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    Plan

    Plan détaillé Texte intégral I. La faute nautique et la faute commerciale II. Absence de faute ; condition d’exonération Notes de bas de page Auteur

    Le droit maritime dans tous ses états

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    La faute du transporteur en droit maritime marocain et comparé

    Driss Saidoune

    p. 269-278

    Texte intégral I. La faute nautique et la faute commerciale A. Le principe de distinction entre les deux notions B. Coexistence d’une faute nautique et d’une faute commerciale II. Absence de faute ; condition d’exonération A. Absence de faute : condition du cas excepté 1. L’incendie 2. La faute du chargeur 3. Le fait d’ennemi public B. Absence de faute : condition de la force majeure Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1Le transport correspond au besoin de l’homme de se déplacer et de dé­placer les choses. L’homme en vient à se forger de véritables besoins, celui de se déplacer pour ses activités professionnelles, celui de voyager dans le cadre de ses loisirs, celui d’avoir à sa disposition un produit quel que soit son lieu de fabrication ou de récolte et celui de consommer à toute époque une denrée pourtant saisonnière.

    2L’importance des transports est également révélée à l’occasion de cir­constances perturbatrices, telles qu’une difficulté naturelle voire une catastrophe.

    3En somme, le transport est l’expression même du commerce. De la mo­deste caravane au moyen le plus moderne, c’est le vecteur nécessaire à la satisfaction du besoin, d’échange et à la répartition des richesses.

    4Ainsi, l’activité de transport apparaît cumulativement comme un facteur de progrès, véritable instrument d’une politique, mais également comme un critère de développement économique.

    5Le droit ne pouvait ignorer un phénomène aussi spécifique et primordial de l’activité humaine. Chaque mode de transport tend à avoir sa propre réglementation.

    6En revanche, la tentative de l’unification des droits de transport reste décevante, même si l’unification est acquise par genre de transport entre de nombreux pays. Ceci s’explique par le fait que certains transporteurs bénéficient d’une véritable situation de monopole dans leur activité, alors que d’autres restent plus proches de celle d’un commerçant ordinaire. De même la nécessité de distinguer les modes de transport peut poser problème en présence de certaines techniques récentes Ex : aéroglisseur, engin maritime ou aérien ? La réponse décide évidemment du régime juridique applicable au contrat.

    7L’opération de transport commence par la remise de la marchandise par l’expéditeur au transporteur de sorte à ce qu’elle puisse supporter un déplace­ment effectué dans des conditions normales. De ce fait, les tarifs imposent parfois à l’expéditeur l’exécution matérielle du chargement de la marchandise qui consiste dans son arrimage et de son calage. Ce principe n’est pas obli­gatoire, cependant dans certain mode de transport notamment le transport maritime, les parties au contrat de transport peuvent fixer dans ce dernier des incoterms permettant de connaître les obligations des parties en ce qui con­cerne le chargement et le déchargement de la marchandise.

    8Ensuite, le transporteur est soumis à un faisceau d’obligations ayant pour but d’assurer, dans les meilleures conditions, le déplacement et la conservation des marchandises du point d’expédition au lieu de destination.

    9C’est ainsi que le transporteur doit assurer à la marchandise les soins ordinaires et généraux appropriés à son maintien en l’état, et compatibles avec les nécessités du service.

    10Les exigences des voituriers varient suivant la nature de la marchandise et le genre de transport demandé1.

    11Ce déplacement qui va être réalisable grâce aux opérations préalables de chargement, constitue l’objet essentiel des obligations du voiturier. Il peut se décharger de toutes sortes d’obligations accessoires, comme de charger ou de décharger, ou connexes comme d’assurer une livraison contre remboursement ou de s’intéresser aux opérations de dédouanement. Il ne peut pas esquiver cette obligation sans ruiner l’économie du contrat de transport.

    12Enfin, l’opération de transport prend fin par la remise de la marchandise par le transporteur à la disposition effective du destinataire au lieu de destination dans l’état où elle se trouvait au moment de sa prise en charge.

    13En cours de chargement, deux types de dommages matériels peuvent se produire : dommages à la marchandise et dommage aux engins du transporteur. Qui doit supporter le poids de ces dommages ? La réponse dépend d’une question préalable : à qui incombait le chargement ?

