Chapitre II. L’étendue de l’irrévocabilité
p. 261-296
Texte intégral
1504. L’acte juridictionnel n’accède pas toujours d’un bloc et d’un seul à l’irrévocabilité. Cette hypothèse la plus simple laisse effectivement place à des cas où la chose jugée devient irrévocable pour partie seulement. Conséquence de la divisibilité du litige quant aux parties et quant à son objet, la chose jugée est également divisible. Et cette divisibilité trouve principalement à s’illustrer à l’occasion de l’exercice des voies de recours. La physionomie du procès, sa matière, évolue au fil de l’avancement des voies de recours. Non seulement le procès peut se gonfler de faits nouveaux, voire de demandes nouvelles ; mais à l’inverse, par un phénomène de décantation, il peut se réduire à l’examen d’une partie seulement des questions litigieuses soumises au précédent juge. Dès lors, tous les points qui échappent à la connaissance ou à la censure des juges du recours accèdent à l’irrévocabilité avant le reste du litige. L’acte juridictionnel concerné sera ainsi partiellement irrévocable.
2505. Deux facteurs principaux conduisent à la divisibilité d’une décision de justice au regard de l’irrévocabilité. Le premier, qui concerne toutes les voies de recours suspensives, offre aux parties la possibilité de n’attaquer qu’une partie de la décision entreprise. La saisine des juges en sera d’autant limitée. Sous peine de statuer ultra petita, ces derniers ne peuvent déborder du cadre ainsi déterminé par les parties. Le second facteur est propre au pourvoi en cassation. La Haute juridiction, ne pouvant connaître du fond des affaires, est en principe tenue de renvoyer le litige après une cassation. Mais cette cassation peut être limitée à certains points de la décision attaquée, si bien que les juges de renvoi ne peuvent statuer que dans la stricte limite de cette cassation. C’est tout le problème de l’étendue des pouvoirs de la juridiction de renvoi à la suite d’une cassation partielle. Ainsi, l’irrévocabilité peut être limitée à la partie de la décision qui, d’une part, n’est pas attaquée par une voie de recours suspensive (section 1) et, d’autre part, n’est pas atteinte par une cassation (section 2).
SECTION 1. L’IRRÉVOCABILITÉ LIMITÉE À LA PARTIE DE LA DÉCISION NON-ATTAQUÉE PAR UNE VOIE DE RECOURS SUSPENSIVE
3506. Un même procès, que ce soit en matière civile ou en matière pénale, apparaît souvent comme un complexe de points litigieux n’opposant pas seulement deux parties. Au civil, une multitude de demandes, principales ou incidentes, formées à titre principal ou à titre subsidiaire, peuvent s’enchevêtrer entre de nombreuses parties. L’exemple des procès de droit de la construction en fournit une illustration presque caricaturale, où souvent le maître de l’ouvrage multiplie ses actions en garantie et en responsabilité à l’encontre des participants à l’acte de construire, des assureurs et des garants d’achèvement. Le droit pénal n’est pas plus à l’abri de ce facteur de complexification, puisqu’à l’action publique se greffe très souvent une ou plusieurs actions civiles, ce qui peut conduire à la mise en cause du civilement responsable et de l’assureur. Or, l’exercice des voies de recours suspensives peut cantonner l’examen du litige à certains des points soumis au précédent juge. Pour cela, il suffit de limiter l’effet dévolutif que produit toute voie de recours. Et cette limitation de l’effet dévolutif est possible de manière aussi bien subjective qu’objective, ce que résume parfaitement bien l’article 509, alinéa 1er, du Code de procédure pénale pour l’appel : « L’affaire est dévolue à la cour d’appel dans la limite fixée par l’acte d’appel et par la qualité de l’appelant (…) ». Le droit positif montre que cette règle peut être étendue à l’ensemble des voies de recours suspensives. Dans la mesure où la matière dévolue à la juridiction de recours dépend avant toute chose de la présence des parties à l’instance de recours1016, il convient d’inverser l’ordre de l’article 509 et d’étudier d’abord la dévolution limitée par la qualité des parties (§ 1) avant d’envisager la dévolution limitée par la volonté des parties (§ 2).
§ 1. La dévolution limitée par la qualité des parties
4507. Cette faculté de divisibilité du procès quant aux parties à l’occasion des voies de recours (A) connaît d’importantes limites (B).
A. Le principe de la divisibilité du procès quant aux parties à l’occasion des voies de recours
5508. Ce principe de divisibilité du procès quant aux parties à l’occasion des voies de recours s’explique par la relativité de l’acte introductif de recours (1) et a pour effet naturel de limiter l’étendue de la saisine de la juridiction de recours (2).
1. La relativité de l’acte introductif de recours
6509. L’acte procédural qui a pour objet d’introduire l’instance sur voie de recours est relatif à son auteur. Déjà Loisel écrivait-il que « les appellations sont personnelles »1017. Il s’agit d’une application du principe général de la relativité des actes de procédure qui, lui-même, est une conséquence du principe de divisibilité de l’instance. Ce dernier principe s’est imposé tardivement, seulement à partir de la fin du 19ème siècle et sous l’influence de la doctrine1018, alors qu’auparavant dominait le principe inverse d’indivisibilité de l’instance quant aux parties1019. Le nouveau Code de procédure civile a systématisé les acquis de la doctrine et de la jurisprudence par deux dispositions générales. L’article 323 énonce d’une part que : « Lorsque la demande est formée par ou contre plusieurs cointéressés, chacun d’eux exerce et supporte pour ce qui le concerne les droits et obligations des parties à l’instance » ; d’autre part, l’article 324 dispose que « Les actes accomplis par ou contre l’un des cointéressés ne profitent ni ne nuisent aux autres (…) ». Ces principes valent pour tous les actes introductifs de recours, aussi bien en matière civile que pénale. Deux exemples peuvent être choisis : le premier concerne l’opposition (a) et le second a trait à ce que les pénalistes ont coutume d’appeler la survie de l’action civile à l’action publique (b).
a) L’exemple de l’opposition
7510. L’effet dévolutif que produit l’opposition est fortement limité par la qualité des parties. Seule la partie jugée par défaut a qualité pour intenter cette voie de rétractation. Il n’existe pas d’opposition incidente, si bien que la partie qui a comparu ne peut critiquer la décision attaquée que par le biais d’un appel ou d’un pourvoi en cassation1020. C’est ainsi que la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a décidé que « l’opposition ne remet en cause que les points jugés par défaut » avec pour conséquence que cette voie de recours « ne permet pas au défendeur à l’opposition de reprendre les prétentions dont il a été débouté par la décision rendue par défaut »1021.
8511. Dans le prolongement, cela signifie aussi que l’opposant ne peut déférer au juge de la rétractation que les dispositions du jugement qui lui font grief ; il n’a pas d’intérêt à agir pour critiquer les points sur lesquels il a, en dépit de son absence, obtenu gain de cause. La règle est également acquise en procédure pénale, même si en cette matière l’opposition produit un effet extinctif rendant non avenu le jugement attaqué (CPP, art. 489). La chambre criminelle juge ce texte sans application aux dispositions prononçant la relaxe du prévenu1022. L’opposition ne défère donc au juge du recours que les points jugés par défaut préjudiciables au défaillant.
b) L’exemple de l’action civile survivant à l’action publique
9512. Lorsqu’une action civile se greffe, devant les juridictions pénales, à l’action pour l’application des peines, ces deux actions peuvent suivre un cours autonome. Tel est notamment le cas quand seule la partie civile décide d’intenter une voie de recours contre la décision qui ne satisfait pas ou qu’insuffisamment ses intérêts1023. Sur ce recours, et essentiellement pour des raisons de commodité, les juridictions pénales restent compétentes1024. Mais l’affaire n’est alors dévolue qu’en sa dimension civile1025. La juridiction de recours dispose d’un pouvoir d’appréciation entier pour tirer les conséquences civiles des actes reprochés au prévenu, quand bien même celui-ci a bénéficié d’une relaxe. Les juges sont même tenus de rechercher si les faits qui leur sont déférés constituent une infraction pénale1026 ; mais, l’action publique étant éteinte, ils ne sauraient prononcer de peine1027. Il en résulte forcément que les risques de contradiction de décisions sont grands1028, puisqu’une personne peut être relaxée en première instance et déclarée coupable en appel au profit d’une partie civile. Mais l’impératif subjectif de réparation l’emporte sur la considération objective de cohérence et la partie civile, comme toute autre partie, a droit au double degré de juridiction.
2. L’étendue de la saisine de la juridiction de recours
10513. La juridiction de recours ne peut connaître de l’affaire qu’à l’égard des parties s’étant valablement pourvues devant elle. Mais il faut bien s’entendre sur la notion de partie s’étant valablement pourvue. Deux situations doivent être distinguées. Il est en premier lieu des cas où une partie n’exerce pas de recours, ni à titre principal, ni à titre incident, et ne se voit même pas citée par la ou les autres parties en qualité de défenderesse à la voie de recours. Dans cette hypothèse, la décision, même attaquée par les autres parties, est bien irrévocable à son égard (a). En second lieu, il se peut au contraire que cette partie soit citée en qualité de défenderesse à la voie de recours intentée par une autre partie. Si, alors, elle s’abstient de former un recours incident, la règle de l’interdiction de la reformatio in pejus (b) jouera au profit de l’auteur du recours.
a) L’irrévocabilité de la chose jugée à l’égard des parties ne participant pas à l’instance sur voie de recours
11514. A l’égard des parties qui n’ont pas recouru alors qu’elles avaient intérêt à le faire1029 et qui ne sont pas visées comme défenderesses à la voie de recours1030, la chose jugée est irrévocable et ce quand bien même, sur le recours d’autres parties, la chose jugée viendrait à être rétractée, réformée ou cassée1031. Toutefois, encore faut-il que le délai du recours soit expiré à l’égard de la partie qui n’a pas recouru. Si par exemple le jugement susceptible de recours par plusieurs parties n’a pas fait l’objet d’une notification valable à l’égard de l’une d’elles, cette partie sera libre d’intenter une voie de recours même après le prononcé de la décision sur le recours des autres1032. Dès lors, et sous cette seule réserve tenant à l’expiration du délai pour recourir, la décision non critiquée par une partie devient irrévocable à son égard1033. L’explication en est évidemment que l’exercice d’une voie de recours n’est jamais obligatoire et qu’une partie, contrairement aux autres, peut parfaitement y renoncer, de la même manière d’ailleurs qu’elle peut acquiescer au jugement. La relativité de la chose jugée, conséquence du respect des droits de la défense, justifie encore plus directement la solution : la chose jugée sur recours est étrangère aux tiers à ce recours1034.
12515. Ainsi, pour reprendre les exemples qui viennent d’être évoqués, les chefs de décision favorables au défaillant lui sont irrévocablement acquis si l’adversaire qui a comparu n’a pas, de son côté, interjeté appel ou formé de pourvoi en cassation. Il est clair, par exemple, que si un prévenu poursuivi du chef de plusieurs délits se voit, par la même décision rendue par défaut, condamné pour certains et relaxé pour d’autres, la relaxe sera dans ces conditions irrévocable1035. De même, en matière civile, si dans un litige portant sur un partage de biens successoraux, les défendeurs au partage prétendent être devenus propriétaires exclusifs des biens concernés par prescription, mais que la décision rendue en appel, contradictoire à leur égard, les déboute de cette prétention, l’opposition intentée par leur adversaire jugé par défaut en appel ne permet pas de remettre en cause la question de la propriété exclusive, laquelle a été définitivement jugée1036. Si, dernier exemple, il s’agit de la situation où seule une partie civile s’est pourvue contre une décision prononçant la relaxe du prévenu, l’action publique est éteinte et aucune peine ne pourra être prononcée contre ce prévenu ; seule une condamnation à des dommages et intérêts pourra éventuellement intervenir.
b) L’interdiction de la reformatio in pejus
13516. Pour les parties qui intentent un recours sans que les autres parties ne forment de recours incident1037, joue l’interdiction de la reformatio in pejus. La règle est clairement formulée par l’article 515, alinéa 2, du Code de procédure pénale : « La cour ne peut, sur le seul appel du prévenu, du civilement responsable, de la partie civile ou de l’assureur de l’une de ces personnes, aggraver le sort de l’appelant »1038. Cette interdiction de la reformatio in pejus trouve son origine dans un avis du Conseil d’Etat du 12 novembre 18061039 et procède de l’idée que les tribunaux ne sauraient se prononcer sur des choses qui ne leur sont pas demandées ; en l’absence de recours incident des défendeurs à la voie de recours, la juridiction ne peut leur accorder une satisfaction non demandée, sous peine de statuer ultra petita.
14517. Le champ d’application de la règle est des plus larges. En matière pénale, il a été étendu au pourvoi en cassation1040, ainsi qu’à l’appel formé en matière criminelle1041. En revanche, la Cour de cassation ne l’a pas étendu au réexamen consécutif à une décision de condamnation de la Cour européenne des droits de l’homme1042. De plus, comme le texte de l’article 515, alinéa 2, le montre, la règle ne concerne pas seulement le prévenu1043, mais également la partie civile1044, le civilement responsable1045 ou leur assureur. Quant au recours du ministère public, celui-ci permet une réformation dans un sens favorable ou défavorable au prévenu (CPP, art. 515, al. 1er)1046. Un esprit de faveur pour le prévenu anime cette disposition, puisqu’une application de la règle de l’interdiction de la reformatio in pejus en pareille occurrence aurait dû conduire à ne permettre qu’une aggravation de son sort. En matière civile, la règle a également été affirmée au sujet de l’appel, dont l’effet dévolutif est limité aux prétentions effectivement formulées. L’appelant ne saurait pâtir d’une aggravation de son sort dès lors que l’intimé se borne à conclure à la confirmation du jugement entrepris1047.
15518. Contrairement au cas où la personne qui ne forme pas de recours n’est même pas citée en qualité de défenderesse à la voie de recours, l’interdiction de la reformatio in pejus n’aboutit pas à rendre irrévocable la chose jugée à l’égard de la personne citée en cette qualité. Cette règle ne conduit qu’à limiter l’étendue des pouvoirs de la juridiction de recours. Si la chose jugée vient à être rétractée, réformée ou cassée, cette remise en cause sera bien évidemment opposable au défendeur à la voie de recours.
16Cette divisibilité du procès quant aux parties à l’occasion des voies de recours n’est pas sans inconvénient. D’importants risques de contradiction en résultent, qui seront la source d’autant de conflits de titres exécutoires1048. C’est pourquoi de nombreuses limites sont apportées à ce principe de divisibilité.
B. Les limites à la divisibilité du procès quant aux parties à l’occasion des voies de recours
17519. Le risque de contrariété de décisions est évident : si la chose jugée est irrévocable à l’égard des parties qui n’ont pas participé au recours, celle-ci peut néanmoins être remise en cause au profit des autres parties. La survie de l’action civile à l’action publique en fournit des exemples édifiants. Ainsi une cour d’appel, saisie à l’initiative de la seule partie civile, est-elle tenue de réexaminer la portée des preuves ayant justifié, en première instance, la relaxe du prévenu : si, par exemple, à l’occasion d’une action en diffamation, les juges sont entrés en voie de relaxe au bénéfice de l’exception de vérité, saisie par la partie civile, la cour d’appel doit à nouveau apprécier la portée des éléments tendant à prouver que les faits prétendus diffamatoires sont vrais1049. Au regard de l’action publique, le caractère diffamatoire des faits ne sera pas reconnu, cependant qu’à l’égard de l’action civile il pourra l’être.
18520. De longue date des correctifs au principe de la divisibilité de l’instance quant aux parties ont donc été apportés1050 ; ils concernent des hypothèses où le risque de contrariété est des plus criants. S’agissant des effets d’une voie de recours, il est possible de distinguer selon que la partie qui n’a pas intenté de recours participe (1) ou non (2) à l’instance sur voie de recours.
1. Le cas de la partie qui n’a pas recouru, comparante à l’instance sur voie de recours
19521. Etendre le bénéfice d’une voie de recours à une partie à la procédure qui, suite au recours des autres, comparaît à cette instance est assez facilement compréhensible1051. Présente à cette instance, elle a la faculté d’y défendre ses intérêts, de telle sorte que la chose jugée la concerne directement. Aussi bien la procédure civile que la procédure pénale fournissent des exemples d’une telle situation.
