Le Congrès international pour l’extension et la culture de la langue française (1905-1913) : genèse de quelques préoccupations francophones
p. 337-354
Texte intégral
1Entreprenant actuellement une thèse de doctorat sur l’historiographie littéraire de la francophonie Nord (Belgique, Suisse, Québec et France), nous ne pouvons nullement prétendre nous fonder sur une vision exhaustive des situations de francophonie. La particularité du corpus qui nous occupe – les discours métalittéraires – et le type de découpage géographique adopté sont même plutôt relativement marginaux par rapport à l’ensemble des travaux existant, ou en cours, sur la francophonie littéraire.
2Il n’en demeure pas moins que l’exposé qui suit ambitionne de se situer dans une certaine conception de ce que sont, ou pourraient être, les « études francophones » et l’objet auquel elles s’attachent. Il ne sera pas question ici de distinguer et de passer en revue les multiples définitions possibles de la francophonie et les approches théoriques qui correspondent à ces définitions (linguistique, institutionnelle, [géo-]politique, culturelle, etc.1). Pour le dire vite, notre démarche s’appuie sur ce qu’on pourrait appeler une définition socio-discursive de la francophonie : celle-ci serait l’ensemble des rhétoriques, des idéologies, des concepts, des représentations mis en place pour rendre compte de la communauté des usagers et des usages de la langue française. Les « études francophones » ainsi comprises viseraient à rendre compte de ces rhétoriques, idéologies, concepts ou représentations, des enjeux sociaux auxquels ils répondent, des énonciateurs qui les prennent en charge et de lieux à partir desquels se pense, s’énonce, se labellise, voire s’instrumentalise, la francophonie.
3Dans le fil de cette histoire socio-discursive, nous avons choisi d’isoler un moment précis : les trois Congrès internationa[ux] pour l’extension et la culture de la langue française, qui se déroulèrent successivement en 1905 à Liège, en 1908 à Arlon et en 1913 à Gand2. Sans pouvoir nous attarder longuement en justifications, nous dirons simplement que le choix d’un tel corpus présente, à nos yeux, au moins deux intérêts pour les questions qui nous rassemblent ici. Premièrement, en forçant un peu les choses, on peut dire que ce corpus appartient au genre particulier des réunions scientifiques, qui constitue, on ne peut le nier, un aspect de notre propre pratique à l’égard de la francophonie. Partant du principe que la réflexivité est un exercice salutaire, il nous semblait intéressant de mettre en lumière les préoccupations, à un siècle d’écart, de nos homologues francisants ou francophonisants. Deuxièmement, et ceci est un corollaire de ce qui précède, la distance historique d’un siècle permet précisément de rendre moins « passionnels » des débats qui sans doute nous agitent encore aujourd’hui et, surtout, de faire apparaître avec plus de netteté les sutures dont sont faits certains de nos discours. Il s’agira donc moins ici de proposer ou de discuter des catégories conceptuelles que d’entreprendre une lecture historico-critique.
1. Contextes
4Avant d’entrer dans l’exposé des principaux contenus discutés à ces trois congrès « proto-francophones », quelques précisions quant au contexte constituent un détour indispensable pour bien faire apparaître le caractère de « moment-charnière » propre à ces premières années du XXe siècle dans la donne politico-culturelle française.
5Sur le plan mondial, la pratique du français accuse incontestablement un net déclin, notamment face à l’expansion coloniale anglaise, mais aussi suite au recul de la francophilie russe et Scandinave. En outre, l’Allemagne de Bismarck, alors en plein Kulturkampf, poursuit son industrialisation massive et sa campagne d’unification nationale. Celle-ci passe par une germanisation renforcée de l’ensemble du territoire, qui n’épargne pas, bien entendu, les toujours très regrettées Alsace et Lorraine3.
6Le sentiment de menace que provoque cet état de crise est encore renforcé, chez certains, par le succès des langues artificielles, à la fin du XIXe siècle. Succès certes bref, mais néanmoins surprenant, de langues telles le volapuk, qui laisse entrevoir d’autres concurrentes du français au titre de « langue auxiliaire internationale ».
7Parallèlement à cette situation, qui concerne principalement les relations internationales, on notera que se pose également, dans les mêmes années, la question du choix d’une langue de communication scientifique. En effet, ce n’est qu’en 1903 (donc deux ans avant notre premier congrès) que la rédaction de la thèse en latin est devenue facultative en France. Avec l’arrivée, sur le marché du savoir, d’intellectuels italiens, allemands, slaves, japonais également, l’enjeu de la nouvelle « langue de la science » est tout à fait central.