    14S’il devait être effectué par l’expéditeur, celui-ci, ne peut rien réclamer du fait des dommages subis par sa marchandise au cours des opérations de char­ge­ment, mais il peut être tenu de réparer les dommages qu’il a causés aux cho­ses appartenant au transporteur ainsi qu’aux marchandises appartenant aux tiers. Ce­pendant si le chargement incombait au transporteur, les solutions sont inversées.

    15Encore faut il établir, pour appliquer cette répartition, que le dommage est bien dû au chargement, ce qui est important compte tenu de la présomption qui pèse sur lui lorsque le chargement incombait à l’expéditeur et qu’il est invoqué par le transporteur pour se libérer.

    16Il peut y avoir d’ailleurs concurremment une faute de l’expéditeur et une faute du transporteur qui a accepté le chargement défectueux sur les instances de l’expéditeur, auquel cas il y aura lieu de partager le poids des dommages entre eux.

    17Sous ces réserves, le principe est que la responsabilité incombe à celui qui a chargé.

    18De même, lorsque l’expéditeur confie sa marchandise au transporteur afin de la transporter, ce dernier est tenu de prendre soin de la cargaison.

    19Quand la marchandise arrive avariée, la mise en jeu de la responsabilité du transporteur manifeste qu’il n’a pas pris suffisamment soin de cette marchandise.

    20Le transporteur doit une certaine sécurité et il n’atteint cette sécurité qu’en prenant soin de la marchandise.

    21La responsabilité du transporteur naît donc de la conclusion du contrat de transport conclu à l’occasion de l’accomplissement des opérations de transport.

    22Le transporteur maritime peut être responsable à l’occasion de la perte, d’avarie et du retard de la marchandise ou de sa faute.

    23Qu’elle est donc le particularisme de la faute dans le droit maritime marocain et comparé ?

    24On étudiera dans une première partie le principe de distinction et la coexistence de la faute nautique et la faute commerciale, et dans une deuxième partie l’absence de faute comme condition exonératoire.

    I. La faute nautique et la faute commerciale

    25L’expression faute nautique comprenant aussi bien la faute dans la naviga­tion que la faute dans le management du navire au sens de la convention de Bruxelles.

    26La jurisprudence considère que la faute est nautique dès qu’elle constitue une menace directe pour la sécurité du navire et de l’expédition, même si elle a des conséquences néfastes sur la marchandise.

    27La faute sera ainsi qualifiée de commerciale toutes les fois qu’une manœuvre maladroite aurait entraîné un dommage à la cargaison sans porter atteinte à la sécurité du navire.

    « Si le mobile de l’acte peut à la rigueur être considéré comme nautique, la faute proprement dite est commerciale dans la mesure où elle porte atteinte à la garde et à la conservation de la marchandise »2.

    28Il y a lieu d’étudier dans ce paragraphe le principe de distinction et la coexistence des deux notions.

    A. Le principe de distinction entre les deux notions

    29L’opposition entre ces deux notions résulte des textes eux-mêmes. On la rencontre déjà dans le Harter Act qui annule, par son article 1er

    « toute clause par laquelle les capitaines et armateurs ne seront pas responsables des pertes ou avaries résultant de négligences, fautes ou erreurs dans le chargement, l’arrimage, la garde, la conservation ou la livraison des marchandises3 ».

    30L’article 3 apporte une exception au principe de la responsabilité du transporteur en cas de faute de l’équipage, commise dans la navigation ou dans l’administration du navire.

    31Le droit marocain proscrit également les clauses qui libéreraient le transporteur en cas de fautes commerciales (art. 264. Al. 1) et permet au transporteur de s’exonérer des fautes nautiques (art. 264. Al. 2).

    32Il en est de même tant dans la convention de Bruxelles que dans la loi française de 1966 où le législateur a expressément voulu cette distinction. Cette volonté a pris corps dans l’article 3 al. 2 de la convention, en vertu duquel

    « le transporteur procédera de façon appropriée et soigneuse au chargement, à la manutention, à l’arrimage, au transport, à la garde, aux soins et au déchargement des marchandises transportées ».

    33Les mêmes dispositions se retrouvent dans l’article 38 du décret du 31 décembre 1966.

