• Contenu principal
  • Menu
OpenEdition Books
  • Accueil
  • Catalogue de 15380 livres
  • Éditeurs
  • Auteurs
  • Facebook
  • X
  • Partager
    • Facebook

    • X

    • Accueil
    • Catalogue de 15380 livres
    • Éditeurs
    • Auteurs
  • Ressources numériques en sciences humaines et sociales

    • OpenEdition
  • Nos plateformes

    • OpenEdition Books
    • OpenEdition Journals
    • Hypothèses
    • Calenda
  • Bibliothèques

    • OpenEdition Freemium
  • Suivez-nous

  • Newsletter
OpenEdition Search

Redirection vers OpenEdition Search.

À quel endroit ?
  • Presses Universitaires de Bordeaux
  • ›
  • Modernités
  • ›
  • Apories, paradoxes et autocontradictions
  • ›
  • Première partie. Réversibilités
  • ›
  • Flaubert : le discours réversible et oxy...
  • Presses Universitaires de Bordeaux
  • Presses Universitaires de Bordeaux
    Presses Universitaires de Bordeaux
    Informations sur la couverture
    Table des matières
    Liens vers le livre
    Informations sur la couverture
    Table des matières
    Formats de lecture

    Plan

    Plan détaillé Texte intégral L’intemporel Extase mystique Tableaux Lyrisme Ambiguïtés Distances et stéréotypes Passion contemplative du narrateur Réversion Notes de bas de page Auteur

    Apories, paradoxes et autocontradictions

    Ce livre est recensé par

    Précédent Suivant
    Table des matières

    Flaubert : le discours réversible et oxymorique

    Jean-Pierre Moussaron

    p. 43-55

    Dédicace

    Pour Wilson Baldridge

    Texte intégral L’intemporel Extase mystique Tableaux Lyrisme Ambiguïtés Distances et stéréotypes Passion contemplative du narrateur Réversion Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1On remarquera ici, à travers une brève microlecture, comment et combien le discours flaubertien peut exceller, de temps à autre, à narrer une chose et son contraire dans le court espace d’une même séquence, en déployant l’ambivalence de son dire jusque dans le « grainé fin » de l’écriture.

    2Soit, au chapitre vi de la deuxième partie de L’Éducation sentimentale1, l’évocation du rapprochement (le seul heureux de tout le roman) de Mme Arnoux et de Frédéric Moreau : pendant un automne, celui-ci rend très fréquemment visite à celle-là, dans la maison de campagne qu’elle loue à Auteuil. Ainsi isolés du monde, les deux héros vivent platoniquement leur passion déclarée. Respectant la tripartition des amours de Frédéric, cet épisode, inséparable du décor naturel, n’est pas sans rappeler celui de Nogent avec Louise Roque, ni anticiper celui de Fontainebleau avec Rosanette Bron2. Mais tout, ici, souligne le caractère unique de la scène choisie :

    Et ils s’imaginaient une vie exclusivement amoureuse, assez féconde pour remplir les plus vastes solitudes, excédant toutes joies, défiant toutes les misères, où les heures auraient disparu dans un continuel épanchement d’eux-mêmes, et qui aurait fait quelque chose de resplendissant et d’élevé comme la palpitation des étoiles.

    Presque toujours, ils se tenaient en plein air au haut de l’escalier ; des cimes d’arbres jaunies par l’automne se mamelonnaient devant eux, inégalement jusqu’au bord du ciel pâle ; ou bien ils allaient au bout de l’avenue, dans un pavillon ayant pour tout meuble un canapé de toile grise. Des points noirs tachaient la glace ; les murailles exhalaient une odeur de moisi ; – et ils restaient là, causant d’eux-mêmes, des autres, de n’importe quoi, avec ravissement. Quelquefois, les rayons du soleil, traversant la jalousie, tendaient depuis le plafond jusque sur les dalles comme les cordes d’une lyre, des brins de poussière tourbillonnaient dans ces barres lumineuses. Elle s’amusait à les fendre, avec sa main ; – Frédéric la saisissait, doucement ; et il contemplait l’entrelacs de ses veines, les grains de sa peau, la forme de ses doigts. Chacun de ses doigts était, pour lui, plus qu’une chose, presque une personne.

    Elle lui donna ses gants, la semaine d’après son mouchoir. Elle l’appelait « Frédéric », il l’appelait « Marie », adorant ce nom-là, fait exprès, disait-il, pour être soupiré dans l’extase, et qui semblait contenir des nuages d’encens, des jonchées de roses.

    Ils arrivèrent à fixer d’avance le jour de ses visites ; et sortant comme par hasard, elle allait au-devant de lui, sur la route.

    L’intemporel

    3L’évolution de la temporalité, tout d’abord, module l’accomplissement narratif de l’accord amoureux des personnages.

    4Dans le premier paragraphe, après le « et » liminaire (« indication qu’une autre partie du tableau commence », selon la formule de Proust3), l’imparfait initial (« ils s’imaginaient »), dépourvu de tout repère de durée, situe d’emblée la rêverie des héros dans la catégorie de l’extra-temporel, en ouvrant l’unique phrase de ce paragraphe. Ce que confirme, outre le balancement symétrique des deux participes présents (« excédant » / « défiant »), l’utilisation redoublée du conditionnel passé (« auraient disparu » / « aurait fait ») qui nie toute détermination temporelle. À quoi correspond l’élargissement de l’espace vers l’infini : le mouvement centrifuge de la « vie exclusivement amoureuse » s’étend jusqu’aux confins de l’univers grâce à la comparaison finale « comme la palpitation des étoiles » ; et, dépassant l’opposition convenue entre « joies » et « misères », son excès se fonde sur l’absence de temps mesuré à l’aune humaine (« les heures »), pour atteindre une dimension cosmique. Cependant qu’apparaissent des adjectifs démultipliant la plénitude rêvée (« toutes » / « toutes ») ou refusant la finitude de la durée (« continuel »). Enfin, la longueur et le rythme de cette période, dont la succession de trois propositions scande l’amplification de la rêverie selon une vaste découpe ternaire, déploient et parachèvent cette conjonction de l’intemporel et de l’illimité en laquelle dérive l’imaginaire du couple.

