Cours de religion ou de morale non confessionnelle : les limites de l’alternative constitutionnelle et les pistes pour en sortir
p. 123-150
Texte intégral
1Lors d’une audition au Parlement de la Communauté française, le 12 mars 2013, trois constitutionnalistes ont eu l’occasion de faire le point sur les questions juridiques suscitées par l’éventuelle introduction, dans le programme du troisième degré de l’enseignement secondaire, soit d’un cours de philosophie et d’histoire culturelle des religions, soit d’une formation au questionnement philosophique, au dialogue interconvictionnel et à la citoyenneté active230. Ils concluaient tous les trois que telle qu'elle était interprétée à l'époque, c'est-à-dire sans dispense possible, l'obligation prévue par la législation décrétale en vigueur en Communauté française de choisir soit un des cours de religion, soit le cours de morale non confessionnelle entrait en contradiction avec le droit international des droits de l’homme lu à la lumière de la jurisprudence des organes préposés au contrôle de la bonne application de ce droit. En effet, dès 2010, l’assemblée générale du Conseil d’État avait dû constater que ledit cours de morale est en partie de iure et en tout cas de facto le plus souvent un cours enraciné dans des présupposés anti-religieux. Deux des constitutionnalistes en déduisaient que les parents qui ne se reconnaissent ni dans une des religions enseignées ni dans la morale inspirée par l'esprit du libre examen ne pouvaient que se sentir atteints dans leur droit fondamental au respect de leurs convictions religieuses et philosophiques, de sorte qu'un système de dispense sur simple demande non motivée231 devait être ménagé.
2Cette conclusion a manifestement encouragé les parents d'une élève d'un établissement de la Ville de Bruxelles à introduire un recours au Conseil d'État contre le refus d'une telle dispense. Le Conseil d'État a alors posé une question préjudicielle à la Cour constitutionnelle sur la conformité de la législation invoquée pour justifier ce refus à l'article 24 de la Constitution232. Hasard du calendrier, deux ans jour pour jour après les auditions parlementaires de 2013, le 12 mars 2015, la haute juridiction constitutionnelle a rendu un arrêt n° 34/2015 qui confirme le point de vue majoritaire qui y était exprimé. Elle a en effet répondu à la question préjudicielle comme suit : « Interprétés comme n'impliquant pas le droit pour un parent d'obtenir sur simple demande, non autrement motivée, une dispense pour son enfant de suivre l'enseignement d'une des religions reconnues ou celui de la morale non confessionnelle, l'article 8 de la loi du 29 mai 1959 modifiant certaines dispositions de la législation de l'enseignement et l'article 5 du décret de la Communauté française du 31 mars 1994 définissant la neutralité de l'enseignement de la Communauté violent l'article 24 de la Constitution, combiné avec l'article 19 de la Constitution et avec l'article 2 du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme ».
3Il serait toutefois erroné de s'en tenir à ce dispositif de l'arrêt. Une analyse de ses motifs doit être faite. Ils recèlent des éléments nouveaux par rapport à ceux que nous avions soulignés lors de notre audition au Parlement de la Communauté française. Aussi, nous allons d'abord brièvement relever ces éléments nouveaux et renvoyer pour le surplus au texte de cette audition que le lecteur trouvera annexé à la présente contribution. Au-delà du vice de constitutionalité exposé dans l'arrêt, on rappellera seulement en quelques mots les autres critiques juridiques qu'il convient d'adresser au dispositif constitutionnel actuel qui régit les cours de religion et de morale non confessionnelle dans l’enseignement officiel233 (1). Sur un plan différent, on avancera ensuite deux critiques que l’on croit justifiées en opportunité (2). Enfin, trois solutions possibles qui permettraient d’introduire un cours de formation au questionnement philosophique, au dialogue interconvictionnel et à la citoyenneté active seront présentées pour terminer (3).
1. Les principales critiques juridiques auxquelles s’expose le régime actuel des cours de religion et de morale confessionnelle
4Le régime actuel s’expose à non moins de cinq critiques sous l’angle juridique.
51) On vient de constater la première en rapportant le dispositif de l'arrêt n° 34/2015 de la Cour constitutionnelle : l'obligation de choisir entre les deux types de cours dits « philosophiques » sans dispense possible sur simple demande non motivée est inconstitutionnelle. Mais cela signifie-t-il que ces cours deviennent en droit purement et simplement facultatifs, comme plusieurs commentaires parus dans la presse l'ont prétendu au lendemain de l'arrêt ? Dans le texte de notre audition, nous estimions qu'ils restaient en principe obligatoires parce qu’ils étaient considérés comme essentiels à une éducation de qualité par le pouvoir constituant qui est à la source de l’article 24 de notre Constitution234. Mais toute demande de dispense introduite par un parent dont les convictions religieuses et philosophiques ne sont rencontrées dans aucun des cours de religion ni dans le cours de morale non confessionnelle devait être satisfaite en vertu des instruments internationaux qui lient la Belgique et avec lesquels la Constitution devait impérativement être conciliée235.
6Les motifs de l'arrêt n° 34/2015 nuancent cette analyse en ce qui concerne la source de l'obligation. Alors qu'une lecture loyale du texte236 et des travaux préparatoires de l'article 24 de la Constitution, très largement répandue jusqu'il y a peu237, pouvait nous donner à penser que l'obligation pour les parents de choisir un des cours dits « philosophiques » est fondée dans la volonté du constituant lui-même, la Cour estime qu'elle ne résulte que de la volonté du législateur décrétal238. C'était sans doute pour elle une façon commode d'écarter tout conflit entre la Constitution et le droit international des droits de l'homme liant la Belgique, sans devoir recourir à la méthode de l'interprétation conciliante que nous recommandions dans notre audition.
7Dans son arrêt, la Cour ajoute un deuxième élément nouveau qui complète l'explication que l'on vient de donner du premier. Pour elle, c'est clairement de iure, en droit, que le cours de morale non confessionnelle est « un cours engagé » dont le titulaire peut « témoigner en faveur d'un système philosophique déterminé »239. Il en va ainsi non pas parce que le constituant aurait conçu initialement le cours dans cette perspective, mais parce que le législateur décrétal a épousé celle-ci dans les décrets sur la neutralité de l'enseignement officiel et que le constituant a autorisé cette « évolution »240 en mettant sur le même pied, dans l'article 181 de la Constitution tel qu'il a été révisé en 1993, les cultes et les organisations qui offrent une assistance morale selon une conception philosophique non confessionnelle. On comprend encore mieux du coup la première interprétation. Si la Cour avait jugé que le caractère obligatoire du choix était fondé dans la Constitution, tout en estimant que celle-ci permet que les cours de morale non confessionnelle soient aussi engagés que les cours de religion, elle aurait dû constater un conflit plus frontal entre la Constitution et le droit international des droits de l'homme. En revanche, dès lors que l'obligation de choisir est réputée ne pas avoir de base constitutionnelle, le législateur décrétal peut et doit maintenir une offre de choix entre les deux types de cours sans violer aucune norme supérieure pour autant qu'il aménage un système de dispense sur simple demande non motivée. Mais peut-il aller plus loin en rendant ces cours purement et simplement facultatifs ? On peut reprocher à l'arrêt n° 34/2015 de manquer de clarté à cet égard. Il appartiendra au législateur décrétal de répondre lui-même à cette question en interprétant au mieux la Constitution et l'arrêt.
8Il serait erroné d'en sous-estimer l'importance en n'y voyant qu'une nuance insignifiante. Nous ne pouvons ici que redire ce que nous avions exprimé devant la Commission de l'Éducation du Parlement de la Communauté française : entre le principe d'une obligation à satisfaire tempéré par un droit discrétionnaire à obtenir une exemption, et le principe d'une liberté absolue qui ne fait aucune distinction entre la voie à suivre en principe et la dérogation, la différence n'est pas mince. Les formulaires qui seront remis aux parents seront rédigés de façon très différente suivant que l'on opte pour la première ou la seconde interprétation. Les chances que les cours philosophiques conservent un large succès en dépendent également.
9Pour trancher en toute loyauté, il nous semble qu'il faut raisonner comme suit. Dans son arrêt du 12 mars 2015, la Cour constitutionnelle rappelle que « le choix entre l'enseignement d'une des religions reconnues et celui de la morale non confessionnelle » relève d'un « droit fondamental reconnu aux parents et aux élèves »241. Un droit fondamental comporte dans le chef des pouvoirs publics une triple obligation : ils doivent non seulement le respecter, mais aussi le protéger contre toute entrave publique ou privée et veiller à sa possible mise en œuvre effective. En toute hypothèse, le législateur décrétal ne pourrait donc pas présenter demain les cours « philosophiques » comme des enseignements aussi facultatifs qu'un cours de chinois que l'on pourrait choisir sur le temps de midi.
10Si le Constituant a laissé aux communautés « la possibilité de décréter si », dans l'enseignement officiel, le choix entre les deux types d'enseignement philosophiques « est obligatoire », comme un passage des travaux préparatoires de l'article 24 de la Constitution cité par la Cour constitutionnelle242 le dit, c'est uniquement parce qu'il savait que les communautés appréciaient différemment le caractère neutre du cours de morale non confessionnelle. En Communauté flamande, l'arrêt Sluijs du Conseil d'État243 avait jugé que ce cours n'était pas réellement neutre de sorte que cette communauté pouvait exempter certains élèves de l'obligation de suivre un cours philosophique « pour des cas précis et limités »244. À l'époque, la Communauté française considérait que ce type de cours était neutre de sorte qu'aucune dérogation ne se justifiait. Que cette dernière appréciation est devenue intenable au moins depuis 1993 n'est pas douteux. Mais qu'il faille en déduire que les cours philosophiques sont devenus purement et simplement facultatifs, il nous semble que ce serait s'écarter autant de la volonté du constituant que du dispositif de l'arrêt n° 34/2015 de la Cour constitutionnelle. Celle-ci n'a en rien rejeté – elle n'aurait d'ailleurs pas pu le faire – la position de principe du Constituant qui considère manifestement que l'éducation des jeunes citoyens postule normalement la participation à un cours dédié à l'examen des questions liées à la recherche du sens de la vie et aux questions éthiques, à partir soit d'un point de vue religieux, soit d'un point de vue laïque. On peut évidemment juger cette option très contestable, mais aussi longtemps que l'article 24 de la Constitution n'est pas révisé245, cette position de principe doit être respectée. Mais il faut tout autant permettre aux parents qui se réclament d'une religion non reconnue ou qui ne se reconnaissent ni dans une religion ni dans la morale inspirée par le libre examen d'échapper au dilemme dans lequel le principe constitutionnel les enferme. Il nous semble donc que le législateur décrétal ne pourrait pas présenter les cours philosophiques comme purement facultatifs. Il doit seulement ouvrir une faculté de dérogation « sur simple demande, non autrement motivée », comme le précise le dispositif de l'arrêt.
