Chapitre I. Développements ecclésiaux en Flandre à la lumière de Vatican II : la voix des laics
p. 223-250
Texte intégral
1La mort du pape Pie XII et l’élection de Jean XXIII en 1958 furent ressenties par les contemporains comme "la fin de l’ère moderne", la fin de l’âge baroque dans l’Église1. L’année 1958 représenta aussi un tournant important de l’histoire de Belgique. Et pas uniquement parce qu’une volonté de rénovation moderniste irradiait des monuments à l’allure futuriste construits pour l’Exposition universelle. Plus important, la conclusion cette année-là du pacte scolaire qui mettait un point final à une période de sévères oppositions idéologiques entre une gauche majoritairement wallonne et une droite principalement flamande qui, durant dix ans, avaient laissé éclater leur colère à propos de la question royale et de la guerre scolaire. C’est ainsi que l’opposition idéologique était quelque peu retombée et avait laissé le terrain aux deux autres matières conflictuelles qui concernaient traditionnellement l’éventail politique belge, à savoir les oppositions socio-économiques et communautaires.
2Pourtant, vu du côté purement ecclésial, dans la Belgique de 1958, l’ère baroque n’était pas encore terminée. Ayant en vue les élections de cette année-là, les évêques désiraient faire chuter le gouvernement anticlérical socialiste-libéral par le biais d’un front catholique solide et unanime. Ils parvinrent d’ailleurs à leurs fins. La veille du scrutin, l’évêque de Bruges, Mgr De Smedt, s’adressa dans cette optique aux croyants de son diocèse en disant que le vote pour la Volksunie – le parti nationaliste flamand récemment fondé – était « dans les circonstances actuelles un péché grave »2. Le cardinal Van Roey dirigeait toujours l’Église belge du style inébranlable et autoritaire qu’il avait adopté depuis le début de son épiscopat en 1926. Son évêque auxiliaire et successeur Léon-Joseph Suenens, qui prendrait part aux dernières années de son épiscopat, le décrirait plus tard comme quelqu’un qui « a privilégié les vertus de prudence, le statique et la conservation des usages ». Comme Pie XII, il n’avait nul besoin de collaborateurs mais d’exécutants. « Il n’y avait guère de place pour la "prospective" (un mot inconnu) ni pour le moindre brin d’humour »3.
3Mais l’archevêque était âgé, 82 ans en 1958, et d’autres portaient clairement leur regard vers une nouvelle époque. Indéniablement, depuis la seconde moitié des années 50, des tendances au renouvellement s’étaient annoncées au sein de l’Église flamande. Un rôle central fut joué dans cette optique par la Ligue des étudiants du Supérieur pour l’Action catholique. Cette organisation avait été fondée en 1933 à l’Université de Louvain en tant que branche universitaire du mouvement d’Action catholique pour la jeunesse étudiante alors en pleine organisation. Dans les années 50, elle se présentait comme le promoteur du courant démocratique et syndical au sein du mouvement étudiant louvaniste. Avec son journal Universitas, elle fonctionnait en outre comme un centre de pensée critique sur la foi et les valeurs chrétiennes, s’orientant vers un dialogue entre l’Église et le monde. C’est sous son impulsion que fut tenu en 1956 à Louvain un congrès national pour l’apostolat des laïcs. Ceci constituait le premier signe manifeste de l’autonomie que les laïcs revendiquaient pour eux-mêmes au sein de l’Église. Ce congrès donna l’impulsion décisive à la fondation de la revue De Maand deux ans plus tard. Ce journal naquit de l’initiative d’anciens universitaires, avec comme directeur général le futur recteur de la KUL Piet De Somer, et se présentait comme un organe indépendant d’intellectuels laïcs catholiques progressistes qui affichait une franchise sans précédent et une "joyeuse" volonté de rénovation ecclésiale, politique et culturelle4.
4Ce journal nous offre une excellente vitrine pour suivre les orientations ecclésiales de la Flandre depuis la fin des années 50, la phase de préparation du Concile étant déjà entamée, jusqu’au début des années 1970, époque où les fruits du Concile commencèrent visiblement à se faire sentir dans des rénovations structurelles. Et ce n’est pas uniquement parce que sa parution encadre bien ladite période – sa parution s’étend de 1958 à la mi-1971 –, mais surtout parce qu’il donna la parole à un groupe significatif dans l’élite catholique intellectuelle de Flandre et parce qu’il renvoya une image assez représentative des points d’intérêts qui étaient vécus dans ce groupe. Nous ne nous limitons pas de surcroît aux positions qui furent prises par le journal concernant la problématique laïque ou les travaux et résultats du Concile, mais nous porterons aussi notre attention sur son évolution idéologique générale à propos de l’Église et de la religion. En Flandre paraissaient également d’autres journaux qui s’adressaient spécifiquement aux intellectuels catholiques, tels Streven et Kultuurleven. Nous ne pouvons pas les traiter dans le cadre de cette contribution mais une lecture rapide nous a montré que ces journaux, chacun avec des accents propres, présentaient une évolution à peu près similaire à De Maand.
La grande attente (1958-1962)
5Le professeur louvaniste et sociologue de la religion, Jacques Leclercq, publia en 1960 dans De Maand les principaux résultats de son étude remarquée sur Clerus en samenleving in Vlaanderen5. Il y démontrait que la Flandre chrétienne était en quelque sorte un mythe. La Flandre était encore bien plus catholique que la Wallonie mais il s’y produisait, avec environ 30 ans de retard, un mouvement continu – semblable à celui de la partie francophone – en faveur de la déchristianisation, d’une baisse de la natalité et d’un regain électoral pour les partis anticléricaux. Par dessus tout, on constatait des nuances régionales : dans des villes, comme Anvers et Gand, les catholiques pratiquants formaient, une minorité de 25 à 30 %, tandis que d’autre part le Limbourg et la Flandre occidentale étaient encore majoritairement catholiques. Dans ces régions existait encore une mentalité majoritairement défavorable aux non-chrétiens, qui étaient traités comme des citoyens marginaux dont il ne fallait tenir aucun compte. Dans de telles communautés religieusement homogènes, la foi s’exprimait de façon représentative dans des manifestations de masse et des cérémonies et on ne ressentait pas le besoin de se justifier par une conduite de vie. Les Wallons s’accordaient en cela davantage avec les catholiques français. Un étudiant américain l’a exprimé comme suit : « Les Flamands sont plus pratiquants et moins moraux, les Wallons sont moins pratiquants et plus moraux ».
6Et le clergé suivait totalement cette mentalité. « Peut-être n’existe-t-il pas un clergé qui appartienne plus à son peuple que le clergé belge, tant wallon que flamand » expliquait Leclercq. L’image traditionnelle du prêtre retiré du monde et intellectuellement en retrait ne tenait plus. Ceci provenait d’abord du mode de recrutement. Jusqu’à leurs 18 ans, les futurs prêtres avaient vécu dans le monde, à la maison et au collège, en compagnie des futurs intellectuels catholiques du pays. Qui plus est, la Belgique était au monde le pays qui comptait le plus de prêtres diplômés universitaires et proposait le plus haut niveau d’études dans les séminaires. Il en allait tout autrement, par exemple, aux Pays-Bas, où les jeunes faisaient dès leur douzième ou quatorzième année le choix de leur vocation religieuse, poursuivaient alors leur formation dans des petits séminaires privés ou juvénats et décrochaient un diplôme qui n’atteignait pas le niveau de celui d’humanités. Notre clergé était aussi de par sa provenance, classes moyennes et petite bourgeoisie, solidement attaché à ces classes sociales catholiques flamandes et se voyait généralement traité avec une familiarité respectueuse. Son intérêt pour la politique, surtout liée au mouvement flamand, se basait sur des fondements moraux et recevait le plus souvent les encouragements des croyants. Dans le même temps, à l’instar de l’ensemble des croyants, le clergé laissait percer, dans des régions majoritairement catholiques, la même réaction épidermique à l’encontre des non-croyants : « On est plus porté à repousser la brebis galeuse qu’à courir derrière la brebis perdue », disait J. Leclercq ; cependant il existait déjà bien des exceptions telle que l’initiative "des prêtres pour les travailleurs" qui était partie de Gand et de Louvain. J. Leclercq croyait aussi qu’un élan suffisant était présent dans le clergé pour infléchir la stratégie quand il le jugerait nécessaire.
7Cette image d’une société encore fortement tournée sur elle-même, excluant les autres secteurs, peut grosso modo s’appliquer à la pratique religieuse concrète. Nous n’en trouvons pas trace dans De Maand. Le journal reconnaissait le fait de la société sécularisée et y voyait de nouvelles opportunités pour une présence plus authentique de l’Église. Une présence qui ne serait plus fondée sur un isolement recherché en tant que tel, un droit de propriété erronément interprété ou une prépondérance institutionnelle mais sur l’idée de rendre service au monde et de proposer une signification réelle pour sa vie privée6. On voulait se défaire de l’image du communisme ennemi et défendre la déconfessionalisation, le relâchement du lien bien trop étroit entre Église et politique et le dialogue avec les forces de gauche en Belgique, qui du reste recevaient relativement souvent la parole dans la revue et dont on attendait une pareille attitude tolérante7.
