Chapitre II. L’expression de cette dualité dans le cadre des droits communautaires dérivés
p. 95-204
Texte intégral
1L’expression « droit dérivé » recouvre l’ensemble des actes adoptés par les institutions en vue de réaliser les objectifs des traités. L’adjectif dérivé est utilisé pour indiquer la forme de ces actes, et leur subordination aux traités. Les traités uemoa et ohada ont crée les institutions auxquelles ils ont assigné des objectifs et les ont dotées de pouvoirs en vue de la réalisation des ces objectifs. La mise en œuvre de ceux-ci intervient à travers le droit dérivé, c’est-à-dire au moyen d’actes qui sont pris par les institutions sur la base des dispositions des traités. L’analyse du droit communautaire dérivé permettra d’étudier les manifestations de cette dualité dans le cadre du droit communautaire dérivé de l’uemoa (section 1) et de celui de l’ohada (section II).
SECTION 1. LE DROIT COMMUNAUTAIRE DÉRIVÉ DE L’UEMOA
2« Le droit dérivé est constitué par l’ensemble des actes pris par les organes de l’UEMOA dans la mise en œuvre du traité conformément aux dispositions du droit primaire244 ». Ce sont des actes unilatéraux pris par les organes communautaires. L’architecture juridique et institutionnelle de l’UEMOA repose sur le pilier de l’UMOA, qu’elle complète : l’ordre juridique de l’UMOA est considéré comme un acquis de l’UEMOA. L’article 42 du Traité UEMOA énumère les actes constitutifs du droit dérivé et les articles 43 et suivants déterminent leur régime juridique. Ainsi pour mieux rendre compte de ce droit dérivé, nous traiterons du droit dérivé unilatéral (§ 1) et les autres sources conventionnelles et jurisprudentielles (§ 2).
§ 1. Le droit dérivé unilatéral
3A l’instar des communautés européennes qui ont défini et énuméré ces actes juridiques245, l’uemoa les a également consacrés. Il en va de même pour certaines communautés africaines246. L’examen de ces actes nous a permis de constater qu’il existe un régime juridique commun à tous ces actes et que chacun de ces actes présente également des spécificités.
4Ainsi nous traiterons d’abord de la communauté (A) puis des spécificités de leur régime juridique (B).
A. La communauté de régime juridique des actes obligatoires
5Il s’agit d’un régime commun aux actes additionnels, aux règlements, aux directives, qui fonde leur validité. En ce qui concerne la compétence d’édiction du droit dérivé quatre principes doivent être respectés.
6Le principe de la compétence d’attribution247, qui signifie que les organes doivent agir dans la limite des compétences attribuées par le traité. Il domine l’ensemble du système institutionnel et normatif de l’Union.
7Ainsi la compétence nécessaire pour étudier les actes doit être prévue par les traités de façon expresse, ce qui permettra de classer la base juridique de chaque acte. Le choix de la base juridique n’est pas toujours évident, comme l’a souligné le professeur Jacqué, car la base juridique commande le type de procédure décisionnelle à mettre en œuvre, son choix « commande l’équilibre entre les institutions dans l’exercice des compétences concernées » et qu’une institution peut être tentée de retenir la base juridique qui lui donne le plus de poids dans le processus décisionnel. Dans le « jargon »communautaire, le terme de base juridique désigne la disposition du traité sur laquelle se fonde la compétence de la communauté pour adopter une certaine mesure. En effet, l’Union ne dispose que des compétences d’attribution, elle ne saurait agir que si le traité contient un titre de compétence.
8La disposition relative à la compétence contient une règle de procédure. Le choix de la base juridique détermine donc la procédure à suivre pour adopter l’acte. Dans ces conditions, on ne saurait s’étonner des enjeux institutionnels qui mettent en jeux le choix d’une base juridique, même s’il est exclu que celle-ci soit déterminée en fonction de considération institutionnelle. La réponse à donner à la question de la base juridique n’est pas toujours évidente, car au niveau des communautés européennes un même texte peut, selon l’angle sous lequel il est abordé, relever d’articles différents du traité. Ainsi la Cour de justice considère donc que « le choix de la base juridique ne peut pas dépendre seulement de la conviction d’une institution quant au but poursuivi, mais se fonder sur les éléments objectifs susceptibles de contrôle juridictionnel »248. Dans le cadre de l’uemoa, une attention particulière doit être portée sur le choix de la base juridique. Car la Cour de justice de l’Union européenne a précisé que « la législation communautaire doit être claire et son application prévisible pour tous ceux qui sont concernés »et que « cet impératif de sécurité juridique requiert que tout acte visant à créer les effets juridiques emprunte sa force obligatoire à une disposition du droit communautaire qui doit être expressément indiquée comme base légale »249.
9Le principe de compétence doit également être complété par celui de la « légalité communautaire ». Ce principe signifie que la soumission au droit des actes des organes est sanctionnée par l’organisation d’un contrôle juridictionnel de légalité.250 Les organes doivent non seulement respecter les dispositions du traité de base, mais également l’ensemble des actes pris pour son application. Le droit dérivé doit respecter le bloc de la légalité communautaire, traité de base et engagements internationaux pris sur la base du traité constitutif.
10Quant au principe de la non intervention des instruments normatifs, il pose la problématique selon laquelle, lorsque le traité ne précise pas la catégorie d’acte pris par les organes ; si cet organe peut choisir librement l’instrument qui lui semble le plus opérant ?
11Le principe de la hiérarchisation du droit dérivé signifie que le processus de l’édiction du droit communautaire dérivé est susceptible d’un aménagement en deux phases hiérarchisées, conduisant à la distinction entre les mesures qui trouvent directement leur base dans le traité et celles qui sont destinées à assurer l’exécution des peines. Ainsi, de même que les systèmes normatifs nationaux distinguent habituellement entre les lois et les décrets d’application, le système communautaire oppose les règlements de base, c’est-à-dire ceux qui sont arrêtés directement en application des traités, aux règlements d’exécution. Quant à la forme des actes, il est nécessaire qu’il porte des visas de l’organe institutionnel qui les a émis. Sur le plan formel, les actes doivent répondre à deux exigences essentielles : indication de la base juridique et les étapes de la procédure suivie.
12Les visas de l’acte doivent, tout d’abord, mentionner la base juridique c’est-à-dire là où les dispositions du traité sur lesquelles l’acte se fonde. Cette obligation de visa de la base juridique résulte du fait que l’Union ne dispose que de compétences d’attribution. Il est donc indispensable d’indiquer la disposition du traité sur laquelle se fonde la compétence communautaire. La mention de la base juridique permet également de vérifier si la procédure suivie par l’adoption de l’acte est bien la procédure correcte. Enfin, ce visa permet également de déterminer si la nature de l’acte correspond bien à celle prévue par le traité, lequel ne laisse pas, dans certains cas, les institutions choisir librement le type d’acte qui convient. L’indication de la base juridique est donc essentielle pour permettre le contrôle de la légalité communautaire, ainsi le simple renvoi au traité sans plus de précisions n’est pas suffisant. Un acte juridique de droit dérivé doit, également, pour être valable, être motivé, c’est ainsi que le traité uemoa, a expressément prévu les motivations de certains actes de droit dérivé251. Il s’agit des règlements, des directives et des décisions du Conseil et de la Commission. Il faut noter l’absence de motivation pour les actes additionnels, les recommandations et avis.
13La motivation est donc un élément de validité de tout acte communautaire. Son objet est de faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution auteur de l’acte252. Cette motivation poursuit une double finalité. Elle remplit tout d’abord une fonction de transparence au profit des particuliers qui pourront ainsi vérifier si l’acte est ou non fondé. Il permet également aux juridictions d’exercer leur contrôle juridictionnel. L’obligation de motiver a donné lieu à un important contentieux au niveau des communautés européennes.
14Dans ces pays, une importante jurisprudence a été développée. L’exigence de motivation est particulièrement importante dans le cadre du contrôle du respect des principes de subsidiarité ou de proportionnalité, puisqu’elle permet de reconstituer le raisonnement effectué par l’auteur de l’acte pour l’adoption de celui-ci. La portée de l’obligation de motiver dépend de la nature de l’acte et du contexte juridique dans lequel il intervient. L’exigence de motivation est atténuée lorsque l’acte intervient dans un contexte juridique connu, à moins qu’il n’introduise dans ce contexte un élément nouveau. De même, lorsqu’un particulier a participé à la procédure qui conduit à l’adoption de l’acte, il n’est pas nécessaire que la motivation comporte une prise de position sur tous les éléments évoqués au cours de cette procédure, mais il suffit qu’elle expose les faits et considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision253. Par contre, la motivation doit être particulièrement développée dans le cas où l’acte comporte une dérogation à la réglementation en vigueur ou qu’elle entraîne des conséquences graves pour son destinataire. Il en va de même lorsqu’une institution dispose d’un large pouvoir d’appréciation. La motivation devra permettre au juge d’exercer un contrôle sur les éléments de faits et de droit qui ont servi de base à l’exercice de ce pouvoir d’appréciation254. Si la motivation d’un acte peut être développée et précisée devant le juge à l’occasion d’un recours, ces explications ne sauraient se substituer à une absence de motivation255. Ces développements tirés de la jurisprudence et de la doctrine de l’intégration européenne inspireront certainement les juges de la Cour de justice de l’uemoa, dans le contentieux relatif à la motivation.
15Ce contentieux est très nombreux, ce qui explique l’importance de la motivation dans le processus de prise de décision. Un acte motivé pour être valable doit être publié, aux termes de l’article 45 du traité de l’uemoa, « les Actes additionnels, les règlements, les directives et les décisions sont publiés au journal officiel de l’Union. Ils entrent en vigueur après leur publication à la date qu’ils fixent. Les décisions sont notifiées à leurs destinataires et prennent effet à compter de leur date de ratification ». La date à prendre en considération est celle de la parution effective au bulletin256 dont un retard dans la publication n’altère nullement la validité des actes.257 La publication de l’acte est une condition indispensable pour que celle-ci puisse produire des effets. Dans ces conditions, l’absence de publicité n’entraîne pas la nullité de l’acte, mais l’empêche de déployer ses effets ; elle est prévue pour les actes additionnels, les règlements, les directives et décisions du Conseil des Ministres. Comme les normes instituées dans le droit interne des États, le droit communautaire doit être publié afin de permettre au citoyen d’en prendre connaissance. La publication s’effectue dans le Journal officiel de l’Union.
16Quant à l’entrée en vigueur, le principe est celui de l’entrée en vigueur immédiate. Cependant, les actes soumis à publication peuvent fixer la date à laquelle ils produiront les effets qu’ils fixent. Le législateur dispose ainsi d’une marge d’appréciation et peut retarder la date à laquelle l’acte prend effet afin de préserver la confiance légitime des opérateurs économiques. Il leur laissera un délai suffisant pour s’adapter à la situation nouvelle et éviter ainsi les incidences dommageables de l’acte sur les opérations en cours. C’est pour cette raison notamment que certains actes distinguent entre la date d’entrée en vigueur et la date d’application à partir de laquelle ils produiront tous leurs effets.
17En application du principe de l’effet immédiat, toutes les situations existantes sont régies par l’acte dès leur entrée en vigueur et les particuliers n’ont aucun droit acquis au maintien d’une législation existante. Cependant, ce principe doit se concilier avec celui de la confiance légitime et s’il apparaît qu’il n’était pas possible pour un opérateur économique faisant preuve d’une vigilance normale de prévoir l’intervention d’une nouvelle législation modifiant la situation existante, il conviendra de prévoir une période d’adoption transitoire ou entrée en vigueur différée. La confiance légitime ne joue pas si les opérateurs ont été informés de l’éventualité d’une réglementation ou s’ils pouvaient prévoir cette modification compte tenu de la nature de la réglementation. S’agissant des décisions, l’alinéa 2 de l’article 45 prévoit leur notification aux destinataires et qu’elles prennent effet à compter de cette date.
18En ce qui concerne la rétroactivité, on peut noter le silence du traité uemoa sur la question, mais malgré ce silence cette question ne peut être occultée. La question de la rétroactivité se pose tout d’abord de manière classique à propos de la possibilité d’une entrée en vigueur rétroactive d’un acte. En principe la rétroactivité des actes communautaires n’est pas possible en raison des exigences de la sécurité juridique. Néanmoins cette règle connaît des exceptions dès lors que le but à atteindre l’exige et la confiance légitime des intéressés est respectée. Ce principe a été dégagé dans un arrêt dans la jurisprudence européenne258. Qu’en serait-il si ce cas se posait dans le cadre de l’uemoa ?.