    5Décrivant ensuite le comportement des personnages, le narrateur les réintroduit dans la durée romanesque. Mais d’une façon bien particulière. Car 1’« éternel imparfait » flaubertien (Proust, encore) prend alors, dans le deuxième paragraphe, sa pleine valeur d’itération : les différentes visites de Frédéric, dont le nombre et la fréquence nous demeurent inconnus, sont rapportées en une seule fois. Or, cette condensation narrative produit plusieurs effets. La durée indéterminée de ces visites est fondue dans leur répétition ; ce qui crée une sorte de temps suspendu, isolant les protagonistes du reste de l’humanité. Et cela s’accorde, en cette retraite rustique, avec leur situation spatiale (« Presque toujours, ils se tenaient au haut de l’escalier ») et l’élévation de leur regard (« cimes d’arbres [...] devant eux [...] jusqu’au bord du ciel »), aussi bien qu’avec leur choix de se réfugier « dans un pavillon », secret abri de leur « ravissement ». Dès lors, à travers l’alternative « presque toujours » / « ou bien ils allaient », la surimpression de ces rencontres selon la forme de l’« itératif » défini par Gérard. Genette4 parvient à en exprimer (à tous les sens du terme) la quintessence. Soit ainsi la qualité singulière et proprement unique de ce qui se reproduit dans le bonheur de leur réunion (scellée par les nombreuses occurrences du pronom « ils ») — bonheur lui-même unique dans le roman. Ainsi, la tentative du narrateur, ici complice de la tentation des personnages, vise à transformer l’insistance de l’écoulement du temps en une consistance immobile, et comme intériorisée par ceux-ci : « ils se tenaient » / « et ils restaient là ».

    6Enfin, sans être nettement mesurable, le temps diégétique fait retour dans les deux derniers paragraphes : une relative précision d’intervalle (« la semaine d’après ») prend place entre les valeurs ponctuelles des deux passés simples conduisant chacun d’eux (« Elle lui donna » / « Ils arrivèrent »), alors que l’adverbe « quelquefois » avait déjà entamé la densité itérative du précédent. Si bien que la courbe temporelle de la séquence s’infléchit fortement : la répétition des visites devient habituelle, et l’accord amoureux perdure selon la régularité.

    Extase mystique

    7Dans le cerne de cette temporalité peu à peu différenciée, s’est accompli ledit accord. Et le terme d’« extase », mentionné au troisième paragraphe, mais qualifiant uniquement la passion exprimée par Frédéric, se révèle, en fait, propre à métaphoriser l’ensemble de la séquence (telle une « tautégorie » du dire dans le dit, selon la définition proposée par Michel Deguy5) car il permet de rendre compte des divers transports affectifs unissant les personnages.

    8Si l’extase consiste bien en une façon privilégiée de se tenir hors du temps perçu comme durée, elle a réuni ceux-ci dès le premier paragraphe. Où, conformément à une attitude et à un sentiment issus du code de la représentation romantique, ils communient dans le désir d’une complète fusion de leur être intime en un univers sans bornes : véritable effusion de l’intérieur dans l’extérieur, capable de recréer ce dernier en le fécondant littéralement (« féconde » / « remplir » / « épanchement d’eux-mêmes » / « aurait fait »). A l’énoncé de ce véritable fantasme s’ajoutent, pour parfaire l’épanouissement imaginaire d’un tel amour, les connotations d’éclat glorieux (« resplendissaient ») et de sublimité morale (« élevé »). Tandis que, grâce à l’hypallage greffée sur la comparaison finale, rénovant par substitution un rapprochement stéréotypé, les « étoiles » ne serviraient alors qu’à répercuter dans le cosmos la « palpitation » de leurs cœurs confondus en un seul. (Habile à jouer avec les clichés, ces scléroses du discours socialisé, le dire flaubertien s’entend aussi bien à les transcender, comme ici, qu’à en accuser l’induration dans le tissu langagier — on le verra plus loin).

    9D’après l’étymologie, l’extase constitue, aussi, une manière de sortir de soi-même et du monde. C’est ce que le mot « ravissement », pris dans sa plus forte acception, indique du comportement des héros au milieu du second paragraphe. Abrités dans le « pavillon », ceux-ci oublient le décor environnant — fait que souligne, typographiquement, la spécifique ponctuation flaubertienne équivalant à une césure : «  ; – et ». En outre, le sens et la distribution ternaire des trois compléments du participe « causant » (« d’eux-mêmes, des autres, de n’importe quoi ») suggèrent une sorte d’évidement progressif de leur personne, laquelle, à travers l’échange heureux, ne se soutient plus que du seul bruit d’une parole allégée du sens.

    10Le mot même d’« extase » ne va point sans connotations mystiques. On trouve celles-ci du côté de Frédéric : non seulement il retrouve ici sa première attitude face à Mme Arnoux, lors de leur rencontre inaugurale, où celle-ci fut perçue, d’emblée, « comme une apparition » et figurée, entre autres modèles picturaux entrelacés6, telle une madone de quelque primitif italien : « son nez droit, son menton, toute sa personne se découpait sur le fond de l’air bleu » et, plus loin : « Jamais il n’avait vu [...] cette finesse des doigts que la lumière traversait » (phrase où s’inscrit déjà le motif de la lumière associée aux mains de Mme Arnoux) ; mais, ici, cette fois, par l’attouchement de « sa main », il se laisse entraîner vers l’adoration muette. Puis sa contemplation, se faisant « regard du myope » (la formule, on le sait, vient de Flaubert lui-même), se perd en une fascination que focalise, comme par accommodations successives, le rythme ternaire : « l’entrelacs de ses veines, les grains de sa peau, la forme de ses doigts ». Enfin, à la limite de l’idolâtrie, la personnification des « doigts », quasiment dénotée par le narrateur, clôt le paragraphe.

    11Dans le suivant, le terme d’« extase » est prononcé au style indirect par Frédéric qui, jouant de la résonance chrétienne du « nom de Marie », évoque à son propos quelques images du rituel catholique. Mais on note que la narration de l’accord extatique s’est arrêtée avant que le mot même n’apparaisse dans le texte, comme si un tel état devait avoir disparu de la diégèse lors de sa nomination dans le discours. On constate encore que, malgré l’énonciation parallèle des prénoms (« Elle l’appelait “Frédéric”, il l’appelait “Marie” ») dont l’échange fait entendre le dernier écho d’un chant que l’on dirait « amébée », la description du concert de gestes amoureux s’est interrompue auparavant. En même temps, par un effet convergent de dématérialisation, l’univers ambiant a entièrement disparu de la représentation.

    Tableaux

    12Le fait se remarque d’autant mieux que, pris dans la texture de cette « moire » d’écriture (pour retourner à Flaubert un autre mot qui lui est cher, et revient dans plusieurs métaphores du roman), divers traits descriptifs du monde extérieur se sont harmonisés — dans une parfaite consonance — avec le duo amoureux, au point d’en amplifier la scénographie.

    13La brève vision de la campagne, donnée au seuil du deuxième paragraphe, suggère fugacement une sensualité épandue en celle-ci (« se mamelonnaient ») et, surtout, propose une stylisation orientée du paysage : épuré par l’implicite mouvement du regard des héros (« devant eux »), il n’est plus que perspectives ascendantes (« haut » / « cimes » / « jusqu’au bord du ciel »), telle une fine estampe propre à refléter la sublimation du désir dans laquelle ceux-ci sont convenus de vivre leur amour.

