Responsabilité du fréteur à temps à l’égard de l’affréteur
p. 105-134
Texte intégral
1Le droit de l’affrètement à temps tire son succès de la répartition qu’il opère entre les droits et obligations des parties d’une part, et la gestion des risques et des conflits qu’il instaure d’autre part. L’atout majeur de cette allocation repose avant tout sur le respect qu’il voue à la séparation inhérente de l’affrètement à temps, entre gestion commerciale et nautique du navire. Cette disposition représente un des éléments fondamentaux des chartes parties à temps, en ce qu’elles fondent à la fois, les droits et devoirs des cocontractants, et permettent de garantir une certaine équité des parties devant les charges que comprend l’exploitation d’un navire. Il semble en effet que chaque stipulation du contrat soit justifiée en fonction du type d’opérations supervisées par les parties sur le navire, qu’implique un véritable compromis sur l’affectation des compétences. Ce dernier point n’est d’ailleurs pas sans importance au vu des enjeux financiers capitalisés sur la rentabilité du navire.
2Cette dimension économique de l’affrètement n’a pas échappé à Lord Griffiths, qui la très justement résumée comme étant : « a matter of very hard business »1. Dans ce contexte hautement concurrentiel, chaque partie au contrat est soucieuse d’optimiser ses revenus à partir de l’exploitation commerciale ou nautique du navire. Tandis que les gains du fréteur, provenant de la collecte du fret, restent une source de rémunération stable, les profits escomptés de l’affréteur sont quant à eux beaucoup plus imprévisibles, puisqu’ils dépendent de nombreux facteurs extérieurs. La volatilité des taux sur le marché de l’affrètement conjuguée avec les variations dans le volume de biens transportés, rend l’équation difficile à résoudre, et la susceptibilité des parties très sensible à l’égard du moindre défaut contractuel. C’est la raison pour laquelle l’équité instaurée par le droit de l’affrètement à temps à temps entre les cocontractants constitue un atout indispensable à la bonne exécution du contrat dans ces circonstances.
3La responsabilité du fréteur à temps est régie en droit maritime marocain par l’article 213 al. 2 du DCCM et l’article 245 du projet de réforme. Cependant cette réglementation ne donne presque jamais lieu à application dans la mesure où les chartes parties à temps, organisent, pour chacune d’entre elles un régime de responsabilité du fréteur à temps.
4Mais quel que soit le régime envisagé, la responsabilité du fréteur s’articule autour de deux éléments essentiels qui caractérisent l’affrètement à temps : le navire objet du contrat et sa contribution nautique pour toutes les opérations commerciales faites par l’affréteur durant la charte.
5C’est pour cette raison que sera étudiée d’abord la responsabilité du fréteur relativement au navire qu’il met à disposition (I). Ensuite, il importe de savoir dans quelles conditions il est débiteur à l’égard de l’affréteur, étant donné qu’il exerce pendant toute la durée de la charte la gestion nautique du navire via son représentant, le capitaine (II).
I. Responsabilité du fréteur, relative au navire
6La responsabilité du fréteur à temps concernant le navire peut être organisée à deux niveaux :
7D’abord, la responsabilité du fréteur peut être retenue quand il commet une faute dans la mise à disposition de son navire.
8Ensuite, le fréteur peut être tenu pour responsable lorsque le navire qu’il met à la disposition de l’affréteur est innavigable.
A. Responsabilité du fréteur dans la mise à disposition du navire
9Autant en droit commun que dans les chartes parties, le fréteur supporte l’obligation de mettre à la disposition de l’affréteur, le navire désigné répondant aux caractéristiques prévues ou son substitut, à la date et au lieu indiqués, pour accomplir les opérations prévues. À cet égard, le fréteur engage sa responsabilité lorsqu’il n’exécute pas son obligation.
10Il convient de différencier les problèmes attachés à la navigabilité que nous verrons tout à l’heure, de ceux qui sont attachés à la performance du navire. Comme critère de différenciation, nous pouvons utiliser les sanctions applicables à leur manquement, car pour la navigabilité, ce seront les dommages et intérêts ou la résiliation du contrat ; pour la performance, ce sera la suspension de location ou une modification du loyer.
1. Non-présentation du navire à la date convenue
11Lorsque le navire ne se présente pas à la date prévue dans la charte-partie, l’affréteur acquiert le droit de résoudre le contrat. Il peut aussi demander réparation du dommage causé par la non-présentation du navire.
12En effet, la responsabilité du fréteur est engagée quand il résulte des circonstances, qu’il a délibérément refusé de remettre le navire à la disposition de l’affréteur. L’obligation fondamentale du fréteur à temps est de fournir un navire dans les temps et au lieu convenus.
13La responsabilité du fréteur peut aussi être retenue pour retard lorsque l’affréteur n’exerce pas l’option qui lui est ouverte de résoudre le contrat. Ainsi, en décide la cour d’appel de Paris dans l’arrêt IVA en précisant que la charte-partie, bien qu’elle prévoit sa résolution en cas de retard supérieur à dix jours, n’exclut pas qu’une indemnisation puisse être accordée pour le préjudice causé par la faute d’un de ses contractants2.
2. Mauvaise description du navire par le fréteur
14Il s’agit ici de la description des caractères physiques du navire. Elle est très importante dans la mesure où elle permet à l’affréteur de se faire une idée sur des éléments tels que la vitesse du navire, la consommation du combustible, l’accessibilité des cales, les engins de manutention les plus adéquats… Dans ces cas, le fréteur peut engager sa responsabilité pour mauvaise description du navire.
15Les armateurs n’acceptent les clauses de performance qu’avec une certaine réticence ; bien que les chartes parties, utilisées fréquemment pour l’affrètement à temps (« Baltime », « Liner time » et « NYPE ») restent assez vagues, traditionnellement, lorsqu’un navire est ralenti, les armateurs invoquent le mauvais temps, et les aléas de navigation restent à la charge des affréteurs.
3. Sanction : la retenue sur le loyer
16Les décisions des arbitres varient selon les cas.
17Si l’armateur ne justifie pas du temps utilisé pour le voyage, très supérieur à celui qui eût résulté de la vitesse prévue à la charte, il supporte une suspension de location estimée par les arbitres3.
18Les chartes courantes décrivent la vitesse du navire de la manière suivante « capable à pleine charge de faire une vitesse X nœuds environ par beau temps et mer calme » (« Baltime », cl 7). Les sentences qui traitent de ce sujet sont assez complexes car elles sont pleines de calculs. Généralement, nous pouvons dire que la tolérance qui recouvre le mot « environ » (about) s’entend pour les arbitres français de 5 % en plus ou en moins. Selon l’interprétation anglaise, elle s’entend de 10 %4. À propos des marges de tolérance sur la vitesse et la consommation des combustibles, les arbitres acceptent qu’il soit prévu une marge sur la vitesse et une marge sur la consommation mais rien n’exige leur combinaison. Ils se montrent rigoureux
« l’exigence de bonne foi dans l’exécution des contrats interdit de penser que de telles marges de tolérance puissent servir à d’autres fins et en particulier, au maquillage flatteur des performances du navire. Une tolérance n’est pas un droit »5.
19Le double recours à la tolérance représentée par le mot « about » est généralement admis lorsqu’aucune valeur précise ne lui est attachée, et dès lors que la liberté d’interprétation de l’arbitre reste entière, elle lui permet d’éviter l’absurde6. Cette interprétation va dans le sens de la jurisprudence à propos d’affaires semblables portées devant la CAMP.
20En ce qui concerne l’interprétation de l’expression « beau temps », les arbitres se réfèrent à l’usage international. Sa signification s’apprécie en fonction de la force du vent et sa limite se situe à l’extrémité haute de la force 4 à l’échelle de Beaufort. Cette définition est rustique mais elle a les mérites de la simplicité et de l’universalité7. La référence au « beau temps », selon les arbitres, doit être interprétée de façon stricte. Rien n’autorise le recours à des corrections théoriques pour convertir les observations recueillies par mauvais temps afin d’en tirer des conclusions8.
21Comment calculent-ils la vitesse ? La tradition consiste à exclure le mauvais temps9, cette solution peut être critiquée puisque le capitaine même de bonne foi, ne peut déterminer avec rigueur la force du vent ou l’état de la mer. La preuve contraire contenue dans les journaux du navire et le « Master’s Report », que les arbitres prennent en considération pour leurs calculs, est extrêmement difficile, à moins qu’il y ait référence à des observations météorologiques neutres.
22Dans une affaire, portée devant la CAMP, l’affréteur incriminait la faible vitesse du navire pendant un mois de voyage sur les neuf qu’il avait duré.
23Celle-ci ne découlait pas de la vitesse absolue du navire, mais des diverses relâches, décidées par le capitaine en raison du mauvais temps, qui était établi par le rapport officiel du Service Météorologique Britannique. Les arbitres ont calculé la compensation due à l’affréteur en tenant compte du fait que les autres navires de taille et de puissance similaires ou inférieures ont réalisé aux mêmes époques sur les mêmes itinéraires des vitesses moyennes beaucoup plus élevées10.
24Généralement, ils analysent chacun des voyages effectués par le navire pour en tirer des conclusions justifiées. Ils font des comparaisons avec les voyages similaires effectués par d’autres navires, et en cas de litige sur la vitesse du navire et les consommations de combustibles, ils apprécient la consommation au regard de la vitesse effective et non point au regard de la vitesse théorique du navire.
25L’affréteur qui prouve la mauvaise performance du navire et qui aura droit à des dommages et intérêts, peut-il résilier le contrat avant son terme ?
26À cette question, on ne trouve généralement pas de réponse dans les chartes et là encore ce sont les arbitres qui apprécient si la vitesse insuffisante ou la consommation excessive constitue l’inexécution grave d’une obligation fondamentale pouvant justifier la résiliation suivant les principes généraux de droit. Seul l’examen des faits permet d’apprécier si l’inexécution est grave (faire une moyenne de 15 nœuds quand il a été promis 16, cela n’est la même chose que faire une moyenne de 8 nœuds).