11Les quatre autres critiques auxquelles s'expose le régime actuel des cours de religion et de morale non confessionnelle peuvent être rappelées plus succinctement246.
122) Dès que l'on appliquera le système de dispense à la demande, conformément à la pratique d’ores et déjà prescrite en Communauté flamande, quel sort réservera-ton aux élèves qui en bénéficieront ? En l'absence de la création d'un nouveau type de cours « philosophique », ils ne recevraient aucune formation ni dans le domaine religieux ni dans le domaine de la morale. Or tous les élèves ont le droit de bénéficier d’une telle formation en vertu de l’article 24, §3, al. 2, de la Constitution dont il convient de rappeler les termes : « Tous les élèves soumis à l'obligation scolaire ont droit, à charge de la communauté, à une éducation morale ou religieuse ». On comprend bien que la Cour constitutionnelle interprète aujourd'hui la notion de « morale non confessionnelle » qui figure dans l'article 24, §1er, al. 4247, comme elle l'a fait dans son arrêt n° 34/2015. Il faut sans doute en déduire que les élèves ont le droit fondamental de bénéficier d'un cours de religion ou d'un cours de morale laïque, mais il nous semble difficile d'admettre que les élèves et les parents qui viennent de se voir reconnaître le droit tout aussi fondamental de ne vouloir ni de l'un ni de l'autre soient du coup privés du droit à une éducation morale au sens le plus large du terme. La conciliation entre les exigences du droit international et celles de notre Constitution conduit donc à une lacune que l’on ne peut pas laisser béante à peine de violer le principe de non-discrimination des articles 10, 11 et 24, §4 de la Constitution combiné avec le prescrit de l'article 24, §3, al. 2. Cette lacune n’est pas compatible non plus avec l’obligation positive que l’article 29 de la Convention relative aux droits de l’enfant impartit à notre État de veiller à ce que l’éducation vise à « inculquer à l’enfant le respect des droits de l’Homme et des libertés fondamentales » et à le « préparer […] à assumer les responsabilités de la vie dans une société libre, dans un esprit de compréhension, de paix, de tolérance, d’égalité entre les sexes et d’amitié entre tous les peuples et groupes ethniques, nationaux et religieux ».
133) Actuellement ni les cours de religion ni le cours de morale non confessionnelle ne font l’objet de socles de compétences ni de compétences terminales officiellement approuvées par un décret en bonne et due forme248. Quant aux programmes de ces cours, ils ne sont soumis à aucune approbation. Or le décret du 24 juillet 1997 définissant les missions prioritaires de l’enseignement fondamental et de l’enseignement secondaire – dit « décret-missions » – impose la rédaction de ces référentiels pour tous les cours sans exceptions. Les cours de religion sont en outre soustraits à tout contrôle direct de leur contenu. Comme l’a confirmé la Cour constitutionnelle, cette situation dérive de « la liberté constitutionnelle des cultes et de l’interdiction d’ingérence qui en résulte ». Toutefois, nous jugeons qu’il devrait être admis en vertu de l’article 24, §3, al. 1er, de la Constitution et de l’article 17 de la Convention européenne des droits de l’homme, que soit exercé un contrôle sur les programmes d’études strictement limité à la vérification du respect des principes démocratiques tels qu’énoncés notamment dans ladite Convention249.
144) Le statut des professeurs des cours de morale non confessionnelle est actuellement très ambigu. Selon la loi du pacte scolaire et le décret du 8 mars 2007 qui organise le Service général d’Inspection, les inspecteurs de ces cours ont le même statut que les inspecteurs des autres cours et le statut des professeurs est le même que celui des autres professeurs. Mais les décrets sur la neutralité du 31 mars 1994 et du 17 décembre 2003 assimilent les professeurs des cours de morale à ceux des cours de religion en ce qu’ils sont exonérés du devoir de respecter le principe de neutralité. Par ailleurs, on a rappelé plus haut que l’article 181, § 2, inséré dans la Constitution en 1993, a traité parallèlement les « organisations philosophiques non confessionnelles » et les cultes. Il a donc ouvert la voie à une mise sur pied d’égalité des professeurs de religion et de morale non confessionnelle. Comme en Communauté flamande, les professeurs de morale non confessionnelle devraient donc être nommés sur proposition du Conseil central laïque. Or tel n’est pas le cas250.
155) Quant au statut des professeurs des cours de religion, il n’est pas satisfaisant non plus en ce qui concerne les titres requis. Ceux-ci devraient attester d’une compétence théologique réelle, ce qui n’est pas le cas actuellement251.
2. Les principales critiques en opportunité auxquelles s’expose le régime actuel des cours de religion et de morale confessionnelle
16Outre les cinq critiques strictement juridiques que l'on vient de synthétiser, il nous semble difficilement contestable que le régime actuel des cours de religion et de morale s'expose à deux autres critiques qui, pour relever de l'opportunité, n'en sont pas moins fondamentales.
17Comment, tout d'abord, ne pas qualifier de réducteur le dilemme dans lequel les élèves des écoles officielles et leurs parents sont enfermés aujourd’hui ? L’obligation de choisir, sauf dispense, soit un des cours de religion, soit le cours de morale non confessionnelle prive ceux qui ont opté pour la première solution d’un cours pourtant indispensable dédié à la morale non confessionnelle et ceux qui ont préféré la seconde solution d’une initiation non moins nécessaire à la connaissance du fait religieux. Tous les élèves devraient bénéficier et même être tenus de bénéficier d’un enseignement conçu de manière « objective, critique et pluraliste » – telle est la formule de la Cour européenne des droits de l'homme, comme on le verra dans le texte de notre audition – sur les trois branches suivantes : les principales religions ; le questionnement philosophique et les grands courants philosophiques ; l’éthique du dialogue interconvictionnel et de la citoyenneté active.
18La deuxième critique concerne la situation qui prévaut dans les écoles du réseau libre confessionnel subventionné. Cette situation n’est pas plus satisfaisante. L’enseignement sur les trois branches que nous venons de distinguer n’y est pas imposé et les pratiques sur le terrain sont très diverses. Il est juridiquement évident que la Fédération Wallonie-Bruxelles ne pourrait pas imposer aux pouvoirs organisateurs de ces écoles le remplacement des cours de religion par des cours de philosophie ou d’histoire des religions à moins de violer à la fois la Constitution et nos engagements internationaux. Mais rien ne s’oppose à ce qu’elle conditionne le subventionnement de ces établissements à l’introduction de ce nouveau cours, pourvu que l’ampleur de celui-ci ne compromette pas leur droit à professer un enseignement conforme à leur projet pédagogique. On peut même considérer que l’article 29 de la Convention relative aux droits de l’enfant doit inciter à revoir le statu quo actuel252.
3. Les solutions possibles dans l’enseignement officiel
19Nous voudrions à présent examiner trois pistes pour sortir des difficultés juridiques et du dilemme réducteur dont on vient de parler.
201) Les cours de morale non confessionnelle et de religion pourraient-ils être réduits à une heure par semaine, voire à une heure par mois comme le propose Marc Uyttendaele, de manière à libérer un volume conséquent pour un cours de philosophie et d’histoire culturelle des religions ? La formule de l’heure mensuelle aurait l’avantage de doter ce nouveau cours d’un espace confortable, mais la réduction des cours prescrits par l’article 24, §1er, al. 4, de la Constitution à une portion aussi dérisoire n’est pas compatible ni avec le caractère fondamental du droit en cause ni avec l’esprit du texte constitutionnel. La section de législation du Conseil d’État l’a souligné : « En tant que telle, la réduction du nombre d'heures consacrées aux cours à option de religions reconnues ou de morale non confessionnelle ne se heurte à aucun obstacle constitutionnel. Cette réduction ne peut cependant pas avoir pour effet que ces cours soient à ce point appauvris que l'obligation prévue à l'article 24, §1er, alinéa 4, de la Constitution ne soit plus correctement respectée »253. Comme l'arrêt n° 34/2015 de la Cour constitutionnelle l'a bien montré, on ne peut pas figer l’article 24 de la Constitution en prétendant n’y voir que la stricte constitutionnalisation du vieux pacte scolaire, mais il serait déloyal d’interpréter cette disposition au rebours de ce pacte aussi longtemps que l’article 24 n’est pas révisé.
21À vrai dire, on ne voit pas bien comment le législateur décrétal pourrait descendre en dessous d'une heure par semaine tout en prétendant respecter la Constitution. Mais alors une autre objection surgit : que ferait-on des élèves dispensés à la demande des parents de l’obligation de choisir un cours de religion ou le cours de morale pendant cette heure hebdomadaire ? Les abandonner plus ou moins à eux-mêmes, comme cela semble souvent être le cas en Communauté flamande, n’est pas une option défendable.
