Vatican II. C’est de toute façon le concile qui portera la réflexion à sa maturité. La constitution apostolique Sponsa Christi du 21 novembre 1950, en même temps qu’elle rétablit les vœux solennels et la clôture papale, est accompagnée de deux instructions qui assouplissent certains points de la clôture, en particulier dans le domaine des soins de santé. Ces instructions, Inter praeclara (23 novembre 1950) et Inter cetera (25 mars 1956), prévoient, moyennant dispense du Saint-Siège, les sorties pour visite chez le médecin, l’oculiste et le dentiste438. Mais les observateurs de l’époque soulignent surtout le renforcement de la clôture devenue « papale ». Le jésuite van Biervliet qualifie les normes relatives à la clôture papale de « fouillis de prescriptions matérielles encombrantes, embarrassantes, agaçantes, compromettant une sainte liberté d’âme et souvent, entravant un travail méthodique et fructueux, tel que le voulait pour les moniales le pape Pie XII439 ».
170Le décret conciliaire sur la vie religieuse du 28 octobre 1965, Perfectae caritatis, réduit le champ d’application de la clôture papale en ne la réservant qu’aux moniales vouées uniquement à la vie contemplative. Pour les religieuses qui pratiquent un apostolat, la clôture mineure est abrogée et remplacée par la « clôture constitutionnelle ou de règle, c’est-à-dire régie par les constitutions propres à l’ordre, plus flexibles ». Le même décret invite les contemplatives qui maintiennent la clôture papale à la modifier « conformément aux besoins des temps et des lieux, avec élimination des coutumes périmées et après avoir pris l’avis des monastères ». Il y a là, selon Paul Wynants, « une ouverture manifeste » qui sera rapidement étouffée par le motu proprio Ecclesiae sanctae du 6 août 1966 qui « semble quelque peu en retrait par rapport au document conciliaire de l’année précédente » en réintroduisant notamment la « séparation matérielle » comme élément essentiel de la clôture.
171L’instruction Venite seorsum du 15 août 1969 marque un nouveau retrait par rapport aux ouvertures conciliaires. Elle maintient la législation antérieure avec quelques concessions : les grilles peuvent être remplacées par « des séparations moins contraignantes » et il est admis, quoique « avec réticence », que les moniales sortent occasionnellement pour l’assistance à des congrès et des réunions. Ce sont toujours les autorités ecclésiastiques qui sont responsables de la clôture et non les supérieures des moniales, ce qui est critiqué notamment par le jésuite A. de Bonhomme et le père L. Renwart440. En revanche, la cistercienne Colette Friedlander émet un jugement plus nuancé que ses confrères masculins. Les freins dans l’adaptation se justifient à un moment où la vie monastique était vivement contestée « au nom de l’engagement actif au service du prochain ». Les autorités romaines auraient donc cherché à empêcher que les adaptations se fassent « dans un climat propice à des changements inconsidérés ». Jusqu’à la promulgation du code de droit canonique en 1983, les moniales qui veulent se lancer dans des expériences qui ne cadrent pas avec la législation sur la clôture papale sont invitées à adopter la clôture constitutionnelle. Mais, selon C.Friedlander, rares sont les moniales qui prennent cette voie, de peur « de ne plus être considérées comme des contemplatives » ou de « se voir imposer un apostolat extérieur ».
172Le code de 1983 fait la distinction entre les moniales « intégralement ordonnées à la vie contemplative » qui suivent la clôture papale et l’instruction Venite seorsum, et les autres religieuses qui suivent la clôture constitutionnelle. Ce qui est à nouveau contesté, c’est la discrimination hommes/femmes : « Les moniales demeurent les seules religieuses à faire l’objet de dispositions spéciales uniquement en tant que femmes. » La législation sur la clôture constitue, dans l’ensemble du droit universel de la vie consacrée, le seul cas de discrimination directe entre hommes et femmes, souligne C. Friedlander. Dans les monastères à clôture pontificale, les entrées et sorties restent subordonnées à la permission de l’évêque diocésain. Les propositions de moniales envoyées à la Congrégation des Religieux voulant donner aux supérieures des moniales la responsabilité de la clôture ne sont pas acceptées.
173En 1994, un synode est tenu dans le but de réviser l’instruction Venite seorsum. Il débouche sur l’exhortation apostolique post-synodale Vita consecrata de 1996. C’est le modèle de la recluse qui est valorisé et réservé aux femmes. L’enfermement apparaît comme la valeur par excellence définissant toute vie monastique féminine. Pour C.Friedlander, ce document remet à l’honneur la dimension uniquement ascétique de la vie claustrale :
« Dans la ligne de la grande Tradition, les Pères du synode envisagent la clôture comme une institution ascétique synonyme de séparation du monde, de solitude et de silence, le tout en vue de la vie de prière. Vita consecrata valorise l’enfermement en lui-même, en le qualifiant de participation à l’anéantissement du Christ et de manière de vivre la Pâque. Il s’agit en fait d’une extension illégitime à l’ensemble de la vie monastique et contemplative de ce qui constitue la perspective spirituelle très particulière propre à la vocation des reclus ou recluses. [note 10 : Dans l’Église latine, un certain écho de cette tradition, qui semble spécifique au monde celtique et saxon, pourrait être relevé uniquement chez les clarisses]. L’exhortation, semble-t-il, ramène indûment toutes les moniales à ce modèle. Leur désignation systématique par le terme de ‘cloîtrées’ pourrait même induire à penser que la claustration suffirait à les définir et constituerait la dimension essentielle de leur vocation. Soulignons en outre que ce modèle réclusionnaire apparaît en pratique réservé aux femmes, car il n’en est nullement question dans les passages généraux relatifs à la vie monastique et aux instituts contemplatifs. »
174Toutefois, la même observatrice soulève que, pour la première fois, des nuances sont apportées dans les formes de clôture. Entre la clôture papale et la clôture constitutionnelle, on distingue la clôture monastique propre à la famille bénédictine et cistercienne : « Il convient de le souligner, car c’est la première fois, à notre connaissance du moins, que la clôture monastique est considérée comme une forme spécifique, au lieu de se voir gommée en étant soit englobée dans la clôture papale, soit maladroitement identifiée à une clôture constitutionnelle destinée à permettre la prise en charge d’œuvres apostoliques. »
175Enfin, sur le terrain, les situations sont très variables. L’attitude de l’évêque est en ce domaine prépondérante : « là où les évêques se sont montrés ouverts, la manière de vivre la clôture a beaucoup évolué depuis trente ans. […]. Sans doute, d’ailleurs, ces progrès sur le terrain ont-ils encouragé [les moniales] à s’accommoder de la législation en vigueur, puisque ‘c’est la vie qui compte’, en entretenant l’espoir qu’on ne reviendrait pas en arrière441 ». Ainsi, quoi qu’il en soit de la législation sur la clôture considérée comme restrictive, la situation sur le terrain a considérablement évolué depuis trente ans. On passe à une relation avec le monde « moins timorée », les marques matérielles de la clôture sont allégées, voire supprimées, les relations avec la famille sont plus fréquentes, les médias entrent dans les cloîtres442. Pour les clarisses françaises, É.Lopez parle d’une « nouvelle pratique de la clôture », avec la sortie pour sessions, la visibilité des moniales au chœur pendant les offices, l’accueil, la maîtrise des moyens de communication443. Mais la cistercienne rappelle que « les mutations ne sont durables que si elles s’incarnent tôt ou tard dans le droit ». Si la prudence romaine se justifiait en 1969 pour Venite seorsum, elle ne se justifie plus en 1996, lorsque les moniales ont prouvé leur « modération » en matière de clôture : « La modération dont les moniales ont fait preuve — modération suffisante, on l’a vu pour qu’on les taxe ici ou là de timidité — devrait inciter à les laisser gérer elles-mêmes une clôture qu’elles ne cherchent nullement à supprimer ou à atténuer à l’excès. La crainte des abus possibles ne semble donc pas être la raison déterminante444 ». En définitive, le problème crucial ressort davantage du rapport homme/femme dans l’institution que de la clôture.
2. Les clarisses et l’ évolution à Malonne : l’adoption de la clôture constitutionnelle
176Revenons deux décennies plus tôt, avec la constitution de la fédération Sainte-Claire dans les années 1950. De fait, chez les clarisses belges, la réflexion sur le sens et les modalités de la clôture se manifeste dès cette époque. Ce qui préoccupe le plus les abbesses lors de la première réunion fédérale de novembre 1953, c’est la question des usages en matière de parloir445. Les abbesses rassemblées constatent le manque d’uniformité en matière d’usages, notamment en ce qui concerne l’ouverture des rideaux lors des parloirs : « Point de vue grille et voile de clôture : un monastère ouvre pour les parents ; un autre ouvre parfois le volet, mais alors on met le ‘voile de clôture’ (alors pour qui est la pénitence ?). » D’autres abbesses insistent plutôt sur le « sens social » de la séparation matérielle. Compte tenu de « l’évolution des mœurs », elles désirent l’ouverture des rideaux de la grille du parloir pour les visites « des parents (père, mère, frères, neveux et nièces) ainsi que dans d’autres cas exceptionnels et utiles ». Elles remettent en question le port du voile de clôture au parloir et lors de l’entrée des ouvriers : « que ne soit plus obligatoire, dans ces cas, ainsi que lors de l’entrée des ouvriers, le voile de clôture446 ». En mai 1955, le conseil fédéral décide des « modifications souhaitables » concernant le parloir et les entrées : il s’agit de la suppression du voile de clôture, de l’ouverture du rideau du parloir « pour les pères, mères, frères et sœurs des religieuses, et dans des cas exceptionnels au jugement de l’abbesse », et de réduire à deux le nombre de religieuses pour accompagner les étrangers en clôture. Le rideau peut rester ouvert « tout le temps de la visite si celle-ci est de durée raisonnable (une heure ou deux heures) » et, dans le cas d’une visite qui dure une journée, seulement « pendant une partie de la visite ». Le nombre de visites annuelles doit aussi être revu : « Il sera nécessaire que chaque monastère revoie ou établisse une réglementation des visites que reçoivent les sœurs, laquelle, tout en tenant compte des nécessités affectives des familles, préserve le recueillement et l’esprit de détachement des sœurs447. »
177Pour la prière apostolique, les moniales remarquent qu’il est plus stimulant et plus efficace de bien connaître la situation du monde que de rester dans l’ignorance : « Sans doute, en théorie du moins, il est vrai qu’on peut prier pour toutes les intentions du monde en les ignorant mais… en fait, nous prions beaucoup mieux quand nous savons concrètement l’urgente nécessité de notre prière et de notre immolation448. » Cette volonté d’avoir une connaissance plus « concrète » du monde pose la question de l’ouverture aux médias, mais, avant le concile, la position de la fédération y est plutôt défavorable : s’il faut mieux connaître les besoins de l’Église et de la société, il n’est pas question que le monde, « les mondanités », « les jouissances illégitimes » pénètrent dans le couvent. Concernant la circulaire du 6 août 1957 de la Congrégation des Religieux sur l’usage de la radio et de la télévision, le conseil fait le bilan suivant : si l’usage de la télévision est complètement à écarter, la radio peut être « tolérée ». Le seul usage entrevu serait l’écoute des « discours du pape », mais le conseil trouve qu’il est préférable d’en faire la lecture au réfectoire. « On dira : mais entendre la voix du saint Père ! Sans doute, il est émouvant d’entendre la voix du saint-Père, mais ce n’est pas sur du sentiment que se bâtit notre vie de contemplatives et ce n’est pas cela qui nous aidera à mieux prier449… » Le conseil dissuade aussi l’emploi de la radio pour « des conférences religieuses hebdomadaires » ou des « des messes chantées », ce qui ne ferait que « prendre du temps de prière et réveiller en nous le goût dangereux de la dissipation ». Que le « monde » n’entre pas chez celles qui l’ont quitté : « ce serait ‘regarder en arrière’ et diminuer le sacrifice450 ». De même, il est déconseillé d’accepter en clôture les photos, enregistrements ou films que les familles ou les prêtres voudraient montrer451. La démarcation d’avec l’extérieur reste tranchée, et le rapport se conclut par cette exhortation : « Il faut du courage pour s’opposer à ce qui plaît à la majorité ».
178Après le concile Vatican II, les moniales sont appelées à approfondir davantage ce point sensible du rapport au monde. En 1965, dans un récapitulatif sur l’aggiornamento, l’abbesse de Huy écrit que, si l’on veut « sauver l’institution contemplative traditionnelle, il faut reconsidérer profondément sa relation positive à la société actuelle ». En insistant sur la « séparation du monde », on oublie l’autre exigence de la vie contemplative qui est sa « communion au monde ». Or, poursuit-elle, « les signes sociaux de communion au monde répondent mieux que les signes de rupture aux intentions avouées de Vatican II ». La séparation totale du monde doit s’entendre comme « séparation totale du monde mauvais », mais certainement pas comme « séparation de la communauté humaine » qui est d’ailleurs impossible452. L’idée selon laquelle une connaissance plus concrète du monde enrichit la prière apostolique fait son chemin : « Notre vie de prière […] suppose une connaissance concrète, profonde de la vie de l’Église, de ses besoins actuels. On a dit : ’nous n’avons pas besoin de connaître les intentions, il suffit que nous priions, que nos offrions tout à toutes les intentions. En théorie, oui, ‘il suffit’, mais en fait, c’est négliger, ignorer que notre vie intérieure s’appuie et part d’un être humain […]. Nous prions et offrons beaucoup mieux pour ce que nous connaissons ». Dans un rapport de mère Marie de Saint-Jean (Lucienne Ramart), abbesse à Malonne jusqu’en 1957 puis à Hannut à partir de 1962, il est souligné que l’apostolat ne doit pas seulement se focaliser sur l’Église, ses missions, la crise sacerdotale, la conversion de l’Islam…, mais, « au-delà de la vie de l’Église, tout doit nous intéresser […] : l’évolution des sciences, l’ascension de la classe ouvrière, les directives données à certaines catégories de personnes […] la question de logement, des sports ou des loisirs453. »
179En juin 1964, le conseil fédéral revoit la directive de 1958 sur l’utilisation des médias : « Il sera fait une mise au point des dispositions précédentes qui s’avèrent trop peu nuancées : les disques et le magnétophone ne semblent pas devoir faire tort. Par contre, les appareils de radio et de T.V. ne seront pas admis dans les monastères454 ». Toutefois, il est précisé qu’il ne sera pas question d’écouter de la musique profane, mais seulement de la musique religieuse « si les disques sont prêtés ». On trouve un commentaire sur l’actualité musicale du moment455, accompagné du conseil suivant : « attention à ne pas se laisser entraîner à une audition fréquente qui ne concorde pas avec une vie contemplative authentique456 ». Lors de l’assemblée fédérale de 1968, cinq monastères proposent qu’une « roulante » soit organisée dans chaque couvent pour l’écoute du journal parlé qui serait ensuite divulguée aux autres membres de la communauté : « cela aide à l’incarnation de la prière ». Détail amusant, ces communautés proposent, pour renforcer le lien avec le monde, de placer « un globe terrestre » dans le chœur qui serait « éclairé pendant l’office » et « une planisphère dans la pièce la plus fréquentée par toute la communauté457 ».
180Les modifications concrètes de la clôture matérielle sont officialisées en 1965. La fédération demande aux évêques de faire valoir, auprès de la Congrégation des Religieux, les demandes suivantes : de n’avoir qu’une seule grille au parloir ; de supprimer l’auditrice au parloir ; de supprimer la fonction de lectrice du courrier de l’abbesse ; enfin, d’accorder l’aménagement d’un second parloir458. La fréquence des transferts de moniales entre couvents augmente après le concile et le conseil fédéral se voit obligé de faire remarquer aux abbesses qu’il faut « veiller à ne pas multiplier les transferts, sinon pour une raison sérieuse d’entraide fraternelle » afin « d’éviter des états d’instabilité459 ». En 1969, on retrouve, dans le rapport du conseil fédéral, des propos qui vont dans le même sens : « Depuis quelque temps, il y a eu assez bien de sorties de moniales et de séjours provisoires plus ou moins justifiés dans d’autres monastères ; cela crée un état d’instabilité qui peut faire perdre les valeurs de vie contemplative460. » De fait, les demandes de transfert dépassent la seule volonté d’entraide entre couvents. Pour reprendre les propos de l’assistant fédéral, on retrouve aussi parmi les sortantes « celles qui s’ennuient derrière leurs grilles461». Le conseil fédéral n’est pas aveugle à ce sujet, mais cette « disparition » de la clôture aurait le mérite de révéler les « vraies contemplatives » : « La clôture disparaissant fait la vérité sur beaucoup de choses : les vraies contemplatives à ce moment-là se révèlent, et aussi celles qui s’ennuient derrière les grilles ; nous devons les prendre avec humilité, et avancer avec elles462. »
181On retrouve, à Saint-Servais et à Malonne, les mêmes lignes d’évolution après le concile. Toutefois, le monastère de Saint-Servais n’ayant pratiquement pas de jeunes (les dernières professions ont lieu en 1947 et en 1969), les évolutions auront moins de poids. Quant à la communauté florissante de Malonne dans les années 1960-1970, celle-ci prend très à cœur les rénovations post-conciliaires. Son parcours est particulier en ce sens qu’elle va adopter la clôture constitutionnelle463, s’opposant en cela à la large majorité des clarisses wallonnes, mais aussi du monde entier. En 1968, le porte-parole de l’ordre franciscain, la Lettre aux moniales, informe les clarisses de la possibilité d’adopter la clôture constitutionnelle : « Outre la clôture papale, le décret prévoit une clôture constitutionnelle, étant sauve la qualité de moniales, bien qu’elles n’aient pas cette institution ascétique qui correspond singulièrement à la vocation spéciale des moniales. » Il entrevoit la possibilité que plusieurs types de clôture existent dans la famille franciscaine, selon « les diversités historiques, spirituelles et locales464». Deux ans plus tard, les positions du général franciscain sont plus réservées quant à la disparition de l’ancienne forme de clôture. Celui-ci souligne que les clarisses ont cette particularité que la clôture a fait l’objet d’un quatrième vœu ; il engage dès lors celles-ci à se conformer « en tout » à l’instruction Venite seorsum465. En 1979, le général de l’ordre franciscain encourage les clarisses à adopter la clôture papale et non la clôture constitutionnelle : « Nous pensons que au moins pour les clarisses, on doive conserver la clôture papale, comme il fut décidé par le concile Vatican II466. » Ainsi, le choix des clarisses de Malonne ne reflète pas celui des clarisses en général. Quels sont les éléments qui ont amené les Malonnaises à choisir la clôture constitutionnelle ?