27Dans une affaire soumise à la CAMP, l’affréteur a été autorisé par la charte NYPE à déduire le temps perdu par rapport à une vitesse d’environ 12,5 nœuds et le coût du fuel-oil consommé au-delà d’environ 16.T.M. Il s’agissait de chiffres garantis par l’armateur.
28De la même façon, le calcul de l’affréteur pour la surconsommation de fuel comportait une marge de 4 % pour tenir compte de l’expression « about ».
29Après avoir noté que le calcul de la vitesse s’effectue par rapport à la route parcourue en éliminant les périodes pendant lesquelles la force de la mer était supérieure à la force 4 Beaufort, et après avoir relevé l’absence d’indications détaillées du capitaine sur les périodes de temps défavorable, les arbitres ont estimé que la retenue sur le loyer pratiquée par l’affréteur tant pour le temps perdu en raison de la vitesse insuffisante que pour la consommation de fuel-oil était justifiée11.
B. Responsabilité du fréteur pour innavigabilité du navire
30Sur cette question, la présentation du régime légal de la responsabilité du fréteur va nous permettre de mieux comprendre les enjeux du régime contractuel prévu par les chartes parties.
1. Régime légal
31Quoique ce régime ne s’impose pas aux parties, cette étude n’est pas seulement théorique. D’une part, il peut arriver que les chartes parties, qui établissent un régime différent, soient nulles de sorte que le droit commun retrouve son empire ; d’autre part, la connaissance du régime légal est indispensable à la compréhension des clauses qui l’écartent et constituent le préalable à leur saine interprétation12.
32D’un intérêt pratique certain, cette étude n’est pas davantage inutile en théorie. La confusion dans l’exposé des régimes de l’affrètement et du transport sous connaissement règne encore dans le droit maritime marocain. En effet, le DCCM traite d’une manière générale la responsabilité du fréteur à temps sans la distinguer de celle du fréteur au voyage ni de celle du transporteur. D’ailleurs, l’article 213 du DCCM impose l’obligation de mettre le navire en bon état de navigabilité pour tous les modes d’exploitation du navire. La cour d’appel de Rabat avait décidé que « les dispositions de l’article 213 du DCCM et qui fait partie du titre premier réglementant le contrat de transport en général sont applicables à toutes les variétés d’affrètement, transport et location »13.
33Il en résulte que le fréteur à temps tenu d’une obligation de résultat pleine et entière, est a priori responsable des dommages causés à l’affréteur par suite de l’innavigabilité du navire. Celle-ci est d’ailleurs la preuve de l’inexécution de son obligation. Autrement dit, il est garant du bon état de navigabilité durant toute la durée de la charte.
34Ainsi, l’inexécution de cette obligation semble établir une présomption de responsabilité, voire même une responsabilité de plein droit qui ne céderait que devant la preuve que l’état défectueux du navire provienne d’un vice caché qu’un examen scrupuleux n’aurait pas permis de découvrir (article 213 du DCCM).
35L’alinéa 2 de l’article 213 permet au fréteur de s’exonérer pour l’innavigabilité de son navire, en posant expressément comme condition la démonstration de sa diligence, provenant d’un « examen scrupuleux ». L’article 214 ajoute que « la preuve de l’innavigabilité peut être admise, nonobstant et contre les certificats de visite de départ ».
36Il s’ensuit que l’affréteur n’a point à démontrer que l’innavigabilité, source du dommage est la suite d’une faute du fréteur. En effet, il appartient à ce dernier d’établir qu’il a pris toutes les mesures nécessaires pour rendre son navire en état de navigabilité au sens de l’article 213.
37L’attitude des tribunaux marocains en matière d’innavigabilité du navire :
38C’est parce que la notion de bon état de navigabilité oblige à prendre en considération l’attitude du fréteur que la jurisprudence marocaine reste floue sur ce point. Parfois elle se montre moins exigeante en imposant à l’armateur la simple preuve de sa diligence pour bien conditionner son moyen de transport.
39La Cour d’appel de Rabat14 avait décidé dans un arrêt du 30 juin 1953 que
« s’agissant d’un navire relativement ancien, pouvant présenter certaines déformations et des corrosions dont l’aspect se trouve nécessairement modifié par des couches successives de peinture, l’on ne peut retenir la responsabilité de l’armateur du chef d’innavigabilité du navire lorsque l’aspect extérieur de ce dernier n’indique pas des déformations ou usures excessives. D’autre part, si la fixation de cordons de protection par soudures discontinues a cessé d’être employée dans les constructions nouvelles, elle a été longtemps en usage et rien n’interdit donc aux navires anciens de continuer à naviguer, munis de ce mode de protection.
Aucun grief ne peut être fait à l’armateur à raison d’une voie d’eau produite en cours de traversée, qui n’était pas décelable par un examen scrupuleux alors que le bâtiment avait reçu, deux semaines avant l’avarie, le visa du bureau Véritas, dont rien ne permet de soupçonner la sincérité. Au surplus, les réclamants reprochent à tort à l’armateur le mauvais rendement des pompes dans lequel ils croient pouvoir trouver l’explication de la quasi-impossibilité d’étaler une voie d’eau importante relativement faible alors qu’il résulte du rapport d’expertise que le chargement, composé de sucre, était susceptible de provoquer l’obstruction de la tuyauterie, à raison du mauvais état des sacs déchirés et décousus ».
40Nous ne pouvons qu’approuver cette jurisprudence car la navigabilité comme le souligne le doyen Rodière15 « est moins une qualité objective du navire que le produit des diligences du fréteur ».
41Ainsi, chaque fois que le bon état de navigabilité du navire est mis en cause, la preuve de la diligence apparaît comme une condition nécessaire à l’exonération de l’armateur.
42La Cour de Rabat, dans un arrêt du 8 décembre 1949, avait reproché au capitaine, en tant que mandataire du fréteur, de ne pas avoir exercé la diligence raisonnable et d’avoir été ainsi la cause initiale et directe du sinistre16.
43Il n’y a pas vice caché, lorsque nulle défectuosité du navire n’est à la base de la présence d’eau dans les cales17.
44Dans une autre affaire, le juge avait décidé que « le transporteur maritime est responsable des avaries à la marchandise transportées dues à des infiltrations d’eau de mer et de gas-oil et attribuées par l’expert à l’état défectueux de certains rivets disjoints qui ne peut être assimilé à un vice caché et aurait dû apparaître à un examen scrupuleux, et à la disjonction des tanks à gas-oil, consécutive à l’âge de la coque trop lourdement chargée18.
45Mais la solution préconisée par la jurisprudence précitée n’a pas été suivie par certains tribunaux. C’est le cas du Tribunal de première instance de Casablanca en date du 2 octobre 198619. En l’espèce, des marchandises avaient souffert d’avaries par suite d’une panne des installations frigorifiques au cours du transport. Le juge déclara le transporteur responsable au motif qu’il « aurait dû prendre les précautions pour assurer le fonctionnement normal du moteur ». Ainsi, selon ce jugement, la seule existence d’une innavigabilité montre que les soins appropriés pour éviter le dommage n’ont pas été pris. Or, la définition du contenu de la diligence du transporteur aurait dû être posée de façon plus nette. Le tribunal ajoute qu’il convient de rechercher si le transporteur avait assuré la révision du point névralgique de son navire avant d’entreprendre le voyage (du fait que le navire avait subi une panne similaire en moins d’une année avant). Si c’est le cas et que, malgré cela, il n’a pu découvrir le vice qui affectait les installations frigorifiques, le transporteur doit être exonéré ». Dans le cadre de ce jugement, l’article 213 du DCCM ne fait peser sur le transporteur qu’une simple obligation de moyens.
46C’est aussi l’avis de Cherkaoui : « l’obligation d’assurer la navigabilité du navire peut s’analyser en une obligation de moyen. C’est le sens de l’article 213 du dahir de 191920. Alors que le législateur marocain a voulu maintenir une obligation de résultat à la charge du transporteur en déclarant dans l’alinéa 2 de l’article 213 et aussi dans l’article 214, que « la preuve de l’innavigabilité peut être admise, nonobstant et contre les certificats de visite au départ ».
47Nous savons que cette présomption n’est pas absolue, la preuve contraire est couramment admise par les tribunaux ; malgré la sévérité de la jurisprudence, aujourd’hui elle admet, compte tenu de la complexité et du degré de spécialisation des navires, que la visite d’un expert du Bureau Veritas ou de l’administration permet de penser que l’armateur a exercé avant le départ un examen vigilant et attentif21.
48Dans un arrêt, le juge a observé qu’aux termes de l’article 213 du DCCM, le transporteur maritime n’est pas responsable des avaries survenues à la marchandise transportée s’il rapporte la preuve qu’elles sont dues à un vice caché du navire. Constitue aussi un vice caché la corrosion, par l’intérieur des canalisations du navire22. En revanche, il est jugé que le transporteur maritime ne peut se soustraire à sa responsabilité en invoquant le vice caché du navire lorsque l’avarie à la marchandise est la conséquence d’une cassure et de deux fêlures d’une boîte à clapets boulonnés à l’intérieur de la coque, d’autant plus visible qu’il était extérieur et qu’il suffisait d’un examen superficiel pour déceler l’enfoncement23.
49En matière de navigabilité le DCCM est loin de la dualité du système français à notre sens bien équilibré. Ce dernier pose le principe d’une obligation de résultat du transporteur, mais n’impose en matière de navigabilité qu’une obligation de moyen.
50La jurisprudence marocaine, quant à elle, ne manque pas non plus de rigueur en matière de diligence raisonnable du transporteur, en se fondant sur l’article 214 du DCCM qui dispose que « la preuve de l’innavigabilité peut être admise nonobstant et contre les certificats de visite au départ ». Il résulte de ce texte que le législateur marocain considère que les certificats de visite constituent des présomptions irréfragables attestant la navigabilité du navire ; mais ces documents ne prouvent pas que le transporteur ait agi avec diligence raisonnable, d’un bon père de famille.
