Chapitre II. L’application des traités pour l’unification du droit maritime
p. 85-101
Texte intégral
1Au cours de ce chapitre, on va tout d’abord étudier l’application par les États des traités édictés pour l’unification du droit maritime (section I).
2Mais il faut aussi aborder les problèmes qui peuvent se poser par rapport au rôle de certaines organisations internationales qui ont contribué à leur création (section 2). Enfin, une place d’exception doit être réservée à l’application qui en est faite par la jurisprudence soit étatique soit arbitrale, qui doivent édifier l’interprétation uniforme du droit maritime (section 3)
SECTION 1. L’APPLICATION DES TRAITÉS PAR LES ÉTATS
3Par principe, en droit international public les États sont souverains dans la manière de mettre en œuvre le traité auquel ils se sont engagés.
4Cette liberté a été parfois établie par disposition écrite au sein d’une Convention internationale. Cela fut le cas soit dans les Règles de La Haye de 1924 soit dans le Protocole de Visby de 1968195, bien qu’au sein des travaux préparatoires il ait été soulevé quelque perplexité sur le fait qu’il y ait vraiment besoin d’une telle disposition, chaque Etat demeurant libre de régler comme il veut toute affaire de droit interne196.
5Mais, selon un principe général du droit international, codifié dans la Convention de Vienne sur le droit des traités197, un État ne peut pas invoquer des dispositions de droit interne pour ne pas exécuter les obligations contractées avec les autres États contractants d’un traité international.
6Toute défaillance dans la mise en œuvre du traité entraîne donc une violation de celui-ci et engage la responsabilité internationale198 de l’État fautif. Cela autorise les autres pays contractants lésés à le sanctionner, notamment par les mesures typiques du droit international public codifiées dans la Convention sur le droit des traités199.
7Il est donc important d’analyser les méthodes de mise en œuvre des traités adoptés par les États, cette phase pouvant engager la responsabilité internationale d’un État qui applique le traité par des dispositions qui constituent une « violation d’une disposition essentielle pour la réalisation de l’objet ou du but du traité »200, ce but étant, dans le domaine des Conventions sur l’unification du droit maritime, l’achèvement de l’unification réelle du droit de fond dans les domaines concernés.
8Dans cette optique il nous faudra présenter les différents systèmes théoriques de mise en œuvre de cette application (§ 1) avant d’étudier les systèmes réellement en vigueur (§ 2).
§ 1. Les systèmes théoriques de mise en œuvre
9Dans un premier temps, il est intéressant de préciser les différents systèmes possibles de mise en œuvre des traités diplomatiques en droit interne, notamment en vue d’en apprécier la conformité aux instances d’unification du droit maritime dont on s’occupe. Ensuite, on analysera dans le détail le système adopté par un nombre de pays représentatifs de la communauté internationale maritime201.
10Il faut en fait remarquer que la distinction classique entre systèmes monistes (A) et dualistes (B) ne trouve pas d’application dans les ordres juridiques modernes, de façon telle que l’analyse qui suit doit être appréciée en tant que posant les données du problème, tout en étant conscients que la réalité du droit positif en vigueur est dominée par l’existence de systèmes mixtes (§ 2).
A. Le système moniste
11Il faut ici distinguer entre monisme des fonctions (a) et monisme normatif (b).
a) Monisme des fonctions
12C’est le premier système qui est apparu, par lequel le traité constitue une source de droit tant en droit international qu’en droit interne.
13L’exemple de « monisme » dans la distribution du pouvoir politique nous est donné par les Etats autoritaires, où le souverain pouvait, à la fois, conclure des accords internationaux et poser les règles de droit interne, sans aucun contrôle ni distribution du pouvoir politique202.
b) Monisme normatif
14Après la mise en place des systèmes constitutionnels fondés sur la séparation des pouvoirs, le « monisme » tel qu’il a été connu sous l’empire des absolutismes politiques a été dépassé par des formes de « monisme normatif », qui envisagent une certaine participation du Parlement à la stipulation des traités, à l’instar des systèmes inspires au « dualisme des fonctions ».
1511 n’en reste pas moins que le « monisme normatif » aujourd’hui en vigueur demeure différent, par rapport à chaque État concerné, selon le degré de participation du Parlement mais, aussi, selon le système constitutionnel visé. Le problème ne se pose plus du côté des compétences fonctionnelles des organes de l’État, mais plutôt du côté de la nature juridique du droit qui est appliqué en droit interne.
16Vu la participation commune du Parlement dans les systèmes de droit modernes, il faut désormais se tourner vers la nature juridique qui est conférée aux traités lors de leur application en droit interne203. On verra alors qu’il y a pas mal d’analogies parmi des systèmes qu’on considérait traditionnellement « dualistes » et d’autres qu’on appelait « monistes ». Sur la base de ce raisonnement, on a alors visé, au chapitre où l’on aborde les systèmes de mise en œuvre dans certains grands États maritimes, des systèmes de droit qu’on peut appeler « apparemment dualistes »204.
17Mais on va remarquer que, parmi les États qui gardent un système dit « dualiste », comme le Danemark et le Royaume Uni, il y a aussi une évolution, surtout dans la pratique des tribunaux et des autorités administratives, vers l’application directe des dispositions du traité pour éviter le conflit avec les engagements internationaux de l’État.
B. - Le système dualiste
18La distinction entre doctrine allemande (a) et italienne (b) doit être posée.
a) La doctrine allemande du « dualisme des fonctions »
19A partir du xixème siècle, en Europe, plusieurs Constitutions nationales ont adopté des articles par lesquels le pouvoir du souverain d’engager l’État par des accords internationaux était limité.
20La théorie dualiste a avancé, en particulier, dans l’environnement juridique allemand, depuis la Constitution de 1871, selon laquelle les traités stipulés par le souverain n’auraient pas eu d’efficacité dans l’ordre juridique interne sans l’autorisation du Parlement, quand ils auraient touché à la sphère législative. Tout d’abord Laband et ensuite Jellinek ont ainsi forgé les théories dualistes allemandes qui distinguent entre la phase de la stipulation et celle de l’exécution, sans pour autant entraîner l’impossibilité structurelle que les normes internationales soient efficaces en droit interne205.
b) La théorie italienne du « dualisme structurel »
21En Italie, l’article 5 de la Constitution de 1948 prévoyait, à l’instar de l’article 68 de la Constitution belge de 1831, que les traités qui comportaient des dépenses financières ou des modifications du territoire de l’État ne pouvaient avoir d’effet qu’après le consensus du Parlement.
22En l’absence d’une norme constitutionnelle telle que l’article 11 alinéa 3 de la Constitution allemande de 1871, qui réservait la sphère entière de compétence du Parlement des intrusion par l’exécutif, la doctrine italienne (Anzilotti, Donati) développa une théorie dualiste « structurelle », sur la base de laquelle les ordres juridiques interne et international étaient comme des cercles distincts qui ne se croisaient jamais.