182L’évolution en matière de clôture s’inscrit dans le rejet de « l’esprit de caste » propre au monachisme. Aujourd’hui, écrivent les moniales de Malonne, « nous ne pouvons plus nous sentir comme des êtres à part, mis sur un certain piédestal à cause d’une vocation en soi plus haute ou plus parfaite que d’autres467 ». Plus tard, elles demanderont même que, dans les constitutions, soit supprimée « la prééminence de la virginité consacrée par rapport au mariage468 ». Parallèlement, l’allégement de la clôture est justifié par le constat des effets pervers d’une clôture trop stricte :
« À côté des trésors de vie spirituelle qui ont été vécus dans les monastères féminins (effacement, don de soi, générosité, gratuité de l’amour), il faut signaler aussi les ombres qui ont dénaturé et jeté un discrédit certain sur notre forme de vie. Les prescriptions multiples concernant la discipline de la clôture notamment, ont engendré des maux très graves, tant spirituels que psychiques et même physiques, et ceux-ci ont marqué la vie de nombreuses moniales. Toutes ces conséquences malheureuses d’une loi trop scrupuleusement appliquée, ainsi que l’y incline le tempérament féminin, toutes ces déviations entretenues inconsciemment par une observance trop rigoureuse dépassant souvent la pensée du législateur masculin, tout cela, […], c’est avec peine que nous nous devons de vous le communiquer469. »
183Les revendications de la communauté de Malonne en matière de clôture s’organisent autour de trois axes : l’égalisation des mesures entre hommes et femmes ; la suppression des marques matérielles de la clôture ; le contrôle des sorties par l’abbesse.
184Dès 1966, la communauté exprime le vœu que la gestion de la clôture revienne à la supérieure : « que l’abbesse, gardienne de la vie contemplative, soit à l’exemple de sainte Claire, maîtresse de la clôture470 ». En 1969, l’abbesse de Malonne formule à nouveau le souhait que la clôture féminine soit « semblable à celle des ordres masculins de vie contemplative ; que l’abbesse soit gardienne et maîtresse de la clôture dans son monastère471 ». En prévision de la réunion du comité de l’U.R.C. en janvier 1970, la communauté malonnaise formule les mêmes souhaits, preuve qu’elle reste en attente de la concrétisation : « que l’abbesse ait plus d’autonomie pour juger de l’opportunité des cas à résoudre472 ». Face à la nouvelle législation établie par la Congrégation des Religieux, Venite seorsum, les réactions témoignent clairement du refus d’une discrimination entre hommes et femmes en matière de clôture :
« Pourquoi une législation spéciale réservée aux moniales ? Il ne convient plus aujourd’hui de tolérer une discrimination vis-à-vis de femmes capables de porter leurs responsabilités au même titre que les hommes ! Ou bien faut-il croire que les hommes ne sont pas à même de mener une vie contemplative réelle ? Dans les deux cas, la pensée de l’Église est ambiguë et ne semble pas inspirée par l’Évangile473. »
185L’évolution du statut de la femme revient encore à plusieurs reprises en 1975, avec la remarque suivante : « Nous pensons que dans nos pays, la femme est suffisamment mûre pour remplir sa fonction de gouvernement à part entière474. » Une nouvelle conception de la séparation matérielle s’affirme, une séparation qui doit viser « le monde » et non les personnes. En vertu de ce principe, toutes les marques matérielles de séparation avec les personnes au parloir et au chœur sont à supprimer475. La première transformation de la clôture matérielle a lieu en 1959, lorsque les carreaux des grilles du chœur sont agrandis. Le 18 juin de la même année, ce sont les grilles du parloir qui sont remplacées : « Les deux anciennes grilles noires font place à deux nouvelles grilles de bois clair476. » En 1961, la communauté décide de la construction d’un second parloir : « Depuis plusieurs années, nous déplorons les difficultés qui résultent d’un ‘unique’ parloir. Nous devons souvent nous excuser auprès de visiteurs ou ecclésiastiques du refus de les accueillir, faute de parloir. Et même simplement, si une religieuse est ‘visitée’, la supérieure ne peut recevoir une personne qui se présente, vu l’impossibilité d’accès ailleurs477. » En octobre 1967, la communauté demande la suppression des grilles de clôture : « Elles ne sont pas un élément majeur pour la sauvegarde de notre vie contemplative, et ceci est bien prouvé par les monastères d’hommes qui ne connaissent rien des rigueurs et des minuties de la clôture féminine et assument pourtant et réellement leur fonction contemplative dans l’Église. » Le parloir devrait être un local « neutre » où « les personnes en visite et les moniales pourraient s’y trouver ensemble ». La communauté malonnaise propose l’abolition des « éléments désuets : tour, rideaux, doubles-portes, doubles-serrures ; brises-vues, voiles de clôture etc. » ; des « prescriptions relatives aux entrées des confesseurs, médecins, ouvriers » et des « prescriptions suivantes : auditrice, sorties à deux, accompagnatrice pour accueillir les étrangers au cloître, l’ouverture de la correspondance épistolaire etc. ». Toutes ces prescriptions extérieures doivent être remplacées par une structure intérieure, une « clôture interne478 ». En 1968, au cours d’une retraite, la grille du chœur est retirée : « On enlève la grille du chœur… avec beaucoup d’humour ! » De novembre 1968 à février 1969, des travaux sont en cours pour enlever le muret qui séparait le chœur de la chapelle. Désormais, « pour les célébrations liturgiques, les laïcs entrent dans le chœur des sœurs479 ». Au niveau liturgique, elles revendiquent « le rassemblement d’une communauté homogène autour de l’autel » et la suppression des « barricades lors des rencontres ». Plus que tout, elles recherchent la sortie de l’isolement et l’entrée dans l’échange, notamment avec la communauté villageoise480. En 1973, « le mur de séparation du parloir est enlevé définitivement481 ». Pour les sorties, en plus de celles permises par les normes existantes, les moniales font valoir, dès 1967, deux motifs supplémentaires : la sortie pour formation et la sortie pour visiter les sœurs ou les parents gravement malades ou mourants. De fait, les rapports avec la famille apparaissent de plus en plus comme un motif valable de sortie. Les moniales mentionnent la nécessité de leur « présence réconfortante » dans des cas difficiles : un proche « atteint par la dépression nerveuse si fréquente de nos jours », la maladie incurable, le veuvage, et demandent l’autorisation de rendre une courte visite annuelle aux parents :
« Dans le même contexte de devoir filial, ne peut-on autoriser aussi que chaque sœur puisse rendre une courte visite annuelle à ses parents, indépendamment de leur état de santé ? L’expérience actuelle des violents conflits de génération à l’intérieur des familles et des situations tendues et parfois dramatiques qu’elles engendrent, nous invite à croire que des relations plus normales et plus ouvertes envers la famille proche, seront plus bénéfiques que la rigueur d’une loi trop absolue. L’expérience provoquée par les retours occasionnels des postulantes lors des élections nationales nous l’a montré fréquemment. Les rapports parents, enfants, se détendent et cela est bon pour l’équilibre de chacun482. »
186Le ‘Quitte ton père et ta mère’ évangélique aurait été pris de façon trop radicale, témoigne une moniale :
« Il y avait un aspect de rupture avec la famille, qui se basait sur l’Évangile, qui a été compris d’une façon beaucoup trop littérale, parce que, ‘quitter son père et sa mère’, Jésus te dit ça, mais c’est quand il guérit. Je crois que c’est avant tout une parole de croissance pour Jésus. Alors il y a aussi l’aspect réel de séparation avec la famille puisqu’on venait dans un lieu cloîtré, dont on ne pouvait pas sortir, n’empêche qu’on a pris ça très littéralement483. »
187Qu’on ne soit plus dans un monde de « chrétienté », comme le définissent elles-mêmes les moniales, soulève de nombreuses questions. Les clarisses se demandent comment interagir avec les demandes familiales, notamment la responsabilité au sein de la fratrie lors de l’accompagnement des parents âgés. Que la religieuse soit automatiquement écartée des charges familiales n’est plus une évidence comme auparavant.
188En 1970, la communauté recense les motifs légitimes de sortie qui se multiplient : « santé physique et psychique ; formation tant spirituelle que professionnelle, liberté de conscience, rencontres au sein de l’ordre, des unions… ; obligations sociales, service d’accueil, dans l’enceinte du monastère ; urgences de tous ordres (Eucharistie non assurée au monastère, affaires, secours occasionnels484…) » Les clarisses iront jusqu’à demander de pouvoir sortir uniquement pour se détendre : « L’espace offert pour une marche réelle, vraie source d’équilibre pour la santé, est pratiquement nul dans nos monastères de clarisses. Une promenade de quelques kilomètres ne peut-elle être autorisée occasionnellement dans un lieu propice au recueillement comme le sont encore de nos jours des sentiers solitaires à travers la campagne environnante485 ? » Dans la pratique, on dégage six motifs de sortie récurrents : les soins de santé, la participation aux réunions fédérales, épiscopales et de l’U.R.C., le suivi de cours, les visites auprès de la famille ; l’achat de matériel « pour le travail rémunérateur » ; les sorties pour répondre à l’appel d’instances officielles : impôts, pensions, notaire, élections. Les moniales sont tenues de faire chaque année un rapport au visiteur diocésain ; ce qui nous permet d’avoir un bilan chiffré des sorties annuelles. On constate que l’assistance aux réunions organisées par l’évêché (16 sorties pour toute la communauté en moyenne pour les années 1969-1973) et l’assistance aux réunions organisées par l’U.R.C. (10 sorties) constituent les deux principaux motifs de sortie, en dehors des soins de santé, non évaluables ici486. Pour comparaison, notons qu’à Saint-Servais les sorties sont plus réduites qu’à Malonne487, principalement du fait qu’il n’y a pas de responsables dans les organes de la Fédération et de l’U.R.C. Mais on voit aussi que les sorties pour rendre visite aux membres de la famille sont, à Saint-Servais, quasi-inexistantes.
189Les souhaits de la communauté de Malonne étant incompatibles avec la législation en place sur la clôture papale, et les demandes de dérogations adressées à la congrégation des religieux se voyant refusées, celle-ci va progressivement se faire à l’idée d’adopter la clôture constitutionnelle. En novembre 1971, l’abbesse écrit : « Clôture papale ou constitutionnelle. Le temps sans loi n’est plus. Les expériences sont terminées. Si on garde la clôture papale, il faut l’observer. En pratique, on va être confronté à des choix de communauté488. » En 1972, elles se décident à demander la clôture constitutionnelle489. En juin 1974, elles écrivent que leur « cheminement vers la clôture constitutionnelle commence à prendre corps490 » et, en octobre 1974, elles font parvenir à Rome « un projet de clôture constitutionnelle » qui est approuvé en 1975491. Cette demande de la clôture constitutionnelle ne s’est pas déroulée facilement. Au moment de rendre les statuts définitifs, les moniales avouent : « Voici le texte du Statut de clôture constitutionnelle revu et corrigé par Mgr Toussaint lui-même, après une visite qui nous a manifesté une fois de plus combien le dialogue était extrêmement difficile… Nous en sommes quand même sorties dans un climat de relative détente, et, malgré les menaces, nous espérons que la note jointe au statut sera encourageante et positive492. » Le 30 octobre 1975, les moniales soulagées écrivent dans les chroniques : « Mgr Toussaint nous envoie la réponse favorable de Rome à propos des nouveaux statuts sur la clôture. Ainsi, nos différends en matière canonique sont résolus493 ! » Toutefois, au moment de renouveler ces statuts provisoires, l’abbesse est à nouveau inquiète : « Nous espérons, bien entendu, que la faculté accordée en 1975 nous sera renouvelée en 1982 malgré l’affirmation réitérée par la S.C.R.I.S. du maintien de la clôture papale comme norme officielle. » Mais leurs statuts sont à nouveau acceptés494.
3. Les carmélites et l’ évolution à Floreffe : conservation de la clôture papale
190Les archives de la fédération des carmélites n’ayant pas pu être consultées, les renseignements concernant son action pendant la période conciliaire sont plus fragmentaires. Il est toutefois certain que cette dernière ne se met en place qu’après le concile. Son rôle deviendra effectif au moment de la révision des textes normatifs. Concernant la clôture et le rapport au monde, la fédération offre une vue générale de la position des carmélites wallonnes. Lorsque la possibilité est offerte aux moniales d’adopter la clôture constitutionnelle, la fédération se positionne clairement en faveur de la clôture papale : « Nous aurons à cœur de demander que soit maintenue pour le carmel la clôture papale avec les normes indispensables pour effectivement la garantir, afin que soit toujours assurée aux carmélites cloîtrées la vie de ‘désert’ en silence et solitude comme l’exige notre vocation propre, dans un cœur à cœur continuel avec Celui qui est notre Tout495. » Face aux désirs d’assouplissement de la clôture manifestés par certaines carmélites, la présidente propose que celles-ci soient orientées vers les carmels apostoliques. Les remises en question de la clôture stricte sont perçues par la présidente comme un amoindrissement de la perfection carmélitaine : « […] Ces quelques sœurs ‘pèsent’ dans leur communauté et — ‘illusion des faibles et des médiocres’ (pardon de l’expression) — elles tentaient de rabaisser le groupe à leur niveau, souhaitent certaines ‘facilités’, certains dérivatifs, bref, une vie moins exigeante. […]. Mais comme je l’ai dit à Monseigneur l’Évêque de Tournai, qui m’a approuvée : ce n’est pas la Montagne qui doit s’abaisser, ce sont les carmélites qui doivent la gravir496. » On voit que la fédération n’est pas prête à abandonner les exigences claustrales telles qu’elles ont existé jusqu’ici.
191Un autre élément essentiel qui joue dans le rapport à la clôture est l’attachement affectif, spirituel et juridique des carmélites à la branche masculine de l’ordre. Les carmes ont la réputation, parmi les ordres religieux, d’être de farouches défenseurs de la clôture des moniales. À ce sujet, on apprend que la congrégation des religieux renferme en son sein « un bon noyau de carmes qui, surtout en ce qui concerne la clôture et donc aussi la grille, semblent avoir décidé de faire mourir par asphyxie les ordres de cloîtrées497 ». La figure de l’assistant fédéral tient un rôle important. Chez les carmélites wallonnes, cette fonction remplace l’ancienne juridiction du provincial. Dans les premiers temps, l’assistant fédéral est réputé comme assez ouvert face aux volontés d’expériences. Mais à partir des années 1970, il fait davantage écho aux désirs de claustration. Il soutient que son « attitude ferme par rapport à la clôture est encouragée par les carmélites elles-mêmes » :
« Quoique lucides quant au style désuet et plutôt négatif des normes et, comme vous le dites, à leur teneur rigoriste, en général les carmélites trouvent qu’à une époque où Dieu est offensé par tant de défections de consacrés, par tant de contestations à tous les échelons, il leur revient de compenser en acceptant, en esprit d’obéissance, les légers sacrifices que proposent ces normes. Je crois, Monseigneur, que les carmélites qui m’écrivent ou me parlent dans ce sens ont une âme attentive aux impulsions divines. L’insistance de certaines a une résonance qui, à mon avis, relève des touches de l’Esprit. Ce sont elles qui ont entendu l’appel mystérieux ; à elles de le suivre avec leurs moyens propres, qui différeront peut-être légèrement d’un carmel à l’autre498. »
192À partir de 1980, la volonté de « clore » le temps des expériences amène les carmes à être plus soucieux du respect des normes en vigueur. En 1982, l’assistant constate, parmi les couvents de la fédération, une « divergence d’idées surtout quant à l’application et la pratique de la clôture ». Il précise qu’« on ne peut pas parler de réels abus dans le sens que l’on négligerait absolument la vie carmélitaine en solitude, mais le temps flou des expériments a laissé des traces en quelques monastères ». Il condamne des « sorties peut-être trop fréquentes pour assister à des conférences ou à des sessions » ; un « élargissement des cas d’espèce pour des retours en famille ou pour les entrées en clôture » ; le ‘recul’ facile des limites de la clôture en certaines occasions. En outre, il insiste pour qu’une législation vienne réglementer l’usage de la télévision499.
193Au carmel de Floreffe comme ailleurs, l’allègement du dispositif matériel est la première manifestation de l’évolution en matière de clôture. Le 14 août 1963, les grilles externes des parloirs sont débarrassées de leurs piques500. En mars 1970, le groupe des jeunes sœurs demande de « supprimer la grille du parloir, au moins à titre d’expérience501 ». Les grilles ne sont pas supprimées, mais « aérées » au parloir du bas. En octobre 1970, les grilles du parloir du haut sont « espacées502 ». En février 1973, les grilles des deux parloirs sont remplacées par une table fixe503. Une religieuse écrit à ses parents : « Les ouvriers ont abattu le mur de séparation avec la petite grille, et nous allons simplement remettre une table tout au long, pour marquer une certaine séparation, car il la faut toujours […]. Inutile de dire que les jeunes sont enchantées et aussi certaines autres504. » En 1974, les jeunes demandent que la table fixe soit également enlevée505, mais cette requête n’est pas accordée. Cependant, lorsque les trois parloirs sont occupés, les carmélites peuvent recevoir leur famille dans les pièces jadis réservées aux tourières, où il n’y a guère de séparation. En novembre 1968, la double grille du chœur est remplacée « par une nouvelle grille en aluminium à simples barreaux pouvant s’ouvrir en sa partie centrale pendant les célébrations506 ». Au départ, la grille est ouverte pour la messe, mais les mères tiennent à ce que le rideau — moins épais qu’avant cependant — reste fermé. À partir de septembre 1969, les rideaux et les grilles sont ouverts pendant la messe. À la suite de ce changement, une jeune carmélite écrit : « Au chœur, nous ne devons être séparées du sanctuaire ni par des grilles, ni par des barreaux, ni par un mur, ni non plus par des châssis ou des voiles. […]. Il est tellement […] plus épanouissant d’être en pleine communion avec le sanctuaire507. »
194En 1971, le grand tour de la porterie et le tour de la sacristie sont remplacés par une grille en bois ouvrante. Une jeune sœur, sacristine, écrit à ses parents : « Nous avons remplacé le tour de sacristie par une simple porte et une grille ouvrante de sorte que je peux actuellement communiquer plus aisément avec le prêtre et sœur Aimée de Marie. J’en devenais gênée508. » En 1978, le quartier du tour est aménagé en vue d’accueillir des prêtres et des retraitants. Les six cellules des anciennes tourières sont transformées en « trois pièces plus grandes : 2 chambres à donner aux retraitants, et un petit parloir, près de tour509 ». Le couvent compte dès lors trois parloirs. En novembre 1972, la communauté établit la liste des motifs de sortie estimés valables. Outre les soins de santé et les élections, sont retenues les visites aux parents gravement malades ou la présence aux funérailles et la participation à des sessions de formation « environ une fois par an510 ». Le contrôle de la correspondance par la prieure avait été supprimé dès juillet 1968.
195Ces changements matériels s’accompagnent d’une vaste réflexion, mise en œuvre dans le cadre de la révision des constitutions. On apprend, des échanges communautaires, que les carmélites de Floreffe ont soif d’intériorité, de spontanéité, de souplesse, de confiance, et rejettent l’accessoire, la « matérialité », le minutieux, le « à la lettre », le dissimulé et le détail. Lorsque les constitutions de 1986 — produit de la Congrégation des Religieux et non plus du premier ordre en concertation avec le deuxième — arrivent à Floreffe, les sœurs se plaignent de la restauration de la clôture rigoureuse avec ses marques matérielles : « Ce texte ne tient pas compte ou si peu de l’évolution post-conciliaire, ni de la mentalité de nos régions511. » Favorables à une clôture moins « surveillée », celles-ci n’iront pas jusqu’à demander le statut de clôture constitutionnelle qui les dégagerait de l’autorité de Rome. Mais cela aurait-il été possible au sein du carmel qui ne voit d’autres possibilités, pour ses moniales, que de suivre la clôture papale ? Cela n’empêche pas les religieuses, sur le terrain, de poursuivre selon la ligne amorcée après le concile Vatican II. Il n’a pas été question, pour se mettre en règle avec les nouveaux statuts, de remettre sur pied une clôture matérielle plus visible. Lors des célébrations religieuses et des fêtes familiales, les hôtes se mêlent aux moniales, et celles-ci gèrent toujours leurs sorties selon le principe du bon sens et de la nécessité.