    34Si les fautes commerciales, telles qu’elles résultent de ces textes, sont celles commises dans les soins prodigués aux marchandises, les fautes nautiques apparaissent comme celles commises directement à l’occasion de la navigation. Cette distinction présente, certes, l’avantage de la simplicité, mais elle ne répond malheureusement ni à l’esprit général des textes, ni à la réalité des choses.

    35C’est généralement sous ce double aspect, nautique et commercial, que se présentera la faute. Sa qualification juridique dépendra alors d’un critère de distinction. Si bon nombre d’auteurs4 se sont efforcés de définir la faute nautique, les tribunaux n’ont pas formulé de critère unique.

    B. Coexistence d’une faute nautique et d’une faute commerciale

    36Nous savons déjà qu’une faute est qualifiée de nautique lorsque le but prin­cipal de l’acte au cours duquel elle a été causée aux marchandises : par exemple, au cours d’une opération de remplissage des ballasts, l’ingénieur du bord chargé de l’opération commet une faute de manœuvre qui permet à l’eau de s’infiltrer jusqu’aux marchandises.

    37Il se peut cependant que le capitaine puisse éliminer ou limiter les effets néfastes d’une telle faute nautique en ordonnant le pompage de l’eau qui s’est infiltrée par inadvertance dans les cales, en isolant les marchandises avariées pour éviter l’extension du dommage, ou en prenant toute autre mesure appro­priée pour la conservation des marchandises. Si le capitaine omet de prendre les mesures qu’il avait le devoir et le pouvoir de prendre, il commet sans aucun doute une faute dans l’exécution de son obligation de prendre soin des marchandises et de veiller à leur conservation ; il devra donc répondre des conséquences d’une telle faute.

    38Le transporteur ne sera toutefois tenu de répondre que des conséquences de cette faute à l’exclusion de toute autre. Il faut donc nécessairement faire le partage entre les dommages ou pertes qui proviennent de la faute nautique, et celles qui sont causées par le manque de soins. C’est ce que la cour de cassation française a très justement décidé dans un arrêt de censure du 6 juillet 1954 en cassant un arrêt de la cour d’appel de Rennes qui, après avoir déclaré que « les griefs relevés à la charge du capitaine constituaient non pas deux fautes diffé­rentes, mais les deux aspects d’une même faute », nautique pour ce qui est du maniement du navire et commerciale pour ce qui est de la cargaison, a attribué ainsi à la faute le double caractère de faute nautique et de faute commerciale, puis a condamné le transporteur à payer des dommages-intérêts à raison des avaries causés par une faute commerciale.

    39En effet, la cour d’appel de Rennes ne justifiait pas de l’existence d’un lien de causalité entre le dommage et la faute commerciale, c’est-à-dire n’opérait pas le partage entre le dommage résultant de la faute et celui qui provient de la faute commerciale5.

    II. Absence de faute ; condition d’exonération

    40Dans le domaine des responsabilités de plein droit, le législateur met l’accent non plus sur la faute ou sur son absence, mais sur la cause du dommage. Parmi ces causes, il effectue un tri, afin de retenir celles qui exonéreront le transporteur. Elles deviendront par là de véritables cas exceptés, dont il suffira en principe au transporteur de montrer l’existence et le lien de cause à effet avec le dommage pour échapper à toute responsabilité.

    41Dans cette optique, on étudiera l’absence de faute comme condition du cas excepté, ainsi que comme condition de la force majeure.

    A. Absence de faute : condition du cas excepté

    1. L’incendie

    42L’incendie, « feu anormal, destructeur et dangereux, causant des dom­mages d’importance appréciable », est assez largement interprété, ce qui correspond à la volonté du Doyen Rodière qui considérait

    qu’« il faut étendre la solution des choses endommagées par l’incendie à celles qui l’ont été par les effets ou les conséquences de l’incendie, ainsi par la fumée qui s’en est dégagée ou par l’eau jetée pour l’éteindre »6.

    43Fut ainsi admis comme entrant dans le cas excepté d’incendie les dom­mages (maturation) subis par une marchandise qui se trouvait dans une cale dont le système de ventilation a été stoppé du fait de l’incendie7.

    44L’incendie est donc une cause exonératoire de responsabilité pour le trans­porteur, sauf dans le cas où le chargeur démontrerait qu’il a commis une faute.