8Sur le plan plus strictement politique, les années 1900 constituent également un moment clé dans l’histoire coloniale française. En Algérie, après avoir réprimé de nombreuses révoltes indigènes à la fin du XIXe siècle, les colons français entament une période d’exploitation agricole massive du sol algérien. Par ailleurs, dans les mêmes années, l’Empire colonial s’étend au Maroc, qui passe sous tutelle française en 1912. La question de l’expansion et de l’enseignement du français est inséparable de cet état des lieux de l’entreprise coloniale et de sa justification par les élites métropolitaines.
9La Belgique (où se déroulent les trois sessions du Congrès) écrit elle aussi, dans ces années, un important chapitre de son histoire coloniale, puisque c’est en 1908 que Léopold II cède la colonie du Congo, jusqu’alors sa propriété personnelle, à l’État belge, qui en organise « l’exploitation économique et l’appropriation territoriale », au nom d’une « mission que l’on qualifie alors de « civilisatrice « »4. Mais le contexte belge a surtout en commun avec la France d’avoir ressenti au plus près la politique du Kulturkampf menée par Bismarck. Non loin de Liège, la commune de Malmedy, française de 1795 à 1813, fut en effet rattachée à la Prusse dès le Congrès de Vienne, tout en maintenant un profond sentiment francophile. Les résistances furent donc vives, à partir de 1862, lorsque les mesures anti-françaises de la Régence royale touchèrent l’administration communale, très majoritairement francophone. La suppression du français dans l’enseignement ne put venir à bout de l’attachement local à la langue française, qui se manifesta notamment dans la création de nombreuses associations culturelles5.
10Il n’est donc sans doute pas indifférent que ce premier grand rassemblement international sur la langue française ait eu lieu non loin de ces futurs « Cantons de l’Est », en Belgique, dont la situation propre pouvait favoriser les expressions de rattachement à la culture française. Outre les quelques éléments que nous venons d’évoquer, cette situation peut se caractériser par une tension entre, d’une part l’exaltation de l’État national francophone (notamment à travers l’aventure coloniale), d’autre part des ferments, déjà, de séparatisme. En effet, d’un côté, la Belgique française vient de s’illustrer sur la scène internationale avec ses représentants du mouvement littéraire symboliste – Maeterlinck, Rodenbach, Verhaeren – et elle fête le 75e anniversaire de son indépendance en accueillant l’exposition universelle (à Liège ; c’est dans ce cadre qu’a lieu le premier congrès, en 1905). D’un autre côté, la même Belgique se voit contestée de l’intérieur par les revendications du « Mouvement flamand », qui font reculer la langue française dans les Flandres au profit du néerlandais : en 1900, August Vermeylen publie son manifeste « Vlaamse en Europese beweging » (« Mouvement flamand et européen »), qui inaugure la littérature belge flamande, et l’université de Gand (ville qui accueille le congrès de 1913) entame sa flamandisation, provoquant les réactions scandalisées des vieilles élites francophones du pays6.
11Enfin, notons encore que, autour de 1900, le monde académique français assiste à l’entrée triomphale, à l’Université, de l’histoire littéraire française moderne, avec Gustave Lanson7. Cet élément n’est certainement pas indifférent au caractère de scientificité dont entendent se doter les trois congrès belges. S’ils présentent bien des aspects purement institutionnels, il s’agit avant tout de réunions de spécialistes légitimés à produire un savoir sur la langue française, son expansion et sa littérature.
12Ces différentes données de contextualisation nous aident à souligner ceci : la réflexion proto-francophone qui nous occupe ici trouve son ancrage dans un moment-charnière, pris dans une tension entre sentiment de menace, nécessité de défense, et poursuite euphorique d’un projet d’avenir ; entre des accents alarmistes et une visée programmatique. C’est précisément cette tension, peut-être constitutive de la parole francophone, qui nous semblait intéressante à examiner.
2. Présentation générale des discours
13Nous présenterons d’abord brièvement le personnel social qui prend la parole dans ces discours, ainsi que les grands contenus abordés successivement dans les trois congrès, pour ensuite tenter de resserrer la focale du commentaire en abordant quelques problématiques précises.