51Il résulte en vertu de l’article 214, qu’il est évident que la délivrance d’un certificat de visite au départ n’interdisait nullement, d’établir l’innavigabilité du navire. Dans cette logique le cas d’innavigabilité fait disparaître la présomption de responsabilité et lui substitue une présomption de faute24. Cependant, par les diligences du transporteur, en procédant à une vérification de son navire, attestée par un organisme agréé par l’autorité, il renverse la preuve. Il ne reste plus à l’affréteur que d’établir que le fréteur a commis une faute. En effet, l’article 214 admet une telle preuve lorsque l’innavigabilité du navire s’est produite pendant la durée de la charte.
2. Responsabilité contractuelle
a. Portée des clauses contractuelles
52Nous savons que dans toutes les chartes parties à temps, le fréteur s’oblige à présenter le navire désigné en bon état de navigabilité.
53Le non-respect par le fréteur de cette obligation fondamentale engage sa responsabilité lorsqu’il en résulte des pertes ou dommages à la cargaison.
54Ainsi, il est précisé dans la clause 13 de la Charte-partie « Baltime », que le propriétaire du navire sera responsable des pertes ou avaries aux marchandises si celles-ci ont été causées par un manque de diligence de sa part ou de la part du gérant (manager) pour rendre le navire navigable.
55Conformément à cette clause, le fréteur est tenu de réparer tous les dommages que subit son navire et de payer les réparations peu importe la façon dont ces dommages se sont produits. De plus, ce principe est confirmé par la réglementation d’exception sur laquelle nous reviendrons plus en détail et qui se trouve à l’alinéa 2 de l’article 13 qui détermine les cas particuliers appartenant au domaine commercial pour lesquels l’affréteur doit supporter les réparations du navire. Il s’ensuit qu’également la responsabilité du fréteur en cas d’innavigabilité nautique et commerciale du navire pendant la durée de la charte découle des termes de la clause 13 al 1 du moins de façon indirecte.
56Dans la c/p NYPE, la responsabilité du fréteur pour innavigabilité se reflète dans les lignes 21 et 22.
57La doctrine anglaise et américaine considère que ces différentes clauses entraînent une obligation « absolue » de présenter un navire en bon état de navigabilité (an absolute undertakiflg of seaworthness)25.
58Ceci s’apparente à une obligation de résultat et c’est une différence avec la navigabilité pour un transport sous connaissement où le transporteur est exonéré de toute responsabilité en cas de perte ou avarie due à l’innavigabilité du navire s’il établit qu’il a exercé une diligence raisonnable. En d’autres termes, l’innavigabilité du navire accuse le fréteur à temps qui ne peut s’exonérer en prouvant qu’il a fait les diligences nécessaires alors que la même innavigabilité exonère le transporteur sous connaissement pour autant qu’il établisse qu’il a fait les diligences nécessaires.
59Cette différence de régime qui fait que l’obligation du fréteur est plus stricte que celle du transporteur constitue en quelque sorte une couverture à l’affréteur à temps qui s’il a émis des connaissements, sera relativement certain, en cas de pertes et avaries aux marchandises, de pouvoir exercer un recours efficace contre son fréteur.
b. Sanction de l’innavigabilité du navire
60La navigabilité n’est pas une propriété intrinsèque du navire, mais elle résulte de l’attestation de la diligence déployée par le fréteur. Elle a été évoquée pour mesurer la portée de son obligation de fournir un navire navigable ; le fréteur fournissant un service, c’est logiquement vers lui qu’on se tourne en premier dès qu’il est question de diligence. La formule “due diligence” désigne la diligence raisonnable que l’on est en droit d’attendre d’un professionnel dans des circonstances similaires26.
61Il ne suffit pas que le fréteur, pour se libérer de cette obligation, excipe des certificats des organismes de classification qui ne constituent qu’une prescription simple.
62Sur le fréteur pèse, de fait, une quasi-obligation de résultat. Pour les arbitres français, la preuve de la diligence raisonnable exonère le fréteur de toute responsabilité en cas d’innavigabilité, même lorsque la charte-partie est muette à ce sujet27.
63Si le navire n’est pas livré par le fréteur en bon état de navigabilité, l’affréteur se trouve devant deux possibilités la première consiste en la mise hors location du navire car l’arrêt est imputable au fréteur ; la seconde se rapporte à la résiliation du contrat d’affrètement.
α. La mise hors location : La clause « off-hire »
64La mise du navire en bon état de navigabilité a comme contrepartie le paiement du fret par l’affréteur. Si le navire n’est pas utilisable par lui, pour une raison qui incombe au fréteur, l’affréteur est en droit de le mettre hors location.
65Les chartes parties prévoient, exceptionnellement, des cas dans lesquels le fret sera suspendu. Ces cas envisagent le non utilisation du navire.
66La majorité des sentences rendues par la CAMP portent sur la clause 11 de la charte « Baltime ». Une seule sentence concerne la clause 14 de la charte « Liner time ».
67La clause 11 de la « Baltime » se divise en deux parties. La première partie prévoit certains cas entraînant un « off-hire », lorsque l’indisponibilité du navire dépasse les 24 heures (franchise). Parfois, il est prévu que les suspensions d’affrètement ne peuvent être prises en compte que pour une indisponibilité supérieure à 12 heures. Ainsi, si l’affréteur a déclaré le navire « off-hire » pour une durée de 9 h 20, ayant retenu une somme due au fréteur, il n’était pas fondé à le faire28. Cependant, au-delà du seuil de 24 ou 12 heures, le loyer ne sera pas payé pour le temps effectivement perdu du fait de la déficience.
68Souvent les parties assimilent, grâce à des clauses additionnelles, la grève avec les autres cas prévus par la clause 11, comme l’arrêt du navire par suite de travaux d’entretien ou de réparation, entraînant suspension de location. Les arbitres ont jugé que quand les parties ont inséré à l’art. 11 les termes « including strikes of officiers and crew », le contrat ne distingue pas suivant que la grève est motivée par des considérations tenant aux intérêts professionnels propres aux marins ou qu’elle est une grève de contagion ou de solidarité, son existence se suffisant à elle-même sans avoir à en rechercher la cause. Cependant, ces principes ne peuvent pas s’appliquer lorsque l’affréteur a dirigé lui-même, en toute connaissance, le navire vers un port français à une époque où la grève, paralysant tous les ports français, s’étendait aux équipages de tous les navires français s’y trouvant, ainsi qu’à ceux qui s’y dirigeaient dès qu’ils avaient touché le port. C’est par simple application de la règle générale que « nul ne peut tirer avantage de son fait » et spécialement de son fait fautif en faisant supporter la charge par son cocontractant, que les arbitres ont refusé à l’affréteur de mettre le navire « off-hire »29.
69En outre, il a été jugé par la CAMP que la saisie du navire30, le retard dû au refus de l’équipage d’appareiller, les périodes de retard dues à une fausse manœuvre du navire ainsi qu’à l’absence injustifiée de deux officiers et le temps d’immobilisation du navire dû à l’exécution des réparations au moteur31, constituent des cas qui entraînent suspension de location. En revanche, les arbitres ont refusé à l’affréteur d’effectuer une suspension d’affrètement pendant le temps où le navire attendait au Canal de Suez car c’est de la pratique courante que les navires, de la taille du navire de l’espèce, ne bénéficiant d’aucune priorité, soient obligés d’attendre au moins 48 heures32. De même, à propos d’un navire immobilisé pendant un mois au port algérien de déchargement, en raison d’une saisie pratiquée par la douane locale à cause de différences entre connaissements et manifeste, les arbitres ont jugé que par application des clauses 9 et 13 de la charte, (selon lesquelles le capitaine est préposé de l’affréteur à temps en matière de rédaction des connaissements ou autres documents tels que le manifeste), l’affréteur ne pouvait pas déclarer le navire “off-hire”33.
70En ce qui concerne la deuxième partie de la clause 11 de la « Baltime », elle prévoit que les accidents de navigation survenus dans les ports difficiles ou des rivières à barre, ne donnent lieu à aucun cas de suspension, même si ces accidents sont dus à une faute de l’équipage34. La clause 14 de la « Liner time » différencie de la clause 11 de la « Baltime » sur plusieurs points, notamment celui de la franchise, étant contractuelle, et sur des précisions qui portent sur les méthodes de calcul en cas de déviation. Ainsi, la décision du capitaine d’entrer à Marseille afin de réparer l’installation radio et embarquer des huiles de graissage, réparation et embarquement qui auraient tout aussi bien pu être effectués au port vers lequel les affréteurs dirigeaient le navire, a entraîné la suspension de l’affrètement. Les arbitres ont décidé que les conditions exigées pour une suspension d’affrètement étaient remplies et que l’affréteur les a à juste titre appliquées35.
71En pratique, le nombre de déclarations de « off-hire » est beaucoup plus important que le nombre de résiliations, moyen très radical pour l’affréteur.
β. La résiliation du contrat
72En droit anglais la rupture unilatérale du contrat d’affrètement de la part de l’affréteur a été toujours admise. En droit marocain comme en droit français la résiliation doit être demandée en justice ; il nous semble que la position du droit anglais a influencé les décisions nouvelles des arbitres français36.
73Les arbitres français, conscients que la résiliation du contrat est un acte avec des conséquences considérables, essaient d’être justes en évitant des solutions qui favorisent une partie du contrat.