§ 2. Les systèmes en vigueur
23La doctrine a depuis longtemps mis en évidence qu’il n’existe guère de systèmes juridiques en vigueur appliquant l’un de ces modèles à l’état pur. On observe plutôt des formes mixtes entre les deux, selon les dispositions constitutionnelles de l’État concerné.
24Le dépassement du contraste net entre les théories monistes et celles dualistes est dû probablement, hormis la diffusion du principe constitutionnel de la séparation de pouvoirs, qui a mis fin au « monisme des fonctions », aux évolutions souvenues dans la qualification de la nature juridique de 1’« ordre d’exécution » au sein des juridictions dualistes.
25Les théories « normatives » originaires, qui envisageaient dans cet acte un instrument de « production juridique » à l’instar de toute autre source législative de droit interne, ont en fait laissé la place aux théories « non-normatives », selon lesquelles il s’agirait d’un procédé spécial et alternatif à la production législative ordinaire, par lequel le traité est introduit dans l’ordre juridique étatique en gardant sa nature de droit international206. C’est ainsi qu’on a parlé, en doctrine, d’un schéma qui rappelle le système dualiste sous l’aspect du partage des fonctions (dualisme des fonctions) mais qui, en même temps, ressemble à celui moniste du côté normatif (monisme normatif)207.
26Mais il n’est pas possible de faire un rapport de synthèse de façon théorique des systèmes de mise en œuvre des traités par les États sans regarder en détail leur dispositions constitutionnelles dans ce domaine, là où elles existent, ou, en absence, la pratique en vigueur208.
27De plus, aujourd’hui la matière est compliquée par la mise en place d’un nombre d’organisations internationales interétatiques, qui agissent en tant qu’organisations productrices de normes de droit. 11 est donc nécessaire d’aller voir de quelle manière ces organisations entaillent la dynamique de la mise en œuvre des normes internationales en droit interne.
SECTION 2. L’APPLICATION DU DROIT ISSU DU TRAVAIL DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES
28Parmi les organisations internationales, certaines limitent leur travail au seul stade consultatif, ou de promotion des conventions internationales, comme l’OMI (§ 1), tandis que d’autres, comme la Communauté Européenne, évoluent en véritables ordres juridiques portant leur propre droit dérivé (§ 2).
29En ce qui concerne la conception du droit dérivé des organisations internationales par rapport au droit étatique, celle-ci dépend du système constitutionnel de l’État concerné. Pour certains États, il ne s’agit que d’une extension du traité constitutif de l’organisation ou bien d’un nouveau droit conventionnel dont l’introduction suivra les techniques prévues pour les traités209. Pour d’autres, il peut s’agir par contre d’un « transfert de compétences souveraines », ou d’une « limitation de la souveraineté » en faveur des organisations internationales210. Quoi qu’il en soit du système constitutionnel visé, la pratique nous montre que les actes normatifs des organisations internationales ne sont pas ignorés par les États qui en font partie. Le système de mise en œuvre de ceux-ci peut pourtant se distinguer en « réception directe » par seule publication211, ou application qui nécessite un acte législatif général ou spécifique212.
30L’analyse faite au cours du présent ouvrage ne va concerner seulement l’incidence du travail des organisations internationales, dans le droit interne des États membres, dans le domaine spécifique du droit maritime. Il s’ensuit que le plan de la recherche est certainement limité aux organisations internationales qui relèvent du droit maritime.
§1. Le rôle de l’OMI
31L’organisation internationale qui vise de façon majeure le droit maritime est l’OMI.
32Établie par une Conférence à Genève en 1948 et entrée en vigueur en 1958, le but de cette organisation est celui de promouvoir la conclusion de traités dans le domaine de la sécurité maritime et de la lutte contre la pollution213.
33À partir de 1967, avec le désastre du “Torrey Canton”, cette organisation a commencé à intervenir en droit privé maritime, avec l’institution du Legal Commettee, alors qu’auparavant elle avait opéré seulement dans le domaine du droit public et des réglementations techniques. A partir de cette époque, l’OMI est devenue le protagoniste de l’unification conventionnelle du droit maritime. Elle a ainsi œuvré pour la promotion des Conventions internationales. Par contre, l’OMI ne s’intéresse pas à la mise en œuvre des réglementations adoptées, laissée aux États participants.
34Hormis les Conventions de droit maritime adoptées sous son initiative, l’ouvrage de l’OMI demeure fondamental en ce qui concerne la création et la mise à jour des standards maritimes internationaux.
35Il s’agit des mesures, dont le caractère est surtout technique, posées dans les différents domaines fondamentaux dans le droit maritime, comme la sécurité maritime et la lutte contre la pollution214.
36Ce travail est mené par les Comités spécialisés de l’OMI comme le Comité sur la sécurité maritime (MSC) et le Comité sur la protection de l’environnement (MEPC). C’est grâce à ses Comités spécialisés que l’OMI est une source très prolifique de réglementations maritimes, regroupées parfois dans des Codes, qui rassemblent les standards maritimes auxquels les navires ou les armateurs doivent se conformer.
37La production de ces standards est menée sur la base des traités promus par l’OMI, dont ces réglementations spécifiques constituent généralement les annexes. C’est le cas, en matière de sécurité maritime, de la Convention SOLAS215, qui dédie aux mesures techniques douze chapitres en annexe. En matière de prévention de la pollution, c’est le cas de la MARPOL ‘73/’78216, qui compte six annexes.
38Les standards maritimes étant posés dans la même forme de la Convention et avec le même effet normatif des traités auxquels ils sont annexés, chaque amendement des mesures techniques est donc soumis aux mêmes règles d’amendement des conventions internationales.
39La nécessité d’opérer une rapide et efficace mise à jour de celles-ci pour tous les États contractants, en gardant ainsi l’uniformité des standards en vigueur, a conduit l’OMI à mettre en place une procédure d’amendement par approbation tacite, qui sera appliquée aussi pour la révision des montants prévus par la LLMC, la CLC, la Convention d’Athènes sur le transport de passagers. Par le biais de cette procédure simplifiée, les amendements à la partie technique des Conventions peuvent être adoptés plus aisément217, sans attendre le consensus de toutes les parties contractantes.
40A titre d’exemple on peut signaler l’amendement du chapitre 9 de la SOLAS218, qui rend obligatoire le Code ISM adopté par l’OMI en novembre 1993219, fondamental pour son incidence sur les obligations des armateurs et sur leur responsabilité220.
41Un exemple dans le domaine de la pollution est l’amendement à l’article 13 G de l’annexe I à la MARPOL ‘73/’78, adopte le 27 avril 2001 par le Comité pour la protection de l’environnement marin et entré en vigueur le 1er septembre 2002, qui a posé un calendrier accéléré pour la mise hors loi des pétroliers qui ne sont pas en double coque221.
42Cela dit en ce qui concerne l’adoption des standards maritimes, il faut rappeler que leur mise en œuvre est laissée aux États contractants.