    45Les professeurs Bonassies et Scapel, dans l’ouvrage de droit maritime le plus récent, considèrent qu’il n’est sans doute pas nécessaire de prouver que le fait non imputable était extérieur, imprévisible et irrésistible « pour les cas exceptés spécifiques visés par la loi de 1966 (incendie, grève, sauvetage) »8.

    46Ainsi, les décisions judiciaires constatant que le dommage est dû à un incendie et que le transporteur n’a pas commis de faute, avec éventuellement le constat de ce que la cause de l’incendie est inconnue, il est vraisemblable que les juges ne ressentent pas la nécessité de justifier plus avant leurs décisions. Si le cas excepté d’incendie est rejeté c’est qu’il est lié à une faute du transporteur (qui, si elle ne l’évince pas, s’accommode mal d’un cas de force majeure), et s’il est reconnu c’est que l’événement est, a minima, très proche de constituer un cas de force majeure.

    2. La faute du chargeur

    47Le (i) du 2nde paragraphe de l’article 4 de la Convention de Bruxelles de 1924 vise « un acte ou omission du chargeur ou propriétaire des marchandises, de son agent ou de son représentant », le (n) vise « les insuffisances d’embal­lage » et le (o) « les insuffisances ou imperfection de marques ». Ces trois cas exceptés distincts sont réunis dans un seul cas qui vise les « fautes du chargeur, no­tamment dans l’emballage, le conditionnement ou le marquage des marchandises ».

    48La faute du chargeur, certainement l’un des cas exceptés les plus sollicités – notamment quant à l’emballage défectueux de la marchandise – correspond au fait du tiers – ici le cocontractant.

    49La jurisprudence n’exige pas que la faute commise par le chargeur (celle du destinataire n’est pas reconnue) présente les caractères de la force majeure9. Cela se comprend aisément : la faute du chargeur ou de ses substituées suffit à dé­gager la responsabilité du transporteur. La faute de son cocontractant l’exo­nère de sa responsabilité sans qu’il soit nécessaire que celle-ci soit irrésistible et imprévisible.

    3. Le fait d’ennemi public

    50Le terme d’ennemis publics « prête à discussion », il paraît toutefois in­discutable que son rejet fondé sur la souveraineté s’exerçant sur les eaux dans lesquelles se déroulèrent les événements est infondé10.

    51De ce fait, la démonstration des caractères irrésistible et imprévisible devrait emporter reconnaissance de ce cas excepté11, sans toutefois que cela soit indispensable.

    52La jurisprudence considère d’ailleurs que le caractère prévisible d’une attaque ou d’un vol s’oppose à la reconnaissance de ce cas excepté12. Cela n’équi­vaut pas nécessairement à ce que la force majeure soit exigée pour que ce cas excepté soit reconnu, cette exigence correspondant, en réalité, à celle d’absence de faute du transporteur.

    53Il semble donc que le fait d’ennemis publics, s’il peut être un cas de force majeure, ne nécessite pas d’être qualifié comme tel pour être reconnu.

    B. Absence de faute : condition de la force majeure

    54L’effet principal et non discuté de la force majeure réside dans l’exoné­ration de responsabilité dont bénéficie le débiteur. N’étant pas responsable de l’inexécution celui-ci n’aura pas à verser de dommages et intérêts au créancier.

    55Il existe toutefois une exception : dans l’hypothèse où le débiteur d’une obligation de livraison est mis en demeure de livrer, il sera redevable de dom­mages et intérêts en cas d’inexécution de son obligation quand bien même celle-ci serait due à un cas de force majeure.

    56Il y a là une sorte de peine privée reposant sur la volonté d’inciter le débiteur à livrer en temps et en heure, mais aussi sur l’idée que la faute du débiteur doit entraîner comme conséquence qu’il supporte les risques liés à la force majeure. Sa faute l’oblige !

    57Certes, la faute initiale du débiteur rend possible la survenance du cas de force majeure. Sans elle, le bien n’aurait pas subi la force majeure, elle peut donc apparaître comme la cause adéquate ou tout au moins une cause ayant participé à la survenance du dommage. Mais la théorie de la causalité adéquate n’est pas totalement respectée en droit civil français : il est impensable que de façon générale l’absence de livraison soit une cause normale, habituelle, de la perte du bien13. L’absence de livraison n’est que l’une des causes du dommage, elle ne devrait donc pas entraîner une exonération totale.