74L’affrètement concernait un remorqueur d’assistance d’une barge, loué pour cinq mois ferme, affrètement à temps selon contrat ad hoc. Trois semaines après sa livraison, un accident de navigation endommagea son propulseur d’étrave, nécessitant un passage en cale sèche. Un remorqueur de substitution fut mis à disposition par l’armateur durant les travaux. Ceux-ci se prolongèrent plus que prévu, en raison d’un incident technique ayant détérioré sérieusement la machine principale. Si bien que, après notification d’un nouveau délai par l’armateur, l’affréteur lui notifia la résiliation de l’affrètement le 27 avril (le navire étant immobilisé depuis le 12 avril). Cette décision fut contestée immédiatement par l’armateur, qui fit recours devant la CAMP pour la réparation de son préjudice. Les arbitres ont observé en premier lieu que trois clauses du contrat d’affrètement traitaient de la restitution anticipée du navire, en donnant à l’affréteur la faculté de résilier le reliquat de la période d’affrètement selon des modalités diverses37.
75Les arbitres ont observé que la restitution anticipée d’un navire est un acte très grave dans ses conséquences, qui exige une notification formelle et dûment motivée. Or, la première notification de résiliation de l’affréteur (datée du 27 avril) se fondait sur la clause 12, laquelle ne pouvait s’appliquer qu’au cas où une faute pourrait être reprochée à l’armateur dans la mise en état de navigabilité du navire et son maintien. La deuxième notification de résiliation du 4 mai confirmait la première et faisait référence tant à la clause 12 qu’à la clause 9, sans préciser s’il s’agissait de ses alinéas (b) ou (d). Cette imprécision avait créé une équivoque de nature à égarer l’armateur. Ceci conduisait à interpréter la seconde notification dans le sens le plus favorable à l’armateur, c’est-à-dire en lui faisant application du cl 9 al. D, qui prévoyait une indisponibilité de plus de 20 jours et un préavis de 20 jours. Les arbitres ont estimé que lors de la seconde notification du 4 mai, cette condition d’indisponibilité était satisfaite, qu’elle ne pouvait avoir d’effet que le 24 mai et que l’affréteur était tenu de payer le loyer convenu jusqu’à la date où le remorqueur était effectivement à sa disposition, lequel avait eu lieu le 18 mai. L’affréteur devait donc indemniser l’armateur de la perte de six jours de loyer, résultant de son refus38.
76D’habitude les armateurs contestent la légitimité de la décision des affréteurs de résilier la charte. Tout dépend de la convention des parties et de l’application de clauses additionnelles, Si elles existent. C’est le cas d’un navire affrété par une C/P « Baltime » ayant une clause additionnelle disposant que le navire était
« en fait affrété pour un voyage circulaire d’essai via la Méditerranée orientale, les affréteurs ayant l’option (si le navire ne répond pas à leur trafic) de résilier l’affrètement pour la période restant à courir de six premiers mois, dix jours avant le passage du navire à Gibraltar, cap à l’ouest à son voyage de retour vers l’Europe ».
77L’affréteur, après deux escales où des conteneurs furent chargés, notifiait par télex à l’armateur sa décision de lui restituer le navire au motif qu’il n’était pas adapté au trafic. L’armateur contestait cette décision et affirmait que l’inaptitude du navire n’était pas prouvée. En premier lieu, la Commission arbitrale n’observait que la double précision apportée par l’expression « le navire est en fait affrété pour un voyage circulaire d’essai et par la parenthèse (si le navire ne répond pas à leur trafic), enlève à l’option de résilier l’affrètement le caractère d’une condition purement potestative qui la rendait nulle. La faculté donnée à l’affréteur représentait une condition potestative dépendant non pas de la seule volonté d’un contractant, mais d’un fait extérieur à savoir d’adéquation du navire au trafic. La Commission arbitrale s’est référée à l’opinion d’un expert idoine en la matière, qui avait considéré que le navire n’était pas adapté à la manutention par ses propres moyens (en raison de la nécessité d’un couplage de mâts de charge) de conteneurs lourds dans un trafic entièrement conteneurisé. La Commission arbitrale avait ainsi estimé justifiée l’option de résiliation exercée par l’affréteur et a rejeté la demande de l’armateur en dommages-intérêts pour résiliation abusive39.
78Comme nous l’avons déjà dit, l’innavigabilité nautique du navire peut résulter de l’incompétence du capitaine. La CAMP a jugé que l’art. 10 de la C/P « Liner time » donnait aux affréteurs la possibilité de se plaindre aux armateurs de la conduite du capitaine et d’en demander son changement, et que cette même disposition ne prévoyait pas qu’ils puissent résilier la location du navire40.
79En général, les arbitres apprécient au cas par cas ; la solution n’est pas atteinte par application d’une règle générale, mais par l’analyse de chaque cas d’espèce. Toutefois, cette interprétation tient compte des données de la charte-partie, de la durée du contrat, de la spécificité du trafic, du dommage causé, et surtout des cas de résiliation prévus au contrat.
II. Responsabilité du fréteur, relative à la cargaison
A. Responsabilité selon les textes légaux
80Avant de nous occuper d’une façon spéciale de la responsabilité légale du fréteur à temps, nous devons signaler une faute technique des rédacteurs du code de commerce maritime. Certains articles, placés sous le titre du contrat de transport maritime, contiennent des dispositions qui, en raison même de leur caractère général, puissent concerner non seulement le transport et l’affrètement au voyage, mais aussi l’affrètement à temps. Il s’agit des articles 213 à 215 sur les obligations du fréteur et 221 sur la responsabilité du fréteur. C’est ainsi qu’à s’en tenir à la lettre de l’article 221 on peut faire état de ce qu’il vise le fréteur en général : « le fréteur est responsable de toutes pertes ou avaries occasionnées aux marchandises, aussi longtemps qu’elles sont sous sa garde, à moins qu’il ne prouve la force majeure ».
81Ceci étant, La responsabilité du fréteur à temps en droit maritime marocain prend la forme d’une responsabilité objective, autrement dit d’une responsabilité de plein droit, elle n’est écartée, que lorsque le dommage causé aux marchandises résulte d’un cas de force majeure (article 221), d’un vice caché du navire qu’un examen scrupuleux n’aurait pas permis de découvrir (article 213 alinéa 2) ou enfin que le dommage résulte d’une faute du capitaine, du pilote ou de l’équipage dans l’accomplissement de leurs fonctions en ce qui concerne le navire (article 264 alinéa 2).
1. Le principe de responsabilité
82Le droit maritime marocain (DCCM), se fonde sur le principe de la responsabilité de plein droit du fréteur. Ce principe est clairement défini par l’article 221 du DCCM « le fréteur est responsable de toutes pertes ou avaries occasionnées aux marchandises, aussi longtemps qu’elles sont sous sa garde, à moins qu’il ne prouve la force majeure ».
83Il n’est donc pas nécessaire d’établir l’existence d’une faute du transporteur pour le faire condamner. En effet, l’obligation assumée par lui est une obligation de résultat. Selon la cour d’appel de Rabat « la responsabilité du transporteur est d’ordre contractuel et une présomption de responsabilité pèse à son encontre »41.
84Le projet de réforme s’est largement écarté du principe adopté par le DCCM. En effet, son article 245 instaure une responsabilité pour faute
« le fréteur est responsable des dommages subis par la marchandise s’il est établi qu’ils sont dus à un manquement à ses obligations telles que déterminées par la présente loi. Il n’est cependant pas responsable de la faute nautique du capitaine ou de ses préposés ».
85À partir de cet article, on peut penser que le projet de réforme consacre au fréteur à temps un régime de responsabilité moins rigoureux par rapport à celui du DCCM.
2. Les cas exceptés prévus par le DCCM
a. La force majeure (article 221)
86L’article 221 précise que le fréteur ne peut s’exonérer de sa responsabilité qu’en prouvant que les pertes ou les avaries sont la conséquence d’un cas de force majeure.
87De nombreux auteurs s’accordent sur l’idée que « la force majeure est le nom que l’on donne à un événement qui empêche le débiteur d’obtenir le résultat recherché bien qu’il ait appliqué la diligence due »42.
88Le Doyen Ripert définit la force majeure de la façon suivante « elle consiste dans un événement qui dépasse manifestement ce que l’on doit prévoir dans le cours ordinaire des choses »43.
89Le droit maritime marocain adopte l’expression de force majeure sans toutefois préciser les caractères que doit comporter cette notion44.
90Si on se réfère au droit français, qui est à l’origine du droit marocain45, la force majeure est constituée de deux éléments l’imprévisibilité et l’insurmontabilité46. Néanmoins, ces deux éléments « doivent s’entendre de façon humaine et non absolue »47. La force majeure doit également avoir un caractère extérieur48. Ceci résulte de l’article 269 du D.0.C. Qui définit la force majeure :
« tout fait que l’homme ne peut prévenir, tel que les phénomènes naturels (inondations, sécheresses, orages, incendies, sauterelles), l’invasion ennemie, le fait du prince, et qui rend impossible l’exécution de l’obligation.
N’est point considérée comme force majeure la cause qu’il fût possible d’éviter, si le débiteur ne justifie pas qu’il a déployé toute diligence pour s’en prémunir.
N’est pas également considérée comme force majeure la cause qui a été occasionnée par une faute précédente du débiteur »49.
91Les tribunaux marocains se montrent très sévères dans l’appréciation des cas de force majeure. Une telle cause de libération du transporteur maritime est souvent invoquée dans de nombreux procès, mais elle est rarement retenue.
92La connaissance de la cause qui a rendu impossible l’exécution de l’obligation constitue un premier élément de force majeure. C’est cette cause, résultant de circonstances propres à une espèce donnée qui doit expliquer l’événement imprévisible insurmontable et extérieur pour le fréteur.
b. Le vice caché du navire, (article 213)
93Nous avons vu qu’en droit maritime marocain le fréteur est tenu personnellement d’exercer la diligence raisonnable avant, au début et pendant la durée de la charte, pour mettre le navire en bon état de navigabilité. Si le dommage provient de l’innavigabilité ou d’un vice caché du navire, le DCCM. dans son article 213 exonère le fréteur de sa responsabilité quand il prouve que le dommage provient du « vice caché qu’un examen scrupuleux n’aurait pas permis de découvrir ».
94Ainsi, le vice caché du navire ne peut exonérer le transporteur que s’il échappe à un examen scrupuleux50, vigilant51 ou à une diligence raisonnable52.