    14Auxiliaire quelque peu féerique de ce dernier, la matière sensible intervient dans la scène centrale, sous sa forme la plus impalpable : « les rayons du soleil », et en son état le plus léger : « des brins de poussière ». Alors, à travers le tissage de ces éléments, où transparaît le plaisir descriptif que prend Flaubert à décomposer l’univers en pulvérulence lumineuse, « quelquefois », la lumière devient l’éther subtil du lieu.

    15(Par là cet écrivain se rapproche de la technique picturale des impressionnistes, dont maints effets sont disséminés dans le roman, tel celui-ci, lors des promenades de Frédéric sur les Champs-Élysées : « les étriers d’acier, les gourmettes d’argent, les boucles de cuivre, jetaient çà et là des points lumineux » (I, iii, p. 76) ; alors qu’ailleurs est abandonnée cette technique, pour proposer des entassements « cubistes »7, comme celui des faïences dans l’entresol du magasin d’Arnoux : « Les plats, les soupières, les assiettes et les cuvettes encombraient le plancher. Contre les murs étaient dressés de larges carreaux de pavage pour salles de bains et cabinets de toilette, avec sujets mythologiques dans le style de la Renaissance, tandis qu’au milieu une double étagère, montant jusqu’au plafond, supportait des vases à contenir la glace, des pots à fleurs, des candélabres, de petites jardinières et de grandes statuettes polychromes figurant un nègre ou une bergère pompadour » (II, I, p. 180) ; jusqu’à ce que, plus tard, dans Bouvard et Pécuchet, apparaissent des équivalents de montages ou collages des tableaux surréalistes, tel le jardin paysagiste des héros8. En quoi, pour une fois, la mimesis littéraire aura devancé la picturale9).

    Lyrisme

    16C’est précisément grâce à l’irruption oblique de la lumière que le narrateur transfigure la scène. On aimerait écrire « transsubstantie » avec Proust, tant son rêve d’un style « où s’est accompli le miracle suprême, la transsubstantiation des qualités irrationnelles de la matière et de la vie dans les mots humains »10 paraît ici réalisé par avance. La transfiguration s’origine dans la comparaison « comme les cordes d’une lyre », qui irradie profondément le texte par-delà son sens obvie, en de multiples rapprochements. L’échange muet des personnages se voit donc ici transposé dans l’image d’un instrument de musique, lui-même emblème immémorial du chant poétique le plus intime — en même temps que cliché romantique déjà passablement usé depuis Lamartine et Musset. Mais, après avoir placé — d’abord au sens spatial du terme — le rapport amoureux sous le symbole littéral du lyrisme (« les rayons du soleil [...] tendaient depuis le plafond jusque sur les dalles comme les cordes d’une lyre ») par le biais d’une analogie, le narrateur prolonge la vibration allégorique de cette dernière. D’abord, par une double possibilité métaphorique : il y enchaîne la danse vive d’infimes particules matérielles (« des brins de poussière tourbillonnaient »), et il y surimprime le motif d’une cage ou d’une châsse dorée (« barres lumineuses ») entourant ou encadrant l’héroïne. Ensuite, par l’interpénétration des registres sensoriels : la « lyre » n’est bien sûr pas audible, mais, donnée à voir, elle est aussi quasiment touchée. Car, non content d’introduire l’instrument dans le discours au titre de comparant, le narrateur semble encore représenter quelque façon d’en jouer : « Elle s’amusait à les fendre avec sa main ».

    17Partant, loin de servir uniquement à « brillanter le style » (comme aurait dit Stendhal), cette image complexe étoile le texte de significations multiples. Grâce à l’alliance mythologique, implicitement convoquée, du rayonnement solaire d’Apollon (l’« oblique », comme le dit l’un de ses surnoms antiques : loxias) et de sa lyre précieuse, les personnages sont comme transportés, un instant, dans l’aube grecque de notre culture : du chœur silencieux de leur amour au moment mythique où se manifestent ensemble la poésie et le sacré. Cependant qu’on lit en filigrane de nouvelles figures symboliques possibles de l’héroïne : de la prêtresse musicienne à la Muse elle-même.

    18Le tout a surgi dans un espace proprement abstrait, au sens étymologique, de la banalité environnante que la lecture ne saurait ignorer plus longtemps.

    *

    Ambiguïtés

    19Le lecteur qui se serait pris d’affection pour les personnages jusqu’à oublier leur « être de papier » (selon le terme de Barthes) voudrait pouvoir arrêter là son analyse, et demeurer avec eux dans la stance de ce bonheur diaphane. Mais le texte ne le permet pas, car la perfection plastique de son écriture ne va pas sans revers.

    20D’abord la représentation de la réalité matérielle dispose quelques dissonances dans l’harmonie d’ensemble. À commencer par le net hiatus sonore (« au haut ») qui entame (tout à la fois : ouvre et ébrèche quelque peu) la brève description initiale. Au cours de laquelle les couleurs du paysage d’« automne » soulignent la déperdition d’intensité lumineuse (« jaunies » / « pâle »), indiquant ainsi le déclin des forces vitales naturelles, plutôt que de s’accorder avec l’effusion imaginaire des personnages ou la profusion solaire de leur bonheur. À l’évidence, la pauvreté et la laideur du pavillon fournissent un cadre contraire à l’enchantement des héros. Plus subtilement, elles accusent, l’accentuant et la dénonçant, la capacité de ces derniers, qui les ignorent, à se réfugier dans l’illusion. En outre, la narration, réduisant jusqu’à le supprimer le concours du monde extérieur au fur et à mesure que les personnages s’installent dans l’habitude, finit par nous signifier que, loin de répondre au désir d’évasion hors du temps et de l’espace quotidiens, la « route » mène à la routine (« Ils arrivèrent à fixer d’avance le jour de ses visites ; [...] elle allait au devant de lui, sur la route »). Cruel paradoxe flaubertien, dont Emma Bovary a déjà été la victime, à l’encontre de son rêve persistant de voyages : de Tostes, où elle a toujours « sous les yeux l’éternel jardin avec la route poudreuse »11, à Yonville, d’où elle prend, tous les jeudis, la diligence l’Hirondelle pour rejoindre à Rouen son amant Léon : « et la route, entre ses deux longs fossés pleins d’eau jaune, allait continuellement se rétrécissant vers l’horizon. Emma la connaissait d’un bout à l’autre »12.