20522. En procédure civile, l’article 552, alinéa 1er, du nouveau Code de procédure civile dispose : « En cas de solidarité ou d’indivisibilité à l’égard de plusieurs parties, l’appel formé par l’une conserve le droit d’appel des autres, sauf à ces dernières à se joindre à l’instance ». Il s’agit d’une sorte de relevé de forclusion en faveur des parties liées par un lien de solidarité ou d’indivisibilité à l’égard de celles qui ont interjeté appel1052. Toutefois, et la condition est claire, il est nécessaire que le codébiteur se joigne à l’instance d’appel. A défaut, la décision attaquée doit être tenue pour irrévocable à son encontre : « si un codébiteur solidaire néglige de relever appel du jugement l’ayant condamné en première instance ou de se joindre au recours recevable formé par son consort, ce jugement a force de chose jugée contre lui, même s’il est réformé sur l’appel du codébiteur »1053. Cette solution ne vaut cependant que pour la solidarité et non pour l’indivisibilité, car cette dernière produit des effets plus importants que ceux prévus par l’article 552, alinéa 1er1054.
21523. En matière pénale, la jurisprudence a pu adopter des solutions comparables. En premier lieu, il est de jurisprudence traditionnelle que, lorsque les accusés ou prévenus sont poursuivis pour avoir participé à un fait unique ou à un ensemble de faits indivisibles, la cassation obtenue par l’un d’eux profite à tous ceux qui se sont pourvus1055. En cas d’indivisibilité, la remise en cause peut même jouer au détriment de celui qui n’a pas fait valoir de moyen personnel de critique1056. En deuxième lieu, il a été jugé que la cassation obtenue par le prévenu doit être étendue au civilement responsable qui s’est pourvu, même si ce dernier n’a pas fait valoir de moyens1057. Il existe en effet un lien de dépendance certain entre la responsabilité du prévenu et celle du civilement responsable. La responsabilité du commettant dépend par exemple de celle du préposé. Ici encore, le bénéfice du recours est subordonné à la comparution de la partie qui ne forme pas de critique contre la décision1058. Une interprétation a contrario de cette jurisprudence semble signifier qu’à défaut de comparution, au moins en qualité de défendeur à la voie de recours, le civilement responsable ne saurait bénéficier de la remise en cause de la chose jugée obtenue par le prévenu. La décision attaquée par le prévenu est donc irrévocable à l’égard de ce civilement responsable. En troisième et dernier lieu, la cassation prononcée pour violation des règles de composition et de compétence des juridictions doit être étendue à toutes les parties présentes à l’instance de cassation, même si elles n’ont pas produit de moyen1059.
22Dans certains cas, la remise en cause de la chose jugée à l’occasion d’une voie de recours profite à une partie à la procédure initiale, même si celle-ci n’a pas comparu à l’instance de recours.
2. Le cas de la partie qui n’a pas recouru, non-comparante à l’instance sur voie de recours
23524. Lorsque dans un litige opposant de nombreuses parties, l’une d’elles n’intente pas de voies de recours et ne se voit pas citée à comparaître sur le recours des autres, il est néanmoins possible de lui opposer les effets de la remise en cause de la chose jugée.
24En procédure civile, cette possibilité existe lorsque les parties sont unies par un lien d’indivisibilité, c’est-à-dire lorsque l’objet de l’obligation litigieuse est indivisible à l’égard des codébiteurs1060. L’hypothèse est prévue aussi bien pour l’appel que pour le pourvoi en cassation (NCPC, art 553 et 615, al. 1er). Il est à ce titre bien précisé que cette opposabilité joue de plein droit, même si la partie concernée ne s’est pas jointe à l’instance. Le résultat de cette opposabilité n’est pas pris en compte par ces textes, si bien que la position de la partie non-comparante peut très bien être améliorée comme aggravée par le recours des autres. Non partie à l’instance de recours, la personne unie par un lien d’indivisibilité doit néanmoins avoir été partie à l’instance ayant donné lieu à la décision attaquée1061 ; le mécanisme ne vaut pas pour les tiers à la procédure.
25525. Concernant l’article 615, alinéa 1er du nouveau Code de procédure civile, la Cour de cassation ne s’est pas bornée à une interprétation littérale. Par un arrêt du 10 mars 1981, elle a considéré que la cassation obtenue par une seule des personnes condamnées in solidum profitait aux autres1062. Valable pour les obligations in solidum, la solution l’est à plus forte raison pour les obligations solidaires, ce que la Haute juridiction a également considéré1063. Cette extension prétorienne du domaine de l’article 615 appelle deux remarques. En premier lieu, cette opposabilité d’une cassation au condamné solidaire ou in solidum qui ne s’est pas pourvu ne semble pouvoir jouer qu’en sa faveur. Il est difficile de concevoir que cette opposabilité lui soit défavorable, tant la violation des droits de la défense ne s’autoriserait alors d’aucune disposition expresse de la loi. En second lieu, un régime distinct de la solidarité en résulte selon que la voie de recours concernée est l’appel ou le pourvoi en cassation. Il a déjà été vu, effectivement, que l’article 552 du nouveau Code de procédure civile n’étend les effets de l’appel au codébiteur solidaire non-appelant qu’à la condition qu’il se joigne à l’instance. Or, pour ce qui est du pourvoi en cassation, cette condition n’est pas exigée.
26526. La procédure pénale connaît également de situations où la remise en cause de la chose jugée sur voie de recours vaut à l’égard d’une personne initialement partie à la procédure mais non-comparante à l’instance de recours1064.
27L’article 509, alinéa 2, du Code de procédure pénale, tout d’abord, dispose que « l’appel de l’assureur produit effet à l’égard de l’assuré en ce qui concerne l’action civile (…) ». Ce texte ne distinguant pas, la remise en cause de la chose jugée est opposable à l’assuré quand bien même elle lui est défavorable1065. Par ailleurs, la chambre criminelle interprète strictement cette disposition en refusant d’étendre les effets de l’appel de l’assuré à l’assureur1066.
28527. Ensuite, une disposition bien plus large concerne les effets du pourvoi en cassation : « En toute matière, lorsque l’intérêt de l’ordre public ou d’une bonne administration de la justice le commande, la Cour de cassation peut ordonner que l’annulation qu’elle prononce aura effet à l’égard des parties à la procédure qui ne se sont pas pourvues » (CPP, art. 612-1). Mais ici, cette extension de la chose jugée ne peut jouer in pejus ; elle n’a pas lieu de s’appliquer lorsqu’elle conduirait à aggraver le sort d’une partie condamnée qui ne s’est pas pourvue1067. Malgré la généralité du texte, cette solution est heureuse, car opposer le dispositif d’une décision à une personne qui n’a pas eu l’occasion de faire valoir ses arguments procède d’une violation flagrante des droits de la défense. En ne jouant qu’in favorem, cette violation est bien entendu moins grave. En respectant cette logique, la chambre criminelle a ainsi pu décider que l’annulation, sur le pourvoi du civilement responsable, d’un arrêt ayant déclaré recevable et fondée la demande de la partie civile, doit avoir effet à l’égard du prévenu, condamné au paiement d’une indemnité1068.
29De manière prétorienne, cette fois-ci, il est traditionnel de considérer que le pourvoi du ministère public doit bénéficier à la partie poursuivie1069. Cela s’explique certainement par le fait que l’interdiction de la reformatio in pejus ne joue pas à l’égard du ministère public, car, effectivement, si son recours aboutit à une minoration ou à une suppression de la responsabilité pénale du prévenu ou de l’accusé, il paraîtrait contraire au principe de faveur de refuser de l’en faire bénéficier au prétexte qu’il ne s’est pas pourvu.
30528. Enfin, sur le fondement de l’article 174 du Code de procédure pénale, la chambre criminelle de la Cour de cassation a eu l’occasion de juger que le retrait du dossier de l’information d’un acte de procédure annulé joue de manière indivisible à l’égard de toutes les parties1070. Au cas d’espèce, l’annulation de l’acte litigieux avait été obtenue par le mis en examen qui s’était seul pourvu contre l’arrêt de la chambre d’accusation et la Cour de cassation n’avait pas fait usage des pouvoirs que lui confère l’article 612-1 du Code de procédure pénale. Elle décide pourtant que l’annulation vaut à l’égard de toutes les parties à l’information. Une solution comparable est donnée par la chambre criminelle lorsqu’une partie civile s’est seule pourvue contre un arrêt statuant sur la validité des poursuites. Si le prévenu a été relaxé au motif que l’action publique était prescrite et que la partie civile obtient de ce chef un arrêt de cassation, cette cassation vaut également pour l’action publique qui renaît de ses cendres1071.
31529. Sauf exception, la juridiction de recours n’a à connaître de l’affaire qu’à l’égard des parties à l’instance de recours. Elle ne saurait non plus connaître de prétentions pour lesquelles les parties présentes n’ont ni qualité ni intérêt pour agir. Mais, la dévolution du litige sur voie de recours ne dépend pas uniquement de la qualité des parties ; le procès s’avère également divisible au regard de la matière constituant l’objet du litige. Il en résulte que les parties peuvent décider de ne déférer à la juridiction de recours qu’une partie seulement de cette matière.
§ 2. La dévolution limitée par la volonté des parties
32530. La qualité des parties n’est pas le seul facteur limitant l’effet dévolutif d’une voie de recours. La personne exerçant une voie de recours peut très bien limiter sa critique à certains points de la décision entreprise. Généralement, la situation se présente lorsque cette décision donne partiellement gain de cause à cette partie. Il peut alors paraître souhaitable, en bonne stratégie procédurale, de limiter le recours à la partie du dispositif qui fait grief. En agissant de la sorte, le plaideur manifeste sa volonté de tenir pour acquis les points laissés hors du champ de la critique. Une irrévocabilité partielle de la décision attaquée en résulte, dont il convient dès lors de détailler le mécanisme. Pour ce faire, il faut d’abord analyser le principe de divisibilité du procès quant à la matière à l’occasion des voies de recours : il s’agit de la règle tantum devolutum, quantum appellatum (A). Sa mise en œuvre sera ensuite étudiée (B).
A. La règle tantum devolutum, quantum appellatum
33531. Cet adage, dont le droit positif fait application, signifie que l’effet dévolutif a pour mesure l’acte d’appel ; la cour ne peut connaître de questions volontairement exclues du champ de la critique. Il s’agit, ici encore, d’une application du principe général selon lequel l’objet du litige se trouve circonscrit par les prétentions respectives des parties. Bien qu’avant tout pensée pour l’appel, cette règle s’applique à toutes les voies de recours (1) et ne cède que devant l’indivisibilité de l’objet du litige (2).
1. La généralité de la règle tantum devolutum, quantum appellatum
34532. Cette règle ne saurait être spécifique à l’appel. Dans la mesure où son fondement a trait à l’interdiction, pour le juge, de statuer sur des choses non demandées ou sur des questions qui débordent du cadre de sa saisine, elle a vocation à s’appliquer à toutes les voies de recours, aussi bien en procédure civile qu’en procédure pénale.
35Pour l’appel, tout d’abord, les deux Codes énoncent explicitement la possibilité de limiter le recours quant à la matière. L’alinéa 1er de l’article 562 du nouveau Code de procédure civile dispose d’une part que l’« appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément ou implicitement et de ceux qui en dépendent » et, d’autre part, l’article 509, alinéa 1er, du Code de procédure pénale précise que « L’affaire est dévolue à la cour d’appel dans la limite fixée par l’acte d’appel (…) ». L’appel d’un jugement prononçant un divorce peut ainsi être limité aux mesures accessoires à ce divorce, de même qu’un prévenu condamné du chef de plusieurs infractions peut cantonner sa critique à celles pour lesquelles il estime avoir été trop sévèrement condamné1072. En revanche, en matière criminelle, la Cour de cassation a décidé que l’accusé ne pouvait pas limiter son appel à certaines dispositions de la décision de première instance, au motif que la cour d’assises de renvoi réexamine l’affaire en son entier1073. Pourtant, à la lecture des textes, rien n’imposait une telle interprétation. Au contraire, l’interdiction de la reformatio in pejus posée par les articles 380-3 et 380-6 du Code de procédure pénale, semble militer en faveur d’une possible limitation de l’effet dévolutif de l’appel.
36533. L’opposition, ensuite, peut pareillement voir son effet dévolutif restreint à certaines dispositions de la décision attaquée. En matière civile, cette possibilité ne fait pas de doute. Bien qu’il n’existe pas de texte comparable à l’article 562, rien n’empêche l’opposant de limiter sa critique et d’acquiescer, ce faisant, à certaines des dispositions le condamnant1074. En matière pénale, la question est plus délicate, car l’article 489 du Code de procédure pénale fait produire un effet extinctif à l’acte d’opposition : « Le jugement par défaut est non avenu dans toutes ses dispositions, si le prévenu forme opposition à son exécution ». Mais, néanmoins, la chambre criminelle n’hésite pas à s’écarter de la généralité de cette disposition pour faire échapper à l’effet extinctif les dispositions du jugement ayant prononcé la relaxe1075. Le prévenu pouvant renoncer à faire opposition, rien ne s’oppose à ce qu’il y renonce partiellement. La possibilité résulte expressément de l’alinéa 2 de l’article 489 du Code de procédure pénale1076 en ce qui concerne les dispositions civiles du jugement1077. Mais il est permis de penser, avec certains auteurs1078, que l’hypothèse peut être étendue à des décisions statuant sur des faits différents donnant lieu à autant d’infractions distinctes. Le prévenu peut avoir intérêt à limiter sa critique à certains chefs de condamnation s’il estime que les juges l’ayant jugé par défaut ont fait preuve d’une certaine clémence. A ce titre, il est donc possible de considérer que l’effet extinctif se limite aux seules dispositions entreprises par l’acte d’opposition.
37534. La règle s’étend enfin au pourvoi en cassation. Pour le civiliste, l’assertion peut paraître erronée, tant il est classique d’affirmer que cette voie de recours est dépourvue d’effet dévolutif1079. Si le pourvoi en cassation n’a pas d’effet dévolutif, comment la dévolution ne pourrait-elle être que partielle ? En vérité, cette conception procède d’une acception stricte de la notion d’effet dévolutif. Ce dernier est conçu comme autorisant une connaissance de l’affaire sous tous ses aspects et non, uniquement, sous la seule considération du respect de la règle de droit. Pourtant, comme l’a démontré de manière fort convaincante Jaques Héron, le pourvoi en cassation se voit doté d’un effet dévolutif dont la limite naturelle est le rôle assigné à la Haute juridiction1080. Dire que cette juridiction ne connaît que d’une décision et non de l’affaire est quelque peu exagéré1081. Deux arguments viennent renforcer cette thèse. En premier lieu, les auteurs pénalistes1082 et la chambre criminelle de la Cour de cassation1083 n’hésitent pas à évoquer l’effet dévolutif que produit le pourvoi en cassation. En second lieu, il est clair que cette voie de recours permet une dévolution limitée quant à la matière. L’auteur du pourvoi peut restreindre sa critique à certains points de la décision attaquée. Certes la cassation obtenue sur ces points pourra éventuellement conduire à une remise en cause, devant la juridiction de renvoi, des chefs se trouvant dans la dépendance des points cassés, mais, en l’absence de dépendance ou d’indivisibilité, le principe demeure qu’ils sont irrévocables faute d’avoir été déférés à la Haute juridiction. Dans la mesure où cette juridiction, si elle entre en voie de cassation, se doit en principe de renvoyer l’affaire aux juges du fond, la question de l’étendue de la cassation se pose avec une particulière acuité1084. Il n’est dès lors pas étonnant que la jurisprudence soit foisonnante sur ce point. Pour délimiter l’étendue de sa saisine, la juridiction de renvoi après cassation doit se poser deux questions : quelles ont été les dispositions attaquées devant la Cour de cassation ? Quelles sont celles des dispositions attaquées qui ont été cassées1085 ?