Conclusion
196Jusque dans les années 1950, les moniales vivent un « reclusage » réel au monastère. Sauf circonstances exceptionnelles comme les fondations, les guerres, l’hospitalisation dans l’urgence (cinq au total seulement à Malonne avant 1950 ; quatre à Floreffe, dont trois se terminent par le décès à l’hôpital), les moniales ne sortent pas. Ainsi conte-t-on, lors des sorties exceptionnelles, l’étonnement des religieuses qui n’ont plus vu le monde depuis 20, 30, 40 ans. Les guerres, tant la première que la seconde, ne modifient pas la vie claustrale. Lors de la Première Guerre, les quatre communautés se disent épargnées ; tout au plus doivent-elles accueillir périodiquement des soldats ou des blessés. En mai 1940, trois communautés sur quatre prennent le chemin de l’exode : Jambes, Saint-Servais et Floreffe, cette dernière pour la plus longue période (retour en août 1940). Ces sorties communautaires ne constituent pas non plus une ouverture sur le monde pour ces moniales qui conservent l’esprit de clôture et se gardent bien de tout contact avec les populations (voyages groupés avec le voile de clôture, hébergement dans les congrégations religieuses). Les années d’occupation se poursuivent dans la recherche de régularité en dépit de quelques modifications dans l’horaire (suppression des offices de nuit) et dans la nourriture (les carmélites suivent les prescriptions de l’évêque qui les autorisent à faire gras, c’est-à-dire de manger les lapins et les poulets élevés au couvent). Chez les clarisses, ce sont les fédérations, dans les années 1950, qui offrent le cadre pour les premières remises en question. Celles-ci concernent surtout les usages liés à la clôture matérielle (grilles, voiles, visites…) qui sont revus dans le but d’être mieux compris de la société. Ces remises en question sont portées à maturité après le concile Vatican II qui pousse les communautés à l’aggiornamento.
197Dans cette stricte autarcie, de quoi vivent les moniales ? Chez les clarisses et chez les colettines, les aumônes et les quêtes constituent les principales sources de revenus. À Malonne, les aumônes apportent plus que les quêtes à domicile, dans une proportion de 60 % pour les aumônes et de 30 % pour les quêtes. Cela, sans tenir compte des quêtes en nourriture, qui sont importantes en temps de crise. Les clarisses font une distinction entre les quêtes, les aumônes et les offrandes, chaque don étant fait dans des circonstances différentes. Les quêtes à domicile sont le fait des tourières, les offrandes sont les dons récoltés dans la chapelle, alors que les aumônes proviennent de bienfaiteurs probablement assez réguliers. Le principal bienfaiteur est le « syndic », personne fortunée chargée d’administrer le temporel, ou plutôt, de renflouer les caisses. Des enquêtes plus approfondies pourraient être réalisées sur ces bienfaiteurs fixes et sur la façon dont ils font leurs aumônes. Pour ce qui est des revenus du travail, toujours pour le monastère de Malonne, ils représentent moins de 10 % de la recette globale. Les clarisses sont donc largement dépendantes de l’environnement extérieur. Leur pauvreté est très relationnelle, contrastant avec la forme de vie recluse. Les carmélites, qui vivent essentiellement des dots et des pensions, dépendent également de tiers dans leur mode de vie. Mais ce sont les familles qui, dans leur cas, fournissent l’essentiel des revenus (en 1900, les dots représentent 79 % des revenus du carmel de Montélimar-Floreffe). Ce système a permis aux cloîtrées de vivre sans difficultés financières jusque dans les années 1960. Notons toutefois que les deux couvents « exilés », Malonne et Floreffe, se caractérisent par une plus grande pauvreté. L’enracinement familial, social et diocésain a donc une grande importance sur le plan économique.
198Si l’on estime que le principal travail des contemplatives est la prière, et si l’on y ajoute les quatre heures quarante de travail, cela fait des journées de treize heures et demie. Est-ce dès lors concevable d’imaginer que ces communautés contemplatives puissent se convertir en cellules de travail rentables ? Dans les années 1950, l’Église pousse activement les moniales à abandonner leur statut de rentières (chez les carmélites) ou de mendiantes (chez les clarisses) pour devenir des travailleuses intégrées au marché du travail. Visiblement, cette conversion est un échec. Même si la crise des vocations a réduit les chances de réussite – par la réduction et le vieillissement des membres –, il n’est pas le seul facteur en cause. Le monastère de Malonne, qui se recrute bien dans les années 1960 et 1970, ne parvient pas à passer du système des aumônes à celui du travail rémunéré. La maison d’accueil s’apparente davantage à « un service », lit-on dans les rapports ; et les travaux de couture sont trop peu lucratifs. Une activité économique rentable exigerait un capital de départ dont les sœurs ne disposent pas. La solution, en harmonie avec l’esprit du temps qui veut copier les ouvriers, est d’entrer dans le système de la sécurité sociale et de vivre des pensions des sœurs âgées. Le carmel de Floreffe fait exception en ce qu’il est parvenu à mettre sur pied une entreprise rentable de confection d’hosties. Mais au prix de quels renoncements ? Le travail a pris, au dire d’une carmélite entrée en 1933, une « place exagérée », et cela, jusqu’aux dernières mécanisations des années 1970- 1980. Les sources évoquent les veilles des moniales tenues de respecter les délais pour l’extérieur ; les témoignages font part de changements horaires en vue de ménager plus de temps au travail (récréations, temps libres et siestes remplacés par le travail).
199L’impulsion des changements en matière de clôture semble venir de l’extérieur : de la société d’abord, à travers le regard des aspirantes, des familles et des visiteurs – la souffrance devinée ou exprimée des parents visitant leur fille à travers les grilles et sous le contrôle de la « tierce » figure parmi les préoccupations majeures de ces aménagements ; ensuite de l’Église qui promeut les fédérations, puis l’aggiornamento. On ne fait guère état, dans les années 1950, des souffrances « physiques et psychiques » des moniales liées à la claustration, comme ce sera le cas après le concile Vatican II. En 1970, les Malonnaises condamnent les « prescriptions multiples concernant la discipline de la clôture » qui « ont engendré des maux très graves, tant spirituels que psychiques et même physiques, et ceux-ci ont marqué la vie de nombreuses moniales512 ». Mêmes constats au carmel de Floreffe où une religieuse entrée en 1933 exprime que « c’est beau le retrait du monde », mais que la clôture matérielle stricte à ce point « fait mal », empêche de s’ouvrir et de confier ses difficultés dans l’intimité513. À côté de ces critiques, on trouve, chez les colettines de Saint-Servais, un attachement aux usages anciens en matière de clôture qui ne semblent pas être vécus comme amoindrissants. Le système claustral semble s’accorder avec les cadres mentaux des colettines et même, avec les clarisses de Malonne entrées avant les années 1960, qui ne se formalisent pas outre mesure de la clôture matérielle : « On savait qu’on avait quitté le monde et qu’on ne désirait pas être avec le monde. Moi j’étais contente » ; « ça faisait partie du plan total ». Les carmélites de Floreffe entrées dans les années 1950 n’ont pas non plus été perturbées par le système claustral qui semblait aller de soi.
200Lorsque les critiques vis-à-vis de la clôture deviennent plus virulentes, dans les années 1970, on voit qu’elles visent davantage le « contrôle de la clôture » que la clôture elle-même. Les contrôles sont perçus comme un manque de confiance et une atteinte à la liberté : ainsi, c’est plus la soumission de la clôture à un système d’obéissance et de contrôle qui pose problème, et non le principe de retrait. L’usage de la tierce par exemple ou encore, la censure du courrier, font partie de ces adjonctions à la clôture considérées dans certains cas comme « malveillantes ». Ce qui opprime les moniales, c’est l’impossibilité de pouvoir « se dire librement », dans l’intimité. Se dire à qui ? Pour les relations avec la famille, la tierce ou la lecture du courrier gênent surtout la moniale « pour » le visiteur ou le correspondant. Il ne semble pas, à ce stade, que la tierce limite réellement la parole des moniales. Celles-ci se gardent d’ailleurs de « se confier » à leur famille en cas de difficultés. En même temps, on entend que la surveillance est perçue comme un obstacle pour « confier certaines difficultés ». On peut dès lors penser que ces confidences ne s’adressent pas aux familles, mais à l’entourage religieux et aux prêtres spécialement. La clôture sur le monde, qui s’est resserrée au 19esiècle, a également limité les relations intimes entre les prêtres et les moniales. À cela s’ajoute un phénomène de société qui est la pénurie de religieux : les religieuses sont, à l’époque contemporaine, quatre à cinq fois plus nombreuses que les religieux514. Cette question est développée dans le chapitre sur l’encadrement ecclésiastique, mais on pourrait déjà formuler l’hypothèse suivante : à partir du moment où les moniales subissent une carence dans leurs relations spirituelles à l’Église et au premier ordre masculin, dans quelle mesure n’ont-elles pas tendance à se replier sur leur famille ?
201La famille reste un maillon important entre le cloître et le monde. Lors de l’entrée, c’est la séparation familiale qui apparaît comme la plus déchirante, et dans les notices et les chants de jubilé, si nostalgie du monde il y a, c’est le plus souvent par rapport au foyer familial. Dans le courant de leur vie, les relations avec la famille apparaissent souvent comme un point sensible. Que les moniales cherchent à transformer leur attachement familial en détachement (mais lorsque la religieuse s’abstient, par mortification, de lire immédiatement une missive familiale, ne trahit-elle pas son attachement persistant à la famille ?) ou qu’elles le vivent ostensiblement, les liens avec la famille suscitent souvent un flux émotionnel qui est loin d’être endigué. Par ailleurs, le rapport à la famille connaît une évolution dans la littérature spirituelle. Si Thérèse d’Avila est catégorique pour dire que les relations avec les parents sont des plus néfastes à la vie spirituelle, les saints de l’époque contemporaine, Thérèse de Lisieux en tête, le sont beaucoup moins. À l’heure actuelle, les moines d’Orval mesurent la réussite de la séparation au degré d’ouverture du cœur515. Un trappiste affirme qu’il ne serait « jamais entré dans un milieu fermé […], indifférent par rapport au monde », qu’il a senti au contraire, « des gens avec le cœur ouvert ». Les cloîtrées, si elles ont probablement vécu une « ouverture de cœur » dans la prière, ont-elles pu la vivre concrètement dans leurs rapports avec l’extérieur, familles, prêtres, religieux, amis, visiteurs quelconques ? Quelle a été l’évolution des trente dernières années ? Comment conçoivent-elles leur rapport avec leur famille, en dehors de leur devoir d’aide aux parents âgés ? La gestion de la séparation avec la famille mériterait un traitement spécifique516, même si l’on peut déjà dire que le discours de l’institution à ce sujet est assez pauvre.
202Les transferts entre monastères fédérés, pour raison d’entraide, sont les premiers motifs de sortie pour des moniales qui ne sont pas en charge (les abbesses et les maîtresses des novices avaient l’occasion d’assister aux réunions fédérales depuis 1953). En 1955, deux clarisses de Malonne séjournent plusieurs mois chez les colettines de Tournai, ce qui est une première dans l’histoire de la fédération. Ces transferts vont se multiplier, notamment en 1968 et 1969, au point que l’assistant fédéral demandera d’y mettre un frein en distinguant les religieuses qui sortent par service de celles « qui s’ennuient derrière leurs grilles517 ». Après le concile Vatican II, les moniales font valoir un nouveau motif de sortie : celui que nécessite une formation solide. Les sorties pour formation semblent émaner d’un souhait des moniales elles-mêmes. En revanche, celles pour venir en aide aux parents malades ou mourants apparaissent comme une concession aux demandes familiales et à une société de moins en moins chrétienne où le retrait de la religieuse des charges familiales n’est plus compris. Le tableau des sorties des clarisses de Malonne pour les années 1969-1973 montre clairement que celles pour motif de formation (sessions organisées par l’ordre, par l’évêché ou par l’U.R.C.) sont de loin les plus nombreuses. Enfin, une dernière demande apparaît çà et là, sans faire l’objet d’une reconnaissance officielle : la sortie pour confession. Celle-ci rejoint également un désir des moniales qui est le lien intime et personnel avec les pères et les frères. Ainsi, parmi les trois nouveaux motifs de sortie, celui pour formation est tout à fait neuf, alors que les deux autres ressortent des relations, toujours complexes, avec d’une part la famille et d’autre part, l’encadrement ecclésiastique et spirituel masculin. La famille semble, comme toujours, faire valoir ses droits (séjours en famille autorisés), alors que la relation plus intime avec les frères et les prêtres reste soumise à un contrôle plus strict de l’Église.
203L’adoption de la clôture constitutionnelle, chez les clarisses de Malonne, marque une étape décisive dans l’évolution des structures de gouvernement. La gestion de la clôture, qui de tout temps avait été la prérogative de l’Église, revient désormais à l’abbesse. À Floreffe, où les revendications et les conceptions en matière de clôture sont assez comparables à celles de Malonne, le pas en faveur de la clôture constitutionnelle n’est pas franchi. C’eût été trop s’écarter de la tradition et des conceptions de l’ordre. Lorsque la présidente fédérale des carmels de Belgique-Sud écrit, en 1981, que la fédération demande que « soit maintenue pour le carmel la clôture papale avec les normes indispensables pour effectivement la garantir, afin que soit toujours assurée aux carmélites cloîtrées la vie de ‘désert’ en silence et solitude518 », elle confond rigueur claustrale et obéissance à l’Église. Car de fait, pourquoi la clôture ne pourrait-elle pas être aussi stricte tout en étant gérée par les moniales elles-mêmes ? On met une fois encore le doigt sur un nœud idéologique mal dénoué qu’est la confusion entre clôture féminine et obéissance à l’Église (et au monde masculin). Cette confusion apparaît clairement en système conventuel : une fois la moniale entrée en clôture, c’est avant tout l’obéissance qui règle la séparation du monde. Un cas emblématique est celui de la sortie de clôture en cas de danger grave : en mai 1940, on voit que les moniales ne sortent, même au péril de leur vie, qu’en vertu de l’obéissance. Pour les soins de santé urgents, on voit aussi que l’autorisation de l’évêque est déterminante. La parole du supérieur ecclésiastique, qui garantit la clôture, devient plus importante que la clôture elle-même. Il n’est pas étonnant que la remise en question du système claustral dans les années 1960 et 1970 débouche sur la question de la relation à l’autorité ecclésiale. Que les moniales exigent d’être les « maîtres » de leur clôture est un pas énorme qui ébranle tout le système de relation entre l’Église et le couvent, entre les hommes et les femmes. On peut dire que ce cheminement n’est pas encore parvenu à maturité.
204Sociologues, historiens, théologiens, spirituels l’ont bien montré, en dépit de son esprit de caste, le monastère ne se situe pas hors du monde. L’anthropologie angélique est le courant spirituel qui éloigne le plus les moniales de la terre : elles doivent fermer les yeux sur le monde et vivre comme les anges. Chez les clarisses, le sens de la séparation du monde s’enracine davantage dans la spiritualité réparatrice et expiatrice. Le cloître est un tombeau, un lieu de réparation personnelle et collective. Cette vision austère et pessimiste est compensée par la vision eschatologique et la promesse d’une récompense future. Les moniales vivent pour un ‘après’, comme cette carmélite qui, au retour d’un parloir, soulignait le contraste entre les visiteurs, « tout pour la vie présente », et la vie monacale : « Elle disait […] sur ce ton méditatif qui lui était familier quand elle sentait très loin quelque chose : ‘Ils sont tout pour la vie présente, eux… ’ »519 Selon cette vision où la vie sur terre n’est qu’un passage, les relations avec l’extérieur sont dépréciées, et autorisées seulement en vertu « de la nécessité qui n’a pas de loi » : « nécessités morales, de relations familiales et de reconnaissance, nécessités matérielles de la subsistance : fournisseurs ou hommes de métier520 ». Les recommandations des coutumiers concernant le parloir montrent qu’il s’agit d’un exercice de « seconde zone ». Les rapports « concrets » et « mondains » sont secondaires par rapport à la relation mystique et invisible qui se devait d’être autant plus intime que la séparation concrète au monde était absolue. C’est entre sœurs, et non avec les gens du monde, que les moniales testent leur ouverture de cœur et la vie en charité. Sur le plan des relations spirituelles, les témoignages récents soulignent l’avantage d’une plus grande ouverture au monde, surtout pour la « prière d’intercession », comme le constate notre témoin bruxellois, sœur Colette : « C’est vrai, si on veut porter le monde dans la prière, et être en communion avec lui, il faut savoir ce qui se passe, ce que les gens souffrent et les problèmes. Parce qu’au début de ma vie religieuse, c’était : ‘on n’a pas besoin de savoir ce qui se passe dans le monde, nous prions, et notre prière est pour le monde, et nous portons Bruxelles, on n’a pas besoin de savoir’. Mais ça aide quand même. » En revanche, elle constate que, pour la prière d’adoration, l’ouverture au monde peut être nuisible : « C’est vrai qu’il n’y a pas que la prière d’intercession, il y a la prière de louange et d’adoration, qui ont leur place, et qui peut-être étaient plus faciles quand on étaient moins distraites, je ne sais pas521. » Ainsi, en même temps que la sollicitude pour le monde devient plus concrète, la paix procurée par une vie « hors du monde » diminue. Mais l’une des questions les plus relevantes pour ce qui est du rapport au monde est celle qui ressort de la conception et du sens de la vie humaine. Colette Friedlander pointe un changement fondamental dans la conception de la vie contemplative à partir des années 1960, qui est sa réinterprétation « en fonction d’une visée d’accomplissement humain et spirituel dans la vie présente522 », ce qui explique la participation croissante dans les activités du monde. Mais comment réinventer la vie monastique à la lumière d’une « visée d’accomplissement humain et spirituel dans la vie présente », alors que, comme l’affirme Colette Friedlander, celle-ci s’est développée dans une tradition qui « ne voit dans la vie présente qu’un passage, sans consistance ni valeurs propres » ? Ce nouveau contexte ne change-t-il pas le sens de la clôture ? Dans cette perspective d’épanouissement spirituel, la clôture devient de plus en plus comme une protection pour le ressourcement de la religieuse et n’apparaît plus comme une barrière devant repousser le mal du monde. La clôture devenant une garantie de l’épanouissement spirituel, il devient inutile qu’elle soit assujettie à des normes de contrôle extérieures.
Notes de bas de page
1 Miquel (P.), Signification et motivations du monachisme, dans D.S., t. X, 1980, col. 1549.
2 Entretien avec Mère Rosa, trappistine de Brecht-Chimay et présidente de l’U.R.C., Abbaye Notre-Dame de la Paix (Chimay), le 11 mai 1999.
3 Matthieu le pauvre, L’expérience de Dieu dans la vie du moine, dans Louvain, revue mensuelle de l’Université catholique de Louvain et de l’Association des anciens et amis de l’U.C.L., n° 97, avril 1999, p. 28-31.