222) Une deuxième piste a été proposée par Madame la ministre Marie-Dominique Simonet254. Il s’agirait d’abord de transformer l’actuel cours de morale non confessionnelle enraciné dans des présupposés anti-religieux en un cours de morale réellement neutre dont le suivi pourrait dès lors être imposé, sans la moindre dispense, aux élèves qui ne choisissent pas l’option d’un des cours de religion. Dans le vocabulaire de la ministre, ce cours serait qualifié de « non convictionnel ». Il resterait crédité, tout comme les cours de religion, du volume horaire légalement prescrit aujourd’hui, soit deux heures par semaine. Toutefois, un tronc commun serait ménagé aussi bien dans le cours non convictionnel que dans les différents cours de religion pour faire droit au questionnement philosophique, au dialogue interconvictionnel et à l’éducation à une citoyenneté active. Ce tronc commun serait conçu en terme d’« objectif de compétences » à atteindre, mais aucun volume horaire prédéterminé ne serait prévu. Les responsables des cours de religion ont accueilli positivement cette idée. Ils se sont déclarés disposés à l’appliquer quand bien même elle n’a pas pu être traduite dans une quelconque règle de droit. En revanche, elle a été rejetée par les responsables du cours de morale non confessionnelle.
23Cette deuxième piste est déjà bancale en raison du refus susmentionné. Mais imaginons qu’elle finisse par prospérer. Elle présente trois avantages. Elle évite d’abîmer les cours de morale et de religion qui ont leur valeur, nous allons y revenir, par une limitation drastique de leur volume horaire. Elle résoud le problème des élèves dispensés et laissés à eux-mêmes. Et enfin, elle a l’avantage d’accueillir dans un premier temps les élèves les plus viscéralement attachés à leurs convictions dans un milieu en harmonie avec celles-ci et de ne les conduire au travail de la raison et de la mise à distance que supposent le questionnement philosophique et le dialogue interconvictionnel que progressivement, sous la conduite d’un professeur en qui ils peuvent avoir confiance.
24Il reste cependant trois objections majeures. Depuis l'arrêt n° 34/2015 de la Cour constitutionnelle, ne faut-il pas considérer que les parents qui souhaitent inscrire leur enfant dans un cours de morale engagé dans l'esprit du libre examen y ont droit ? Donc un cours de morale réellement neutre dont le suivi pourrait être imposé, sans la moindre dispense, aux élèves qui ne choisissent pas l’option d’un des cours de religion ne pourrait qu'être juxtaposé à un autre de cours de morale, mais cette fois de morale laïque.
25Prétendre qu’il suffirait de revenir à l’esprit initial du pacte scolaire qui voudrait que les cours de morale non confessionnelle soient effectivement donnés de manière objective, critique et pluraliste n’est par ailleurs pas très convaincant quand on sait sur quels équilibres idéologiques et politiques ses normes ont reposé255. Oserait-on dire qu’il s'agirait là d’un vœu pieux qui méconnaîtrait la sociologie profonde de la société civile belge ? À peine ce cours non convictionnel serait institué en droit et donc imposé sans dispense possible que de nouveaux recours au Conseil d’État seraient formés dont on peut prévoir aisément l’issue.
26La troisième objection est encore plus forte : comment ne pas voir que la formule soft du tronc commun demeure très éloignée des attentes légitimes de ceux qui veulent instaurer un vrai cours dédié aux trois objets que nous avons distingués ?
273) Nous nous risquons donc à avancer une troisième piste qui nous semble plus raisonnable à tous égards. Avant de l’exposer, il convient d’en exprimer les prémisses. Il y a à notre sens de bonnes raisons, moyennant des pondérations différentes, de maintenir l’offre actuelle du cours de morale non confessionnelle et des différents cours de religion. Nous appelons aussi de nos vœux un cours de formation au questionnement philosophique, au dialogue interconvictionnel et à la citoyenneté active, mais ce dernier n’a pas vocation à se substituer aux premiers. Avec le philosophe Jean-Marc Ferry, professeur honoraire à l’Université libre de Bruxelles, il faut en effet affirmer, avec la plus grande fermeté, que la philosophie ne peut pas être assimilée à « la poursuite de la religion par d’autres moyens. Elle n’est pas le relais de la religion »256. Autrement dit, « pas plus que les sciences, elle n’est apte à répondre aux questions ultimes »257. Or, de telles questions sont incontournables et le fait est qu’elles sont rencontrées de face par les grandes traditions religieuses et par le courant humaniste laïque.
28Certes, ce n’est pas à l’école que doivent se forger les convictions ultimes et elle n’est pas non plus l’espace public spécialement dédié à leur confrontation. Mais avec la philosophe Martine Collin, il faut reconnaître que l’école est nécessairement « l’instance de socialisation intermédiaire entre la famille, les communautés de proximité et l’espace public potentiellement universel. Elle est ou elle devrait » donc « être l’endroit où se travaillent peu à peu les convictions par l’initiation aux disciplines argumentatives ». Ces convictions religieuses ou athées « ne sont, en effet, dans le champ scolaire, ni à contourner ni à confirmer mais à réfléchir pour les préparer à une confrontation à visée universalisante ». À ce travail d’autocompréhension critique, c’est tant le cours de religion ou celui de morale non confessionnelle que le cours de questionnement philosophique qui peuvent contribuer, mais chacun « selon des voies distinctes »258. Bien sûr, cette contribution ne va pas sans condition. Si la tradition religieuse verse dans le positivisme de la révélation en confondant la lettre et l’esprit et si elle ne s’ouvre pas aux Lumières de la modernité, le cours de religion correspondant sera inapte à l’exercice de cette responsabilité. Il en va de même du cours fondé sur la tradition athée si celle-ci bascule dans le positivisme du scientisme qui confond le factuel et le normatif259.
29Dira-t-on que quand les religions sont vécues comme « des ressources identitaires », la condition que l’on vient d’énoncer est forcément défaillante ? Avec Martine Collin encore, nous répliquons au contraire que c’est précisément dans ces moments que les religions « doivent être travaillées par leur noyau rationnel interne, si nous voulons tenter d’échapper aux imaginaires régressifs »260. Le cadre scolaire est particulièrement précieux pour relever ce défi. Mais, bien sûr, tout dépend alors, insistons-y, de la qualité de la formation théologique des maîtres. La question des titres requis qui n’est toujours pas correctement réglée aujourd’hui est donc cruciale.
30La piste concrète que nous proposons sur ces bases consiste à distinguer deux séquences au cours du cursus scolaire. Dès la première année primaire et jusqu’à la quatrième année du secondaire, le cours de religion ou celui de morale non confessionnelle serait proposé à raison de deux heures par semaine pendant les deux tiers de chaque année. Aux élèves qui ont choisi ce cours « convictionnel », un cours distinct de formation au questionnement philosophique, progressivement élargi au dialogue interconvictionnel et à la citoyenneté active, serait imposé tout au long de cette même séquence, dans un format de deux heures par semaine également, mais seulement pendant un tiers de l’année scolaire. En revanche, c’est pendant toute l’année qu’il serait imposé aux élèves qui auraient demandé à être dispensés du premier cours.
31Les proportions s’inverseraient dans la deuxième séquence qui correspond aux deux dernières années du cursus. Le deuxième cours de facture plus philosophique serait imposé à raison de deux heures par semaine pendant les deux tiers de chaque année aux élèves qui suivent le cours convictionnel durant le tiers restant, et pendant toute l’année aux élèves qui ne souhaitent pas s’inscrire dans un des cours convictionnels.
32Ce n’est évidemment qu’une ébauche. On devine sans peine toutes les objections en terme de praticabilité et de coût. Nous ne sommes pas sûrs cependant que ces objections seraient dirimantes si la volonté politique, c’est-à-dire le consensus transidéologique, était au rendez-vous. Le dispositif réunirait au moins tous les avantages des deux premières pistes et aucun de leurs inconvénients. Il serait injuste d’y voir pour autant un compromis insatisfaisant par définition ; il s’appuie au contraire sur des raisons positives de fond qui nous semblent très fortes. La principale objection consiste dans la continuité pédagogique qui pourrait être cassée d’une année à l’autre au gré de choix sinueux. Une bonne coordination entre les catégories de cours et un système d’inscriptions dans des sous-séquences cohérentes composées de plusieurs années paraissent cependant envisageables.
33La deuxième objection lourde porte sur l’inévitable régime transitoire par lequel il faudrait passer avant de disposer d’un cadre suffisant de professeurs de philosophie formés pour livrer ce type d’enseignement. Là aussi des solutions sont possibles, moyennant la volonté d’aboutir. Nous renvoyons encore sur ce point au texte de l’audition ci-joint261.
4. Conclusion
34Le débat sur l’introduction d’un éventuel cours de philosophie et les impasses sur lesquelles il conduit depuis longtemps constituent malheureusement un bel exemple de blocage politique induit par une société encore très « pilarisée ». On a parfois cru que l’autonomie des Communautés allait nous délivrer de ce mal typiquement belge262. L’expérience démontre qu’il n’en est rien. Les juristes, depuis les études pionnières et décisives de Xavier Delgrange263, ont pourtant fait leur part de travail pour lever des obstacles que l’on a longtemps cru insurmontables. Le 12 mars 2013, avec, pensions-nous, tous les membres de la Commission de l’Éducation du Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles qui avaient pu constater nos convergences, Marc Uyttendaele et moi-même avions cru que la voie du déblocage était ouverte. Mais le soufflé est vite retombé. Les textes de nos rapports n’ont même pas été publiés dans les documents parlementaires264 !
35Il est évident que si certains acteurs du « monde de la laïcité » veulent saisir l’occasion de cette innovation souhaitable pour tuer les cours de religion, rien ne se fera. Il est aussi manifeste que si certains acteurs du « monde catholique » veulent brandir la menace d’une nouvelle guerre scolaire ou avancer divers prétextes pédagogiques si l’on ose remettre en question le volume horaire actuellement dédié aux cours de religion et de morale, le blocage persistera. Quant aux syndicats, ils disposent aussi de toutes les armes pour nous installer dans l’immobilisme s’ils préfèrent la tentation de la facilité à la construction de l’intérêt général.
36Une nouvelle législature 2014-2019 s’est ouverte. Elle autorise encore l’optimisme de la volonté. Au cours des prochaines années, puissent des personnalités fortes dans les différents « camps » et « sous-camps » en présence se lever et crier à haute et intelligible voix, avec l’appui des médias : allons de l’avant ; prenons chacun des risques mesurés ; personne n’a le droit d’étouffer l’espoir d’un vrai progrès pour la citoyenneté.