38535. Pour l’instant, seule la première question, qui a trait à l’effet dévolutif, intéresse le propos1086. A cet égard, une évolution notable de la jurisprudence a eu lieu. Pendant longtemps le principe a été que : « la cassation d’un arrêt, quelques généraux et absolus que soient les termes dans lesquels elle a été prononcée, laisse subsister comme passés en force de chose jugée toutes les parties de la décision qui n’ont pas été attaquées par le pourvoi »1087. Ceci valait aussi bien au civil qu’au pénal, même si en cette dernière matière il n’existe pas de disposition analogue à celle de l’article 624 du nouveau Code de procédure civile. Ce texte, qui sert de fondement aux solutions civilistes, dispose que la « censure qui s’attache à un arrêt de cassation est limitée à la portée du moyen qui constitue la base de la cassation ». Pour les pénalistes, la solution va de soi, tant il paraît normal qu’un juge ne statue que sur ce que l’acte de saisine lui soumet1088.
39Pourtant, en dépit de ces règles, une évolution se dessine clairement dans le sens d’une prépondérance du libellé du dispositif de l’arrêt de cassation sur les règles de l’effet dévolutif. Depuis peu, en effet, la Haute juridiction considère que « la cassation d’une décision « dans toutes ses dispositions » investit la juridiction de renvoi de la connaissance de l’entier litige dans tous ses éléments de fait et de droit »1089. Cela vaut même si des chefs de la décision attaquée, clairement isolés, n’étaient pas visés par le pourvoi. Par exemple, dans un litige concernant une vente immobilière où la garantie du vendeur était mise en jeu, d’une part, pour des vices affectant la charpente et, d’autre part, à cause du caractère gélif des tuiles, le fait pour l’acquéreur, ayant obtenu gain de cause sur le second point, de limiter son pourvoi au premier point, n’interdit pas à la juridiction de renvoi, après une cassation de l’arrêt d’appel « dans toutes ses dispositions », de réexaminer la question des tuiles gélives1090. Le but d’une telle solution, de l’aveu de ses promoteurs1091, est d’éviter des discussions sans fin devant la cour de renvoi sur l’étendue de la cassation. Dès lors que l’arrêt de renvoi indique casser la décision dans toutes ces dispositions, l’intégralité de la chose jugée par cette dernière peut être remise en cause. Pourtant, une telle conception formelle semble contredire l’article 623 du nouveau Code de procédure civile qui invite plutôt à une appréhension matérielle de la cassation prononcée : « La cassation peut être totale ou partielle. Elle est partielle lorsqu’elle n’atteint que certains chefs dissociables des autres ». A l’évidence, dans l’espèce du 27 octobre 2006, la cassation n’atteignait que le chef relatif à la charpente, parfaitement détachable de celui concernant les tuiles. Cette conception catégorique faisant prévaloir le dispositif mal formulé1092 d’un arrêt de la Cour de cassation sur les termes du nouveau Code de procédure civile s’avère donc bien critiquable1093. Elle porte atteinte à la chose irrévocablement jugée. La solution de la chambre criminelle s’avère donc préférable1094.
40Quoi qu’il en soit, bien que limité par une exagération de la portée d’une cassation prononcée « dans toutes ses dispositions », l’effet dévolutif du pourvoi en cassation est bien réel. Au même titre que les autres, cette voie de recours peut donner lieu à une dévolution limitée quant à la matière. Cette dévolution partielle de l’affaire au juge de recours n’est cependant pas toujours possible ; c’est que, tout comme la divisibilité de l’instance quant aux parties, la divisibilité de l’instance quant à la matière connaît d’importantes limites.
2. Les limites à la règle tantum devolutum, quantum appelatum
41536. Les articles 562 et 624 du nouveau Code de procédure civile prévoient, respectivement pour l’appel et pour le pourvoi en cassation, les cas où la limitation du recours à certaines dispositions de la décision attaquée est sans effet. Ces deux textes visent l’indivisibilité ou la dépendance nécessaire qui existerait entre les chefs attaqués et les chefs délaissés1095.
42La notion de dépendance nécessaire semble impliquer une appréciation plus souple que celle d’indivisibilité. « L’idée générale que l’on peut en donner est qu’il y a dépendance nécessaire lorsqu’une décision est cassée [ou réformée] sur un chef du dispositif reposant sur un motif erroné sans lequel une autre disposition non attaquée par le pourvoi [ou par l’appel] n’aurait pu intervenir »1096. En jurisprudence, la Cour de cassation ne distingue d’ailleurs pas entre les cas d’indivisibilité et de dépendance nécessaire. Aucun effort de détermination des critères de chacune de ces notions ne semble avoir été entrepris, alors que les conséquences qui en résultent sont loin d’être négligeables1097.
43537. Il est vrai que ce défaut de systématisation n’est pas gênant lorsque la solution ne fait pas de doute. Il est par exemple évident que, si le recours est limité à la partie de la décision ayant refusé d’admettre le jeu d’une exception de procédure ou d’une fin de non-recevoir, la remise en cause de la chose jugée sur ce point entraîne dans son sillage l’anéantissement de la partie de la décision statuant au fond1098. De même, il n’est pas douteux que la cassation de la partie de la décision ayant admis le principe d’une responsabilité s’étend à la partie évaluant le dommage1099. Certaines situations, en revanche, sont moins évidentes à justifier. Ainsi, comment expliquer qu’un pourvoi en cassation limité aux conséquences d’un divorce remette en cause, en cas de cassation effectivement prononcée sur ce point, le principe même du divorce1100 ? Une solution contraire était concevable. Il est clair qu’en pareille hypothèse, « la Cour de cassation fait un usage extensif de l’indivisibilité en matière de divorce »1101. Tout aussi surprenant est l’arrêt par lequel la Cour de cassation considère qu’il n’y a pas de lien de dépendance nécessaire entre la disposition d’un arrêt statuant sur le caractère économique d’un licenciement et celle appréciant son caractère réel et sérieux. Alors que le caractère économique du licenciement avait été remis en cause sur pourvoi du salarié, la Haute juridiction approuve la juridiction de renvoi d’avoir considéré que la question de son caractère réel et sérieux avait été irrévocablement tranchée1102. Il est pourtant difficile de nier qu’un licenciement, selon sa cause, économique ou personnelle au salarié, appelle une argumentation différente de la part de l’employeur pour en justifier le bien-fondé.
44538. En procédure pénale, l’absence de texte et la pauvreté apparente de la jurisprudence rend plus hasardeuse la détermination des cas où il n’est pas possible de limiter un recours à certains chefs de la décision attaquée. Deux points, néanmoins, paraissent acquis : d’une part, l’action publique et l’action civile sont indépendantes, en conséquence de quoi le prévenu peut ne faire porter son recours que sur l’une ou l’autre de ces actions1103 ; d’autre part et conformément à la meilleure logique, le recours limité à la déclaration de culpabilité s’étend au prononcé de la peine1104. Se limiter à ce dernier arrêt laisse accroire qu’une interprétation a contrario est possible, s’autorisant elle-aussi de la meilleure logique : la seule remise en cause de la peine ne serait d’aucun effet au regard de la déclaration de culpabilité, tant le fait de s’être trompé quant à la conséquence juridique à déduire d’une règle ne signifie pas forcément qu’il y a erreur dans la mise en œuvre de son présupposé. Pourtant, si des arrêts statuent en ce sens1105, d’autres retiennent une position inverse, faisant jouer l’indivisibilité dans les deux sens1106. Ainsi a-t-il été décidé que l’annulation d’une peine complémentaire par la Cour de cassation emporte cassation totale des dispositions pénales de la décision attaquée1107.
45539. Au-delà de ces solutions, semble-t-il inconciliables, une question se pose : qu’en est-il en cas d’infractions connexes ou indivisibles ? Légalement, la connexité1108 et l’indivisibilité1109 n’ont pour effet principal que de permettre une prorogation de compétence matérielle ou territoriale1110. Rien n’est prévu dans les textes quant au régime des voies de recours et l’examen de la jurisprudence sur cette question conduit à dresser un procès-verbal de recherches infructueuses. Du côté de la doctrine, le résultat est également décevant : seul un article, de surcroît antérieur au Code de procédure pénale, évoque cette question1111. Traitant de l’opposition, cet auteur estime que dans l’hypothèse d’infractions connexes ou indivisibles, la voie de recours peut être limitée à l’une de ces infractions. Néanmoins, cette position doit être relativisée. Dans le cas où la personne poursuivie du chef de plusieurs infractions en concours a été relaxée ou acquittée relativement à l’une de ces infractions, il semble logique d’admettre que, sauf recours du ministère public, seules les autres infractions peuvent être déférées à la juridiction de recours. C’est une application du principe selon lequel une personne ne peut recourir que dans la limite de son intérêt et de sa qualité1112. Mais, dans l’hypothèse où les juges sont entrés en voie de condamnation pour toutes les infractions poursuivies, il convient de voir si les peines ont été cumulées ou non. A cet égard, le nouveau Code pénal a partiellement abandonné le principe de la confusion des peines en cas d’infractions en concours réel. La confusion ne porte plus que sur les peines de même nature (C. pén., art. 132-3)1113. Dès lors, il est permis de penser que la confusion des peines empêche la divisibilité du jugement, à l’occasion des voies de recours, quant aux différentes infractions poursuivies, cependant que le prononcé de peines différentes et distinctes permettra cette divisibilité.
46Le principe de la règle tantum devolutum, quantum appellatum et ses limites ayant été étudiés, il reste à en détailler les modalités de mise en œuvre.
B. La mise en œuvre de la règle tantum devolutum, quantum appellatum
47540. Après avoir montré quelles sont les formes procédurales d’un recours limité quant à la matière (1), les conséquences au regard de l’office de la juridiction de recours en seront exposées (2).
1. Les formes procédurales d’un recours limité quant à la matière
48541. Les formes procédurales à utiliser pour limiter une voie de recours à certains des points de la décision attaquée sont différentes en procédure civile (a) et procédure pénale (b).
a) En procédure civile
49542. En procédure civile, pour connaître l’étendue de la dévolution opérée par le recours, deux éléments sont à prendre en considération, qui interviennent dans l’ordre suivant.
50En premier lieu, c’est l’acte manifestant la volonté d’une partie de former un recours qui permet de restreindre la saisine de la juridiction de recours1114. La déclaration d’appel, d’opposition ou de pourvoi pourra ainsi être limitée1115. Les praticiens ont surtout l’habitude de parler d’appel limité, mais ce dernier terme peut tout aussi bien s’appliquer à ces autres voies de recours. Peu importe la forme que prend l’acte de recours, du moment que la volonté a été clairement manifestée d’en limiter l’étendue1116. A défaut de manifestation claire de volonté d’en limiter la portée, le recours opèrera une dévolution générale.
51543. Le juge, pour déterminer l’étendue de sa saisine en vertu de la règle tantum devolutum, quantum appellatum doit donc tenir compte, avant toute chose, de la déclaration de recours, étant précisé que plusieurs parties à la procédure peuvent avoir ainsi formalisé leur volonté de recourir en ne visant pas toujours les mêmes chefs de la décision attaquée. Une addition de ces différentes déclarations devra ainsi être effectuée.
52544. En second lieu, le juge doit s’attacher aux prétentions formulées par l’ensemble des parties.
53Dans les procédures avec représentation obligatoire, les conclusions détermineront l’étendue finale de la dévolution. A cet égard et depuis le décret du 28 décembre 1998, lorsque plusieurs jeux d’écritures ont été échangés entre les parties, ce sont les dernières conclusions qui doivent être prises en compte1117. Les prétentions et moyens qui n’auraient pas été expressément récapitulés sont réputés abandonnés1118.
54545. Dans les procédures sans représentation obligatoire, les écritures ne sont jamais que facultatives. En outre, même si les parties y ont recours, elles n’ont pas l’obligation de récapituler leurs prétentions. Bien que faisant partie des dispositions communes aux deux types de procédures, l’article 954 ne s’applique pas lorsque la procédure est orale1119. Quoi qu’il en soit, le juge ne doit bien évidemment prendre en compte que les prétentions effectivement formulées par les parties1120.
55Dès lors, les écritures se superposent à l’acte de recours pour fixer l’étendue de la saisine du juge. Il en résulte que la dévolution peut être restreinte ou étendue par rapport à celle résultant de la déclaration de recours.
56546. Les parties qui ont formalisé une déclaration de recours ne peuvent, par leurs prétentions ultérieures, élargir celui-ci à d’autres chefs de la décision attaquée. Le principe est souvent rappelé en cas d’appel limité1121. Par ces prétentions, elles ont en revanche la possibilité de réduire l’étendue de la déclaration de recours1122. Cette restriction s’analyse en une renonciation partielle au recours1123, laquelle est parfois implicitement déduite des écritures1124.
57Ce n’est que par le biais d’un recours incident ou provoqué, lequel émane par définition d’une autre partie, que la saisine peut être élargie. Un appel incident général peut ainsi suivre un appel principal limité1125. A ce titre, il n’y a pas lieu de distinguer selon que le recours incident ou provoqué se formalise par déclaration dans le délai ou en la forme des demandes incidentes hors délai (NCPC, art. 551 et 614)1126.
58547. Pour récapituler ces principes, la situation suivante peut être imaginée : un employeur a été condamné par le conseil de prud’hommes à payer à son ancien salarié des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle sérieuse ainsi que diverses sommes à titre de rappel de salaire. Le salarié à été débouté de sa demande tendant à voir ordonner une expertise afin d’évaluer le nombre d’heures supplémentaires qu’il aurait effectuées. Si le salarié interjette un appel limité à l’expertise et au montant des dommages et intérêts et que l’employeur, devant la cour, conclut à la confirmation du jugement entrepris, cette juridiction n’aura à connaître que de ces deux demandes. Si, autre hypothèse, le salarié renonce à sa demande d’expertise le jour de l’audience des plaidoiries, seule la question du quantum des dommages et intérêts sera dévolue à la cour. Enfin, si l’employeur, fort logiquement, répond à l’appel limité du salarié par un appel incident sur tous les points du jugement sauf celui relatif à l’expertise qui ne lui fait pas grief, la dévolution sera totale et la cour aura à réexaminer tous les points tranchés par le conseil de prud’hommes.
b) En procédure pénale
59548. En procédure pénale, il est nécessaire de distinguer selon le type de voies de recours suspensives exercé.
60Pour ce qui est de l’appel, la possibilité d’en limiter l’effet dévolutif ne s’opère pas de la même manière selon que l’auteur du recours est le ministère public ou une autre partie. S’il s’agit du ministère public, seule la déclaration d’appel est de nature à limiter la dévolution du litige à la cour. Cette dernière ne saurait apporter des restrictions que ne contient pas l’acte d’appel1127. Peu importent à cet égard les indications contenues dans la citation à comparaître devant la cour délivrée au prévenu à la requête du procureur général1128. En outre, une requête d’appel ou des conclusions prises à l’audience par le procureur de la République ne sont pas de nature à limiter les pouvoirs de la cour si la déclaration était des plus générales1129. Par exemple, le fait que le procureur de la République ait formulé, à la suite d’un appel général, une requête d’appel par laquelle il se bornait à critiquer le jugement en ce qu’il avait refusé de faire droit à la mesure de démolition demandée, ne prive pas la cour du pouvoir d’augmenter l’amende à laquelle le prévenu a été condamné en première instance1130. Cette impossibilité pour le ministère public de limiter un appel général qu’il aurait formé se comprend par l’interdiction qui lui est faite de renoncer à une voie de recours engagée, fût-ce partiellement1131. En revanche, rien n’interdit le prévenu, la partie civile, le civilement responsable ou l’assureur, de procéder à une telle renonciation1132. Ils peuvent donc limiter leur appel par l’acte qui le formalise1133 ou par conclusions ultérieures1134.
61549. Devant la Cour de cassation, la dévolution semble, comme en matière civile, pouvoir être réalisée en deux temps : le pourvoi peut d’emblée être limité par la déclaration faite à la juridiction qui a rendu la décision attaquée (CPP, art. 576)1135 ou bien ultérieurement, au moment du dépôt du mémoire contenant les moyens de cassation (CPP, art. 584)1136.
62550. Pour l’opposition enfin, la forme de cette voie de recours est libre1137 pourvu que la volonté de l’opposant soit portée à la connaissance du ministère public (CPP, art. 490). Il revient donc à la juridiction statuant sur cette opposition de déterminer l’étendue de sa saisine en fonction de la volonté exprimée par l’auteur du recours1138.
63Aussi bien en matière civile que pénale, la dévolution limitée du litige sur voie de recours est lourde de conséquences.