    21Le comportement des personnages lui-même introduit quelque ambiguïté dans leur rapport. Ils n’ignorent pas la réalité de leur situation, mais décident de l’oublier, préférant l’un et l’autre se leurrer l’un l’autre : à l’illusion voulue, risquent de se substituer les faux-semblants d’un accord prétendument partagé. C’est ainsi que, rompant l’échange, Frédéric s’isole dans l’idéalisation de Mme Arnoux, comme le marque le retour de la césure « ; — » séparant le couple au cœur du « ravissement ». La personnification des « doigts » suggère, chez lui, une tendance au fétichisme, plus proche de la perversion que du mysticisme. Tandis que le choix du terme « soupiré » (« fait exprès, disait-il, pour être soupiré dans l’extase ») implique, aussi bien, un autre sens, érotique, du mot « extase », propre à dévoyer celle-ci du rapport platonique. De fait, le narrateur confirmera plus loin de telles arrière-pensées : « Il voulait qu’elle se donnât, et non la prendre » (p. 371-372). Mme Arnoux, de son côté, tout en s’accusant « elle-même », se complaît à cette duperie, comme on lit peu après :

    – « Oui ! je fais mal ! j’ai l’air d’une coquette ! Ne venez donc plus ! »
    Alors, il répétait les mêmes serments, — qu’elle écoutait chaque fois avec plaisir. (p. 372).

    22Mieux, dans la dernière phrase, l’intrusion d’un simple « comme » révèle qu’elle tente de travestir l’habitude routinière en surprise de la rencontre : « et sortant comme par hasard » — dérisoire tricherie avec la réalité que pointe, subrepticement, le narrateur.

    Distances et stéréotypes

    23Car tout se passe comme si ce dernier, en son instance propre, travaillait à miner la représentation et l’aura symbolique de ce bonheur dans le moment même où il le produit.

    24Dès le premier paragraphe, le rêve du couple est présenté sous un aspect irréalisable par l’emploi du conditionnel passé. Au lieu d’indiquer le futur dans le passé, comme le ferait le présent du même mode (*disparaîtraient et *feraient pouvaient remplacer, sans contrevenir à la grammaire, « auraient disparu » et « aurait fait »), ce temps verbal implique qu’il n’y a aucune perspective d’avenir, et donc d’accomplissement, pour cet amour. Si bien que les personnages apparaissent, d’entrée, contraints à l’extase, pour ainsi dire, sous sa forme d’abord intemporelle.

    25Dans cette même phrase d’ouverture, l’énoncé du fantasme de fécondation de l’univers qui unit les protagonistes transfère en fait, en même temps qu’il le remarque, le désir érotique latent de ces derniers. Est ainsi accentué le caractère intenable de sa dénégation, fondant le pacte manifeste de ces rencontres : « Il était bien entendu qu’ils ne devaient pas s’appartenir », a-t-on lu précédemment (p. 370). Par quoi le discours, sans le dire autrement, révèle que la tentative de sublimation est vouée à l’échec du semblant.

    26Lorsque Frédéric s’extasie sur le prénom de Mme Arnoux, au troisième paragraphe, ses paroles sont rapportées au style indirect. Mais l’incise « disait-il », qui sépare ce « discours transposé » de sa « variante connue sous le nom de “style indirect libre” »13, permet aussi au narrateur de marquer sa distance à leur égard. Et pour cause : ces paroles aboutissent aux stéréotypes les plus plats, banalisant leur apparence mystique en rites religieux strictement codés. Autrement dit, des clichés de la langue, véritables syntagmes figés (« nuages d’encens »/« jonchées de roses »), se font le simple écho de pratiques dévotes, telles les processions mariales, évoquées de façon convenue et de l’extérieur : sans aucune adhésion à la croyance qui les fondent, ni, surtout, la moindre recherche expressive.

    Passion contemplative du narrateur

    27De fait, la distanciation du narrateur opère dans presque tout le fragment et souligne, en particulier, d’un contraste ironique la médiocre capacité artistique des héros, malgré l’emportement initial de leur imagination. Cette rêverie énoncée au style indirect, puis dérivant vers sa variante « libre » par l’éloignement progressif du verbe déclaratif « s’imaginaient », entretient encore une confusion possible entre leur discours et celui du narrateur. Mais bientôt, tandis que ce dernier s’approprie le champ imaginaire, c’est-à-dire la création d’images, il paraît en même temps les priver de sa complicité. Ainsi, lorsque la « lyre » se présente dans le texte, rien n’assure que, dans la diégèse, elle soit vue comme telle par les personnages. Tout porte à penser, au contraire, que, plus prosaïquement, ils ne voient à sa place que des « barres lumineuses », objet d’amusement pour Mme Arnoux, occasion d’une caresse pour Frédéric. Laissés à eux-mêmes, l’un et l’autre sont sans doute incapables d’une telle vue poétique — d’un tel « phantasme de discours », selon la belle expression de Barthes — que le narrateur réserve à son plaisir et à celui du lecteur. Plaisir raffiné, car cette image, en même temps qu’elle s’incorpore le grain le plus fin de la matière sensible, persiste au-delà de son éphémère apparition, grâce aux seules résonances métaphoriques et allégoriques qu’elle induit dans le texte.

    28Plaisir quasi extatique, aussi. Car Flaubert atteint ici, semble-t-il, — l’intensité compensant la brièveté — l’une des visées extrêmes de son désir descriptif, qu’il a très tôt revendiquée sous le nom d’« effusion contemplative ». On lit en effet, dans Par les champs et par les grèves : « … et, dans la sympathie de cette effusion contemplative, nous eussions voulu que notre âme, s’irradiant partout, allât vivre dans toute cette vie pour revêtir toutes ses formes, durer comme elles, et se variant toujours, toujours pousser au soleil de l’éternité ses métamorphoses »14. En outre, on ne peut que remarquer, ici, la coïncidence du motif solaire.

    29Ainsi, en ces lignes, l’auteur, tout à son bonheur descriptif, anticipe une intuition esthétique de T. Adorno : « Si l’apparition est ce qui s’illumine, ce qui nous touche, alors l’image est tentative paradoxale de capter ce qu’il y a de plus éphémère »15.

    30Cette passion contemplative entraîne même le romancier à se détacher des personnages, à suspendre son récit, et peut-être à l’oublier un instant16 — précisément dans la seule séquence où son héros commence de réaliser le plus vif de ses désirs, le seul qui durera jusqu’à la fin du roman. À moins que ce ne soit l’inverse : le désintérêt momentané pour les personnages et leur histoire l’amenant à créer une vision, dont l’efflorescence imaginaire et la richesse symbolique échappent apparemment à ceux-ci. Mais, quelle qu’en soit l’origine, l’ironie du discours flaubertien17 frappe ici au profond de l’agencement narratif : avant d’abandonner ses deux héros à l’imagerie quelque peu usée de leurs propos amoureux, le narrateur place devant leurs yeux une image qu’ils ne voient probablement pas, grâce à laquelle ils auraient pu magnifier leur amour — à commencer par son expression.