Annexe
Annexe
Consultation du Professeur Hugues Dumont sur les questions juridiques suscitées par l’éventuelle introduction d’un cours de philosophie et d’histoire culturelle des religions ou d’une formation au questionnement philosophique, au dialogue interconvictionnel et à la citoyenneté active dans le programme du troisième degré de l’enseignement secondaire
Audition au Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles du mardi 12 mars 2013
Les questions juridiques suscitées par l’éventuelle introduction d’un cours de philosophie et d’histoire culturelle des religions ou d’une formation au questionnement philosophique, au dialogue interconvictionnel et à la citoyenneté active dans le programme du troisième degré de l’enseignement secondaire sont nombreuses. J’en retiens six :
- Faut-il raisonner à partir du présupposé que les cours, dans l’enseignement organisé par les pouvoirs publics, portant soit sur une des religions reconnues, soit sur la morale non confessionnelle, sont obligatoires dans le chef des élèves en vertu de l’article 24 de la Constitution, ou pourrait-on admettre que le législateur décrétal rende, le cas échéant, ces cours facultatifs pour eux ?
- Une éventuelle réduction du nombre d’heures consacrées à ces cours serait-elle compatible avec cette même disposition constitutionnelle ?
- Compte tenu des articles 19 à 21 et 24 de la Constitution, la Communauté française peut-elle intervenir dans le contenu de ces cours et exercer un contrôle sur leur qualité ?
- Si l’on crée, à côté de ces cours, un cours de philosophie et d’histoire culturelle des religions, les professeurs chargés des premiers pourraient-ils dispenser le second, compte tenu de leur formation et de leur statut, et les parents pourraient-ils solliciter une exemption pour soustraire leur enfant à l’obligation qui serait imposée à tous les élèves de suivre ce cours de philosophie et d’histoire culturelle des religions, au nom de leur droit à voir respectées leurs conceptions philosophiques, idéologiques ou religieuses ?
- Pourrait-on scinder chaque cours de religion et chaque cours de morale non confessionnelle en deux parties, l’une se limitant strictement à son objet premier (l’enseignement de telle religion ou de la morale non confessionnelle) et destinée aux seuls élèves qui s’y inscrivent librement, et l’autre consistant en une partie commune dispensée sous l’autorité du même professeur, mais destinée à tous les élèves et portant soit sur les « principes et éléments fondateurs » de chaque religion reconnue et de la morale non confessionnelle, soit sur le questionnement philosophique, le dialogue interconvictionnel et l’éducation à une citoyenneté active, conformément à des référentiels (socles de compétences et compétences terminales) identiques (ou au moins analogues) dans les trois réseaux ?
- Dans l’hypothèse où l’on suivrait la suggestion évoquée supra au 4° ou au 5°, chaque pouvoir organisateur de l’enseignement libre pourrait-il être contraint par la Communauté française de remplacer tout ou partie du cours de religion correspondant à son caractère par un cours conforme aux référentiels qui seraient ceux de l’enseignement officiel en ce qui concerne la philosophie et l’histoire culturelle des religions ou le questionnement philosophique, le dialogue interconvictionnel et l’éducation à une citoyenneté active ?
1° Faut-il raisonner à partir du présupposé que les cours, dans l’enseignement organisé par les pouvoirs publics, portant soit sur une des religions reconnues, soit sur la morale non confessionnelle, sont obligatoires dans le chef des élèves en vertu de l’article 24 de la Constitution, ou pourrait-on admettre que le législateur décrétal rende, le cas échéant, ces cours facultatifs pour eux ?
L’article 24, §1er, alinéa 4 de la Constitution dispose que « les écoles organisées par les pouvoirs publics offrent, jusqu’à la fin de l’obligation scolaire, le choix entre l’enseignement d’une des religions reconnues et celui de la morale non confessionnelle ». En son §3, alinéa 2, le même article garantit « à tous les élèves soumis à l’obligation scolaire » le droit à « une éducation morale ou religieuse ».
Lors de la révision constitutionnelle de 1988 dont ces textes sont issus, le caractère obligatoire du cours philosophique fut largement débattu265. Selon la note explicative, l’article 24, § 1er, alinéa 4, de la Constitution « laisse à une Communauté la possibilité de décréter si, dans l’enseignement organisé par le pouvoir public, ce choix est obligatoire »266. En commission sénatoriale, le secrétaire d’État à l’Éducation nationale (N) a reconnu que « le membre de phrase "les écoles organisées par les pouvoirs publics garantissent le choix entre l’enseignement d’une des religions reconnues et de la morale non confessionnelle" ne dit effectivement rien sur le caractère obligatoire de ces cours ». Mais il a ajouté ceci : « Il est précisé dans le commentaire qu’il entrera dans les compétences de la Communauté de dire si ces cours sont ou non obligatoires. Dans la pratique, il s’agira surtout de fixer les modalités selon lesquelles le choix sera rendu obligatoire. L’arrêt "Sluijs" du Conseil d’État en constitue le fondement »267. On se souvient que cet arrêt du 14 mai 1985 avait dit pour droit qu’un élève devait être dispensé de l’obligation de choisir entre un cours de religion et celui de la morale non confessionnelle dès lors que, ne souhaitant pas suivre un des premiers, ses parents pouvaient considérer que le second n’était pas réellement neutre. Le Conseil d’État avait jugé en effet que le dit cours visait « à défendre un système philosophique spécifique », à savoir la libre pensée268. Finalement, à la Chambre, il y eut un consensus pour considérer qu’il serait « inconcevable que les cours de morale et religion deviennent facultatifs. Il doit y avoir une obligation de suivre les cours sauf dérogation individuelle et motivée »269. Cette option fut explicitée par le ministre de l’Éducation nationale (F) comme suit : « cette disposition ne peut […] empêcher demain une Communauté d’exempter certains élèves de l’obligation de suivre un cours philosophique, mais uniquement pour des cas précis et limités (par exemple pour les enfants de parents adhérant à une religion non reconnue ou dont l’enseignement n’est pas organisé) »270.
À la différence de la Communauté flamande qui a reconnu le caractère engagé du cours de morale non confessionnelle271 et a tenu rigoureusement compte de la volonté du pouvoir constituant en instituant par conséquent un mécanisme de dispense272, la Communauté française a maintenu, pour sa part, l’obligation de choisir entre un des cours de religion et le cours de la morale non confessionnelle sans dérogation possible. Elle a confirmé cette obligation dans les deux décrets organisant la neutralité de l’enseignement officiel273.
La norme constitutionnelle n’est pas la seule à prendre en compte pour évaluer cette situation. Il faut aussi intégrer dans le raisonnement juridique l’article 2 du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme qui consacre le droit des parents au respect de leurs convictions religieuses et philosophiques274 et l’article 18, §4, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui proclame la liberté des parents « de faire assurer l’éducation religieuse et morale de leurs enfants conformément à leurs propres convictions »275. Que l’on se tourne vers la jurisprudence de la Cour européenne des droits qui interprète la première disposition276 ou vers celle du Comité des droits de l’homme des Nations Unies qui interprète la seconde277, les conclusions ne laissent pas de place au doute en ce qui concerne les principes.
Primo, l’article 2 du premier protocole, « vaut pour chacune des fonctions de l’État dans le domaine de l’instruction et de l’enseignement ». Il « ne permet pas de distinguer entre l’instruction religieuse et les autres disciplines. C’est dans l’ensemble du programme de l’enseignement public qu’il prescrit à l’État de respecter les convictions, tant religieuses que philosophiques des parents »278. Comme l’a souligné Xavier Delgrange dans son commentaire de ces jurisprudences, « cette responsabilité ne porte pas seulement sur l’élaboration des programmes, mais également sur la façon dont ils sont enseignés dans les classes »279.
Secundo, si les pouvoirs publics décident de créer un cours sur les convictions religieuses et philosophiques, ils doivent veiller « à ce que les informations et connaissances figurant au programme de ce cours soient diffusées de manière objective, critique et pluraliste pour satisfaire aux exigences de l’article 2 du protocole n° 1 »280.
Tertio, si ces exigences ne sont pas satisfaites, autrement dit si « l’éducation publique » inclut « l’enseignement d’une religion ou d’une conviction particulière », il faut impérativement prévoir « des exemptions ou des possibilités de choix non discriminatoires correspondant aux vœux des parents et des tuteurs »281.
Quarto, le mécanisme de dispense qui doit être prévu ne peut pas « soumettre les parents concernés à une lourde charge » ni « au risque que leur vie privée soit indûment exposée »282.
Nous disposons ainsi de tous les principes de hard law, d'un côté ceux qui dérivent de notre Constitution, de l'autre côté, ceux qui proviennent du droit international des droits de l'homme. Quand on interprète une norme constitutionnelle et que l'on a le choix entre une interprétation qui la rend conforme au droit international et une autre qui la rend contraire à ce droit, il faut impérativement choisir la première pour honorer nos engagements internationaux.
À la lumière de ces principes et de cette directive d'interprétation, notre question est maintenant bien circonscrite : eu égard à la législation en vigueur, au programme et à la pratique, est-ce que le cours de morale non confessionnelle dans la Fédération Wallonie-Bruxelles est donné de manière neutre ou de manière engagée ? Si l’on peut considérer qu’il est dispensé de manière neutre, on peut contraindre un élève à le choisir, faute d’avoir opté pour un des cours de religion qui sont eux, par hypothèse, engagés. S’il faut reconnaître au contraire qu’il est donné d’une manière engagée, on doit soit le rendre facultatif, avec alors une difficulté, compte tenu de la volonté contraire du pouvoir constituant, soit instituer un mécanisme dérogatoire, avec une autre difficulté consistant à concilier ce mécanisme avec le respect du droit des parents et des élèves de ne pas révéler leurs pensées ou leur adhésion à une religion ou à une conviction283.
