1 Cette idée reviendra dans les Salons de Diderot qui recourt aux expressions évocatrices « vision de près » (à propos des tableaux de Raphaël) et « vision de loin » (à propos des toiles de Rembrandt et de Chardin).
2 Cf. la définition de la peinture de Roger de Piles : il s’agit d’un « Art, qui par le moyen du dessein & de la couleur, imite sur une superficie plate tous les objets visibles » (en italiques dans l’original). Roger de Piles, LIdée du peintre parfait (1715), Paris, Gallimard, 1993, p. 14-15.
3 Plus exactement, à partir du XVIIe siècle, la notion du goût qualifie un comportement entre l’esthétique et l’éthique. Voir Claude Chantalat, À la recherche du goût classique, Paris, Klincksieck, 1992.
4 Cf. la tentative de réhabilitation de l’odorat par Chantal Jaquet qui a fait de ce sens négligé un objet d’investigation philosophique. Chantal Jaquet, Philosophie de l’odorat, Paris, PUF, 2010.
5 Il s’agit là du débat du mérite respectif des différentes branches artistiques, appelé paragone.
6 Léonard de Vinci, Traité de la peinture, trad. et prés. par André Chastel, Paris, Berger-Levrault, 1987, p. 90.
7 Voir à ce sujet Rensselaer Wright Lee, Ut pictura poesis. Humanisme et théorie de la peinture : XVe-XVIIIe siècles, trad. par M. Brock, Paris, Macula, 1994, p. 8.
8 Voir Volker Schröder, « Le langage de la Peinture est le langage des muets : remarques sur un motif de l’esthétique classique », dans Prospect n° 1 — Hommage à Elisabeth Sophie Chéron : Texte & Peinture à l’âge classique, Paris, Presses de la Sorbonne Nouvelle, 1992, p. 95-110.
9 Léonard de Vinci, op. cit., p. 90.
10 Ibid.
11 « Comme nous avons conclu que la poésie s’adresse en principe à l’intelligence des aveugles, et la peinture à celle des sourds, nous accorderons d’autant plus de valeur à la peinture par rapport à la poésie qu’elle est au service d’un sens meilleur et plus noble qu’elle. » Ibid., p. 89.
12 Cf. entre autres La Dioptrique de Descartes (Leyde, 1637). Sur la valeur paradigmatique du modèle pictural au XVIIe siècle voir Jacqueline Lichtenstein, La couleur éloquente. Rhétorique et peinture à l’âge classique, Paris, Flammarion, 1989, p. 129-151.
13 Marc-Antoine Laugier, Manière de bien juger des ouvrages de peinture (1771), Genève, Minkoff, 1972, p. 104.
14 Ibid., p. 2.
15 C’est Félibien qui formule, en 1667, dans sa Préface aux Conférences de l’Académie royale de Peinture et de Sculpture, le principe de cette hiérarchie. Cf. André Félibien, « Préface aux Conférences », in Alain Mérot (éd.), Les Conférences de l’Académie royale de peinture et de sculpture au XVIIe siècle, Paris, ENSB-A, 1996, p. 50.
16 La Vanité est née dans l’atmosphère intellectuelle de la ville calviniste Leyde où règne une idéologie réformée. Voir Charles Sterling, La nature morte de l’Antiquité au XXe siècle, Paris, Macula, 1985, p. 26.
17 Paul Claudel conçoit les natures mortes comme « un arrangement en train de se désagréger ». Cf. Paul Claudel, « Introduction à la peinture hollandaise » (1935), dans L œil écoute, Paris, Gallimard, 1946, p. 48.
18 En revanche, dans la peinture hollandaise du XVIIe siècle, l’illustration des cinq sens apparaît souvent sans aucune connotation philosophique, mais à travers une représentation satirique.
19 Bailly était le premier peintre à avoir imaginé des compositions formées d’un répertoire des symboles des sens. Voir Sterling, op. cit., p. 49. Sur l’iconographie de la Vanité voir Jan Białostocki, « Art et vanité », dans Style et iconographie. Pour une théorie de l’art, trad. par S. Brun-Fabry, Paris, Gérard Monfort, 1996, p. 181-220.
20 La tendance à l’allégorisation est également présente sur une autre composition de Linard conçue sur le motif des cinq sens, intitulée Les cinq sens et les quatre éléments. L’association des sens et des éléments, suggérée par le titre, établit des liens parfois surprenants – des correspondances et des miroitements – entre eux.
21 À propos de l’identité de Baugin, il faut noter que selon certains historiens de l’art – comme Charles Sterling –, Baugin (que Sterling considère comme le meilleur peintre français des natures mortes du XVIIe siècle) n’est peut-être pas identique à Lubin Baugin. Cf. Sterling, op. cit., p. 134.
22 Sterling note encore que les ombres dans les tableaux de Baugin accompagnent les objets comme « des échos tranquilles et profonds », ibid., p. 47.
23 Pour l’analyse de ce tableau voir Louis Marin, « Signe et représentation au XVIIe siècle. Notes sémiotiques sur trois natures mortes », Revue d’Esthétique, 4, 1971, p. 402-436.
24 Claudel, op. cit., p. 34.
25 René Démoris, Chardin, la chair et l’objet, Paris, Adam Biro, 1991, p. 144-145.
26 Cf. Lacombe qui affirme, en 1753, que de près, les tableaux de Chardin « n’offre[nt] qu’une sorte de vapeur qui semble envelopper tous les objets ». Jacques Lacombe, Le Salon, in Six pièces rares de l’année 1753, s. l., 1753, p. 34. Cf. aussi Diderot : « Approchez-vous, tout se brouille, s’aplatit et disparaît. Éloignez-vous ; tout se crée et se reproduit. » Denis Diderot, Salon de 1763, dans Salons de 1759, 1761, 1763, éd. par J. Chouillet, Paris, Hermann, 1984, p. 220.
27 Denis Diderot, Salon de 1767, dans Salons III. Ruines et paysages, éd. par E. M. Bukdahl, M. Delon, A. Lorenceau, Paris, Hermann, 1995, p. 173.
28 Comme le remarque Michel Serres : « Beaucoup de philosophies se réfèrent à la vue ; peu à l’ouïe ; moins encore donnent leur confiance au tactile, comme à l’odorat. L’abstraction découpe le corps sentant, retranche le goût, l’odorat et le tact, ne garde que la vue et l’ouïe, l’intuition et l’entendement. » Michel Serres, Philosophie des corps mêlés 1. Les cinq sens, Paris, Bernard Grasset, 1985, p. 23.