2. Les conséquences d’un recours limité quant à la matière
64551. Les chefs de la décision non-attaqués sont irrévocablement jugés. Il s’agit de la conséquence essentielle d’une telle limitation de l’effet dévolutif (a). Cette irrévocabilité partielle donnant lieu à d’importants effets, il n’est pas inutile, compte tenu de la complexité du problème, de s’attacher à fixer le moment de ce mode particulier d’accession à l’irrévocabilité (b).
a) L’irrévocabilité des chefs non attaqués
65552. La divisibilité du procès quant à la matière permet une dévolution limitée à certains points du litige lors de l’exercice d’une voie de recours. La conséquence à en tirer est la même, mutatis mutandis, que lorsque le procès, à l’occasion des voies de recours, se divise entre les parties. Dans ce dernier cas, il est acquis que les parties qui se sont tenues à l’écart de la voie de recours exercée par d’autres ne peuvent, en principe, se voir opposer la chose jugée sur ce recours ; les délais pour recourir étant expirés à leur égard, la décision est en ce qui les concerne irrévocable, bien que celle-ci soit critiquée par les autres parties et éventuellement remise en cause par le juge de recours1139. Dans l’hypothèse d’une dévolution limitée quant à la matière, c’est la portion de la décision qui échappe à la critique qui devient irrévocable. En limitant son appel ou son pourvoi à certains points de la décision attaquée, le demandeur à la voie de recours manifeste implicitement son approbation du reste. La solution est certaine, en jurisprudence1140 comme en doctrine1141, tant elle s’autorise d’une logique implacable : une voie de recours peut se limiter à certains points de la décision attaquée ; or, une voie de recours a pour fonction de remettre en cause la chose jugée par la décision attaquée ; donc, le recours partiel opère une remise en cause partielle. Il en résulte a contrario que ce qui n’est pas visé par le recours n’est pas remis en cause et devient donc irrévocable avec tous les effets qui en résultent. Pour ne citer qu’un exemple, si l’appel d’un jugement prononçant un divorce est limité à la condamnation portant sur la prestation compensatoire, la cour d’appel se doit de considérer, compte tenu des conclusions d’appel de l’époux défendeur également limitées à la question de la prestation compensatoire, que les deux parties ont implicitement, mais nécessairement, renoncé à critiquer les autres dispositions du jugement ; la question du divorce est donc irrévocablement tranchée par le jugement de première instance1142.
66Il est même possible d’affiner l’analyse en distinguant le cas dans lequel la limitation de la dévolution est opérée ab initio, par la ou les déclarations de recours, de celui où la limitation est opérée ultérieurement, par les prétentions respectives des parties, après une déclaration de recours général.
67553. Dans le premier cas, la situation doit s’analyser en un acquiescement implicite partiel au jugement1143. En limitant son recours à certains chefs tranchés par la décision attaquée, la partie reconnaît implicitement mais nécessairement le bien-fondé des autres chefs1144. La plupart du temps, ce sera le cas parce que les chefs non attaqués lui ont donné raison. Mais il est aussi possible qu’il se contente d’une décision lui donnant partiellement gain de cause, voire qu’il reconnaisse le bien-fondé de la décision lui donnant tort. C’est seulement dans ces dernières hypothèses qu’il y a acquiescement, puisque, dans la première, le plaideur, rempli des droits dont il se prévalait, est dénué d’intérêt à recourir. En tout état de cause, il en résulte que les chefs non déférés à la juridiction de recours deviendront irrévocables, par l’effet de cet acquiescement qui emporte renonciation aux voies de recours1145.
68554. En revanche, lorsque la limitation de l’effet dévolutif est opérée par les prétentions des parties, à la suite d’un recours non limité au stade de sa formation, la situation est différente. Il n’est pas possible de considérer qu’il s’agit d’un acquiescement partiel à la décision attaquée, puisque précisément elle fait l’objet d’une critique générale. Il faut y voir, plus justement, un désistement partiel de l’instance engagée1146. Certes ce désistement sera le plus souvent implicite1147, mais comme pour l’acquiescement, une manifestation implicite de volonté peut suffire (NCPC, art. 397 et 410). De même encore que l’acquiescement, le désistement vaut soumission aux chefs sur lesquels il porte, donc renonciation aux voies de recours, de telle sorte en définitive que, sur ces chefs, la décision entreprise est irrévocable1148.
69Cette distinction peut paraître excessivement théorique ; elle n’est pourtant pas dénuée d’intérêt pratique et devrait permettre une détermination plus précise du moment auquel se réalise cette accession partielle à l’irrévocabilité1149.
b) Le moment de l’irrévocabilité des chefs non attaqués
70555. Il convient de distinguer la situation où le recours est limité dès sa formalisation (α) de l’hypothèse où cette limitation résulte des prétentions ultérieures des parties (β)
α. La limitation du recours dès le stade de sa formation
71556. En présence d’un acquiescement partiel résultant d’un recours limité par l’acte qui l’introduit, il est admis que cet acquiescement ne produit effet qu’en l’absence de recours réciproque d’une autre partie. Si effectivement un tel recours est valablement intenté sur les points non critiqués par l’auteur du recours principal, l’acquiescement est non avenu (NCPC, art. 409)1150. Il paraît donc logique d’admettre que l’accession à l’irrévocabilité se réalise à l’expiration du délai dont disposent les autres parties pour recourir, solution que retient la Cour de cassation1151. A partir de là, il convient de s’interroger sur ce délai dont disposent les autres parties pour former un recours contre les chefs non dévolus par le recours principal.
72S’agissant des parties non citées en qualité de défenderesses à la voie de recours, il s’agit du délai imparti pour agir à titre principal. Le stade de l’irrévocabilité ne sera donc atteint que lorsque cette forclusion aura joué1152.
73557. Concernant les défendeurs à la voie de recours, l’irrévocabilité adviendra à l’expiration du délai pour faire un recours incident. Cela amène à distinguer selon la matière et selon la voie de recours concernée. En procédure pénale, l’appel incident doit être exercé dans un délai maximal de 5 jours après l’expiration du délai d’appel principal de 10 jours (CPP, art. 500). Le pourvoi incident doit quant à lui être impérativement exercé dans le délai normal de 10 jours1153. En procédure civile, l’article 550 du nouveau Code de procédure civile dispose que l’appel incident ou provoqué peut être formé en tout état de cause, alors même que celui qui l’interjetterait serait forclos pour agir à titre principal. Ainsi, dès lors qu’un appel principal a été formé dans le délai, un appel incident peut venir s’y greffer jusqu’à la date où l’objet du litige se trouve définitivement cristallisé1154. A la question de savoir si ce principe vaut même lorsque le recours est limité par l’acte qui l’introduit, la Cour de cassation répond par l’affirmative1155.
74558. Il existe pourtant de sérieuses raisons qui permettent de douter du bien-fondé de cette dernière solution. En droit, il est admis que l’appel incident formé hors délai se trouve sous la dépendance de l’appel principal. Si celui-ci s’avère irrecevable, celui-là tombe par voie de conséquence (NCPC, art. 550, al. 1, in fine)1156. Il est donc permis d’en déduire que l’appel incident hors délai n’est possible que dans les limites de l’appel principal qui lui sert de support. Par conséquent, cet appel incident ne peut sortir des bornes assignées par l’appel principal à l’effet dévolutif1157. En opportunité, la solution proposée est tout à fait raisonnable, car elle conserve une utilité certaine à la déclaration de recours limitée. La position adoptée par la Cour de cassation conduit au contraire à dénier tout avantage à celui qui procède à un tel recours limité. Aucun acquis ne résulte d’un tel acquiescement si l’intimé peut, hors du délai d’appel, étendre la dévolution opérée par l’acte d’appel. Finalement, le recours limité ne fait que se retourner contre l’appelant qui se trouve le seul à ne pas pouvoir sortir des limites de son recours. Admettre la solution proposée conduit alors à considérer que les points non visés par l’acte introduisant la voie de recours sont irrévocables à l’expiration du délai du recours, qui doit être impérativement respecté pour sortir des limites de l’appel principal. Le jeu normal de l’effet dévolutif devrait en tout cas conduire à admettre cette solution.
β. La limitation d’un recours général par les prétentions ultérieures des parties
75559. En présence d’un recours non limité par l’acte qui l’introduit, mais ultérieurement restreint par les prétentions et moyens respectifs des parties1158, le moment de l’irrévocabilité est forcément postérieur à l’expiration du délai de recours. Dans ce cas, il s’agit en effet d’un désistement implicite partiel. Il y donc lieu d’appliquer les règles dégagées quant à la détermination du moment de l’irrévocabilité en cas de désistement1159. Cela amène donc à distinguer selon que le désistement requiert ou non l’acceptation de celui à qui il est opposé. Dans le premier cas, l’irrévocabilité est conditionnée par l’acceptation du défendeur à la voie de recours1160. Dans le second, le désistement est parfait dès sa notification à l’adversaire ou à la juridiction (NCPC, art. 401 et 1024), sous réserve qu’un autre recours à titre principal ne soit pas recevable (NCPC, art. 403 et 1025).
76Or, ce ne sont pas là les solutions que consacre la jurisprudence majoritaire. Le contentieux du divorce fournit l’occasion de la discussion, car les enjeux sont importants : il s’agit de savoir si une demande de prestation compensatoire est recevable en appel ou de fixer le terme des mesures provisoires ordonnées pour la durée de la procédure, et notamment le terme de l’obligation à pension alimentaire, dont la prestation compensatoire ne prend pas toujours le relais1161.
77560. Selon que la voie de recours concernée est l’appel ou le pourvoi en cassation, les solutions retenues ne semblent pas conciliables. S’agissant d’un appel intenté à titre général et ultérieurement limité aux mesures accessoires du divorce, la Haute juridiction a décidé que le divorce n’était irrévocable, malgré cette limitation, qu’à la date du prononcé de l’arrêt d’appel1162. La cour d’appel doit considérer que la dévolution porte sur le tout et que, sur les points qui ne sont pas remis en cause dans les écritures des parties, il s’agit d’un appel non soutenu, si bien qu’elle doit confirmer le jugement1163. Quant au pourvoi limité aux conséquences du divorce par le mémoire de cassation, elle a décidé que : « la pension alimentaire allouée pendant la procédure de divorce prend fin à la date à laquelle le divorce devient irrévocable ; elle cesse d’être due, en cas de pourvoi, à la date de signification du pourvoi incident ou d’expiration du délai ouvert pour former ce pourvoi lorsque sont seules remises en cause les dispositions relatives aux conséquences financières du divorce »1164. Outre le fait que ces solutions ne sont pas conciliables1165, elles paraissent critiquables au regard des articles 401 et 1024 du nouveau Code de procédure civile. Si l’intimé ou le défendeur au pourvoi n’a pas formé de recours incident ou de demande incidente avant le désistement de l’appelant ou du demandeur au pourvoi, ce désistement est parfait dès sa notification. Point n’est besoin d’attendre le prononcé de la décision ou, même, l’écoulement du délai ouvert pour former recours incident. Retenir cette solution permettrait de clarifier la qualification de la situation résultant d’un recours général non soutenu sur certains points1166. De plus, le régime du désistement permet alors d’appliquer la même solution à l’appel et au pourvoi en cassation.
78561. Il est vrai que cette analyse semble alors s’opposer aux dispositions de l’article 550 qui autorisent un appel incident en tout état de cause1167. Dès que le demandeur à la voie de recours aura fait valoir ses prétentions limitant la critique de la décision attaquée à certains chefs, le défendeur ne pourra sortir de ces limites. La solution paralyse ainsi la faculté d’un recours incident et paraît bien trop radicale, compte tenu notamment du fait qu’il appartient au demandeur à la voie de recours de prendre l’initiative de faire valoir ses prétentions et moyens. En vérité, le mécanisme n’est pas aussi radical que cela, car il se combine avec le principe selon lequel le droit de recourir de chaque partie est fonction de son intérêt à agir. Généralement, l’auteur du recours général cantonne naturellement sa critique aux chefs du jugement qui lui causent grief au regard de ce qu’il avait demandé au précédent juge. Or, cette situation ne s’analyse pas comme un désistement, mais comme une application de la règle suivant laquelle l’intérêt à recourir se mesure à la succombance de chaque partie. Ainsi, les autres parties demeurent totalement libres, conformément aux articles 550 et 1010 du nouveau Code de procédure civile, d’intenter un recours incident hors du délai ouvert pour agir à titre principal, sur les points qui ne causent pas grief au demandeur, mais sur lesquels ils ont intérêt à recourir. En revanche, lorsque le demandeur à la voie de recours ne critique pas un chef de la décision qui ne joue qu’à son détriment, il s’agit d’un véritable désistement partiel, de telle sorte qu’il est parfait dès sa notification. Il ne pourra donc sortir des bornes de son appel, de même que le défendeur qui n’a pas d’intérêt à le faire sauf si, ayant préalablement conclu sur ce point, il peut invoquer le bénéfice des articles 401 et 1024 du nouveau Code de procédure civile. Une combinaison certes compliquée des règles du désistement et de la faculté de recourir à titre incident en résulte, mais une combinaison qui permet une conciliation raisonnable de chacune de ces règles.
79562. Un arrêt de la Cour de cassation peut servir de contre-épreuve à cette vue des choses. Dans un litige successoral opposant les enfants d’un premier lit à l’épouse en seconde noce, plusieurs demandes avaient été formées. Ayant interjeté appel à titre général de la décision ne leur donnant pas satisfaction, les enfants avaient, dans leurs premières conclusions, demandé à ce qu’il leur soit donné acte qu’ils renonçaient à la demande d’expertise qu’ils avaient formulée. Mais ultérieurement, dans les dernières conclusions, ils avaient réintroduit cette demande. La cour d’appel l’avait déclarée irrecevable aux motifs que cette limitation de l’appel à un chef du jugement ne permet pas aux appelants d’étendre ensuite l’appel à d’autres points hors le cas d’un appel provoqué. La Cour de cassation censure cette décision en considérant que « la dévolution s’opère pour le tout lorsque l’appel n’est pas limité à certains chefs ; la portée de l’appel est déterminée d’après l’état des dernières conclusions »1168. Or, pour exactes que soient ces deux affirmations contenues au chapeau de l’arrêt, il n’en demeure pas moins qu’il est fait abstraction de tout ce qui peut advenir entre ces deux moments extrêmes de la période où se détermine l’étendue de la dévolution. La solution de la cour d’appel semble à ce titre plus conforme à l’ensemble des dispositions qui fixent les limites de la saisine de la cour d’appel. Même si les juges du fond n’ont pas retenu la qualification de désistement, comment considérer que la demande de donné-acte de renonciation à une prétention ne s’analyse pas en un désistement partiel, exprimé de surcroît de la manière la plus expresse possible ? Dans cette affaire, la Cour de cassation semble faire totalement abstraction des dispositions de l’article 401 du nouveau Code de procédure civile, tout en se focalisant exagérément sur l’obligation de déposer des conclusions récapitulatives. Celles-ci n’ont pas la vertu d’effacer un désistement parfait dès sa notification ; elles ne peuvent que conduire à réputer abandonnés les prétentions et moyens non récapitulés et ne sauraient, au contraire, élargir une dévolution préalablement restreinte.
80563. Cette analyse paraît sérieusement fondée dès l’instant où l’effet dévolutif se conçoit comme un entonnoir. Même totale à l’origine, la dévolution ne peut évoluer que dans un sens, celui de la limitation. Sauf évocation ou demandes nouvelles, toute restriction valablement apportée à cette dévolution est irrévocable. Les parties ne peuvent y revenir, comme si un cliquet anti-retour1169 s’y opposait. Il en résulte un phénomène de décantation de la chose jugée, laquelle accède à l’irrévocabilité par paliers. C’est un phénomène semblable qui s’observe lorsqu’une cassation partielle laisse subsister comme irrévocables les points non concernés par cette cassation.