95De toutes ces expressions légales qui sont synonymes, il résulte que la notion du vice caché oblige en pratique à considérer l’attitude du fréteur. En effet, ces expressions donnent bien la mesure de diligence du fréteur, le degré à partir duquel on considérera le vice comme effectivement caché53.
96Faute de précision, la même diligence est exigée tant pour le cas d’innavigabilité que pour le cas du vice caché. On se demande quelles sont les caractéristiques qui séparent l’un de l’autre.
97Lorsqu’on estime que le fréteur a exercé la “due diligence” avant et au début du voyage, on reconnaît par-là même, que l’innavigabilité du navire constitue un vice caché.
98On ne serait en effet, sans se contredire, déclarer à la fois que le fréteur a exercé la diligence raisonnable et que le vice est apparent. Tout vice caché est donc considéré comme l’innavigabilité du navire, alors que l’inverse n’est pas toujours vrai.
99Ceci étant, l’exonération du fréteur trouve sa raison d’être dans la complexité des navires modernes. En effet, du fait que les navires sont soumis à des visites techniques et à des vérifications confiées à des organismes spécialisés, il est légitime de penser que le vice caché qui a échappé à leurs examens était moins prévisible pour le fréteur.
c. La faute nautique du capitaine ou de l’équipage (article 264-2)
100La faute nautique est plus qu’un cas excepté, c’est un véritable cas d’irresponsabilité puisque le réclamant ne peut bien évidemment pas faire tomber ce cas par la preuve de la faute, puisque ce cas… C’est la faute elle-même. On touche là, un particularisme majeur du droit maritime dont le bien-fondé a été longuement débattu et notamment remis en cause lors de la tenue de la Conférence de Hambourg54.
101Ce cas excepté puise ses origines dans l’article 3 du Harter Act qui est le premier texte à l’échelle internationale à avoir essayé de donner la notion de la faute nautique. En effet, cet article disposait que si
« le propriétaire d’un navire a exercé une diligence pour mettre le navire à tout point de vue, en état de navigabilité, l’équiper, l’armer, l’approvisionner convenablement, ni le navire ni ses propriétaires, affréteur, agent ou capitaine ne seront tenus pour responsables des dommages ou pertes résultant des fautes ou erreurs dans l’administration du navire ou dans la navigation ».
102La même idée est exprimée en des termes différents par l’alinéa 2 de l’article 264 du DCCM qui prévoit que l’armateur pouvait s’exonérer des fautes commises par le capitaine, le pilote et l’équipage dans l’accomplissement de leurs fonctions ou ce qui concerne le navire.
103Ceci étant, la faute nautique s’oppose à une autre faute identifiée par la pratique dite « faute commerciale ».
104La distinction entre faute nautique et faute commerciale est d’importance dans la mesure où le fréteur est libéré de la faute dans la navigation et l’administration du navire, mais responsable de la faute dans le chargement, l’arrimage, le transport, la surveillance, les soins et le déchargement de la marchandise55. La difficulté naît, en pratique, du fait qu’il n’y a pas de frontière très nette entre la faute nautique et la faute commerciale ainsi qu’en témoignent les décisions jurisprudentielles en la matière.
105À défaut de précision dans les textes de loi tant sur le plan national qu’international, il faut apprécier la faute à l’origine du dommage et pour déterminer sa nature véritable il est nécessaire de se référer à certains critères établis par la jurisprudence. Cette dernière, comme la majorité de la doctrine est en faveur de deux critères, à savoir : le but de l’acte fautif et la destination de la chose utilisée ou maniée.
3. Le but de l’acte fautif
106Il s’agit ici de se demander à quoi tendait l’acte fautif. S’il s’agit d’un acte « qui intéresse le navire comme tel et non d’abord la cargaison ou les appareils et installations du navire établis pour la conservation de la cargaison »56. L’acte sera considéré comme effectué dans l’administration du navire. S’il s’agit d’un acte qui intéresse la marchandise, il n’entrera pas dans l’administration du navire.
107Le critère du but de l’acte est retenu par la Cour d’appel de Rabat dans l’arrêt déjà évoqué du 8 mai 195757à propos duquel la dite Cour a décidé que l’inondation d’une cale ayant causé des avaries aux marchandises, quand cette inondation est la conséquence d’un mouvement de ballast effectué en cours de traversée, afin de mieux assurer la stabilité d’un navire secoué par la tempête, et que par suite d’un serrage défectueux du joint en caoutchouc du deeptank, l’eau du ballast a filtré dans la cale, constitue une faute nautique dont l’armateur peut s’exonérer.
108Le critère du but de l’acte fautif est également retenu par les jurisprudences étrangères. Pour n’en donner qu’exemple, nous citerons un arrêt de la Cour d’appel de New York du 29 novembre 1963 concernant l’affaire Black Héron. Dans cette espèce, l’erreur de l’officier du navire dans le choix de vanne de remplissage et l’envoi de l’eau de ballastage dans une cale pleine de marchandises a été considérée par la Cour comme une faute nautique.
109D’après le professeur Bonassies,
« les tribunaux américains demeurent en principe fidèles au critère de l’objet, du but premier de l’acte. Lorsqu’un comportement a clairement pour objet l’administration du navire, ce qui est le cas d’un ballastage destiné à rétablir l’équilibre du bâtiment, nul n’en discute le caractère et ce quelles qu’en soient les conséquences »58.
110On trouve la même analyse dans les fautes d’arrimage à propos desquelles la jurisprudence étrangère adopte une distinction fondamentale entre les fautes d’arrimage qui n’affectent pas la sécurité du navire (fautes commerciales) et les fautes d’arrimage qui affectent la sécurité du navire (fautes nautiques)59. Pour ce qui est de la jurisprudence marocaine nous ne disposons pas d’exemple analogue. Le seul cas connu concerne une faute dans le fardage à propos de laquelle la Cour d’appel de Rabat60 a statué qu’il n’y a pas de vice caché lorsque nulle défectuosité du navire n’est à la base de la présence d’eau clans les cales. Les rapports d’expertise excluaient la faute nautique, le défaut de fardage étant une faute commerciale caractérisée. De plus la présence de 20 cm d’eau dans les cales n’aurait pas dû échapper à un examen vigilant et attentif.
4. La destination de la chose maniée
111Ce critère, ainsi que l’a défini Monsieur Rodière, « consiste à localiser l’acte fautif sur une partie du navire et à se demander si cette partie concerne le navire comme tel ou si elle est destinée aux marchandises »61. Quelques exemples permettent d’illustrer l’application de ce critère : Si la marchandise est inondée à la suite de l’utilisation défectueuse des appareils en vue de ballastage du navire, la faute est nautique. Lorsque l’infiltration d’eau provient d’une canalisation d’un réfrigérateur des cales, l’acte fautif intéresse la cargaison, et la faute est commerciale.
112Le critère de la destination a été retenu par la Cour d’appel de Rabat62 dans une affaire concernant l’inondation d’une cale. Inondation due à ce que le mécanicien a négligé de fermer une robinetterie de prise à la mer établie pour assurer la sécurité du navire. La Cour a considéré la faute comme une faute nautique, tirant cette conclusion du fait qu’il s’agit ici de la sécurité du navire.
113Voilà pour la responsabilité du fréteur à temps selon les textes légaux. Il faut reconnaître que ce sont les chartes qui sont à la base de la jurisprudence dans la mesure où le droit commun est rarement appliqué.
B. Responsabilité selon les chartes parties
114Après avoir vu la responsabilité du fréteur à temps dans son schéma légal, nous nous proposons ici d’étudier cette responsabilité dans sa réglementation conventionnelle.
115Ce qui caractérise l’affrètement à temps est la distinction entre la gestion nautique du navire, à charge du fréteur, et la gestion commerciale qui revient à l’affréteur.
116Loin de se désintéresser de son navire, le fréteur le fait naviguer pendant toute la durée de la charte via le capitaine, qui le nomme lui-même. Quant au capitaine, s’agissant d’un navire frété à temps, il est préposé de ses armateurs pour la gestion nautique et engage leur responsabilité pour des dommages causés par la navigation, par les manœuvres et par tout ce qui s’y rattache.
117Dans la pratique, la distinction entre la gestion nautique et la gestion commerciale ne semble pas toujours évidente63. Les chartes sont assez obscures sur la distinction de la double subordination du capitaine.
118L’affrètement est le domaine de la liberté contractuelle. Les chartes parties contiennent des clauses qui, tantôt définissent la responsabilité du fréteur, tantôt l’exonèrent de celle-ci.
1. Concept de la responsabilité
119Les clauses 13 de la charte « Baltime » et 12 de la charte « Liner time », définissent l’étendue de la responsabilité du fréteur à temps.
120Ce dernier sera tenu pour responsable chaque fois qu’il fera preuve d’un manque de diligence raisonnable « due diligence » de sa part.
a. Les clauses déterminant l’étendue de la responsabilité
121Sous le titre « Responsabilité et Exemption », la clause 13 de la « Baltime » définit l’étendue de la responsabilité du fréteur en stipulant que
« les armateurs ne seront responsables du retard dans la livraison du navire et pour retard dans le cours de la charte, ainsi que pour perte ou dommage des marchandises à bord que si, ce retard ou perte a été occasionné par le manque de soin diligent de la part des armateurs ou de leur gérant pour mettre le navire en bon état de navigabilité et le gréer pour le voyage ou pour tout autre acte ou omission personnel ou manquement des armateurs ou de leur gérant… ».
122La clause 12 de la charte-partie « Liner time » prévoit sous l’intitulé « Responsabilité » que :
« … les armateurs seront eux responsables pour les réclamations concernant la marchandise survenant ou résultant de :
Difficultés ou manquement de leur part, à transporter, à conserver ou à prendre soin de la marchandise se trouvant à bord ;
Déroulement imprévu pour le voyage décrit dans les connaissements sauf Si celui-ci est ordonné ou approuvé par les affréteurs ;
Manque de “due diligence” de leur part avant et au début de chaque voyage, afin de mettre le navire en état de navigabilité… les affréteurs seront entièrement responsables pour toutes réclamations portant sur la marchandise. Néanmoins, Si la marchandise appartient aux affréteurs, les armateurs auront la mime responsabilité qu’ils auraient d’après cette clause… ».