    31Enfin, l’inscription du mot « jalousie », au début de la phrase qui construit cette image, permet d’apprécier la qualité indécidable de ladite ironie, trop souvent réduite, dans maintes lectures, à ses manifestations les plus voyantes et voulues. Entre l’évidente congruence sémantique autant que lexicale et la fugitive discordance symbolique qu’assure l’intrusion du mot, joue son double signifié : si l’objet référé est irremplaçable pour motiver de façon réaliste une comparaison qui aurait pu intensifier l’accord des personnages, le sentiment, lui, insistant dans l’intermittence de leur amour (et même jusque dans leur dernière entrevue : III, VI, brève évocation de Rosanette, p. 543), les aura séparés à plusieurs reprises18.

    Réversion

    32On voit, dès lors, le texte s’inverser, à la façon, si l’on veut, de ces anamorphoses de tableaux ou de miroirs dont l’aspect, les formes et les perspectives se modifient selon le point de vue du spectateur. De fait, si l’on relit ce fragment à contre-jour de la progression qui achemine le bonheur des héros jusque dans l’habituel, celle-ci apparaît doublée (je veux dire, à la fois, redoublée, dépassée et trahie) par le progrès d’une logique dont les divers parcours concourent à dévoyer et banaliser l’idéal que se proposent ces derniers : de l’immensité cosmique à l’espace confiné, de l’exaltation visionnaire aux clichés reçus, du sublime éthéré à l’objet trivial (« gants » / « mouchoir »), de l’union extatique à la duplicité tacite, de l’évasion rêvée à la routine masquée.

    *

    33Trois remarques pour assumer la « bêtise de vouloir conclure ». Dans l’unique séquence du roman porteuse d’un bonheur littéralement absolu et pluriel (diégétique, discursif, symbolique), offrant sans doute le plus beau duo d’amour jamais écrit par Flaubert, la narration parvient à imprimer le tracé d’une dégradation, qui reproduit en réduction — abyme miniature — la courbe générale de L’Éducation sentimentale.

    34S’agissant de lyrisme, on est tenté de rapprocher l’effet de cette écriture contrariée, — que l’on dirait oxymorique — de celui que procurent les derniers opéras de Puccini, brisant et raréfiant la mélodie lors même qu’elle y atteint ses plus hautes cimes19.

    35Enfin, si le sentiment se dilue et le sens se divise, en cette séquence, comme dans le reste de ce roman, il n’en va pas de même du Sensible, dont Flaubert réinvente la représentation. Jusqu’au don rare — (pour rejoindre Proust, l’auteur qui a le mieux commenté Flaubert, et ses « lilas », une dernière fois) — d’une « invisible et persistante » lyre20…

    Notes de bas de page

    1 Pages 370 et 371, deuxième partie, chapitre vi, de l’édition Stéphanie Dord-Croulé (Paris, 2001, Garnier-Flammarion) qui sera utilisée ici.

    2 Respectivement : deuxième partie, chapitre v, p. 343-349, et, troisième partie, chapitre l, p. 429-443.

    3 « À propos du “style” de Flaubert », recueilli dans Contre Sainte-Beuve, Essais et Articles, Paris, Gallimard, 1971, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », p. 591.

    4 « Ce type de récit, où une seule émission narrative assume ensemble plusieurs occurrences du même événement, nous le nommerons récit itératif », dans « Discours du récit », Figures iii , Paris, Seuil, 1972, au chapitre « Fréquence », p. l48.

    5 « Manière du poème [ou discours littéraire] de se dire aussi à lui-même ce qu’il est, à travers ce qu’il dit explicitement de ce qui est autre que lui », dans l’article « Vers une théorie de la figure généralisée », Critique, no 269, p. 858-859.

    6 Soit pour le modèle romantique : « Ses bandeaux noirs, contournant la pointe de ses grands sourcils, descendaient très bas et semblaient presser amoureusement l’ovale de sa figure ». Et pour l’impressionniste : « Elle avait un large chapeau de paille, avec des rubans roses qui palpitaient au vent, derrière elle. [...]Sa robe de mousseline claire, tachetée de petits pois, se répandait à plis nombreux. », p. 53-54.

    7 J’emprunte le terme (et l’idée), en les spécifiant, à Genette : « [Flaubert] le premier romancier impressionniste ? Malgré les dates, et à cause de certaines arêtes assez vives, je dirais plutôt le premier écrivain cubiste. Et ce n’est pas ma faute s’il est aussi le dernier », dans « Flaubert par Proust », Flaubert, L’Arc, no 79, 1980, p. 17.

    8 Voici les deux premières phrases de la description du jardin paysagiste : « C’était dans le crépuscule, quelque chose d’effrayant. Le rocher comme une montagne occupait le gazon, le tombeau faisait un cube au milieu des épinards, le pont vénitien un accent circonflexe pardessus les haricots — et la cabane, au-delà, une grande tache noire ; car ils avaient incendié son toit pour la rendre plus poétique » (Bouvard et Pécuchet, éd. C. Gothot-Mersch, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 1979, p. 106.).

    9 Quant au prolongement moderne de ce rapport, je rappelle le questionnement ouvert par Barthes : « D’abord, où, quand cette prééminence du code pictural dans la mimesis littéraire a-t-elle commencé ? Pourquoi a-t-elle disparu ? Pourquoi le rêve de peinture des écrivains est-il mort ? Par quoi a-t-il été remplacé ? Les codes de représentation éclatent aujourd’hui au profit d’un espace multiple dont le modèle ne peut plus être la peinture (le “tableau”) mais serait plutôt le théâtre (la scène), comme l’avait annoncé, ou du moins désiré, Mallarmé. Et puis : si littérature et peinture cessent d’être prises dans une réflexion hiérarchique, l’une étant le rétroviseur de l’autre, à quoi bon les tenir plus longtemps pour des objets à la fois solidaires et séparés, en un mot : classés ? Pourquoi ne pas annuler leur différence (purement substantielle) ? Pourquoi ne pas renoncer à la pluralité des “arts”, pour mieux affirmer celle des “textes” ? », dans S/Z, Paris, Le Seuil, 1970, p. 62. Pour une réponse à la première question posée ici — soit l’historique du rapport narration/description —, voir le chapitre ix, « La pierre descriptive », du livre de Raymonde Debray-Genette, Métamorphoses du récit, Le Seuil, 1988, p. 209, et seq.