8Cette même largeur d’esprit était de mise à l’égard des autres Églises chrétiennes. Dans les années 50, le mouvement œcuménique s’était fortifié et les espoirs vis-à-vis de l’œcuménisme furent profondément stimulés par la décision de convoquer un concile, que Jean XXIII avait rendue publique en janvier 1959. Et la création en 1961 d’un Secrétariat romain pour l’Unité des Chrétiens renforça cette attente. Alors que les autres périodiques écrivaient avec une certaine symptahie sur les "frères séparés", De Maand brisait les frontières. Il laissait s’exprimer d’éminents spécialistes de l’œcuménisme, surtout des Pays-Bas, comme les professeurs protestants A.J. Bronkhorst et A.E N. Lekkerkerker et les catholiques P. Smulders s.j. et E Thijssen, qui depuis 1961 était consulteur du Secrétariat pour la promotion de l’Unité des chrétiens8. Il critiquait aussi avec virulence « l’anti-protestantisme mesquin » et le « sectarisme extrême à propos des relations entre chrétiens et non-chrétiens, entre catholiques et non-catholiques » tel qu’on le trouvait dans un pamphlet que la revue des jésuites flamands De Linie avait diffusé auprès des ligues du Sacré-Cœur. Ce pamphlet caricatural et démagogique jetait, aux dires de De Maand, toute la province jésuite flamande dans le discrédit, et cela alors que, dans la plupart des pays occidentaux, les jésuites faisaient partie des plus courageux pionniers notamment dans la réorientation de l’Église vers l’œcuménisme9.
9La perspective du Concile suscita bien d’autres espérances. Parmi les titres de la rubrique que le journal insère, à partir de 1961, dans l’optique du futur Concile, nous pouvons en relever l’un ou l’autre qui prévoyaient : Het vrije woord in de Kerk, Het einde van de barok, Tussen Kerk en Wereld, Episcopaat en concilie, et Concilie en openbare mening. Outre l’œcuménisme, on place des attentes toutes particulières à propos de la place des laïcs, de la collégialité, de l’introduction de la langue vulgaire dans la liturgie. Piet De Somer plaide également en faveur d’une plus forte participation des catholiques dans le domaine scientifique10.
10De Maand témoigne durant ces années d’une grande attente, celle d’une nouvelle Église. On y présente en effet l’Église comme une réalité vivante qui, à chaque époque, constitue d’une autre manière l’incarnation du Dieu vivant. Avec son encyclique Mystici corporis, Pie XII avait donné l’impulsion à un nouveau modèle ecclésial dans lequel ce n’était plus seulement la tête mais aussi les membres qui étaient regardés comme des parties activement impliquées d’un même corps. Bien que l’Église ne soit pas une démocratie, la position du laïc ne pouvait demeurer plus longtemps celle du dirigé face au dirigeant, il s’accommodait certes d’une docilité sincère et constructive mais plus de ce climat d’ordres et d’obéissance. Apparaissait un type nouveau de croyants qui désiraient s’engager et se sentaient étroitement impliqués dans l’Église, alors que les tièdes désertaient progressivement. La qualité devrait désormais l’emporter sur la quantité : « ofwel zal de Kerk op bewuste en dus mondige leken steunen, ofwel zal ze nog slechts met onverschillige "volgelingen" te rekenen hebben »11. Lorsque le cardinal Van Roey, en octobre 1960, réduisit au silence l’une de ses laïques devenues majeures, en l’occurrence Maria Rosseels, lui enjoignant de cesser la publication dans De Standaard de sa série d’articles consacré aux Moderne nonnen, série où elle exposait les problèmes de l’adaptation des religieuses au monde moderne, De Maand réagit vivement12.
11Néanmoins, à cette époque existait chez Van Roey, de même que parmi les autres évêques belges, une grande préoccupation pour le dévouement des laïcs. Cela ressortait des vota qu’ils avaient envoyés en 1959 à Rome en vue du prochain concile. Tous les évêques avaient insisté sur une définition claire de la doctrine de l’Action catholique et Van Roey proposait même que soit intégré dans le droit canon un statut juridique du laïc. N’était-ce pas le devoir de tous les baptisés et de tous les confirmés de pratiquer l’apostolat, pensaient ses collègues De Smedt et Charue. Tous soulignaient aussi la nécessité d’un mandat par lequel l’Action catholique serait liée à l’évêque. Les évêques auxiliaires de Malines, Schoenmakers et Suenens, qui avaient consacré à ce thème la majeure partie de leur réaction, désiraient une complète équivalence de toutes les formes d’Action catholique13.
12Cette attente de l’opinion publique flamande à l’égard du Concile fut certainement tempérée par la manière dont il fut préparé. L’impression générale était que « Il existe une muraille de Chine autour des préparatifs » et de ce qui en suintait on ne présageait rien de bon14. Les prélats conservateurs de la curie détenaient les postes-clés dans les commissions préparatoires et les théologiens progressistes semblaient repoussés. À maintes reprises l’irritation s’afficha à propos de l’ignorance des laïcs concernant les activités préparatoires non seulement à cause de Rome mais aussi du fait de son propre épiscopat15. De Maand salua avec d’autant plus de bienveillance le message de Noël que l’épiscopat néerlandais consacra au Concile en 1960 parce qu’il témoignait d’une volonté de dialogue avec le peuple de Dieu16.
13Abstraction faite de l’attention pour le Concile, De Maand publia aussi quelques commentaires approfondis au sujet de ce qu’il nommait "la nouvelle réalité conjugale", ayant à ce sujet l’intention de stimuler un franc débat d’idées. Un article de 1959, marqué par une approche encore plus traditionnelle en matière conjugale, fut caractérisé par un autre intervenant de « tegelijk zeer sympathiek en ook zeer spijtig... Het is een kreet van heimwee naar de goede oude tijd toen ailes zoveel eenvoudiger was ». Dans le cadre de l’explosion de la démographie, l’Église ne pouvait plus tenir ce point de vue. Le mariage évoluait de plus en plus vers ce qui était en fait « een zuivere ontmoeting van twee personen in elke menselijke dimensie. De inkrimping van de eigenlijke voortplantingstaak is een nieuw aspect van deze ontwikkeling », et l’auteur de l’article, paru en 1960, marquait sa totale confiance dans le fait que la doctrine de l’Église allait évoluer rapidement dans cette direction17.
L’avenir de l’Église a-t-il déjà commencé (1962-1966) ?
14En 1962, pour diverses raisons, émergea une nouvelle phase dans cette évolution. Au début de l’année, Léon-Joseph Suenens, qui donna un nouveau visage à l’Église belge, prenait possession du siège de Malines comme successeur du cardinal Van Roey disparu à la fin de 1961. Ensuite en octobre 1962, le second concile du Vatican fut ouvert. En 1962 toujours, paraissait l’étude remarquée de Jan Kerkhofs et Jean Van Houtte sur De Kerk in Vlaanderen. Par là même, la discipline de la sociologie religieuse – récemment apparue en Flandre –, qui s’était principalement concentrée à l’intérieur du Centre pour les recherches socio-religieuses créé en 1956 à l’Université de Louvain, soumettait ses premiers résultats importants. Des résultats qui avaient aussi pour objectif d’être des orientations pour une nouvelle approche de la pastorale. Enfin, à partir de 1962, de nouveaux problèmes attiraient l’attention sur le plan politique. Les tensions socio-économiques que la loi unique de 1961 avaient ravivées semblaient se calmer avec l’entrée en fonction du gouvernement travailliste Lefèvre-Spaak, tandis que le tapage lié à la politique linguistique et le débat autour de l’expansion universitaire commençaient à se faire clairement entendre.
15De Maand profita de l’interrègne épiscopal qui suivit la mort de Van Roey pour présenter à son successeur les souhaits en matière de renouvellement de la vie ecclésiale auxquels les catholiques réformateurs de Belgique aspiraient depuis déjà un certain temps. La revue plaida une fois de plus et avec d’autant plus d’insistance le rappel de la relation entre l’Église et la sphère politique : la liaison de l’Église à un parti et l’imbrication réelle qui avait grandi avec les années entre les intérêts de l’Église et ceux de l’État. Elle désirait le rattachement au principe de séparation de l’Église et de l’État tel qu’il avait été proclamé en 1830. Ce serait aussi bien mieux si le catholicisme belge récupérait le caractère progressiste qui avait marqué son existence au XIXe siècle mais s’était totalement perdu entretemps. Pourquoi les évêques tenaient-ils si peu compte des résultats du travail innovateur des sociologues de la religion ? Pourquoi avaient-ils mis une sourdine au succès du prometteur congrès des laïcs de 1956 de telle sorte qu’il demeurait sans suites ? Pourquoi les catholiques de Belgique ne pouvaient-ils pas s’organiser, à l’instar des Allemands, en assemblées régulières de laïcs ?
16On demandait de plus avec insistance au successeur de Van Roey une sérieuse révision des limites ecclésiastiques des paroisses et des diocèses en fonction du développement démographique qu’avait connu le pays. Les diocèses belges étaient bien trop grands, Malines constituant même le diocèse le plus peuplé du monde. Cela était nuisible au travail pastoral et aux contacts entre le clergé et son évêque. Dans l’archidiocèse de Malines et le diocèse de Liège, les relations conflictuelles entre les groupes linguistiques rendaient la scission vraiment nécessaire. On réclamait des diocèses supplémentaires, comme cela s’était récemment passé aux Pays-Bas avec la création des diocèses de Rotterdam et de Groningen. Pour notre pays, on demandait de nouveaux sièges à Anvers, Bruxelles, Hasselt et Charleroi de même que dans la province du Luxembourg. Le facteur ecclésial n’était pas le seul à constituer un frein à ce programme. Les autorités civiles devaient se rallier à ce point de vue parce que des conséquences financières pour les caisses de l’État et des provinces découlaient d’une telle réforme18.