19En droit communautaire européen plusieurs situations peuvent rendre l’acte rétroactif ; celles ci constituent des exceptions. Ce sont les cas dans lesquels, il est possible de démontrer que l’application rétroactive des règles de fond était recherchée.
20En cas d’annulation d’une directive et l’adoption rapide d’une nouvelle directive pour remplacer celle qui a été annulée par le juge, dans ce cas, il est possible d’attribuer un effet rétroactif à la nouvelle directive pour éviter un vide juridique et offrir une base légale aux mesures nationales de transposition à condition cependant que la directive ne porte pas sur la matière pénale259.
21S’agissant de la modification ou du retrait des actes, le droit communautaire de l’uemoa, n’a pas prévu la question, mais il faut noter que le droit communautaire n’a pas reconnu un droit au maintien d’une législation existante. Les institutions de l’Union légifèrent en principe librement à condition toutefois de ne pas modifier le droit positif de manière totalement imprévisible. Une telle modification violerait le principe de sécurité juridique260. Comme il n’y a pas droit au maintien de la réglementation existante, l’autorité communautaire peut toujours procéder au retrait d’un acte légal, à condition que ce retrait intervienne dans un délai raisonnable261. Selon l’article 46, du traité uemoa, s’agissant des décisions du Conseil et de la Commission qui comportent, à la charge des personnes autres que l’État une obligation pécuniaire formelle, un titre exécutoire, un régime spécial est prévu pour cette situation. Il faut également noter que cette communauté de régime juridique dont il a été question, n’affecte pas les recommandations et les avis.
22Après avoir traité de la communauté de régime, voyons à présent la spécificité de régime de chaque acte juridique.
B. La spécificité de régime des actes obligatoires
23Il s’agit des actes additionnels, des règlements, des directives, des décisions, des recommandations et des avis et ceux du droit substantiel de l’uemoa.
1. Les Actes additionnels
24Les actes additionnels sont prévus par l’article 19 du traité. Leur première spécificité est qu’ils sont au sommet de la hiérarchie du bloc de la légalité de l’ordre juridique communautaire de droit dérivé dans le cadre du traité de l’uemoa. Ils tirent cette importance du fait qu’ils ont le pouvoir juridique de compléter le traité constitutif dont ils font partie intégrante sans pouvoir le modifier. Les Actes additionnels sont annexés au traité, contrairement aux autres actes, et leur respect s’impose aux organes de l’Union, ainsi qu’aux autorités des États membres. Il revient ainsi à la Conférence des Chefs d’État et en fonction de l’opportunité de prendre des Actes additionnels et, ce conformément aux dispositions de l’article 19. Il importe de souligner que les Actes additionnels peuvent être prévus par le traité de base chaque fois qu’une étape importante devra être franchie dans la voie de l’intégration.262 Par exemple, un acte est nécessaire pour la modification du nombre des membres de la Commission, ce qui correspond à une étape importante dans la vie de l’intégration dans l’Union.263
25De même, un Acte additionnel pourrait être pris pour la création d’organes consultatifs nouveaux pour la gestion financière de la période transitoire ou la prise des principes directeurs pour le choix permettant l’harmonisation légitime. Il faut préciser que dans la pratique une confusion risque de s’installer entre les Actes additionnels et les protocoles. Il y a une différence entre ces deux actes. Une autre spécificité des Actes additionnels est que l’obligation de motivation est prévue et exigée par l’article 44 du traité uemoa pour les règlements, les directives, les décisions du conseil alors qu’elle ne l’est pas pour les protocoles. On peut s’interroger sur ce silence. Il est quand permis d’affirmer même si d’une manière expresse cette obligation n’est pas précisée, de façon tacite cela doit l’être, car la motivation étant une condition de validité d’un acte, nous pensons que les Actes additionnels doivent être motivés. De toutes les façons la jurisprudence future de la Cour de justice de l’uemoa nous édifiera sur la question.
26L’article 43 a prévu le régime spécifique de certains actes de droit dérivé. Les Actes additionnels n’ont pas été prévus dans cette énumération, mais nous pensons que certains caractères tels que la portée générale d’un règlement sont aussi valables pour les Actes additionnels. Pour la mise en œuvre des actions communautaires plusieurs Actes additionnels ont été pris par la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement264.
27Après l’examen du régime des Actes additionnels, voyons à présent celui du règlement.
2. Le régime spécifique du règlement
28« Le règlement est un acte de portée générale et obligatoire dans tous ces éléments. Il vise des catégories de personnes définies de manière générale et abstraite. Il est en outre directement applicable, ce qui signifie que chaque particulier peut s’en prévaloir directement, sans qu’il faille de réception, de transformation ou même de mesure d’exécution interne ».265 Selon Guy Isaac « il est de loin la principale source du droit dérivé, c’est à travers lui que s’exprime par excellence, le pouvoir législatif des communautés » L’uemoa a consacré cet acte dans l’article 43. Ces actes sont édictés, soit par le Conseil, soit par la Commission quand il s’agit de l’application des actes du Conseil.
29La particularité des règlements se trouve dans leur diversité. Il existe plusieurs sortes de règlements qui se distinguent d’une part suivant leur auteur, d’autre part suivant leur contenu. Dans ce dernier cas, les règlements se répartissent en règlement de base et en règlement d’exécution. La caractéristique fondamentale du règlement est son caractère de portée générale ce qui fait qu’il s’applique de manière abstraite à toutes les personnes qui entrent dans son champ d’application. Il vise donc des destinataires appartenant à des catégories « envisagées abstraitement ou dans leur ensemble ».266 Comme la loi, il contient des prescriptions générales impersonnelles, c’est-à-dire statue abstraitement, c’est la condition de la fonction normative qu’il est appelé à jouer dans le système du traité.
30Dans la systématisation de la notion de portée générale, la Cour de justice des communautés européennes (cjce) a développé une abondante jurisprudence en la matière et qui constituera une source d’inspiration à la Cour de justice de l’uemoa. Ainsi selon la Cour de justice des communautés européennes, un acte est de portée générale lorsqu’il « établit des principes normatifs, pose de façon abstraite, des conditions de son application et formule les conséquences juridiques qui en découlent »267, en d’autres termes, « un acte quasi législatif » ayant un effet erga omnes268.
31Ne fait pas perdre à un acte son caractère réglementaire le fait qu’il puisse avoir des effets concrets différents pour divers sujets auxquels il s’applique dès lors que cette situation est objectivement déterminée,269 car, « il est de la nature d’une disposition générale que son application uniforme peut atteindre les intéressés de façon variable selon les particularités de leur situation ou de leur activité »270. Le caractère général d’un acte n’est pas davantage affecté par la possibilité de déterminer le nombre ou même l’identité des sujets de droit auxquels il s’applique à un moment donné271. Les dispositions qui abrogent, modifient ou limitent dans le temps un acte de portée générale, participent du caractère général de celui-ci272. L’exigence du caractère général du règlement est fondamentale dans le cadre du contentieux de la légalité. En effet, les recours en annulation formé par les particuliers à l’encontre d’un règlement seront irrecevables à moins qu’il puisse être établi que le règlement est en fait une décision qui concerne actuellement et directement le requérant. Compte tenu de sa portée générale, le règlement communautaire présente une similitude avec des lois nationales, qui ont légalement pour caractéristique de s’appliquer à des catégories de justiciables envisagées abstraitement dans leur ensemble. Il n’est cependant pas possible de considérer que le règlement constitue la loi communautaire dans la mesure où il lui manque le caractère essentiel d’une loi, puisqu’il n’est pas formellement adopté par les Parlements. Son caractère de portée générale fait que le règlement s’applique simultanément dans l’ensemble du territoire communautaire.
32Le caractère de portée générale du règlement est complété par son caractère obligatoire dans tous ses éléments. Le règlement fixe les résultats à atteindre et prévoit parallèlement les moyens qu’il convient impérativement d’utiliser pour réaliser l’objectif fixé. Le règlement est obligatoire dans tous ses éléments, c’est-à-dire qu’il s’impose dans son intégralité aux institutions de l’Union, à tous les États membres et aux particuliers. Il s’applique à toutes les situations qui entrent dans son champ d’application et les États membres ne peuvent l’appliquer de manière sélective. Les difficultés d’application ne peuvent pas permettre à un État membre de se dispenser de l’exécuter.273 Les États membres doivent s’abstenir de tout acte susceptible de remettre en cause l’autorité du règlement, lequel doit pouvoir déployer tous ses effets aussi longtemps que son illégalité n’a pas été établie par le juge274. Un État membre ne peut pas non plus faire obstacle à l’exécution d’un règlement en se fondant sur le fait qu’il aurait exprimé des réserves lors des travaux préparatoires du règlement. Ce caractère obligatoire dans tous ses éléments rapproche le règlement de la décision et le différencie de la directive qui ne lie que quant au résultat à atteindre. Ce qu’on peut constater, c’est que dans le territoire de l’uemoa, le contentieux en matière d’application du caractère obligatoire reste faible sinon inexistant, ce qui fera que l’illustration ne pourra se faire qu’à travers la jurisprudence européenne qui influencera certainement la Cour de justice de l’uemoa, les États membres et leurs ressortissants.
33Le troisième caractère spécifique du règlement est son application directe. Le règlement est directement applicable dans tous les États membres. Il ne doit donc faire l’objet d’aucune mesure de transposition et s’impose dès son entrée en vigueur dans les ordres juridiques nationaux. A ce titre, il s’oppose à la directive et à la décision qui ne déploient en principe leurs effets dans l’ordre interne des États que lorsque les mesures d’exécution nécessaires au plan national ont été prises, autrement dit, lorsque les États membres ont obéi à leur prescription en les traduisant dans les textes nationaux. L’applicabilité directe du règlement a une double signification275 : elle signifie qu’il est non seulement inutile, mais encore interdit de transformer le règlement en norme juridique nationale, l’intervention de l’État ne se justifie pas.
34L’applicabilité directe du droit international est une question bien connue de celui-ci. Elle revêt en réalité deux aspects qui sont assez souvent confondus. Le premier est d’ordre formel, il concerne l’introduction de ce droit dans l’ordre interne et la place qu’il y occupera, ce qui conditionne son inviolabilité. Le second d’ordre national s’attache à la question de savoir si le droit international est susceptible de créer, au bénéficie ou à la charge des particuliers, des droits et des obligations dont ces particuliers peuvent se prévaloir directement sans que soient nécessaires des dispositions nationales d’application. En général, ces deux principes sont réglés par le droit interne des États ou le droit international lui même. L’originalité des traités communautaires est d’inverser les règles et l’exception des actes que l’applicabilité directe du droit communautaire devient le principe, à moins que la nature ou le contenu de telles dispositions ne le permettent pas.
35Cette problématique de l’effet direct du règlement a une source lointaine. Dès 1963, dans l’arrêt Van Gend en Loos276, la Cour de justice a estimé que certaines dispositions du traité communautaire ne pourraient pas donner des effets directs devant les juridictions nationales. L’admission de l’effet direct du règlement dans l’article 43 du traité uemoa n’est véritablement pas une innovation par rapport au droit international. La véritable rupture réside dans la méthode. La Cour de justice a estimé dans cette affaire, qu’il revenait, dans le cadre des questions préjudicielles en interpellation, de se prononcer sur l’effet direct du droit communautaire selon des critères fixés par elle-même. Si la généralisation de l’effet direct a été admise à d’autres normes du droit communautaire, c’est au niveau des règlements que son application a posé le moins de difficultés, puisque selon l’article 243 (ex article 189) du Traité alinéa 2, il est « directement applicable » et ce, en dépit même des incertitudes qui peuvent exister quant à la signification exacte de cette formule. Ce principe a été repris textuellement par l’article 43 du traité uemoa, qui certainement s’est inspiré du droit communautaire européen.