    10 Lettre à Lucien Daudet du 27 novembre 1913.

    11 Madame Bovary, in Œuvres complètes de Gustave Flaubert, t. I, Club de l’Honnête Homme, Paris, 1971, p. 86.

    12 Ibid., p. 283.

    13 Selon les définitions de Genette, in Figures III, op. cit., chapitre « Mode », p. 191-194.

    14 Œuvres complètes, op. cit., t. X, p. 118. Pour un commentaire de ce passage, voir le chapitre xi, « Voyage et description », de Métamorphoses du récit, op. cit., p. 250 et 251, dans lequel R. Debray-Genette souligne qu’il s’agit là de la forme de description « la plus lyrique » chez cet auteur.

    15 Dans Théorie esthétique, Paris, Klincksieck, 1989, trad. M. Jimenez, p. 116. Voici encore, parmi bien d’autres, un exemple de cette « tentative [de] capter par l’image le « plus éphémère », dans L’Éducation sentimentale : « et la Seine, verdâtre dans toute son étendue, se déchirait en moires d’argent contre les piles des ponts » (I, III, p. 76).

    16 Selon un effet définitivement analysé par Genette, à propos du célèbre épisode du fiacre de Madame Bovary (III, 1), dans l’article « Silence de Flaubert », Figures, Paris, Seuil, 1966, p. 238-240. A la seule différence qu’ici le détachement du narrateur est beaucoup plus finement agencé (et insidieux) que dans ledit épisode. Serait-ce à proportion de la distance qui sépare une « baisade » d’un rapport platonique ? Ou bien à cause de la distorsion, accrue dans L’Éducation sentimentale depuis Madame Bovary, entre l’obligation de narrer et le plaisir de décrire.

    17 Dont l’enjeu textuel a été précisément repéré par Barthes : « Flaubert cependant [...], en maniant une ironie frappée d’incertitude, opère un malaise salutaire de l’écriture : il n’arrête pas le jeu des codes (ou l’arrête mal), en sorte que (c’est là sans doute la preuve de l’écriture) on ne sait jamais s’il est responsable de ce qu’il écrit (s’il y a un sujet derrière son langage) ; car l’être de l’écriture (le sens du travail qui la constitue) est d’empêcher de jamais répondre à cette question : Qui parle ? » (S/Z, op. cit., p. 146.)

    18 On trouve une occurrence de cette ironie indécidable, dès la première rencontre de Frédéric et Mme Arnoux, dans l’emploi de deux mots de même radical ouvrant et refermant la séquence : « Ce fut comme une apparition. [...] “Ma femme, es-tu prête ?” cria le sieur Arnoux, apparaissant dans le capot de l’escalier » (p. 50-52). Cette reprise, jouant entre épanalepse et épistrophe, non seulement accentue ironiquement la brutalité de l’interruption du dialogue s’amorçant entre les deux personnages, mais accuse la soudaine transformation dévalorisante de la femme idéale — madone ou déesse — en bourgeoise mariée ; enfin, elle surimprime déjà, outre le désenchantement, le double leitmotiv du rival et de la séparation à l’inscription inaugurale de l’unique désir véritablement amoureux de Frédéric dans tout le roman.

    19 Ainsi, dans son Histoire de l’opéra (Paris, Buchet-Chastel, 1957, p. 338), René Leibowitz, remarquable critique et chef d’orchestre, souligne, contrairement à une idée reçue, que, dans La Tosca, par exemple, « les passages de véritable bel canto, c’est-à-dire les grands airs où peut se déployer la voix du chanteur, sont extrêmement rares et brefs et ne représentent dans l’ensemble de l’ouvrage qu’une proportion infime. Il suffit, pour s’en convaincre, de considérer les deux airs les plus célèbres de La Tosca, ceux qui ont sans doute le plus contribué à la gloire de l’œuvre. Je veux parler du Vissi d’arte du deuxième acte et du Ho ! Dolci baci du troisième acte. Le premier compte trente-cinq mesures (dans une partition qui en compte au moins deux mille) ; le second totalise (avec le récitatif initial) trente-trois mesures, mais la partie du bel canto à proprement parler n’en compte que quinze ».

    20 Voir la fin de « Combray » dans Du Côté de chez Swann, Paris, Gallimard, Pléiade, t. I, 1987, p. 183.

    Auteur

    Jean-Pierre Moussaron

    Précédent Suivant
    Table des matières

    Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

    Voir plus de livres
    L’art et question de la valeur

    L’art et question de la valeur

    Dominique Rabaté (dir.)

    2007

    Le lecteur engagé

    Le lecteur engagé

    Critique - enseignement - politique

    Isabelle Poulin et Jérôme Roger (dir.)

    2007

    Déclins de l'allégorie ?

    Déclins de l'allégorie ?

    Bernard Vouilloux (dir.)

    2006

    Mondes perdus

    Mondes perdus

    Alain-Michel Boyer (dir.)

    1991

    Ecritures discontinues

    Ecritures discontinues

    Yves Vadé (dir.)

    1993

    Ce que modernité veut dire (I)

    Ce que modernité veut dire (I)

    Yves Vadé (dir.)

    1994

    Le retour à l'archaïque

    Le retour à l'archaïque

    Yves Vadé (dir.)

    1996

    Écritures de l'objet

    Écritures de l'objet

    Roger Navarri (dir.)

    1997

    Poétiques de l'instant

    Poétiques de l'instant

    Yves Vadé (dir.)

    1998

    L'instant romanesque

    L'instant romanesque

    Dominique Rabaté (dir.)

    1998

    Surfaces et intériorité

    Surfaces et intériorité

    Cabanès Jean-Louis (dir.)

    1998

    Ruptures, continuités

    Ruptures, continuités

    Yves Vadé (dir.)

    2000

    Voir plus de livres
    1 / 12
    L’art et question de la valeur

    L’art et question de la valeur

    Dominique Rabaté (dir.)

    2007

    Le lecteur engagé

    Le lecteur engagé

    Critique - enseignement - politique

    Isabelle Poulin et Jérôme Roger (dir.)

    2007

    Déclins de l'allégorie ?

    Déclins de l'allégorie ?

    Bernard Vouilloux (dir.)

    2006

    Mondes perdus

    Mondes perdus

    Alain-Michel Boyer (dir.)

    1991

    Ecritures discontinues

    Ecritures discontinues

    Yves Vadé (dir.)

    1993

    Ce que modernité veut dire (I)

    Ce que modernité veut dire (I)

    Yves Vadé (dir.)

    1994

    Le retour à l'archaïque

    Le retour à l'archaïque

    Yves Vadé (dir.)

    1996

    Écritures de l'objet

    Écritures de l'objet

    Roger Navarri (dir.)

    1997

    Poétiques de l'instant

    Poétiques de l'instant

    Yves Vadé (dir.)

    1998

    L'instant romanesque

    L'instant romanesque

    Dominique Rabaté (dir.)

    1998

    Surfaces et intériorité

    Surfaces et intériorité

    Cabanès Jean-Louis (dir.)

    1998

    Ruptures, continuités

    Ruptures, continuités

    Yves Vadé (dir.)