SECTION 2. L’IRRÉVOCABILITÉ LIMITÉE À LA PARTIE DE LA DÉCISION NON ATTEINTE PAR UNE CASSATION
81564. Le pourvoi en cassation présente cette particularité qu’il ne permet pas un réexamen complet de l’affaire. Si la décision attaquée encourt la critique, la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire se doit de renvoyer la cause et les parties devant les juges du fond pour que l’affaire reçoive une solution concrète. Ce n’est que par exception que la Haute juridiction peut d’elle-même trancher le litige en procédant à une cassation sans renvoi1170. La plupart du temps, le renvoi s’impose, soit pour des raisons de technique juridique, parce que les faits, tels qu’ils ont été souverainement appréciés par les juges du fond, ne permettent pas à la Cour de cassation de faire directement application de la règle de droit, soit pour des raisons d’opportunité, parce que la poursuite du « dialogue » avec les juges du fond peut s’avérer utile à la formation de la jurisprudence. De ce mécanisme, il résulte un rallongement inévitable de la procédure. En théorie, même, le procès peut ne jamais recevoir de fin : le renvoi à l’assemblée plénière de la Cour de cassation ne s’impose en effet que lorsque le pourvoi se fonde sur un moyen identique à celui ayant déjà justifié une cassation. En conséquence, si le pourvoi soulève à chaque fois des moyens différents, la Cour de cassation statuera en formation ordinaire, c’est-à-dire sans avoir le pouvoir d’imposer sa solution à la juridiction de renvoi. Il est donc nécessaire de lutter contre ce facteur de perpétuelle remise en cause de la chose jugée en limitant l’étendue de la saisine de la juridiction de renvoi1171. Et l’un des moyens de limiter le débat devant la juridiction du fond consiste, pour la Cour de cassation, à utiliser la technique des cassations partielles1172. S’il ne fait pas de doute que la portée d’une telle cassation se traduit par une accession partielle de la chose jugée à l’irrévocabilité (§ 1), il n’est en revanche pas toujours évident de déterminer tous les cas de cassation partielle (§ 2).
§ 1. La portée du caractère partiel de la cassation
82565. Toute cassation partielle constitue, réciproquement, un rejet partiel du pourvoi1173. Les points non touchés par la cassation deviennent ainsi irrévocables1174. L’étendue de l’irrévocabilité s’attache donc à une partie seulement de la décision attaquée. L’utilité d’une telle technique consiste à tenir pour acquis certains chefs du dispositif de la décision attaquée et, ce faisant, à circonscrire le débat devant la juridiction de renvoi aux seuls points remis en cause. De la même manière que ce qui se produit lorsque la critique de la décision est limitée par les parties à certains aspects du litige, un phénomène d’accession à l’irrévocabilité par paliers se produit. La seule différence porte sur le moment auquel intervient l’irrévocabilité. Alors qu’il a été vu que celle-ci est antérieure au prononcé de la décision en cas de cantonnement de l’effet dévolutif pas les parties, elle ne peut être que concomitante à ce prononcé lorsqu’il est procédé à une cassation partielle. Seule, effectivement, la Haute juridiction dispose du pouvoir de limiter la portée de la censure qu’elle prononce. C’est donc nécessairement au moment où sera rendue sa décision que sera connue l’ampleur de la cassation.
83566. En jurisprudence, la portée d’une cassation partielle se trouve souvent rappelée quant il est reproché à la juridiction de renvoi d’avoir outrepassé les limites de sa saisine en statuant sur des points échappant à la cassation prononcée. C’est ainsi que viole l’autorité de la chose jugée l’arrêt qui, statuant sur renvoi après cassation, déclare irrecevable l’action en nullité d’une vente immobilière au motif que le conservateur des hypothèques avait rejeté la formalité de publicité, alors que la cassation, intervenue dans la limite du moyen pris de la tardiveté de la formalité de publicité foncière, avait rendu la décision attaquée irrévocable en ce qu’elle décidait que cette formalité avait été effectivement remplie1175. De même, si la décision qui retient l’existence d’un concubinage notoire entre deux personnes et accueille une demande en recherche de paternité n’est cassée qu’en ce qui concerne les dispositions portant sur la reconnaissance du lien de filiation, la juridiction de renvoi doit tenir pour irrévocable la partie du dispositif statuant sur l’existence du concubinage1176. Les exemples où la Cour de cassation rappelle ces principes pourraient être multipliés à l’envie1177, y compris en matière pénale1178.
84567. La seule limite à ce morcellement de la chose jugée à l’occasion d’une cassation résulte naturellement des cas où un lien tellement étroit qu’il est impossible de les séparer unit plusieurs chefs du dispositif. La définition même de la cassation partielle se fait, du moins en procédure civile, sous cette réserve expresse : l’article 623 du nouveau Code de procédure civile indique que la cassation est partielle lorsqu’elle n’atteint que certains chefs dissociables des autres1179. Cette référence à l’indissociabilité paraît plus souple qu’un appel aux notions d’indivisibilité ou de dépendance nécessaire, mais en réalité aucune distinction ne semble résulter de cette variation terminologique. Les cas où la Cour de cassation peut procéder à une cassation partielle sont les mêmes que ceux où les parties peuvent limiter la dévolution à certains chefs de la décision attaquée1180, si bien qu’il suffit de renvoyer à ce qui a déjà été écrit à ce sujet1181.
85Pour les cassations partielles, la difficulté essentielle consiste à bien identifier les cas d’une telle cassation.
§ 2. La détermination du caractère partiel de la cassation
86568. Lorsque la Cour de cassation use de formules du type « casse en toutes ses dispositions… » ou « casse en son entier l’arrêt… », aucun doute ne porte sur l’étendue de la cassation1182. Réciproquement, il en va de même lorsqu’elle utilise l’expression « casse l’arrêt attaqué, mais seulement en ce qu’il a… ». Il s’agit alors d’une cassation partielle explicite éclairant sans difficulté les juges de renvoi sur l’étendue de leur saisine. Mais, même si des efforts significatifs ont été fournis par les magistrats de la Haute juridiction pour délimiter de la manière la plus expresse possible l’étendue des cassations qu’ils sont amenés à prononcer1183, il est revenu à la jurisprudence le soin d’apporter deux séries de précisions.
87569. En premier lieu, il convient de considérer que le dispositif de l’arrêt l’emporte sur les motifs. C’est ainsi que le fait de rejeter expressément un moyen, d’en admettre un autre pour, au final, prononcer une cassation totale, ne vaut pas cassation partielle1184. Malgré le rejet du moyen, le chef de la décision qu’il visait ne devra pas être tenu pour irrévocable. La juridiction de renvoi doit donc s’en tenir avant tout à la formulation du dispositif de l’arrêt de cassation. Ce n’est qu’en l’absence de précision dans le dispositif que le rejet d’un moyen pourra développer ses effets en conférant l’irrévocabilité aux chefs de la décision auxquels il s’attaquait1185.
88570. En second lieu, la cassation prononcée sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres moyens ne vaut pas plus cassation partielle. En se dispensant d’examiner ces autres moyens, les juges ne reconnaissent bien évidemment pas leur bien-fondé, mais considèrent qu’il est inutile d’aller plus loin puisque l’examen d’un seul de ces moyens suffit pour prononcer la cassation1186.
89571. La question s’est ensuite posée, en doctrine, de la signification à accorder au défaut d’examen d’un moyen. Il peut en effet advenir que les juges prononcent une cassation en faisant droit à l’argumentation développée par un moyen sans statuer sur d’autres. Si le dispositif de l’arrêt ne fournit aucune précision sur l’étendue de la cassation et que le moyen sur lequel il n’a pas été statué aurait pu conduire à la remise en cause de dispositions distinctes de celles effectivement cassées, un doute sérieux existe. Faye considérait que le doute devait se résoudre en faveur de la cassation totale1187. M. Voulet opte en revanche pour la cassation partielle, car « les décisions déférées doivent être présumées bien jugées »1188. MM. Boré placent quant à eux le débat sur le terrain de la difficulté d’interprétation justifiant le recours à la procédure prévue par l’article 461 du nouveau Code de procédure civile1189. Cette dernière position semble la plus raisonnable et, au demeurant, la Haute juridiction a déjà été amenée à faire application du principe selon lequel il appartient à tout juge d’interpréter sa décision1190.
90572. Un dernier point mérite d’être précisé. Les juridictions de renvoi sont souvent tentées de ne statuer que dans la limite du moyen ayant servi de base à la cassation. Si par exemple la cassation a été prononcée pour défaut de réponse à conclusions, les juges de renvoi peuvent considérer que leur saisine est réduite à la seule question du moyen délaissé. L’article 624 du nouveau Code de procédure civile semble, il est vrai, commander une telle interprétation : « La censure qui s’attache à un arrêt de cassation est limitée à la portée du moyen qui constitue la base de la cassation. » La formule s’avère en réalité trompeuse, car elle n’a d’autre but que de signifier que la cassation ne peut outrepasser les bornes assignées par les parties à leur pourvoi1191. Il ne faut voir là qu’une formulation malheureuse de la règle selon laquelle la cassation laisse subsister comme irrévocable toutes les parties de la décision qui n’ont pas été attaquées. Plutôt que de s’attacher à la base de la cassation – le moyen –, il convient de regarder son objet – le chef de la décision concerné. Et de ce chef, la cassation ne laisse rien subsister. La juridiction de renvoi doit donc procéder à un réexamen total de la partie de décision cassée, en fait et en droit1192. En définitive, « la cassation partielle n’est pas limitée au moyen technique qui a permis de l’obtenir, mais s’applique au dispositif que ce moyen a permis de faire tomber »1193.
CONCLUSION DU CHAPITRE II
91573. L’étendue de l’irrévocabilité varie en fonction du nombre de parties qui exercent ou n’exercent pas un recours, et selon les points litigieux qui sont effectivement soumis à la critique des juridictions de recours. Il s’agit d’une autre dimension de la relativité qui peut s’attacher au stade de l’irrévocabilité. Relatif non pas parce que d’autres voies de droit peuvent remettre en cause la décision irrévocable, mais relatif parce qu’une décision peut être irrévocable à l’égard d’une partie et non vis-à-vis d’une autre, ou irrévocable sur certaines demandes et non sur d’autres.
92L’objet du litige – terme commode pour résumer le complexe des demandes, défenses, exceptions et incidents composant une instance – s’avère effectivement divisible entre les parties et quant à sa matière, si bien qu’au fil des instances sur voies de recours, les décisions peuvent devenir partiellement irrévocables. Dès lors, l’accession à l’irrévocabilité n’apparaît pas forcément comme un phénomène monolithique, global et instantané, mais comme un processus pouvant jouer par paliers et par degrés successifs.
93574. Les seuls tempéraments qui peuvent venir freiner cette divisibilité du procès quant aux parties et quant à sa matière sont à rechercher dans les notions de solidarité, d’indissociabilité, de dépendance nécessaire et, bien sûr, d’indivisibilité.
94S’agissant du pourvoi en cassation, qui présente la particularité de dissocier la phase de destruction de la décision attaquée de celle de son remplacement, l’accession partielle à l’irrévocabilité joue à un double niveau. Elle résulte non seulement de l’effet dévolutif initialement voulu par les parties, mais encore de l’étendue de la cassation ensuite décidée par la Cour. Les pouvoirs de la juridiction de renvoi sont ainsi limités par ces deux moments où la décision est susceptible de devenir pour partie irrévocable.
Notes de bas de page
1016 Ce qui permet de remarquer que l’opposition entre les éléments subjectifs et objectifs du procès n’est pas tranchée.
1017 Cité par J.-P. MOREAU, Les limites au principe de la divisibilité de l’instance quant aux parties, LGDJ, 1966, préf. G. CORNU, p. 214.
1018 Les premiers auteurs à avoir remis en cause le principe d’indivisibilité de l’instance quant aux parties sont Bourbeau, Tissier et Glasson. Cette genèse de l’idée de divisibilité de l’instance et son impact en jurisprudence sont parfaitement retracés par J.-P. MOREAU, Les limites au principe de la divisibilité de l’instance quant aux parties, LGDJ, 1966, préf. G. CORNU, pp. 3 et ss.
1019 Un vestige de cette théorie demeure en droit positif : l’effet indivisible de la péremption. V. supra n° 443.
1020 J. HERON, Droit judiciaire privé, Montchrestien, 3ème éd. par T. LE BARS, 2006, n° 876.
1021 Civ. 2ème, 17 nov. 1993, RTD civ. 1994, p. 173, obs. R. PERROT.
1022 Crim., 5 oct. 1994, Bull. crim. n° 319. v. aussi : C. LAPP, « La divisibilité du jugement pénal et son effet sur le droit d’opposition », RS crim. 1951, pp. 249-255 ; Paris, 17 févr. 1964, JCP 1964, II, 13657, note P. CHAMBON et, de manière implicite : crim., 28 janv. 1985, Bull. crim. n° 43.
1023 L’inverse peut également se produire dans le cas où seulement ce qui a été jugé sur l’action publique est remis en cause par une voie de recours : crim., 15 oct. 1980, Bull. crim. n° 260 ; crim., 22 juill. 1981, Bull. crim. n° 235; civ. 1ère, 24 nov. 1998, D 1999, IR, p. 22; crim., 10 sept. 2003, JCP 2003, IV, n° 2882. Dans ce cas, deux hypotheses peuvent être distinguées : soit une relaxe, d’abord prononcée, est remplacée par une condamnation ; soit une condamnation est annulée, laissant place, sur voie de recours, à une relaxe. Dans la première hypothèse, la partie civile qui a n’a pas exercé de voie de recours ne saurait se prévaloir de la condamnation prononcée. Mais dans la seconde, le maintien des dispositions civiles irrévocables malgré la mise à néant de la décision en ce qui concerne l’action publique est plus problématique : autant il est possible, en cas de survie de l’action civile à l’action pénale, de concevoir une condamnation civile postérieure à une relaxe sur l’action publique dans l’hypothèse où la juridiction de recours estime qu’une infraction a bien été commise sans qu’il soit possible, pour des raisons procédurales, de prononcer une peine pénale ; autant il parait absurde de maintenir une condamnation civile au profit de la partie civile lorsque, ultérieurement à cette condamnation, la personne poursuivie parvient à faire reconnaître son innocence dans le cadre des voies de recours. Si la jurisprudence est hésitante sur la solution à adopter en pareille occurrence (Cass. civ., 1er juill. 1954, D 1955, p. 45, concl. LEMOINE, RTD civ. 1954, obs. P. HEBRAUD ; civ. 2ème, 27 juin 1984, D 1985, p. 199, concl. CHARBONNIER. Contra cass., ch. mixte, 19 mars 1982, D 1982, concl. J. CABANNES), un auteur à démontré, de manière tout à fait pertinente, qu’il est possible d’admettre que la décision civile est caduque pour perte de son fondement juridique : T. LE BARS, « La perte de fondement juridique en droit judiciaire privé », in J. FOYER et C. PUIGELIER [dir.], Le nouveau Code de procédure civile (1975-2005), Economica, 2006, pp. 269-293, n° 18.
1024 P. SAVEY-CASARD, « Le régime de l’action civile survivant à l’action publique », RS crim. 1976, pp. 319-328 ; Ph. BONFILS, L’action civile. Essai sur la nature juridique d’une institution, PUAM, 2000, préf. S. CIMAMONTI, spéc. pp. 453 et ss.
1025 crim., 6 janv. 1981, Bull. crim. n° 1 ; crim., 14 sept. 1985, Bull. crim. n° 284; crim., 7 janv. 1986, Bull. crim. n° 11; crim., 8 avr. 1991, Bull. crim. n° 165; crim., 18 juin 1991, RS crim. 1992, p. 115, obs. A. BRAUNSCHWEIG; crim., 5 oct. 1994, Bull. crim. n° 315; crim., 22 oct. 1997, Bull. crim. n° 345; crim., 27 mai 1999, Bull. crim. n° 109.
1026 Crim., 6 oct. 2004, Dr. pénal 2005, n° 14, obs. A. MARON ; 18 janv. 2005, D 2005, IR, p. 664, Procédures 2005, n° 112, obs. J. BUISSON ; crim., 22 nov. 2005, pourvoi n° 05-84826
1027 Crim., 30 mars 2005, D 2005, IR, p. 1246.
1028 C’est pourquoi le parquet a très souvent pour habitude d’interjeter systématiquement appel incident à la suite de l’appel de la partie civile : J. BANCAL, « De l’automatisme des appels a minima consécutifs à des appels limités aux intérêts civils », JCP 1965, I, 1883. La pratique parle « d’appels de courtoisie ».
1029 Un prévenu est recevable en cause d’appel à faire valoir des exceptions de nullité même s’il n’a pas fait appel, dès lors que le jugement attaqué par les autres parties l’a relaxé et que, par conséquent, il n’avait aucun intérêt à recourir : crim., 26 févr. 1985, Bull. crim. n° 93.