36Cet élément formel conduit, selon Monsieur Kovar, « a son effet direct au sens, défini par la Cour de Justice dans son arrêt Van Gend en Loos du 5 février 1963 »277. Dans la mesure où les intérêts de l’arrêt Van Gend en Loos sont des critères matériels touchant au contenu de la norme, cette équation pouvait néanmoins n’être pas vérifiée. Il convient d’abord de souligner que certains règlements peuvent contenir des dispositions purement procédurales qui n’ont pas pour objet de créer des droits et obligations pour les individus. De telles dispositions ne devraient normalement pas être adoptées par voie réglementaire, et un tel règlement constituerait un acte de nature composite278. J.C. Louis a ainsi observé que « l’instauration d’un mécanisme financier qui s’est faite par un règlement aurait dû normalement être prévu par un acte sui generis ». Il estime alors que « le lien entre États membres et la communauté est exclusif, sans que des effets de droit soient créés au-delà du cercle des relations ». La trop grande généralité des dispositions du règlement peut malgré tout empêcher que celui-ci puisse permettre au juge national de trancher le litige qui lui est soumis. Il faut en déduire que cette imprécision ne saurait pour autant entraîner l’irrecevabilité de l’action, et que le juge devra examiner la question du fond.
37L’effet direct, il convient encore une fois de le rappeler, est une question de recevabilité de la demande. Il permet, en effet, au juge de décider de prôner que la norme invoquée par le requérant est apte à résoudre un litige. Il faut noter que la jurisprudence de la Cour de Justice européenne a été abondante en matière d’applicabilité directe des règlements, ce qui inspira au niveau du droit communautaire de l’uemoa les sujets de ce droit en matière d’applicabilité directe des règlements. L’applicabilité du règlement signifie qu’il est source directe de droit, qu’il crée directement des droits ou obligations au profit des particuliers. Parce qu’il est d’applicabilité directe, le règlement pourra être invoqué directement par un particulier à l’appui d’un recours devant le juge national279. Le particulier pourra invoquer les dispositions du règlement non seulement dans un litige qui l’opposera à un État membre (effet direct vertical), mais également dans un litige qui l’opposera à un autre particulier, (effet direct horizontal) et le juge national aura l’obligation d’assurer la protection des droits que le particulier tire du règlement communautaire280.
38La jurisprudence de la Cour de justice sur l’effet direct des règlements révèle finalement que l’effet direct est, en réalité, une question de répartition des compétences entre les États membres. Si le règlement a par nature un effet direct, c’est « parce qu’au regard de la répartition des compétences, il est l’instrument qui matérialise les situations de compétences transférées, manifestant la substitution radicale de la réglementation communautaire à la réglementation nationale »281.
39La doctrine de l’effet direct pose également le problème de sa mise en œuvre à savoir l’exécution normative des règlements. L’effet direct du règlement désigne l’aptitude de cet acte à déployer par lui-même ses effets dans les ordres juridiques nationaux, c’est-à-dire sans aucune interposition des autorités portant réception ou même reproduction des règles communautaires dans le droit national. Le règlement se présente ainsi comme l’instrument normatif le plus efficace mis à la disposition des institutions particulièrement adaptées à la mise en œuvre des politiques communes, par la création d’un corps de règles communes applicables de façon uniforme dans l’ensemble de l’Union. Il reste que l’applicabilité directe des règlements ne saurait préjuger de la question de leur caractère normatif complet. S’il est en principe loisible aux institutions d’arrêter elles-mêmes toute modalité jugée nécessaire par l’application de ces actes communautaires, cette hypothèse est loin d’être la situation dominante dans la pratique. Bien au contraire, les règlements communautaires appellent, en règle générale, des mesures étatiques visant à préciser les modalités procédurales de leur mise en œuvre et des sanctions infligées en cas d‘inobservation de leurs dispositions. Dans le contexte européen, une évolution de cette pratique législative communautaire a été illustrée notamment par la mise en œuvre des règlements portant établissement des organisations communes de marchés dans le domaine agricole. La Cour de justice a été amenée à reconnaître, non sans hésitation, la possibilité d’une action des États membres en vue de la mise en œuvre des règlements communautaires282, ainsi qu’à éliminer la technique des habilitations accordées aux autorités dans le même but283.
40L’adaptation des ordres juridiques nationaux aux exigences découlant des règlements communautaires constitue une opération complexe qui suppose le recours des États membres à une série de mesures de caractère général remplissant de multiples fonctions. Dans le contexte du droit communautaire de l’uemoa, un certain nombre de problèmes ne manqueront pas de se poser lorsque les citoyens de ces États commenceront à invoquer devant la Cour les actions contre les règlements. Pour la mise en œuvre des actes, plusieurs règlements ont été pris dans le cadre de l’uemoa284. Les différents règlements applicables dans le territoire de l’Union ne manqueront pas de générer un contentieux que la Cour de justice de l’Union Economique et Monétaire examinera. Il est évident qu’elle s’inspirera sans doute des dispositions prises par la Cour de justice européenne. S’agissant toujours du régime spécifique de certaines normes du droit dérivé, nous allons examiner à présent celui de la directive.
3. Le régime spécifique de la directive
41Une directive est un acte de portée obligatoire et abstraite qui lie tous les États, quant au but à atteindre285, mais qui allie à cette rigueur une certaine souplesse leur permettant de choisir, en fonction des impératifs de leur ordre juridique national, le moyen le plus adapté pour y parvenir. En principe, les directives ne sont pas directement applicables. Toutefois, on peut imaginer que la Cour de justice soit amenée à admettre, comme son homologue européen, qu’un particulier puisse dans certaines conditions se prévaloir directement d’un tel acte. A la différence du règlement, la directive n’est pas de portée générale. Elle n’oblige que les destinataires qu’elle désigne. La directive fixe les objectifs à atteindre en laissant aux destinataires le choix de la forme et des moyens d’y parvenir. Les États ont l’obligation de la transposer, mais le choix de la norme interne leur incombe. Pour aboutir au résultat qui leur est prescrit, les États peuvent donc, selon les règles de leur droit interne, procéder par voie législative286, réglementaire287 ou par des instructions administratives. L’alinéa 2 de l’article 43 dispose que : « les directives lient tous les États quant aux résultats à atteindre ».
42La directive, tout comme le règlement, est obligatoire. Elle est adressée aux États membres, qu’il s’agisse de tous les États ou de certains d’entre eux. Mais elle doit être considérée comme une loi cadre. Il appartient aux États destinataires d’adopter les mesures adéquates pour atteindre l’objectif qu’elle fixe, c’est là une expression de la subsidiarité. Certes, l’aptitude laissée aux États membres est plus ou moins grande selon le degré de précision de la directive. On a noté une tendance à la rédaction de directives de plus en plus précises ce qui, par conséquent, restreint la marge d’autonomie de leurs destinataires.
43A la lecture de l’article 43, la directive impose des obligations, mais elle ne précise pas comment atteindre les objectifs. Le silence du texte, quant aux moyens et aux formes, fait présumer que le destinataire conserve ce choix. La compétence laissée aux instances nationales quant à la forme et aux moyens ne saurait être une compétence discrétionnaire. La directive est l’instrument privilégié de la réalisation d’un marché commun. Elle, a en effet, pour vocation d’intervenir dans les domaines où il existe des contradictions et des différences substantielles entre les législations nationales ; elle vise alors, à inciter les États membres d’une part, au rapprochement de leur législation, et d’autre part, à la transcription au niveau national, des principes fondamentaux des règles à rapprocher.
44En réalité, la directive cherche à concilier le souci de garantir l’indispensable unité du droit communautaire et la volonté de préserver la diversité des particularités nationales alors que le règlement suppose une homogénéité initiale des situations juridiques et économiques nationales. Selon l’article 249 alinéa 3 CE l’ex 189 alinéa 3, « la directive lie tout État membre destinataire quant aux résultats à atteindre tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et les moyens ». L’alinéa 2 de l’article 43 est silencieux quant moyens nationaux à adopter. Il ressort clairement des dispositions européennes d’une part, que la directive n’a pas de portée générale, elle ne lie en effet que ses destinataires c’est-à-dire les États membres, d’autre part, qu’elle constitue selon la formule évocatrice du juge Pescatoré « une méthode législative à deux étapes : au niveau communautaire sont arrêtés les lignes politiques et le modèle législatif ; ensuite il appartient aux États membres de traduire ce modèle dans leurs catégories nationales »288.
45Autrement dit, le résultat que la directive cherche à atteindre est fixé au niveau communautaire de manière contraignante pour que le ou les destinataires désignés, c’est-à-dire pour un ou plusieurs ou tous les États membres ; ensuite les autorités nationales ont l’obligation de mettre en œuvre le résultat à atteindre dans certains délais en adoptant les mesures internes. Les dispositions de l’article 189 alinéa 3 font donc de la directive, d’une part, un acte communautaire d’une « intensité normative limitée » la formule est du professeur R. Kovar, nous préférons parler d’un acte « hyper normatif d’autre part, d’un acte devant faire l’objet d’une transposition en droit interne ». La directive ne fait que définir des objectifs qui s’adressent aux États membres, lesquels restent libres en principe de déterminer les modalités de mise en œuvre de ces objectifs, dans leur droit interne. Les États membres conservent donc une certaine marge d’appréciation pour réaliser les objectifs définis au niveau communautaire. Cette marge d’appréciation n’a pas cependant pour effet de priver la directive de son caractère normatif289. Par comparaison avec le règlement, la directive est certes une mesure plus souple et d’une intensité « normative » plus circonscrite, puisqu’elle laisse aux États le choix de la forme et des moyens pour la réalisation des objectifs communautaires ; mais sa nature normative n’est pas moins incontestable. En pratique, l’intensité normative des directives s’est progressivement renforcée, parce que les institutions communautaires ont eu tendance à définir le résultat à atteindre de manière si précise qu’il ne restait plus aux États la moindre marge de manœuvre pour le choix des moyens.
46Lorsque les institutions communautaires ont défini le résultat à atteindre avec une grande précision, il ne reste souvent aux États membres qu’à « recopier »le contenu de la directive dans un acte interne. Comme l’a relevé la doctrine, il n’est pas toujours aisé d’opérer une distinction claire entre le résultat à atteindre et les moyens à mettre en œuvre pour l’atteindre. Le professeur J.V. Louis a souligné que « c’est la disposition habilitante qui détermine l’étendue de la précision qu’une directive peut atteindre. Il n’y a pas de règles préétablies qui permettent de déduire à partir de l’interprétation de l’article 189 alinéa 3 le degré de précision qui serait inadmissible pour une directive290 ». Cette affirmation du professeur J. V. Louis peut être retenue par la directive de l’uemoa, à la lecture de l’article 43 alinéa 2. L’une des particularités de la directive est qu’elle doit faire l’objet d’une transposition en droit interne. Les directives doivent faire l’objet de mesures nationales de transposition, ces mesures ne visent pas à « introduire » les directives dans l’ordre juridique interne, au sens de la théorie dualiste291. Transposer une directive consiste uniquement à mettre en œuvre cette directive au moyen de mesures internes, un peu de la même façon qu’une loi cadre nationale est mise en œuvre au moyen d’un décret d’application.
47Dans tous les cas, le droit interne doit être en conformité avec les prescriptions de la directive à l’issue du délai de transposition292. En outre, bien qu’il semblait acquis que les États membres sont « libres en la matière » tant que l’échéance n’était pas atteinte293, la Cour de justice a précisé dans l’arrêt Inter environnement c/Wallonie de 1997, qu’avant l’expiration du délai de transposition, certaines obligations pesaient sur les États. Pour elle, les États membres doivent, en effet, s’abstenir pendant le délai de transposition, « de prendre des dispositions de nature à compromettre sérieusement le résultat prescrit » par la directive, et « il appartient à la juridiction nationale d’apprécier si tel est le cas des dispositions nationales dont elle est chargée d’examiner la légalité ». Quant au critère d’appréciation de la validité de la transposition, si les autorités nationales sont, en principe, libres de déterminer, la forme et les moyens de la transposition, c’est en fonction de critères communautaires que l’on doit apprécier la validité des mesures nationales de transposition. Il ressort de la jurisprudence de la Cour de Justice que la transposition doit créer une situation juridique permettant de déterminer de manière suffisamment claire et précise, les droits et obligations qui découlent des dispositions d’une directive. Cette exigence générale est commandée par la nécessité d’offrir au justiciable la possibilité de se prévaloir éventuellement des dispositions de la directive devant les juridictions nationales294.