4 Vie de S. Thérèse. Cité dans Sr Marie-Germaine de Jésus, Germaine Beckers 1877-1947, souvenirs…, p. 7-8. Dans A.C.J.
5 Sr Marie-Germaine de Jésus, Germaine Beckers 1877-1947, souvenirs…, p. 7-8. Dans A.C.J.
6 Nécrologe, sr Marthe de Saint-Charles, Émilie Debuiche, 1839-1923, p. 36. Dans A.C.M.
7 Nécrologe, sr Véronique de Saint-Paul, Hortense Bernaert, 1849-1939, p. 58. Dans A.C.M.
8 Nécrologe, sr Marie-Rose de Saint-Augustin, Yvonne Devin, 1897-1920, p. 26. Dans A.C.M.
9 De Nives… Chant à l’occasion du jubilé de Sr M. Louise, [1950]. Dans A.C.S. Carton ‘Archives n° 1’. Chants de sr Marie-Madeleine.
10 Interview de sr Marie-Louise Michel, Arlon, le 1er juillet 1998. Dans A.C.S.
11 Notes I de mère Élisabeth de la Trinité, le 17 février 1948, Floreffe, p. 124. Dans A.C.F.
12 Lettre de Monique de Jésus (Bauret), Floreffe, le 14 septembre 1972. Dans A.C.F. Classeur. Sœurs. Dossier n° 55.
13 Interview de Sr Marcelle du Cœur de Jésus (Marcelle Pirotte), Floreffe, les 20, 21 et 22 octobre 1993.
14 Origine et historique du monastère des pauvres clarisses de l’Ave Maria…, p. 68 bis. Dans A.C.M.
15 Nécrologe, sr Marguerite-Marie, Paulette Tricot, 1906-1992, Malonne, p. 105. Dans A.C.M.
16 Interview de sr Marie-Joseph de Jésus (Marie-Josèphe Verhoye), Malonne, les 16, 17 et 18 avril 1998.
17 Origine et historique du monastère des pauvres clarisses de l’Ave Maria…, p. 73. Dans A.C.M.
18 Nécrologe, sr Marie des Anges, Yvonne L., 1906-1985, p. 98. Dans A.C.M.
19 Nécrologe, sr Alice-Marie, Alice Cointrel, 1910-1986, p. 97. Dans A.C.M.
20 « Alice-Marie, elle a dû se sauver aussi. […] En tournant la rue, elle a dit qu’elle entendait maman qui hurlait. » Interview de sr Marie-Joseph de Jésus (Marie-Josèphe Verhoye), Malonne, les 16, 17 et 18 avril 1998. Dans A.C.M.
21 Notices…, sr Jeanne-Marie de la Croix de Jésus, Hortense Thyrifays, 1861-1931, p. 116b. Dans A.C.J.
22 Notices…, sr Marie-Gertrude de Saint-Joseph, Esther Wedekind, 1879-1945, p. 43. Dans A.C.J.
23 Livre précieux…, sr Marie-Joséphine de Jésus, Joséphine Lacroix, 1859-1915, p. 104-105. Dans A.C.F.
24 Livre précieux…, sr Agnès de Jésus, Marie Gustin, 1904-1979, p. 201. Dans A.C.F.
25 Souvenirs de Marie-Josèphe, avril-mai 1998, 14 p. Dans A.C.M. Série d’une enveloppe personnelle par sœur avec extrait de naissance, certificat de baptême, de confirmation etc. Dans A.C.M. Série J.
26 Interview de sr Thérèse (Danis), Malonne, le 17 avril 1998. Dans A.C.M.
27 Nécrologe, sr Marie-Rose de Saint-Augustin, Yvonne Devin, 1897-1920, p. 27. Dans A.C.M.
28 Notices…, sr Marie-Thérèse du Sacré-Cœur de Jésus, Mélanie Petit, 1859-1940, p. 26. Dans A.C.J.
29 Ibid.
30 La petite sr Céline de Saint-Servais, chant festif pour Sr Marie-Céline, s.d. Dans A.C.S. Caisse ‘Archives n° 1’. Chants de sr Marie-Madeleine
31 Lettre de sr Marie des Anges, Roulers, octobre 1924. Dans A.C.S. Carton ‘Archives n° 1’.
32 Son histoire, chant à l’occasion de sr Marie-Félicie, 1952. Dans A.C.S. Carton ‘Archives n° 1’. Chants de sr Marie-Madeleine.
33 Notices…, sr Marie-Xavier de Jésus, Alix Dupiereux, 1867-1919, p. 114. Dans A.C.J.
34 Nécrologe, sr Marthe de Saint-Charles, Émilie Debuiche, 1839-1923, p. 36. Dans A.C.M.
35 Notices…, mère Louis de Gonzague de Jésus, relation de sa vie…, p. 50. Dans A.C.J.
36 Notices…, sr Marie-Christine de Saint-Joseph, Lévina Duchêne, 1883-1943, p 33. Dans A.C.J.
37 Notices…, sr Marie-Cécile des Saints-Anges, Maria Grandjean, 1856-1906, p. 155, 161. Dans A.C.J.
38 Notices…, Sr Marie-Gabrielle de la Sainte-Trinité, Louise Ranwez, 1839-1906, p. 128. Dans A.C.J.
39 Interview de sr Anne de Jésus (Anne-Marie Adam), Jambes, le 26 avril 1999.
40 Interview de sr Marie-France (Becker), le 15 avril 1998.
41 Interview de sr Marcelle (Pirotte), Floreffe, le 20, 21 et 22 octobre 1993.
42 Notices…, sr Marie-Cécile des Saints-Anges, Maria Grandjean, 1856-1906, p. 161. Dans A.C.J.
43 Notices…, sr Marie-Gabrielle de la Sainte-Trinité, Louise Ranwez, 1839-1906, p. 128. Dans A.C.J.
44 Nécrologe, Rde Mère Angèle de Saint-Jean Capistran, Clavies Damary, 1855-1913, p. 16. Dans A.C.M.
45 Lettre de sr M. Agnès « pour » mère Marie des Anges, Roulers, le 30 mars 1936. Dans A.C.S.
46 Lettre de sr M. Agnès…, Roulers, le 15 juin 1936. Dans A.C.S.
47 Lettre de sr M. Agnès…, Roulers, le 13 novembre 1933. Dans A.C.S.
48 Campbell-Jones (S.), In habit. An anthropological study of working nuns, Londres-Boston, 1979, p. 80.
49 Récit imprimé sur la prise d’habit d’Élisabeth De Koster, le 22 octobre 1929, par le jésuite le père G. Hoornaert. Dans A.C.J. Boîte ‘Archives III. Le carmel à Jambes, rue d’Enhaive, 20e siècle’. Enveloppe ‘Quelques souvenirs de sœurs qui ont vécu au carmel de la rue d’Enhaive… ’.
50 Cf. Coupure de presse, [le 12 décembre 1933]. Dans A.C.F. Classeur. Sœurs. Dossier n° 42.
51 Mon histoire. Chant à l’occasion du jubilé de Mariette Thys, le 21 novembre 1946. Dans A.C.S. Carton ‘Archives n° 1’. Chants de sr Marie-Madeleine.
52 Dans un joli couvent…, chant à l’occasion du jubilé de Sr Marie-Joseph, s.d. Dans A.C.S. Carton ‘Archives n° 1’. Chants de sr Marie-Madeleine.
53 Son histoire, chant à l’occasion de sr Marie-Félicie, 1952. Dans A.C.S. Carton ‘Archives n° 1’. Chants de sr Marie-Madeleine.
54 Nécrologe, mère Angélique de Saint-Michel, Rosalie Vermesche, 1844-1910, p. 1. Dans A.C.M.
55 Connaissez-vous Berthe Dumont ?… Dans A.C.S. Carton ‘Archives n° 1’. Chants de sr Marie-Madeleine.
56 À notre chère jubilaire. 1880-1930. Novissima et vetera’ chant composé à l’occasion du jubilé de sr Marie-Thérèse du S.C. (Mélanie Petit), Jambes, 1930. Dans A.C.J. Boîte ‘Archives II’.
57 Lettre de Monique de Jésus, Monique Bauret, Floreffe, le 14 septembre 1972. Dans A.C.F. Classeur. Sœurs. Dossier n° 55.
58 À notre Mère Marie-Cécile de Jésus (Louise Zomers), composé par les sœurs du carmel de Ciney, Ciney, septembre 1936. Dans A.C.J. Boîte ‘Archives II’. Enveloppe ‘Fêtes et jubilés de mère Marie-Cécile de Jésus’.
59 Fêtes virginales…, Dans A.C.J. Théâtre. Boîte ‘Divers’. Enveloppe ‘Petits chants et saynètes de Jubilés’.
60 À notre chère jubilaire. 1880-1930. Novissima et vetera, chant composé à l’occasion du jubilé de sr Marie-Thérèse du S.C. (Mélanie Petit), Jambes, 1930. Dans A.C.J. Boîte ‘Archives II’.
61 Office des vêpres du jubilé de la Très Sainte Révérende Mère Abbesse (Marie-Agnès). 1re classe avec octave privilégiée, avril 1954. Dans A.C.S. Carton ‘Archives n° 1’. chants de Sr Marie-Madeleine.
62 Une enfant des Ardennes. Chant à l’occasion du jubilé de Sr M. Julienne, [1950]. Dans A.C.S. Carton ’Archives n° 1’. Chants de Sr Marie-Madeleine.
63 Nécrologe, mère Angélique de Saint-Michel, Rosalie Vermesche, 1844-1910, p. 1. Dans A.C.M.
64 Notices…, sr Marie-Gertrude de Saint-Joseph, Esther Wedekind, 1879-1945, p. 42. Dans A.C.J.
65 Interview de sr Marie-Joseph de Jésus (Marie-Josèphe Verhoye), Malonne, les 16, 17 et 18 avril 1998.
66 Notices…, sr Marie-Adèle de Jésus, Marie-Josèphe Charlier, 1849-1904, p. 109. Dans A.C.J.
67 Une visite. 1881-1931. À notre très chère Sr Térésa-Joseph du Saint-Cœur de Marie en son jubilé de 50 ans de vie religieuse, 1er juin 1931. Dans A.C.J. Théâtre. Boîte ‘Divers’. Enveloppe ‘Petits chants et saynètes de Jubilés’.
68 Dortel-Claudot (M.), La clôture des moniales, des origines au code de droit canonique, dans La clôture des moniales, trente ans d’expectative, Namur, 1997, p. 65-79 (1re éd. dans Vie consacrée, 1967, n° 39, p. 165- 176).
69 Le Petit Robert I, Paris, 1977, p. 327.
70 Abbayes et collégiales…, p. 15, 17.
71 Lettre de mère Marie des Anges, Roulers, le 28 février 1891. Dans AG (Rome) OFM. P 72. Suore clarisse, 1800-1895. Francia-Belgio.
72 Archives du monastère Saint-Michel des sœurs de Sainte-Claire…, [1911-1954], p. 237. Dans A.C.S.
73 Règle et constitutions…, 1938, p. 107. Dans A.C.M. Série G.
74 Elle se souvient aussi que le jour de sa prise d’habit, on avait fait passer son filleul âgé de quatre ans par le tour : « On avait un tour, on l’a mis dedans, et il est sauté par ici. Ça n’a pas fait un problème. » Cf. Interview de sr Thérèse (Danis), Malonne, le 17 avril 1998.
75 Déclarations sur la règle…, [1910], p. 108. Dans A.C.M.
76 Règle et constitutions…, 1938, p. 107. Dans A.C.M. Série G.
77 Souvenirs de sr Marie-Joseph, avril-mai 1998, p. 12. Dans A.C.M. Série d’une enveloppe personnelle.
78 Monastère des Pauvres Clarisses. Malonne. Coutumier, Namur, 1944 (non édité), p. 41. Dans A.C.M.
79 Catéchisme et instructions pieuses sur la sainte règle des religieuses Pauvres claires colettines…, 1876, p. 85. Dans A.C.R.
80 Coutumier des religieuses Pauvres claires colettines…, Huy, p. 23, 29. Dans A.C.M. Archives fédérales.
81 Archives du monastère Saint-Michel des sœurs de Sainte-Claire…, [1911-1954], p. 106, 222. Dans A.C.S.
82 Usages réguliers…, p. 336. Dans A.C.F.
83 Interview de mère Marie-Cécile de Jésus (Madeleine Michel), Floreffe, les 20, 21 et 22 octobre 1993.
84 Écrits de la mère Louis de Gonzague…, p. 357. Dans A.C.J.
85 Interview de sr Marie-Lucie de Jésus (Ida Furnémont), Jambes, le 23 avril 1999.
86 Interview de sr Marcelle du Cœur de Jésus (Marcelle Pirotte), Floreffe, les 20, 21 et 22 octobre 1993.
87 Interview de sr Marie-Madeleine de la Croix (Cécile Séquies), Malonne, le 15 avril 1998.
88 Interview de sr Thérèse (Danis), Malonne, le 17 avril 1998.
89 Interview de sr Anne de Jésus (Anne-Marie Adam), Jambes, le 26 avril 1999.
90 Us des cisterciennes réformées de la congrégation de la grande Trappe, précédés de la règle de S. Benoît et des constitutions, La Grande Trappe, 1884.
91 Règle de l’ordre de sainte Claire avec les statuts de la réforme de sainte Colette…, [1864], p. 87. Dans A.C.R.
92 Règle de sainte Claire et constitutions…, p. 98.
93 Coutumier des religieuses Pauvres claires colettines…, Huy, p. 25. Dans A.C.M. Archives fédérales.
94 Règle et constitutions…, 1938, p. 136. Dans A.C.M. Série G.
95 Coutumier des religieuses Pauvres claires colettines…, Huy, p. 25. Dans A.C.M. Archives fédérales.
96 La sortie de clôture pour raison électorale n’est pas systématique et dépend des compromis et des stratégies politiques au niveau communal et national. En 1926, la plupart des communautés religieuses participent aux élections. Les chroniques de Malonne mentionnent : « sorties des sœurs belges à la demande de l’évêque pour aller voter, avec la recommandation de rester hors de la clôture le moins longtemps possible ».
97 Notices…, sr Marie-Madeleine du saint Enfant-Jésus, Marie Dewert, 1865-1939, p. 21. Dans A.C.J.
98 Lettre du curé de Malonne, s.d. [1920], Malonne. Dans A.S.V. Arch. Nunz. Belgio. [1904-1922]. Carton 91. ‘Congregazione religiose’.
99 Archives du monastère Saint-Michel des sœurs de Sainte-Claire…, [1911-1954], p. 18. Dans A.C.S.
100 Lettre du frère François de Sales, o.c.d., provincial, Bruxelles, le 1er septembre 1940. Dans A.G. OCD. Série C. Provincia. Brabante. 104. François de Sales.
101 Lettre du frère François de Sales…, Bruxelles, le 24 septembre 1940. Dans A.G. OCD.
102 Lettre du frère François de Sales…, Bruxelles, le 28 janvier 1941. Dans A.G. OCD.
103 Lettre du frère Gérard de Saint-Joseph, o.c.d., provincial, Bruxelles, le 20 janvier 1946. Dans A.G. OCD. Série C. Provincia. Brabante. 105. Gérard de Saint-Joseph.
104 Souvenirs de notre exode pendant la guerre 1940-45. Dans A.C.J. Boîte ‘Archives III. Le carmel à Jambes, rue d’Enhaive, 20e siècle’.
105 Notices…, sr Marie-Thérèse du Sacré-Cœur de Jésus, Mélanie Petit, 1859-1940, p. 29. Dans A.C.J.
106 Récit de l’exode de 1940 par sr Claire-Marie de l’Eucharistie, Justine Winters, Floreffe, 1943, p. 6. Dans A.C.F.
107 Récit de l’exode de 1940…, p. 7. Dans A.C.F.
108 Goulven (J.), Rayonnement de sainte Colette…, p. 206.
109 Il est amusant de relever, dans ce contexte de l’exode, le commentaire d’une clarisse de Huy qui contraste avec le tragique de la situation. Elle se demande comment les sœurs pourraient partir sur les routes et « marcher de longues heures avec des souliers », elles qui depuis longtemps marchaient pieds nus. Cf. Archives du monastère de Saint-Joseph des religieuses Pauvres claires colettines fondé à Huy en 1892, Huy, p. 164. Dans A.C.H.
110 Goulven (J.), Rayonnement de sainte Colette…, p. 206.
111 Origine et historique du monastère des pauvres clarisses de l’Ave Maria…, p. 116, 117. Dans A.C.M.
112 Archives du monastère Saint-Michel des sœurs de Sainte-Claire…, [1911-1954], p. 132-139. Dans A.C.S.
113 Origine et historique du monastère des pauvres clarisses de l’Ave Maria…, p. 133. Dans A.C.M.
114 Nécrologe, Rde Mère Angèle de Saint-Jean Capistran, Clavies Damary, 1855-1913, p. 23. Dans A.C.M.
115 Lettre de sr Marie-Agnès, abbesse des clarisses de Saint-Servais, le 31 octobre 1952. Dans A.E.N. Série R 46. Clarisses de Saint-Servais, 1952-1983.
116 Lettre de Mgr Toussaint, vicaire général, Namur, le 4 novembre 1952. Dans A.E.N. Série R 46.
117 En même temps, l’adoption de la clôture papale, avec l’obligation de demander à Rome la permission de sortie, complique le processus. Ainsi, à l’abbesse de Saint-Servais qui demande en 1954 l’autorisation de sortie pour une sœur qui doit être opérée d’un fibrome, l’évêque accorde deux jours de sortie en précisant que, pour un délai plus long, il faut s’en référer à Rome. Lettre de Mgr Toussaint, vicaire général, Namur, le 28 septembre 1954. Dans A.E.N. Série R 46. Clarisses de Saint-Servais, 1952-1983.
118 Indult de la Sacrée Congrégation des Religieux du 30 juin 1956 concernant la sortie de clôture pour cause de maladie, donné par l’évêque de Namur, le 7 juillet 1953. Dans A.C.F. Classeur. Carmel. 4. Clôture.
119 Indult de la Sacrée Congrégation des Religieux du 11 avril 1957 concernant la sortie de clôture pour cause de maladie, donné par l’évêque de Namur, le 10 mai 1957. Dans A.C.F. Classeur. Carmel. 4. Clôture.
120 Il y a quatre opérations chirurgicales à Floreffe entre 1945 et 1960 : en 1949 pour les amygdales ; deux en 1950 et une en 1958. Cf. Notes II… (13 octobre 1949)…, (27 décembre 1950) de mère Marie-Élisabeth de la Trinité, Floreffe, p. 26, 27 et 48. Dans A.C.F.
121 À l’exception des sorties plus fréquentes de la prieure, mère Élisabeth de la Trinité, atteinte d’une maladie incurable.
122 Monastère Saint-Michel. Relation quinquennale pour les années 1949-1954, p. 4. Dans A.C.S. Carton ’Archives n° 2’. Relation quinquennale. 1954.
123 Fédération Sainte-Claire. Relation quinquennale, 1955-1959, le 24 février 1959. Dans A.C.M. Archives fédérales. Caisse ‘Relations quinquennales… ’.
124 Fédération Sainte-Claire. Relation quinquennale, 1960-1964, le 1er décembre 1964, p. 10. Dans A.C.M. Archives fédérales. Caisse ‘Relations quinquennales… ’.
125 Pour plus de détails, voir le chapitre sur le recrutement et le tableau sur les « Types de sorties », p. 131.
126 Archives du monastère de Saint-Joseph… fondé à Huy en 1892, p. 259. Dans A.C.H.
127 Entretien avec sr Françoise (Franque), Malonne, le 16 octobre 1997.
128 Jubilé de 25 ans de la Fédération Sainte-Claire de Wallonie : 1953-1978, par Sr Marie-Claire, clarisse de Malonne, p. 1. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédération.