17Lorsqu’au début de 1962, il apparut clairement que serait seulement érigé un nouveau diocèse à Anvers – ultérieurement il y aurait aussi un nouveau diocèse à Hasselt – et que plus encore l’archevêché de Malines-Bruxelles ne serait pas scindé mais totalement dirigé à partir de la cité archiépiscopale, la revue évoqua d’un ton amer un « gecamoufleerd status quo ». Il apparaissait à l’évidence que dans le passé d’autres forces conservatrices s’étaient abritées derrière le large dos de Van Roey, comme la majorité des autres évêques qui avaient soutenu ce statu quo. Nettement moins bien dissimulés, bon nombre de politiciens se rangeaient derrière la carrure du premier ministre Theo Lefèvre qui s’opposait à une réorganisation ecclésiastique par réaction anti-fédéraliste. De Maand fit une sortie inhabituellement dure contre « de janussen » parmi les socialistes « die met de mond de deconfessionalisatie van de politiek belijden maar in het hart tenslotte meer het christendom zelf dan de uitwassen van het klerikalisme hopen te ondergraven ». Cela confortait le journal dans l’idée qu’il avait déjà énoncée à plusieurs reprises : le lien de fait entre Église et État s’apparentait en réalité à une infidélité conjugale réciproque19.
18D’autre part, au début de 1962, la revue vit un important signe d’espoir dans la nomination de Suenens comme nouvel archevêque de Malines. Sa lettre inaugurale était rédigée dans un langage simple et direct qui faisait clairement comprendre que le nouveau prélat voulait exercer ses fonctions plus près des croyants et avec eux. Suenens promettait aussi de s’attaquer à la réorganisation de la pastorale et sans attendre prenait à ce propos des initiatives, telle la mise en place de nouvelles zones pastorales en 1962 ou la fondation l’année suivante d’un Centre de formation théologique et pastorale pour l’archevêché de Malines. En 1964, il rendait possible une approche renouvelée de la formation des prêtres par la fondation à Louvain du séminaire Jean XXIII. Au second concile du Vatican, il devait jouer un rôle moteur.
19Les activités conciliaires furent suivies avec grande attention par De Maand. Jan Grootaers, qui était rédacteur en chef du journal, apparut à cette période comme un spécialiste du Concile qui, durant les mois que durèrent les sessions, séjourna fréquemment à Rome et tint informé les lecteurs de son journal des activités et de l’atmosphère prévalant sur la scène et à l’envers du décor20. Les points les plus importants de son information conciliaire concernaient l’œcuménisme, la position des laïcs et le rôle de l’épiscopat, des thèmes qui tous avaient déjà fait l’objet de beaucoup d’attention lors de la phase préparatoire et qui, sans parler de l’information purement conciliaire, entraient en ligne de compte dans bien d’autres aspects.
20En matière d’œcuménisme, les activités du Conseil œcuménique des Églises continuaient à éveiller l’attention. Les opinions orthodoxes et protestantes – en particulier hollandaises – sur le Concile furent publiées et on mentionnait aussi les initiatives œcuméniques qui étaient prises dans notre pays comme l’invitation de l’archevêque anglican Ramsey par des étudiants louvanistes (1963) et l’organisation, en collaboration avec les Pays-Bas, de congrès œcuméniques des jeunes, respectivement à Utrecht (1963) et à Hofstade (1964)21. Remarquons aussi l’attention, nouvelle par rapport à la période précédente, portée aux religions non chrétiennes ou, pour être plus précis, à l’une d’entre elles, le judaïsme. Le thème des relations entre christianisme et judaïsme fut de 1962 à 1965 fréquemment mis à l’ordre du jour, parfois deux à trois fois dans les livraisons annuelles. Ceci était lié à la visite de Paul VI à Jérusalem en janvier 1964, au remue-ménage causé par la parution de l’ouvrage de Hochhutt, Le Vicaire, qui traitait de Pie XII et de la persécution des Juifs durant la Seconde Guerre mondiale et enfin à la discussion qui était conduite à Rome en vue d’une déclaration conciliaire sur les Juifs, qui devint la déclaration sur les religions non-chrétiennes promulguée en 196522.
21Concernant la problématique du laïcat, J. Grootaers fit en 1962 un plaidoyer en faveur de l’installation d’organes permanents de concertation au sein de l’assemblée diocésaine, par le biais desquels les laïcs pourraient mieux préparer leur participation à un futur concile23. On consacra des relations détaillées à un week-end que De Maand, en collaboration avec d’autres groupes flamands, organisa à Heverlee à la veille du Concile. Le thème de la réunion était ’Le laïc dans l’Église’. Dans les différents groupes de travail se dégagea une forte demande en faveur de la participation. La conclusion de ce week-end très fructueux selon les participants fut que « niet langer kan gezegd worden dat de intellectuelen in Vlaanderen zich afzijdig houden van de Kerk » mais qu’au contraire une grande partie de ceux-ci « met de Kerk medeleeft, in ieder geval mondig is geworden en dat zij zich engageren op een wijze die enkel misschien anders is dan soms verwacht of gewenst wordt »24. De Maand suivit avec intérêt le processus de décision conciliaire sur le sujet des laïcs, plus précisément dans la Constitution sur l’Église, Lumen gentium, et dans le décret sur l’apostolat des laïcs, Apostolicam actuositatem. Grâce à l’intervention de Suenens, l’ordre de succession des chapitres consacrés au clergé et à l’ensemble de la communauté ecclésiale dans le schéma sur l’Église fut inversé de telle sorte que, après le premier chapitre sur "le mystère de l’Église", fut placé celui sur "le peuple de Dieu » et que la hiérarchie’ fut traitée dans le troisième chapitre. Ce chapitre sur le peuple de Dieu fut qualifié par De Maand comme « un des plus réussis » dans la Constitution sur l’Église Lumen gentium25. En 1965, on introduisit encore un nouveau paragraphe sous l’intitulé Le laïc et le clerc dans l’Église.
22Dans les compte rendus consacrés au Concile, après les centres d’intérêt signalés plus haut, apparut un nouveau thème : la liberté religieuse. Ce thème émergea à partir de 1963 dans les débats conciliaires et prendrait, après des discussions difficiles, la forme d’une déclaration conciliaire en 1965. Finalement, l’Église catholique reconnaissait explicitement par ce biais le principe d’une société pluraliste et une page était définititivement tournée depuis la condamnation des libertés modernes par Pie IX en 1864. Cette problématique, qui tenait fort à cœur à la rédaction de la revue, eut un large écho dans ses colonnes, d’autant plus que l’évêque de Bruges, Mgr De Smedt, était impliqué dans la confection du décret. À l’instar de cet évêque, De Maand se référait à la dernière encyclique de Jean XXIII, Pacem in terris, pour la justification de son plaidoyer en faveur de la liberté religieuse26.
23Les grands espoirs que De Maand avait laissé poindre durant la phase préparatoire étaient confirmés explicitement au début du Concile par les paroles de Hans Küng : « Dit concilie zal of de vervulling van een grote verwachting of een geweldige teleurstelling opleveren. De vervulling van een kleine verwachting zou al een geweldige teleurstelling betekenen »27. « Is de toekomst van het Europese katholicisme al begonnen ? », se demandait, pleine d’espoir, la revue en intitulé d’un article consacré au dominicain français du XIXe siècle Lacordaire28.
24Depuis le début, il apparaissait clairement que deux courants se dessinaient au sein de l’assemblée conciliaire, un réformateur et un conservateur, et il était tout aussi évident qu’il faudrait tenir grand compte de ce groupe conservateur – même minoritaire – parce qu’il pouvait sérieusement entraver un processus de réforme29. Le déroulement des activités conciliaires fut donc suivi avec ’des sentiments mélangés’ par De Maand, sous le sceau du désenchantement devant les trop nombreuses manipulations et les manœuvres de retardement, avec reconnaissance et joie pour l’entreprise immense qui avait été mise en œuvre en quelques années et changeait la face de l’Église plus rapidement que prévu. Durant toute cette période, De Maand évoqua toujours avec beaucoup de considération la figure de Paul VI. Lors de son élection en tant que successeur de Jean XXIII en 1963, il avait été salué par la revue comme « de beste paus die menselijkerwijze gezien, het geopende concilie tot een goed einde zal brengen »30. La revue continua à défendre le pape même après que celui-ci, à la suite de la crise de la 3e période, ait commencé à avoir mauvaise presse. « Slechter dan hij eigenlijk, objectief verdiend heeft », écrivait-on dans De Maand. Le journal faisait d’ailleurs remarquer que les évêques dans leur propre diocèse étaient souvent moins disposés à de profonds changements que Paul VI en concédait sur ses propres arrières, à Rome. Bon nombre d’évêques tenaient une position ambiguë : ils étaient progressistes tant qu’ils demeuraient à Rome mais semblaient bien plus réservés une fois revenus chez eux parce que les réformes y seraient « pastoraal onhaalbaar »31.