2.1. Personnel
14Le nombre des participants est assez impressionnant, et relativement constant de 1905 à 1913 : environ cinq cents « membres » sont recensés à chaque congrès. La grande majorité provient du monde de l’enseignement, secondaire et supérieur, parmi lesquels de nombreux universitaires étrangers. On observe également une forte présence de personnalités du monde industriel, surtout à Gand en 1913, qui accueille également beaucoup de rentiers francophones : preuve que, dans ces années en Belgique, l’emploi de la langue française constituait pour eux un enjeu qui touchait à leur raison sociale elle-même. Sont présents aussi des journalistes, hommes de lettres et artistes locaux, des représentants politiques, et des écrivains français (André Gide, Gustave Kahn, Henri de Régnier sont présents en 19058). Enfin, deux institutions françaises majeures manifestent une présence remarquée : la Sorbonne (avec Gustave Lanson et Ferdinand Brunot) et l’Académie française (avec Jules Claretie, Émile Faguet, Anatole France, puis Maurice Barrès, qui sera nommé en 1913 président du Comité d’action parisien9).
2.2. Contenus
15Quant aux contenus, de 1905 à 1913, leur présentation est de mieux en mieux balisée, structurée en différentes sections. Le premier congrès présente, pêle-mêle, des repérages de situations géolinguistiques, des considérations pédagogiques et des états des lieux des principales institutions qui œuvrent à l’expansion de la langue française. Le congrès de 1908 maintient ces différentes orientations, qu’il organise en sections distinctes. On notera la création d’une « section littéraire », qui draine en réalité des problématiques d’enseignement et d’institution ; ainsi que l’apparition d’une « section scientifique ». Originellement, celle-ci a été créée pour répondre à l’enjeu, cité plus haut, d’établissement du français comme langue de science internationale. Mais il semble y avoir eu malentendu sur l’intitulé de la section, qui finalement accueillera des rapports qui adoptent la posture la plus « distanciée », la plus « scientifique » au sens où nous l’entendons aujourd’hui, à l’égard du projet même d’expansion qui rassemble les congressistes. Nous nous attarderons plus loin sur ce type de posture. La « section scientifique » n’apparaît plus dans les actes du troisième congrès, qui la remplacent par une « section de philologie et d’histoire », manifestant par là le souhait de limiter la portée de la parole spécialisée au seul domaine de l’érudition, à de seules questions philologiques ou historiques précises, sans plus de portée critique sur le projet « proto-francophone » lui-même. Il est d’ailleurs significatif que, dans le même mouvement, ce troisième congrès voit s’accroître considérablement la section qui recense les différentes institutions de propagande française et en expose les missions.
3. Présupposés et positions discursives
16Sans prétendre rendre compte en détail de tous ces discours, on peut, dans un premier temps, tenter d’en dégager les grands présupposés communs, les grandes catégories de pensée tacitement admises, partagées, qui conditionnent la bonne compréhension réciproque des différents intervenants. Ces présupposés peuvent se laisser ramener à trois grandes propositions.
17Premièrement, la proposition qui place en équivalence langue et pensée : l’ensemble des discours examinés considèrent en effet comme allant de soi qu’à une langue correspond nécessairement un seul et même mode de pensée. La langue est une, ensemble clos de traits connus ou connaissables, et détermine une disposition d’esprit par rapport au monde tout aussi unitaire et caractérisable. C’est ce présupposé du monologisme qui sous-tend, par exemple, des énoncés tels que celui-ci :
« [M. Wilmotte] fait des vœux pour que cette assemblée, qui réunit les représentants autorisés de peuples d’origines diverses, qui ont une commune façon de penser parce qu’ils se servent de la même langue, nous donne des travaux et prenne des résolutions ayant pour effet de favoriser l’expansion et la culture du français, de cet instrument merveilleux grâce auquel la pensée acquiert des qualités incomparables de clarté, de précision et d’urbanité. »10
Ou encore : « [...] le langage d’un peuple, c’est ce peuple même, c’est sa pensée, son caractère ; ce sont ses croyances, ses aspirations, son passé et son avenir. »11
18Deuxièmement, la plupart des discours s’accordent pour reconnaître que cette langue et cette pensée françaises ont pour centre unique la nation française. De cela découle une représentation de la « proto-francophonie » sous forme d’étoile, dont les branches qui partent du centre occupent la fonction « rayonnement », tandis que celles qui y convergent sont investies du sens du « dévouement ». Ainsi, par exemple, le ministre de France à Bruxelles se déclare « fier de représenter, en même temps que [s]on pays, tout ce rayonnement civilisateur qu’évoque à elle seule la langue française. »12 Dans l’autre sens, le représentant officiel de la Confédération helvétique affirme quant à lui que « [les] cantons romands [...] ont donné à la tradition française de multiples preuves de dévouement [...]. »13