129 Lettre de sr Marie-Emmanuel de l’Annonciation, Tournai, le 1er novembre 1955. Dans A.C.M. Série d’une enveloppe personnelle par sœur…, n° 31-42.
130 Déclarations sur la Règle…, [1910], p. 45. Dans A.C.M. Série G.
131 Catéchisme et instructions pieuses sur la sainte règle des religieuses Pauvres claires colettines…, 1876, p. 100. Dans A.C.R.
132 Règle de sainte Claire et constitutions…, p. 141-142.
133 Lettre de l’abbesse de Malonne, avec annotation de l’évêque, Malonne-Namur, le 8 avril 1926, dans A.C.M. Série d’une enveloppe personnelle par sœur…, etc., n° 18-24.
134 Déclarations sur la Règle…, [1910], p. 180, 143. Dans A.C.M.
135 Règle de l’ordre de sainte Claire avec les statuts de la réforme de sainte Colette…, [1864], p. 123. Dans A.C.R.
136 Déclarations sur la Règle…, [1910], p. 181. Dans A.C.M.
137 Catéchisme et instructions pieuses sur la sainte règle des religieuses Pauvres claires colettines…, 1876, p. 133. Dans A.C.R.
138 Coutumier des religieuses Pauvres claires colettines…, Huy, p. 111. Dans A.C.M. Archives fédérales.
139 Ibid. ; Goede gebruiken voor de religieusen arme clarissen-coletinen van het klooster van Rousselare… (trad. française). Dans A.C.R.
140 Règle de l’ordre de sainte Claire avec les statuts de la réforme de sainte Colette…, [1864], p. 127, 123. Dans A.C.R.
141 Lettre de sr Marie-Agnès « pour » mère Marie des Anges, Roulers, le 11 mai 1936. Dans A.C.S.
142 Archives du monastère Saint-Michel des sœurs de Sainte-Claire…, [1911-1954], 270 p. Dans A.C.S.
143 Interview de sr Françoise (Franque), Malonne, les 14, 15 et 16 avril 1998.
144 Historique du monastère de l’Ave Maria, II, 1951-, Malonne, p. 87. Dans A.C.M.
145 Interview de sr Marie-Bernard (Bernadette de Dorlodot), Floreffe, les 20, 21 et 22 octobre 1993.
146 Interview de sr Colette (Micheline Swalus), Clarisse de Bruxelles-Loonbeek, le 17 octobre 1998.
147 Interview de mère Marie-Cécile de Jésus (Madeleine Michel), Floreffe, les 20, 21 et 22 octobre 1993.
148 Gounon (M.-P.), Un monastère au quotidien…, dans Beauté et pauvreté…, p. 33. Voir également le point « tourières » dans le chapitre sur le recrutement, p. 113.
149 Règle et constitutions…, 1938, p. 132. Dans A.C.M. Série G.
150 Statuts des sœurs tourières attachées au monastère des moniales de l’Ordre de S. Claire à Malonne, Namur, 1942, 20 p. (manuscrit). Dans A.C.M. Série G : Vie communautaire. 2,3 : Coutumier.
151 Ancelet-Hustache (J.), Les clarisses…, p 184.
152 Coutumier des sœurs externes des monastères des moniales de l’ordre des clarisses-colettines, [Namur, 1933], p. 14 et 38. Dans A.C.S. Carton ‘archives n° 2’.
153 Ancelet-Hustache (J.), Les clarisses…, p 186.
154 Coutumier des sœurs externes…, p. 1. Dans A.C.S. Carton ‘archives n° 2’ ; Dispense concernant la clôture. Monastère des clarisses-colettines Saint-Servais (rédigé par le père Adrien), s.d. Dans A.E.N. Série R 46. Clarisses de Saint-Servais, 1952-1983.
155 Derix (J.), De armoede is mijn rijkdom…
156 Dispenses demandées à Rome, Malonne, s.d. [v.1952) dans Série G : Vie de la communauté. Section 9 : Sœurs externes.
157 Interview de sr Anne de Jésus (Anne-Marie Adam), Jambes, le 26 avril 1999.
158 Archives du monastère Saint-Michel des sœurs de Sainte-Claire…, [1911-1954], p. 175. Dans A.C.S.
159 Ibid., p. 231. Dans A.C.S.
160 Chant festif à l’occasion de Sr Antoine, tourière à La Louvière, s.d. Dans A.C.S. Carton ‘Archives n° 1’. Chants de sr Marie-Madeleine.
161 Archives du monastère Saint-Michel des sœurs de Sainte-Claire…, [1911-1954], p. 161. Dans A.C.S.
162 « En vertu des facultés qui nous ont été concédées par l’indult de la S.C. des Religieux du 7 janvier 1953, nous permettons à deux sœurs de chœur de sortir de la clôture et de partager la vie des deux sœurs tourières qui ne savent plus suffire aux travaux de leur charge et ce, tant que perdurera la nécessité. » C’est soeur Marie-Françoise du Précieux Sang de Jésus (Louise Famerée) qui est désignée. Cf. Autorisation de Mgr André-Marie Charue de rester avec les sœurs externes, 1947 et 1953. Dans A.C.S. Farde mauve. Correspondance avec l’évêché.
163 Archives du monastère Saint-Michel des sœurs de Sainte-Claire…, [1911-1954], p. 219. Dans A.C.S.
164 Clarisses de Saint-Servais, le 5 novembre 1953. Visite canonique par le chanoine L. Hubin. Dans A.E.N. R. 19. Visites canoniques de communautés religieuses de la province de Namur.
165 « À la tête des sœurs externes, et avec le titre de sœur majeure, est placée l’une d’entre elles, professe des vœux perpétuels. La sœur majeure est choisie tous les trois ans par la mère abbesse et son discrétoire, après l’avis préalable des sœurs externes professes perpétuelles, qui donneront humblement leur sentiment à la mère abbesse. » Cf. Statuts des sœurs tourières attachées au monastère des moniales de l’Ordre de S. Claire à Malonne, Namur, 1942, p. 2. Manuscrit non éd. Dans A.C.M. Série G.
166 Sr Françoise Franque explique qu’à la mort de sr Agathe, sœur majeure, en 1922, il y a les deux novices, sr Agnès et sr Thérèse, ainsi que les plus anciennes : sr Eugénie, sr Marie-Françoise et sr Marie-Angélina. Les « deux chefs » seront finalement sr Agnès et sr Thérèse [de l’Immaculée-Conception]. Cf. Entretien avec Sr Françoise, le 19 juin 1998. A.C.M.
167 Face et profil, sr Agnès, dans Malonne Première, mai 1989, n° 26. Dans A.C.M. Série d’une enveloppe personnelle par sœur…, Sœurs externes, n° 8.
168 Nécrologe, sr Marie-Angélina, Germaine Dhellemme, 1888-1961, p. 76. Dans A.C.M.
169 Nécrologe, sr Eugénie de Saint-François, Julia Rucquoy, 1912-1969, p. 87. Dans A.C.M.
170 Interview de sr Christiane Loicq, Malonne, le 15 avril 1998.
171 Interview de sr Françoise (Franque), Malonne, les 14, 15 et 16 avril 1998.
172 Lettre circulaire des clarisses de Malonne, Avent 1978, p. 4. Dans A.C.M. Série P. Section 2. Bulletins ou circulaires donnant des nouvelles du monastère.
173 Nécrologe, sr Marie-Françoise, (Marie Bal), 1905-1988, p. 104. Dans A.C.M.
174 1929-1954. À notre charmante violette Sr Marie-François de l’Enfant-Jésus…, Malonne, 1954. Dans A.C.M. Série d’une enveloppe personnelle par sœur…, sœurs externes, n° 9.
175 Nécrologe, sr Bernadette…, Léona Delférière, 1912-1980, p. 92-94. Dans A.C.M.
176 Souvenirs de sr Marie-Josèphe, avril-mai 1998, p. 12. Dans A.C.M. Série d’une enveloppe personnelle…
177 Lettre des clarisses à l’évêché, Malonne, le 25 octobre 1961. Dans A.C.M. Série N. Section 2. Hôtellerie.
178 Interview de sr Françoise (Franque), Malonne, les 14, 15 et 16 avril 1998.
179 Coutumier des religieuses Pauvres claires colettines…, Huy, p. 28 et 50. Dans A.C.M. Archives fédérales…
180 Thérèse d’Avila, Le chemin de la perfection…, p. 294, 394-395.
181 Ils doivent avoir lieu le matin entre 8h30 et 11 h et l’après midi, de 13h à 15h30. Pendant l’Avent, le carême, la retraite annuelle, les dimanches et les jours de fête, les parloirs sont exclus. Cf. Coutumier des religieuses Pauvres claires colettines…, Huy, p. 30. Dans A.C.M. Archives fédérales.
182 Monastère des Pauvres Clarisses. Malonne. Coutumier…, 1944, p. 41. Dans A.C.M. Série G.
183 Usages réguliers…, p. 160. Dans A.C.F.
184 Règle et constitutions…, 1938, p. 101-102, 110. Dans A.C.M. Série G.
185 Coutumier des religieuses Pauvres claires colettines…, Huy, p. 31. Dans A.C.M. Archives fédérales.
186 Souvenirs de sr Marie-Josèphe, avril-mai 1998, 14 p. Dans A.C.M. Série d’une enveloppe personnelle par sœur…
187 Interview de mère Marie-Cécile de Jésus (Madeleine Michel), Floreffe, les 20, 21 et 22 octobre 1993.
188 Interview de sr Marie-Bernard du Christ (Bernadette de Dorlodot), Floreffe, les 20, 21 et 22 octobre 1993.
189 Interview de sr Marcelle du Cœur de Jésus (Marcelle Pirotte), Floreffe, les 20, 21 et 22 octobre 1993.
190 La clôture, texte réalisé par une jeune carmélite du carmel de Floreffe, Floreffe, janvier 1971, p. 3-4. Dans A.C.F. Classeur. Carmel. 2. Section ‘Renouveau’.
191 Interview de sr Marie-Joseph de Jésus (Marie Josèphe Verhoye), Malonne, les 16, 17 et 18 avril 1998.
192 Interview de sr Françoise (Franque), Malonne, les 14, 15 et 16 avril 1998.
193 Ibid.
194 Interview de sr Marie-Bernard (Bernadette de Dorlodot), Floreffe, les 20, 21 et 22 octobre 1993.
195 Déclarations sur la règle…, [1910], p. 133-134. dans A.C.M.
196 Règle de l’ordre de sainte Claire avec les statuts de la réforme de sainte Colette…, [1864], p. 90. Dans A.C.R.
197 Carnet des retraites données par le père Adrien, 1941-1944. Carnet noir. Constitutions, retraite d’octobre 1941, Malonne, p. 5. Dans A.C.M. Série K. Section 3. Formation permanente. Spiritualité et divers (1).
198 Coutumier des religieuses Pauvres claires colettines…, Huy, p. 31. Dans A.C.M. Archives fédérales.
199 Monastère des Pauvres Clarisses. Malonne. Coutumier…, 1944, p. 41-42. Dans A.C.M. Série G.
200 Interview de sr Françoise (Franque), Malonne, les 14, 15 et 16 avril 1998.
201 Usages réguliers…, p. 168. Dans A.C.F.
202 Interview de sr Madeleine de Saint-Joseph (Anne-Marie Bauduin), Floreffe, le 20, 21 et 22 octobre 1993.
203 Interview de sr Marie-Bernard (Bernadette de Dorlodot), Floreffe, les 20, 21 et 22 octobre 1993.
204 Interview de mère Marie-Cécile de Jésus (Madeleine Michel), Floreffe, les 20, 21 et 22 octobre 1993.
205 Enveloppe ‘Lettres adressées à Sr Marguerite du S.C. (Germain) par sa sr Marie de Saint-Joseph (Germain), 1933-1937’. [25 lettres]. Dans A.C.J. Boîte ‘Carmélites de Ciney, Huy et Corioûle’.
206 Lettre de sr Marie de Saint-Joseph, Ciney, le 18 août 1935. Dans A.C.J. Boîte ’Carmélites de Ciney… ’.
Enveloppe ’Lettres adressées à Sr Marguerite du S.C. (Germain) par sa sr Marie de Saint-Joseph (Germain), 1933-1937’.
207 Lettre de sr Marie de Saint-Joseph, Ciney, le 30 septembre 1934. Dans A.C.J.
208 Lettre de sr Marie de Saint-Joseph, Ciney, le 11 octobre 1936. Dans A.C.J.
209 Lettre de sr Marie de Saint-Joseph, Ciney, le 16 janvier 1938. Dans A.C.J.
210 Lettre de sr Marie de Saint-Joseph, Ciney, le 14 août 1938. Dans A.C.J.
211 Lettre de sr Marie Marguerite du Sacré-Cœur, Jambes, le 24 décembre 1960. Dans A.G. OCD. Série D. 84J.
212 Livre précieux…, Magdeleine de Jésus, Marguerite Bovagnet, 1875-1951, p. 164. Dans A.C.F.
213 Livre précieux…, Marie-Thérèse de Jésus, Julia Royaux, 1893-1975, p. 3. Dans A.C.F.
214 Dans le sillage de Thérèse : Sr Marie-Germaine de Jésus, o.c.d. (1877-1947), par sr Marie-Immaculée, Jambes, p. 14.
215 Drewermann (E.), Fonctionnaires de Dieu…, p. 182-186.
216 Notices…, sr Marie du Saint-Sacrement, Catherine Schrols, 1827-1918, p. 187. Dans A.C.J.
217 Notices…, sr Marie-Stéphanie des Apôtres, Marie Reder, 1856-1897, p. 88. Dans A.C.J.
218 Notices…, sr Marie-Cécile des Saints-Anges, Maria Grandjean, 1856-1906, p. 169, 175. Dans A.C.J.
219 Notices…, sr Thérèse de Jésus, Lucia Bouillon, 1868-1918, p. 299. Dans A.C.J.
220 Notices…, sr Marie-Éléonore…, Anne-Marie du Roscoäl, 1851-1926, p. 325. Dans A.C.J.
221 Notices…, sr Marie-Élie du Sacré-Cœur de Jésus, Marie Anciaux, 1832-1917, p. 269. Dans A.C.J.
222 Notices…, sr Marie-Julienne de Jésus, Marie Müller, 1879-1916, p. 261. Dans A.C.J.
223 Archives du monastère Saint-Michel des sœurs de Sainte-Claire…, [1911-1954], p. 135.
224 Notices…, sr Marie-Madeleine du saint Enfant-Jésus, Marie Dewert, 1865-1939, p. 23. Dans A.C.J.
225 Notices…, sr Térésa-Joseph du Saint-Cœur de Marie, Angèle Monchamps, 1862-1938, 15. Dans A.C.J.
226 Notices…, sr Thérèse de Jésus, Lucia Bouillon, 1868-1918, p. 297. Dans A.C.J.
227 Ibid.
228 Sr Marie-Agnès, Gabrielle Mons, 1880-1964, notice préparée par Sr Marie-Thérèse du Sacré-Cœur, vers 1920, dans Boîte ‘Archives II’. Enveloppe ‘Notices et souvenirs sur différences sœurs’.
229 Notices…, mère Marie des Anges…, Maria Bodart, 1847-1919, p. 107. Dans A.C.J.
230 Notices…, sr Marie-Thérèse du Sacré-Cœur de Jésus, Mélanie Petit, 1859-1940, p. 28. Dans A.C.J.
231 Notices…, sr Marie-Alphonse de Sainte-Thérèse, Marie Gilbert, 1849-1931, p. 340. Dans A.C.J.
232 Notices…, sr Marie-Christine de Saint-Joseph, Lévina Duchêne, 1883-1943, p. 36-37. Dans A.C.J.
233 Ibid.
234 Sr Bernadette de l’Immaculée-Conception, Stéfanie Doudriack, 1910-1968, dans A.C.J.
235 Interview de sr Marie-Lucie de Jésus (Ida Furnémont), Jambes, le 23 avril 1999.
236 Bonanate (M.), Femmes de Dieu. Au-delà des grilles dans les monastères de l’an 2000, Paris, 1991, p. 236.
237 Lettre de sr Marie des Anges, Roulers, le 14 juillet 1924. Dans A.C.S. Carton ‘Archives n° 1’.
238 Nécrologe, sr Marie-Emmanuel des Anges, Marie Herenguel, 1876-1910, p. 8. Dans A.C.M.
239 Nécrologe, sr Marguerite-Marie, Paulette Tricot, 1906-1992, p. 106. Dans A.C.M.
240 Nécrologe, sr Marie des Anges, Yvonne L., 1906-1985, p. 99. Dans A.C.M.
241 Nécrologe, sr Marie du Sacré-Cœur, Marie-Frédérique Schweighœuser, 1870-1920, p. 31. Dans A.C.M.
242 Nécrologe, sr Marie du Sacré-Cœur…, p. 32. Dans A.C.M.
243 Nécrologe, sr Alice-Marie, Alice Cointrel, 1910-1986, p. 97. Dans A.C.M.
244 Office des vêpres du jubilé de Sr Marie-Anna. 1re classe, chant pour les 50 ans de profession de Sr Marie-Anna, Saint-Servais, le 8 septembre 1947. Dans A.C.S. Carton ‘Archives n° 1’. Chants de sr Marie-Madeleine.
245 Wynants (P.), Les religieuses contemplatives…, dans Filles du silence…, p. 69.
246 Résumé de la thèse de Dominique Dinet (Vocation et fidélité, le recrutement des réguliers dans les diocèses d’Auxerre, Langres et Dijon aux XVIIe et XVIIIe siècles, Paris, 1988 , 333 p.) dans Bulletin du C.E.R.C.O.R., déc. 1985, n° 8, p. 24-25.
247 Henneau (M.-É.), Moniales contemplatives dans la tradition bénédictine et cistercienne, dans Filles du silence…, p. 135.
248 Carnier (M.), Les couvents des capucines en Belgique, dans Filles du silence…, p. 223.
249 Lettre de mère Marie des Anges, Roulers, le 28 février 1891. Dans AG (Rome) OFM. P 72. Suore clarisse, 1800-1895. Francia-Belgio.
250 Déclarations sur la Règle…, [1910], p. 35. Dans A.C.M.
251 Sa notice figure dans le chapitre sur le gouvernement, p. 343, note 83.
252 Dossier du père Adrien, s.l., mars 1941. Dans A.C.M. Série G : Vie communautaire. Section 2, 2 : Constitutions. Concernant les constitutions du 21 janvier 1938.
253 En 1961, l’assistant fédéral Henri Peeters apporte d’autres précisions quant à la renonciation aux biens, en rapport avec le statut canonique des moniales qui ne sont plus soumises officiellement depuis la Révolution française et cela jusqu’en 1921, aux vœux solennels. Il précise que les clarisses ont disposé, même hors du régime des vœux solennels, du privilège « de renoncer à leurs biens » : « quoique n’ayant pas les vœux solennels, vous avez le droit de renoncer à vos biens, parce que vos constitutions et votre privilège de pauvreté le permettent et l’imposent, et que Rome, en donnant des indults généraux n’a pas voulu y déroger. Les clarisses considèrent la renonciation à leurs biens comme une faveur et non comme une charge. Les moniales non-clarisses, n’ayant pas dans l’Église la même mission ‘témoignage de pauvreté’ ne doivent nullement adopter la même pratique ». Cf. Lettre du fr. Henri Peeters, assistant religieux, Bruxelles, le 12 juin 1961. Dans A.E.N. Série R.9. Enveloppe ‘Fédérations des communautés religieuses. 1954-1962’.