    58Mais plus que la question de l’exonération (solution acquise dont seuls les fondements sont contestés), c’est celle de son caractère partiel qui suscite la controverse14.

    59Nombre d’auteurs estiment que la qualification de force majeure entraîne nécessairement une causalité exclusive, qu’elle ne peut qu’être la cause adéquate du dommage ou de l’inexécution. Les professeurs Flour, Aubert et Savaux consi­dèrent ainsi que « l’existence d’un tel événement exclut toute responsabilité du fait personnel. S’il y a eu force majeure, il n’a pas pu y avoir faute – comme elle exclut d’ailleurs la responsabilité du fait des choses »15.

    60De même le professeur Le Tourneau considère-t-il que « force majeure et responsabilité sont des termes antinomiques et inconciliables »16 parce qu’un résultat ne peut être imputé à faute qu’à celui qui avait le pouvoir de l’empêcher.

    61Est ainsi avancée l’idée selon laquelle le caractère irrésistible de l’événe­ment de force majeure exclut toute autre cause au dommage.

    62Nous pouvons toutefois noter qu’il y a « souvent lieu à ambiguïté faute d’opérer une distinction selon le stade auquel intervient la force majeure »17. Certes les conséquences d’un événement de force majeure, par hypothèse irrésistible, ne peuvent être évitées. Pour autant, celui-ci peut n’être que pour partie cause du préjudice.

    63Le débiteur peut ainsi commettre une faute postérieure à l’événement de force majeure venant aggraver les conséquences de celui-ci, comme l’a admis un arrêt récent de la 2e chambre civile de la Cour de cassation18 : « la faute (posté­rieure) engage la responsabilité de son auteur malgré la force majeure »19. Nous noterons cependant que dans l’espèce considérée, la faute postérieure du débi­teur de l’obligation de déblaiement (constituée par son abstention), joue un effet extinctif quant aux effets de la force majeure, venant ainsi les « éclipser ».

    64Prenons l’exemple d’une tempête venant endommager par mouille une cargaison lors de son transport. Si les 2/3 de la cargaison sont affectés, il reste possible de sauver les marchandises restées saines grâce à la dissociation des deux parties de la marchandise. Cependant, si lors de la réalisation de cette opération, le transporteur commet une faute entraînant la destruction de la marchandise restée saine, sa faute postérieure au cas de force majeure aura contribué au dommage.

    65Le débiteur peut aussi commettre une faute antérieure à la force majeure. Il faudra donc rechercher ce qui serait produit en l’absence de faute.

    66Il paraît donc possible de considérer qu’un cas de force majeure ne soit à l’origine que d’une partie de l’inexécution contractuelle en cas de succession temporelle de causes, à tout le moins lorsque la faute du débiteur est postérieure à la force majeure. Le professeur Starck défendait ainsi que

    « si la faute ou le fait ont simplement aggravé un dommage qui se serait produit de toute façon par suite d’un événement de force majeure, le juge devrait rechercher quelle eût été l’importance du sinistre si le fait ou la faute n’eût pas eu lieu et ne laisser à la charge du défendeur que la partie du dommage qui lui est attribuée, c’est-à-dire l’aggravation »20.

    67De même le Doyen Rodière considérait-il

    qu’« on conçoit le jeu par contre le jeu successif et cumulatif de deux causes dont l’une est une faute du débiteur, l’autre un événement qui ne lui est pas imputable.

    Il semble néanmoins que la doctrine s’accorde sur la caducité de ces solutions, reléguant au rang historique cette causalité partielle de la force majeure, en considérant que désormais l’existence d’un cas de force majeure entraîne en principe la disqualification de la faute »21.

    68Si nous admettons clairement que les caractéristiques propres à la notion de force majeure rendent cette notion exclusive de toute faute du débiteur procédant du même événement, il nous semble qu’une faute débiteur distinct peut, elle aussi, contribuer à déterminer l’événement ou à en déterminer les circonstances.

    69Quelle que soit l’importance de l’exonération, totale ou partielle, celle-ci fait exception à l’obligation, pour le débiteur n’exécutant pas son obligation, d’acquitter des dommages et intérêts. La sanction étant écartée, reste à déterminer le devenir des rapports entre les parties, c’est-à-dire du contrat et des obligations qu’il contient ; en effet :

    « une chose est de déterminer dans quelle mesure l’inexécution de l’obligation d’un des cocontractants par suite d’une force majeure rejaillit sur l’obligation de l’autre contractant, autre chose est de se prononcer sur le sort du contrat »22.