    2000

    Voir plus de chapitres

    King Kong (1933) ou la migration du sens

    Jean-Pierre Moussaron

    Présence et estompe du “film noir” dans Nous avons gagné ce soir (The Set Up) de Robert Wise

    Jean-Pierre Moussaron

    Le « marteau » de Nietzsche contre le nihilisme

    Jean-Pierre Moussaron

    Le Multivers derridien

    Jean-Pierre Moussaron

    Johnny Guitar : le western rédimé

    Jean-Pierre Moussaron

    L’enchantement du jazz

    Jean-Pierre Moussaron

    Vers l’inusable beckettien : Malone meurt

    Jean-Pierre Moussaron

    Vers la ruine du poétique

    Jean-Pierre Moussaron

    L’instant du jazz

    Philippe Méziat et Jean-Pierre Moussaron

    Avant-dire

    Éric Benoit, Michel Braud, Jean-Pierre Moussaron et al.

    Voir plus de chapitres
    1 / 10

    King Kong (1933) ou la migration du sens

    Jean-Pierre Moussaron

    Présence et estompe du “film noir” dans Nous avons gagné ce soir (The Set Up) de Robert Wise

    Jean-Pierre Moussaron

    Le « marteau » de Nietzsche contre le nihilisme

    Jean-Pierre Moussaron

    Le Multivers derridien

    Jean-Pierre Moussaron

    Johnny Guitar : le western rédimé

    Jean-Pierre Moussaron

    L’enchantement du jazz

    Jean-Pierre Moussaron

    Vers l’inusable beckettien : Malone meurt

    Jean-Pierre Moussaron

    Vers la ruine du poétique

    Jean-Pierre Moussaron

    L’instant du jazz

    Philippe Méziat et Jean-Pierre Moussaron

    Avant-dire

    Éric Benoit, Michel Braud, Jean-Pierre Moussaron et al.

    Accès ouvert

    Accès ouvert freemium

    ePub

    PDF

    PDF du chapitre

    Suggérer l’acquisition à votre bibliothèque

    Acheter

    Édition imprimée

    • amazon.fr
    • decitre.fr
    • mollat.com
    • leslibraires.fr
    • placedeslibraires.fr

    1 Pages 370 et 371, deuxième partie, chapitre vi, de l’édition Stéphanie Dord-Croulé (Paris, 2001, Garnier-Flammarion) qui sera utilisée ici.

    2 Respectivement : deuxième partie, chapitre v, p. 343-349, et, troisième partie, chapitre l, p. 429-443.

    3 « À propos du “style” de Flaubert », recueilli dans Contre Sainte-Beuve, Essais et Articles, Paris, Gallimard, 1971, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », p. 591.

    4 « Ce type de récit, où une seule émission narrative assume ensemble plusieurs occurrences du même événement, nous le nommerons récit itératif », dans « Discours du récit », Figures iii , Paris, Seuil, 1972, au chapitre « Fréquence », p. l48.

    5 « Manière du poème [ou discours littéraire] de se dire aussi à lui-même ce qu’il est, à travers ce qu’il dit explicitement de ce qui est autre que lui », dans l’article « Vers une théorie de la figure généralisée », Critique, no 269, p. 858-859.

    6 Soit pour le modèle romantique : « Ses bandeaux noirs, contournant la pointe de ses grands sourcils, descendaient très bas et semblaient presser amoureusement l’ovale de sa figure ». Et pour l’impressionniste : « Elle avait un large chapeau de paille, avec des rubans roses qui palpitaient au vent, derrière elle. [...]Sa robe de mousseline claire, tachetée de petits pois, se répandait à plis nombreux. », p. 53-54.

    7 J’emprunte le terme (et l’idée), en les spécifiant, à Genette : « [Flaubert] le premier romancier impressionniste ? Malgré les dates, et à cause de certaines arêtes assez vives, je dirais plutôt le premier écrivain cubiste. Et ce n’est pas ma faute s’il est aussi le dernier », dans « Flaubert par Proust », Flaubert, L’Arc, no 79, 1980, p. 17.

    8 Voici les deux premières phrases de la description du jardin paysagiste : « C’était dans le crépuscule, quelque chose d’effrayant. Le rocher comme une montagne occupait le gazon, le tombeau faisait un cube au milieu des épinards, le pont vénitien un accent circonflexe pardessus les haricots — et la cabane, au-delà, une grande tache noire ; car ils avaient incendié son toit pour la rendre plus poétique » (Bouvard et Pécuchet, éd. C. Gothot-Mersch, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 1979, p. 106.).

    9 Quant au prolongement moderne de ce rapport, je rappelle le questionnement ouvert par Barthes : « D’abord, où, quand cette prééminence du code pictural dans la mimesis littéraire a-t-elle commencé ? Pourquoi a-t-elle disparu ? Pourquoi le rêve de peinture des écrivains est-il mort ? Par quoi a-t-il été remplacé ? Les codes de représentation éclatent aujourd’hui au profit d’un espace multiple dont le modèle ne peut plus être la peinture (le “tableau”) mais serait plutôt le théâtre (la scène), comme l’avait annoncé, ou du moins désiré, Mallarmé. Et puis : si littérature et peinture cessent d’être prises dans une réflexion hiérarchique, l’une étant le rétroviseur de l’autre, à quoi bon les tenir plus longtemps pour des objets à la fois solidaires et séparés, en un mot : classés ? Pourquoi ne pas annuler leur différence (purement substantielle) ? Pourquoi ne pas renoncer à la pluralité des “arts”, pour mieux affirmer celle des “textes” ? », dans S/Z, Paris, Le Seuil, 1970, p. 62. Pour une réponse à la première question posée ici — soit l’historique du rapport narration/description —, voir le chapitre ix, « La pierre descriptive », du livre de Raymonde Debray-Genette, Métamorphoses du récit, Le Seuil, 1988, p. 209, et seq.

    10 Lettre à Lucien Daudet du 27 novembre 1913.

    11 Madame Bovary, in Œuvres complètes de Gustave Flaubert, t. I, Club de l’Honnête Homme, Paris, 1971, p. 86.

    12 Ibid., p. 283.

    13 Selon les définitions de Genette, in Figures III, op. cit., chapitre « Mode », p. 191-194.

    14 Œuvres complètes, op. cit., t. X, p. 118. Pour un commentaire de ce passage, voir le chapitre xi, « Voyage et description », de Métamorphoses du récit, op. cit., p. 250 et 251, dans lequel R. Debray-Genette souligne qu’il s’agit là de la forme de description « la plus lyrique » chez cet auteur.