43Une assistance dans cette phase a été mise en place depuis 1992 par l’institution du Sub-Commettee on Flag Implementation, en faveur de tous les pays qui le nécessitent, pour la mise en œuvre des standards, en assurant par là-même leur application uniforme. Puisque l’interprétation du droit maritime par les autorités judiciaires et administratives dépend largement de sa mise en œuvre en droit interne, quand il est issu de sources extérieures à l’ordre juridique étatique, l’importance de la tâche confiée à ce sous-comité est évidente. Son institution se pose ainsi dans le nombre des mesures prises, à l’heure actuelle du droit positif, pour favoriser l’interprétation uniforme du droit maritime et l’unification dans la phase de l’application de celui-ci222.
44Pour assurer le respect des standards par les États et donc leur application réelle, l’OMI adopte la technique des certifications obligatoires à bord des navires et celle du contrôle de l’État du port sur les navires étrangers. Le pouvoir de l’État du port se concrétise dans des droits d’inspection sur les navires étrangers et dans l’interdiction d’accès aux navires qui ne se conforment pas aux standards établis. Il s’agit ici des mesures posées au sein de l’OMI pour assurer l’efficacité du droit créé, par l’application de celui-ci au niveau étatique, chaque État demeurant souverain dans l’espace de sa juridiction. À défaut, il n’y aurait d’autres sanctions envisageables que celles tirées du droit international coutumier, codifiées au sein de la Convention de Vienne de 1969.
§ 2. La Communauté Européenne
45La Communauté Européenne, parmi les différentes organisations internationales existantes, constitue une exception dont la spécificité a été unanimement reconnue. Il s’agit en fait d’une organisation dont certaines sources de droit dérivé sont directement applicables dans les États membres et dont le rang hiérarchique est supérieur aux lois de droit interne223. L’uniformité d’interprétation et d’application par les tribunaux étatiques du droit communautaire est assurée par la CJCE, qui peut être saisie224 par tout juge national, lors d’un doute sur l’interprétation d’une règle communautaire, avant son application.
46Le rôle de la Communauté Européenne peut être très important au niveau de la mise en œuvre du droit international ou du droit dérivé des organisations internationales lorsque ceux-ci relèvent de sa compétence ou, même lorsque la Communauté a participé à ceux-ci sur la base de sa « compétence extérieure »225 Le treaty making power de la Communauté Européenne est en fait désormais très étendu, sa compétence dans ce domaine ayant été synthétisée, d’après l’affaire ERTA, par la formule latine « in foro interna, in foro esterno »226.
47Le treaty making power de la Communauté est d’ailleurs destiné à s’élargir, suite aux pouvoirs reconnus à la CE, en tant que « personne morale », par la nouvelle Constitution signée à Rome le 29 octobre 2004.
48Il pourra y avoir, alors, une mise en œuvre de ces instruments internationaux par le biais du droit communautaire, ce qui aura partant l’effet de permettre l’unification des mesures d’application de ces sources de droit international par rapport aux États de la Communauté227. Cet effet sera autant plus fort par rapport à l’application des traités qui sont conclus par la Communauté elle-même et qui sont introduits dans l’ordre communautaire par acte formel du Conseil, une décision ou plus souvent un règlement, publié au Journal Officiel des Communautés Européennes avec le texte du traite228.
49Il faut cependant remarquer que l’introduction dans l’ordre communautaire des accords conclus par la Communauté sur la base de son treaty making power amène la possibilité d’un conflit avec les autres sources communautaires. Il s’agit d’une question qui vise tout d’abord l’approche de la nature juridique de l’accord introduit dans l’ordre juridique communautaire et, ensuite, son rang hiérarchique parmi les sources de droit communautaire. En ce qui concerne le premier aspect, il faut avouer que l’accord international conclu par la Communauté maintient son « individualité » par rapport au droit communautaire et il n’est pas « transformé » en celui-ci. De sa nature juridique particulière et spécifique il découle que le droit communautaire en conflit peut être sanctionné d’invalidité par la CJCE229. En ce qui concerne le rapport avec d’autres sources des États membres en conflit, la primauté de l’accord international est un phénomène normal dans ceux qui reconnaissent toujours aux traites une force supérieure aux lois internes. La particularité vise plutôt les systèmes, comme celui du Royaume Uni, qui ne connaissent pas normalement cette primauté, par rapport auxquels il s’avère alors que ces accords jouissent d’une force certaine dès qu’ils appartiennent à l’ordre juridique communautaire, dont la primauté sur la législation étatique est désormais reconnue dans tous les États membres230.
50En droit maritime ont été mises en place une série de directives et d’autres actes communautaires, par une démarche autonome après le désastre des pétroliers Erika et Prestige, mais on est désormais près de l’adhésion de la CE à l’OMI231. Dès sa participation directe à l’OMI, la CE pourra jouer tout son poids non seulement au niveau de la mise en œuvre des actes de celle-ci232, mais de la formation de cette réglementation internationale aussi.
SECTION 3. L’APPLICATION PAR LA JURISPRUDENCE
51On a vu que les traités diplomatiques font l’objet d’une mise en œuvre par les États, qui relève de leur système constitutionnel. Il s’agit donc de dispositions de droit interne, écrites ou coutumières, qui posent les conditions pour la mise en œuvre des Conventions internationales en droit interne, avec l’exception qu’on a observé par rapport au droit dérivé des organisations internationales. Mais la mise en œuvre en droit interne, au fond, ne signifie rien d’autre que l’application des normes des traités par les organes étatiques administratifs ou judiciaires.
52Le droit maritime ayant une forte vocation commerciale, les rapports de droit le concernant sont constitués pour la plupart par les relations du commerce international entre professionnels. Ces relations sont fortement marquées par les usages et les pratiques commerciales des secteurs concernés, auxquels les professionnels se conforment de façon autonome, pour ne pas risquer leur crédibilité sur le marché, ou des sanctions posées par leurs associations ou par des organismes tiers. Ainsi, les conflits sont souvent dirimés par le recours aux arbitres. Toutefois, cette matière qui relève du cadre commercial et qui a pu faire songer à une « nouvelle lex mercatoria », n’enlève pas la nécessité d’assurer le respect du droit aussi par des autorités capables d’imposer leur décision par la force exécutoire.
53Il est donc nécessaire que le droit maritime qu’on a voulu unifier par le biais de l’adoption des conventions internationales ne soit pas atteint par une fragmentation de l’uniformité acquise lors de son application concrète par les juges. Le but de l’unification réelle du droit maritime ne peut être achevé, en fait, que par son interprétation uniforme par la jurisprudence qui l’applique aux cas concrets. L’uniformité d’interprétation et d’application du droit maritime doit être cherchée, alors, soit par rapport à la jurisprudence arbitrale (§ 2), soit par rapport à celle étatique (§ 1). il s’agit dans tous les cas d’assurer l’application du droit maritime sans discrimination parmi les opérateurs du commerce maritime international.
§ 1. Jurisprudence étatique
54Quoi qu’il en soit de la conception du droit maritime, c’est-à-dire, selon la doctrine des tenants de « la nouvelle lex mercatoria » ou celle des « positivistes kelseniens » plus convaincus, un rôle fondamental est toujours mené par la jurisprudence étatique. Seul le juge national a le pouvoir de mettre en place des décisions ayant force exécutoire et dont le respect est assuré par l’assistance de la « force publique ».