    Notes de bas de page

    1 En ce sens que c’est le transporteur qui décide des modalités selon lesquelles le transport sera effectué. Autrement dit c’est la nature de la marchandise et le moyen de transport utilisé qui vont décidés des conditions de transport.

    2 Trb. Com. Sète, 28 avril 1959, DMF, 1959 p. 685.

    3 H. Cherkaoui, La responsabilité du transporteur maritime et aérien, revue et corrigée 2009, 2e édition, p. 187.

    4 V. Rodière, « Faute nautique et faute commerciale devant la jurisprudence française », DMF 1961 p. 451 s. ; M. Pourcelet op. cit., p. 96 et s. ; Lefage, « Faute commerciale et faute nautique », DMF 1963, p. 104.

    5 Civ. 6 juillet 1954, DMF 1954, 714 cassant l’arrêt de la cour d’appel de Rennes, 10 juillet 1952, DMF 1952, 324 ; sentence arbitrale, 20 juin 1950.

    6 Rodière, Traité, t. II « Affrètement et transports », 1968, n° 627, p. 269.

    7 CA Paris 9 mars 1977.

    8 P. Bonassies et Ch. Scapel, n° 1073, p. 685.

    9 Récemment, et parmi un florilège d’arrêts, Cass. Com 22 janvier 2002, CA Aix 2 décembre 2004, 7 septembre 2001, Kamakura, 29 juin 2000, CA Versailles 5 avril 2001, 30 mars 2000, CA Paris 19 février 2003.

    10 P. Bonassies et Ch. Scapel, n° 1077, p. 687 et DMF 1989, p. 419 note de P. Bonassies à propos de l’arrêt Cass. 14 février 1989, Sunny Arabella. Une étude accessible sur le site de l’OMI (www.imo.org) nous apprend que 86,5 % des attaques de navires entre 1995 et 2000 eurent lieu dans les eaux territoriales ou des ports, démontrant encore un peu plus le caractère aberrant de la solution adoptée par la Cour de cassation. Cf. aussi, sur l’état actuel de la piraterie le site www.arte.tv.fr.

    11 Dans ce sens : P. Bonassies et Ch. Scapel n° 1077, p. 687.

    12 TC Marseille 18 décembre 1998, Tiger Force, CA Paris 7 octobre 1986.

    13 L’article 1302 alinéa 2 du Code civil vient d’ailleurs battre en brèche cette hypothèse en dis­posant que « Lors même que le débiteur est en demeure, et s’il n’est pas chargé des cas fortuits, l’obligation est éteinte dans le cas où la chose fut également périe chez le créancier si elle lui eût été livrée ».

    14 Question qui nous intéresse particulièrement de part la possibilité, lorsque la preuve de l’un des cas exceptés de la Convention de Bruxelles de 1924 ou de la loi française du 16 juin 1966 est rapportée, pour l’ayant-droit marchandise de prouver que le transporteur a commis une faute et, ainsi d’obtenir que l’exonération de responsabilité ne soit que partielle.

    15 In Droit civil. 2. Le fait juridique, Armand Colin, 2005, n° 275, p. 297

    16 In Le Tourneau, n° 1803, p. 483.

    17 In Bénabent n° 562, p. 387, à propos des divers cas de responsabilité délictuelle – l’auteur considérant qu’il faut distinguer la force majeure survenant au stade de l’acte fautif et la force majeure survenant après une faute.

    18 Cass. civ. 2e 5 février 2004.

    19 Note de S. Beaugendre, « Voile sur la force majeure », Dalloz 2004, p. 2520. Cf. aussi la note approbative sur ce point du professeur Jourdain in RTD civ. 2004, p. 740.

    20 B. Starck, « La pluralité des causes de dommage et la responsabilité civile (La vie brève d’une fausse équation : causalité partielle = responsabilité partielle) », JCP 1970, I, 2339.