254 Dossier du père Adrien, s.l., mars 1941, p. 3-4. Dans A.C.M. Série G.
255 Interview de sr Marie-Joseph de Jésus (Marie-Josèphe Verhoye), Malonne, les 16, 17 et 18 avril 1998.
256 Lettre de sr Marie de Saint-François, Malonne, le 6 février 1937. Dans A.C.M. Série d’une enveloppe personnelle…, n° 26-33.
257 Interview de sr Marie-Joseph de Jésus (Marie-Josèphe Verhoye), Malonne, les 16, 17 et 18 avril 1998.
258 Lettre de mère Marie des Anges, Roulers, le 28 février 1891. Dans AG (Rome) OFM. P 72. Suore clarisse, 1800-1895. Francia-Belgio.
259 Archives du monastère de Saint-Joseph… fondé à Huy en 1892, p. 7. Dans A.C.H.
260 Lettre de sr Marie-Gertrude, Roulers, 22 février 1925, p. 4. Dans A.C.S.
261 Association sans but lucratif. Monastère des Clarisses de Saint-Servais, comptes annuels, 1923-1958, p. 2. Dans A.C.S. Carton ’Archives n° 4’.
262 Lettre de sr Marie-Gertrude, Roulers, le 7 février 1924. Dans A.C.S. Carton ‘Archives n° 1’. Lettres de mère Marie des Anges de Roulers, 1922-1938.
263 Coutumier des religieuses Pauvres claires colettines…, Huy, p. 88b. Dans A.C.M. Archives fédérales.
264 Ibid. ; Goede gebruiken voor de religieusen arme clarissen-coletinen van het klooster van Rousselare… (trad. française). Dans A.C.R.
265 Sur l’affaire Béguin, voir p. 265 et sv.
266 En 1927, la prieure de Floreffe demande une dispense de dot pour Marie Gustin qui est entrée au couvent sans l’autorisation de son père ; elle est accordée par l’évêque qui demande en contre partie : « il est bien entendu qu’à la mort de ses parents, la postulante héritera de sa part ». Cf. Lettre de l’évêché de Namur, le 8 novembre 1927. Dans A.C.F. Sœurs. Dossier n° 36. À Jambes, on note également une certaine souplesse quant au paiement de la dot. De Marie-Louise du Saint-Esprit, élue à sept reprises prieure de 1886 à 1913, il est dit qu’elle préférait recevoir sans dot des postulantes ayant de bonnes dispositions que des jeunes filles fortunées « qui ne donneraient pas les mêmes espérances ». Cf. Notices des religieuses décédées…, mère Marie-Louise du Saint-Esprit, Idalie Desy, 1846-1915, p. 225. Dans A.C.J. Les archives de l’évêché contiennent trois dispenses de dot pour le carmel de Jambes dans les décennies 1940-1950. En 1949, la prieure demande une dispense de dot pour une demoiselle de Nivelles dont les parents s’opposent à l’entrée ; elle appuie sa demande en affirmant « que l’état financier de la communauté et le travail fourni par [les] religieuses permettent d’envisager avec suffisamment de sécurité cette admission ». Cf. Lettre du père Marie de Jésus, provincial, Bruxelles, le 20 juin 1949. Dans A.E.N. R.35. Carmélites de Jambes. En 1953, une sœur obtient une dispense partielle de dot « à condition qu’elle la complète dès que possible ». Cf. Dispense de dot. Évêché de Namur, Namur, le 27 février 1953. Dans A.E.N. R.35. Carmélites de Jambes. En 1955, une troisième dispense de dot est octroyée « avec obligation de compléter dès que possible ». « Dispense partielle de dot pour sr Marguerite (verse 30.000 au lieu de 50.000) avec obligation de compléter dès que possible. » Dispense de dot. Évêché de Namur, Namur, le 12 février 1955. Dans A.E.N. R.35. Carmélites de Jambes.
267 En 1936, le provincial carme écrit : « J’attire l’attention […] sur la grave obligation qu’il y a […] d’exiger une dot de toute postulante choriste. » Cf. Notes communiquées aux carmélites de la province Saint-Joseph de Brabant par N.T.R.P. Gérard de Saint-Joseph, provincial, le 25 juin 1936. Dans A.C.F. Classeur. Carmel. 4. Formation.
268 Cf. Règle et constitutions…, Milan, 1926, p. 124-125. Dans A.C.F.
269 « Il est entièrement défendu de la dépenser avant la mort de la religieuse, en quelque manière que ce soit, pas même pour construire la maison ou éteindre des dettes. » Cf. Règle et constitutions…, Milan, 1926, p. 118. Dans A.C.F.
270 Rosa Gillibert naît le 4 juin 1842 à Isle-les-Avignon dans une famille de rentiers « très aisée ». Elle est l’unique enfant du couple. Formée chez les ursulines, elle se présente au carmel de Montélimar le 8 octobre 1861, à 19 ans. Le 31 décembre de la même année, elle prend l’habit sous le nom de Marie-Thérèse-Josèphe de Jésus-Hostie. Elle est affectée aux offices de couture (office des voiles, des chausses de laine et de toile). D’une santé peu brillante, elle meurt d’une anémie cérébrale le 8 novembre 1907. Sa mémoire est également associée aux nombreuses libéralités qu’elle a faites au couvent.
271 Au carmel de Jambes également. Par exemple, Marie Anciaux, fille fortunée de notaire, paie elle-même sa dot et ses frais de noviciat, ce qui est l’occasion de soulever, pour la compositrice d’un chant humoristique, l’attachement de la jeune fille à son argent et ses bijoux. Cf. Débats du procès de béatification de la vénérable mère Marie Élie du S.C. de Jésus, morte en odeur de sainteté au carmel de Jambes, le 25 décembre 1939 dans sa 103e année. Élevée sur les autels sous le glorieux pontificat de sa sainteté le pape Avantin 1er, le 20 juillet 1989, Jambes, [1909]. Dans A.C.J.
272 Nous n’avons pas trouvé d’informations sur le ou les propriétaire(s) du couvent avant la constitution en a.s.b.l. Il est très probable que le père syndic, le chanoine Bouchat, ait fonctionné comme prête-nom jusque là.
273 Lettre de sr Marie des Anges, Roulers, juin 1923, p. 4-5. Dans A.C.S. Carton ‘Archives no 1’.
274 Lettre de sr Marie-Agnès, abbesse des clarisses de Saint-Servais, le 22 décembre 1951. Dans A.E.N. Série R 46. Clarisses de Saint-Servais, 1952-1983.
275 Monastère Saint-Michel. Relation quinquennale pour les années 1955-1959. Dans A.C.S. Carton ‘Archives no 2’. Relation quinquennale. 1959.
276 Sa notice figure dans le chapitre sur le gouvernement des pères, p. 380, note 126.
277 Lettre de mère Marie des Anges, Roulers, février 1924, p. 2. Dans A.C.S. Carton ’Archives no 1’. Lettres de mère Marie des Anges de Roulers, 1922-1938.
278 Archives du monastère Saint-Michel des sœurs de Sainte-Claire…, [1911-1954], p. 35. Dans A.C.S.
279 Archives du monastère Saint-Michel des sœurs de Sainte-Claire…, [1911-1954], p. 95. Dans A.C.S.
280 Monastère Saint-Michel. Relation quinquennale pour les années 1949-1954, p. 4-5. Dans A.C.S. Carton ‘Archives no 2’. Relation quinquennale. 1954.
281 Clarisses de Saint-Servais, le 5 novembre 1953. Visite canonique par le chanoine L. Hubin. Dans A.E.N. R. 19. Visites canoniques de communautés religieuses de la province de Namur.
282 Pauvres Claires, Saint-Servais. Le 28 avril 1965. Visite canonique par le père Croonenberghs. Dans A.E.N. R. 19. Visites canoniques de communautés religieuses de la province de Namur.
283 Origine et historique du monastère des pauvres clarisses de l’Ave Maria…, p. 70. Dans A.C.M.
284 En juin 1930, Mr Waelkens demande des prières pour la marche de ses affaires : « ayant été exaucé, il nous envoya 30.000 F. […]. Cette somme servira pour les nouvelles constructions. Cf. ibid., p. 82. Dans A.C.M.
285 Ibid., p. 74. Dans A.C.M.
286 Lettre de J. Waelkens, Thielt, le 25 juin 1929. Dans Série N. Section 3. Bienfaiteurs et amis. Lettres de Mr Waelkens, notre syndic de 1926 à 1958.
287 Origine et historique du monastère des pauvres clarisses de l’Ave Maria…, p. 97. Dans A.C.M.
288 « Il examina pour poser l’électricité d’une façon irréprochable et très satisfaisante, puis il fit changer la chaudière du calorifère devenue insuffisante, il fit aussi une amélioration aux vasistas de la chapelle, enfin, il nous fournit d’étoffe pour habits, chemises, draps de lit, couvre-chefs etc. etc. Nous étions dans une pauvreté extrême, quand le bon maître nous ménagea ce secours providentiel. » Origine et historique du monastère des pauvres clarisses de l’Ave Maria…, p. 106. Dans A.C.M.
289 Interview de sr Marie-Joseph de Jésus (Marie-Josèphe Verhoye), Malonne, les 16, 17 et 18 avril 1998.
290 Il s’agit des restes, non des assiettes des élèves, mais des plats mis à table.
291 Origine et historique du monastère des pauvres clarisses…, p. 33, 20. Dans A.C.M.
292 Relation des 50 ans du monastère de Malonne, Malonne, le 12 août 1953, p. 5. Dans A.C.M. Série G : Vie de la communauté. 5 : Annales, états, listes, chroniques, lettres aux absents.
293 Interview de sr Françoise (Franque), Malonne, les 14, 15 et 16 avril 1998.
294 Origine et historique du monastère des pauvres clarisses…, p. 59. Dans A.C.M.
295 Entretien avec sr Françoise (Franque), Malonne, le 13 juin 1997.
296 « … Notre mère Antoinette, avec sa confiance invincible, recourut à saint Joseph : elle plaça l’enveloppe renfermant les factures aux pieds de saint Joseph, promettant une neuvaine de Messes, si tout est payé à la fin du mois ; et voici que saint Joseph commence le trafic d’argent : chaque jour nous apporte 100F, 200F, 300F, 50F etc. etc. ». Origine et historique du monastère des pauvres clarisses de l’Ave Maria à Malonne…, p. 72. Dans A.C.M.
297 Ibid., p. 81-82. Dans A.C.M.
298 Ibid., p. 106. Dans A.C.M.
299 Il s’agit d’un don d’un professeur de collège de Tourcoing, alerté par les membres de la famille des clarisses de la pauvreté de celles-ci.
300 Interview de sr Marie-Joseph de Jésus (Marie-Josèphe Verhoye), Malonne, les 16, 17 et 18 avril 1998.
301 Fédération Sainte-Claire. Relation quinquennale, 1955-1959, le 24 février 1959, p. 7. Dans A.C.M. Archives fédérales. Caisse ‘Relations quinquennales… ’.
302 Fédération Sainte-Claire. Relation quinquennale, 1960-1964, le 1er décembre 1964, p. 6 et 14. Dans A.C.M. Archives fédérales. Caisse ’Relations quinquennales… ’.
303 Interview de sr Colette (Micheline Swalus), clarisse de Bruxelles-Loonbeek, 17 octobre 1998.
304 Monastère des moniales de l’ordre de sainte Claire à Malonne-lez-Namur (Belgique). Relation quinquennale, 1964, p. 3. Dans Série G : Vie de la communauté. Section 3 : Rapports quinquennaux.
305 Pauvres Claires, Malonne. Le 5 mai 1965. Visite canonique par le père Croonenberghs. Dans A.E.N. R. 19. Visites canoniques de communautés religieuses de la province de Namur.
306 Voir le point « e. 1950 : la promotion du travail rémunéré par l’Église », p. 268.
307 Interview de sr Thérèse (Danis), Malonne, le 17 avril 1998.
308 Interview de sr Marie-Joseph de Jésus (Marie-Josèphe Verhoye), Malonne, les 16, 17 et 18 avril 1998.
309 À la suite d’une convention entre la France et la Belgique, les sœurs françaises reçoivent une pension de vieillesse de l’État belge. Cf. Derix (J.), De armoede is mijn rijkdom…, p. 39.
310 Cette loi de juin 2001 concerne la G.R.A.P.A. (Garantie de Revenus aux Personnes Âgées), revenu d’intégration qui remplace le minimex. Les religieuses sont considérées comme cohabitants, ce qui signifie une diminution des revenus (cohabitant : 411,55 euros par mois ; isolé : 617,37 euros par mois). Depuis mai 2004, il y a une « amélioration en cours ». Cf. Lettre de Christiane Loicq à l’auteur, Malonne, le 18 août 2004 ; Moniteur belge, 21 juin 2004.
311 Mère Marie de la Trinité, Émilie Monin, 1874-1923, dans Livre précieux…, p. 118. Dans A.C.F.
312 À titre de comparaison, la construction du carmel de Floreffe a coûté, en 1908, 70.000 francs belges.
313 « Ce fut la guerre pour tous, surtout pour les couvents de cloîtrées qui devaient rester coites derrière leurs grillages à picots. On dut se serrer la bouche et vivre d’un ravitaillement dérisoire et de ce que les pauvres tourières allaient quémander de portes en portes en y mettant le prix dans les communes voisines de huit et dix kilomètres de distance, heureuses encore quand, pour le retour, la petite charrette était chargée à craquer. » Lettre du menuisier Jean Dumont, s.l., [1922-1940]. Dans A.C.F. Classeur. Amis du carmel.
314 Livre précieux…, p. 185. Dans A.C.F.
315 Lettre de Guillaume de Saint-Albert, préposé général, Rome, le 10 août 1926. Dans A.C.F. Classeur. Carmes. Supérieurs généraux.
316 Les données par années sont le résultat d’une analyse plus approfondie présentée dans notre mémoire de licence et dans un article traitant de la vie matérielle au couvent. Nous renvoyons au mémoire pour les données brutes, et à l’article pour une vue d’ensemble : Marcélis (A.-D.), Le mode de vie des moniales contemplatives au XXe siècle. L’exemple du carmel de Floreffe, dans Revue belge d’histoire contemporaine, t. XXV, 1994-1995, n° 3-4, p. 397-432.
317 Rapport sur les carmels du diocèse de Namur par le provincial Élisée de la Nativité. Carmel de Floreffe, le 7 mars 1964. Dans A.E.N. Série R. 35. Carmélites. Generalia, 1946-1981.
318 Rapport… Carmel de Jambes, le 15 avril 1966. Dans A.E.N. Série R. 35.
319 Livre précieux…, p. 165.
320 Les chroniques de notre monastère I…, 1925, p. 191. Dans A.C.F.
321 Livre précieux…, p. 178. Dans A.C.F.
322 Interview de mère Marie-Cécile de Jésus (Madeleine Michel), Floreffe, les 18, 19 et 20 octobre 1993.
323 Livre précieux…, Marie-Véronique de la Sainte-Face, Marie-Thérèse Dujardin, 1901-1982, p. 205.
324 Notes I de mère Élisabeth de la Trinité (24 décembre 1946), p. 82. Dans A.C.F.
325 Réunions communautaires. Cahier n° 4 (4 août 1980), p. 7. Dans A.C.F.
326 Marie-Bernard du Christ (Bernadette de Dorlodot), Prier toute sa vie ?, dans La foi et le temps, nov.-déc. 1968, n° 6, p. 7.
327 Notamment avec l’encyclique Sponsa Christi (21 novembre 1950) où le pape encourage les monastères de moniales à se regrouper en fédération en vue d’une entraide économique, et à gagner leur vie par un travail rentable.
328 Rapport du père Adrien sur le régime alimentaire des clarisses de Malonne, [1948], 4 p. Dans A.E.N. Série R 46. Clarisses de Malonne. Correspondance 1936-1960.
329 Au sujet du Petit Office de la Sainte-Vierge, voir la note 139, p. 496.
330 Lettre de l’évêque de Namur, Mgr Charue, Namur, le 23 février 1949, dans Enquête faite par l’évêché à propos de l’horaire de communauté et du régime alimentaire en 1948-1949-1959. Série D. Section 4. Mgr André Marie Charue.
331 Interview de sr Thérèse (Danis), Malonne, le 17 avril 1998.
332 Réponse au questionnaire en vue d’établir un fichier sur l’état du monastère. Clarisses de Malonne, Malonne, 1968, p. 6. Dans A.C.M. Archives fédérales. Fichier des communautés de Wallonie, 1968.
333 L’Union des Supérieurs Majeurs est l’organe représentatif des congrégations masculines belges.
334 Travail des contemplatives, clarisses de Malonne, 1969. Dans A.C.M. Série M. Section 1. Accueil. But de la maison d’accueil.
335 Notre aggiornamento. Clarisses de Malonne. Réponse à la lettre encyclique du père Constantin Koser, Malonne, 4 octobre 1967, p. 15. Dans A.C.M. Série G. Section 6. Aggiornamento depuis Vatican II.
336 Historique du monastère de l’Ave Maria, II, 1951-, Malonne, p. 51.
337 Lettre de sr Monique de Jésus, Floreffe, le 24 mai 1970. Dans A.C.F. Classeur. Sœurs. Dossier n° 55.
338 Telex, pièce composée à l’occasion de la Sainte-Cécile, Floreffe, le 14 janvier 1989, p. 5. Dans A.C.F. Classeur. Sœurs. Dossier n° 43.
339 Rapport de mère Abbesse de Huy sur : Problème actuel : pauvreté et mobilier, s.l.n.d., p. 5. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédérations. Documents, rapports et lettres.
340 Rapport de Mère Abbesse de Tournai sur la pauvreté…, [1955], p. 3. Dans A.C.M.
341 Rapport de mère Abbesse de Huy…, p. 5. Dans A.C.M. Série E.
342 Le travail dans notre vie contemplative, s.l.n.d. [1955], p. 4. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédération. Travaux de la fédération du temps de mère Françoise de Hannut, présidente.
343 Fédération sainte Claire. 1re réunion [du conseil fédéral], le 1er mai 1956, p. 4. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédération. Rapport des conseils fédéraux, de 1953 à 1965.
344 Rapport de mère Abbesse de Huy…, p. 5. Dans A.C.M.
345 Ibid., p. 3. Dans A.C.M.
346 Rapport de Mère Abbesse de Tournai…, [1955], p 6. Dans A.C.M.
347 Rapport sur : retrait du monde, pénitence, pauvreté, travail, obéissance, vie de prière…, s.l.n.d., p. 4. Dans A.C.M. Série E. Section 5. U.R.C. De juin 1967 à décembre 1969.
348 Lettre de Joseph Ernest, archevêché de Malines, Malines, le 27 septembre 1926. Dans A.E.N. Série R.3. Correspondance avec l’évêché et documents généraux… 8 dossiers. Enveloppe ‘Communautés religieuses. Généralités. Tableau du clergé 1930’.
349 Lettre de F. Everaert, vicaire général, Malines, le 3 février 1943, cité dans Lettre de R. Joanne, secrétaire au ministère du travail et de la prévoyance sociale, Bruxelles, le 13 décembre 1950. Dans A.E.N. Série R.3. Correspondance avec l’évêché et documents généraux… 8 dossiers. Enveloppe ’Religieuses Generalia, 1936-1951’.