55L’application des traités diplomatiques par les juges étatiques dépend du système constitutionnel de l’État du for. Selon que le système adopté est plutôt dualiste, ou plutôt moniste, compte tenu du fait que dans la réalité on ne trouve pas de tels systèmes « à l’état pur », l’application du traité par le juge sera différente. Dans le premier cas, le juge sera influencé par la conception nationale du droit, le traité étant « transformé » en droit interne. Dans le deuxième cas, par contre, le juge appliquera directement le traité international en tant que source de droit dont la nature juridique demeure « internationale ». La réalité est tout de même compliquée, notamment par le fait que les systèmes en vigueur sont « mixtes ». L’aptitude des juges devra donc être appréciée par rapport à chaque État, au cas par cas233.
56Mais l’application du traité par le juge étatique dépend aussi de certaines qualités de celui-ci, parmi lesquelles l’une des plus importantes est le fait qu’il soit ou non directement applicable, c’est-à-dire savoir s’il nécessite d’une discipline complémentaire pour sa mise en œuvre. Celle-ci, en effet, ne peut qu’être donnée dans le ressort de l’ordre juridique étatique, avec les conséquences qui dérivent, sur l’interprétation du traité, de son introduction en droit interne par une source de droit nationale dans les systèmes dualistes. C’est la question de savoir si un traité est « self-executing » ou non.
57Puisqu’on reviendra plus tard sur cette question fondamentale234, on dira seulement, pour l’instant, que l’appréciation de la qualité de « self-executing » d’un traité est l’œuvre, normalement, des tribunaux. Au fond il s’agit en fait d’une question d’interprétation, dont la tâche relève, comme il a été mis en évidence dans un important travail de droit comparé, du « juge ou autorité administrative appelée à appliquer le traité » qui doit « apprécier la nature de ce dernier sous le contrôle, toutefois, des juridictions supérieures »235.
58Une fois ces questions résolues, l’analyse de l’application des traités diplomatiques par les juges étatiques doit distinguer le cas des traités qui ont été ratifiés par l’État du for et, lorsque cela est nécessaire, introduits dans l’ordre juridique par des sources de droit interne, de celui où le traité, bien qu’existant au niveau international, n’appartient pas à l’ordre juridique du for, ou même le cas extrême où le traité n’est pas entré en vigueur au niveau international. 11 s’agit ici de voir la place hiérarchique qui est reconnue au traité dans chacun des cas mentionnes notamment au regard des autres sources de droit interne, comme en particulier par rapport aux règles de conflit. Toutes ces questions feront l’objet d’une analyse plus détaillée dans la suite de cette étude236.
59Pour l’instant, notre attention doit porter, pour ce qui concerne l’application des traités pour l’unification du droit maritime par les juges, sur la nécessité d’en assurer l’interprétation uniforme, même si celle-ci ne constitue pas une valeur absolue, puisqu’il s’agit d’un élément qui doit être apprécié par rapport à l’instrument de droit uniforme considéré. Parfois des dispositions identiques doivent être interprétées de façon différente puisqu’elles sont posées dans des contextes différents, ou parce que le traité en question ne permet pas d’introduire une discipline substantielle commune, c’est-à-dire qu’il n’est pas édifié pour l’unification d’un certain domaine du droit237. On peut donner, à ce sujet, l’exemple de l’arrêt Polydor238 de la CJCE, dans lequel la Cour a dénié l’interprétation uniforme de deux dispositions similaires relevant de deux traités différents. Dans notre domaine, il est par contre clair que l’interprétation uniforme doit être poursuivie, puisque seule son application uniforme peut satisfaire les instances auxquelles l’unification du droit maritime veut répondre. Les conventions de droit maritime, en fait, peuvent être groupées sur la base du but poursuivi, qui est communément constitué par le souci de promouvoir l’unification.
60Souvent, l’unification du droit maritime a été atteinte par la carence d’interprétation et d’application uniforme des conventions par les juges nationaux, ce qui a conduit aussi à la nécessité d’une clarification des textes internationaux par des Protocoles d’amendement.
61C’est ainsi, par exemple, qu’il y a longtemps eu une forte carence dans l’interprétation uniforme du champ d’application des Règles de la Haye, due notamment à l’ambiguïté des dispositions le concernant. Le problème se posait au regard de la nationalité des parties. Il était douteux si la Convention s’appliquait aux transports entre nationaux ou s’il y avait la condition de 1’« internationalité subjective » du rapport239. Les tribunaux italiens et français penchaient pour l’affirmative, tandis que ceux d’autres pays tels la Belgique et la Hollande ne faisaient aucune distinction sur la base de la nationalité des parties ni du navire. Le doute fut éliminé par l’amendement de l’article 10 lors du Protocole de Visby.
62Une autre interprétation douteuse par rapport aux Règles de La Haye était celle qui concernait la valeur probante du connaissement. Suite à l’entrée en vigueur de la Convention de Bruxelles de 1924, il y avait eu certaines décisions jurisprudentielles qui avaient admis que le transporteur pouvait rapporter la preuve contraire du connaissement face au tiers porteur de bonne foi. Cette interprétation du texte de la Convention était contraire aux pratiques et usages maritimes en vigueur. En outre, le principe de la valeur absolue du connaissement dans les mains du tiers porteur de bonne foi avait été reçu par beaucoup de législations nationales240. Dans les pays anglo-saxons, c’était la jurisprudence qui, par tradition, n’admettait pas que le transporteur puisse rapporter la preuve contraire du connaissement. C’est le cas surtout de la stopping evidence doctrine développée en Angleterre, d’après laquelle le fait que les marchandises aient été embarquées en bon ordre et en bon conditionnement empêcherait l’armateur de plaider le contraire envers un tiers de bonne foi auquel le connaissement aurait été endossé moyennant une contre-valeur. L’interprétation contraire aux usages maritimes gênait particulièrement au commerce maritime, puisqu’elle entachait la valeur du connaissement en tant que titre de crédit négociable. C’est ainsi que ce problème fut examiné au sein de la Commission sur les clauses des connaissements à la Conférence du CMI de Stockholm241, à l’issue de laquelle fut approuvée la proposition d’ajouter au § 4 le texte suivant : « toutefois la preuve contraire n’est pas admise lorsque le connaissement a été transféré à un tiers porteur de bonne foi ». Ce texte fut enfin approuvé par la Conférence diplomatique et inséré dans l’article 1 du Protocole de Visby. Le but fut ainsi poursuivi de rendre uniforme et générale une interprétation qui était d’ailleurs déjà admise dans la plupart des pays et qui était issue des usages maritimes242.