48La doctrine met traditionnellement l’accent sur le fait que l’action normative par voie de directive repose sur une collaboration étroite entre l’Union et les États membres. Les directives ne visent pas ainsi à créer un corps de règles communes uniformes, fonction exercée par les règlements, mais procèdent plutôt à la convergence des droits nationaux dans la mesure nécessaire à la réalisation du résultat prescrit au niveau communautaire. Cette catégorie d’acte constitue, par conséquent, l’instrument privilégié des compétences communautaires visant à la seule harmonisation des droits nationaux. S’il est donc clair que la directive représente un mode de législation relativement décentralisé, en ce qu’elle suppose nécessairement le recours à des mesures étatiques qui traduisent, selon un degré de souplesse variable, le contenu des règles communautaires en droit interne, on ne saurait se méprendre sur la signification véritable de cette interposition des mesures étatiques, puisque même en leur absence, les directives n’en produisent pas moins une série d’effets juridiques dans l’ordre interne des États membres.
49D’autre part, et contrairement aux principes régissant la mise en œuvre des lois cadres dans certains pays dualistes, la transposition des directives ne se présente pas comme une faculté réservée aux États membres, mais bien au contraire, comme une obligation de faire à la charge des autorités étatiques dont l’inobservation peut être sanctionnée par les juridictions compétentes. De prime abord, on pourrait considérer que les directives communautaires n’ont qu’une partie normative indirecte, adressée exclusivement aux États membres, elles n’auraient vocation à déployer leurs effets juridiques dans l’ordre interne des États membres que par l’entremise des mesures étatiques de transposition. Cette imperfection normative des directives résultant d’une lecture exégétique de l’article 189 alinéa 3, du Traité UE, les opposerait ainsi radicalement aux règlements actes applicables de plein droit dans les ordres juridiques nationaux du seul fait de leur publication communautaire295. On doit toutefois se garder d’une dichotomie tranchée entre ces deux sources de droit communautaire dérivé.
50D’une part, on a déjà vu que l’applicabilité des règlements n’exclut aucunement l’hypothèse des règles normativement incomplètes, appelant des mesures nationales d’application. D’autre part, la nécessité structurelle de la transposition des directives en droit interne selon la technique de la législation à deux « étages », n’implique pas nécessairement que l’interposition des mesures étatiques ait un caractère fondateur et qu’en son absence, les directives doivent être traitées « comme un non être du droit interne »296. Bien au contraire, les directives constituent, elles aussi, un « élément du droit communautaire dont le juge national peut avoir à tenir compte selon les circonstances »297. Il est à noter que la jurisprudence de la Cour de justice a centré sur le principe de l’immédiateté normative de l’ensemble du droit communautaire sur l’exclusion de toute explication dualiste des relations entre l’ordre juridique communautaire et les ordres juridiques nationaux298.
51Selon les prises de position classiques du juge dans l’arrêt Costa c/ENEL « le traité CEE a institué un ordre juridique intégré au système juridique des États membres lors de l’entrée en vigueur du traité et qui s’impose à leur juridiction »299. Dans le cas des directives, l’immédiateté normative du droit communautaire se manifeste par la reconnaissance d’une série d’effets juridiques internes de ces actes communautaires en l’absence de toutes mesures opérant leur transposition en droit interne dans les délais prescrits.
52Tout d’abord, le juge communautaire n’a pas hésité à consacrer l’effet direct des dispositions inconditionnelles et suffisamment précises des directives, à voir leur aptitude à créer par elle-même des droits dans le chef des particuliers susceptibles d’être invoqués devant les juridictions nationales300. S’il est vrai que l’effet direct des directives ne concerne que certaines dispositions susceptibles d’être appliquées sans interposition des mesures étatiques « impliquant une marge importante de discrétion301 » et ne peut « créer d’obligation dans le chef d’un particulier »302, il n’en confirme pas moins l’aptitude de cette catégorie d’actes communautaires à produire des effets juridiques dans l’ordre interne des États membres en l’absence de toute médiatisation étatique. Il est important de noter que les autorités étatiques et les juridictions nationales en particulier sont tenues d’interpréter le droit national à la lumière du texte et de la finalité des directives non transposées, d’écarter l’application des règlements nationaux incompatibles avec le droit communautaire, ou encore de sanctionner l’absence de transposition par la mise en jeu de la responsabilité de la puissance publique. Ces trois formes d’inviolabilité des directives devant les tribunaux nationaux, dissociables de l’effet direct, démontrent, elles aussi, très clairement l’intégration de plein droit des directives dans l’ordonnancement juridique national en tant que source de droit communautaire et l’obligation des juges nationaux d’en tenir suffisamment compte dans le contentieux de la légalité et de la responsabilité.
53En dehors de leur importance primordiale pour la protection juridictionnelle des droits que les justiciables tiennent des directives communautaires, force est de constater que ces enseignements jurisprudentiels emportent aussi des conséquences significatives sur le plan de la qualification de l’opération de transposition des directives en droit interne303. En effet la reconnaissance de différentes formes d’invocabilité des directives transposées devant les juridictions nationales fait clairement ressortir que la compétence de transposition reconnue aux États membres ne peut nullement s’analyser comme une compétence de réception des directives en droit interne et encore moins comme une compétence de transformation des normes communautaires en des normes nationales. En dépit des variations terminologiques de la jurisprudence sur la qualification des mesures étatiques prises pour l’application des directives et des connotations dualistes de certaines formules retenues par le juge à cet égard304, on peut constaté que les directives s’intègrent d’elles-mêmes dans l’ordonnancement juridique valable dans les États sans avoir à renoncer à leur nature de normes communautaires. Loin de correspondre à l’insertion des traités internationaux dans l’ordre juridique interne, la compétence réservée aux États membres doit, dès lors être considérée comme une compétence d’exécution des directives dans la mesure nécessaire à leur pleine application dans l’environnement national. Dans cette optique, les effets concrets de l’opération de transposition varient en fonction de l’intensité normative de chaque directive considérée.
54D’une part, la transposition des dispositions des directives jouissant d’effets directs, même s’il s’agit d’une reproduction littérale du contenu des règles communautaires, comporte des conséquences importantes, dans la mesure où elle permet de créer des obligations dans le chef d’un particulier. En outre, il ne faut pas perdre de vue que seule une transposition répondant aux exigences de clarté et de sécurité juridiques permet de lever l’état d’incertitude. Quant aux possibilités réelles offertes aux justiciables pour invoquer les droits tirés des directives, l’effet direct des directives ne constitue dans ces conditions qu’une garantie minimale, qui ne peut en aucun cas assurer leur plein effet dans l’ordre juridique interne. D’autre part, les mesures de transposition visent à assurer l’application effective de dispositions normativement incomplètes des directives en y apportant les compléments normatifs nécessaires.
55Sur un plan plus général, l’opération de transposition comporte non seulement la traduction avec un degré de souplesse variable, du contenu des directives en droit interne, mais aussi la création d’un « droit national complémentaire » portant sur les modalités d’application, des autorités chargées de l’application et des mécanismes de contrôle et de sanction des directives communautaires. En somme, les mesures de transposition des États membres remplissent donc des fonctions diverses, dont le contenu exact dépend de l’intensité normative de chaque directive considérée, mais qui ne dépasse pas pour autant le cadre de l’exécution des directives dans l’ordre juridique interne. Il convient d’ailleurs d’ajouter que l’exercice ou non de cette compétence d’exécution n’est pas laissée à leur discrétion mais elle doit intervenir dans le délai prescrit par chaque directive, sous peine de déclencher des procédures en manquement à l’encontre des États membres défaillants.
56Ainsi la transposition des directives se présente, à l’instar de l’exécution des règlements comme une compétence liée quant au principe de son exercice. La compétence quant à la forme réservée aux autorités étatiques selon la formule consacrée en doctrine, le principe de l’autonomie institutionnelle et procédurale des États membres ne signifie pas que le choix des instruments réalisant l’opération de traduction des directives en droit interne relève de l’entière discrétion des États membres, selon une latitude d’action qui comporterait une gamme d’options allant « de la loi jusqu’à la simple note interne ». La question qu’il importe d’examiner concerne le principe même d’une transposition formelle d’une directive dans le cas où selon la thèse avancée par certains États membres, le contexte juridique national existant aurait permis d’assurer sa mise en œuvre appropriée dans l’ordre interne.
57Ainsi les exigences de clarté et de sécurité juridiques imposent cette nécessite des mesures de transposition. L’exigence de sécurité juridique acquiert une importance particulière dans le cadre de la transposition des directives dans la mesure où celles-ci doivent normalement atteindre la sphère des particuliers par l’intermédiaire des mesures d’application prises par l’autorité étatique dans les délais prescrits. L’opération de la transposition s’étend à l’ensemble des dispositions d’une directive, y compris les dispositions dotées d’effets directs. Le principe de la sécurité juridique remplit dans ces conditions, une fonction de protection à l’égard des droits que les particuliers tirent du droit communautaire, de façon que les bénéficiaires soient mis en mesure de connaître la plénitude de leurs droits et de s’en prévaloir le cas échéant devant les juridictions nationales. Compte tenu de ces deux exigences fondamentales de pleine application et de sécurité juridique, l’hypothèse d’une harmonie préétablie devrait rester une situation exceptionnelle.
58Ainsi, une construction juridique fondée sur l’effet combiné du principe d’égalité de traitement applicable aux ressortissants d’un État membre, et du principe communautaire du traitement national doit être bien étudiée. La mise en œuvre des directives ne se limite pas nécessairement à la traduction, selon une formule d’appréciation variable, de leur contenu normatif en droit interne, mais elle postule l’adoption de toute mesure interne nécessaire pour assurer leur plein effet dans l’environnement juridique national. Il est fait obligation aux États membres de prévoir toutes les modalités procédurales nécessaires pour l’application effective d’une directive même en l’absence d’une indication explicite dans le sens communautaire. Il est fait obligation aux États membres d’adopter des mesures conformes aux dispositions prises des directives.
59Dans la plupart des cas, il est possible d’identifier au sein d’une directive certaines dispositions précises à l’égard desquelles les autorités étatiques ne conservent pas une pluralité des choix en ce qui concerne les modalités de leur traduction en droit interne. On peut, dès lors, parler d’un rapport de conformité entre le droit national d’exécution et cette catégorie de disposition des directives en ce que le contenu des mesures de transposition peut être déterminé positivement ou négativement, avec une précision suffisante sur la base des seules dispositions des directives. Ainsi, il convient d’observer en premier lieu, que les États membres doivent procéder à la reproduction textuelle dans leur droit interne d’une série de dispositions techniques et détaillées, qui forment dans bien des cas une partie considérable du contenu normatif des directives. En deuxième lieu, les mesures d’adaptation du droit national ne sauraient altérer la portée des dispositions précises des directives soit en limitant leur domaine d’application et les garanties de protection fixée au niveau communautaire.
60Ainsi les États membres doivent choisir des mesures adéquates aux objectifs poursuivies par les directives. La caractéristique principale des directives du point de vue matériel tient incontestablement au fait qu’elle laisse aux autorités étatiques chargées de leur mise en œuvre une marge d’appréciation extrême variable en fonction de la nature de leurs objectifs et du degré de précision de chacune de leur disposition. Il est à noter qu’en plus des directives, les décisions ont également un régime spécifique.
4. Le régime spécifique de la décision
61Une décision est un acte de portée individuelle qui est obligatoire dans tous ces éléments pour les destinataires qu’elle vise. Son caractère individuel ne l’empêche pas de s’adresser à un nombre important de personnes identifiables. Il convient tout d’abord de distinguer les décisions de base, adoptées directement sur la base d’une disposition du traité, et les décisions d’exécution adoptées pour l’exécution des décisions de base, les secondes ne peuvent pas déroger aux premières.