25À travers De Maand, nous percevons aussi quelques réactions de l’opinion publique. Comme Max Wildiers le constatait en janvier 1963, le Concile fut accueilli avec joie par un grand nombre, mais il appelait également nervosité, dépit et même panique chez beaucoup d’autres. La révolution silencieuse qui s’accomplissait dans l’Église était ressentie par eux comme une profanation et érodait leurs anciennes certitudes. La cause de ceci était à rechercher dans le fait que les gens n’étaient pas préparés à des changements dans l’Église, et qu’au contraire ils étaient toujours découragés dans cette aspiration. Le seul remède à cet égard consistait en un éclairage convenable de telle sorte que le sens des réformes devînt évident. Comme exemple, l’auteur renvoyait à la fondation par l’évêque Bekkers, de Bois-le-Duc, d’une « commissie voor theologische heroriëntering »32.
26En 1965, au début de la quatrième et dernière période conciliaire, Jan Grootaers attirait l’attention sur une toute autre réaction qui, bien qu’encore diffuse, était apparente depuis peu dans l’opinion publique et qu’il désignait comme peut-être le plus grand danger qui menaçait le succès final du Concile. « Wij bedoelen – nous citons le texte de J. Grootaers – een zekere stroming in de buitenconciliaire opinie van hen die het concilie nu reeds een mislukking noemen omdat het de vereiste vernieuwing niet grondig genoeg, niet vooruitstrevend genoeg zou hebben aangedurfd. In tegenstelling tot de vernieuwers uit traditie kunnen deze voorstanders van een nieuw modernisme worden omschreven als vernieuwers-buiten-traditie... Door bepaalde opvattingen inzake de sacramenten (door de relativering van hun objectieve tekenwaarde), inzake de Eucharistie (door een eenzijdige accentuering op het maaltijds-aspect en in dit aspect op de psychologische inzet), inzake bijbelinterpretatie (door het uithollen van het Verrijzenisverhaal enz.), inzake kerkelijke structuren (door het opgeven van het ambtelijk priesterschap), inzake heilsgeschiedenis (door nivellering van alle wereldgodsdiensten) komen zij telkens tot opvattingen die in volledige tegenspraak staan met de bijbels-liturgische beweging waar zij vroeger adepten van schenen te zijn l », observait-il avec une certaine consternation. Grootaers considérait cela comme un développement inquiétant parce que de telles « neomodernistische uitwassen « seraient saisies par la minorité conservatrice pour affaiblir l’autorité des évêques et même celle du Concile tout entier. Paul VI était d’ailleurs déjà assailli par de tels arguments33.
Quel avenir pour l’Église ?
27À partir de 1966, l’Église parut se retrouver dans un tourbillon. Ce jugement exprimé en 1969 par Herman Servotte, qui était président du nouveau séminaire Jean XXIII ainsi que professeur de littérature anglaise à l’Université de Louvain, rend d’une façon frappante en sous-entendu comment ces années agitées furent vécues par un observateur perspicace et engagé tel que lui. « Het evolueren van het denken kan men haast nooit constateren, juist zoals men in een vliegtuig hoog boven de wolken de beweging niet waarneemt. Het is pas achteraf dat men, terugblikkend op de afgelegde weg, de afstand kan meten die de huidige situatie scheidt van de plaats van vertrek. Soms echter voelt men als het ware lijfelijk de beweging aan waarin men betrokken is ». Il gardait une telle impression de mouvement, d’une "speurbare evolutie", d’un colloque sur le prêtre auquel il avait assisté à Heverlee en février de cette année-là34.
28Le point de départ vers ces changements rapides fut marqué par la publication du mandement épiscopal du 13 mai 1966, qui entendait conserver à l’Université de Louvain son caractère unique et indivisible. Le document suscita un violent mouvement de protestation, inattendu pas seulement pour les évêques, dans tout le pays flamand, en particulier parmi les jeunes étudiants, les écoliers et les universitaires. Ce n’était pas seulement le contenu, qui, selon De Maand, témoignait d’un confessionalisme et d’un cléricalisme dépassé, qui gênait les contestataires, mais aussi le ton arrogant et autoritaire des évêques35. L’anticléricalisme qui constituait un élément réel dans l’idéologie nationaliste flamande se mêlait ici à un anti-autoritarisme croissant des jeunes générations36.
29Dans le mouvement de protestation intervenait peut-être encore un autre facteur mis en avant par De Maand et par le collectif des associations de contestation religieuse, Kontakt, auquel appartenait notamment la paroisse universitaire de Louvain. Ces associations reprochaient à l’épiscopat de ne pas se rendre pleinement compte « à quel point ce nouvel esprit a pénétré dans le peuple chrétien et avec quelle aspiration on a les yeux tournés vers les réformes qui doivent donner une forme concrète à l’aggiornamento ». Le malaise dominait à cause du silence de la hiérarchie depuis le Concile, le retard d’un dialogue large et ouvert avec le peuple chrétien, le mystère qui entourait les réformes qu’on laissait espérer, les demi-mesures qui ne contentaient personne. La crise de confiance ne s’exprimait du reste pas seulement chez les laïcs mais aussi dans de larges secteurs du clergé, et le fait qu’elle avait conduit à une explosion aussi violente tenait aussi au manque de structures adéquates de concertation. On renvoyait, comme exemple à suivre, à l’épiscopat des Pays-Bas qui avait donné l’espoir d’un concile pastoral de la province ecclésiastique néerlandaise pour réfléchir à l’application concrète des décisions conciliaires. Si les évêques belges avaient été à Rome des partisans de l’ouverture et des défenseurs de la collégialité, ils avaient à présent beaucoup à apprendre de l’Église des Pays-Bas37.
30L’entente avec l’épiscopat belge était compromise. Un incident le montra encore en 1967 : quand des professeurs et étudiants de Louvain voulurent adresser une lettre à Paul VI pour lui recommander instamment de ne pas laisser au régime autoritaire de Salazar, lors du voyage pontifical prévu au Portugal, l’occasion d’exploiter cette visite à son propre avantage. Suenens s’opposa à une telle lettre jugée "impolie" et "sans tact" à l’égard du pape. Cela lui valut encore un commentaire acerbe du Maand : « Wij zijn van mening dat de kromstaf definitief thuis hoort in de antiquiteitenwinkel en dat het hanteren ervan alleen de gezagsdragers nog meer van de gelovigen zal verwijderen »38.
31Le mécontentement à propos de la marche des affaires dans l’Église était encore renforcé par l’impression que le curialisme romain reprenait l’offensive et que « le rythme du renouveau ecclésial demeurait en retrait par rapport aux impulsions issues de Vatican II ». Selon De Maand, le déroulement du premier synode des évêques en 1967 le montrait clairement. Il y régnait « une atmosphère lourde, où on marchait sur la pointe des pieds », toute différente de celle du Concile. L’idée de collégialité, dont il aurait dû se faire l’expression, avait été, au déplaisir de la revue, interprétée dans un sens très minimaliste. Le synode paraissait ne pouvoir fonctionner que comme un conseil consultatif, tandis que le pape et la curie prenaient finalement les décisions eux-mêmes39. En net contraste apparaissait la dynamique du premier congrès des laïcs à se tenir après le Concile, qui avait eu lieu à Rome cette année-là, dans une atmosphère démocratique et de libre opinion. On y avait abordé des problèmes d’actualité comme la régulation des naissances, le sous-développement, le racisme et la femme dans l’Église40. En 1968, De Maand réagissait contre ce qu’elle appelait « la verticalisation excessive de la hiérarchie ecclésiastique » et plaidait en faveur d’une « horizontalisation des structures ecclésiales » qui pouvait prévenir les nombreux court-circuits dans une Église conçue « comme une institution ouverte, transparente, aussi démocratique que possible »41.
32"Horizontalisation", "démocratisation" : nouveaux termes qui émergent désormais dans la revue. Ils indiquent qu’il y avait plus que du dépit au sujet d’une intervention autoritaire ou de l’impatience à propos de la lenteur des réformes concrètes. Un changement de mentalité en profondeur était à l’œuvre, qui impliquait aussi une approche de l’Église et même de la religion. Nous en trouvons les premiers signes en 1966 avec l’insertion d’un texte du philosophe parisien Paul Ricoeur sur le devoir pour l’Église et les chrétiens individuels de s’engager collectivement en faveur d’un monde socialement plus juste et plus viable42. La même année se tint à Genève, à l’initiative du Conseil œcuménique des Églises, un congrès consacré au thème "Église et Révolution", où prit entre autres la parole Harvey Cox, l’auteur de La cité séculière. Le but consistait à réfléchir à une théologie de la révolution en vue de créer ou de susciter une toute nouvelle époque au point de vue politique, économique et social. « L’idée de la révolution est essentielle pour la Bible », telle était la conviction de base, selon le compte rendu donné dans De Maand43. La révolte de 1968, qui, en connexion avec une nouvelle explosion du conflit linguistique, se manifesta dans toute sa force à l’Université de Louvain à partir de janvier et atteignit vite un seuil socialement critique, accéléra encore cette dynamique révolutionnaire. De Maand publia à ce moment un article du dominicain français Paul Blanquart sur la foi chrétienne et la révolution, dans lequel il envisageait la possibilité d’une grande convergence entre marxisme et christianisme. À partir d’une même utopie mobilisatrice, ils pouvaient combattre les structures du capitalisme et de l’exploitation44. Se manifestait ainsi un rapprochement de convictions qui mettait radicalement en question l’ordre établi et qui ramenait pratiquement la foi à une forme d’agir éthique.