19Enfin, le troisième présupposé coïncide avec une forme de doxa positiviste, selon laquelle l’effort des grandes nations serait porté par la foi en un progrès civilisateur à l’échelle universelle : autrement dit, la science poursuit un idéal situé au-delà des contingences historiques et matérielles et la poursuite de cet idéal est censée neutraliser à elle seule toutes les luttes et rapports de force réels. C’est exactement ce qui transparaît de ce vœu du bourgmestre de Liège qui, s’adressant aux congressistes, leur dit :
« [...] dans les pays bilingues, les débats linguistiques peuvent soulever des conflits irritants et dangereux. Votre besogne n’est pas là, et vous voudrez vous placer au-dessus des rivalités ethniques pour étudier la question du développement civilisateur de la langue française dans le monde. »14
20La présence manifeste de ces grands présupposés communs (monologisme, rapport centre/périphérie sur le mode rayonnement/dévouement, progrès scientifique comme neutralisateur des conflits historiques réels) ne doit pas pour autant laisser croire que tous ces discours sont absolument consensuels et répétitifs. Nous pouvons distinguer cinq grandes modalités de prise de parole (et de prise de position), qui se répartissent sur le continuum suivant :

4. Positions descriptives
21Les positions descriptives sont les plus évidentes à saisir, puisqu’elles consistent à manifester la présence de la norme (linguistique, culturelle) française, à travers l’exposé de données chiffrées ou la mise en évidence de valeurs partagées. De ces positions ressortissent évidemment tous les rapports qui dressent des « états des lieux » du français dans les différentes régions du monde (« La langue française en Hollande », « La langue française dans le Grand-Duché du Luxembourg, « La langue française en Macédoine », etc.)
22Mais on peut ranger également sous cette catégorie les considérations portées sur les rapports entre la littérature française et l’enseignement du français. En effet, il apparaît tout à fait clairement que le projet francophone porte en lui un projet de codification littéraire, ou d’instrumentalisation du littéraire à des fins d’illustration et de transmission de la norme. Ainsi, parmi les « Vœux adoptés par le Congrès d’Arlon », on lit :
« Considérant qu’il importe, particulièrement dans les pays bilingues, de mettre entre les mains des enfants des textes capables de développer leur imagination et leur sensibilité ; considérant que chacun des trois grands siècles de la littérature française, les xviie, xviiie et xixe, peuvent fournir une ample moisson de ces textes ; émet le vœu que l’étude de la langue et de la littérature françaises commence par l’explication de morceaux empruntés aux meilleurs auteurs de chacun de ces trois siècles et appropriés à l’âge des enfants et réserve pour un âge plus avancé les auteurs des xviie et xviiie siècles, qui restent la base fondamentale de l’enseignement de la langue et de la littérature françaises. »15
23Contre l’état de décadence et la « littérature pornographique » qui minent la littérature française qui leur est contemporaine, les congressistes entendent promulguer un canon littéraire classique : la référence à un tel canon est en effet la condition indispensable de l’enseignement du français, entendu comme transmission d’une norme stylistique (à la fois écrite et orale, nous le verrons) coïncidant avec une norme morale (clarté, bon sens, sincérité, probité, etc.).
24Dans le cadre de cette problématique est discutée la question de l’entrée des écrivains belges au programme de l’enseignement. Dans les premières années du XXe siècle, les écrivains belges ne cessent en effet de revendiquer une meilleure situation matérielle, qui passe notamment par une reconnaissance publique et une entrée à part entière dans les anthologies scolaires. L’un des congressistes dénigre ouvertement ce genre de revendications nationalistes, principalement au nom de l’argument suivant : la Belgique littéraire ne présente pas une masse critique suffisante d’écrivains de qualité. Cette question de la valeur littéraire, du seuil critique à partir duquel l’écrivain est jugé suffisamment « bon » pour entrer dans les manuels, est évidemment le point aveugle du raisonnement. La norme idéologique qui commande à de telles conceptions et se voit renforcée par elles est celle du « désintéressement de l’artiste sincère », de la vision sacralisée et dépersonnalisée de la création artistique. En phase avec cette norme, qu’il est censé reproduire, l’enseignement du français a bien pour finalité, nous dit le congressiste, de fournir un « modèle classique », un « exemple à l’effort phraséologique des collégiens », et non de livrer des leçons de géographie et d’histoire belges, aussi nombreux soient les écrivains nationaux qui parlent de leur terre et de leur passé. Ni pornographie, ni particularismes donc : la compréhension du littéraire français en francophonie se doit d’être déshistoricisée, conforme au mythe de l’artiste dont la valeur est proportionnelle à son désintéressement et à sa sincérité morale.