123La NYPE (cl 12) impose au capitaine de faire diligence en ce qui concerne la ventilation des cales.
124Nous remarquerons à la lecture des deux clauses, que nous venons de citer, que la responsabilité du fréteur est maintenue pour certains types de réclamations relatives à la cargaison lorsqu’il y a eu absence de due diligence de sa part ou de la part de son gérant.
b. La clause de « due diligence »
125La clause 13 de la « Baltime » comme la clause 12 de la NYPE déclarent le fréteur à temps non responsable, sauf s’il a manqué à sa diligence raisonnable.
126Cette dernière, selon le Doyen Rodière est une notion anglo-saxonne, qui s’interprète comme « Ce qu’on doit attendre d’un armateur soigneux, sans qu’on puisse exiger de lui des soins exceptionnels ».
127Il ajoute que l’appréciation de ce qui était raisonnable ne doit pas se faire après coup, une fois que l’événement en a prouvé l’insuffisance, il faut se reporter par l’esprit au moment où se présentait la situation à laquelle le fréteur devait faire face, pour apprécier son comportement64.
128Notons, qu’en ce qui concerne l’affrètement à temps, c’est à l’affréteur de prouver que le fréteur n’a pas exercé la diligence qui lui incombe dans la mise en état de navigabilité et dans l’équipement du navire.
2. Les clauses d’exonération de responsabilité du fréteur
129Les chartes parties à temps contiennent des clauses énumérant des situations où le fréteur peut se dégager de sa responsabilité.
130C’est ainsi qu’il peut se libérer de sa responsabilité pour son fait personnel lorsqu’il n’aura pas manqué à sa diligence raisonnable65.
131Il peut ainsi se libérer de sa responsabilité pour le fait de ses préposés ou encore pour certains faits mentionnés à la charte-partie.
a. Les clauses d’exonération par leur rédaction
132La clause 13 de la charte à temps « Liner time » indique sous le titre « Exemptions », les cas pour lesquels le fréteur est exonéré de sa responsabilité. Elle stipule :
« Soit en ce qui concerne aussi bien les armateurs que les affréteurs, la responsabilité pour toute perte, dommage ou retard dans l’accomplissement de cette charte, ce que l’on ne mentionne pas dans la clause 12 est soumise aux exceptions mutuelles suivantes :
- faits de Dieu, fait de guerre, troubles civils, grèves, lock-out, faits du prince et décrets, restrictions de quarantaine. De plus, si cette responsabilité émane des armateurs, elle est sujette aux exceptions suivantes :
- toute négligence du capitaine, pilotes ou autres servants des armateurs pour la navigation du navire, feu, explosions, s’ils ne résultent pas de la faute personnelle des armateurs, collisions ou échouages, avarie soudaine ou dégât provenant de la coque, l’équipement ou la machine du navire »66.
133La « Baltime » prévoit les cas d’exonération de responsabilité du fréteur dans deux clauses différentes.
134La clause 9 stipule en effet que les armateurs ne seront pas responsables des manquants, des mélanges, des marques, ni du nombre de pièces ou colis, ni des avaries ou réclamations sur marchandises résultant de mauvais arrimage ou autrement.
135La clause 13 de la même charte par contre, fait la distinction entre les causes d’exonération de responsabilité du fréteur tout en les énumérant.
136Cette clause déclare que :
« Les armateurs ne seront responsables du retard dans la livraison du navire ou de celui pouvant survenir dans le cours de la charte, ainsi que pour perte ou dommage des marchandises à bord, que si ce retard ou perte a été occasionné par un défaut de la diligence incombant aux armateurs ou à leurs gérants dans la mise du navire en bon état de navigabilité et dans son équipement ou le voyage ou par tout autre acte ou omission personnelle ou manquement des armateurs ou de leurs gérants (clause concernant le fait personnel du fréteur).
Les armateurs ne seront responsables dans aucun autre cas, ni pour dommages ou retards quels qu’ils soient ou de quelque manière qu’ils soient causés, même s’ils sont occasionnés par la négligence ou le manquement de leurs préposés (clause concernant le fait des préposés).
Les armateurs ne répondront pas des pertes ou dommages provenant ou résultant de grèves, lock-out ou arrêts ou restrictions de main-d’œuvre (y compris le capitaine, les officiers ou l’équipage), qu’ils soient partiels ou généralisés” (clause concernant l’exclusion de certains faits) ».
137Ainsi, en vertu de la clause que nous venons de citer, le fréteur est exonéré de toute responsabilité en cas de retard dans la livraison ou de pertes ou de dommages subis par la cargaison, ainsi que pour tout autre dommage, qu’il soit dû à l’innavigabilité du navire ou à d’autres causes, à moins que ces retards, pertes ou dommages ne soient causés par sa faute personnelle ou par la faute de son gérant. Le terme « personnelle » est interprété dans un sens littéral, excluant toute faute de la part du capitaine, des officiers et de l’équipage.
138Nous remarquerons que la « Baltime » prévoit le manque de main-d’œuvre, notamment le manque de capitaine et d’équipage, le fréteur s’exonérant des conséquences.
b. Preuve du cas d’exonération
139Dans l’affrètement à temps, le fréteur n’est pas responsable a priori des dommages subis par la cargaison. Il faut pour que la responsabilité soit mise en jeu que l’affréteur établisse la preuve d’un manquement aux obligations du fréteur, particulièrement à l’obligation de mettre le navire en état de navigabilité.
140Une clause d’exonération de ce type peut être utile au fréteur dans la mesure où le dommage entre bien dans le cas d’exonération prévu.
141Ainsi par exemple, si l’incendie constitue selon la clause qui le prévoit une cause d’exonération, le fréteur ne sera pas responsable grâce à la clause. Mais deux conditions doivent, néanmoins être satisfaites en premier sur le terrain de la preuve, le fréteur aura dû au préalable établir que le dommage a bien été causé par l’incendie ; puis en second, il ne faut pas que l’incendie soit dû à une faute dolosive ou lourde du fréteur. Nous noterons en effet, que le fréteur en vertu du droit commun perdra le bénéfice de la clause d’exonération de responsabilité chaque fois qu’il fera preuve d’une faute lourde personnelle ou d’un dol.
3. Attitude de la jurisprudence arbitrale
142Il résulte de ce qui précède que les chartes-types contiennent des dispositions différentes, selon lesquelles la responsabilité du fréteur va d’un extrême à l’autre.
143La « Baltime » (cl 13) exonère le fréteur des dommages à la marchandise par négligence ou fautes du capitaine ; l’affréteur est à la merci de sa conscience et, bien évidemment de sa compétence.
144La « NYPE » accorde à l’affréteur un début de protection en imposant au capitaine une obligation de diligence pour la ventilation des cales.
145La « Liner time » (cl 12) lui accorde une garantie réelle l’armateur est responsable du manque de soin à l’égard de la cargaison pendant la présence du capitaine à bord.
146Cette clause fut la cause de toutes les sentences qui ont été rendues par la CAMP. Cette constatation ne doit pas nous étonner, car on notera dans la clause un renversement des responsabilités le capitaine demeure le préposé du fréteur pour les soins à donner à la cargaison.
147Cette disposition de la charte « Liner time » reprenant sur ce point les dispositions de l’art. 3 de la Convention de Bruxelles de 1924, permet d’imputer au fréteur toute faute commise par lui dans l’organisation ou la réalisation du voyage.
148À propos de l’obligation du fréteur de procéder de manière appropriée et soigneuse au transport, à la garde et aux soins de la marchandise, les arbitres ont motivé le rejet de la demande en observant que
« la responsabilité du fréteur serait donc engagée s’il avait connu avant le début du voyage les risques pesant sur le navire du fait des actions de l’I T F ou s’il avait négligé de se renseigner sur l’éventualité de tels risques ».
149Les investigations faites par les arbitres leur ont permis de conclure qu’il n’en était rien.
« Au surplus, l’affréteur qui avait lui-même établi l’itinéraire du navire aurait dû, de son côté, recueillir toutes informations utiles sur les difficultés susceptibles de survenir et prendre à cet effet les mesures nécessaires »67.
150Nous pouvons constater que par application de l’art. 12 de la C/P « Liner time », le fréteur n’est responsable des dommages causés à la marchandise que si ces dommages sont imputables à un manque de diligence de sa part à mettre le navire en bon état de navigabilité ou à soigner la marchandise. C’est bien le cas où suite à des avaries survenues à deux conteneurs frigorifiques, les marchandises transportées ont été considérées en avarie totale. L’affréteur-transporteur avait introduit une demande d’arbitrage pour son indemnisation. Les arbitres, après avoir consulté les expertises, ont décidé que le fréteur n’était pas responsable d’une panne imputable au conteneur lui-même, et irréparable par les moyens de bord. En revanche, ils l’ont déclaré responsable pour le conteneur ayant souffert d’un défaut d’alimentation électrique en raison d’une négligence à bord ; le capitaine s’étant abstenu de s’assurer du bon état de ce conteneur, une surveillance convenable aurait peut-être permis de remédier à la cause du mal affectant ce conteneur. Ce manque de diligence du capitaine a engagé la responsabilité du fréteur qui fut condamné par les arbitres à rembourser la valeur des marchandises transportées dans ce deuxième conteneur68.
151Les arbitres n’hésitent pas à condamner les armateurs qui se montrent négligents à l’égard de l’affréteur, surtout devant des situations où les événements démontrent qu’il n’y a aucun doute quant à leur négligence.