33En même temps, une sécularisation très accentuée se manifestait dans la vie de foi, une évolution du verticalisme – renvoyant au divin, au surnaturel – vers l’horizontalisme – renvoyant à l’homme et au monde, comme l’évoquait Fons D’Hoogh dans les titres des articles publiés à ce sujet dans De Maand45. Cette nouvelle vision impliquait à son tour une nouvelle image de l’Église. Ainsi, un étudiant de l’Institut des sciences religieuses de Louvain décrivait l’Église telle qu’elle devrait être pour "nous", jeunes de vingt ans. Cette Église, écrivait-il, doit partir des options de base du prophétisme, du service et de la formation d’une communauté et donner une place au dialogue et à la pluriformité. Ses prêtres doivent être des prophètes qui ne sont pas liés à l’obligation du célibat et vivent au milieu des hommes46.
34H. Servotte, qui, comme on l’a mentionné, fut lui-même engagé activement dans le renouveau de la formation sacerdotale dans l’archidiocèse de Malines, remit l’étudiant amicalement mais clairement à sa place. Cette nouvelle approche d’Église, disait le professeur louvaniste, s’appuie sur une théologie très boiteuse parce qu’elle réduit la tâche de l’Église à un engagement purement humain pour le prochain et laisse de côté son devoir d’annoncer le message du Christ, tout comme elle présente le ministre ordonné simplement comme un homme parmi les hommes alors que, comme membre de la hiérarchie, il est en même temps quelqu’un qui se tient en face de la communauté au nom du Seigneur. H. Servotte voyait dans cette présentation un symptôme inqiétant de ce qui était en train de se passer dans l’Église. Beaucoup de ceux – et ce sont souvent des très engagés – qui veulent rénover les structures de l’Église formulent cette aspiration en des termes qui donnent l’impression qu’ils ne font pas attention à des valeurs chrétiennes essentielles. D’autres, plus conservateurs et frères dans la foi tout aussi engagés, en tirent argument pour rejeter les changements proposés parce qu’ils semblent s’appuyer sur une conception faussée de la foi. Les deux groupes parlent donc une autre langue. Il y a, par conséquent, dans l’Église un besoin pressant d’interprètes de manière à ce que l’échange puisse se poursuivre entre théologiens et peuple, entre les générations et entre les groupes différents en son sein. « Alleen zo zullen wij van elkaar leren en komen tot de brede consensus die nodig is, wil het beleid doelmatig blijven functioneren »47.
35En cette année 1969, H. Servotte revint encore dans un autre article sur cette pluriformité croissante dans la vie des croyants. Le phénomène se manifestait non seulement entre générations mais aussi chez des personnes d’une même génération, et même chez celles qui ont reçu une formation identique. Est en cause, pensait-il, une façon différente de percevoir le rapport entre nature et surnaturel, expérience et révélation, immanence et transcendance. C’est l’opposition entre une conception plus essentialiste et une plus existentialiste qui était déjà apparue au Concile. Tout se passe comme si un mouvement ascendant remplaçait un mouvement descendant. « Waar wij vroeger van bovenaf een aantal waarheden en daaruit voortvoeiende gedragsregels aanvaardden, hechten wij nu geleidelijk aan meer belang aan wat in onze ervaring en in de menselijke ervaring überhaupt te vinden is »48. Dans l’ensemble se produisait donc une évolution vers la radicalisation, l’aplatissement, la pluriformité, tous phénomènes qui détachaient les fidèles, surtout les jeunes, de l’institution et de la doctrine et qui faisaient du Concile une affaire dépassée. Les "novateurs hors tradition", que J. Grootaers avait déjà aperçus en 1964, avaient depuis lors augmenté dans une proportion notable.
36Dans ce contexte parut en 1968 l’encyclique Humanae Vitae. Le document était en retrait par rapport à la Constitution conciliaire Gaudium et spes, qui avait abordé le mariage sur un mode personnaliste et avait laissé un espace à la conscience personnelle. Comme l’écrivait dans De Maand le théologien wallon Philippe Delhaye, la nouvelle encyclique replaçait la loi naturelle au point de départ et subordonnait de nouveau les rapports entre partenaires à la transmission de la vie, tandis qu’il n’était plus question de responsabilité personnelle. La désillusion et l’indignation résonnèrent dans beaucoup de réactions de la presse et dans la lettre ouverte de nombreux laïcs adressée aux évêques. Telles étaient les réactions des gens de même mentalité et peut-être de même génération de De Maand (les 30 et 40 ans), mais pour les jeunes radicaux l’encyclique constitue tout au plus un stimulant externe pour se détourner davantage de l’institution49.
37Abstraction faite d’Humanae Vitae, le problème sacerdotal allait aussi former, autour de 1970, un point de friction entre Rome et une plus large opinion dans l’Église ; spécialement dans une partie du clergé. Depuis les années du Concile, on plaidait avec insistance dans les bulletins flamands pour le clergé en faveur d’un nouveau type de prêtre. Le temps du fonctionnaire isolé et étranger au monde qui posait des actes sacrés et conduisait son troupeau d’une manière paternaliste demandait à être dépassé. Une autre image du prêtre était mise en avant : celle du pasteur qui conçoit principalement sa fonction comme une mission. Le prêtre devrait être un médiateur entre Dieu et les hommes, un bâtisseur de la communauté croyante, un homme qui n’enseigne pas mais écoute, qui est présent comme homme parmi les hommes, qui ne conçoit pas sa fonction comme un pouvoir mais comme un service, qui engage le dialogue avec son entourage et s’ouvre au monde. La formation cléricale devait être réorganisée en fonction de cette nouvelle image50. Ces conceptions avaient été en grande partie affirmées par le Concile, dans la Constitution Lumen gentium aussi bien que dans les décrets sur la formation sacerdotale Optatam totius et sur la vie et le ministère des prêtres Presbyterorum ordinis, promulgués tous deux en 1965.
38Il n’empêche : après le Concile, on put constater un malaise dans le clergé. Le sentiment demeurait, non sans raison, que les prêtres avaient été l’objet d’une moindre attention de la part de Vatican II que les évêques et les laïcs et qu’après le Concile, ils avaient été abandonnés à leur sort. Les prêtres plutôt conservateurs éprouvaient quelque difficulté à définir leur nouvelle position vis-à-vis des laïcs, ceux de la tendance plutôt progressiste estimaient que les évêques ne prolongeaient pas logiquement le principe de la collégialité dans leurs relations avec le clergé51. À leur avis, ces relations restaient trop distantes et autoritaires, du fait notamment du manque d’organes spécifiques de concertation pour le clergé. Dans ce débat, le célibat était un point chaud, qui, comme celui de la régulation des naissances, avait été exclu par Paul VI de la compétence du Concile. Dès 1965, il fut mis à l’ordre du jour dans De Maand, à l’instar de la revue belgo-néerlandaise Tijdschrift voor théologie. La valeur du célibat n’était pas mise en question, mais bien son lien obligé avec la fonction prophétique des prêtres. Ce lien essentiel n’avait de sens que dans la vie monastique52. En 1967 cependant, Rome affirmait le caractère obligatoire du lien dans l’encyclique Sacerdotalis Caelibatus.
39La "crise du clergé", encore renforcée par la publication d’Humanae vitae, fut l’occasion du congrès, déjà mentionné, qui fut organisé en 1969 à Heverlee pour les prêtres de la région flamande. On y plaida en faveur d’une plus grande pluriformité du sacerdoce : prêtres à temps plein et à mi-temps, prêtres mariés et célibataires, et pour une plus grande autonomie du clergé. Au début de 1969 naquit en Flandre le groupe sacerdotal contestataire Exodus, branche du mouvement qui se manifestait également dans d’autres pays européens. Ce mouvement joignait la critique à propos de nombreuses situations internes à l’Église, en particulier le célibat et les relations hiérarchiques, à une critique sociale de gauche plus globale par laquelle il reprochait à l’Église sa complicité avec le système capitaliste exploiteur53. Pendant la conférence des évêques d’Europe sur le problème sacerdotal tenue à Coire en juillet 1969, ces groupes de prêtres critiquant la société organisèrent une contre-conférence dans la même ville comme expression de leur désir d’avoir voix au chapitre54. Le synode romain des évêques de 1971, qui lui aussi allait être placé sous le signe de la problématique sacerdotale, était attendu par les « réformateurs « avec espoir et crainte, mais il manifesta une fois de plus que les membres conservateurs de la curie tiraient à nouveau les rênes vers eux. Il ne pouvait être question de toucher au sacerdoce célibataire.