5. Positions pragmatiques
25En se déplaçant d’un cran vers le pôle « pragmatique » (position B), on trouve des discours qui ne visent pas spécialement à manifester la norme, mais bien à démontrer la nécessité de la propager. Nous trouvons par exemple sous cette catégorie les discours qui envisagent la question de l’enseignement du français dans les colonies nord-africaines. Les consensus de base de ces argumentaires sont 1) que le progrès est un idéal forcément universel, 2) que la langue française est un agent de civilisation forcément meilleur que tout autre pour atteindre cet idéal, 3) que les conditions actuelles du peuple arabe sont fortement éloignées de cet idéal. Le seul débat porte finalement sur la question de l’existence d’une « âme arabe », distincte de l’âme française, qui maintiendrait les Arabes « arriérés », « stérilisés ». L’alternative à cette opinion consiste à dire que les Arabes s’assimilent en réalité à la race blanche, dont ils possèdent l’intelligence, mais que des conditions climatériques particulières ont pu neutraliser. Quoi qu’il en soit, dans l’un et l’autre cas, la diffusion de la norme linguistique française vient justifier à elle seule l’entreprise coloniale, comme l’exprime Henry Bigot, professeur de lycée à Tunis : « Aucune entreprise n’est plus digne des Français du XXe siècle que celle de réveiller les Arabes du Moghreb [sic], de leur apporter non seulement nos méthodes pratiques d’agriculture et d’industrie, mais encore la conscience de leur humanité et les moyens de la développer. »16
26Autrement dit, la position du pragmatisme linguistique, portée toute entière par l’idéal de l’expansion d’une langue de civilisation, conduit à l’aveuglement sur les conditions d’exploitation des colonisés. Sans aucun cynisme, cet ancien maître des écoles arabes-françaises d’Algérie déclare ainsi :
« L’augmentation des effectifs [militaires] indigènes servira la cause de la langue française [...]. [...] Ces intelligents propriétaires [agriculteurs de Versailles et de Tours] font venir de Kabylie les moissonneurs et les vendangeurs supplémentaires qu’ils ne peuvent trouver sur place. / Les indigènes apprendront vite le français au contact de nos nationaux et se soucieront même d’arriver en France avec un petit bagage de mots et de phrases qu’ils augmenteront ensuite. »17
27Par ailleurs, on notera que de tels discours doivent se lire en regard de ceux qui, comme celui-ci, affirment la dépolitisation totale de la langue française :
« Nous avons dit jusqu’à quel point on peut séparer les intérêts de la langue française, devenue propriété internationale, de ceux de la France, dépossédée de l’usage exclusif de sa langue. D’autre part, des sentiments francophobes pouvaient avoir leur raison d’être lorsque la France était en situation de prétendre à l’hégémonie politique en Europe. À présent, que la France est devenue une nation résolument pacifique, de tels sentiments ne doivent plus exister. [...] Alors que la langue du conquérant ne se supporte qu’avec peine, la langue française serait admise avec empressement comme un gage de paix et de tolérance par toutes ces nationalités et amènerait bien plus sûrement l’unité. Cause de la suppression des conflits à l’intérieur des pays, la langue française préparerait aussi de cette façon la voie à la bonne entente entre les pays eux-mêmes. Ce serait l’acheminement vers la paix universelle, vœu sublime et ardent des peuples ! »18
28Pacificateurs universels par nature, le français et son expansion ne peuvent dès lors pas être soupçonnés d’impérialisme. Cette version dépolitisée du discours sur la langue sera évidemment à nouveau mobilisée après la décolonisation.
29Les positions situées en A), à l’extrémité du pôle « pragmatique », consistent à discuter des modalités pratiques et concrètes de la propagation de la norme. Il nous semble utile de souligner le paradoxe qu’elles révèlent : se prenant à rechercher les moyens pratiques les plus efficaces par lesquels assurer au français une place prépondérante, le proto-francophoniste reconnaît du même coup implicitement que cette place prépondérante ne peut lui être assurée « par nature ». Plusieurs proposent ainsi de corriger, par une « cure phonétique », les « vices de la parole » ; se formule également le souhait d’accroître le taux de natalité de la « race française ». Cette obsession du comptage nous semble être véritablement au cœur du projet francophone, dès ses premières formulations chez Onésime Reclus19. C’est d’ailleurs précisément cet attachement aux faits démographiques qui fait surgir, sous la plume de Reclus, le mot « francophones » et ici, chose amusante, le mot « francoloques ». Le pasteur liégeois qui examine les « causes et remèdes » de la régression du français dans le monde écrit en effet : « Au cours du XIXe siècle les francoloques ont passé du chiffre de 31,450,000 au chiffre de 53 millions [...] Pendant le même temps les angloloques passaient de 20,500,000 à 136 millions [...] »20. Il indique ensuite en note : « Qu’on nous permette ces néologismes commodes, préférables à ceux créés par El. [sic] Reclus qui écrit : francophones, etc. »
30Cette anecdote nous rappelle au passage, si besoin en était, que la francophonie – qui aurait donc pu être la « francoloquie » – est, dès ses premières formulations, une convention arbitraire postulée par souci de clarté dans le cadre d’un exposé démographique.