    21 Fabre-Magnan, n° 270, p. 739.

    22 Propos des professeurs Weill et Terré in Droit civil, les obligations, 4e édition, Dalloz 1986, n° 486, p. 506.

    Auteur

    Driss Saidoune

    Doctorant en Droit, Université Aix-Marseille

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    1 En ce sens que c’est le transporteur qui décide des modalités selon lesquelles le transport sera effectué. Autrement dit c’est la nature de la marchandise et le moyen de transport utilisé qui vont décidés des conditions de transport.

    2 Trb. Com. Sète, 28 avril 1959, DMF, 1959 p. 685.

    3 H. Cherkaoui, La responsabilité du transporteur maritime et aérien, revue et corrigée 2009, 2e édition, p. 187.

    4 V. Rodière, « Faute nautique et faute commerciale devant la jurisprudence française », DMF 1961 p. 451 s. ; M. Pourcelet op. cit., p. 96 et s. ; Lefage, « Faute commerciale et faute nautique », DMF 1963, p. 104.

    5 Civ. 6 juillet 1954, DMF 1954, 714 cassant l’arrêt de la cour d’appel de Rennes, 10 juillet 1952, DMF 1952, 324 ; sentence arbitrale, 20 juin 1950.

    6 Rodière, Traité, t. II « Affrètement et transports », 1968, n° 627, p. 269.

    7 CA Paris 9 mars 1977.

    8 P. Bonassies et Ch. Scapel, n° 1073, p. 685.

    9 Récemment, et parmi un florilège d’arrêts, Cass. Com 22 janvier 2002, CA Aix 2 décembre 2004, 7 septembre 2001, Kamakura, 29 juin 2000, CA Versailles 5 avril 2001, 30 mars 2000, CA Paris 19 février 2003.

    10 P. Bonassies et Ch. Scapel, n° 1077, p. 687 et DMF 1989, p. 419 note de P. Bonassies à propos de l’arrêt Cass. 14 février 1989, Sunny Arabella. Une étude accessible sur le site de l’OMI (www.imo.org) nous apprend que 86,5 % des attaques de navires entre 1995 et 2000 eurent lieu dans les eaux territoriales ou des ports, démontrant encore un peu plus le caractère aberrant de la solution adoptée par la Cour de cassation. Cf. aussi, sur l’état actuel de la piraterie le site www.arte.tv.fr.

    11 Dans ce sens : P. Bonassies et Ch. Scapel n° 1077, p. 687.

    12 TC Marseille 18 décembre 1998, Tiger Force, CA Paris 7 octobre 1986.

    13 L’article 1302 alinéa 2 du Code civil vient d’ailleurs battre en brèche cette hypothèse en dis­posant que « Lors même que le débiteur est en demeure, et s’il n’est pas chargé des cas fortuits, l’obligation est éteinte dans le cas où la chose fut également périe chez le créancier si elle lui eût été livrée ».

    14 Question qui nous intéresse particulièrement de part la possibilité, lorsque la preuve de l’un des cas exceptés de la Convention de Bruxelles de 1924 ou de la loi française du 16 juin 1966 est rapportée, pour l’ayant-droit marchandise de prouver que le transporteur a commis une faute et, ainsi d’obtenir que l’exonération de responsabilité ne soit que partielle.

    15 In Droit civil. 2. Le fait juridique, Armand Colin, 2005, n° 275, p. 297

    16 In Le Tourneau, n° 1803, p. 483.

    17 In Bénabent n° 562, p. 387, à propos des divers cas de responsabilité délictuelle – l’auteur considérant qu’il faut distinguer la force majeure survenant au stade de l’acte fautif et la force majeure survenant après une faute.

    18 Cass. civ. 2e 5 février 2004.

    19 Note de S. Beaugendre, « Voile sur la force majeure », Dalloz 2004, p. 2520. Cf. aussi la note approbative sur ce point du professeur Jourdain in RTD civ. 2004, p. 740.

    20 B. Starck, « La pluralité des causes de dommage et la responsabilité civile (La vie brève d’une fausse équation : causalité partielle = responsabilité partielle) », JCP 1970, I, 2339.

    21 Fabre-Magnan, n° 270, p. 739.

    22 Propos des professeurs Weill et Terré in Droit civil, les obligations, 4e édition, Dalloz 1986, n° 486, p. 506.

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    El Khayat, Mustapha, éditeur. Le droit maritime dans tous ses états. Presses universitaires d’Aix-Marseille, 2016, https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.puam.4020.
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