40Cette attitude de repli était peut-être dictée par le sentiment au demeurant exact que la direction ecclésiastique perdait son emprise totale sur la communauté catholique et, plus encore, par les chiffres alarmants de l’adhésion ecclésiale et de la situation du clergé. Le nombre annuel d’entrées dans les séminaires belges baissa entre 1965 et 1971 de 264 à 92 et le nombre de sorties passa de 6 à 38 ; les deux courbes subissent leur plus forte inflexion respectivement vers le bas et vers le haut en 1969. En 1964, environ 55 % de la population belge observait encore le précepte dominical, en 1971 seulement 43 %, avec une forte baisse surtout en Flandre. Les courbes pour les "rites de passage’’, baptême, mariage et funérailles, déclinaient plus lentement mais dénotaient une tendance tout aussi indéniable à la baisse55. L’appareil des organisations catholiques demeurait en grande partie sur pied, mais s’y insinuait un creusement interne, une évolution d’un « catholicisme ecclésial vers une chrétienté socio-culturelle », comme le disent K. Dobbelaere et J. Billiet dans un bilan provisoire de 197656. Dans les organisations catholiques de jeunesse eurent lieu vers 1970 des discussions parfois épiques à propos du "K" de leur mouvement et il y eut dans la première moitié des années 70 une évolution dans le sens d’une activité socio-critique de même que, parfois dans un stade ultérieur, de désidéologisation, de sorte qu’elles acquirent plutôt le caractère d’un club de jeunes57. Les chrétiens les plus engagés eurent, autour de 1970, tendance à se détacher des structures traditionnelles de l’Église et à se replier dans des groupes d’étude et de conscientisation. Face à la mouvance radicale et socio-critique naquit en 1968 une formation nettement conservatrice et traditionaliste avec la fondation de la Société Thomas More et l’édition de la feuille Positief58. Il n’y a rien d’étonnant à ce que, vers cette époque, des questions commencèrent à surgir autour de l’avenir de la religion et de l’Église59. Cependant, on n’en vint pas en Flandre dans les années 70 à une polarisation entre forces progressistes et conservatrices, comme ce fut le cas aux Pays-Bas.
41Cela s’explique peut-être en partie par un certain rétablissement de la confiance entre la hiérarchie, spécialement le cardinal Suenens, et le peuple chrétien. Ce rétablissement fut perceptible à partir de 1968. Le fait que les évêques, lors de la seconde crise de Louvain en janvier 1968, reconnurent qu’ils étaient divisés entre eux et laissaient donc l’affaire aux laïcs fut salué par De Maand comme un coup de grâce qui avait été porté, sans intention expresse, par l’épiscopat, à « l’Église triomphaliste de Belgique ». Finalement, laïcs et prêtres retrouveraient peut-être au sein de l’Église ces évêques « die zij als herders (en niet als iets anders) kunnen beschouwen »60. Plus tard dans l’année, on parla avec reconnaissance de la réaction de l’épiscopat belge à Humanae vitae, une réaction qui entendait donner notamment la preuve du souci pour l’homme et la netteté de sa conscience, et non pour les règlements, ainsi que pour l’alliance non seulement avec le pape mais aussi avec les fidèles61. Les interviews que le card. Suenens accorda, en mai 1969 et mai 1970, aux Informations catholiques internationales et au journal Le Monde, furent également très appréciées ; le cardinal y défendait courageusement l’héritage du Concile en matière de collégialité, d’autonomie pour les Églises locales et de libre expression de la pensée, face au mouvement de récupération qui était largement en cours à partir de la curie62. Du reste, la mise en œuvre concrète des décisions conciliaires commençait, vers 1969, à prendre peu à peu des formes plus claires en Flandre.
Structures pour l’Église de demain
42Malgré la critique des voix contestatrices après le Concile à propos de la mollesse avec laquelle les réformes étaient menées, il y eut, pendant les premières années postconciliaires, beaucoup de travail en peu de temps de la part des responsables ecclésiastiques pour donner vie à de nouvelles structures à l’Église en Flandre. Ces réformes furent énergiques notamment dans le domaine de la formation théologique. Dans les grands séminaires, l’enseignement fut mieux mis en accord avec une visée et une justification croyante, l’étude personnelle fut encouragée, la vie communautaire fut organisée en petits groupes et l’on accorda encore plus d’attention, dans la formation, à l’apprentissage pastoral63. En outre, se produisit un important mouvement de concentration pour la formation des religieux, une concentration qui s’imposait en fonction du déclin rapide dans le recrutement des novices. En 1966, de nombreuses congrégations établies à Leuven décidaient déjà de collaborer au sein du L.I.K.S. (Leuvens Instituut voor Kerkelijke Studies). L’année suivante, une concentration à plus grande échelle se concrétisa avec la fondation du Centrum voor Kerkelijke Studies à Leuven, au sein duquel un grand nombre de religieux du pays flamand entendaient organiser leur formation en commun.
43La réforme la plus marquante sur ce terrain s’accomplit en 1968-1969, par la réorganisation de la Faculté de théologie à Leuven, en relation avec l’éclatement de l’Université. En vue du nouveau départ de la Faculté néerlandophone dans la Katholieke Universiteit Leuven furent prévues, outre la formation théologique, réorganisée en conformité avec les nouvelles normes romaines de 1968, trois autres orientations d’études. La section néerlandophone de l’Institut supérieur des sciences religieuses, une institution qui existait dans l’Université depuis 1942 et qui s’était développé, devenant un institut de formation pour les professeurs de religion, fut intégrée dans la Faculté. Dans l’intention de conserver le caractère international de la formation fut créée en outre une section anglophone. De plus, une formation en théologie appliquée fut mise sur pied en vue d’attirer prêtres et religieux. Le Centrum voor Kerkelijk Studies, récemment créé, et l’archevêché de Malines conclurent une convention avec la Faculté, par laquelle ils s’engageaient à envoyer dorénavant leurs étudiants à la Faculté de théologie dans la mesure où ceux-ci étaient aptes aux études universitaires. De son côté, la Faculté accueillit plusieurs professeurs venus du Centrum et des séminaires. L’offre devint ainsi très diversifiée. De la sorte, la Faculté put jouer son rôle pour donner une impulsion renouvelée à l’enseignement religieux et à l’activité pastorale en Flandre. D’autant plus qu’il était désormais permis aux laïcs, hommes et femmes, d’accéder à une formation théologique de caractère scientifique64.
44Des nouvelles structures furent ébauchées à bref délai pour la pastorale ; aussi bien les laïcs que le clergé y trouvèrent leur place. Le point de départ dans ce sens fut le concept d e"pastorale d’ensemble", qui était préconisé dans les bulletins ecclésiastiques depuis la première moitié des années 60. Le concept venait de France. Il signifiait d’abord que de nouveaux liens de collaboration seraient créés entre pastorale paroissiale et catégorielle au sein de la paroisse, entre paroisses, sur le terrain décanal et diocésain, en second lieu que toutes les forces disponibles seraient impliquées, séculiers et religieux, pasteurs et laïcs, enfin que la mise en œuvre se ferait en même temps dans de nombreux domaines et avec des méthodes diverses.
45L’élaboration des structures pour cette nouvelle pastorale avait été entamée dès avant la fin du Concile ; elle parvint en 1972 à un certain achèvement. Dans les différents diocèses, des organes de concertation furent créés pour les laïcs au plan paroissial (conseils paroissiaux), et pour laïcs et prêtres au niveau décanal et diocésain (conseils pastoraux, conseils presbytéraux). Entre l’échelon diocésain et décanal furent mis sur pied des districts, comme nouveaux organes intermédiaires qui rendaient possible la collaboration entre doyennés. En 1970, apparurent également quelques importantes formes de collaboration interdiocésaines. Une Commission nationale pour le clergé fut créée, avec une section néerlandophone et une autre francophone : elle s’occuperait spécifiquement des problèmes du clergé. Elle était composée entre autres de représentants des conseils presbytéraux et des religieux. C’est encore en 1970 que démarra la Commission interdiocésaine de formation continue, qui visait à l’éducation permanente du clergé en coordination interdiocésaine ou diocésaine. Elle produisit en 1972 un impressionnant rapport de ses activités65.
46Une importante conquête pour le mouvement des laïcs fut enfin la création, le 28 février 1970, du Conseil pastoral interdiocésain (I.P.B.). Le plan en avait été ébauché à Rome en 1967, pendant le congrès international pour les laïcs. L’I.P.B. était conçu comme une structure de concertation interdiocésaine entre « tous les secteurs et articulations dans lesquels le peuple chrétien se met à l’œuvre et les évêques, surtout en rapport avec les problèmes qui sont communs et dépassent les frontières des diocèses ». Lors de la première réunion, le 24 octobre 1970, il y eut immédiatement une proposition concernant l’opportunité d’un concile pastoral flamand, à l’image de celui des Pays-Bas. Cette proposition fut rejetée, « mais on désire intensifier l’activité du Conseil interdiocésain lui-même, en renforçant le secrétariat et en tenant régulièrement des réunions de travail bien préparées »66.
47L’I.P.B. publia chaque année un rapport d’activités. Depuis 1980, paraît aussi I.P.B.-berichten. L’accroissement en ces années des feuilles d’information religieuse pour un large public chrétien fut vraiment surprenant. Le diocèse d’Anvers commença avec Daco, celui de Bruges avec Ministrando, Malines-Bruxelles avec Pastoralia. À Gand, continuèrent à paraître les anciens bulletins Monita ad Clerum et De godsdienstige week van het Bisdom Gent. Ces initiatives visaient à rapprocher les fidèles de la vie de l’Église.