6. Positions critiques
31Il nous reste enfin à exposer le volet « critique » du continuum, catégorie particulièrement intéressante à observer, en ce qu’elle manifeste l’émergence d’une parole distanciée sur les réalités francophones, d’une démarche de connaissance, plutôt que de propagande, et dessine certaines des grandes perspectives de recherche qui pourraient être les nôtres aujourd’hui encore.
32Contrairement aux pôles descriptif et pragmatique, le volet critique consiste à mettre en question le projet d’expansion de la norme (position D), voire à mettre en question l’existence d’une norme transcendante, en tentant d’objectiver les conditions d’exercice de la tendance normalisatrice (position E). Ces voix restent relativement minoritaires dans le concert des rapports consignés. Nous pointerons ici trois discours qui nous semblent particulièrement significatifs de cette rupture posée entre le projet (proto-) francophone et le regard scientifique.
33Ainsi, Fernand Mallieux, avocat liégeois et docteur en philosophie, se demande, simplement : « Que suppose l’importance mondiale d’une langue ? »« Dans ce dédale de voies par où le réel pénètre les esprits, comment reconnaître et isoler l’influence d’un peuple et d’une langue ? » Ces interrogations sur les fondements et le sens même du congrès dans lequel il prend la parole le conduisent finalement à récuser la possibilité d’une action collective et concertée sur l’expansion de la langue française et, par là, à mettre en échec la caution scientifique que voulait se donner la pensée monologique : « Il est [...] vain de prétendre mesurer l’influence éducatrice d’une langue comme le français. [...] affirmer le recul ou l’avancement de la langue et des idées, c’est presque affaire de goût [...] »21. Dès lors, s’il garde sens à ses yeux, le projet francophone n’est plus qu’affaire de volonté personnelle, de sentiment intime qui pousse chacun, « suivant son état [économique, moral] » à s’investir pour le progrès du français :
« Aussi, en ce qui nous concerne dans le problème des destinées du français, vaut-il mieux prendre conscience que nous attendons tout d’une impulsion généreuse de la volonté, d’un acte de foi mis en rapport avec nos sentiments intimes, que nous confier à une formule d’apparence scientifique, recette peu rigoureuse, peu vraie, faible pour l’action, »22
34Cette rupture entre le projet francophone et le regard scientifique, thématisée dans le discours qu’on vient d’observer, est pleinement réalisée dans les exposés de Fernand Baldensperger et de Gonzague de Reynold. Le premier est le fameux comparatiste de renommée mondiale, qui mènera une brillante carrière universitaire aux États-Unis. Son discours au congrès d’Arlon envisage, sans spécialement les assumer, certaines « objections psychologiques à la diffusion de la langue française »23. En historien des civilisations, philologue et sociologue de la culture, il fait en effet état, en les contextualisant, de représentations attachées à la langue française (ou à la « langue de l’autre » en général) nettement moins positives que « la clarté », « la sincérité » ou « les vertus pacificatrices »24. Il rappelle ainsi qu’Allemands, Anglais, Italiens ou Russes peuvent être convaincus que le français est une langue perfide, corrompue et corruptrice, dont l’apprentissage consisterait, selon le mot de Tolstoï, en un « désapprentissage de la sincérité ». Autrement dit, Baldensperger démontre que la langue n’a pas qu’une vitalité interne, mais aussi une « vitalité extérieure ». Que celle-ci dépend des nécessités économiques et politiques, mais aussi des multiples représentations, variables et parfois contradictoires, que les usagers des langues y attachent, sans que l’observateur extérieur puisse avoir aucune prise sur ces représentations. Ce faisant, il ouvrait la voie à une sociolinguistique soucieuse de rendre compte des rapports de force sociaux entre langues (ou communautés linguistiques) en contact, mais aussi à une histoire des représentations linguistiques et des argumentaires déployés au service de ces représentations.