350 Pro monialibus, n° 18, novembre 1969, p. 6. Dans A.C.M. Série E. Section 3. Union internationale des clarisses. Commission pour les moniales o.s.c. auprès de la curie générale de l’ordre des frères mineurs.
351 Compte rendu des premières journées de rencontre des supérieures des religieuses contemplatives de Belgique à Malines, du 2 au 5 mai 1967, s.l.n.d., p. 11. Dans A.C.M. Série E. Section 5. U.R.C. Rencontre des moniales à Malines, mai 1967.
352 Réunions du conseil fédéral, 1953 à 1971, Fédération Sainte-Claire, (réunion du conseil du 4 au 5 avril 1956, procès rédigé par sr M. Joseph de l’E.J.), manuscrit, s.l.n.d., p. 16. Dans A.C.M. Archives fédérales. Caisse ‘Relations quinquennales… ’
353 Fédération sainte Claire. 1re réunion [du conseil fédéral], le 1er mai 1956, p. 3. Dans Série E. Section 9. Fédération. Rapport des conseils fédéraux, de 1953 à 1965.
354 Importance et pratique de la pauvreté [Malonne], s.l.n.d. [1955], p. 3. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédération. Travaux de la fédération du temps de mère Françoise de Hannut, présidente.
355 Rapport de la R.M. Abbesse de Malonne sur le travail […], points principaux touchés pendant l’échange de vue qui a suivi ce rapport, [novembre 1953], s.l.n.d., p. 2. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédération. Rapport des conseils fédéraux, de 1953 à 1965.
356 Rapport sur : retrait du monde, pénitence, pauvreté, travail, obéissance, vie de prière…, s.l.n.d., p. 4. Dans A.C.M. Série E. Section 5. U.R.C. De juin 1967 à décembre 1969.
357 Fédération Sainte-Claire. Relation quinquennale, 1955-1959, le 24 février 1959, p. 8. Dans A.C.M. Archives fédérales. Caisse ‘Relations quinquennales… ’
358 « Prix à demander : aube : 40 f ; surplis de prêtre : 30 f ; surplis d’enfant : 25 f ; Nappe d’autel : 25 à 35 f ; Amict : 5 f ; Pale : 20 f ; Purificatoire : 2 f ; Manuterge : 2 f ; Cordon d’aube : 2 f ; Col d’étole : 1,50 f ; Essuie-main : 2 f ; Une heure de raccommodage : 20 f. » Cf. Fédération Sainte-Claire. Rapport de la réunion du Conseil fédéral 1958, s.l.n.d., p. 9. Dans Série E. Section 9. Fédération. Rapport des conseils fédéraux, de 1953 à 1965.
359 Fédération… . Relation quinquennale…, le 24 février 1959, p. 8. Dans A.C.M.
360 Compte rendu des premières journées de rencontre des supérieures…, p. 11. Dans A.C.M. Série E. Section 5. U.R.C. Rencontre des moniales à Malines, mai 1967.
361 Importance et pratique de la pauvreté [Malonne], s.l.n.d. [1955], p. 3. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédération. Travaux de la fédération du temps de mère Françoise de Hannut, présidente.
362 Fédération… Relation quinquennale…, le 24 février 1959, p. 8. Dans A.C.M.
363 Fédération… Relation quinquennale…, le 1er décembre 1964, p. 7. Dans A.C.M.
364 Rapport sur les carmels du diocèse de Namur par le provincial Élisée de la Nativité. Carmel de Floreffe, le 7 mars 1964. Dans A.E.N. Série R. 35. Carmélites. Generalia, 1946-1981.
365 Id., Dernier rapport sur le carmel de Floreffe, Bruxelles, le 28 mars 1968. Dans A.E.N. Série R. 35.
366 Id., Carmel de Rochefort, le 7 mars 1964. Dans A.E.N. Série R. 35.
367 Id., Carmel de Rochefort, Bruxelles, le 28 mars 1968. Dans A.E.N. Série R. 35.
368 Id., Carmel de Jambes, le 7 avril 1965. Dans A.E.N. Série R. 35.
369 Id., Carmel de Jambes, le 15 avril 1966. Dans A.E.N. Série R. 35.
370 Id., Carmel de Matagne-la-Petite, le 7 mars 1964. Dans A.E.N. Série R. 35.
371 Id., Carmel de Marche-en-Famenne, le 7 mars 1964. Dans A.E.N. Série R. 35.
372 Id., Carmel de Marche-en-Famenne, Bruxelles, le 28 mars 1968. Dans A.E.N. Série R. 35.
373 Id., Carmel de Ciney, le 7 mars 1964. Dans A.E.N. Série R. 35.
374 Id., Carmel de Virton, le 7 mars 1964. Dans A.E.N. Série R. 35.
375 Id., Carmel de Marche-en-Famenne, le 7 avril 1965. Dans A.E.N. Série R. 35.
376 Abbayes et collégiales entre Sambre et Meuse…, p. 90-98.
377 Théo…, p. 40.
378 Vergote (A.), Dette et désir…, p. 147.
379 Hill (M.), Typologie sociologique de l’ordre religieux…, p. 60-61, 64.
380 Réponse au questionnaire en vue d’établir un fichier sur l’état du monastère. Clarisses de Saint-Servais, Saint-Servais, 1968, p. 5. Dans A.C.M. Fédération Malonne. Archives fédérales. Fichier des communautés de Wallonie, 1968.
381 Matthieu le pauvre, père, L’expérience de Dieu dans la vie du moine…, p. 31.
382 Albert ( J.-P.), Le sang et le ciel. Les saintes mystiques dans le monde chrétien, Mayenne, 1997, p. 339, 341, 410-411.
383 Seguy ( J.), Les sociétés imaginées : monachisme et utopie, dans Annales. E.S.C., 1971, no 2, p. 337.
384 Bernard (C.-A.), Le Dieu des mystiques, t. II : La conformation au Christ, Paris, 1998, p. 12 (Théologies).
385 Seguy (J.), Les sociétés imaginées…, p. 336.
386 Lopez (É.), Culture et sainteté. Colette de Corbie…, p. 433.
387 Règle de sainte Claire et constitutions…, p. 26.
388 Henri de Baume (°1367, Bourgogne - †23 février 1439, Besançon) entre chez les franciscains, vraisemblablement au couvent de Chambéry et devient prédicateur de renom. En 1406, il est mandé par Colette de Corbie pour l’assister dans sa réforme du second ordre. Des écrits de Henri de Baume, très peu ont été retrouvés : ses constitutions pour les coletans, une lettre adressée à sainte Colette, une exhortation à la vie religieuse. Cf. Schmitt (C.), art. Henri de Baume, dans D.S., t. VII, Paris, 1969, col. 178-180.
389 Règle de sainte Claire et constitutions…, p. 54.
390 Friedlander (C.), En guise de présentation. La réalité concrète, dans La clôture des moniales, trente ans d’expectative, Namur, 1997, p. 12 (Coll. Vie consacrée, no 18).
391 Lopez (É.), Culture et sainteté. Colette de Corbie…, p. 443.
392 Gounon (M.-P.), Le renouveau du XIXe siècle…, p. 372 et 374.
393 Bultot (R.), Aux sources du divorce entre l’Église et le monde moderne : la doctrine du mépris du monde, dans Rêves de chrétienté, réalités du monde. Imaginaires catholiques, Actes du colloque Louvain-la-Neuve, 4-6 novembre 1999, s. dir. L. van Ypersele, A.-D. Marcélis, Louvain-la-Neuve, 2001, p. 17-58.
394 Instruction sur la clôture d’après le chapitre 3 des Constitutions de Sainte Thérèse, dans Écrits de la mère Louis de Gonzague…, p. 228. Dans A.C.J. Recueil E.
395 Sur le chapitre 3 : de la clôture, dans Écrits de la mère Louis de Gonzague…, p. 359. Dans A.C.J.
396 Sur le titre 7e de la règle, dans Écrits de la mère Louis de Gonzague…, p. 307. Dans A.C.J.
397 Sur le chapitre 3 : de la clôture, dans Écrits de la mère Louis de Gonzague…, p. 357. Dans A.C.J.
398 « Je suis l’aveugle volontaire, Sans marcher au hasard, la foi me montre que la terre, est indigne de mon regard, Une incomparable sagesse, que le monde ne connaît pas, à l’oreille me dit sans cesse, ferme les yeux et tu verras […] » Cf. L’aveugle volontaire ou le recueillement, s.d. Dans A.C.J. Chants. Cantique… Recueil de chants pour les fêtes, Jambes, s.d. [19e siècle].
399 Maître (J.), L’orpheline de la Bérésina. Thérèse de Lisieux (1873-1897). Essai de psychanalyse socio-historique, Paris, 1995, p. 44 et 106.
400 Réponses au questionnaire concernant la bibliothèque de sr Marcelle du Cœur de Jésus, Floreffe, septembre 1993. Dans A.C.F. Classeur. Sœurs Dossier no 52.
401 Interview de sr Marie-Bernard (Bernadette de Dorlodot), Floreffe, les 20, 21 et 22 octobre 1993.
402 Interview de mère Marie-Cécile de Jésus (Madeleine Michel), Floreffe, les 20, 21 et 22 octobre 1993.
403 Notices…, sr Marie-Madeleine de Jésus, Julie Dillies, 1797-1883, p. 23-24. Dans A.C.J.
404 Notices…, sr Marie-Joseph de Jésus, Marie Murphy, 1805-1888, n° 16, p. 16. Dans A.C.J.
405 Notices…, sr Marie-Thérèse du Sacré-Cœur de Jésus, Mélanie Petit, 1859-1940, p. 30. dans A.C.J.
406 Notices…, sr Marie-Gabrielle de la Sainte-Trinité, Louise Ranwez, 1839-1906, p. 134. Dans A.C.J.
407 Composition qui témoigne de la persistance de la « culture de guerre » jusqu’au milieu des années 1920. Cf. Becker (A.), La guerre et la foi : de la mort à la mémoire 1914-1930, Paris, 1994.
408 Les roses d’étrennes à l’Enfant-Jésus, loterie composée par Sr Marie-Immaculée, Jambes, le 1er janvier 1924. Dans A.C.J. Théâtre. Cahier 1, p. 156-157.
409 Visite d’un conscrit, pièce composée par Mère Marie-Immaculée, [janvier 1937]. Dans A.C.J. Théâtre. Boîte ‘Noël’. Enveloppe ‘Divers pour Noël’.
410 Les trois rois. Poème composé par Sr Marie-Germaine, janvier 1944. Dans A.C.J. Théâtre. Boîte ‘Noël’.
411 Veillée de prière pour sr Lucie, Hannut, le 23 juin 1997, p. 1. Dans A.C.M. Série d’une enveloppe personnelle par sœur…, n° 16-22.
412 Nécrologe, sr Marthe de Saint-Charles, Émilie Debuiche, 1839-1923, p. 40. Dans A.C.M.
413 Notices…, sr Marie-Madeleine de Jésus, Julie Dillies, 1797-1883, souvenirs…, p. 92. Dans A.C.J.
414 Notices…, sr Marie-Angèle…, Marie-Louise Vermeer, 1870-1925, p. 306-316. Dans A.C.J.
415 Notices…, sr Marie-Xavier de la Sainte-Famille, Julie Van Landschoot, 1873-1951, p. 49. Dans A.C.J.
416 Cf. Bartoli (M.), Caterina, la Santa di Bologna, Bologne, 2003, p. 167-168.
417 Demandant à Dieu un signe pour son entrée au couvent, elle prie pour la conversion d’un condamné à mort incroyant. Cette conversion, juste avant l’exécution, l’impressionne fortement.
418 Vive sr Marie-Lucie en route pour le centenaire. 92 ans de sr Lucie, le 12 octobre 1991. Dans A.C.J. Chants composés à l’occasion des anniversaires et jubilés. Farde noire.
419 Notices…, sr Marie-Christine de Saint-Joseph, Lévina Duchêne, 1883-1943, p. 36-37. Dans A.C.J.
420 Cœurs sacrés, sauvez-nous. Jubilé de 25 ans de Mère Sous-prieure, Marguerite du Sacré-Cœur, le 20 février 1944. Dans A.C.J. Théâtre. Boîte ‘Divers’. Enveloppe ‘Petits chants et saynètes de Jubilés’.
421 Le monde en désarroi a besoin d’être bercé, composé par sr Françoise-Thérèse, s.d. Dans A.C.J. Chants composés à l’occasion des anniversaires et jubilés, sœurs décédées. Farde à fleurs.
422 « Jette à profusion sur tous, bons et méchants, L’irrésistible flot des suprêmes largesses De l’amour conquérant ». Cf. Épousailles. Première profession de sr Anne, par sr Marie-Immaculée, le 23 janvier 1947. Dans A.C.J. Chants composés à l’occasion des anniversaires et jubilés. Farde noire.
423 Épiphanie au carmel avec la Vierge Marie, chant composé par sr Marie-Françoise, [1958]. Dans A.C.J. Boîte ’Saints 1’. Enveloppe ’Veillée mariale… ’
424 Au cours d’un cycle de conférences intitulé « Mystiques et politiques », organisé par la fondation Sedes Sapientiae et la Faculté de Théologie de l’U.C.L., Jean-Pierre Delville s’interroge sur la conscience et l’action politique de grandes figures mystiques : Bernard de Clairvaux, Claire d’Assise, Julienne de Cornillon, Édith Stein, ou encore des acteurs religieux confrontés à l’histoire et à la violence politique (les trappistes de Tibhirine). Cf. Leclercq (J.), Bartoli (M.), Delville (J.-P.), Mystiques et politiques : une lecture de Bernard de Clairvaux, Claire d’Assise, Julienne de Cornillon, Édith Stein, Etty Hillesum et des sept pères trappistes de Tibhirine, Bruxelles, 2005 (Trajectoires, Lumen Vitae, 15)
425 Claire d’Assise, Julienne de Cornillon, exposé de Marco Bartoli et de Jean-Pierre Delville dans le cadre du cycle de conférence « Mystiques et politiques », Louvain-la-Neuve, le 23 février 2004, notes personnelles.
426 Girard (A.), Vandrey (L.), Noubadji (M.), Léna Vandrey et le travail des mains des moniales. De la collecte à la création, Musée d’art sacré du Gard, Pont-Saint-Esprit, 8 novembre 1997-31 janvier 1998, 1997, p. 23.
427 Lopez (É.), Théorie et pratique de la clôture à l’ époque moderne et contemporaine, dans Les religieuses dans le cloître et dans le monde des origines à nos jours, Saint-Étienne, 1994, p. 571.
428 Vandenbroeck (P.), Tu m’effleures, moi qui suis intouchable, dans Le jardin clos de l’ âme : l’ imaginaire des religieuses dans les Pays-Bas du Sud depuis le 13e siècle, dir. Vandenbroeck (P.), Bruxelles, 1994, p. 99.
429 Règle et constitutions…, 1938, 142 p. Dans A.C.M. Série G.
430 Coutumier des religieuses Pauvres claires colettines…, Huy, p. 22. Dans A.C.M. Archives fédérales.
431 Coutumier des sœurs externes des monastères des moniales de l’ordre des clarisses-colettines, [Namur, 1933], p. 13. Dans A.C.S. Carton ‘archives no 2’.
432 Catéchisme et instructions pieuses sur la sainte règle des religieuses Pauvres claires colettines, Tournai, 1876, p. 61. Dans A.C.R.
433 Lettre du père Henri de Baume dans laquelle il explique le testament de notre mère sainte Colette dont il a été le père spirituel aux religieuses de sainte Claire de la réforme de sainte Colette. Dans Règle de sainte Claire et constitutions…, p. 49.
434 Lopez (É.), Théorie et pratique de la clôture à l’ époque moderne et contemporaine…, p. 572.
435 Maritain (J.), Le paysan de la Garonne. Un vieux laïc s’interroge à propos du temps présent, Paris, 1966, p. 79-81. Cité dans Bultot (R.), Aux sources du divorce entre l’Église et le monde moderne…, p. 53.
436 Friedlander (C.), « Hors du monde ». La vie monastique questionnée, dans La clôture des moniales, trente ans d’expectative, Namur, 1997, p. 208.
437 Friedlander (C.), En guise de présentation. La réalité concrète…, p. 14.
438 de Bonhomme (A.), Le régime de clôture, possibilités actuelles et futures, dans La clôture des moniales…, Namur, 1997, p. 82.
439 Paul Wynants, dans son article sur la vie contemplative à l’époque contemporaine, fait un bilan des principaux avis émis. Ainsi, pour Madeleine Delmer, bénédictine de Louvain, « les vœux solennels ont été accueillis par certains comme la réalisation du rêve de leur vie. On ne voyait pas à ce moment-là que les mutations de plus en plus accélérées des mentalités demandaient un approfondissement de la vocation contemplative, plutôt qu’un renforcement des structures extérieures ». Le jésuite van Biervliet dénonce essentiellement les effets pervers du rétablissement des vœux solennels et de la clôture papale : « le retour aux vœux solennels et la clôture papale […] s’appliquent à des générations qui n’ont pas connu ce régime. De là, fréquemment […] une psychose du péché, un assaut de scrupules, une pieuse frousse ». En finale, conclut Paul Wynants, les réformes de Pie XII ne satisfont ni les plus progressistes, ni les conservateurs. Cf. Delmer (M.), o.s.b., Pour une formation doctrinale des moniales, dans Vie consacrée, t. 47, 1977, p. 205- 219 ; Van Bliervliet (A.), Problèmes actuels chez les moniales, dans Plé (A.), La séparation du monde, Paris, 1961, p. 233-234. Cités dans Wynants (P.), Les religieuses contemplatives…, dans Filles du silence…, p. 90-91.
440 « Venite seorsum maintient une inégalité de traitement flagrante entre moines et moniales soumis à la clôture papale. Ainsi, l’entrée de toute personne, sans distinctions de sexe, est interdite dans les monastères féminins, alors que seule l’entrée de femmes est prohibée dans les couvents masculins. Sauf dans des cas limites et moyennant des permissions, les sorties du cloître sont défendues aux moniales, tandis que, pour les religieux, elles sont réglées par les constitutions. Les possibilités de séjour en dehors des maisons de l’ordre ne sont pas identiques pour les deux sexes. Les moines doivent indiquer clairement les limites de la clôture, sans plus, alors que la séparation matérielle est imposée aux moniales. Enfin, l’instruction de 1969 légifère sur l’usage de la radio, de la télévision, des journaux et des organes d’information pour les contemplatives, mais elle ne fait rien de tel pour leurs homologues masculins ». Wynants (P.), Les religieuses contemplatives en Belgique…, dans Filles du silence…, p. 98.
441 Friedlander (C.), En guise de présentation…, p. 8-12 ; p. 8, note 6.
442 Wynants (P.), Les religieuses contemplatives en Belgique…, dans Filles du silence…, p. 92.
443 Auberger (J.-B.), Un monastère à travers les siècles : Béziers, dans Sainte Claire d’Assise et sa postérité…, p. 441-443.