48L’implication des laïcs fut évidemment favorisée aussi par le renouveau de la liturgie, dans lequel la paroisse universitaire louvaniste, entre autres, joua un rôle stimulant67. En 1967, les évêques belges reçurent l’autorisation, dans la ligne du Concile, d’introduire le diaconat permanent. Les premiers diacres furent ordonnés en 196968.
Conclusion
49De Maand a joué en Flandre un rôle mobilisateur important dans la réflexion sur la religion et l’Église. La revue reflétait la tendance réformatrice d’une grande partie de l’élite intellectuelle catholique en pays flamand. Cette tendance était très étroitement liée à l’événement conciliaire : au cours de la période préparatoire, il y eut une grande attente ; le déroulement du Concile fut suivi avec grande attention ; le temps de l’après-Concile fut marqué par la recherche importante des réalisations concrètes.
50Dans la seconde moitié des années 60, se produisit en Flandre, en dehors de la revue, une accélération du courant : de l’ambition aux changements internes vers une mise en question de la tradition et même un complet décrochage de l’Église. En même temps, le renouveau ecclésial auquel De Maand avait tendu commençait à se consolider en d’importantes réformes de structure. La fonction critique de la revue parut avoir joué son rôle et elle en tira les conclusions. Dans le courant de 1971, le titre fut modifié pour devenir De Nieuwe Maand et la rédaction fut profondément modifiée. Le nouveau périodique voulut se consacrer au renouveau politique, accordant dès lors une attention très restreinte à l’Église.
51Traduit du néerlandais.
Notes de bas de page
1 De Maand, 3,1960, p. 604, en référence à Otto Roegele dans le Rheinisher Merkur, 10 octobre 1958.
2 K. Van Isacker, Herderlijke brieven over politiek, Antwerpen, 1969, p. 164-168.
3 L.-J. Suenens, Souvenirs et Espérances, Paris, 1991, p. 46.
4 Bij een nieuwe start, dans De Maand (désormais abrégé DM), 12,1969, p. 2-5 ; A. Schramme, De Universitas-beweging (1940-1960), mémoire de licence non publié de la KULeuven, 1985, p. 88 et suiv. ; L. Gevers et L. Vos, Kerk vormen in Leuven. 25 jaar Universitaire Parochie, Leuven, 1989, p. 9-25.
5 J. Leclercq, « Clerus en samenleving in Vlaanderen. Voor een sociologische zelfkennis », dans DM, 3, 1960, p. 330-341.
6 Voir à ce sujet D. De lange, « Tussen Kerk en wereld », dans DM, 4, 1961, p. 11-23 ; A. Dondeyne, « Verdraagzaamheid », dans Ibid., p. 322-330.
7 R. Merecy, « Onderwijs op humanistlsche basis », dans DM, 3, 1960, p. 79-84 ; J. Grootaers, « Bereidheid tôt dialoog. Onderwijs en opvoeding na het Schoolpact », dans Ibid., p. 266-269 ; B. Delfgaauw, « Heulen met de vijanden », dans DM, 4, 1961, p. 227-228 ; A. J. Nevink, « Uw naaste gelijk u zelf », dans Ibid., p. 294-302 ; B. Delfgaauw, « Dialoog met Moskou », dans Ibid., p. 421-426 ; Idem, « Open brief aan de redacteur van "Links"», dans Ibid., p. 441-444 ; W. Banning, « Een christelijke visie op marxisme », dans Ibid., p. 467-481 ; J. Kruithof, « De toekomst van het Kristendom », dans Ibid., p. 583-586 ; B. Delfgaauw, « De toekomst van het kristendom : repliek of Kruithof », dans Ibid., p. 651.
8 P. Leemans, Op weg naar de oecumene, dans DM, 3, 1960, p. 26-32 ; C. Cerpentier, Een Lutherse kloostergemeenschap : « "Ökumenische Marienschwestern"» Damstadt-Eberstadt, dans Ibid, p. 41-45 ; « Protestanten en katholieken over het concilie », dans Ibid, p. 316-320 ; D. De Lange, « Gesprek met dr. F. Thijssen, consulter van het "Secretariaat ter bevordering van de eenheid der Christenen" », dans DM, 4, 1961, p. 284-288.
9 I. Lindemans, « Anti-protestantisme op zijn smalst. Protest tegen demagogische praktijken », dans DM, 3, 1960, p. 113-116.
10 P. De Somer, « Geloof en Wetenschap », dans Ibid., p. 465-474.
11 B. Luykx, « De leek in de Kerk », dans Ibid., p. 602-609.
12 « Het vrije woord in de Kerk », dans Ibid., p. 522-531.
13 Cl. Soetens, « Les "vota" des évêques belges en vue du concile », dans M. Lamberigts et Cl. Soetens (éd.), À la veille du concile Vatican II. Vota et réactions en Europe et dans le catholicisme oriental, Leuven, 1992, p. 41-42.
14 La citation est extraite de Kultuurleven, 28,1961, p. 405. De Gids op maatschappelijk gebied et Streven s’exprimaient dans le même sens.
15 « Curie en concilie », dans DM, 4, 1961, p. 179-181 ; O. Rousseau, « Waarover zal het concilie handelen ? », dans Ibid., p. 185-192 ; De grote verwachting, dans Ibid., p. 227- 228 ; F. Oudejans, « Het concilie en de openbare mening. Journalisten spreken hun bezorgdheid uit », dans Ibid., p. 231-235 ; H. Küng, « Vernieuwing en verwachting », dans Ibid., p. 445-447.
16 B. Delfgaauw, « Het Nederlands episcopaat en het concilie », dans DM, 4, 1961, p. 89- 96.
17 X.X.X., « De nieuwe huwelijksrealiteit », dans DM, 3, 1960, p. 46-50.
18 « Sede vacante », dans DM, 4, 1961, p. 394-401.
19 Telemachus, « Tussen conservatisme en doorbraak », dans DM, 4, 1961, p. 466-468 ; « Bisdommen en pers », dans Ibid., p. 502 ; « Habemus pontificem », dans DM, 5, 1962, p. 2-6.
20 J. Grootaers, « Het concilie op alle tonen. Een bezinning van de kerkgemeenschap op de geloofsbeleving », dans DM, 5, 1962, p. 51-55 ; F. Hintjens, « Het concilie, maar... », dans Ibid., p. 250-252 ; J. Grootaers, « Weerbericht voor een concilie », dans Ibid., p. 415- 425 ; Idem, « Conciliaire météorologie », dans Ibid., p. 473-487 ; Idem, « Een concilie voor de 20ste eeuw », dans Ibid., p. 538-555 ; « Het gesprek van de Maand met twee concilie-theologen », dans Ibid., p. 602-607 ; « Conciliekalender voor de eerste sessie : 11 oktober 1962-8 december 1962 », dans Ibid., p. 634-638 ; « Concilievoorstel van een missiebisschop », dans DM, 6, 1963, p. 158-161 ; L. Peters, « Concilie aperto », dans Ibid., p. 221-229 ; J. Grootaers, « Op de vooravond van de tweede Conciliesessie », dans Ibid., p. 433-445 ; Idem, « Naast en na het concilie », dans Ibid., p. 450-460 ; Idem, « Opportune, Importune. Een sessie met gemengde gevoelens », dans Ibid., p. 590-606 ; N. Riccio, « Brief uit Rome », dans DM, 7, 1964, p. 148-156 ; J. Grootaers, « Concilie en Paus, Rome en thuis. Een bewogen sessie », dans DM, 8, 1965, p. 16-35 ; G. Philips, « De constitutie over de Kerk », dans Ibid., p. 121-127 ; J. Grootaers, « Geschreven voor de opening. De inzet van de 4de zittijd : het na-concilie », dans Ibid., p. 402-415.
21 « Gesprek van de Maand over New Delhi », dans DM, 5, 1962, p. 39-43 ; B. Griffiths, « Drie wegen naar eenheid », dans Ibid., p. 96-101 ; « Westerse kruisvaarders tegen de Wereldraad van Kerken », dans Ibid., p. 242-245 ; « De Orthodoxen en het Tweede Vaticaans Concilie », dans DM, 6, 1963, p. 88-98 ; J. Grootaers, « Het gesprek van de Maand met Dr. Willem A. Visser’t Hooft », dans Ibid., p. 99-105 ; Telemachus, « Meer vertrouwen gevraagd : pleidooi voor œcumene », dans Ibid., p. 166-170 ; « Een protestants standpunt. R.K. renouveau in Zuid-Amerika », dans Ibid., p. 188-192 ; « Michael D.D. Ramsey, aartsbisschop van Canterbury », dans Ibid., p. 357-367 ; A. J. Bronkhorst, « De Tweede Zittingsperiode van het concilie en de protestanten », dans Ibid., p. 406- 413 ; B. Delfgaauw, « Enkele œcumenische publikaties uit Nederland », dans Ibid., p. 507-511 ; Idem, « De œcumene in het werk van W. N. van de Pol », dans Ibid., p. 561- 566 ; P. Bouman et a., « Wij waren op het œcumenisch jongerencongres : Utrecht, 28 september 1963 », dans DM, 7, 1964, p. 20-27 ; « Gcumenisch weekend te Hofstade », dans Ibid., p. 157-158 ; G. Valquist, « Het concilie in het Hoge Noorden », dans DM, 8, 1965, p. 81-87 ; G. Baum, « Het œcuménisme volgens Vaticanum II », dans Ibid., p. 291- 296.