Tous les indices convergent pour considérer que le cours de morale non confessionnelle n’est pas neutre. Aussi bien l’évolution des normes de référence, depuis les résolutions adoptées par la Commission permanente du Pacte scolaire le 8 mai 1963 jusqu’aux deux décrets définissant la neutralité de l’enseignement officiel284, que les commentaires autorisés des programmes qui renvoient « au libre examen qui a présidé à la naissance de l’Université libre de Bruxelles »285 démontrent que le cours de morale non confessionnelle, tout comme celui d’une des religions reconnues, peut être donné – je cite l’assemblée générale du Conseil d’État elle-même – « d’une manière non pas neutre mais engagée »286.
Nous n’échappons donc pas à l’alternative287 : soit rendre le cours entièrement facultatif288 malgré la volonté contraire du pouvoir constituant, soit instituer un mécanisme dérogatoire malgré la difficulté de concilier ce mécanisme avec le respect du droit des parents et des élèves de taire leurs appartenances convictionnelles.
La première branche de l'alternative doit être écartée. S'il est vrai qu'une interprétation étroitement littérale du texte constitutionnel ne contraint que les écoles (organisées par les pouvoirs publics) à offrir le choix entre le cours de morale non confessionnelle et un des cours de religion, et non les élèves à faire ce choix, le § 3 de l'article 24 associe tant le droit à une éducation morale ou religieuse que le droit à un enseignement à l'obligation scolaire. À cet argument de texte, s'ajoute surtout la volonté du constituant qui est assez claire comme on l'a montré plus haut.
C'est donc la deuxième branche de l’alternative qui nous conduit à la meilleure solution juridique, celle qui optimise le respect à la fois de la Constitution et du droit international. Cette solution postule une modification de la législation en vigueur en Communauté française : sur simple demande, sans avoir à fournir la moindre justification, le parent ou l’élève qui sollicite la dispense doit l’obtenir, le pouvoir organisateur ne pouvant exercer aucun pouvoir d’appréciation289. C’est en effet la seule manière de respecter le droit fondamental de ne pas révéler ses préférences philosophiques et religieuses.
Cette solution ressemble, mais n'est pas tout à fait identique à la première branche de l'alternative : rendre le cours de religion ou de morale non confessionnelle purement et simplement facultatif. En effet, on ne peut pas nier la différence, même si elle n'est que procédurale et symbolique, entre un principe d'obligation tempéré par un droit discrétionnaire à obtenir une exemption, et un principe de liberté absolue qui ne fait aucune distinction entre la voie à suivre en principe et la dérogation. Le constituant belge a décidé qu'en principe l'éducation des jeunes citoyens postule la participation à un cours dédié à l'examen des questions liées à la recherche du sens de la vie et aux questions éthiques, à partir soit d'un point de vue religieux, soit d'un point de vue laïque. Cette position de principe doit être respectée. Mais il faut tout autant permettre aux parents qui se réclament d'une religion non reconnue ou qui ne se reconnaissent ni dans une religion ni dans la morale inspirée par le libre examen d'échapper au dilemme dans lequel le principe constitutionnel les enferme.
Obsédé par la logique du vieux pacte scolaire, le constituant n'a pas pris toute la mesure de cette impérieuse voie dérogatoire pourtant initiée par la jurisprudence de l'arrêt Sluijs qu'il connaissait. Il n'a pas anticipé le succès possible de cette voie dérogatoire, un succès qui me semble prévisible compte tenu de l'évolution spirituelle de bon nombre de nos concitoyens, et il a cru à tort pouvoir la cantonner dans la marginalité en la subordonnant à une motivation individuelle que le droit international des droits de l'homme réprouve aujourd'hui, à juste titre. Par conséquent, il n'a pas anticipé non plus le problème du vide pédagogique sur lequel l’exercice de ce droit d'exemption débouche. Que sa demande de dispense soit sérieuse ou de pure convenance, l’élève ne bénéficie plus de la moindre formation dans le domaine pourtant essentiel de la morale et des convictions religieuses.
Or, nous ne pouvons pas ignorer un autre principe, un principe de soft law cette fois. Qui dit soft law dit norme non juridiquement contraignante, mais susceptible d'orienter l'interprétation des règles de droit contraignant. Il s'agit en l'occurrence de deux recommandations de l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. La recommandation n° 1396 du 27 janvier 1999 énonce que : « L'éducation est un élément clé pour combattre l'ignorance et les stéréotypes. Il est urgent que les cursus scolaires et universitaires soient révisés afin de promouvoir une meilleure connaissance des différentes religions, et que l'éducation religieuse ne se fasse pas au détriment de l'enseignement des religions en tant que partie intégrante de l'histoire, de la culture et de la philosophie de l'humanité ». Et dans une recommandation n° 1720, la même assemblée ajoutait le 4 octobre 2005 : « En enseignant aux enfants l'histoire et la philosophie des principales religions avec mesure et objectivité, dans le respect des valeurs de la Convention européenne des droits de l'homme », l'école « luttera efficacement contre le fanatisme »290. L’Assemblée a donc recommandé au Comité des ministres d’encourager les gouvernements des États membres du Conseil de l’Europe « à veiller à l’enseignement du fait religieux aux niveaux primaire et secondaire de l’éducation nationale ». L’objectif de cet enseignement « doit consister à faire découvrir aux élèves les religions qui se pratiquent dans leur pays et celles de leurs voisins, à leur faire voir que chacun a le même droit de croire que sa religion "est la vraie" et que le fait que d’autres ont une religion différente, ou n’ont pas de religion, ne les rend pas différents en tant qu’êtres humains ; il devrait inclure l’histoire des principales religions, ainsi que l’option de ne pas avoir de religion, en toute neutralité ; […] Il ne s’agit pas de transmettre une foi, mais de faire comprendre aux jeunes pourquoi des millions de gens puisent à ces sources »291.
Il me semble donc que nous devons aborder les questions qui vont suivre avec cette recommandation à l'esprit. L'exercice du droit d'exemption qu'il faudra ménager ne devrait pas conduire à un vide pédagogique injustifiable. Par ailleurs, on peut penser que cette recommandation fonde en outre une critique de lege ferenda à l'égard de la législation en vigueur. En effet, il est malheureux que celle-ci prive les élèves qui ont opté pour le cours dédié à la morale non confessionnelle d'une initiation à la connaissance du fait religieux. Et j'ajoute qu'il est tout aussi malheureux que les élèves qui ont opté pour un cours de religion soient du coup privés d'une initiation à la morale non confessionnelle292.
2° Une éventuelle réduction du nombre d’heures consacrées aux cours portant soit sur une des religions reconnues, soit sur la morale non confessionnelle serait-elle compatible avec l'article 24 de la Constitution ?
Comme on le sait, selon l'article 8 de la loi du 29 mai 1959 dite du Pacte scolaire, « dans les établissements officiels d'enseignement primaire et secondaire de plein exercice, l'horaire hebdomadaire comprend au moins deux heures de religion et deux heures de morale ». Envisagée en doctrine par Xavier Delgrange dès 2001293, la réponse positive à la question d'une possible réduction de ce volume horaire ne fait plus de doute aujourd'hui. La section de législation du Conseil d'État l'a confirmé : « En tant que telle, la réduction du nombre d'heures consacrées aux cours à option de religions reconnues ou de morale non confessionnelle ne se heurte à aucun obstacle constitutionnel. Cette réduction ne peut cependant pas avoir pour effet que ces cours soient à ce point appauvris que l'obligation prévue à l'article 24, §1er, alinéa 4, de la Constitution ne soit plus correctement respectée »294. En vertu de l'article 24, §5, de la Constitution, c'est au législateur décrétal lui-même qu'il appartient de fixer le volume horaire minimal295. On ne voit pas bien comment il pourrait descendre en dessous d'une heure par semaine.
Le vide pédagogique dénoncé plus haut pourrait donc être comblé par l'heure qui serait rendue disponible suite à cette possible réduction. Il est même permis de penser qu’en dédiant cette heure à un cours répondant à la recommandation du Conseil de l’Europe on respecterait beaucoup mieux l’esprit de l’article 24 de la Constitution combiné avec le droit international des droits de l’homme qu’en laissant le vide béant.
3° Compte tenu des articles 19 à 21 et 24 de la Constitution, la Communauté française peut-elle intervenir dans le contenu des cours de religion et de morale non confessionnelle et exercer un contrôle sur leur qualité ?
a) L'enseignement de la religion échappe aujourd'hui au contrôle des autorités publiques. La loi du pacte scolaire précise que les cours sont donnés par les ministres du culte ou leurs délégués. En pratique, les professeurs de religion sont nommés par le gouvernement ou le pouvoir organisateur sur proposition des chefs de culte. Les délégués de ceux-ci sont également chargés du contrôle des cours via l’inspection296.
Malgré les termes généraux du décret « Missions » qui est censé s’appliquer à l’ensemble de l’enseignement fondamental et secondaire, en ce compris les cours dits philosophiques, les cours de religion ne font pas l’objet de socles de compétences ni de compétences terminales. Comme l’a confirmé la Cour constitutionnelle, cette absence de contrôle direct sur le contenu des cours de religion et sur leur qualité dérive de « la liberté constitutionnelle des cultes et de l’interdiction d’ingérence qui en résulte »297. Toutefois, nous jugeons qu’il devrait être admis en vertu de l’article 24, §3, al. 1er, de la Constitution et de l’article 17 de la Convention européenne des droits de l’homme, que soit exercé un contrôle sur les programmes d’études strictement limité à la vérification du respect des principes démocratiques tels qu’énoncés notamment dans ladite Convention298.
b) Les professeurs de morale sont prioritairement engagés parmi les titulaires d'un diplôme non confessionnel299. Mais aucune instance autre que le pouvoir organisateur n'intervient dans leur nomination. Ils se voient donc appliquer le même statut que les autres enseignants. Le cours de morale est soumis à « une inspection chargée de l’évaluation et du contrôle du niveau des études en référence aux objectifs pédagogiques, et de l’évaluation du respect des programmes d’études »300. Mais, curieusement, il ne fait pas l’objet de socles de compétences ni de compétences terminales, et les programmes de cours ne sont soumis à aucune approbation, tout comme les cours de religion. À juste titre, la section de législation du Conseil d’État s’est émue de cette incohérence, mais son appel à adopter pareils référentiels n’a pas été entendu jusqu’à présent301. Compte tenu de la mise sur pied d’égalité par l’article 181 de la Constitution révisée le 5 mai 1993 des ministres des cultes et des délégués du Conseil central laïque, il me semblerait logique que les référentiels du cours de morale non confessionnelle soient déterminés par les délégués de ce Conseil et que les inspecteurs chargés de contrôler cet enseignement soient nommés, comme en Communauté flamande302, par le gouvernement sur la proposition du même Conseil.