63Pourtant d’autres doutes demeurent et peuvent affecter l’interprétation uniforme par les juges. Tel est le cas de l’article 1 b) des Règles de La Haye, qui définit le « contrat de transport » en citant, après les connaissements, aussi les « documents similaires formant titre pour le transport des marchandises ». La difficulté avait déjà été mise en évidence lors de la rédaction du texte, pour le fait de la non correspondance de cette traduction française avec le texte anglais qui disait documents of title, in so far as such document relates to carriage of goods by sea243. Cette difficulté se reflète aujourd’hui dans les doutes quant à l’application des Règles à des contrats de transport constatés pas des documents d’emploi commun, tels le sea waybill244, hors des pays qui ont étendu le champ d’application des Règles à ceux-ci245.
64L’interprétation uniforme est donc le moyen par lequel les traités pour l’unification du droit maritime peuvent réellement achever leur but déclaré. C’est ainsi qu’elle doit caractériser les traités pour l’unification dans la phase de leur mise en oeuvre, soit par les États, soit par la jurisprudence. Toute entrave dans l’une de ces phases peut compromettre la réussite finale, consistant dans la mise en place non seulement d’un droit positif uniforme visant à unifier certains domaines du droit maritime, mais encore d’un « droit vivant » réellement unifié. Pour que cela soit possible, des démarches doivent être entreprises. Si certaines font d’ailleurs déjà partie de notre réalité quotidienne, d’autres demeurent fortement souhaitables à l’état actuel du droit positif.
65Parmi ces démarches souhaitables, il faut mentionner la contribution que la doctrine doit donner dans l’interprétation du droit maritime, pour conduire tous ceux qui doivent l’appliquer à ne pas confondre des faux problèmes avec des différences réelles de droit. 11 peut se passer en fait, comme la recherche de Schlesinger mentionnée auparavant l’a mis en évidence, une même circonstance, concernée par une source formelle dans un ordre juridique, ne soit pas considérée comme telle dans un autre ordre juridique. On a pu observer que les mêmes éléments qui, dans un ordre juridique, jouent de façon officielle, peuvent agir de façon « occulte » ou inconsciente dans un autre, sans que le résultat final ne soit pour autant différent, la solution concrète étant, au final, la même246. C’est alors la tâche de la doctrine que de déceler ces fausses différences du droit parmi les États, amenées par une conception incorrecte des sources247. La doctrine conduira ainsi elle-même dans une certaine mesure à l’unification du droit maritime par le biais d’une interprétation reconnaissant sa vraie essence dans la pluralité des sources qui le concernent248, et dont la variété multiforme échappe à toute construction « positiviste étatique », qui ne reconnaît que les sources formelles relevant de l’ordre juridique national249.
66C’est ainsi que l’on s’efforcera, par la suite, de tirer une interprétation uniforme des mêmes expressions employées au sein des traités pour l’unification du droit maritime, quand cela sera possible, compte tenu du contexte dans lequel elles ont été employées, comme, par exemple, par rapport à la notion de « faute inexcusable », qu’on trouve dans plusieurs conventions internationales pour l’unification du droit maritime, et qui embrasse les actes accomplis « soit avec l’intention de provoquer un dommage, soit témérairement, et avec conscience qu’un dommage en résulterait probablement », et auxquels se réfère la formule anglaise « recklessly and with knowledge that damage would probably result »250.
§ 2. Jurisprudence arbitrale
67Pour ce qui concerne les arbitres, il faut rappeler qu’une large partie de la doctrine dite « de la nouvelle lex mercatoria » leur confère un rôle « créateur » du droit. Ce courant doctrinal s’appuie sur le constat que « il n’existe pas de législateur international présidant positivement à la naissance de règles de droit aptes à régir les rapports naissant au sein des opérateurs du commerce international »251. Il en découle ainsi que la branche du droit considérée est riche de lacunes dont le comblement serait confié largement à l’ouvrage créateur de l’arbitre. Par rapport à celui-ci, il a en fait été mis en évidence que « la fonction d’interprétation confiée à l’arbitre est indéniablement à l’origine de l’énoncé des principes dont la véritable autorité normative est sans conteste l’organe d’application du droit du commerce international, soit, en ce qui nous concerne, l’institution arbitrale »252.
68Plus généralement c’est l’activité d’interprétation et d’application du droit qui est estimée « créatrice ». C’est ainsi que cette doctrine se réfère à un droit en quelque sorte « prétorien », c’est-à-dire issu de l’activité des arbitres en tant qu’acteurs d’une activité « normative »253. Ce sentiment est bien exprimé aussi par M. Mayer ainsi que cité par M. Osman254.
69M. Pierre Mayer, comme on peut le constater, pose l’accent sur l’œuvre unificatrice poursuivie aussi par la jurisprudence arbitrale. En reconnaissant en fait la naissance d’une vraie jurisprudence arbitrale255, il affirme « le rôle créateur des arbitres » en ajoutant que « il est légitime que les juges principaux du commerce international participent à la création et à l’unification du droit qui lui convient »256. Cette action unificatrice a d’ailleurs été poursuivie particulièrement en droit maritime, grâce à la Society of Maritime Arbitrators257, qui public les arrêts des arbitres et en permet ainsi la connaissance, pour favoriser l’interprétation uniforme du droit maritime.
70Ainsi, s’il est incontestable de reconnaître l’importance de l’application des traités pour l’unification du droit maritime par les États, par les organisations internationales, par la jurisprudence étatique, ou par les arbitres, il n’en demeure pas moins que certains inconvénients, liés notamment au processus de codification, subsistent.
Notes de bas de page
195 V. Protocole de Visby de 1968, art. 16 ; V., égal., Protocole de signature, al. 2. des Règles de La Haye de 1924.
196 Ce doute tut soulevé par la délégation française, voir l’intervention de M. BRESSON à la Conférence diplomatique de Stockholm, séance plénière, 22 février 1968, procès verbal p. 140 : « Nous savons tous que, suivant les États, les conventions internationales sont incorporées dans le droit interne de manière différente. Pour certains d’entre nous il suffit qu’une convention internationale soit régulièrement ratifiée pour être du fait même incorporée au droit interne, pour d’autres États, la convention doit se trouver reproduite sous forme de dispositions de droit interne. Mais j’ai le sentiment que tout ceci est précisément une affaire de droit interne. Nous n’avons pas l’habitude de trancher ce genre de problème dans la Convention internationale elle-même. Je ne suis donc pas convaincu pour ma part que l’amendement qui nous est soumis soit indispensable. J’ai plutôt tendance à penser que si nous ne disons rien sur ce sujet dans la Convention, chaque Etat procédera pour la mise en application de la Convention suivant les exigences de son droit interne à cet égard. Je demande donc une fois de plus s’il est réellement indispensable que nous délibérions sur cet amendement et que nous tranchions ce problème dans le cadre de la présente Conférence. C’est donc plutôt un point d’interrogation que je pose à la Conférence avec votre permission. Monsieur le Président. », The Travaux Préparatoires of the Hague Rules, précit., p. 779.
197 Convention de Vienne sur le droit des traités, 23 mai 1969, article 27 : « Droit interne et respect des traités Une partie ne peut invoquer les dispositions de son droit interne comme justifiant la non-exécution d’un traité. Cette règle est sans préjudice de l’article 46 ».