35Enfin, dans le domaine plus littéraire, c’est le discours du Suisse Gonzague de Reynold qui se distingue par sa modernité méthodologique et par la dissonance qu’il instaure à l’égard des conceptions dominantes sur la littérature, dont nous avons pu dire un mot tout à l’heure. Dans son exposé, ce spécialiste de la littérature suisse propose rien de moins qu’une justification et qu’un programme d’étude complet pour une histoire des littératures françaises hors de France. Sa démarche critique s’appuie sur un geste fort, qui consiste à suspendre, pour l’étude spécifique de ces littératures, la question de la valeur littéraire.
« Sans doute, les grands écrivains de la Belgique ou de la Suisse romande, par le fait qu’ils sont des écrivains français, appartiennent en premier lieu à l’histoire de la littérature française à laquelle nous n’avons pas le droit de les enlever. [À côté, ] [...] on se trouve [...] en présence d’une foule d’écrivains, de penseurs, les uns illustres, les autres obscurs, les uns doués, les autres médiocres, mais tous intéressants et significatifs, parce qu’ils représentent des collectivités. / La valeur purement littéraire de ces auteurs secondaires est généralement fort contestable. Mais ce n’est plus de ce point qu’il convient de les juger. La « manie du grand homme « est dangereuse [...]. C’est [...] socialement qu’il faut les étudier. Car l’étude des minores est souvent très importante : elle nous révèle, mieux parfois que celle des chefs d’œuvre, les habitudes, les tendances moyennes, mais vastes et puissantes, de groupes sociaux. »25
36Ce geste critique est d’une importance décisive, puisqu’il manifeste la construction du point de vue sociologique sur les littératures francophones périphériques. Et c’est ce point de vue, nous dit Reynold, qui s’avère le plus ajusté pour saisir le fonctionnement spécifique de ces collectivités littéraires. Prenant le contre-pied complet de la doxa pédagogique exposée plus haut, il plaide pour une étude de ces littératures qui prenne en compte leur ancrage géographique, historique, institutionnel, religieux et même leur rapport aux arts plastiques. De même, l’étude de « l’influence française » sur ces littératures ne pourra se contenter d’envisager simplement les transferts de formes, mais devra faire intervenir des paramètres explicatifs et médiateurs parmi lesquels la situation périphérique des littératures cibles et leur dépendance institutionnelle à l’égard de la France26. Enfin, Reynold va jusqu’à poser, en ces termes, la question de la langue d’écriture :
« [...] un Belge ou un Suisse romand, pour bien écrire, pour parler français, doit-il parler, doit-il écrire comme un Parisien, comme un Français de France ? Doit-il pourchasser impitoyablement, non seulement les incorrections, mais aussi les provincialismes, les archaïsmes, et même les germanismes, au risque de parler ou d’écrire d’une manière artificielle, d’une manière apprise ? »27
37Il invite ainsi le critique des écrivains hors de France à abandonner à leur égard une attitude puriste, pour reconnaître l’existence d’une gamme de solutions expressives propres à ces écrivains.
Conclusion
38Ce parcours était certainement trop rapide et trop allusif respectivement au volume de discours dont il ambitionnait de traiter. Chacune des quelques problématiques pointées ici mériterait sans aucun doute un examen approfondi, plus détaillé et plus nuancé que ce que nous avons pu l’être dans le cadre de cet article. Nous espérons néanmoins avoir pu mettre en évidence quelques conceptions (plutôt que concepts) liminaires du projet francophone et, surtout, les complexes discursifs et rhétoriques dans lesquels ces conceptions prenaient sens. Cette démarche a pu nous amener à saisir certaines des conditions d’émergence du regard distancié ou de l’effort de conceptualisation sur les réalités francophones.
Bibliographie
Bibliographie
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CHRISTOPHE Robert, « Aperçu historique de Malmedy », Art et histoire. De l’Occident médiéval à l’Europe contemporaine, 1997, p. 87-97.
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VERVLIET Raymond, « La Littérature flamande s’affirme », Histoire de la littérature belge francophone (1830-2000), s/s direction de Jean-Pierre Bertrand, Michel Biron, Benoît Denis et Rainier Grutman, avec la collaboration de David Vrydaghs, Paris, Fayard, 2003, p. 217-226.
Congrès international pour l’extension et la culture de la langue française. Première session, Liège, 10-14 septembre 1905, Paris – Bruxelles – Genève, Honoré Champion – P. Weissenbruch – A. Jullien, 1906.
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Id. Troisième session, Gand, 11-14 septembre 1923,Paris – Bruxelles – Genève, Honoré Champion – P. Weissenbruch – A. Jullien, 1914.