4° Si l’on crée, à côté des cours optionnels de religion et de morale non confessionnelle, un cours distinct et obligatoire de philosophie et d’histoire culturelle des religions303, les professeurs chargés des premiers pourraient-ils dispenser le second, compte tenu de leur formation et de leur statut, et les parents pourraient-ils solliciter une exemption pour soustraire leur enfant à l’obligation qui serait imposée à tous les élèves de suivre ce cours de philosophie et d’histoire culturelle des religions, au nom de leur droit à voir respectées leurs conceptions philosophiques, idéologiques ou religieuses ?
Les deux décrets précités sur la neutralité soustraient les titulaires des cours de religion et de morale à l'exigence de la neutralité. Il leur est seulement interdit de « dénigrer les positions exprimées dans les cours parallèles »304.
La section de législation du Conseil d'État a douté de l'aptitude des titulaires de cours de religion de recevoir une autre charge d'enseignement qui est, elle, nécessairement soumise à l'exigence de neutralité. Comment pourraient-ils témoigner de leur foi dans leurs cours de religion sans être perçus ensuite comme inaptes à la neutralité dans un cours d'histoire ou de biologie ?305 Dans l'exposé des motifs du projet devenu le décret du 10 mars 2006 relatif aux statuts des maîtres de religion et professeurs de religion, il a été répondu que « tout enseignant de religion exerçant par ailleurs également une charge d'enseignant d'un cours non philosophique est soumis au respect des principes de neutralité dans l'exercice de chacune de ses deux fonctions »306. Curieuse réponse qui déroge tant à la lettre qu'à l'esprit des deux décrets sur la neutralité de 1994 et 2003 « puisqu'elle revient à écarter la dérogation octroyée aux cours philosophiques en matière de neutralité, lorsque le professeur n'enseigne pas exclusivement la religion ou la morale »307.
Il me semble pour ma part que l'on pourrait résoudre le problème plus correctement, d’une part, en suivant la suggestion formulée plus haut de soumettre les cours de religion à un contrôle sur les programmes d’études strictement limité à la vérification du respect des principes démocratiques tels qu’énoncés notamment dans la Convention européenne des droits de l’homme et, d’autre part, en admettant la technique du dédoublement fonctionnel : un professeur de religion peut témoigner de sa foi de manière sobre et respectueuse des convictions d’autrui dans son cours de religion qui n’est suivi que par les élèves qui souhaitent en bénéficier et se soumettre à la rigoureuse neutralité décrétale dans les autres cours qu’il peut donner par ailleurs à des élèves contraints de les suivre. Il en va d’autant plus ainsi que les deux décrets sur la neutralité combinés avec les règles régissant les titres requis pour enseigner obligent aujourd’hui tous ceux qui veulent devenir professeurs à suivre une formation à la neutralité de 20h qui porte notamment sur « les grands textes fondateurs de la démocratie et de la citoyenneté moderne »308. Cette formation s’impose aussi à ceux qui ambitionnent de donner un cours de religion ou un cours de morale.
Nous avons déjà relevé que l’article 24 de la Constitution oblige les Communautés à offrir le choix entre un cours de religion et le cours de morale non confessionnelle. Il est donc évidemment exclu en droit qu’un décret remplace ces cours dits philosophiques par un cours de philosophie et d’histoire culturelle des religions309. Mais rien n’empêcherait de mettre à profit la réduction de 2h à 1h qui serait infligée aux cours dits philosophiques pour créer un cours obligatoire de philosophie et d’histoire culturelle des religions.
Il reste à rencontrer deux questions. Tout d’abord, les professeurs de religion et de morale non confessionnelle doivent-ils être tous présumés aptes à enseigner la philosophie ? Pour bénéficier de cette présomption, ils devraient d’abord posséder les titres requis pour enseigner la philosophie. Mais si tel est le cas, eu égard à notre raisonnement ci-dessus, le seul fait qu’ils échappent à l’obligation de neutralité en tant que professeurs de religion ou de morale non confessionnelle quand ils dispensent ces cours ne devrait pas les priver du droit de postuler utilement à la fonction de professeur de philosophie et d’histoire culturelle des religions, dès lors qu’ils acceptent de se soumettre pour cet autre cours à l’obligation de neutralité dès qu’ils y sont désignés.
Deuxième question : des parents pourraient-ils s’opposer à l’obligation qui serait imposée à tous les élèves de suivre ce cours de philosophie et d’histoire culturelle des religions, au nom de leur droit à voir respectées leurs conceptions philosophiques, idéologiques ou religieuses ? La réponse négative ne fait aucun doute dès lors que le cours devrait se conformer à la jurisprudence rapportée plus haut de la Cour européenne des droits de l’homme et donc respecter rigoureusement la triade de l’objectivité, de l’esprit critique et du pluralisme. Comme l’a écrit la même Cour, moyennant ce respect, « l’on ne saurait tirer de la Convention un droit comme tel à ne pas être exposé à des convictions ou opinions contraires aux siens »310.
5° Pourrait-on scinder chaque cours de religion et chaque cours de morale non confessionnelle en deux parties, l’une se limitant strictement à son objet premier (l’enseignement de telle religion ou de la morale non confessionnelle) et destinée aux seuls élèves qui s’y inscrivent librement, et l’autre consistant en une partie commune dispensée sous l’autorité du même professeur, mais destinée à tous les élèves et portant soit sur les « principes et éléments fondateurs » de chaque religion reconnue et de la morale non confessionnelle311, soit sur le questionnement philosophique, le dialogue interconvictionnel et l’éducation à une citoyenneté active, conformément à des référentiels (socles de compétences et compétences terminales) identiques (ou au moins analogues) dans les trois réseaux312 ?
Cette hypothèse-ci ne saurait être confondue avec la précédente. Il ne s’agirait pas d’un cours distinct de philosophie et d’histoire culturelle des religions obligatoire pour tous les élèves, mais d’une partie distincte à l’intérieur soit d’un cours de religion librement choisi, soit d’un cours de morale non confessionnelle librement choisi. En réalité, cette deuxième partie du cours ne pourrait pas avoir le même statut que la première. À la différence de la première, la seconde serait soumise à l’ensemble des décrets neutralité ; autrement dit, elle devrait avoir pour objectif de fournir une information objective, critique et pluraliste ; elle devrait se conformer à des socles de compétence ou à des compétences terminales déterminées conformément au décret « Missions » ; son enseignement serait soumis à un contrôle via une inspection classique ; et elle pourrait être rendue obligatoire, sans aucune dérogation possible cette fois.
Dans son avis précité du 27 mars 2010 sur la proposition Miller, Neven et Bertieaux du 28 septembre 2009313, l’assemblée générale du Conseil d’État a admis ce schéma sous réserve que tous ses éléments essentiels figurent bien dans un décret et non dans un arrêté du gouvernement, compte tenu du principe de légalité de l’article 24, § 5, de la Constitution. Non sans une certaine réserve, elle a admis aussi « qu’en raison de la bonne connaissance par les enseignants concernés de la religion ou de la philosophie qu’ils enseignent, ils sont les mieux placés pour donner sur le sujet quelques heures de cours qui seront obligatoires pour tous les élèves »314. On peut supposer que le Conseil d’État mise ainsi sur une objectivité collective construite par une addition d’exposés faits tour à tour par chaque professeur particulier de religion et de morale non confessionnelle invité à abandonner toute forme de prosélytisme. Juridiquement, je n’ai pas d’objection, mais comment ne pas relever que la juxtaposition de cinq cours de religion et d’un cours de morale ne peut pas prétendre équivaloir à une véritable formation au questionnement philosophique ?
Le projet de Madame la ministre est différent : il s’agit bien de dédier la partie commune au questionnement philosophique, au dialogue interconvictionnel et à l’éducation à la citoyenneté active. Mais la question est alors de savoir s’il ne serait pas cohérent d’exiger des professeurs de religion et de morale non confessionnelle qui souhaiteraient enseigner dans ce tronc commun qu’ils possèdent les titres requis pour enseigner la philosophie. À terme, cela semble une exigence appropriée, mais on pourrait prévoir un régime transitoire avant d’en généraliser l’application. Ce régime serait acceptable pour autant que les référentiels soient adaptés aux enseignants provisoirement dépourvus des titres requis et qu’une inspection rigoureuse en contrôle le respect.
Pour les motifs déjà évoqués au point 4, les parents ne pourraient pas s’opposer à la participation de leur enfant à cette deuxième partie du cours au nom de leur droit à voir respectées leurs conceptions philosophiques, idéologiques ou religieuses. Mais, on l’a déjà relevé au point 1, ils sont en mesure de s’opposer à la participation de leur enfant à la première partie sur simple demande. Ces parents se trouveraient donc dans une situation un peu étrange : ils devraient opter pour un cours de religion ou un cours de morale non confessionnelle, non pas pour en suivre l’enseignement proprement dit, mais pour accéder au tronc commun à ces cours dispensé sous l’autorité d’un de leurs titulaires.
6° Dans l’hypothèse où l’on suivrait la suggestion évoquée supra au 4° ou au 5°, chaque pouvoir organisateur de l’enseignement libre pourrait-il être contraint par la Communauté française de remplacer tout ou partie du cours de religion correspondant à son caractère par un cours conforme aux référentiels qui seraient ceux de l’enseignement officiel en ce qui concerne la philosophie et l’histoire culturelle des religions ou le questionnement philosophique, le dialogue interconvictionnel et l’éducation à une citoyenneté active ?