198 V., pour un approfondissement de la notion de responsabilité internationale, R. AGO, Scrini sulla responsabilità internazionale degli Stali. Il, 1, Jovene Editore, 1986, p. 765 et s. ; V., égal., P. -M. DUPUY, Droit des traités, codification et responsabilité internationale. AFDI. Paris. 1997. n. 7 et s.
199 Cf. Convention de Vienne sur le droit des traités, 23 mai 1969, article 60 : « Extinction d’un traité ou suspension de son application comme conséquence de sa violation 1. Une violation substantielle d’un traité bilatéral par l’une des parties autorise l’autre partie à invoquer la violation comme motif pour mettre fin au traité ou suspendre son application en totalité ou en partie. 2. Une violation substantielle d’un traité multilatéral par l’une des parties autorise :
a) les autres parties, agissant par accord unanime, à suspendre l’application du traité en totalité ou en partie ou à mettre fin à celui-ci :
i) soit dans les relations entre elles-mêmes et l’Etat auteur de la violation,
ii) soit entre toutes les parties ;
b) une partie spécialement atteinte par la violation à invoquer celle-ci comme motif de suspension de l’application du traité en totalité ou en partie dans les relations entre elle-même et l’Etat auteur de la violation ;
c) toute partie autre que l’Etat auteur de la violation à invoquer la violation comme motif pour suspendre l’application du traité en totalité ou en partie en ce qui la concerne si ce traité est d’une nature telle qu’une violation substantielle de ses dispositions par une partie modifie radicalement la situation de chacune des parties quant à l’exécution ultérieure de ses obligations en vertu du traité.
3. Aux fins du présent article, une violation substantielle d’un traité est constituée par ;
a) un rejet du traité non autorisé par la présente Convention ; ou
b) la violation d’une disposition essentielle pour la réalisation de l’objet ou du but du traité.
4. Les paragraphes qui précèdent ne portent atteinte à aucune disposition du traité applicable en cas de violation.
5. Les paragraphes 1 à 3 ne s’appliquent pas aux dispositions relatives à la protection de la personne humaine contenues dans des traités de caractère humanitaire, notamment aux dispositions excluant toute forme de représailles à l’égard des personnes protégées par lesdits traités ».
200 Art. 60 de la Convention de Vienne sur le droit des traités.
201 V., infra, Partie II, Titre II, Chapitre III, Section I.
202 E. CANNIZZARO, op. cit., p. 1394.
203 V. égal., infra, § 2.
204 V., infra, Partie II, Titre II. Chapitre III, Section 1, § 2.
205 Cf. E. CANNIZZARO, op. cit., p. 1400.
206 Cf. E ; CANNIZZARO, op. Cit., p. 1408 et s. L’ordre d’exécution serait donc posé en fonction de “garantie” de la mise en œuvre des normes internationales en droit interne, ibid, p. 1410.
207 “Le concezioni non-produttiviste ricostruiscono I rapporti dell’ordinamento interno con le norme internazionali presupponendo una visione unitaria dell’esperienza giuridica interna rispetto a quella internazionale. I due ordinamenti sarebbero separati, ma solo in quanto ciò sia disposto dall’ordinamento interno stesso, che in tal modo intende tutelare le competenze dei propri organi interni. La separazione viene invece a cadere in presenza di un ordine di esecuzione che garantisce l’efficacia delle norme internazionali in diritto interno. Questo schema richiama certamente lo schema dualista dei rapporti fra ordinamento interno e diritto internazionale quanto alla necessità di individuare un atto autonomamente posto in essere dall’ordinamento interno al fine dell adeguamento, dal punto di vista normativo, invece, si avrebbe qualcosa di assai simile ad uno schema monista, che presuppone quindi la tendenziale omogeneità del fenomeno giuridico interno rispetto a quello internazionale e dell’utilizzazione dell’esperienza giuridica interna al fine di concretizzare le norme internazionali”, E. CANNIZZARO, op. cit., p. 1412. Cf. le système en vigueur en Italie, Partie III. chapitre III. § I, lettre B.
208 V., infra. Partie II, Titre 11, Chapitre III, Section I.
209 E. ROUCOUNAS, Droit dérivé des organisations internationales, in L’intégration du droit international et communautaire dans l’ordre juridique national, précit., p. 39 et 40.
210 Cf. art. 11 de la Constitution italienne, qui a été appliqué seulement par rapport aux Communautés Européennes, dont les traités et le droit dérivé sont en fait directement applicables, à la seule condition qu’ils soient self-executing.
211 Cf. E. ROUCOUNAS, Droit dérivé des organisations internationales, in L’intégration du droit international et communautaire dans l’ordre juridique national, précit., p. 42, qui précise que les Pays-Bas, la France, l’Espagne et la Belgique adoptent ce système.
212 Cf. E. ROUCOUNAS, op. cit., p. 43, précisant que l’Italie, l’Allemagne et l’Irlande demandent un acte de réception spécifique pour la mise en œuvre du droit dérivé des organisations internationales, exception faite pour le droit dérivé de la CE.
213 Le but de l’organisation est mentionné à l’article 1(a) “to provide machinery for cooperation among Governments in the field of governmental regulation and practices relating to technical matters of all kinds affecting shipping engaged in international trade; to encourage and facilitate the general adoption of the highest practicable standards in matters concerning maritime safety, efficiency of navigation and prevention and control of marine pollution from ships”.
214 V., infra. Partie II. Titre I. Chapitre I.
215 International Convention for the Safety of Life at Sea, dont la premiere version fut adoptée après le désastre du TITANIC en 1914, la deuxième en 1929, la troisième en 1948. la quatrième en 1960 et eelle maintenant en vigueur en 1974.
216 International Convention for the Prevention of Pollution from Ships, 1973, as modified by the Protocol of1978 relating thereto (MARPOL 73/78).
217 La Convention SOLAS prévoit que l’amendement technique puisse être adopté aussi par le MSC, avec une majorité de deux tiers des votants.
218 Chapter IX: Management for the Safe Operation of Ships. International Convention for Safety of Life at Sea, précit.
219 Résolution de l’Assemblée A.7I4(I8), novembre 1993.
220 Cet amendement est entré en vigueur par la procédure d’approbation tacite le I“ juillet 1998 pour les pétroliers et les navires passagers et le 1er juillet 2002 pour les cargo ships et pour les plateformes mobiles de plus de 500 tonnes brutes.
221 Resolution MEPC. 95(46), adopted on 27 april 2001, amendments to the annex of the protocol of 1978 relating to the international convention for the prevention of pollution from ships, 1973 (amendments to regulation I3g of annex i to MARPOL 73/78 and to the supplement to the IOPP certificate).
222 V., infra, Titre II, Chapitre II. Section III.
223 Cf. par exemple, en droit italien, l’arrêt de la Cour constitutionnelle du 8 juin 1984, n. 170, Prev. soc. 1984, p. 1403.