    15 Dans Théorie esthétique, Paris, Klincksieck, 1989, trad. M. Jimenez, p. 116. Voici encore, parmi bien d’autres, un exemple de cette « tentative [de] capter par l’image le « plus éphémère », dans L’Éducation sentimentale : « et la Seine, verdâtre dans toute son étendue, se déchirait en moires d’argent contre les piles des ponts » (I, III, p. 76).

    16 Selon un effet définitivement analysé par Genette, à propos du célèbre épisode du fiacre de Madame Bovary (III, 1), dans l’article « Silence de Flaubert », Figures, Paris, Seuil, 1966, p. 238-240. A la seule différence qu’ici le détachement du narrateur est beaucoup plus finement agencé (et insidieux) que dans ledit épisode. Serait-ce à proportion de la distance qui sépare une « baisade » d’un rapport platonique ? Ou bien à cause de la distorsion, accrue dans L’Éducation sentimentale depuis Madame Bovary, entre l’obligation de narrer et le plaisir de décrire.

    17 Dont l’enjeu textuel a été précisément repéré par Barthes : « Flaubert cependant [...], en maniant une ironie frappée d’incertitude, opère un malaise salutaire de l’écriture : il n’arrête pas le jeu des codes (ou l’arrête mal), en sorte que (c’est là sans doute la preuve de l’écriture) on ne sait jamais s’il est responsable de ce qu’il écrit (s’il y a un sujet derrière son langage) ; car l’être de l’écriture (le sens du travail qui la constitue) est d’empêcher de jamais répondre à cette question : Qui parle ? » (S/Z, op. cit., p. 146.)

    18 On trouve une occurrence de cette ironie indécidable, dès la première rencontre de Frédéric et Mme Arnoux, dans l’emploi de deux mots de même radical ouvrant et refermant la séquence : « Ce fut comme une apparition. [...] “Ma femme, es-tu prête ?” cria le sieur Arnoux, apparaissant dans le capot de l’escalier » (p. 50-52). Cette reprise, jouant entre épanalepse et épistrophe, non seulement accentue ironiquement la brutalité de l’interruption du dialogue s’amorçant entre les deux personnages, mais accuse la soudaine transformation dévalorisante de la femme idéale — madone ou déesse — en bourgeoise mariée ; enfin, elle surimprime déjà, outre le désenchantement, le double leitmotiv du rival et de la séparation à l’inscription inaugurale de l’unique désir véritablement amoureux de Frédéric dans tout le roman.

    19 Ainsi, dans son Histoire de l’opéra (Paris, Buchet-Chastel, 1957, p. 338), René Leibowitz, remarquable critique et chef d’orchestre, souligne, contrairement à une idée reçue, que, dans La Tosca, par exemple, « les passages de véritable bel canto, c’est-à-dire les grands airs où peut se déployer la voix du chanteur, sont extrêmement rares et brefs et ne représentent dans l’ensemble de l’ouvrage qu’une proportion infime. Il suffit, pour s’en convaincre, de considérer les deux airs les plus célèbres de La Tosca, ceux qui ont sans doute le plus contribué à la gloire de l’œuvre. Je veux parler du Vissi d’arte du deuxième acte et du Ho ! Dolci baci du troisième acte. Le premier compte trente-cinq mesures (dans une partition qui en compte au moins deux mille) ; le second totalise (avec le récitatif initial) trente-trois mesures, mais la partie du bel canto à proprement parler n’en compte que quinze ».

    20 Voir la fin de « Combray » dans Du Côté de chez Swann, Paris, Gallimard, Pléiade, t. I, 1987, p. 183.

    Apories, paradoxes et autocontradictions

    X Facebook Email

    Apories, paradoxes et autocontradictions

    Ce livre est diffusé en accès ouvert freemium. L’accès à la lecture en ligne est disponible. L’accès aux versions PDF et ePub est réservé aux bibliothèques l’ayant acquis. Vous pouvez vous connecter à votre bibliothèque à l’adresse suivante : https://0-freemium-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/oebooks

    Si vous avez des questions, vous pouvez nous écrire à access[at]openedition.org

    Apories, paradoxes et autocontradictions

    Vérifiez si votre bibliothèque a déjà acquis ce livre : authentifiez-vous à OpenEdition Freemium for Books.

    Vous pouvez suggérer à votre bibliothèque d’acquérir un ou plusieurs livres publiés sur OpenEdition Books. N’hésitez pas à lui indiquer nos coordonnées : access[at]openedition.org

    Vous pouvez également nous indiquer, à l’aide du formulaire suivant, les coordonnées de votre bibliothèque afin que nous la contactions pour lui suggérer l’achat de ce livre. Les champs suivis de (*) sont obligatoires.

    Veuillez, s’il vous plaît, remplir tous les champs.

    La syntaxe de l’email est incorrecte.

    Référence numérique du chapitre

    Format

    Moussaron, J.-P. (2013). Flaubert : le discours réversible et oxymorique. In Éric Benoit (éd.), Apories, paradoxes et autocontradictions (1‑). Presses Universitaires de Bordeaux. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pub.9588
    Moussaron, Jean-Pierre. « Flaubert : le discours réversible et oxymorique ». In Apories, paradoxes et autocontradictions, édité par Éric Benoit. Pessac: Presses Universitaires de Bordeaux, 2013. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pub.9588.
    Moussaron, Jean-Pierre. « Flaubert : le discours réversible et oxymorique ». Apories, paradoxes et autocontradictions, édité par Éric Benoit, Presses Universitaires de Bordeaux, 2013, https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pub.9588.

    Référence numérique du livre

    Format

    Benoit, Éric (éd.). (2013). Apories, paradoxes et autocontradictions (1‑). Presses Universitaires de Bordeaux. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pub.9561
    Benoit, Éric, éd. Apories, paradoxes et autocontradictions. Pessac: Presses Universitaires de Bordeaux, 2013. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pub.9561.
    Benoit, Éric, éditeur. Apories, paradoxes et autocontradictions. Presses Universitaires de Bordeaux, 2013, https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pub.9561.
    Compatible avec Zotero Zotero

    1 / 3

    Presses Universitaires de Bordeaux

    Presses Universitaires de Bordeaux

    • Mentions légales
    • Plan du site
    • Se connecter

    Suivez-nous

    • Facebook
    • X
    • Flux RSS

    URL : http://www.pub-editions.fr

    Email : pub@u-bordeaux-montaigne.fr

    Adresse :

    Université Bordeaux Montaigne

    Domaine Universitaire

    Esplanade des Antilles

    33607

    Pessac cedex

    France

    OpenEdition
    • Candidater à OpenEdition Books
    • Connaître le programme OpenEdition Freemium
    • Commander des livres
    • S’abonner à la lettre d’OpenEdition
    • CGU d’OpenEdition Books
    • Accessibilité : partiellement conforme
    • Données personnelles
    • Gestion des cookies
    • Système de signalement