444 Friedlander (C.), En guise de présentation…, p. 12.
445 Avec plus de recul, les moniales s’étonneront, en 1978, que cette question des « usages de la clôture » ait tant monopolisé les esprits : « Des réflexes d’époque nous étonnent aujourd’hui. On s’en souvient, le bastion de la clôture était l’objet de discussions publiques et privées : les grilles, le rideau du parloir, ouvert ou pas ouvert, combien de temps : un Ave Maria ou plus ? Avec qui ? Privilèges des unes et des autres… Il fallait tout justifier jusque dans les détails ; par dessus tout, il fallait convaincre que tout cela était au service de la vie contemplative à la suite de Claire […] ». Jubilé de 25 ans de la Fédération Sainte-Claire de Wallonie : 1953-1978, par Sr Marie-Claire, clarisse de Malonne, p. 3. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédération.
446 Réunions du conseil fédéral, 1953 à 1971, Fédération Sainte-Claire de Belgique, (réunion du 12 au 14 nov. 1953, procès rédigé par fr. Henri Peeters), manuscrit, s.l.n.d., 86 p. Dans A.C.M. Archives fédérales. Caisse ’Relations quinquennales… ’
447 Décisions prises par l’assemblée fédérale de la fédération Sainte-Claire le 27 mai 1995, p. 2. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédération. Rapport des conseils fédéraux, de 1953 à 1965.
448 Rapport de la R.M. Abbesse de Hannut sur la place de l’oraison dans notre vie contemplative, s.l.n.d. [novembre 1953], p. 4. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédération. Rapport des conseils fédéraux, de 1953 à 1965.
449 Réunions du conseil fédéral, 1953 à 1971, Fédération Sainte-Claire, (réunion du conseil du 16 au 18 juin 1958), procès rédigé par Sr M.-Joseph de l’E.J., manuscrit, s.l.n.d., p. 4. Dans A.C.M. Archives fédérales. Caisse ’Relations quinquennales… ’
450 Fédération Sainte-Claire. Rapport de la réunion du Conseil fédéral 1958, s.l.n.d., p. 5-6. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédération. Rapport des conseils fédéraux, de 1953 à 1965.
451 « Lorsque des familles offrent de montrer des photos de ces fêtes, il sera souvent possible aux sœurs de demander qu’on les dépose et qu’on les rendra plus tard… ce qui peut laisser aux familles l’illusion que l’on aura tout admiré ‘à l’aise’… mais en fait, sauf pour un cas d’ordination, que l’abbesse veille avec grand discernement à ne pas favoriser l’habitude de montrer ces photos en récréation : il est de beaucoup préférable de ne pas montrer du tout ces choses mondaines qui, loin d’apporter quelque chose de constructif à notre vie intérieure, peuvent la disperser et la distraire dangereusement. […]. Tout cela est très vrai et très beau et très bien pour les gens du monde… et même pour des enseignantes […], mais pour nous, contemplatives, il n’y a aucune utilité, et il y a beaucoup d’inconvénients ». Cf. Fédération Sainte-Claire. Rapport de la réunion du Conseil fédéral 1958…, p. 5-6.
452 L’aggiornamento de l’institution contemplative pure. Fédération Sainte-Claire, Monastère des clarisses de Huy, août 1965, p. 1. Dans A.E.N. Série R.9. Enveloppe ‘Union des moniales 1965-1966’.
453 Ce que l’Église attend de nous, rapport de sr Marie de Saint-Jean, s.l.n.d. dans A.C.S. Carton ’Archives no 1’. Fédération. Farde grise no 1.
454 Réunions du conseil fédéral, 1953 à 1971, Fédération Sainte-Claire, (conseil fédéral des 8-10 juin 1964), procès rédigé par Sr Marie-Antoine de l’E.J., manuscrit, s.l.n.d., p. 47. Dans A.C.M. Archives fédérales. Caisse ’Relations quinquennales… ’
455 Avec les chants de Sr Sourire, des Petites Sœurs de Jésus et du père Didier.
456 Fédération Sainte-Claire. Belgique. Rapport de la réunion du conseil, juin 1964, s.l.n.d., p. 3. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédération. Rapport des conseils fédéraux, de 1953 à 1965.
457 Fédération Sainte-Claire des Clarisses, Belgique. Rapport de la réunion des abbesses tenue le 23 juillet 1968 à Malonne, s.d.n.l., p. 11. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédération. Rapports des conseils fédéraux de 1967 à 1970.
458 Rapport de la session de la fédération sainte-Claire, 20-24 septembre 1965 [Malonne], s.l.n.d., 12 p. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédérations. Documents, rapports et lettres ; Réunions du conseil fédéral, 1953 à 1971, Fédération Sainte-Claire, session du 20 au 24 sept. 1965, procès rédigé par Sr Marie-Antoine de l’E.J., manuscrit, s.l.n.d., 86 p. Dans A.C.M. Archives fédérales. Caisse ‘Relations quinquennales… ’.
459 Rapport du conseil fédéral, 11-12 juillet 1967, [Beaumont], 1 p. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédération. Rapports des conseils fédéraux de 1967 à 1970.
460 Rapport du conseil fédéral du 14 février 1969, s.l.n.d., p. 1. Dans A.C.M. Série E.
461 Propos du père Romain, cité dans Réunion du conseil fédéral, 23 juillet 1968, s.l.n.d., p. 1. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédération. Rapports des conseils fédéraux de 1967 à 1970.
462 Réunion du conseil fédéral, 23 juillet 1968, s.l.n.d., p. 1. Dans A.C.M. Série E. Section 9.
463 La clôture constitutionnelle signifie que les règles de clôture sont définies par la constitution de l’ordre et gérées par l’abbesse. Elle se distingue de la clôture papale.
464 Lettre aux moniales, no 8, juillet 1968, p. 6. Dans A.C.M. Série E. Section 3. Union internationale des clarisses. Commission pour les moniales o.s.c. auprès de la curie générale de l’ordre des frères mineurs.
465 Pro monialibus, no 29, septembre-octobre 1970, p. 6. Dans A.C.M. Série E. Section 3.
466 Propos du père général repris dans : Lettre de sr Chiara Lucia Canova, o.s.c., abbesse, Assise, le 22 mai 1979. Dans A.C.M. Série E. Section 3. Union internationale des clarisses. Commission pour les moniales
o.s.c. auprès de la curie générale de l’ordre des frères mineurs.
467 Allocution des clarisses à Mgr Mathen, Malonne, le 24 juillet 1974, p. 3. Dans A.C.M. Série G. Section 6. Aggiornamento depuis Vatican II. Clôture constitutionnelle (farde mauve).
468 Corrections du monastère de Malonne pour les Constitutions générales de 1980, s.d., p. 2. Dans A.C.M. Série G. Section 6. Aggiornamento depuis Vatican II.
469 Lettre des clarisses de Malonne au Saint-Siège, le 10 juillet 1970. Dans A.C.M. Série G. Section 6. Aggiornamento depuis Vatican II. Clôture constitutionnelle (farde mauve).
470 Propositions de synthèse au questionnaire du P. Koser (août 1966). Mère Marie-Claire, Malonne, 1966, p. 14. Dans A.C.M. Série G. Section 6. Aggiornamento depuis Vatican II (1).
471 Critique du schéma des textes spirituels présentés à la lecture et à la correction des monastères, synthèse envoyée au P. Romain, mars 1969, p. 4. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédération. Rapports des conseils fédéraux de 1967 à 1970.
472 Réponses préparatoires à la réunion du 29 janvier concernant la session de Malines, Malonne, s.d., p. 5 Dans A.C.M. Série E. Section 5. U.R.C. 1970.
473 Lettre des clarisses de Malonne [à la Congrégation des Religieux], Malonne, le 3 mars 1970. Dans A.C.M. Série G. Section 6. Aggiornamento depuis Vatican II. Clôture constitutionnelle (farde mauve).
474 Réponse de la communauté de Malonne au questionnaire II du Cardinal Pironio de la S.C.R.I.S., Malonne, s.d., p. 12. Dans A.C.M. Série D : Relations avec les autorités ecclésiastiques. Section 1.2. S.C. des Religieux.
475 Propositions de synthèse au questionnaire du P. Koser (août 1966). Mère Marie-Claire, Malonne, 1966, p. 14. Dans A.C.M. Série G. Section 6. Aggiornamento depuis Vatican II (1).
476 Historique du monastère de l’Ave Maria, II, 1951-, Malonne, p. 17. Dans A.C.M.
477 Lettre de mère Marie-Claire du Saint-Sacrement, Malonne, le 1er février 1961. Dans A.E.N. Série R 46. Clarisses de Malonne. Correspondance. 1960-1961.
478 Notre aggiornamento. Clarisses de Malonne. Réponse à la lettre encyclique du père Constantin Koser, Malonne, 4 octobre 1967, p. 12 ; 28-30. Dans A.C.M. Série G. Section 6. Aggiornamento depuis Vatican II.
479 Historique du monastère de l’Ave Maria, II, 1951-, Malonne, p. 27, 26. Dans A.C.M.
480 Allocution des clarisses à Mgr Mathen, Malonne, le 24 juillet 1974, p. 4. Dans A.C.M. Série G. Section 6. Aggiornamento depuis Vatican II. Clôture constitutionnelle (farde mauve).
481 Historique du monastère de l’Ave Maria, II, 1951-, Malonne, p. 33. Dans A.C.M.
482 Réponse de la communauté de Malonne au questionnaire II…, p. 11. Dans A.C.M. Série D.
483 Interview de sr Francine (Grégoire), Malonne, le 17 avril 1998.
484 Les conditions de vie en clôture, Malonne, 1970. Dans A.C.M. Série G. Section 6. Aggiornamento depuis Vatican II. Projets rédigés par les clarisses de Malonne en 1970 en vue d’aider à la rédaction de nos Constitutions.
485 Réponse de la communauté de Malonne au questionnaire II… Dans A.C.M. Série D.
486 Pauvres Claires, Malonne, 1969. Visite canonique par le père Croonenberghs. Dans A.E.N. R. 19.
Visites canoniques de communautés religieuses de la province de Namur ; Monastère des Clarisses à Malonne, année 1970, dans A.C.M. Rapports annuels des sorties et des entrées. Série D. Section 4. Mgr André Marie Charue ; Monastère des Clarisses à Malonne, année 1971. Rapports annuels… ; Monastère des Clarisses à Malonne, année 1972. Rapports annuels… ; Monastère des Clarisses à Malonne, année 1973. Rapports annuels…
487 Monastère de Saint-Michel, clarisses-colettines, Saint-Servais. Permissions utilisés au cours de l’année 1968 au sujet de la clôture ; Monastère de Saint-Michel… Permissions utilisés au cours de l’année 1969 au sujet de la clôture ; Monastère de Saint-Michel… Permissions utilisés au cours de l’année 1970 au sujet de la clôture. Dans A.E.N. R. 19. Visites canoniques de communautés religieuses de la province de Namur.
488 Constitutions…, par Sr Marie-Claire de Malonne, s.l.n.d. [novembre 1971], p. 1. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédération. Courrier fédéral de 1970 à 1984.
489 Statut sur la clôture du monastère des clarisses de Malonne à soumettre à la S.C. des Religieux, [1972].
Dans A.C.M. Série G. Section 6. Aggiornamento depuis Vatican II. Clôture constitutionnelle (farde mauve).
490 Lettre des clarisses de Malonne au Père Henri, le 7 juin 1974. Dans A.C.M. Série G. Section 6. Aggiornamento depuis Vatican II. Clôture constitutionnelle (farde mauve).
491 « Les communautés de Hannut et de Malonne ont demandé et obtenu de Rome le statut de clôture constitutionnelle ». Compte rendu de l’Assemblée fédérale tenue à Malonne les 6 et 7 septembre 1975, 2 p. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédération. Compte rendu des assemblées fédérales de 1967 à 1987.
492 Lettre des clarisses de Malonne au père Henri Peeters, Malonne, le 25 mars 1975. Dans A.C.M. Série G. Section 6. Aggiornamento depuis Vatican II. Clôture constitutionnelle (farde mauve).
493 Historique du monastère de l’Ave Maria, II, 1951-, Malonne, p. 35. Dans A.C.M.
494 « Je vous envoie l’indult, reçu ce matin, concernant la prorogation pour cinq ans de la clôture constitutionnelle. Cela n’a fait aucune difficulté à la S. Congrégation pour les religieux ». Lettre du frère Bernardin Beck, o.f.m. Rome, le 19 novembre 1980. Dans A.C.M. Série G. Section 6. Aggiornamento depuis Vatican II. Clôture constitutionnelle (farde mauve).
495 Lettre de sr Thérèse de Jésus, présidente fédérale, Mons, le 10 août 1981, p. 1. Dans Arch. CIVCSVA. FM 71. Monache carmelitane scalze. Federazione Belga (Brabant). En fait, les carmélites préfèrent surtout que les lois de clôture restent aux mains de l’Église, car ces lois pourraient rester tout aussi strictes en étant gérées par les constitutions et la supérieure. Ce problème de clôture renvoie inévitablement à la question de l’obéissance et du rapport aux pères.
496 Lettre de sr Marie-Madeleine du S.C., Mons, le 8 septembre 1972, p. 1. Dans A.E.N. Série R. 35. Carmélites. Generalia, 1946-1981.
497 Lettre du P. Romain Mailleux, assistant fédéral, Rome, le 17 décembre 1967, p. 2. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédérations. Assistants de la fédération.
498 Lettre du frère Antoine J. Marijsse, o.c.d., provincial de Flandre et assistant de la fédération francophone, Gand, le 22 décembre 1971 Dans A.E.N. R. 35. Carmélites. Generalia. 1971-1981.
499 Rapport triennal. Fédération des carmélites de Belgique sud, par le Père Lucien Derdaele, o.c.d., assistant fédéral, Courtrai, le 15 octobre 1982, 5 p. Dans Arch. CIVCSVA. Federazioni…, FM 71. Monache carmelitane scalze. Federazione Belga (Brabant).
500 Notes III… (14 août 1963) de mère Élisabeth de la Trinité, Floreffe, p. 135. Dans A.C.F.
501 Lettre de sr Marie-Bernard du Christ, Floreffe, février-mars 1970, p. 1. Dans A.C.F. Classeur. Carmel. 2. Section ‘Renouveau’.
502 Les chroniques de notre monastère II (19 mars, 28 octobre 1970), p. 46 et 54. Dans A.C.F.
503 Les chroniques de notre monastère II (février 1973), p. 78. Dans A.C.F.
504 Lettre de sr Monique de Jésus, Floreffe, le 6 février 1973. Dans A.C.F. Classeur. Sœurs Dossier no55.
505 « Notre parloir n’a plus de grilles, mais une table fixe. La chapelle a des grilles mobiles. Tout compte fait, ce sont des signes symboliques. Ne pourrait-on pas penser à les supprimer et à garder l’érémitisme propre à notre vocation plutôt que de maintenir un matérialisme dépassé ? » Cf. Témoignage de sr Annick et de sr Jeannine, Floreffe, le 20 juillet 1974, p. 2. Dans A.C.F. Classeur. Carmel. 2. Section ‘Renouveau’.
506 Lettre de mère Agnès de Jésus, Floreffe, le 6 mars 1968. Dans A.C.F. Classeur. Carmel. 1. Partie historique ; Les chroniques de notre monastère II (11 juillet 1969), p. 33. Dans A.C.F.
507 La clôture. Texte réalisé par une jeune carmélite du carmel de Floreffe, Floreffe, janvier 1971, p. 3. Dans A.C.F. Classeur. Carmel. 2. Section ‘Renouveau’.
508 Lettre de sr Monique de Jésus, Floreffe, le 4 juin 1971. Dans A.C.F. Classeur. Sœurs Dossier no 55.
509 Les chroniques de notre monastère II (1978), p. 63. Dans A.C.F.
510 Le carmel. Principes d’application, Floreffe, le 26 novembre 1972, p. 2. Dans A.C.F. Classeur. Carmel. 2. section ’Renouveau’.
511 Lettre de mère Marie-Cécile de Jésus, Floreffe, le 21 décembre 1986. Dans A.C.F. Farde 3. Documents relatifs au projet de législation.
512 Lettre des clarisses de Malonne au Saint-Siège, le 10 juillet 1970. Dans A.C.M. Série G. Section 6. Aggiornamento depuis Vatican II. Clôture constitutionnelle (farde mauve).
513 Interview de mère Marie-Cécile de Jésus (Madeleine Michel), Floreffe, les 20, 21 et 22 octobre 1993.
514 Si le nombre de religieux augmente dans la première moitié du 20e siècle, leur proportion reste minoritaire par rapport aux femmes : en 1947, il y a en Belgique 12.725 religieux et 49.624 religieuses. Cf. Aubert (R.), 150 ans de vie des Églises…, p. 58.
515 « On n’est pas une secte […]. Un frère qui entre dans notre vie, si nous voyons qu’il entre vraiment dans notre vie, c’est ainsi qu’il grandit dans l’amour de Dieu et des autres. Et les autres, c’est d’abord les frères autour de lui, mais c’est aussi souvent le rapport par rapport à la famille ou les amis ». Cf. Interview du père Lode Van Hecke, Orval, le 24 mars 1996. Cité par Remacle (M.), Résurrection d’Orval. Cheminement monastique et vie quotidienne des cisterciens de la stricte observance : 1926-1995, mémoire de licence en histoire, U.C.L., Louvain-la-Neuve, 1997, 2 vol., p. 44, 83.
516 Dans quelle mesure le système claustral aide-t-il les moniales à prendre leurs distances par rapport à une famille envahissante ? Une jeune clarisse ayant récemment quitté la vie monacale racontait que la relation avec sa mère était plus détendue lorsqu’elle était au couvent, grâce à la clôture.
517 Propos du père Romain, cité dans Réunion du conseil fédéral, 23 juillet 1968, s.l.n.d., p. 1. Dans A.C.M. Série E. Section 9. Fédération. Rapports des conseils fédéraux de 1967 à 1970.
518 Lettre de sr Thérèse de Jésus, présidente fédérale, Mons, le 10 août 1981, p. 1. Dans Arch. CIVCSVA. FM 71. Monache carmelitane scalze. Federazione Belga (Brabant).
519 Notices…, Sr Marie-Christine de Saint-Joseph, Lévina Duchêne, 1883-1943, p. 39. Dans A.C.J.
520 Chroniques de Ciney III. Carmels fusionnés de Ciney II et de Corioule, années 1952-1965, p. 25. Dans A.C.J. Boîte ’Carmélites de Ciney… ’. Colette Friedlander parle de relation utilitaire entre le monde et les couvents : « Nos ancêtres dans la vie monastique vivaient dans une grande pauvreté matérielle, intellectuelle et culturelle et mouraient faute de soins médicaux plutôt que d’assouplir leur clôture. Moyennant quoi, ils pouvaient refuser des services au nom de cette même clôture sans paraître égoïstes. » Actuellement, le monastère s’insère dans une relation d’échange avec la société, sans toujours assumer les conséquences de cette plus grande ouverture : « Autrement dit, nous avons laissé se créer une situation où nous n’assumons plus les sacrifices entraînés par une stricte séparation d’avec l’extérieur, mais où nous en acceptons encore les avantages, quand nous ne les revendiquons pas. » Il s’agit pour la cistercienne de sortir de ce rapport au monde « inauthentique » caractérisé par « l’uti-lisation » au profit d’un rapport de service et d’échange. Friedlander (C.), « Hors du monde ». La vie monastique questionnée…, p. 210-213.
521 Interview de sr Colette (Micheline Swalus), Clarisse de Bruxelles-Loonbeek, 17 octobre 1998.
522 Friedlander (C.), « Hors du monde ». La vie monastique questionnée…, p. 210-213.
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