62Aux termes de l’alinéa 3 de l’article 43 du traité de l’uemoa, « les décisions sont obligatoires dans tous leurs éléments pour des destinataires qu’elles désignent. Le terme n’est pas ici pris dans son sens générique, mais spécifique si l’article 189 CE définit les décisions comme des actes obligatoires dans tous leurs éléments, les articles 161 CEEA et 43 de l’uemoa précisent que cette obligation pèse sur les destinataires que ces actes désignent. Cela correspond à la définition jurisprudentielle de la décision non générale de la CECA. Ainsi les décisions se caractérisent par leur portée non générale d’où découlent les principales règles de leur régime. Le critère de distinction réside dans l’absence de portée générale. La jurisprudence est à cet égard parfaitement claire- « Les traits essentiels de la décision résultent de la limitation des destinataires auxquels elle s’adresse, alors que le règlement de caractère essentiellement normatif est applicable non à des destinataires limités, désignés ou identifiables, mais à des catégories envisagées abstraitement et dans leur ensemble, partant pour déterminer dans des cas douteux, si l’on se trouve en présence d’une décision ou d’un règlement, il faut rechercher si l’acte en question concerne individuellement les sujets déterminés ».305
63Dépourvues de caractère général, les décisions doivent faire l’objet d’une notification à leur destinataire et prennent effet à partir de cette notification. Le défaut de notification n’affecte pas la validité de ces actes. A l’instar du traité CE et de la jurisprudence communautaire, le traité uemoa indique que les décisions sont obligatoires dans tous leurs éléments pour les destinataires qu’elles désignent. Ce caractère permet ainsi de distinguer d’autres actes qui, bien que dénommés « décision », ne le présente pas et inversement. On ne peut pas manquer de relever que les effets juridiques des décisions ne sont pas nécessairement limités à leurs destinataires. La réglementation du recours en annulation en donne une illustration. Les justiciables sont fondés à intenter un tel recours contre les décisions qui, bien qu’adressées à une personne, les concernent directement et individuellement. Contrairement au règlement, la décision n’a pas de portée générale. C’est un acte de portée individuelle, puisqu’elle n’oblige que ces destinataires qui peuvent être des États, tous les États ou certains d’entre eux, des entreprises ou des particuliers. Elle constitue l’acte typique par lequel les institutions communautaires réglementent les cas particuliers et, de ce point de vue, elle s’apparente à un acte administratif individuel. Les décisions individuels CECA ont un régime juridique comparable à celui des décisions CE et CEEA.
64Il ressort clairement de la jurisprudence de la Cour de Justice que la décision constitue un acte individuel d’exécution du droit communautaire306 spécifique lorsqu’elle s’adresse à des particuliers ou des entreprises. Le juge a eu l’occasion de préciser : « pour déterminer dans les cas douteux si on se trouve en présence d’une décision ou d’un règlement, il faut rechercher si l’acte en question concerne individuellement des sujets déterminés »307. Dans certains cas, les décisions peuvent définir, à la charge d’un ou de plusieurs États, un objectif nécessitant l’adoption de mesures nationales ; elle présente alors des similitudes avec des directives. Contrairement à la directive cependant, la décision est obligatoire dans tous ces éléments et pas seulement quant au résultat à atteindre, elle peut donc légitimement être très détaillée et prescrire même les moyens d’atteindre les résultats imposés, les États ne conservent que le choix des formes juridiques de la mise en œuvre dans l’ordre national.
65Une décision peut prescrire à un État ou à un ensemble d’États membres un objectif dont la réalisation passe par l’édiction de mesures nationales. A portée générale, elle se présente alors comme un instrument de législation indirecte qui n’est pas sans rappeler la directive. Il faut également noter que, contrairement au règlement, la catégorie des décisions ne comporte aucune unité en matière d’applicabilité directe. Expresse et obligatoire pour les destinataires, la décision possède un effet direct lorsque le destinataire est un particulier ou une entreprise, c’est-à-dire modifié par la même sa situation juridique ; il en va autrement en principe, lorsque le destinataire est un État, seules les mesures nationales d’applications peuvent alors modifier la situation juridique des particuliers ; cependant dans ce dernier cas, comme pour les directives, un certain effet interne n’est pas exclu. Les décisions adressées à un État sont comme des directives, un instrument de coopération entre l’Union et les États membres. Les mesures d’exécution nationale à l’origine desquelles se trouve la décision communautaire peuvent avoir un caractère normatif.308 Les décisions peuvent être adressées à tous les États membres et elles auront alors généralement un caractère indirectement normatif. Les décisions peuvent aussi être adressées à un État membre déterminé. Elles sont alors appelées à régler un cas concret, cas des mesures de sauvegarde. Dans ce cas, les décisions ne créent d’obligation qu’à la charge de cet État, car il en résulte qu’elles ne peuvent être invoquées par les particuliers dans l’ordre interne lesquelles ont été traduites dans les mesures d’exécution nationale. La protection juridictionnelle des particuliers en matière de décision adressées aux États membres se pose à peu près dans les mêmes termes que pour les directives.
66Quant aux décisions adressées aux particuliers, il faut noter que les cas de la gestion directe et de l’applicabilité directe sont l’illustration de l’application du droit communautaire aux cas particuliers et concrets confiés aux organes communautaires eux-mêmes. Cette relation directe, ce rapport immédiat entre autorités communautaires et les particuliers ne se rencontrent pas dans les domaines applicables aux entreprises309. Il est erroné de parler à ce sujet d’applicabilité directe.
67Cette notion est utilisée pour indiquer que l’ordre juridique international reconnaît directement à l’individu la jouissance de certains droits qui sont exercés dans l’ordre interne sous le contrôle et la garantie des autorités étatiques. L’effet d’immédiateté s’attache, non pas à la relation gouvernants-gouvernés, mais au passage de la règle de l’ordre juridique international où elle est formée à l’ordre interne dans lequel elle est sanctionnée. Les décisions adressées aux particuliers ne constituent pas du droit directement applicable car la notion d’applicabilité directe caractérise la qualité d’une norme. Les décisions ne constituent pas des normes, mais l’application d’une norme à un cas particulier. Il est à remarquer que cette norme est directement applicable dans l’ordre interne, dans la mesure où les juridictions nationales peuvent être appelées à statuer sur les conséquences civiles des infractions aux règles de concurrence.
5. Le régime particulier des Recommandations et des Avis
68Cette dernière catégorie d’actes unilatéraux prévus par le traité communautaire se caractérise par le fait qu’elle n’a pas de force exécutoire. Ainsi l’alinéa 4 de l’article 43 de l’UEMOA dispose « les recommandations et les avis n’ont pas de force exécutoire ». De la clarté de cette formule se déduisent des conséquences apparemment simples. De tels actes ne comportent aucune obligation ni pour leur auteur, ni pour leur destinataire, et en tant que tels échappent au contrôle juridictionnel.
69En présence d’un acte dénommé avis, il appartient aux juges de la légalité de procéder à la qualification et de reconnaître comme tels que des actes n’expriment que des opinions. Selon l’article 249 alinéa 5, CE (ex article 189 alinéa 5) « les avis et les recommandations ne lient pas » ce qui signifie que les destinataires de ces actes (États membres, particuliers, entreprises) ne sont pas obligés de s’y conformer. Parce qu’ils « ne lient pas » les avis et les recommandations ne font pas griefs et ne peuvent donc pas faire l’objet de recours contentieux. Les recommandations et les avis permettent aux institutions communautaires de se prononcer de manière non contraignante. Le plus souvent, l’avis n’est que l’expression de l’opinion d’une institution et à l’égard d’une situation déterminée. La recommandation est destinée à inviter ses destinataires à adopter un certain comportement ou une ligne de conduite particulière.
70Ces actes ont donc une portée essentiellement politique, mais ils peuvent avoir des effets juridiques indirects s’ils créent des conditions préalables d’édiction d’actes contraignants, ou si l’institution qui les a adoptés s’est liée elle-même de telle sorte qu’elle a engendré une situation de confiance légitime qui pourrait être invoqué à l’occasion d’un contentieux. Ainsi la Cour de justice a également dit que les juges nationaux « sont tenus de prendre les recommandations en considération en vue de la solution de litiges qui leur sont soumis, notamment quand elles sont de nature à éclairer l’interpellation d’autres dispositions nationales ou recommandations »310.
71Le dernier régime spécifique sera consacré au droit substantiel de l’uemoa.
6. Le régime du droit substantiel de l’UEMOA
72Le droit substantiel dérivé de l’uemoa a pour origine des textes cadres à savoir la Convention créant la Commission bancaire de l’uemoa. S’agissant de la réglementation unique de la profession bancaire, il faut noter que dans l’ensemble des États membres de l’uemoa, trois textes fondamentaux ont été édictés :
- la loi organisant la profession bancaire ;
- le décret relatif au classement, à la forme juridique et aux opérations des Etablissements financiers ;
- la loi portant réglementations des institutions ou coopératives d’épargne et de crédit.
73Ainsi ces textes organisent d’une part la profession bancaire, et d’autre part, le contrôle bancaire. La surveillance bancaire s’exerce sur la base de la loi applicable à l’ensemble du territoire de l’uemoa. En effet la solidarité observée par les États membres de l’Union se traduit au niveau du système bancaire par l’adoption d’une loi harmonisée qu’il insère dans l’arsenal juridique de chacun des États. Cette loi communément appelée loi bancaire, est entrée en vigueur en 1990.
74Cette loi donne une définition exacte de ce que doivent être les Banques et les Etablissements financiers, ainsi que les opérations de crédits et de déplacement réalisées par ces organismes. Elle précise les conditions d’accès à l’exercice de la profession et détermine les obligations des Banques et Etablissements financiers en matière d’opérations. La loi bancaire fixe les domaines du contrôle exercé par la Banque Centrale et la Commission bancaire, ainsi que les règles de l’Union monétaire et les sanctions applicables en cas de non respect de ces règles. Les Banques et Etablissements financiers doivent solliciter leur agrément et leur inscription sur la liste des Banques et Etablissements financiers avant d’exercer leur activité. Cet agrément est prononcé par le Ministère des Finances après instruction du dossier par la BCEAO et avis conforme de la Commission Bancaire de l’uemoa. En vue d’assurer à toutes les Banques et tous les Etablissements financiers de l’Union l’accès au marché bancaire de chacun des États membres dans les conditions de concurrence optimales, le Conseil des Ministres de l’Union a décidé en sa session du 3 juillet 1997, le principe de l’agrément unique.
75Outre la loi bancaire d’autres textes juridiques viennent renforcer la surveillance bancaire dans l’uemoa. Il s’agit du nouveau dispositif entré en vigueur le 1er Octobre 1991. La supervision bancaire au sein de l’uemoa est organisée et réglementée sur la base d’instruments juridiques qui prennent essence dans les dispositions de la loi portant réglementation bancaire. La Commission bancaire constitue l’organe communautaire chargé d’assurer le contrôle des banques et Etablissements financiers. Dans l’exercice de ses attributions, elle donne un avis conforme pour l’agrément d’une banque ou d’un Etablissement financier, procède à des contrôles sur pièces et sur place auprès des Etablissements. Elle peut, le cas échéant, effectuer ces contrôles aux sociétés apparentées.
76Pour l’accomplissement de sa mission, la Commission bancaire peut requérir toute information et dispose de larges pouvoirs de sanctions administratives et disciplinaires pour toute infraction à la réglementation bancaire. Elle peut, aussi dans certaines circonstances, proposer la nomination d’administrateur provisoire ou de liquidateur pour les Banques et Etablissements financiers. Par ailleurs, elle informe le Ministre des Finances et les autorités judiciaires des infractions qu’elle constate à l’occasion de ces contrôles. Pour améliorer l’information entre les Banques au plan comptable, un Acte Uniforme a été adopté et approuvé le 9 avril 1994. Il est entré en vigueur en 1996. l’uemoa a également consacré une réglementation uniforme des instruments de paiement. Il s’agit de la réglementation unique de change et de la réglementation unique du chèque de la carte de paiement, de la lettre de change et du billet à ordre. En plus de l’étude du droit dérivé unilatéral de l’uemoa, nous traiterons à présent du droit dérivé conventionnel et jurisprudentiel.
§ 2. Les sources conventionnelles et jurisprudentielles du droit communautaire
77L’uemoa, à l’instar des communautés européennes et dans le cadre de la réalisation de ses objectifs, a conclu plusieurs conventions avec les États-tiers, les États membres ou avec les Organisations Internationales, régionales et sous-régionales. Ces conventions constituent le droit conventionnel. Il faut noter également que la jurisprudence constitue une source. Ainsi, nous traiterons du Droit Conventionnel (A) et de la jurisprudence de la Cour de Justice comme sources (B).