152Le meilleur exemple d’une telle attitude du capitaine et des armateurs fut le cas d’un navire affrété à temps selon C/P « Liner time » qui, suite à un déroutement décidé par le capitaine pour effectuer des réparations à la machine, mouillait sur une rade ouverte au port du Pirée, les marchandises saisissent en pontée restant ainsi à la merci d’une forte tempête.
153Le capitaine avait quitté le navire se trouvant hors location, lequel par la suite fut abordé par un autre navire mouillant en rade. Les réparations se poursuivaient très lentement et entre-temps, le navire et la cargaison ont été saisis par la société des remorqueurs avec laquelle le capitaine avait signé un contrat d’assistance.
154Les arbitres ont estimé que pendant la période de suspension de la location, le capitaine et les armateurs du navire restaient responsables vis-à-vis de la cargaison et des affréteurs des marchandises, dont ils avaient la garde ; qu’ils avaient l’obligation de réduire la période du déroutement à son minimum pour limiter le préjudice résultant du retard.
« Le capitaine a été négligent en quittant son navire lequel se trouvait en innavigabilité totale, puisqu’il séjournait sur rade ouverte, exposé à la tempête, dépourvu des moyens pour lever ses ancres, sans machine et sans capitaine. L’abordage survenu en rade du Pirée et le temps perdu étaient la conséquence directe de la négligence caractérisée des armateurs et du capitaine ».
155Bien que le délai anormal passé au Pirée fut-il de novembre jusqu’au 19 juin résultait directement de la négligence des armateurs à l’égard de la cargaison dangereusement menacée à bord d’un navire en état d’innavigabilité, les arbitres les ont condamnés à réparer le préjudice subi par l’affréteur à l’égard de sa clientèle, des chargeurs et des frais substantiels engagés par lui pour pouvoir obtenir le départ du navire du Pirée, le tout étant évalué globalement69.
156En ce qui concerne l’arrimage, bien qu’il relève en principe de la gestion commerciale du navire, question que nous allons examiner dans la deuxième section de notre chapitre, il nous semble utile de mentionner la position des arbitres, qui est conforme avec celle des décisions des Tribunaux70 lorsque l’arrimage peut constituer une faute nautique. Ce cas se présente lorsqu’une faute d’arrimage affecte la stabilité et la sécurité du navire, prenant alors les caractères d’une faute nautique du commandant, qui supervise toujours l’arrimage pour des raisons de sécurité évidentes ; c’est le cas où la faute d’arrimage exonère toujours le fréteur.
157Bien qu’ils n’avaient pas eu l’occasion de se prononcer sur ce point, les arbitres soulignent accessoirement qu’il s’agit de la gestion nautique, quand en matière d’arrimage se pose le problème de la répartition des poids sur la tenue du navire71.
158Du point de vue du droit anglais, la mixtion active du capitaine dans le chargement et l’arrimage de la cargaison peut rendre l’armateur responsable ipso facto, position que généralement le droit américain ne suit pas72.
159La position des arbitres français dépend sur ce point des dispositions particulières qui sont assez souvent convenues entre les parties. Nous citons ainsi l’exemple d’une affaire très intéressante sur laquelle la CAMP a eu l’occasion de se prononcer.
160Le navire affrété par charte-partie « Liner time » était chargé de sucre et de café, le chargement de sucre ayant été fait par-dessus un chargement de café vert. À l’arrivée du navire, le café était sucré, du fait de l’infiltration du sucre dans le café, résultant de la mauvaise étanchéité des panneaux de cale et de l’insuffisance des prélarts recouvrant le café. Les parties avaient substitué dans le texte initialement imprimé une clause manuscrite qui stipulait que l’armateur acceptait la responsabilité des fautes de la préparation des cales ou de l’arrimage de la cargaison, sauf si celui-ci a été effectué contre les instructions formelles du capitaine73.
161En l’espèce, d’après les documents versés aux débats, la préparation des cales et l’arrimage de la cargaison ont été effectués avec l’accord et la pleine coopération du capitaine et du subrécargue qui représentait l’affréteur. Il appartenait au capitaine, sachant que les panneaux n’étaient pas absolument étanches (puisque le second avait attiré l’attention du subrécargue sur ce point) de formuler toutes réserves écrites, voire même de refuser de charger les marchandises. Faute de ne pas avoir pris des réserves, la responsabilité entière de l’armateur à l’égard de l’affréteur était retenue par les arbitres selon la clause 12 (d) de la charte. L’armateur fut condamné de reverser la somme payée par l’affréteur pour indemniser les destinataires de la cargaison74.
Conclusion
162Dans cette étude consacrée à la responsabilité du fréteur à temps à l’égard de l’affréteur, il semble que l’arsenal juridique et conventionnel, démontré tout au long de ce développement, pourrait rétablir l’équilibre qui manque au contrat d’affrètement à temps. Or, en pratique, ils y sont très réticents. Mais, en définitive, pour que cet équilibre soit retrouvé, ne faut-il pas que non seulement des concessions soient faites de la part des fréteurs (armateurs) toujours en position de force, mais encore une large intervention du législateur ?
163Dans la pratique, malheureusement, le contenu qu’on a pu donner aux chartes parties à temps n’a pas manqué d’être inspiré pour une grande partie par les intérêts de l’armateur fréteur, partie puissante économiquement et plus compétente sur le plan juridique et technique, et une certaine méfiance.
164Car, en général, à l’instar des autres modes d’exploitation du navire, le but poursuivi dans l’affrètement à temps est, avant tout, la rentabilité maximale.
165L’insertion de certaines clauses dans les différentes chartes parties à temps que nous avons examinées, a, en effet, tendance à donner la priorité à l’intérêt de l’armateur fréteur étranger sur l’intérêt de l’affréteur marocain. Cette attitude est de nature à nuire au développement économique du Maroc affréteur et ne favorise pas l’équilibre des intérêts dans les clauses négociées des chartes parties.
166N’étant pas capable de concevoir une stratégie de rédaction de charte-partie claire, les négociateurs des pays sous-développés, en position évidemment de faiblesse, signent des contrats dont ils ignorent la teneur et parfois la langue.
167Ainsi des commentaires émanant de pays développés à économie de marché, semblent indiquer qu’à la différence des chargeurs de ligne régulière, les affréteurs n’ont pas besoin d’une protection législative pour être sur un pied d’égalité avec le fréteur, cela est tout à fait possible car ils occupent souvent, dans les négociations, une position de force qui leur permet d’imposer certaines conditions aux fréteurs. Mais certains milieux d’affrètement, notamment dans les pays en voie de développement, ont estimé, toutefois qu’ils étaient en position d’infériorité lors de la négociation des contrats et que leurs courtiers ne faisaient pas suffisamment d’efforts, lorsque le marché leur était favorable, pour changer ou atténuer l’orientation « anti-affréteur » des chartes parties. La constitution de groupes d’intérêts économiques du côté des chargeurs affecte à la fois le niveau des taux de fret et l’équilibre des intérêts dans les clauses négociées des chartes parties.
168Nous aurions souhaité découvrir dans la pratique la plus récente de ce pays, des contrats plus « émancipateurs » pour sa souveraineté politique, économique et juridictionnelle, mais nos entretiens avec les responsables marocains et nos recherches nous ont permis de conclure que, malheureusement, cette pratique n’a pas suivi l’évolution qui s’est opérée ailleurs. Le contenu est toujours le même, seuls les noms des cocontractants changent.
169Il ne faut pas oublier que le contrat, instrument juridique de l’entreprise, continue de jouer un rôle prépondérant dans le commerce international. Il incombe, dès lors, aux courtiers d’affrètement d’insister, au cours de la négociation préliminaire, sur le contenu du contrat et non sur son assimilation, comme c’est toujours le cas de ces pays.
170N’est-il pas grand temps enfin que les responsables des pays en développement prennent conscience de ces vérités et cessent de négocier en méconnaissance des causes et recourent à des contrats plus adaptés, plus équilibrés et clairs ?
Notes de bas de page
1 The Afovos (1982) 1 WLR 848 at p 855.
2 Cour d’appel de Paris, 23 juin 1983, DMF 1984, p. 307. Voir pour un affrètement coque-nue, Cham Arb Mar de Paris, sentence n° 1000 du 29 janvier 1999, DMF 1999, p. 837.
3 Cham Arb Mar de Paris, Sentence n° 316 du 3 octobre 1979, DMF 1980, p. 185.
4 J. Potier, « Le Capitaine aux ordres de l’affréteur à temps », Études offertes à René Rodière, p. 469.
5 Cham Arb Mar de Paris, Sentence n° 684 du 1er mars 1988, DMF 1988, p. 245.
6 Cham Arb Mar de Paris, Sentence n° 703 du 15 mars 1988, DMF 1989, p. 256.
7 Cham Arb Mar de Paris, sentence n° 684 du 1er mars 1988, DMF 1988, p. 245.
8 Cham Arb Mar de Paris, Sentence n° 703 du 15 mars 1988, DMF 1989, p. 256.
9 Cham Arb Mar de Paris, Sentence n° 510 du 21 décembre 1983 DMF, 1984 p. 493.
10 Cham Arb Mar de Paris, Sentence n° 220 du 27 juillet 1977 (second degré) DMF 1978, p. 47.
11 Cham. Arb. Mar. de Paris, sentence n° 927 du 6 novembre 1995, DMF 1996, p. 344.
12 Cf. R. Rodière, « La responsabilité légale du fréteur », DMF, 1963, p. 323 et suivantes.
13 Cour d’appel de Rabat, 8 décembre 1949, RMD 1950, p. 263. Note de R. Bayssière.
14 CA de Rabat, 30 juin 1953, DMF, 1954 p. 586.
15 Rodière, « Le bon état du navire affréter », DMF 1965, p. 391.
16 Cour d’appel de Rabat, 8 décembre 1949, RMD, 1950, p. 263.
17 Cour d’appel de Rabat, 12 janvier 1963, RACAM, 1963, p. 96.
18 Cour d’appel de Rabat, 30 juin 1953, navire « Danio », DMF, 1954, p. 90.
19 Tribunal de première instance de Rabat, 2 octobre 1986, RMD, 1986, n° 5, p. 288.
20 H. Cherkaoui, « La navigabilité du navire », RMD, 1988, p. 87.
21 Cour d’appel d’Aix, 20 septembre 1985, BTL, 1986, p. 214 ; M. de Juglard, « Le vice de la chose en droit maritime », DMF, 1982, p. 1 et s. Cité par R. Rodière et E. du Pontavice, Droit maritime, Dalloz, 1997, n° 368.