22 A. Bredero, « De ontmoeting van Christenen en Joden », dans DM, 5,1962, p. 450-456 ; A. Neher, « Dejood tegenover de Kristen », dans DM, 4,1963, p. 170-174 ; H. Duesberg, « Het Joodse geweten », dans Ibid., p. 175-181 ; « Tussen Rome en Jeruzalem », dans DM, 7,1964, p. 28-39 ; « Plus XII, de Christenheid en de Joden », dans Ibid., p. 194-202 ; « Vijf Joodse stemmen », dans Ibid., p. 250-253 ; « Voor een vrije opinievorming », dans DM, 8,1965, p. 129-131 ; C. Tindemans, « De plaatsbekleder. Een standpunt », dans Ibid., p. 161-168 ; L. Liebman, « Eindpunt of vertrekbasis ? Eindelljk een concilieverklaring over de Joden », dans Ibid., p. 532-539.
23 J. Grootaers, « De leek, zijn bisdom en de concilies », dans DM, 5, 1962, p. 87-95.
24 R. Delbeke, « Het weekend over "De leek in de Kerk"», dans DM, 5, 1962, p. 367-383.
25 G. Peters, « Het probleem van de religieuzen », dans DM, 8, 1965, p. 481-491.
26 E.-J. De Smedt, « Pleidooi voor de godsdienstvrijheid », dans DM, 6, 1963, p. 627-635 ; « Bij het keren van de zandloper : het afgelopen jaar, wat is er gebeurd ? », dans Ibid., p. 537-550 ; A. J. Bronkhorst, « Geloofsvrijheid en Gewetensvrijheid », dans DM, 8, 1965, p. 297-304 ; « Een enquête van De Maand. De verklaring van de godsdienstvrijheid », dans DM, 9, 1966, p. 290-318, 343-378 ; J. Courtney Murray, « De godsdienstvrijheid van Leo XIII tot Vaticanum II », dans DM, 10, 278-286.
27 H. Küng, « Van het eerste naar het tweede Vaticaans concilie. Naar een theologie van het œcumenisch concilie », dans DM, 5, 1962, p. 66-72 ; M. Van der Plas, « Spot ? Waarom ? Vertrouwen », dans Ibid., p. 73-86.
28 F. Heer, « Lacordaire herdenken », dans Ibid., p. 31.
29 « Bolwerk of samenspraak », dans Ibid., p. 102.
30 J. Grootaers, « Bij het graf van Paus Johannes », dans DM, 6, 1963, p. 368-373.
31 J. Grootaers, « Concilie en Paus, Rome en thuis... », op. cit. ; Idem, « Geschreven voor de opening. De inzet... », op. cit.
32 N. M. Wildiers, « Bij de vernieuwing van de Kerk. Overbodige conflicten », dans DM, 6, 1963, p. 6-10.
33 J. Grootaers, « Geschreven voor de opening. De inzet... », op. cit.
34 H. Servotte, « Colloquium over de priester in Filosofenfontein, 1-2 februari 1969 », dans DM, 12, 1969, p. 123-124.
35 « Leuven buiten Leuven », dans DM, 9, 1966, p. 257-280.
36 Voir L. Vos, M. Derez, I. Depraetere et W. Van der Steen, De strnte jaren. Studentenprotest in de jaren zestig, Tielt, 1988.
37 « « Kontakt « over Leuven », dans DM, 9, 1966, p. 439-443 ; « Pastoraal concilie van de Nederlandse kerkprovincie », dans Ibid., p. 557-565.
38 J. Van de Walle, « Kardinaal Suenens zet de klok achteruit », dans DM, 10,1967, p. 292- 300.
39 J. Grootaers, « De synode in de kelder », dans Ibid., p. 481-483.
40 Idem, « Het eerste lekencongres na het concilie », dans Ibid., p. 451-457.
41 « Gezagsuitoefening en communicatie in de kerkelijke hiërarchie », dans DM, 11, 1968, p. 298-299.
42 P. Ricoeur, « De taak der christenen », dans DM, 9, 1966, p. 626-630.
43 G. Van Leeuwen, « Kerk en Revolutie », dans DM, 10, 1967, p. 414-422.
44 P. Blanquart, « Christelijk geloof en revoiutie », dans DM, 11, 1968, p. 233-242.
45 F. D’Hoogh, « De uitnodiging van God doorheen de hedendaagse werkelijkheid », dans DM, 10, 1967, p. 402-413 ; Idem, « Horizontaal engagement en contemplatief leven », dans DM, 11, 1968, p. 139-151.
46 J. Cornille, « Een Kerk voor ons », dans DM, 11, 1968, p. 506-515.
47 H. Servotte, « Gewikt en gewogen », dans DM, 12, 1969, p. 75-76.
48 H. Servotte, « Colloquium over de priester in Filosofenfontein », dans Ibid., p. 123-124.
49 « Eenzame beslissing, kerkelijke vergissing ; open brief aan de Bisschoppen van de Belgische Kerkprovincie ; Verklaring van het Belgisch episcopaat over Humanae vitae », dans DM, 11,1968, p. 322-347 ; PH. Delhaye, « Humanae vitae en het concilie betreffende het huwelijk », dans Ibid., p. 496-500. Plusieurs autres articles sur les problèmes conjugaux parurent pendant et après le Concile.
50 Cette image se dégage dans les revues du clergé Collectanea Mechliniensia, Collationes Brugenses et Gandavenses, Pastor Bonus et Sacerdos. Nous avons traité le sujet dans un exposé sur Priesterbeeld en priestervorming in het licht van Vaticanum II, lors du colloque « Vaticanum II en zijn erfenis » à Leuven en avril 1995. À paraître dans les actes du colloque.
51 W. Dirks, « Clerus en leken in Duitsland », dans DM, 9,1966, p. 635-638 ; I. Illich, « De geestelijke die verdwijnt », dans DM, 10, 1967, p. 484 ; voir aussi Ch. Duquoc, « Réforme cléricale », dans G. Alberigo et J.-P. Jossua éd., La réception de Vatican II, Paris, 1985.
52 J. Grootaers, « Een brandende kwestie... het celibaat », dans DM, 8, 1965, p. 475-478 ; « De verplichting tot celibaat voor de priesters ? », dans DM, 10, 1968, p. 121.
53 Exodus. Van een binnenkerkelijk naar een reëel maatschappelijk engagement, janvier 1969.
54 J. Snyders, « Na Chut : contestatie binnen de Kerk », dans DM, 12, 1969, p. 423-425 ; J. Grootaers, « Een tijd van spreken », dans Ibid., p 83-91 ; L. Gevers et L. Vos, Kerk vormen in Leuven..., p. 68-71.
55 K. Dobbelaere, Het ’Volks Gods’ de mist in ? Over de Kerk in België, Leuven, 1988, p. 152- 153.
56 J. Billiet et K. Dobbelaere, Godsdienst in Vlaanderen. Van Kerks katholicisme naar sociaal-culturele christenheid, Leuven, 1976.
57 L. Gevers, Honderd jaar katholieke studerende jeugd. De geschiedenis van de Hasseltse Jonge Klauwaarts, Leuven-Hasselt, 1986.
58 K. Dobbelaere et J. Billiet, « Groepsvorming in en rond de Kerk in Vlaanderen », dans Collationes, 1976, p. 329-362.
59 P. Leemans, Kerk en toekomst, dans DM, 12,1969, p. 46-59 ; A. Morawska, « Onzekerheden en vooruitzichten in de huidige religieuze ontwikkeling », dans Ibid., p. 237-243 ; E. Schillebeeckx, « De huidige kerkelijke problematiek », dans Ibid., p. 426-436 ; H. Servotte, « Waar ligt de toekomst voor de Kerk ? », dans DM, 13, 1970, p. 265-270.
60 « Lessen uit Leuven », dans DM, 11, 1968, p. 67-73.
61 « Verklaring van het Belgisch episcopaat over Humanae Vitae », dans Ibid., p. 333-336.
62 « Gewikt en gewogen », dans DM, 12, 1969, p. 391 ; « In gesprek met negen auteurs », dans Ibid., p. 401-422. L’interview du cardinal fut d’autre part l’occasion saisie par la tendance conservatrice dans l’Église de Flandre pour le combattre : voir par ex. la brochure du R.P. G. De Becker, Requiem voor een Kardinaal en een Theoloog. Het dossier Suenens en Schillebeeckx, Tremelo, 1970, 95 p.
63 Collectanea Mechliniensia, 1967, p. 483 et sv., Collationes Brugenses et Gandavenses, 1968, p. 370 et sv.
64 De Theologische Faculteit 1919-1969, Leuven, 1970 ; M. Lamberigts, L. Gevers et B. Pattyn, Hoger Instituut voor Godsdienstwetenschappen. Faculteit der Godgeleerdheid K.U. Leuven 1942- 1992. Rondorn catechese en godsdienstonderricht, Leuven, 1992. Un volume sur la Faculté, pour la période 1969-1995, va paraître bientôt sous la direction de L. Gevers et L. Kenis.
65 Collectanea Mechliniensia, 1965-1970 ; Collationes Brugenses et Gandavenses, 1965-1970.
66 Collationes, 1971, p. 127-128.
67 L. Gevers et L. Vos, Kerk vormen in Leuven..., p. 58-61.
68 Collationes, 1971, p. 234 et sv.
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