A. Le droit dérivé conventionnel
78Le droit dérivé peut être conventionnel, il s’agit des accords conclus entre l’Union et des États ou organisations tiers. Ces actes relèvent de l’ordre juridique de l’Union en ce qu’ils sont autorisés par son droit primaire ; mais ils relèvent également du droit international public en ce qu’ils ont pour vocation à gérer des situations présentant un caractère d’extranéité marqué. L’étude de ce droit dérivé secondaire permet de dégager l’aspect évolutif de la construction communautaire de l’uemoa. Il faut noter que le processus de construction de l’uemoa s’appuie sur le traité de l’umoa qui traduit l’intégration monétaire réalisée entre les États francophones de l’Afrique occidentale.
79Le nouveau traité de l’uemoa s’articule sur l’acquis communautaire de l’umoa, et institue un dispositif susceptible de générer un droit complémentaire. Les États qui adhèrent à un nouveau traité acceptent d’ores et déjà durant les négociations le droit dérivé déjà existant qui constitue en général un acquis communautaire. Les nouveaux États adhérent acceptent ainsi l’architecture conçue par les premiers États. Mais dans le contexte européen, la notion d’acquis communautaire peut avoir deux sens.
80Dans un premier temps l’acquis est un résultat macro-économique constituant un succès pour l’organisation communautaire. Telle est la croissance des échanges communautaires dont le rythme est plus rapide que celui de la croissance des échanges mondiaux.311 En second lieu, l’acquis communautaire traduit le résultat de la construction européenne, considérée comme irréversible, par exemple le régime de la préférence communautaire en matière agricole. Il est important de remarquer que la Cour de Justice consacre implicitement cette notion d’acquis communautaires sous l’angle juridique. En effet, pour la Haute juridiction, dès lors que pour atteindre la finalité d’un traité européen les organes compétents établissent des règles communes, elles deviennent du droit positif, c’est-à-dire un élément de la constitution européenne sur lequel il n’y a plus à revenir.
81Dans le cadre de l’uemoa, l’acquis communautaire s’analyse comme l’ensemble des dispositions de l’UMOA encore en vigueur. En effet, l’entrée en vigueur du traité instituant l’uemoa n’est pas accompagnée de l’abrogation de sa devancière en l’occurrence le traité UMOA. Certains éléments de ces dispositions réglementaires conformes à l’esprit et à la lettre du traité de l’uemoa restent en vigueur. Ils précisent que le traité de l’uemoa est un complément au traité de l’UMOA. Cette stipulation consacre la continuité des relations entre la France et les États membres de l’uemoa. En plus de l’acquis communautaire, le traité de l’uemoa a consacré un droit complémentaire. Ce droit complémentaire sert à qualifier une catégorie d’actes conventionnels. Ces actes conventionnels sont classés dans le droit dérivé car ils sont conclus sur la base des compétences que l’Union tient de la source principale d’attribution des compétences.
82Ces actes conventionnels traduisent l’ouverture de l’Union tant au niveau interne qu’au niveau externe. Dotée de la personnalité juridique internationale, l’Union a la capacité de conclure les accords internes avec chacun des États membres ou avec les États tiers, mais également avec d’autres organisations. Le droit conventionnel communautaire comprend ce qu’on appelle « accord externes » c’est-à-dire ceux que l’Union conclut avec les États tiers, seule ou conjointement avec les États membres. L’article 13 du traité se rapporte à la réglementation des modalités de conclusion des accords de coopération établis avec les États tiers ou des organisations internationales. La procédure de conclusion des accords de coopération d’assistance est régie par les articles 84 et 85 du traité. Il convient de préciser que le premier texte ne s’applique pas aux accords à caractère économiques. Lorsque de tels accords comportent des incidences sur le fonctionnement du marché commun, l’article 85 alinéa 2 exige des États intéressés une coordination de leur position en amont des négociations. Le traité comporte des dispositions déterminant les domaines dans lesquels l’Union peut conclure des accords soit avec les États tiers soit avec des organisations internationales. Il prévoit, expressément la possibilité pour l’Union de conclure des accords internationaux dans le cadre d’une politique commerciale commune. Afin de rayer d’éventuelles incompatibilités ou des doubles emplois entre le droit et les compétences de l’uemoa, il est institué un mécanisme de concertation au sein du Conseil. Le rôle respectif des institutions est déterminé au stade de la négociation, puis de la conclusion.
83La Commission présente des recommandations au Conseil qui l’autorise à ouvrir à la majorité qualifiée les négociations nécessaires. Les négociations sont conduites par la Commission consultative avec un comité désigné par le conseil dans le cadre des directives élaborées par celui-ci. Dans l’ultime phase de la conclusion des accords négociés par la Commission, le Conseil se prononce à la majorité qualifiée des deux tiers des membres.
84A titre d’illustration, l’uemoa a conclu plusieurs accords de coopération avec les organisations internationales, régionales et sous-régionales.
85Des avancées significatives ont été enregistrées dans le cadre des relations avec la CEDEAO, le Comité permanent Inter-États de lutte contre la sécheresse dans le Sahel (CILSS, le Conseil de l’entente, la Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale (cemac). Avec la CEDEAO et le CILSS un comité technique tripartite en vue de définir les principaux axes de coopération a été créé. L’uemoa a également conclut un accord de coopération avec le Conseil de l’entente, le 28 octobre 1997, par lequel les deux organisations ont convenu de coordonner et d’harmoniser leur action de développement.
86Avec la Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale (CEMAC), un protocole d’entente pour la gestion commune et la promotion des investissements dans la Zone Franc a été conclu à l’occasion de la coorganisation à Paris, les 12 et 13 octobre à Paris, des journées investir dans la Zone Franc.
87Au niveau régional des contacts avec la BAD et la Commission Economique pour l’Afrique ont été noués, mais également avec la Conférence Ministérielle des États de l’Afrique de l’Ouest et du Centre sur les transports Maritimes CMEAO/TM et le CAMES. L’uemoa entretient des relatons importantes avec l’Union européenne. En plus de l’assistance que l’Union européenne apporte aux fonctionnaires de l’uemoa, l’essentiel des relations avec cette Union se développent dans le cadre de la mise en œuvre de la convention de financement signée le 14 novembre 1996. Cette convention qui vise, principalement le renforcement des capacités institutionnelles des organes communautaires et le repositionnement du secteur privé de l’Union, a contribué dans une forte proportion, à la mise en place de certains organes de l’Union ainsi qu’au lancement de l’essentiel des activités relatives à la définition d’actions prioritaires de ses politiques sectorielles.
88Dans le cadre de la coordination du PIR 8ème FED en Afrique occidentale, l’Union a participé à l’élaboration du mécanisme de coordination et du suivi. L’uemoa mène également d’intenses activités dans le cadre des accords avec Union européenne et les pays d’Afrique Caraïbe et Pacifique.
89S’agissant de la coopération avec les autres organisations internationales, l’uemoa a des relations très suivies avec les institutions de Bretton Woods et les autres pays tels que la France, le Canada, l’Allemagne.
90Par ailleurs le Conseil des Ministres par la directive en date du 22 décembre 1998, a donné un mandat à la Commission pour ouvrir et conduire les négociations en vue de la conclusion d’un accord entre les États Unis d’Amérique et l’uemoa relatif au développement du commerce et des investissements. Ces différents accords conclus avec d’autres États tiers ou Organisations ne manqueront pas de poser la problématique d’antériorité ou de postériorité par rapport à l’entrée en vigueur du traité uemoa.
91S’agissant des accords conclus par les États membres avec les États tiers, le régime juridique est différent, ces accords sont conclus antérieurement ou postérieurement à l’entrée en vigueur du traité. S’agissant des accords externes dans certains cas, seule l’Union en tant que telle conclut des accords avec les pays tiers, parce que l’objet de ces accords ne dépasse pas sa compétence. Mais il arrive également que l’objet de l’accord dépasse la compétence de l’Union. Dans cette hypothèse, l’accord est conclu parallèlement par l’Union et les États membres, on parle alors d’un accord « mixte ».312 Il a été jugé dans le cadre de la Cour de Luxembourg que « les dispositions de l’accord forment partie intégrante, à partir de l’entrée en vigueur de celui-ci dans l’ordre communautaire »313. L’acte de conclusion (règlement ou directive ou décision) n’a qu’une valeur instrumentale, en ce sens qu’elle se borne à approuver l’accord conclu, sans en pouvoir modifier ni la teneur, ni la portée. Il peut donc être considéré comme opérant une réception de l’accord dans l’ordre juridique communautaire.
92En ce qui concerne les accords conclus par les États membres avec les pays tiers, ils peuvent être conclus antérieurement ou postérieurement à l’entrée en vigueur du traité. Pour l’accord conclu avant l’entrée en vigueur du traité, la Cour de justice européenne a jugé que l’application du traité n’affecte pas l’engagement de l’État membre concerné de respecter les droits des États tiers résultant d’une convention antérieure et d’observer les obligations correspondantes314. Concernant les accords conclus postérieurement à l’entrée en vigueur du traité par les États membres ils sont en principe opposables au traité, dès lors qu’ils sont compatibles avec les traités. Les accords d’adhésion en sont une parfaite illustration, parce qu’ils sont conclus entre les États membres et l’État candidat. En tout état de cause, les États membres n’ont pas le droit de porter atteinte à leurs obligations communautaires par les traités conclus avec les pays tiers. S’agissant des accords conclus entre États membres, elles permettent de régir des situations qui ont certains liens étroits avec les activités de l’Union, mais pour lesquelles aucune compétence n’a été confiée aux institutions communautaires. Ils peuvent ainsi constituer de véritables accords internationaux entre les États membres, ces accords peuvent être conclus antérieurement ou postérieurement à l’entrée en vigueur du traité.
93Les accords entre États membres antérieurs à l’entrée en vigueur du traité sont inopposables à l’Union, lorsqu’ils sont incompatibles au traité.
94Les accords entre États membres conclus postérieurement à l’entrée en vigueur du traité visent notamment à élargir les limites territoriales de la réglementation nationale et à créer un droit uniforme à l’échelon communautaire.
95Il revêt actuellement une grande importance dans le domaine du droit privé international. Après l’étude du droit conventionnel, nous traiterons à présent des sources jurisprudentielles.
B. Les sources jurisprudentielles
96Elles sont constituées par la jurisprudence de la Cour de justice de l’uemoa et les principes généraux de droit.
1. La jurisprudence de la Cour de justice
97A l’exception de celles rendues sur les recours en annulation erga omnes, les décisions de la Cour de justice de l’uemoa ne sont revêtues d’aucune autre autorité que celle relative à la chose jugée.
98En réalité, la situation est assez différente pour trois raisons principales, dont les conséquences se conjuguent et se renforcent pour donner à cette jurisprudence une valeur singulière.
99La première de ces raisons tient à la position occupée par la Cour dans le système institutionnel. Seule juridiction de l’Union dotée de la qualité d’institution, chargée, à ce titre, d’assurer le respect du droit dans l’interprétation et l’application du traité, sans que le droit dont il s’agit d’assurer le respect soit assortie d’un moindre qualificatif restrictif, la Cour dispose ainsi d’une autorité d’autant plus considérable que celle-ci n’est tempérée par aucun contre poids structurel ou institutionnel.
100La seconde raison réside dans le système de contrôle juridictionnel que la Cour a pour mission d’exercer et plus spécialement dans l’un des instruments de sa fonction. Outre les divers recours qui le conduisent à trancher au fond les différentes catégories de litiges et le placent ainsi au centre de gravité du système contentieux, le juge communautaire a été investi d’une fonction fondamentale par le traité, celle de donner du droit communautaire la seule interprétation authentique. Il est important d’indiquer la justification et d’en souligner l’incidence sur l’autorité de la jurisprudence.
101La justification tient à la nécessité d’imposer aux différentes règles de droit communautaires une interprétation uniforme seule compatible avec le maintien de la cohérence et de l’homogénéité du système. C’est pour répondre à cette nécessité que la Cour est investie de cette fonction d’interprétation sur renvoi des juges nationaux saisis de litiges mettant en cause le droit communautaire et qu’à cette occasion, elle est chargée non pas de trancher elle-même ces litiges, mais de délivrer l’interprétation des dispositions concernées du droit communautaire. Cette interprétation objective s’incorpore à la norme interprétée qui devra dès lors être lue, comprise et appliquée dans le sens que lui donne l’interprète. Sans doute le dispositif des arrêts doit se borner à répondre aux questions posées par le juge national. Avec le développement futur de la jurisprudence au niveau de l’uemoa, la Cour ne doit pas hésiter à reformuler ces questions.
102Dès lors, il n’est pas besoin d’insister sur l’importance de ces décisions interpellées.