1030 Lorsqu’une partie intimée devant la cour d’appel s’abstient de faire appel incident, elle ne peut par la suite faire appel principal, même si le délai d’appel n’avait pas couru à son égard : sa comparution devant la cour épuise son droit de faire appel : civ. 2ème, 28 mai 2003, Bull. civ. II, n° 160, RTD civ. 2003, p. 549, obs. R. PERROT.
1031 J.-P. MOREAU, Les limites au principe de la divisibilité de l’instance quant aux parties, LGDJ, 1966, préf. G. CORNU, p. 172 ; pour des applications : Riom, 1ère ch., audience solennelle, 14 juin 1973, JCP 1974, II, 17624, note G. COUCHEZ (relativité du pourvoi en cassation en matière civile) ; civ. 1ère, 5 mai 1981, Bull. civ. I, n° 147 ; pour la matière pénale, v. notamment : crim., 6 sept. 1980, Bull. crim. n° 236 (l’appel d’une partie civile ne saurait profiter à une autre partie civile non-appelante) ; crim., 10 mai 1984, Bull. crim. n° 165 (le pourvoi de la partie civile est sans effet sur l’action publique, la décision attaquée étant irrévocable) ; civ. 2ème, 6 mai 2004, Procédures 2004, n° 161, obs. J. JUNILLON (l’appel du procureur général est sans effet sur l’action civile) ; crim., 9 mars 2005, D 2005, IR, p. 1302, JCP 2005, IV, n° 1978, crim., 19 janv. 2005, D 2005, IR, p. 664 (les appels du procureur de la République et du prévenu sont sans effet sur l’action civile). Néanmois, la réussite du recours intenté par les auteurs ou coauteurs d’une infraction, permet au complice ou co-auteur de cette infraction, à l’égard duquel une condamnation est irrévocable, d’obtenir la révision de celle-ci : crim., 24 mai 2006, pourvoi n° 05-86081.
1032 Mais ce nouveau recours ne pourra entreprendre les dispositions qui ont été cassées sur le pourvoi en cassation des autres parties : civ. 1ère, 25 nov. 1975, Bull. civ. I, n° 339.
1033 Le moment de cette irrévocabilité est donc à fixer au jour de l’expiration du délai pour recourir. Pour un exemple topique, v. : civ. 2ème, 6 mai 2004, Procédures 2004, n° 161, obs. J. JUNILLON.
1034 Pour une explication du principe de la divisibilité de l’instance quant aux parties fondée sur le respect des droits de la défense, v. J. MAROTTE, L’incompatibilité des décisions de justice en droit judiciaire privé interne, européen et international, Paris-X Nanterre, 2001, dactyl., n° 100.
1035 C. LAPP, « La divisibilité du jugement pénal et son effet sur le droit d’opposition », RS crim. 1951, pp. 249-255.
1036 Civ. 2ème, 17 nov. 1993, RTD civ. 1994, p. 173, obs. R. PERROT.
1037 Pour la cassation en matière civile, si le défendeur au pourvoi s’abstient de former un pourvoi incident ou provoqué, il sera irrecevable à le faire ultérieurement (NCPC, art. 621, al. 3).
1038 Pour l’appel en matière criminelle, v. CPP, art. 380-3 et 380-6.
1039 P.-D. de BOISVILLIERS, « La règle de l’interdiction d’aggraver le sort du prévenu », RS crim. 1993, pp. 694-716, spéc. n° 3.
1040 Ibid. n° 22et ss.
1041 Crim., 26 mars 2003, D 2003, IR, p. 1480 ; crim., 28 avr. 2004, D 2004, IR, p. 1709 ; crim., 31 oct. 2006, pourvoi n° 06-82372, D 2007, AJ, p. 84.
1042 Crim., 7 déc. 2005, pourvoi n° 05-80988.
1043 Pour des applications de la règle en faveur du prévenu, V. par ex. : crim., 18 juill. 1975, Bull. crim. n° 189; crim., 8 juin 1988, Bull. crim. n° 263; crim., 19 mars 1991, Bull. crim. n° 132; crim., 21 nov. 2001, D 2002, IR, p. 251.
1044 V. par ex. : crim., 8 oct. 2003, JCP 2003, IV, n° 2971, Procédures 2004, n° 9, obs. J. BUISSON.
1045 P.-D. de BOISVILLIERS, « La règle de l’interdiction d’aggraver le sort de la partie civile et de la partie civilement responsable », RS crim.1994, pp. 237-253. Pour une application, V. par ex. : crim., 21 nov. 1972, Bull. crim. n° 347.
1046 Pour une application, v. crim., 7 déc. 1999, D 2000, IR, p. 55.
1047 Civ. 2ème, 26 juin 1991, Bull. civ. II, n° 192 ; com., 3 nov. 1992, Bull. civ. IV, n° 343 (dans cet arrêt, la chambre commerciale casse au visa du « principe selon lequel les juges d’appel ne peuvent aggraver le sort de l’appelant sur son unique appel ») ; civ. 2ème, 11 janv. 1995, Bull. civ. II, n° 4 ; civ. 2ème, 13 mai 2004, JCP 2004, IV, n° 2362 ; civ. 2ème, 23 juin 2005, pourvoi n° 03-16382.
1048 J. MAROTTE, L’incompatibilité des décisions de justice en droit judiciaire privé interne, européen et international, Paris-X Nanterre, 2001, dactyl., n° 102.
1049 Crim., 14 sept. 1985, Bull. crim. n° 284.
1050 J.-P. MOREAU, Les limites au principe de la divisibilité de l’instance quant aux parties, LGDJ, 1966, préf. G. CORNU.
1051 La plupart du temps, c’est parce que cette partie est citée comme défenderesse à la voie de recours. adde., sur l’impossibilité de former un pourvoi contre « toutes autres personnes désignées par la décision attaquée » : civ. 3ème, 10 mai 2002, D 2002, IR, p. 2233.
1052 L’alinéa 2 de ce texte pose un principe symétrique lorsque les litisconsorts ont obtenu gain de cause et que leur adversaire n’interjette appel qu’à l’encontre d’un seul des consorts. Les autres peuvent être attraits à la cause, même par un appel inscrit hors délai. Pour une application : civ. 3ème, 23 juin 1999, JCP 2000, II, 10260, note E. du RUSQUEC.
1053 Com., 9 avr. 2002, Procédures 2002, n° 111, obs. R. PERROT ; civ. 2ème, 20 janvier 2005, D 2005, IR, p. 456.
1054 V. infra n° 536 et ss.
1055 J. BORE, La cassation en matière pénale, LGDJ, 1985, n° 930.
1056 Ibid. n° 931 et la jurisprudence citée.
1057 Crim., 18 avr. 1988, Bull. crim. n° 163.
1058 Lorsqu’un prévenu condamné par défaut forme opposition, l’effet extinctif de cette voie de recours (CPP, art. 589) s’étend à la condamnation du civilement responsable si toutefois celui-ci a formé un pourvoi contre la décision contradictoire à son égard. Ce pourvoi devient dès lors sans objet : crim., 4 oct. 1995, Bull. crim. n° 295.
1059 Crim., 19 déc. 1988, Bull. crim. n° 433.
1060 Sur la notion d’indivisibilité en matière de voies de recours, v. J.-C. GROSLIERE, L’indivisibilité en matière de voies de recours, LGDJ, 1959, pp. 19 et ss. Pour une étude de droit privé plus transversale, qui n’embrasse toutefois pas les effets procéduraux de la notion, v. J.-B. SEUBE, L’indivisibilité et les actes juridiques, Litec, 1999, préf. M. CABRILLAC. En matière procédurale, « l’indivisibilité se reconnaît au risque d’une impossibilité d’exécution si l’on devait se trouver en présence de décisions distinctes » (R. PERROT, obs. sous com., 9 avr. 2002, Procédures 2002, n° 111) Ce critère, qui exclut de considérer la nature des rapports d’obligations en cause, est consacré par la Haute juridiction (civ. 2ème, 12 oct. 2006, pourvoi n° 05-14573, Dr. et proc. 2007, n° 2, p. 76, obs. F. VINCKEL ; civ. 1ère, 20 mars 2007, pourvoi n° 05-11296, JCP 2007, IV, n° 1864). Pour des exemples d’actions jugées indivisibles, v. notamment : civ. 3ème, 30 nov. 1977, Bull. civ. III, n° 420 (action en résolution d’une vente indivisible entre les covendeurs) ; civ. 1ère, 19 nov. 1996, Rép. not. deF. 1997, p. 861, obs. D. TALON (la question de la validité d’un testament instituant un tiers en qualité de légataire universel est indivisible à l’égard des héritiers ad intestat) ; civ. 1ère, 22 nov. 1994, Bull. civ. I, n° 342 (en cas de surendettement de deux époux, les mesures adoptées par la commission de surendettement ont un caractère indivisible entre ces deux époux) ; civ. 1ère, 12 oct. 2004, D 2004, IR, p. 3035 (action en responsabilité indivisible entre l’assuré et son assureur).
1061 V. pour un exemple : civ. 1ère, 12 oct. 2004, D 2004, IR, p. 3035.
1062 Civ. 3ème, 10 mars 1981, D 1981, p. 429, note J. BORE.
1063 Civ. 1ère, 5 juin 1985, D 1986, p. 361, note J.-L. AUBERT ; Gaz. pal. 1985, panor., p. 296, obs. S. GUINCHARD et T. MOUSSA.
1064 En dehors de ces situations, quelle est la conception à adopter lorsque plusieurs personnes ont été condamnées solidairement à des restitutions ou à des dommages et intérêts en vertu des articles 375-2 et 480-1 du Code de procédure pénale ? Par souci de conformité avec la solution retenue au civil, il serait souhaitable que le recours de l’un des coobligés solidaires profite à celui qui ne s’est pas pourvu. Comp. avec : civ. 1ère, 24 nov. 1998, D 1999, IR, p. 22.
1065 Crim., 29 sept. 1993, Bull. crim. n° 270.
1066 Crim., 19 juin 1996, Bull. crim. n° 262.
1067 Crim., 29 févr. 2000, Bull. crim. n° 90 ; un arrêt a cependant fait jouer cette extension de la cassation au détriment d’un assureur : crim., 5 févr. 2002, Bull. crim. n° 17, JCP 2002, I, 155, n° 12.
1068 Crim., 12 févr. 1997, Bull. crim. n° 57.
1069 J. BORE, La cassation en matière pénale, LGDJ, 1985, n° 920.
1070 Crim., 28 janv. 2000, JCP 2001, I, 289, n° 11, obs. A. MARON.
1071 Crim., 4 nov. 1985, Bull. crim. n° 339; crim., 6 févr. 2001, Bull. crim. n° 34.
1072 En jurisprudence, la principale illustration du jeu d’un effet dévolutif limité quant à la matière résulte du cas où le prévenu cantonne son appel aux dispositions civiles ou pénales du jugement : crim., 6 sept. 1980, Bull. crim. n° 236 ; crim., 15 oct. 1980, Bull. crim. n° 260 ; crim., 22 juill. 1980, Bull. crim. n° 235 ; crim., 24 mars 1999, Bull. crim. n° 54. V. aussi crim., 8 janv. 1998, Bull. crim. n° 8 (appel de l’administration des douanes, exerçant tant l’action publique que l’action civile en première instance, limité aux dispositions civiles du jugement).
1073 Crim., 2 févr. 2005, D 2005, IR, p. 795, Procédures 2005, n° 136, obs. J. BUISSON.
1074 Il y a lieu de rappeler qu’en raison de la qualité de l’opposant, l’effet dévolutif de l’opposition ne peut concerner que les dispositions qui lui font grief : v. supra n° 510 et s.
1075 Crim., 5 oct. 1994, Bull. crim. n° 319, déjà évoqué supra n° 511 ; la généralité de l’effet extinctif de l’acte d’opposition, telle que prévue par l’article 489, n’aurait en réalité pour but que d’insister sur le fait que l’anéantissement vaut aussi bien pour le dispositif que pour les motifs de la décision par défaut : P. CHAMBON, note sous Paris, 17 févr. 1964, JCP 1964, II, 13657.
1076 La disposition vaut également pour l’appel d’un jugement du tribunal de police (CPP, art. 545).
1077 Pour une application, v. crim., 24 janv. 1979, Bull. crim. n° 36. Si le prévenu peut limiter son opposition aux seules dispositions civiles de la décision, l’inverse n’est pas possible, ce qui est une saine précaution permettant d’éviter qu’une condamnation au titre des intérêts civils ne perde son fondement juridique si une relaxe intervient dans le cadre de l’action publique : crim., 16 mai 2006, pourvoi n° 05-85080.
1078 C. LAPP, « La divisibilité du jugement pénal et son effet sur le droit d’opposition », RS crim. 1951, pp. 249-255, spéc. p. 253 ; P. CHAMBON, note sous Paris, 17 févr. 1964, JCP 1964, II, 13657.
1079 G. CORNU et J. FOYER, Procédure civile, PUF, 3ème éd., 1996, n° 144, p. 606 ; L. CADIET et E. JEULAND, Droit judiciaire privé, Litec, 5ème éd., 2006, n° 872 ; S. GUINCHARD et F. FERRAND, Procédure civile, Droit interne et droit communautaire, Dalloz, 28ème éd., 2006, n° 1814.
1080 J. HERON, Droit judiciaire privé, Montchrestien, 3ème éd. par T. LE BARS, 2006, n° 783. Certains auteurs se sont ralliés à cette analyse : L. BORE et J. de SALVE DE BRUNETON, « Quelques idées sur le pourvoi en cassation », D 2005, pp. 180-184 ; J. et L. BORE, La cassation en matière civile, Dalloz, 3ème éd., 2003/2004, n° 103 et ss. Un autre, se référant à une définition stricte de l’effet dévolutif, critique cette analyse : K. SALHI, Contribution à une théorie générale des voies de recours en droit judiciaire privé, thèse, Caen, 2004, dactyl., n° 420, note 862.
1081 J. HERON, « Convention européenne des droits de l’homme et théorie générale des voies de recours », in Le juge entre deux millénaires, Mélanges offerts à Pierre Drai, Dalloz, 2000, pp. 369-399, spéc. n° 13.
1082 B. BOULOC, Procédure pénale, Dalloz, 20ème éd., 2006, n° 948 ; J. BORE, La cassation en matière pénale, LGDJ, 1985, n° 657 et ss. ; S. GUINCHARD et J. BUISSON, Procédure pénale, Litec, 3ème éd., 2005, n° 2162 ; J. PRADEL, Procédure pénale, Cujas, 13ème éd., 2006, n° 1001 ; M.-L. RASSAT, Manuel de procédure pénale, PUF, 2002, n° 342. Contra : E. VERGES, Procédure pénale, Litec, 2005, n° 470.
1083 Crim., 17 sept. 2002, pourvoi n° 01-87696.
1084 A la différence de la juridiction statuant sur appel ou opposition qui statue à nouveau immédiatement après avoir réformé ou rétracté les chefs de décision concernés.
1085 J. VOULET, « L’étendue de la cassation en matière civile », JCP 1977, I, 2877 ; J.-Cl. Procédure, fasc. 798, Effets et suites des arrêts de la Cour de cassation, par O. RENARD-PAYEN, n° 96 et ss.
1086 Sur la seconde et ses conséquences sur les pouvoirs de la juridiction de renvoi, v. infra n° 564 et ss.
1087 L’expression « passés en force de chose jugée » est ici employée au sens d’« irrévocables ». Ce terme, préférable, est d’ailleurs parfois employé : civ. 3ème, 27 févr. 1969, Bull. civ. III, n° 177 ; civ. 3ème, 16 oct. 1969, Bull. civ. III, n° 654 ; civ. 2ème, 12 juill. 1971, Bull. civ. II, n° 253 ; civ. 3ème, 22 févr. 1972, Bull. civ. III, n° 118 (emploi du terme « irrévocable ») ; civ. 3ème, 19 avr. 1972, Bull. civ. III, n° 246 ; com., 26 févr. 1973, Bull. civ. IV, n° 92 ; crim., 15 nov. 1973, Bull. crim. n° 420 ; civ. 3ème, 4 déc. 1973, Bull. civ. III, n° 612 ; com., 3 mai 1976, Bull. civ. IV, n° 141 ; civ. 3ème, 23 mars 1982, Bull. civ. III, n° 76 ; crim., 10 mai 1984, Bull. crim. n° 165 ; crim., 14 mai 1984, Bull. crim. n° 173 ; com., 18 déc. 1984, Bull. civ. IV, n° 350 (emploi du terme « irrévocable ») ; crim., 9 juin 1986, Bull. crim. n° 196 ; civ. 1ère, 19 juill. 1989, Bull. civ. I, n° 295 ; soc., 4 avr. 1990, Bull. civ. V, n° 167 ; soc., 21 janv. 1998, Bull. civ. V, n° 26 ; civ. 3ème, 5 mai 1999, Bull. civ. III, n° 106 ; civ. 1ère, 12 oct. 1999, Bull. civ. I, n° 261 ; civ. 1ère, 12 mars 2002, JCP 2002, IV, n° 1701 ; soc., 6 févr. 2003, pourvoi n° 01-03852.