Il est d’abord évident que la Fédération Wallonie-Bruxelles ne pourrait pas imposer aux établissements de l’enseignement libre le remplacement des cours de religion par des cours de philosophie ou d’histoire des religions à moins de violer à la fois la Constitution et nos engagements internationaux.
Mais rien ne s’oppose à ce qu’elle conditionne le subventionnement de ces établissements à l’introduction d’un cours dédié à la philosophie et à l’histoire culturelle des religions ou au questionnement philosophique, au dialogue interconvictionnel et à l’éducation civique. Il ne faut pas oublier que l’article 41 de la loi du pacte scolaire interdit aux écoles du réseau libre subventionné « toute activité et propagande politique » ni que le décret du 12 décembre 2008 « relatif à la lutte contre certaines formes de discrimination » prohibe toute discrimination directe ou indirecte fondée notamment sur la religion ou les convictions. Il s’impose aux membres du personnel des établissements d’enseignement « de tous types, tous niveaux, tous réseaux confondus »315. Il importe aussi et surtout de se souvenir que le cours de formation à la neutralité qui est centré sur l’apprentissage de la philosophie et du droit des droits de l’homme doit également être suivi par les futurs professeurs de ce réseau316.
Non seulement rien ne s’oppose à cette innovation, mais tout l’indique. En effet, l’article 29 de la Convention relative aux droits de l’enfant qui s’applique aux établissements libres comme aux établissements officiels impartit aux États signataires de veiller à ce que l’éducation vise à « inculquer à l’enfant le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales » et à « préparer l’enfant à assumer les responsabilités de la vie dans une société libre, dans un esprit de compréhension, de paix, de tolérance, d’égalité entre les sexes et d’amitié entre tous les peuples et groupes ethniques, nationaux et religieux […] »317. Or, l’État – en l’occurrence, la Communauté – « ne saurait se soustraire à sa responsabilité en déléguant ses obligations à des organismes privés ou à des particuliers »318.
La seule limite à respecter consiste dans le respect du principe de proportionnalité : si par exemple un cours dédié à la comparaison des religions peut être imposé, la part que ce cours occupe dans le total des cours de branches liées aux conceptions religieuses ou philosophiques consacrées dans le projet pédagogique du pouvoir organisateur ne peut pas être disproportionnée au point de compromettre le droit de celui-ci à professer un enseignement conforme à ce projet319.
Notes de bas de page
230 Il s'agissait de nos collègues Christian Behrendt (ULg), Marc Uyttendaele (ULB) et de l'auteur de ces lignes. Le texte de nos interventions n'a pas encore été publié dans les documents du Parlement de la Communauté française. Celui de M. Uyttendaele est publié sur le site du Centre de droit public de l’ULB. Voy. aussi sa contribution dans le présent ouvrage. Le texte de notre audition est annexé à la nôtre ici-même.
231 Pour Ch. Behrendt, une motivation individuelle pouvait être exigée.
232 C.E., arrêt n° 226.627 du 6 mars 2014, de Pascale et de Thier c. Ville de Bruxelles et Communauté française.
233 Pour une analyse plus approfondie, voy. la contribution au présent ouvrage de Xavier Delgrange.
234 Nous divergions sur ce point de l’interprétation, trop peu nuancée à notre estime, de notre collègue M. Uyttendaele.
235 Voy. l’argumentation juridique développée dans le premier point de notre consultation jointe en annexe.
236 Même si celui-ci ne parle que d'une « offre » dans l'article 24, §1er, al. 4 : « Les écoles organisées par les pouvoirs publics offrent, jusqu'à la fin de l'obligation scolaire, le choix entre l'enseignement d'une des religions reconnues et celui de la morale non confessionnelle ».
237 Voy. seulement en sens contraire la doctrine de J. Sohier et M. Uyttendaele citée dans la note 73 de la contribution au présent ouvrage de Xavier Delgrange.
238 Cf. considérant B. 4.2. de l'arrêt. Comme le montre Xavier Delgrange dans cette même contribution, cette interprétation n'est pas convaincante.
239 Cf. considérant B. 6.4. de l'arrêt.
240 Le terme apparaît expressément dans le considérant B. 6.1.
241 Cf. considérant B. 4.1.
242 Dans son considérant B. 4.2.
243 Voy. infra la référence de cet arrêt sous la note 39.
244 Voy. infra la référence aux travaux préparatoires de l'article 24 de la Constitution sous la note 41.
245 Il n'est pas révisable sous l'actuelle législature, faute d'avoir été inséré dans la dernière déclaration de révision de la Constitution. Sur cette procédure excessivement rigide, voy. nos critiques et nos propositions dans H. Dumont, M. El Berhoumi et I. Hachez, La sixième réforme de l'État : l'art de ne pas choisir ou l'art du compromis ?, Bruxelles, Larcier, 2015, n° 6-18, à paraître.
246 En renvoyant encore pour le surplus au texte ci-annexé de notre audition et à la contribution au présent ouvrage de Xavier Delgrange.
247 Le texte de cet alinéa est reproduit supra dans la note 7.
248 Lors du colloque, les responsables des cours de religion protestante et musulmane nous ont dit leur souhait de voir les socles qu’ils proposent avalisés par décret.
249 Voy. les références dans le point 3 de notre consultation et, dans le même sens, l'avis n° 48.022 rendu le 20 avril 2010 par l'assemblée générale de la section de législation du Conseil d'État tel qu'il est analysé par X. Delgrange dans sa contribution au présent ouvrage.
250 Voy. les références dans le point 3 de notre consultation.
251 Voy. à ce sujet les précisions fournies dans la contribution de X. Delgrange.
252 Voy. les précisions et les références dans le point 6 de notre consultation.
253 Voy. les références dans le point 2 de notre consultation.
254 Faute de documents officiels, nous nous appuyons sur ce que la presse en a dit, ainsi que sur des conversations avec des membres de son cabinet.
255 Cf. H. Dumont, « Le pacte scolaire : une norme para-légale exemplaire », dans Het schoolpact van 1958. Ontstaan, grondlijnen en toepassing van een Belgisch compromis – Le pacte scolaire de 1958. Origines, principes et application d’un compromis belge, sous la dir. de E. Witte, J. De Groof en J. Tyssen, Brussel-Leuven, VUBPRESS-Garant, 1999, pp. 657-667.
256 J.-M. Ferry, Les lumières de la religion. Entretien avec Élodie Maurot, Paris, Bayard, 2013, p. 200.
257 M. Collin, « De la philosophie à l’école ? Contribution au débat », dans Cahiers du CIRC (Centre interdisciplinaire de recherche en droit constitutionnel), n° 1, 2001, accessible sur le site de l’Université Saint-Louis – Bruxelles, p. 6.
258 Ibidem, p. 4.
259 Sur ces « deux positivismes antagonistes et complémentaires », cf. ibidem, p. 5.
260 Ibidem, p. 5.
261 Voy. les points 4 et 5.
262 Cf. sur ce thème notre ouvrage Le pluralisme idéologique et l’autonomie culturelle en droit public belge, Bruxelles, Publications des Facultés universitaires Saint-Louis - Bruylant, 1996, 2 vol.
263 Voy. nos nombreuses références à ses travaux dans la consultation ci-joint.
264 Cf. supra, note 1.
265 Nous nous appuyons ici sur les synthèses de X. Delgrange, « Les cours de philosophie et la Constitution. Éléments de réflexion à propos du Rapport introductif portant sur "l’introduction de davantage de philosophie dans l’enseignement, que ce soit à court ou à long terme" déposé par Mme Wynants », dans Cahiers du CIRC, n° 1, septembre 2001, § 5-7 ; Idem, « Plaidoyer pour une étude de droit comparé intrafédéral de l’enseignement. Une ébauche sur le thème des cours philosophiques à l’école », dans Tijdschrift voor Onderwijsrecht en Onderwijsbeleid, 2006-2007, pp. 329-330 ; N. Bonbled et P. Vandernoot, « Les droits des minorités », dans Les droits constitutionnels en Belgique, sous la dir. de M. Verdussen et N. Bonbled, vol. 2, Bruxelles, Bruylant, 2011, p. 1768 ; M. El Berhoumi, Le régime juridique de la liberté d’enseignement à l’épreuve des politiques scolaires, Bruxelles, Bruylant, 2012, n° 300-301.
266 Note explicative du Gouvernement, Doc. parl., S., S.E. 1988, n° 100-1/1, p. 4.
267 Rapport de la Commission de la révision de la Constitution et des réformes des institutions, Doc. parl., Sénat., S. E. 1988, n° 100-1/2, p. 80.
268 C.E., arrêt n° 25.326 du 14 mai 1985, Sluijs. Sur cette jurisprudence et les arrêts ultérieurs du Conseil d’État qui ont apprécié différemment la situation en Communauté flamande et en Communauté française, cf. N. Bonbled et P. Vandernoot, op. cit., pp. 1771-1774.
269 Rapport de la commission de révision de la Constitution, des réformes institutionnelles et du règlement des conflits, Doc. parl., Ch., S.E., 1988, n° 10/17-455/4, p. 21 (souligné par nous). Voy. également p. 36.
270 Rapport de la commission de révision de la Constitution, des réformes institutionnelles et du règlement des conflits, Doc. parl., Ch., S.E., 1988, n° 10/17-455/4, p. 55.
271 Celui-ci est contrôlé par des inspecteurs nommés sur proposition du Conseil central laïque.
272 Voy. les références dans M. El Berhoumi, op. cit., note 1379.
273 Article 5, alinéa 2, du décret du 31 mars 1994 définissant la neutralité de l’enseignement de la Communauté ; article 6, alinéa 2, du décret du 17 décembre 2003 organisant la neutralité inhérente à l'enseignement officiel subventionné et portant diverses mesures en matière d'enseignement.