103La fonction normative de la jurisprudence doit revêtir les caractères d’une véritable législation jurisprudentielle.
104La troisième raison doit être recherchée sur les méthodes que le juge communautaire mettra en place à l’instar de son homologue européen. Le juge communautaire européen recourt souvent aux méthodes classiques, finalistes.
105Il faut retenir que l’étude de la jurisprudence et la pratique du droit communautaire sont inséparables d’une connaissance approfondie de cette jurisprudence, de ces méthodes d’élaboration et de son contenu qui constituent autant de composantes essentielles de ce droit.
106Dans le contexte de l’Union européenne, la jurisprudence a joué un rôle extrêmement important dans la construction de l’ordre juridique communautaire. En effet, le droit communautaire est pour une large partie un droit prétorien. La Cour de justice est chargée par le traité d’interpréter et d’appliquer le droit issu des traités fondateurs et des règles posées par les actes des institutions. Pour remplir ce rôle elle a eu, à de nombreuses reprises, à faire œuvre créatrice et combler les lacunes d’un ordre juridique encore incomplet et en construction.
107Chargé en particulier de répondre aux questions préjudicielles des juridictions nationales sur l’interprétation des dispositions du droit européen, elle assure de ce fait l’uniformisation de ce droit et garantit ainsi une application harmonisée dans les États membres. Elle assure la sauvegarde et l’efficacité du droit communautaire, elle est aussi chargée de créer des normes juridiques.
2. Les principes généraux
108Dans ce droit jurisprudentiel, une place importante doit être faite aux principes généraux. Comme la plupart des juges et pour les mêmes raisons le juge communautaire doit faire appel à de tels principes et en imposer leur respect. En présence de textes auxquelles leur contenu économique confère souvent une certaine sécheresse technique, et qui ne manquent pas de lacunes, la Cour doit, pour éviter des dénis de justice, recourir à des principes généraux de droit sur lesquels elle pourra s’appuyer. Le choix de ces principes ne pourra pas être fait sans précaution. Sans doute elle fera recours soit au droit international soit au droit interne des États membres. Mais dans l’un et ou l’autre cas, quoique de manière différente, l’originalité et l’autonomie du système juridique communautaire risqueraient d’en être plus ou moins affectées.
109Ainsi, le juge communautaire doit faire des emprunts soit aux principes généraux inhérents à la notion de système juridique, soit aux principes généraux communs, aux droits des États membres et aux principes issus du droit international. Les principes inhérents à la notion de système juridique sont des principes généraux tout à fait classiques qui, en eux –mêmes, n’appellent pas d’explications particulières. En les considérant comme tels, on adopte de cette notion une conception généralement reçue dans les États membres sans pour autant que ces principes soient directement rattachés à des droits. Ainsi, ces principes sont relatifs à l’exercice et à la bonne administration de la justice, à la reconnaissance expresse des recours exceptionnels, aux notions de sécurité juridique, de bonne foi, d’équité etc. Quant aux principes généraux communs, il est naturel que le juge communautaire recherchera des principes généraux dans le droit des États membres. La parenté d’inspiration et de technique des droits nationaux dans l’Union justifiera une telle démarche.
110La première de ces conditions tient en quelque sorte à la nécessité. La Cour ne se tournera vers le droit des États membres qu’en cas de besoin, soit en présence d’une lacune du traité qui l’exposerait à un déni de justice, soit à titre supplétif pour mieux fonder ses interprétations. La seconde condition tient au degré de communauté de principe. La Cour n’exige pas pour les reconnaître en tant que principes généraux de droit communautaire que ces principes soient communs au droit des États membres. Il suffit qu’il existe dans un certain nombre de ceux-ci.
111Enfin, la dernière condition tient à ce que le principe reconnu par le droit des États membres soit apte à être reçu par l’ordre juridique communautaire et en d’autres termes qu’il soit conciliable avec la structure juridique et les objectifs de celui-ci.
112En ce qui concerne les principes issus du droit international, il faut reconnaître que l’Union est une personne du droit international, à ce titre elle a l’obligation de respecter le droit international conventionnel ou coutumier et peut aussi se prévaloir de principes reconnus par ce droit dans l’exercice de ses compétences.
113C’est ainsi qu’elle peut justifier l’application des règles communautaires de concurrence à des entreprises situées hors du territoire de la communauté en se fondant sur le principe de territorialité consacré par le droit international public, les effets des comportements restrictifs de la concurrence à l’intérieur du futur marché commun.
114En plus de ces principes, on a également les principes déduits de la nature de l’Union et ceux déduits des droits fondamentaux. L’’étude du droit communautaire dérivé de l’uemoa, nous conduit également à l’étude de celui de l’ohada.
SECTION 2. LE DROIT COMMUNAUTAIRE DÉRIVÉ DE L’OHADA
115Dans le cadre de cette thèse et pour l’étude du droit dérivé de l’ohada, nous traiterons uniquement de quelques actes uniformes. Le droit dérivé de l’ohada est constitué par l’ensemble des actes pris par les organes de cette organisation. Pour stimuler les initiatives économiques et assurer plus de fiabilité au corpus juridique des États, le traité précise à l’article 5 que « les Actes pris pour l’adoption de règles communes prévus à l’article premier du présent traité sont qualifiés « Actes uniformes ». Ainsi, les Actes uniformes qui constituent l’essentiel du droit dérivé de l’ohada permettent la matérialisation de la volonté d’harmonisation et contiennent des innovations que cette volonté a suscité, mais il convient de noter que les limites à cette volonté d’harmonisation existent également.
116Ainsi nous traiterons de la consécration d’un droit uniforme des affaires dans la Zone Franc (§ 1) et les limites à l’uniformisation du droit des affaires (§ 2).
§ 1 – La consécration d’un droit uniforme des affaires dans la zone franc
117L’analyse du contenu de l’article 2 du traité ohada, permet d’affirmer qu’il encadre aussi bien les personnes physiques et morales acteurs de la vie des affaires, que les matières du droit des affaires. Cette nouvelle réglementation s’est traduite par une rénovation par l’uniformisation du droit matériel régissant les acteurs de la vie des affaires (A), et une rénovation par l’uniformisation du droit processuel des affaires (B).
A. La rénovation par l’uniformisation du droit matériel régissant les acteurs de la vie des affaires
118Cette nouvelle réglementation des acteurs de la vie des affaires recouvre essentiellement l’uniformisation de la législation des sociétés dans la Zone Franc, ainsi que l’uniformisation de la réglementation de l’activité commerciale et des sûretés.
1. L’uniformisation de la législation des sociétés
119Aux termes de l’article 1832 du code civil « la société est un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes conviennent de mettre quelque chose en commun en vue de partager le bénéfice qui pourra en résulter ». Parfois une personne isolée ne trouve de capitaux pour créer ou accroître son entreprise qu’en acceptant de donner à son bailleur de fonds la qualité d’associé. En effet selon Yves Guyon « les nécessités de l’économie moderne dépassent de plus en plus les moyens dont dispose un commerçant individuel quelle que soit sa richesse »315.
120L’Acte uniforme portant droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique adopté le 7 avril 1998 et entré en vigueur le 1er janvier 1998 est le bienvenu dans la mesure où, avant son adoption, hormis le Sénégal, le Mali et la Guinée, tous les autres États en étaient restés au droit vétuste du code civil de 1804 et des lois du 24 juillet 1867 et 7 mars 1925, pour la SARL sans qu’il soit toujours facile de consulter ces textes anciens.
121Ainsi, par son adoption, l’ohada poursuit un vaste but en direction de toutes les entreprises, quelles que soient leurs activités à travers la rénovation du statut des entreprises. Cet Acte uniforme est relativement long, puisqu’il compte 919 articles, il est en effet complet et détaillé, mais le détail relève du souci d’éviter le recours à des textes réglementaires d’une part et de faciliter la compréhension dans l’application d’autre part. Au niveau de sa conception, l’Acte uniforme ne retient que les sociétés commerciales excluant ainsi les sociétés civiles.
122Sur le fond, l’un des objectifs principaux de l’Acte uniforme est d’améliorer l’information et la sécurité des associés et des tiers. Les banquiers sont largement concernés par cette réforme. A cet égard, on relève en particulier les dispositions relatives à la vérification des apports en natures, et des avantages particuliers, au contrôle et à la certification des comptes, des procédures d’arbitrage etc… qui vont tous dans le sens de l’amélioration de la sécurité des partenaires de l’entreprise. Pour les mêmes raisons, la forme authentique déposée au rang des minutes d’un notaire a été imposée aux statuts de toutes les sociétés commerciales.
123Selon Joseph Issa Sayegh, « la première partie contient des dispositions générales sur la société commerciale, elle réglemente la constitution de la société jusqu’à son immatriculation au registre de commerce, qui lui confère la personnalité juridique : le fonctionnement de celle-ci (pouvoir et responsabilité des dirigeants sociaux et états financiers de synthèses annuelles, procédures d’alerte interne expertise de gestion) ; les liens de droit entre les sociétés telles que les sociétés à participation et les filiales »316. La transformation de la société commerciale y compris la fusion, scission et apport partiel d’actifs ; nullité de la société, sa dissolution et liquidation, les formalités et les publicités à accomplir lors des différentes phases de la vie de la société. Cet Acte uniforme s’applique dans tous les États membres de l’ohada à toutes les sociétés commerciales y compris celles dans lesquelles l’État ou une collectivité publique détient une participation. Les personnes, quelle que soit leur nationalité, qui veulent exercer une activité commerciale en société dans un État partie, doivent obligatoirement choisir une des formes de société créées à partir de la date de son entrée en vigueur. Mieux, les sociétés existantes à cette date ont deux ans pour mettre leur statut en harmonie avec les dispositions nouvelles.
124De l’avis de Joseph Issa Sayegh, « la deuxième partie317 est consacrée aux différentes sociétés commerciales : société en nom collectif, société en commandite simple, on remarquera la disparition de la société en commandite par actions qui était tombée en désuétude ; société à responsabilité limitée, société anonyme pour laquelle il est prévu deux formes d’administration et de direction318 ; société en participation et société de fait qui reçoivent une brève, mais suffisante réglementation. Le groupement d’intérêt économique a également sa place et se voit restitué son véritable objet qui est la mise en œuvre pour une durée déterminée de tous les moyens propres à faciliter ou développer l’activité de ses membres ou d’améliorer ou accroître les résultats de cette activité sans réalisation ni partage de bénéfice ». A notre avis toutes ces formes de sociétés doivent être maintenues à l’exception de la société en commandite sous toutes ses formes. Plusieurs arguments militent en faveur de cette suppression de la société en commandite.
125D’abord même s’il s’agit d’une simple consultation, l’on se doit de souligner que les États Africains se sont montrés particulièrement favorables à cette suppression. Par ailleurs, le caractère hybride de cette société en commandite est source de complexité en ce qu’elle rend tributaire à la fois juridique de la société à nom collectif et la société anonyme319.
126Son rattachement à la société en nom collectif se traduit par l’exigence unanime de tous les associés en cas de cessation des parts des commandités, ce qui entraîne une certaine lenteur, et par la dissolution de la société en cas de mort, d’incapacité ou faillite du commandité. De ce point de vue, on peut dire que la société a encore quelques difficultés à transcender ses éléments d’intuitu personae et devenir une personne morale à part entière. L’influence des dispositions régissant la Société anonyme se reflète nettement dans les recours au statut des membres du Conseil de surveillance. Enfin, il importe de se référer à une considération « juridico-historique ». En effet, la société en commandite qui se justifiait en 1856, du fait qu'elle offrait la possibilité de développer l’entreprise par des apports extérieurs de capitaux, a perdu son importance et connaît un sérieux déclin depuis la création de la SARL dont le régime s’adapte aussi bien aux petites entreprises qu’aux sociétés de grandes dimensions. On note dans ce travail d’uniformisation une fidélité au droit classique des sociétés commerciales.
127Dans la nouvelle définition de la société commerciale, il faut noter l’existence de deux innovations apportées par l’article 4, par rapport à la législation ancienne. Selon l’article 4 « la société commerciale est créée dans le but de partager ou de profiter de l’économie qui pourra en résulter » ce qui a permis d’englober dans la définition une forme de société qui, comme le GIE, n’a pas nécessairement pour but la réalisation de profit direct comme objectif.