1088 Lorsqu’une cour d’appel statue au-delà de ce que l’acte d’appel lui avait dévolu, la chambre criminelle invoque la violation des règles de la saisine : crim., 2 janv. 1980, Bull. crim. n° 2 ; crim., 15 mai 1984, Bull. crim. n° 175.
1089 Civ. 1ère, 7 déc. 1999, Bull. civ. I, n° 334 ; civ. 1ère, 2 mai 2001, Bull. civ. II, n° 109 ; com., 15 oct. 2002, Bull. civ. IV, n° 142 ; civ. 2ème, 28 févr. 2006, pourvoi n° 04-12936 ; civ. 2ème, 13 juillet 2006, pourvoi n° 04-12984, D 2006, IR, p. 2123 ; soc., 5 déc. 2006, pourvoi n° 05-697 ; civ. 1ère, 12 déc. 2006, pourvoi n° 05-21388. En revanche, la chambre criminelle, qui n’applique pas les mêmes textes de procédure, ne retient pas une telle solution : crim., 6 mars 2007, pourvoi n° 06-84160, D 2007, AJ, p. 1273.
1090 Cass. ass. plén., 27 oct. 2006, pourvoi n° 05-18977, rapport RIVIERE, avis CAVARROC, BICC n° 653 du 15 janv. 2007, p. 55, JCP 2007, II, 10019, note (crit.) L. LEVENEUR.
1091 V. le rapport et l’avis précités de MM. RIVIERE et CAVARROC.
1092 Dans l’hypothèse où le débat devant la Cour de cassation ne porte que sur certaines prétentions et qu’une cassation est prononcée, celle-ci devrait dès lors être partielle et formulée comme telle par la Haute juridiction.
1093 Même en opportunité, sous prétexte d’éviter les discussions sans fin sur l’étendue de la cassation, il est permis aux parties de remettre en cause tous les points qui avaient été jugés par les juges du fond et qui n’étaient pourtant pas atteints par la cassation. La Haute juridiction ferme une porte pour finalement en ouvrir une autre, plus grande encore… En s’inspirant d’un cas jugé par la Cour de cassation, ainsi serait-il permis de discuter à nouveau de la recevabilité d’un appel dès lors que la juridiction d’appel initialement saisie avait écarté cette fin de non-recevoir et que la cassation prononcée porte sur le fond de l’affaire et nullement sur cette question de recevabilité ? Comp. avec soc., 6 févr. 2003, pourvoi n° 01-03852, qui ne retient pas une telle solution alors que depuis 1999 au moins la Haute juridiction a amorcé son revirement de jurisprudence.
1094 Crim., 6 mars 2007, précité.
1095 La jurisprudence fait également application de la notion d’indivisibilité ou d’indissociabilité pour contrecarrer les effets d’une opposition limitée à certains chefs de la décision par défaut : R. PERROT, obs. sous civ. 2ème, 17 nov. 1993, RTD civ. 1994, p. 173.
1096 J.-Cl. Procédure, fasc. 798, Effets et suites des arrêts de la Cour de cassation, par O. RENARD-PAYEN, n° 108.
1097 La doctrine, pour sa part, cherche depuis longtemps à fixer les critères de l’indivisibilité : J.-C. GROSLIERE, L’indivisibilité en matière de voies de recours, LGDJ, 1959, pp. 19 et ss. ; J.-P. MOREAU, Les limites au principe de la divisibilité de l’instance quant aux parties, LGDJ, 1966, préf. G. CORNU, spéc. 3ème partie, où l’auteur envisage l’indivisibilité tenant à l’objet du litige ; J.-B. SEUBE, L’indivisibilité et les actes juridiques, Litec, 1999, préf. M. CABRILLAC.
1098 Civ. 1ère, 23 juin 1969, Bull. civ. I, n° 241 ; civ. 3ème, 10 janv. 1973, Bull. civ. III, n° 40. La réciproque, bien évidemment, n’est pas vraie ; la limitation d’un pourvoi à une question de fond laisse subsister comme irrévocable le rejet des moyens de procédure : civ. 3ème, 4 déc. 1973, Bull. civ. III, n° 612.
1099 Civ. 2ème, 23 mai 1984, Bull. civ. II, n° 88 ; civ. 2ème, 26 oct. 2006, pourvoi n° 05-21398, Dr. et proc. 2007, n° 2, p. 78, obs. O.SALATI. Pour d’autres exemples fort logiques : com., 16 févr. 1976, Bull. civ. IV, n° 52 (lorsque le juge du fond a alloué une somme unique en réparation de divers chefs de préjudice, la cassation sur l’un d’eux doit s’étendre aux autres) ; soc., 28 sept. 1983, Bull. civ. V, n° 467 et civ. 2ème, 15 déc. 2005, pourvoi n° 04-12299 (la cassation sur le fond entraîne cassation du chef statuant sur les dépens et les frais irrépétibles).
1100 Civ. 2ème, 20 juill. 1987, Bull. civ. II, n° 172.
1101 J. HERON, Droit judiciaire privé, Montchrestien, 3ème éd. par T. LE BARS, 2006, n° 828, note 191, et les différentes illustrations jurisprudentielles citées par ces auteurs.
1102 Soc., 5 nov. 1986, Bull. civ. V, n° 503.
1103 Sauf en ce qui concerne l’appel en matière criminelle qui, aboutissant à un réexamen de l’affaire, produit un effet dévolutif total : crim., 2 févr. 2005, D 2005, IR, p. 795, Procédures 2005, n° 136, obs. J. BUISSON.
1104 Crim., 6 juin 1988, Bull. crim. n° 247.
1105 Crim., 29 mai 1996, Bull. crim. n° 220 ; crim., 14 mai 1997, Bull. crim. n° 181 (dès lors que la déclaration de culpabilité n’encourt pas la censure, la cassation peut être limitée aux seules peines prononcées).
1106 Crim., 10 juill. 1996, Bull. crim. n° 292.
1107 Crim., 9 juill. 1980, Bull. crim. n° 222.
1108 L’article 203 du Code de procédure pénale énonce les causes de connexité entre infractions.
1109 La différence avec la connexité est plus de degré que de nature : l’indivisibilité, notion jurisprudentielle, serait constituée entre plusieurs faits par « un lien tellement intime que l’existence des uns ne se comprendrait pas sans l’existence des autres » (crim., 13 juin 1968, Bull. crim. n° 196).
1110 Pour la connexité la jonction est facultative, alors que pour l’indivisibilité, elle est obligatoire : S. GUINCHARD et J. BUISSON, Procédure pénale, Litec, 3ème éd., 2005, n° 1065 et ss. ; B. BOULOC, Procédure pénale, Dalloz, 20ème éd., 2006, n° 571 et ss. Sur les effets secondaires de la connexité et de l’indivisibilité, v. J.-Cl. Procédure pénale, fasc. 60, Chambre d’accusation, Connexité et indivisibilité, par H. ANGEVIN.
1111 C. LAPP, « La divisibilité du jugement pénal et son effet sur le droit d’opposition », RS crim. 1951, pp. 249-255, spéc. p. 255.
1112 V. supra n° 79 et ss.
1113 B. BOULOC, Procédure pénale, Dalloz, 20ème éd., 2006, n° 692.
1114 V. par ex. : J.-P. DUHAMEL, « L’effet dévolutif de l’appel au regard de l’acte d’appel et des écritures des parties », BICC, n° hors-série, rencontres Université-Cour de cassation, La procédure civile, JORF, 2002, pp. 48-51.
1115 Pour des exemples de déclaration d’appel limitée, V. par ex. : civ. 2ème, 15 mai 1972, Bull. civ. II, n° 146; Reims, 25 oct. 1976, JCP 1977, II, 18655, obs. J. A. ; civ. 1ère, 22 juin 1999, Procédures 1999, n° 193, obs. R PERROT, JCP 2000, II, 10275, note E. du RUSQUEC ; civ. 2ème, 7 mars 2002, JCP 2002, IV, n° 1665 ; civ. 3ème, 15 mai 2002, JCP 2002, IV, n ° 2096.
1116 Dans les procédures sans représentation obligatoire, une déclaration verbale au greffe permet ainsi de formaliser le recours, laquelle pourra très bien préciser l’étendue du recours.
1117 Pour l’appel, l’article 954, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile pose cette exigence ; pour l’opposition formée contre une décision du tribunal de grande instance, il y a lieu de se référer à l’article 753 de ce Code.
1118 Ce n’est pas à une simple compilation de l’ensemble des écritures précédemment échangées que doit se livrer l’auxiliaire de justice, mais à un véritable travail de synthèse : Orléans, 15 septembre 2000, JCP 2001, II, 10511, note R. MARTIN ; G. BOLARD, « Les dernières conclusions », JCP 2001, I, 297. Toute formule de renvoi ou de référence aux écritures précédentes est dépourvue de portée : cass., avis, 10 juill. 2000, Procédures 2000, n° 231, obs. R. PERROT, D 2000, p. 837, note A. LACABARATS, JCP 2000, I, 267, n° 9, obs. L. CADIET, JCP 2000, II, 10404, note A. PERDRIAU.
1119 Civ. 2ème, 30 avr. 2002, JCP 2002, II, 10129, note H. CROZE, Procédures 2002, n° 138, obs. R. PERROT, D 2002, IR, p. 1594.
1120 Dans les procédures orales, le greffe doit consigner au procès-verbal d’audience ou noter au dossier les demandes des parties ou la référence qu’elles font aux écritures éventuellement déposées : NCPC, art. 843, al. 2, 871, al. 2 et 946, al. 2 ; C. trav., art. 516-7 ; décret du 31 juill. 1992, art. 13, al. 2.
1121 Civ. 2ème, 15 mai 1972, Bull. civ. II, n° 146; Reims, 25 oct. 1976, JCP 1977, II, 18655, obs. J. A. ; civ. 1ère, 22 juin 1999, Procédures 1999, n° 193, obs. R PERROT, JCP 2000, II, 10275, note E. du RUSQUEC ; civ. 2ème, 7 mars 2002, JCP 2002, IV, n° 1665 ; civ. 3ème, 15 mai 2002, JCP 2002, IV, n° 2096.
1122 Civ. 2ème, 17 juin 1965, Bull. civ. II, n° 521 ; civ. 2ème, 28 janv. 1987, Bull. civ. II, n° 25 ; civ. 2ème, 13 juill. 1999, Procédures 1999, n° 275, obs. J. JUNILLON ; civ. 2ème, 10 févr. 2000, RTD civ. 2000, p. 407, obs. R. PERROT ; civ. 1ère, 8 janv. 2002, Procédures 2002, n° 42, obs. R. PERROT.
1123 Civ. 2ème, 28 janv. 1987, Bull. civ. II, n° 25 (désistement accepté) ; 8 janv. 2002, Procédures 2002, n° 42, obs. R. PERROT (donné-acte de renonciation à une demande).
1124 Civ. 2ème, 17 juin 1965, Bull. civ. II, n° 521 ; civ. 2ème, 10 févr. 2000, RTD civ. 2000, p. 407, obs. R. PERROT.
1125 Soc., 28 nov. 2000, Procédures 2001, n° 2, obs. R. PERROT, RJS 2/01, n° 228.
1126 Pour une critique de cette solution, v. infra n° 557 et s.
1127 Crim., 12 déc. 1988, Bull. crim. n° 417 ; S. GUINCHARD et J. BUISSON, Procédure pénale, Litec, 3ème éd., 2005, n° 2122.
1128 Crim., 21 janv. 1991, Bull. crim. n° 35.
1129 Crim., 3 nov. 1964, JCP 1964, II, 13966, rapport COMBALDIEU.
1130 Crim., 26 mars 1974, Bull. crim. n° 128. V. aussi : crim., 30 janv. 1985, Bull. crim. n° 51 ; crim., 5 févr. 1985, Bull. crim. n° 56 ; crim., 19 juin 1985, Bull. crim. n° 194.
1131 V. supra n° 307.
1132 Comp. crim., 28 nov. 1989, Bull. crim. n° 442 (Une cour d’appel peut passer outre au désistement du prévenu si celui-ci est assorti de réserves).
1133 Crim., 7 avr. 1976, Bull. crim. n° 104 ; crim., 25 mai 2004, JCP 2004, IV, n° 2579.
1134 J. PRADEL, Procédure pénale, Cujas, 13ème éd., 2006, n° 967.
1135 Crim., 9 juin 1986, Bull. crim. n° 196 : lorsqu’aux termes de la déclaration de pourvoi, le demandeur a limité son recours à certaines dispositions de l’arrêt attaqué, le moyen visant d’autres dispositions n’est pas recevable. V. encore : crim., 14 mai 1984, Bull. crim. n° 173.
1136 Sauf pour le ministère public qui ne peut se désister d’un pourvoi engagé de manière générale : J. BORE, La cassation en matière pénale, LGDJ, 1985, n° 670.
1137 B. BOULOC, Procédure pénale, Dalloz, 20ème éd., 2006, n° 915.
1138 Comp. avec crim., 30 janv. 1973, Bull. crim. n° 48 : l’affaire est dévolue à la cour dans la limite fixée par l’acte d’appel ; en cas de contestation, c’est à la cour d’appel qu’il appartient de déterminer elle-même, au vu des actes d’appel, l’étendue de sa saisine. Encourt par suite la cassation l’arrêt qui renvoie les parties à faire interpréter par les premiers juges, en vue d’en déterminer la portée, l’une des dispositions du jugement frappé d’appel.
1139 V. supra n° 508 et ss.
1140 Pour l’appel en matière civile, v. : civ. 2ème, 17 juin 1965, Bull. civ. II, n° 521 ; civ. 2ème, 15 mai 1972, Bull. civ. II, n° 146 ; civ. 2ème, 28 janv. 1987, Bull. civ. II, n° 25 ; civ. 1ère, 18 mai 1994, Rép. not. Defr. 1994, p. 1089, obs. J. MASSIP. Pour le pourvoi en cassation en matière civile : civ. 3ème, 27 févr. 1969, Bull. civ. III, n° 177 ; civ. 2ème, 12 juill. 1971, Bull. civ. II, n° 253 ; com., 26 févr. 1973, Bull. civ. IV, n° 92 ; civ. 3ème, 4 déc. 1973, Bull. civ. III, n° 612 ; com., 3 mai 1976, Bull. civ. IV, n° 141 ; com., 18 déc. 1984, Bull. civ. IV, n° 350 ; soc., 21 janv. 1998, Bull. civ. V, n° 26 ; civ. 1ère, 12 mars 2002, JCP 2002, IV, n° 1701. Pour l’appel en matière pénale : crim., 3 oct. 1967, JCP 1968, II, 15554, note G. DURRY ; crim., 27 oct. 1976, Bull. crim. n° 302 ; crim., 15 oct. 1980, Bull. crim. n° 260 ; crim., 19 nov. 1985, Bull. crim. n° 360 ; crim., 18 juin 1991, RS crim. 1992, p. 115, obs. A. BRAUNSCWEIG; crim., 22 oct. 1997, Bull. crim. n° 345; crim., 24 mars 1999, Bull. crim. n° 54; crim., 27 mai 1999, Bull. crim. n° 109. Pour le pourvoi en cassation, v. crim., 7 janv. 1986, Bull. crim. n° 11.