224 Par la procédure de l’art. 234 CE (ancien art. 177 CEE).
225 Sur l’étendue de cette compétence v. P. PESCATORF, Treaty-making by the Europran Community, in UKNCCL, The effect of treaties in domestic law, dirigé par F. G. JACOBS. Londres, 1987, p. 172 et s.: Capacity of the Communities in the field of treaty-making.
226 “The Community enjoys the capacity to establish contractual links with third countries over the whole field of objectives defined in part one of the Treaty", CJCE, 31 mars 1971, Commission v. Council, Affaire ERTA. V. PESCATORE., precit., p. 175.
227 Cf. F.. ROUCOUNAS, op. cit., p. 44 et 45, qui donne l’exemple de la série d’actes communautaires pris entre le 11 novembre 1991 et le 28 avril 1993 destinés à l’application des résolutions du Conseil de Sécurité des Nations Unies contre l’Irak, la République Fédérale de Yougoslavie et la Libye.
228 P. PESCATORE. Treaty-making by the Europran Community, in UKNCCL, The effect of treaties in domestic law, dirigé par F. G. JACOBS, Londres, 1987, p. 179 : "After consultation of the European Parliement, in those cases where this is prescribed by the Treaty, the Council approves the agreement by a formal act which may be a decision, but which is more often a regulation".
229 Ce principe a été établi lors de l’arrêt de la CJCE du 12 décembre 1972, International Fruit Company, cité par P. PESCATORE, op. cit., p. 182.
230 Cf. P. PESCATORE., op. cit., p. 184.
231 Voir communication de la Commission COM/2002/0681 final, précit.
232 En ce qui concerne la pollution voir la communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen, COM/2002/0539, ANNEXE 2, 1.5 : « Eu égard aux dispositions internationales, la législation communautaire régissant les transports maritimes et les aspects connexes ayant trait à la sécurité et à l’environnement repose sur quatre principes essentiels. Pour ce qui est de l’Organisation maritime internationale (OMI), la législation communautaire peut :
* garantir une application et une mise en oeuvre harmonisées des réglementations de l’OMI dans l’UE, par exemple en ce qui concerne le contrôle par l’Etat du port ;
* renforcer la législation internationale au niveau communautaire, pour ce qui est par exemple des installations de réception des déchets dans les ports ;
* combler les lacunes de la législation de l’OMI, par exemple en ce qui concerne le commerce intérieur ;
* accélérer la mise en oeuvre de la législation internationale, pour ce qui est par exemple des pétroliers à double coque ».
233 V., infra, Partie II, Titre II, Chapitre III, Section III.
234 V., infra, Partie II, Titre II, Chapitre III.
235 J.A. FROWEIN, K. OELLERS-FRAHM, L’application des traités dans l’ordre juridique interne, in L’intégration du droit international et communautaire dans l’ordre juridique national, Etude de la pratique en Europe dirigé par P. M. EISEMANN, Le Hague/Boston/-Londres, 1996, p. 18.
236 V., infra. Partie II, Titre II. Chapitre III, Section III.
237 “It s trite to say that treaties aiming to lay dawn common rules serve little purpose if those rules are not uniformly applied. Where, on the other hand, treaties are not concerned with promoting uniform legislation, their uniform interpretation is not an end in itself. It may even he desirable to envisage differences of interpretation”, F. G. JACOBS, The effect of treaties in domestic law, London 1987,
238 Cf. CJCE, 9 février 1982, EEC/Portugal Free Trade Agrement ; V. PESCATORE, op. cit., p. 189 et 190: “must a clause in a Free Trade Agrement, concluded by the Community and having a wording almost identical to a provision of the EEC Treaty, be given the same interpretation as in the framework of the Community or may it be construed differently? The Court gave a well-considered answer to this question from wich it appears that an identical clause can have two different meanings if it is pleaced in different contexts”.
239 V., par exemple, l’arrêt de la Cour de cassation italienne n. 2539, du 16 juillet 1954, Foro it., 1955, I. p. 33. Dans cet arrêt la Cour affirme en t’ait qu’il n’est pas suffisant que le transport soit international d’un point de vue « objectif » (c’est-à-dire entre deux ports afférant à deux États différents), mais qu’il faut qu’au contrat participent des sujets de nationalité différente. Selon l’avis de la Cour “è infatti indifferente agli Siali aderenti verso i quali è stato assunto l’impegno eseguilo dall’Italia di rendere esecutiva la Convenzione, che vengano applicale le norme unificale concordale, anziché le norme comuni in materia dì contratto di trasporto, allorché il trasporto di cose, (pur avendo come luogo d’imbarco e di destinazione un porlo straniero) si svolga tra cittadini italiani e su nave battente bandiera nazionale”, Cf. aussi S. M. CARBONE. Le regole di responsabilità del vettore marittimo. Dall’Aja ad Amburgo attraverso la giurisprudenza italiana, Milano. 1984, p. 8.
240 Il s’agit par exemple de la loi italienne et allemande.
241 Cf. le Rapport de la Commission sur les clauses des connaissements. Conférence de Stockholm du CMI, 12 juin 1963, procès verbal pp. 11 et 12, The Travaux préparatoires of the Hague Rules and of the Hague-Visby Rules, Anvers, 1997, p. 260 : “Mr. F. Berlingieri (Italy). Mr. Chairman. Gentlemen the purpose of this amendement is to clarify what is the value of the bill of lading as evidence. I think that most of the Delegations here have staled in their reports that this is not a problem since there is no doubt that the bill of lading has the value of conclusive evidence as regards third parlies and on this assumption it has been pointed out thai there is no reason to change the present wording, but unfortunately in some countries this problem has arisen and there have been many decisions stating that according to the Hague Rules the value of the hill of lading as evidence is just the value of prima facie evidence so that the carrier is allowed also vis a vis a bonafide holder of the bill of lading to prove against the wording of the bill of lading. We think that this interpretation is completely wrong and that if this interpretation be held valid the value of the hill of lading as a document of title would be completely lost and consequently we submit to your consideration the advisability of adding a new sentence in order to make clear to everybody that the bill of lading as regards a bone fide holder has the value of conclusive evidence. We don’t want to change anything, we ask your help and your co-operation in order to seek unification. There are many delegations who I repeat don’t think this is a problem but I really ask them to help us since this problem exists in some countries, in France, in Belgium and in Italy, at least so I am told, and perhaps also in Yugoslavia. The amendment has been drafted differently by the French. Belgian and Italian delegations. We have proposed a certain wording and I am going to read it to vou, namely, modify paragraph 4 of Article 3 as follows: ”Such bill of lading when transferred to a third party who is acting in good faith shall be conclusive evidence of the receipt by the carrier of the goods as therein described in accordance with article 3 a, b, and c ”.This is an alternative, the French Delegation has proposed a different wording, namely they have proposed to add the following new sentence to paragraph 4 of Article 3: “Toutefois la preuve contraire n’est pas possible à l’égard de toute personne autre que le chargeur ”. We approach the same problem from a different view point but we are really reaching the same result because we want to state that as regards a hone fide holder, the bill of lading has the value of conclusive evidence. The French Delegation wording means that the value of prima facie evidence is limited as regards the original shipper of the goods, whilst as regards the third party the bill of lading must have the value of conclusive evidence; I repeat, there is no specific difference, and my Delegation would be prepared to accept also the French suggestion. I submit the question of principle namely we think is advisable to add something in this paragraph with the purpose to make it clear that at least as regards bona fide holders the bill of lading has the value of conclusive evidence. Thank you”.