274 Voy. aussi l’art. 9 de la CEDH dédié à la liberté de pensée, de conscience et de religion.
275 Voy. aussi l’art. 14 de la Convention relative aux droits de l’enfant.
276 Cf. not. Cour eur. D.H., arrêt Kjeldsen, Busk Madsen et Pedersen c. Danemark du 7 décembre 1976 ; arrêt (grande chambre) Folgero et autres c. Norvège du 29 juin 2007 et arrêt Hasan et Eylem Zengim c. Turquie du 9 octobre 2007.
277 Cf. Comité des droits de l’homme de l’ONU, Communication n° 1155/2003 du 23 novembre 2004.
278 Cour eur. D.H., arrêt Kjeldsen, Busk Madsen et Pedersen c. Danemark du 7 décembre 1976, § 51 ; arrêt (grande chambre) Folgero et autres c. Norvège du 29 juin 2007, §84 et arrêt Hasan et Eylem Zengim c. Turquie du 9 octobre 2007, §49.
279 X. Delgrange, « La neutralité de l’enseignement en Communauté française », dans Administration publique, 2007-2008/2, p. 148.
280 Cour eur. D.H., arrêt (grande chambre) Folgero et autres c. Norvège du 29 juin 2007, §102.
281 Comité des droits de l’homme de l’ONU, Observation générale n° 22 du 30 juillet 1993 relative à l’article 18 du PIDCP, rappelée dans la communication précitée.
282 Cour eur. D.H., arrêt Hasan et Eylem Zengim c. Turquie du 9 octobre 2007, § 100. Pour une analyse plus approfondie de ces jurisprudences, voy. X. Delgrange, « La neutralité de l’enseignement en Communauté française », dans Administration publique, 2007-2008/2, pp. 139-142 et N. Bonbled et P. Vandernoot, « Les droits des minorités », dans Les droits constitutionnels en Belgique, sous la dir. de M. Verdussen et N. Bonbled, vol. 2, Bruxelles, Bruylant, 2011, pp. 1769-1770.
283 Ce droit élémentaire est rappelé dans l’observation générale n° 22 précitée du Comité des droits de l’homme.
284 Cf. l’art. 5 du décret du 31 mars 1994 précité qui abandonne l’appellation « cours de morale non confessionnelle » au profit de « cours de morale inspirée par l’esprit du libre examen » et les commentaires de X. Delgrange, « La neutralité de l’enseignement en Communauté française », op. cit., p. 141.
285 M. Bastien, « Quelles sont les bases légales et les référentiels qui ont présidé à la construction du nouveau programme du cours de morale ? », cité par ibidem, p. 141.
286 Avis n° 48.023/AG rendu le 20 avril 2010 sur une proposition de décret modifiant l’article 5 du décret du 31 mars 1994 définissant la neutralité de l’enseignement de la Communauté et l’article 6 du décret du 17 décembre 2003 organisant la neutralité inhérente à l’enseignement officiel subventionné et portant diverses mesures en matière d’enseignement, Doc. PCF, 2009-2010, n° 24/2, p. 7. Voy. dans le même sens X. Delgrange, « La neutralité de l’enseignement en Communauté française », op. cit., p. 141 ; N. Bonbled et P. Vandernoot, « Les droits des minorités », dans Les droits constitutionnels en Belgique, sous la dir. de M. Verdussen et N. Bonbled, vol. 2, Bruxelles, Bruylant, 2011, p. 1774-1775 ; M. El Berhoumi, op. cit., n° 301. Contra C.E., arrêt Lallemand n° 32.637 du 24 mai 1989.
287 J’écarte l’hypothèse passablement irréaliste – et par ailleurs non souhaitable en opportunité, je vais y revenir – qui consisterait à décréter que ce cours doit devenir véritablement neutre et qu’il le deviendrait par le seul effet de ce commandement. Comp. M. El Berhoumi, op. cit., n° 301.
288 Cf. en ce sens la carte blanche signée par les 12 associations constitutives du Centre d’étude et de défense de l’école publique (CEDEP) dans Le Soir du 26 novembre 2012 sous le titre « Cours philosophiques : ce que le CEDEP demande ».
289 Telle est la règle aujourd’hui en Communauté flamande. Sur les errements de la jurisprudence de la section du contentieux administratif du Conseil d’État qui a admis pendant un certain temps qu’il soit exigé du demandeur de la dispense la démonstration que ses convictions dissidentes sont dignes de protection, voy. N. Bonbled et P. Vandernoot, op. cit., p. 1772-1774 et M. El Berhoumi, op. cit., n° 301, note 1338. Le Conseil d’État a heureusement abandonné cette jurisprudence dans son arrêt Davison, n° 35.834 du 13 novembre 1990.
290 Extraits de ces Recommandations cités par X. Delgrange, « La neutralité de l'enseignement en Communauté française », op. cit., p. 156.
291 § 14 de la Recommandation reproduite par le Conseil d’État dans son avis précité n° 48.023/AG rendu le 20 avril 2010, p. 6.
292 Cf. en ce sens H. Dumont, « Le pluralisme "à la belge" : un modèle à revoir », dans R.B.D.C., 1999/1, p. 23-31.
293 Cf. X. Delgrange, « Les cours de philosophie et la Constitution », op. cit., pp. 10-11 et Idem, « Plaidoyer pour… », op. cit., p. 334.
294 Avis n° 48.023/AG rendu le 20 avril 2010 sur une proposition de décret modifiant l’article 5 du décret du 31 mars 1994 définissant la neutralité de l’enseignement de la Communauté et l’article 6 du décret du 17 décembre 2003 organisant la neutralité inhérente à l’enseignement officiel subventionné et portant diverses mesures en matière d’enseignement, Doc. PCF, 2009-2010, n° 24/2, p. 11.
295 Voy. en ce sens le même avis, p. 13.
296 Cf. art. 9 de la loi du pacte scolaire.
297 C. C., arrêt n° 18/93 du 4 mars 1993, B. 3.5. Cf. les art. 19 à 21 de la Constitution. Voy. aussi l’avis du C.E. 27.641/2 du 11 juin 1998 présenté et commenté par X. Delgrange, « Plaidoyer pour… », op. cit., pp. 327-329.
298 Cf. H. Dumont et F. Tulkens, « Les activités liberticides et le droit public belge », dans Pas de liberté pour les ennemis de la liberté ?, sous la dir. de H. Dumont, P. Mandoux, A. Strowel et F. Tulkens, Bruxelles, Bruylant, 2000, p. 292. Voy. dans le même sens X. Delgrange, « Plaidoyer… », op. cit., p. 329 et M. El Berhoumi, op. cit., n° 302-303.
299 Cf. art. 10 de la loi du pacte scolaire.
300 M. El Berhoumi, op. cit., n° 303 avec les références.
301 Cf. ibidem, eod. loc.
302 Cf. X. Delgrange, « Plaidoyer… », p. 327.
303 Cf. not. la carte blanche précitée : « Cours philosophiques : ce que le CEDEP demande ».
304 Cf. art. 5, al. 1er du décret précité de 1994 ; art. 6, al. 1er du décret précité de 2003.
305 Cf. avis 39.507/2 évoqué par X. Delgrange, « Plaidoyer… », op. cit., p. 325.
306 Cité par ibidem, eod. loc.
307 Ibidem, p. 326.
308 Cf. art. 6 et 9 du décret de 1994 et art. 7 et 10 du décret de 2003.
309 Cf. en ce sens X. Delgrange, « Plaidoyer… », op. cit., pp. 330-331 avec la doctrine citée.
310 Cour eur. D.H., arrêt Appel-Irrgang et autres c. Allemagne du 6 octobre 2009, p. 13. Voy. auparavant l’arrêt Kjeldsen, Busk Madsen et Pedersen c. Danemark déjà cité du 7 décembre 1976, § 53.
311 Cf. la proposition de décret modifiant l’article 5 du décret du 31 mars 1994 définissant la neutralité de l’enseignement de la Communauté et l’article 6 du décret du 17 décembre 2003 organisant la neutralité inhérente à l’enseignement officiel subventionné et portant diverses mesures en matière d’enseignement déposée par MM. Richard Miller et Marcel Neven et Mme Françoise Bertieaux, Doc. PCF, 2009-2010, n° 24/1.
312 Cf. le projet de Mme la ministre Simonet évoqué par les associations constitutives du CEDEP dans la carte blanche précitée et par les représentants des chefs ou organes des différents cultes organisant un cours de religion dans La Libre Belgique, 25 juin 2012 sous le titre « Pour l’école et la société d’aujourd’hui ».
313 Avis n° 48.023/AG rendu le 20 avril 2010 sur la proposition de décret précitée, Doc. PCF, 2009-2010, n° 24/2.
314 Ibidem, p. 7.
315 Art. 3.
316 Relevons encore que les établissements libres non confessionnels peuvent adhérer à la neutralité applicable à l’enseignement de la Communauté ou à l’enseignement officiel subventionné.
317 Cf. en ce sens X. Delgrange, « La neutralité de l’enseignement en Communauté française », op. cit., pp. 146-147.
318 Cour eur. D.H., arrêt Costello-Roberts c. Royaume-Uni du 25 mars 1993, §27, cité par ibidem, p. 148.
319 Cf. l’avis du C.E. n° 48.636 du 10 février 2011 présenté dans M. El Berhoumi, op. cit., n° 551, note 2555. Voy. plus largement le rappel des principes par le même auteur, n° 136-139.
Auteur
Docteur en droit de l'Université catholique de Louvain. Professeur ordinaire à l’Université Saint-Louis – Bruxelles (USL-Bruxelles), il y enseigne le droit constitutionnel, la théorie du droit et le droit institutionnel européen. Il est actuellement président de l’Institut d’études européennes, du Centre interdisciplinaire de recherches en droit constitutionnel (CIRC) et codirecteur du Séminaire interdisciplinaire d’études juridiques (SIEJ) de son université. Il est l’auteur de nombreux travaux dans les domaines du droit public et de la théorie du droit
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