1141 Pour la doctrine civiliste, v. notamment : E. FAYE, La Cour de cassation, 1970, n° 263 ; J. VOULET, « L’étendue de la cassation en matière civile », JCP 1977, I, 2877, spéc. n° 4. Pour la doctrine pénaliste, V. par ex. : P.-D. de BOISVILLIERS, « La règle de l’interdiction d’aggraver le sort du prévenu », RS crim. 1993, pp. 694-716, spéc. n° 55 et ss. ; J. BORE, La cassation en matière pénale, LGDJ, 1985, n° 669.
1142 Civ. 2ème, 24 févr. 1993, Bull. civ. II, n° 73.
1143 Civ. 2ème, 24 févr. 1993, Bull. civ. II, n° 73 : il s’agit bien, dans cet arrêt, d’une déclaration d’appel limitée à la question de la prestation compensatoire.
1144 Contrairement d’ailleurs au cas où le plaideur laisse expirer le délai pour recourir, car en pareille occurrence, la volonté d’acquiescer n’est pas certaine : la forclusion peut tout aussi bien résulter de la négligence des parties.
1145 V. supra n° 320 et ss.
1146 Pour un exemple de désistement d’appel partiel : civ. 2ème, 24 juin 2004, JCP 2004, IV, n° 2734.
1147 Très souvent, dans leurs écritures, les plaideurs concluent à la confirmation du jugement s’agissant des points qu’ils ne souhaitent pas critiquer. Dans ce cas, le juge n’a pas à suivre cette invitation à confirmer le jugement sur ces points non critiqués, mais se doit d’y voir un désistement implicite partiel du recours, si bien qu’il doit en conséquence constater le caractère irrévocable du jugement sur ces points. Comp. avec J.-P. DUHAMEL, « L’effet dévolutif de l’appel au regard de l’acte d’appel et des écritures des parties », BICC, n° hors-série, rencontres Université-Cour de cassation, La procédure civile, JORF, 2002, pp. 48-51, qui écrit que « les conclusions demandant l’infirmation totale sont insuffisantes à maintenir la dévolution totale. Il est nécessaire que les conclusions formulent des demandes et contiennent des critiques de tous les chefs du jugement ».
1148 V. supra n° 424 et ss.
1149 Un autre de ces intérêts pratiques tient au fait que le juge de recours n’a pas à confirmer les chefs concernés par un acquiescement ou un désistement ; il doit seulement constater son dessaisissement relativement à ces chefs, donc le caractère irrévocable des dispositions non critiquées.
1150 Il semble que cette solution puisse être transposée à la procédure pénale, car il s’agit d’une conséquence du principe selon lequel toutes les parties à un procès sont libres d’intenter les voies de recours qui les intéressent.
1151 Civ. 2ème, 7 févr. 1990, pourvoi n° 88-20314 ; civ. 2ème, 2 nov. 1994, Bull. civ. II, n° 212 ; civ. 2ème, 18 déc. 1996, Bull. civ. II, n° 294 ; civ. 2ème, 15 nov. 2001, pourvoi n° 00-11891 (« Vu les articles 260 du Code civil, 623, 624, 1121 et 1122 du nouveau Code de procédure civile ; -Attendu que, par l’ordonnance de non-conciliation, le juge prescrit les moyens nécessaires pour assurer l’existence des époux jusqu’à la date à laquelle le jugement de divorce prend force de chose jugée ; que le divorce prononcé par un arrêt dont seules les dispositions relatives aux conséquences financières sont frappées d’un pourvoi principal, devient irrévocable à la date d’expiration du délai ouvert pour former pourvoi incident ») ; civ. 1ère, 22 mars 2005, JCP 2005, IV, n° 2046 ; civ. 1ère, 19 avr. 2005, D 2005, IR, p. 1179, JCP 2005, IV, n° 2331 ; civ. 1ère, 25 oct. 2005, pourvoi n° 04-15573, D 2007, pan., p. 611, obs. L. WILLIATTE-PELLITTERI, AJ Famille 2006, n° 3, p. 111, obs. S. DAVID ; contra. Lyon, 8 juin 1998, RTD civ. 1998, p. 662, obs. J. HAUSER (Cet arrêt décide, toujours au sujet du droit à pension alimentaire de l’époux en instance de divorce, que l’obligation de secours avait nécessairement cessé à la date de la notification de l’appel partiel de l’épouse, limité aux dispositions accessoires au divorce, lequel valait acquiescement et rendait le jugement définitif. Ici, les juges n’ont pas tenu compte de la possibilité d’un appel incident du mari).
1152 Ou, en matière civile, lorsqu’en l’absence de notification, la forclusion biennale de l’article 528-1 du nouveau Code de procédure civile aura fait son œuvre.
1153 Crim., 13 déc. 1924, Bull. crim. n° 415 : la rédaction de cet arrêt semble signifier qu’un pourvoi incident n’est pas concevable en matière pénale. Il semble toutefois préférable de considérer qu’il impose de respecter le délai du pourvoi principal pour former un pourvoi incident. Le pourvoi incident sera celui intenté en second. Comp. J. BORE, La cassation en matière pénale, LGDJ, 1985, n° 517.
1154 Dans les procédures écrites, il s’agit de la date de l’ordonnance de clôture (cass., ch. mixte, 3 févr. 2006, pourvoi n° 03-16203, RTD civ.2006, p. 381, obs. R. PERROT). Dans les procédures orales, un recours incident peut être intenté jusqu’au terme de l’audience des plaidoiries (soc., 30 mars 1994, Bull. civ. V, n° 111).
1155 Soc., 28 nov. 2000, Procédures 2001, n° 2, obs. R PERROT, RJS 2/01, n° 228 : cassation de l’arrêt qui avait cru pouvoir déclarer irrecevable l’appel incident, formé hors du délai de l’appel principal, portant sur des points non critiqués par l’appel principal. V. aussi : civ. 3ème, 9 mai 1983, Bull. civ. III, n° 107 ; soc., 22 mars 2006, pourvoi n° 04-43662, JCP 2006, IV, n° 1897.
1156 La solution vaut aussi pour le pourvoi incident : soc., 21 juill. 1986, Bull. civ. V, n° 384 ; civ. 2ème, 17 mai 1993, Bull. civ. II, n° 176 ; civ. 3ème, 14 nov. 2002, JCP 2003, II, 10197, note C. PUIGELIER.
1157 Il appartient à la partie souhaitant critiquer les chefs non dévolus par l’appel principal d’interjeter appel incident dans le délai (civ. 2ème, 7 déc. 1994, Bull. civ. II, n° 253). Il est possible d’invoquer au soutien de la solution admise par la Cour de cassation l’article 550 qui ne distingue pas selon que l’appel est général ou limité. Toutefois, il paraît raisonnable de considérer, dans une perspective plus téléologique, que les auteurs de cet article l’ont rédigé en considération de la situation normale d’un appel non limité.
1158 L’hypothèse ne concerne que la procédure civile car, en matière pénale, la chambre criminelle considère que seuls les actes formalisant le recours sont de nature à limiter la dévolution : crim., 7 avr. 1976, Bull. crim. n° 104 ; crim., 25 mai 2004, JCP 2004, IV, n° 2579, Procédures 2004, n° 189, obs. J. BUISSON ; crim., 21 sept. 2004, D 2004, IR, p. 2761. En outre, s’agissant du ministère public, ses réquisitions ne limitent pas les pouvoirs de la juridiction, laquelle peut prononcer une peine plus sévère que celle demandée ou aller à l’encontre de réquisitions de relaxe : crim., 30 janv. 1985, Bull. crim. n° 51 ; crim., 5 févr. 1985, Bull. crim. n° 56 ; crim., 19 juin 1985, Bull. crim. n° 194.
1159 V. supra n° 428 et ss.
1160 Sauf la possibilité pour le juge de passer outre à un refus d’acceptation illégitime (NCPC, art. 396 et 405).
1161 Dans la pureté des principes, la prestation devrait naturellement succéder à la pension alimentaire. L’obligation de secours entre époux cesse effectivement au jour de la dissolution du mariage, donc en cas de divorce, au jour où son prononcé est irrévocable, et c’est précisément à ce moment que prend éventuellement effet la prestation compensatoire (C. civ., art. 270). Mais en pratique, si une voie de recours est cantonnée aux mesures accessoires au divorce, par exemple au montant de la prestation compensatoire, le divorce est irrévocable cependant que l’obligation à prestation compensatoire n’est pas encore effective. D’où un certain hiatus, préjudiciable à l’époux créancier, mais extrêmement favorable au débiteur, ceci expliquant l’importance du contentieux en la matière. V. infra n° 670 et ss.
1162 Civ. 2ème, 31 mai 2000, Dr. et patr. 2001, n° 89, p. 94, obs. A. BENABENT ; civ. 1ère, 14 juin 2005, D 2005, IR, p. 1803, RTD civ. 2005, p. 578, obs. J. HAUSER ; comp. avec : civ. 2ème, 26 sept. 2002, D 2002, IR, p. 2915. V. aussi, en matière de séparation de corps où les enjeux sont identiques : civ. 2ème, 24 juin 2004, JCP 2004, IV, n° 2728, LPA 18 janv. 2005, p. 14, note L. MINIATO, RTD civ. 2004, p. 558, obs. R. PERROT.
1163 En ce sens : R. PERROT, obs. sous civ. 2ème, 24 juin 2004, RTD civ. 2004, p. 558 et obs. sous civ. 1ère, 14 déc. 2004, Procédures 2005, n° 26.
1164 Civ. 2ème, 18 mai 2000, Bull. civ. II, n° 81, Dr. et patr. 2001, n° 89, p. 95, obs. A. BENABENT, D 2000, IR, p. 175 ; et, dans le même sens : civ. 2ème, 2 nov. 1994, Bull. civ. II, n° 212 ; civ. 2ème, 15 nov. 2001, pourvoi n° 00-11891.
1165 Pourquoi ne pas admettre que le divorce est irrévocable, s’agissant de l’appel, au jour où l’étendue de la saisine de la cour d’appel est définitivement déterminée par les prétentions des parties, c’est-à-dire au jour de l’ordonnance de clôture ? Ou bien, concernant le pourvoi, pourquoi ne pas considérer que le divorce est irrévocable au jour du prononcé de l’arrêt ?
1166 Sur les difficultés à analyser cette situation, v. R. PERROT, obs. sous civ. 2ème, 10 févr. 2000, RTD civ. 2000, p. 407.
1167 De même que le pourvoi incident est recevable hors délai, pourvu qu’il soit fait sous forme de mémoire remis avant l’expiration du délai prévu pour la remise du mémoire en réponse (NCPC, art. 614 et 1010).
1168 Civ. 1ère, 8 janv. 2002, Procédures 2002, n° 42, obs. R. PERROT, RTD civ. 2002, p. 361, obs. R. PERROT (les observations paraissent en décalage avec la solution réelle de l’arrêt).
1169 J.-P. DUHAMEL, « L’effet dévolutif de l’appel au regard de l’acte d’appel et des écritures des parties », BICC, n° hors-série, rencontres Université-Cour de cassation, La procédure civile, JORF, 2002, pp. 48-51.
1170 V. supra n° 488.
1171 Une étude quantitative et qualitative a pu montrer combien le caractère partiel de la cassation incitait les plaideurs à ne pas continuer le litige devant la juridiction de renvoi : V. FORTIER, « La déperdition des renvois », RRJ 2002-5, n° spécial Justice et qualité, pp. 2275-2288.
1172 V. par ex., soc. 18 févr. 2003, pourvoi n° 00-42948, par lequel la Cour de cassation combine une cassation partielle avec un renvoi partiel pour limiter au maximum l’étendue du renvoi.
1173 J.-Cl. Procédure, Traité, fasc. 796, Cassation, Sens des arrêts, n° 51, par A. PERDRIAU.
1174 J. VOULET, « L’étendue de la cassation en matière civile », JCP 1977, I, 2877, spéc. n° 12.
1175 Civ. 3ème, 22 févr. 1972, Bull. civ. III, n° 118.
1176 Civ. 1ère, 18 mai 1960, Bull. civ. I, n° 274.
1177 Com., 23 mai 1967, Bull. civ. IV, n° 202 ; soc., 23 juin 1971, Bull. civ. V, n° 465 ; civ. 1ère, 21 avr. 1982, Bull. civ. I, n° 141 ; civ. 1ère, 3 juin 1997, Bull. civ. I, n° 178 ; civ. 1ère, 22 févr. 2000, Bull. civ. I, n° 52 ; soc., 26 mars 2002, JCP 2002, IV, n° 1838.
1178 V. la jurisprudence citée par J. BORE, La cassation en matière pénale, LGDJ, 1985, n° 948 et ss.
1179 L’article 612, alinéa 2, du Code de procédure pénale se borne à disposer que « La Cour de cassation peut n’annuler qu’une partie de la décision lorsque la nullité ne vicie qu’une ou quelques-unes de ces dispositions.
1180 J.-Cl. Procédure, Traité, fasc. 798, Effets et suites des arrêts de la Cour de cassation, n° 117, par O. RENARD-PAYEN.
1181 V. supra n° 536 et ss.
1182 Civ. 2ème, 9 janv. 1991, Bull. civ. II, n° 5 ; civ. 2ème, 11 janv. 1995, Bull. civ. II, n° 6 ; civ. 2ème, 28 févr. 2006, pourvoi n° 04-12936, D 2006, IR, p. 745. Une tendance critiquable conduit même à considérer qu’une telle rédaction du dispositif d’un arrêt de cassation permet de remettre en cause tous les chefs de la décision cassée, alors même que le pourvoi était limité à certains seulement de ces chefs : v. supra n 535.
1183 J. et L. BORE, La cassation en matière civile, Dalloz, 3ème éd., 2003/2004, n° 122-41.
1184 Civ. 1ère, 20 juin 1995, Bull. civ. I, n° 265 ; civ. 1ère, 7 déc. 1999, RGDA 2000, n° 1, p. 237, obs. J. BEAUCHARD, D 2000, IR, p. 2.
1185 J. et L BORE, La cassation en matière civile, Dalloz, 3ème éd., 2003/2004, n° 132-132 et s. ; J. BORE, La cassation en matière pénale, LGDJ, 1985, n° 951.
1186 J. et L. BORE, La cassation en matière civile, Dalloz, 3ème éd., 2003/2004, n° 122-55 ; J. BORE, La cassation en matière pénale, LGDJ, 1985, n° 955. La solution vaut également lorsqu’une branche du moyen suffit à emporter cassation : civ. 3ème, 10 janv. 1984, Gaz. pal. 1984, pan. p. 149, obs. S. GUINCHARD.
1187 E. FAYE, La Cour de cassation, Librairie E. Duchemin, 1970, n° 264.
1188 J. VOULET, « L’étendue de la cassation en matière civile », JCP 1977, I, 2877, spéc. n° 14.
1189 J. et L BORE, La cassation en matière civile, Dalloz, 3ème éd., 2003/2004, n° 122-41 et 123-101. Pour un exemple où la Cour de cassation fait application de l’article 463 pour remédier à une omission de statuer : com., 28 avr. 1987, Bull. civ. IV, n° 94.
1190 C’est ce que rappelle André Perdriau, pour inciter les parties à utiliser cette voie de droit afin de préciser l’étendue d’une cassation : A. PERDRIAU, « La Cour de cassation ne pourrait-elle pas être consultée par les juridictions de renvoi sur la portée exacte de ses décisions de censure ? », LPA du 27 nov. 2000, pp. 10-11.
1191 J. HERON, Droit judiciaire privé, Montchrestien, 3ème éd. par T. LE BARS, 2006, n° 827 ; S. GUINCHARD et F. FERRAND, Procédure civile, Droit interne et droit communautaire, Dalloz, 28ème éd., 2006, n° 1852.
1192 Civ. 2ème, 3 juin 1970, Bull. civ. II, n° 190 ; crim., 25 févr. 1986, Bull. crim. n° 73 ; com., 16 févr. 1988, Bull. civ. IV, n° 70 ; civ. 2ème, 28 mai 1990, Bull. civ. II, n° 115.
1193 J. BORE, La cassation en matière pénale, LGDJ, 1985, n° 952. Cet auteur poursuit en comparant l’effet d’une cassation à l’effet d’un obus : « Ce n’est pas le calibre de l’obus qui importe, mais l’importance des dégâts causés par cet obus » ! V. aussi J. et L. BORE, La cassation en matière civile, Dalloz, 3ème éd., 2003/2004, n° 122-63.
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