22 Cour d’appel de Rabat, 25 juin 1954, GTM, 1954, n° 1, p. 157.
23 Tribunal de première instance de Casablanca, 6 juillet 1954, DMF, 1956, p. 87.
24 H. Cherkaoui, « La navigabilité du navire », RMD, 1988, p. 87, Cour d’appel de Rabat, 30 juin 1953, DMF, 1954, p. 58 Cour d’appel de Rabat, 27 février 1952, RACAR, tome XVII, 1953-54, p. 452.
25 Ceci apparaît clairement dans la décision rendue par la Cour Suprême américaine dans l’affaire The CALEDONIA qui jugea : « In aur opinion, the shipowner’s undertaking is not merely that he will do and has done his best ta make the ship fit, but that the ship is really fit to undergo the perils of the sea and other incidental risks ta which she must be exposed in the course of the voyage ; and, this being so, that undertaking is not discharged because the want of fitness is the result of latent defects ». 157 U.S. 124 [1895].
26 R. Rodière, Traité de droit maritime, TII, n° 325.
27 Par exemple : la charte-partie NYPE.
28 Ch. Arb. Mar. de Paris, Sentence arbitrale n° 271 du 3 juillet 1978 DMF 1979 p. 58.
29 Ch. Arb. Mar. de Paris, Sentence arbitrale n° 29 du 29 décembre 1969 DMF 1970, p. 443.
30 Ch. Arb. Mar. de Paris, Sentence arbitrale n° 293 du 17 avril 1979 DMF 1979, p. 629.
31 Ch. Arb. Mar. de Paris, Sentence arbitrale n° 63 du 26 juillet 1971 DMF 1971, p. 765.
32 Ch. Arb. Mar. de Paris, Sentence arbitrale n° 375 du 8 octobre 1980 DMF 1981, p. 571.
33 Ch. Arb. Mar. de Paris, Sentence arbitrale n° 458 du 2 novembre 1982, DMF 1983, p. 246.
34 Ch. Arb. Mar. de Paris, Sentence arbitrale du 14 mai 1974, JCP, 1974, II, 17818. DMF, 1974, p. 653 ; cf. Également la sentence du 29 décembre 1973, citée et analysée par M. Monetti, Arbitrage et affrètement maritime, Étude comparée des sentences françaises et américaines, thèse de 3e cycle, université de Rouen, Haute Normandie, 1981, p. 146-147.
35 Ch. Arb. Mar. de Paris, Sentence arbitrale n° 194 du 2 octobre 1976, DMF 1977, p. 430.
36 En sens contraire, Cham Arb Mar de Paris, Sentence n° 19 du 8 juillet 1969, DMF 1970, p. 58. « Qu’en rompant unilatéralement le contrat d’affrètement, l’affréteur a méconnu les règles du Droit français régissant les contrats et en particulier celles exprimées dans l’art. 1184 du Code civil ».
37 - sans avoir à justifier d’un motif et avec deux semaines de préavis (clause 9 b). - à condition que le navire ait, été indisponible, pour une raison quelconque (incluant une avarie) pendant plus de 20 jours consécutifs et avec 20 jours de préavis (clause 9 d). - à condition que le navire ait été indisponible, pour raison d’innavigabilité résultant de la faute de l’armateur, pendant plus de cinq jours et sans préavis (cl 12).
38 Cham Arb Mar de Paris, Sentence n° 572 du 15 mars 1985, DMF 1986, p. 183.
39 Cham Arb Mar de Paris, sentence n° 548, du 2 novembre 1984, DMF 1985, p. 306.
40 Cham Arb Mar de Paris, sentence du 18 mars 1976, citée à la page 31 du document IIETM des journées des 12 et 13 janvier 1977 sur l’affrètement à temps.
41 Cour d’appel de Rabat, 12 janvier 1963, RACAR 1964 p. 96, Navire « Tanger », publié aussi dans la GTM, mars 1963 p. 29 dans le même sens voir, CA de Casablanca, 21 juillet 1981, Doss 859, J. 1881 ; CA de Casablanca, 29 janvier 1980 Doss 2205/80, J. 160.
42 Mazeaud et Tunc, Traité théorique et pratique de la responsabilité civile, délictuelle et contractuelle, T. I, 6e édition, n° 667 page 738. Voir aussi Carbonnier, Droit civil, T. II, 2e édition, n° 150, édition Thémis.
43 G. Ripert, Droit maritime, T. Il, p. 593.
44 Cf. C. Hassania, « Le péril de mer, notion maritime de la force majeure », DMF 1991, p. 212.
45 Cf. M. El Khayat, La responsabilité du transporteur maritime an droit maritime marocain, Thèse Paris Il, 1986 p. 73.
46 P. Lureau, « Le cas de force majeure et la loi du 2 avril 1936 », DMF, 1949, p. 179 et suivantes ; voir aussi Legendrk, « Le péril de mer an droit français », DMF 1955 p. 323 et suivantes.
47 Rodière, référence précitée, T. 14, n° 630.
48 « La foudre peut être tellement violente qu’aucun moyen d’extinction ne suffira à éviter l’incendie. Elle sera considérée, alors, comme un cas de force majeure. C’est au juge d’apprécier le degré d’intensité de l’imprévisibilité et I’inévitabflité », Y. Keslin, La responsabilité de l’armateur et du transporteur maritime. Étude de droit turc, Thèse Lausanne, 1961.
49 Voir pour un cas d’application, Cour d’appel de Rabat, 2 novembre 1937 RACAR 1937, p. 38, cet arrêt définit la force majeure comme étant : « un événement que le contractant ne pouvait prévoir et qui rend impossible l’exécution de l’obligation. Cette impossibilité devant être à la fois inévitable et imprévisible ».
50 Articles 231 du DCCM et 123 du projet de reforme.
51 Article 77 litt b de la loi française.
52 Article 4 § litt a de la convention de Bruxelles de 1924.
53 H. Charkaoui, « La navigabilité du navire », RMD 1986, p. 88.
54 Cf. J. Bonnaud, « Les réformes apportées par les Règles de Hainbourg aux exonérations de responsabilité et limitation de réparation du transporteur maritime », Colloque du 16 décembre 1992, sur les Règles de Harnbourg, IMTM 1992, Revue Scapel 1993, p.
55 Rodière, « Faute nautique et faute commerciale », DMF 1961, p. 451.
56 Rodière, Traité, référence précitée, T. 11, n° 221.
57 CA de Rabat, 8 mai 1957, Gaz. Tribu. du Maroc de juin 1957, p. 81, infirme Casablanca, 28 février 1956.
58 Commentaire de l’arrêt Black Héron, DMF 1966 p. 117, voir aussi Cour suprême de Suède, DMF 1963 p. 439.
59 Voir dans ce sens, Cour de cassation française, 12 avril 1976, DMF 1976 p. 685 et récemment Cour de cassation française 26 février 1991, mars 1991 p. 358. Affaire Aude note P. Bonassies.
60 Cette décision de la Cour d’appel ne faisait que confirmer celle du Tribunal de première instance de Casablanca dans son jugement du 14 janvier 1960. Voir CA de Rabat 12 janvier 1963, RACAR 1964, p. 96-97 ; une autre décision va dans le même sens, voir CA de Rabat, 5 décembre 1956, GTM du 25 mai 1957, p. 46, infirme Casablanca 25 juin 1953.
61 Rodiere, référence précitée, T. Il, n° 622.
62 Cour d’appel de Rabat, 16 juillet 1954, GTM 1954 p. 13. Pour ce qui est de la jurisprudence française, voir les références citées par R. Rodiere, T. Il n° 622 et notamment un jugement du Tribunal du Havre du 13 novembre 1973, DMF 1974 p. 168.
63 Cf. D. Jouidi, L’exploitation commerciale du navire affrété en droit français et comparé, Thèse Nante, 1994, p. 235 et suivantes. Voir aussi, P. Garoche, L’exploitation commerciale du navire et ses problèmes, édition Maritime et d’Outre-Mer, Paris, 1966.
64 Cf. Rodière, op. cit., n° 325, p. 358.
65 Cf. clause de « due diligence ».
66 Traduction libre.
67 Cham. Arb. Mar. de Paris, Sentence n° 623 du 15 juin 1986, DMF 1987, p. 54.
68 Cham. Arb. Mar. de Paris, Sentence n° 291 du 13 février 1979, DMF 1979, p. 381.
69 Cham. Arb. Mar. de Paris, Sentence n° 514 du 8 février 1984 (second degré), DMF 1984, p. 554.
70 C. cass 4 juillet 1972, DMF, 1972, p. 717 note Achard (R). CA de Paris 27 novembre 1979, DMF, 1979, p. 80, note R. Rodière.
71 Cham. Arb. Mar. de Paris, Sentence n° 166 du 6 février 1976, DMF 1976, p. 764.
72 M. Wilford, T. Coghlin, N. Healy, J. Kihball, Time Charters, p. 211.
73 Traduction livre de la clause 12 (d) ajoutée dans la charte « The owner shah be hable of d) daims arising or resulting from faulty preparation of the holds and/or tanks of the vessel or from bad stowage of the cargo except if made against Master’s formai instruction ».
74 Cham. Arb. Mar. de Paris, Sentence n° 166 du 6 février 1976, DMF 1976, p. 764.
Auteur
Professeur de l’enseignement supérieur à la faculté de droit de Fès, Directeur du Laboratoire de recherche en Droit des Transports, Distribution et de la Logistique, Responsable du Master Droit International des Affaires
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