Notes de bas de page
1 Cf. M. Beniamino & L. Gauvin (dir.), Vocabulaire des études francophones. Les concepts de base, Pulim, 2005, p. 82-86.
2 L’intégralité des discussions et rapports issus de ces trois réunions majeures a été consignée et publiée en trois volumes successifs : Congrès international pour l’extension et la culture de la langue française. Première session, Liège, 10-14 septembre 1905, Paris – Bruxelles – Genève, Honoré Champion – P. Weissenbruch – A. Jullien, 1906 ; Id. Deuxième session, Arlon-Lwcernbourg-Trèves, 20-23 septembre 1908, id., 1908 ; Id. Troisième session, Gand, 11-14 septembre 1913, id., 1914. Dorénavant, nous référençons les extraits cités par la mention de l’auteur (lorsqu’il est mentionné), du titre, de la section (le cas échéant), de l’année du congrès (renvoyant au volume d’actes correspondant) et de la page (N.B. : la pagination des volumes recommence à 1 à chaque nouveau discours).
3 Notamment, en 1872, un rescrit impérial institue l’université allemande de Strasbourg.
4 P. Halen, « Une Littérature coloniale », Histoire de la littérature belge francophone (1830-2000), 2003, p. 230.
5 Cf. R. Christophe, « Aperçu historique de Malmedy », Art et histoire. De l’Occident médiéval à l’Europe contemporaine, 1997, p. 87-97.
6 Cf. R. Vervliet, « La Littérature flamande s’affirme », Histoire de la littérature belge francophone (1830-2000), 2003, p. 217-226.
7 Cf. A. Compagnon, La Troisième République des lettres. De Flaubert à Proust, Le Seuil, 1983.
8 On pointe également le nom du futuriste italien Marinetti. Il n’est pas exclu que leur présence s’explique par la tenue de l’Exposition universelle dans la même ville.
9 La présentation du personnel dénote un degré d’institutionnalisation croissant au fil des congrès : en 1908 se crée un Comité de Patronage, qui rassemble les élites politiques, universitaires et littéraires ; en 1913, sont représentés un Bureau permanent, un Comité d’action parisien et un Comité d’organisation belge.
10 Propos rapportés de M. Wilmotte, « Dimanche 10 septembre 1905. À l’Université », 1905, p. 22.
11 H. Bigot, « La Langue française et l’âme arabe », 1905, p. 5.
12 Propos rapportés de M. Gérard, « Dimanche 10 septembre 1905. À l’Université », 1905, p. 23.
13 Propos rapportés de B. Bouvier, Ibid., p. 24.
14 Propos rapportés de M. Kleyer, bourgmestre de Liège, « Dimanche 10 septembre 1905. À l’Hôtel de Ville », 1905, p. 27.
15 « Vœux adoptés par le Congrès d’Arlon », 1908, p. 90.
16 H. Bigot, « La Langue française et l’âme arabe », 1905, p. 3.
17 J.-H. Probst, « Les Meilleures méthodes d’enseignement et de propagation du français chez les Arabes de l’Algérie », IV-3, 1913, p. 21-22.
18 J.-A. Fürstenhoff, « Raisons plaidant en faveur de l’adoption du français comme langue auxiliaire internationale », IV, 1908, p. 16 et 22.
19 O. Reclus, France, colonies et Algérie, Hachette, 1886.
20 A. Rey, « La Langue française est-elle en régression dans le monde ? Causes et remèdes », 1905, p. 3.
21 F. Mallieux, « L’Universalité de la langue française. – Progrès ou régression ?
– Questions préliminaires. – Notes interrogatives », 1905, p. 2-5.
22 Ibid., p. 7.
23 F. Baldensperger, « Deux objections psychologiques à la diffusion de la langue française », 1908.
24 Par exemple : « [...] le français, par certaines de ses figures et certains de ses tropes préférés, hyperbole et litote par exemple, se prête autant aux détours de la diplomatie galante qu’il est propice en revanche, par la clarté de son vocabulaire même, à la rédaction des traités [...]. » (Ibid., p. 32.)
25 G. de Reynold, « L’Histoire de la littérature française dans les pays étrangers de langue française. Méthode et points de vue », III-1, 1913, p. 6-8 ; nous soulignons « grands écrivains ».
26 « [L’influence française] s’exerce [...] de façon indirecte, mais souvent plus profonde, sur tout ce qui est les sources mêmes de la vie et de la production intellectuelles – l’éducation, les habitudes et les coutumes sociales, l’existence publique et privée. [...] À côté de ces faits qui eurent des répercussions si manifestes sur les esprits et les mœurs, l’influence de la littérature, des formes littéraires, est beaucoup moins importante. » (Ibid., p. 11.)
27 Ibid., p. 16.
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