242 Cf. le Rapport de la Commission sur les clauses des connaissements. Conférence de Stockholm du CMI, 12 juin 1963, procès verbal p. 21, The Travaux préparatoires of the Hague Rules and of the Hague-Vishy Rules, Anvers, 1997, p. 261 : « M. Le President. Quelqu’un demande-t-il la parole au sujet de cette proposition dont la portée est extrêmement réduite. Il ne s’agit pas d’apporter un changement quelconque à la Convention mais simplement de rendre uniforme et générale une interprétation qui est admise dans la plupart des pays. Le texte est nécessaire pour que cette interprétation puisse être admise partout : c’est donc plutôt presque une question de forme. Si personne ne demande la parole je vais demander à la commission de se prononcer sur cet amendement de forme. Que ceux qui sont en faveur de l’adoption de la proposition de l’Association italienne veuillent bien lever la main. Epreuve contraire ». La proposition est adoptée par 8 voix contre 6 et 3 abstentions ». V., aplius. infra. Partie II, Titre II, Chapitre I, Section I, § 2, A.
243 Intervention de M. BERLINGIER1 à la Conférence diplomatique de Bruxelles, 25 octobre 1922, procès verbal p. 37 : « d’accord avec le professeur Ripert, trouve que le texte ne s’accorde pas avec les idées et les principes des codes italiens et français. Par exemple : l’expression “document formant titre pour le transport de marchandises” est la traduction de “document of title”. Mais quelle différence y a-t-il entre la charte-partie et le document formant titre pour le transport de marchandises par mer ? L’expression française ne le dit pas. Ce ne sont pas simplement des questions de rédaction, mais bien des questions qui affectent le fond car les lois nationales devront traduire les principes adoptés dans un langage juridique et il est certain qu’une modification de la forme a fatalement pour effet de changer en une certaine mesure le fond, et cependant si une convention est conclue, c’est afin qu’elle soit exécutée intégralement dans chaque pays », The Travaux Préparatoires of the Magne Rules, précit.. p. 112.
244 Sur cette question V., G. BOI, La lettera di trasporto marittimo. Milano, 1995, p. 131 et s.
245 C’est le cas des USA, le US COGSA s’appliquant aussi à tout titre non négociable, et d’autres législations étatiques comme celle du Canada et de l’Australie.
246 Cf. R. SACCO, op. cit., p. 62 et s.
247 Sur l’importance de la conception doctrinale « ouverte » du droit et de ses sources pour déceler des « fausses différences entre systèmes juridiques différents insiste aussi M. J. BONELL. Le regole oggettive del commercio internazionale, précit.. p. 249 et 250 : « [...] non si intendono affano negare o minimizzare le differenze che attualmente esistono in questo come in altri settori tra i vari sistemi positivi nazionali, dall’altro non si deve dimenticare come spesso si tratti di differenze che attengono più alla forma o alla struttura, che non alla sostanza. [...] Certo finché ci si limila a seguire il tradizionale metodo ed orientamento concettuale, a confrontare cioè i singoli concetti, principi ed istituti nazionali astrattamente, nella loro struttura teorico-dogmatica, essi non potranno non risultare divergenti e a volte effettivamente inconciliabili ; basta viceversa che si adotti il più moderno metodo ed. problemalico-funzionale, si prendano quindi le mosse direttamente dal singolo problema concreto cercando di stabilire quale sia in ordine allo stesso la soluzione giuridica cui i rispettivi diritti nazionali, visti non più soltanto nelle loro prescrizioni formali ed astratte (“law in the books ”), ma anche e soprattutto nella loro applicazione in pratica (“law in action”), pervengono, per rendersi conto come il più delle volte dietro una diversità di tecniche e strutture si nasconde un’unità di “sostanza”, un “nucleo comune ” ben più consistente di quanto non si voglia comunemente ammettere”.
248 Cf. E. O. QUERCI, Analisi del diritto marittimo. Trieste, 1999, p. 200 : « Solo il porro unum di una dottrina dell Interpretazione giuridica consente l’identificazione della struttura totale della fenomenologia giurìdica marittima, assunta e visualizzata diacronicamente e nella sua complessità dinamica e, quindi, l’individuazione fisionomica (strutturale e funzionale) dell’oggetto di quello studio a cui, come più volle rimarcato, può soltanto conformarsi la sintesi verbale “scienza del diritto marittimo” », e p. 229 : « ma l’astuzia della tecnica dell’interpretazione sta appunto nell ‘affermazione della completezza, dell’unità e dell’autonomia del sistema giuridico marittimo, attraverso il rilievo giuridico da assegnare, per la soluzione dei casi singoli, e per la disciplina delle varie ed innumeri fattispecie negoziali prospettate dal libero esplicarsi del commercio marittimo internazionale, alle plurime fonti del diritto marittimo, e nello sconfiggere, ad esempio, il problema delle antinomie delle singole soluzioni promananti dalla disciplina e dal regolamento posti dalle varie e plurime fonti ».
249 Pour apprécier l’écart entre ees deux conceptions doctrinales, v. par exemple M. J. BONELL, Le regole oggettive del commercio internatzionale. Milano, 1976, p. 91 et s.
250 V., infra, Partie I Titre II, Chapitrc III, Section II.
251 F. OSMAN, Les principes généraux de la lex mercatoria, Paris, 1992, p. 314.
252 F. OSMAN, op. cit., ibid., qui poursuit en affirmant le rôle créateur de la jurisprudence arbitrale : « l’interprétation apparaît comme largement créatrice, ne serait-ce que parce qu’au-delà de la recherche de la commune intention des parties, l’arbitre procède par voie de systématisation et de généralisation des solutions dégagées pourtant de manière casuistique ».
253 Cf. E. LOQUIN, La réalité des usages du commerci international, Revue int. dr. comp. , 1989, n. 2, p. 195.
254 F. OSMAN, op. cit., p. 314.
255 P. MAYER, L’autonomie de l’arbitre dans l’appréciation de sa propre compétence, Recueil des cours de l’Académie de droit international, 1989, tome 217. vol. V, p. 428 : « [...] le désir des arbitres étant de s’appuyer sur l’autorité la plus solide, le courant majoritaire tend naturellement à se renforcer, donnant naissance à une règle [...] une jurisprudence arbitrale, en ce sens est donc susceptible de se former »
256 P. MAYER, op. cit., ibid.
257 F. OSMAN, op. cit., p. 315 ; O’BRIEN, Maritime arbitration, 14 Form (1978-1979), pp. 222 et 227.
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