128Quant à l’article 5, elle permet la création d’une forme de société jusqu’ici inconnue en Afrique c’est la société unipersonnelle.
129L’originalité de la notion de société de l’Acte uniforme réside dans le glissement du contrat vers l’institution, ainsi que dans la réforme des éléments caractéristiques de la société commerciale.
130L’article 4 semble trancher la controverse sur la nature juridique de la société. Il privilégie la conception institutionnelle par rapport à la conception contractuelle. Si dans l’ancien droit positif la société commerciale relevait d’une situation contractuelle par son fondement avec l’Acte uniforme, la constitution de la société, sa création par acte unilatéral de volonté et l’effet constitutif de son immatriculation au registre de commerce et du crédit mobilier sont les éléments les plus caractéristiques du glissement du contrat vers l’institution.
131L’amélioration des règles de constitution de la société est la traduction de la prise en compte de l’intérêt commun des associés. Il faut noter que l’Acte uniforme a rationalisé les structures des sociétés et leur fonctionnement.
a) Les structures des sociétés
132En ce qui concerne les structures des sociétés, l’Acte uniforme a repris l’ensemble des sociétés commerciales, à l’exception de la société en commandite par action. Il est fait obligation aux sociétés en commandite existantes de se transformer dans un délai de deux ans en sociétés anonymes sous peine d’être dissoutes. La question qui se pose est celle de savoir si cette mesure a été appliquée dans les pays de la Zone Franc.
133L’Acte uniforme a maintenu la société anonyme SA dont le régime est prévu dans les articles (385 à 905), mais également la société à responsabilité limitée (SARL, articles 309 à 384) ; la société en nom collectif (SNC, articles 270 à 292), les groupes de sociétés et les groupements d’intérêts économiques. L’Acte uniforme a apporté des innovations importantes, surtout en fonction des dimensions des sociétés et de leur modèle.
134Ainsi le capital social des SARL a été porté de 500.000 F à 1000.000 francs CFA. En ce qui concerne la SA qui fait appel public à l’épargne, le capital social doit être au moins 100.000.000 F, CFA dans le cas contraire 10.000.000 F CFA.
135Les rédacteurs de l’Acte uniforme ont maintenu la société en commandite simple, mais il est regrettable qu’ils aient exclu la commandite par actions qui présente des intérêts certains. Elle permet une bonne collaboration entre les investisseurs et les entrepreneurs, car grâce à l’émission d’actions, elle peut emprunter aisément. Le droit communautaire des sociétés devrait favoriser la libre circulation et permettre les structures sociétaires à l’échelle africaine.
136Il devrait également favoriser la pénétration de structures sociétaires plus libérales à l’instar du droit communautaire européen, qui permet la mise en harmonie du droit français avec les directives européennes. La loi du 3 janvier 1994, relative à la société par action simplifiée a fait de cette société une institution contractualisée, et a l’avantage de permettre d’échapper aux règles d’ordre public applicables aux actionnaires.
137On peut également dans le même ordre d’idées, citer la loi Madelin du 11 février 1994 et celle du 8 Août 1994 qui ont simplifié le fonctionnement des SARL et les sociétés par actions.
138La société par action simplifiée a été créée pour servir de base aux entreprises communes, car elle est importante pour les joint-ventures. Pour plusieurs raisons évoquées, l’ohada aurait dû retenir la société par actions, en la réaménageant car elle est intéressante pour les filiales communes. On peut constater que l’Acte uniforme n’a pas retenu certaines formes secondaires de sociétés commerciales, telles que les sociétés à capital variable, les sociétés d’investissements et des sociétés coopératives. Cela est regrettable, souvent pour les sociétés à capital variable, celles-ci prévoient une clause de variabilité du capital. A tout moment, le capital social peut être augmenté par l’adhésion d’associés nouveaux, réduit du fait de l’exclusion du retrait d’un associé sans qu’il soit besoin de se conformer aux conditions habituelles de majoration du capital. Seulement le choix de la clause de variabilité implique l’application de règles spécifiques, à caractère nominatif des actions, possibilité d’exclusion d’un associé par l’assemblée générale, faculté pour celui-ci de se retirer de la société à tout instant.
139Les sociétés d’investissements, dont l’objet est de gérer un porte feuille de valeurs mobilières composé de titres émanant de multiples sociétés en respectant le principe de division des risques, auraient pu également être retenues. Suivant leur importance et compte tenu de leur fonction dans l’économie, elles peuvent bénéficier de faveurs fiscales notables : l’exonération de l’impôt sur les sociétés dans la mesure où elles s’engagent à distribuer au titre de chaque exercice, la totalité de leur bénéfices. On peut rajouter également que l’Acte uniforme n’a pas introduit la société de coopérative (comme dans le projet de code de société de (l’UDEAC) son but est de mettre en œuvre tous les moyens propres à faciliter ou développer l’activité de ses membres à améliorer ou à accroître les résultats de cette activité.
140A l’instar du traité des Communautés Européennes, l’ohada devait réglementer les petites et moyennes entreprises (PME).
141Malgré ces quelques remarques, il faut noter que l’Acte uniforme a apporté quelques innovations au niveau des structures des sociétés. Ainsi, l’Acte uniforme a introduit dans le droit positif de la Zone Franc deux innovations. Il s’agit de la société unipersonnelle qu’elle revête la forme d’une SARL ou d’une SA, le groupement d’intérêt économique et les groupes de sociétés.
i) La société unipersonnelle
142Tenant compte des récentes modifications survenues dans le droit des pays du marché commun européen, l’Acte uniforme a consacré cette forme de société. L’article 309 alinéa 2 dispose que la SARL peut être constituée par une personne physique ou morale. L’une des grandes innovations de l’Acte uniforme est la création de cette forme de société.
143L’importance de cette innovation est de permettre au commerçant de limiter sa responsabilité, car dans le monde des affaires, il y a beaucoup de prête - noms. Il convient ainsi de répondre à l’insistante aspiration du monde des affaires vers l’entreprise à responsabilité limitée320. Dans le cadre du droit comparé, la loi allemande du 4 juillet 1980 a réglementé la société à responsabilité limitée, il en va de même au Royaume-Uni (one man limited company). La directive du 21 décembre 1989, en matière de société a consacré également la société à responsabilité limitée à une personne. Du point de vue juridique, l’EURL offre plusieurs avantages. En l’instituant, le législateur communautaire a certainement voulu limiter la responsabilité de l’entrepreneur et assurer une meilleure gestion des entreprises artisanales et commerciales, faciliter les cessions et transmissions d’entreprises et diminuer le recours aux sociétés fictives.
144L’autre innovation méritant d’être soulignée est la S.A unipersonnelle, car l’article 385 alinéa 2 de l’Acte uniforme dispose, que la société anonyme peut ne comprendre qu’un seul actionnaire. La S.A unipersonnelle est réglementée par les articles 558 et 559 de l’Acte uniforme, les décisions qui doivent être prises en assemblée sont prises par l’actionnaire unique. La situation la plus fréquente est celle de l’association de deux personnes qui désirent réellement créer ensemble une entreprise individuelle qui existe déjà et dont elle est propriétaire. Il est courant que la société vive avec simplement un ou plusieurs actionnaires réels. C’est certainement pour cela que l’Acte uniforme admet la S.A unipersonnelle. La Commission des communautés européennes recommande pour sa part, la reconnaissance de la SA unipersonnelle dans les États membres de manière à faciliter la transmission des entreprises. La constitution de la SA à une seule personne exige que l’on prévoie pour cette société un mode d’administration et de direction simplifiée, sans Conseil d’Administration. C’est pour cela, qu’il a été prévu dans l’Acte uniforme l’aménagement de l’administration et la direction de la société par un administrateur321 général. Pour une bonne gestion adaptée à leurs besoins réels les PME constituées sous forme de SA et qui ne comportent que peu d’actionnaires peuvent être dirigées par un administrateur général, ce qui lui éviterait un Conseil d’Administration.
145La société anonyme unipersonnelle présente des avantages certains. Au lieu de faire un appel public à l’épargne, la S.A unipersonnelle peut ouvrir largement son capital en émettant des valeurs mobilières telles que les actions. Au niveau international on peut remarquer la tendance à la consécration de cette forme de société que ce soit en Allemagne, au Danemark, en Espagne, en Italie322. En ce qui concerne les PME qui doivent se transformer en SA. Unipersonnelle, la Commission de la communauté européenne a édicté une recommandation332321. En plus de la société unipersonnelle l’Acte uniforme a consacré également le groupement d’intérêt économique et les groupes de sociétés.
ii) Le groupement d’intérêt économique
146L’Acte uniforme consacre une nouvelle définition de ces types de sociétés. En effet, selon l’article 4. « La société commerciale est créée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent par un contrat, d’affecter à une activité les besoins numéraires ou de natures, dans le but de partager le bénéfice ou de profiter de l’économie qui pourrait en résulter les sociétés s’engagent à contribuer aux pertes et profits ». Cette définition est la bienvenue, car dans la plupart des pays de l’UDEAC, c’est la définition issue de l’article 1832 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la réforme de 1985, qui était applicable. Il faut noter que le Sénégal a réglementé le GIE depuis 1985324. Désormais l’économie est au centre des GIE et des sociétés.
147En France, le groupement d’intérêt économique GIE a été institué par l’ordonnance n° 67.821 du 23 Septembre 1967, complété par un décret du 2 février 1968. « Cette forme de personne morale est une innovation par rapport aux sociétés, dont l’existence est immatérielle et aux sociétés qui sont régies par une loi du 1er juillet 1901, cette création paraît être une originalité du droit français »325. Dans le cadre du droit communautaire européen, le groupement d’intérêt économique européen, GIE a été institué326, ce sont les premières personnes morales de droit européen, elles facilitent les collaborations souples entre personnes de nationalité différente. Dans le contexte africain, plusieurs techniques répondent à la recherche de bénéfice ou au besoin de faire des économies.
148La nouvelle définition des sociétés a permis de retenir les GIE. Aussi, comme le soutient Paul Gérard Pougoué, elle permet de donner un cadre juridique aux tontines qui sont en faite des GIE ayant pour but de développer l’activité économique de leurs membres. Dans le contexte européen, trois étapes ont été franchies dans le cadre de la problématique de l’activité économique ou de la recherche.327 Dans le contexte africain, le GIE est très important pour les opérateurs économiques de la sous région, surtout quant à la facilité de sa constitution. Mais le législateur communautaire devait être plus ambitieux et dépasser la distinction surannée société et association. Il faut noter que l’Acte uniforme a également réglementé les groupes de sociétés.
iii) Les groupes de sociétés
149L’Acte uniforme relatif au droit des sociétés et du GIE n’a consacré aux groupes de société que les articles 173, 174 et 175.
150« Un groupe de sociétés est l’ensemble formé par les sociétés unies entre elles par des liens divers qui permettent à l’une de contrôler les autres328.
151Il faut noter que cette réglementation de l’Acte uniforme est avancée quand on sait que dans plusieurs pays telle que la France, on ne l’a pas réglementé tandis que l’Allemagne l’a fait. Il faut également noter que les groupes de sociétés n’ont pas de personnalité morale « ce qui fait dire à François De Fontaine que « les groupes de sociétés sont une unité économique entourée d’une nébuleuse juridique ». Ainsi chaque société du groupe conserve sa personnalité morale propre, c’est la consécration de l’autonomie des personnes morales au sein des groupes. La Cour de Cassation Française a souvent affirmé le principe de l’indépendance des personnes morales, au sein du groupe de société329.
152Devant la tendance mondiale, et la compétitivité internationale on devrait s’interroger sur l’organisation juridique pour l’entreprise du 21ème siècle.
153Dans le contexte des pays membres de l’ohada, la réglementation des groupes de sociétés est indispensable car dans la sous région, et dans certains États, compte tenu de l’étroitesse de leurs marchés, il est important que les groupes de sociétés puissent être constitués. Ainsi comme l’écrit Yves Guyon, « les filiales sont des instruments commodes pour faire, à l’aide de simples cessions d’actions, des opérations de partage d’influence ou de transfert d’une branche d’activités à des groupes voisins ou concurrents. Chaque filiale n’est donc pas forcément spécialisée dans un secteur économique. Aussi, la configuration des groupes est-elle mouvementée. Dans les affaires familiales, il est assez fréquent d’adopter une structure dualiste : les immeubles appartiennent à une société civile, le fonds de commerce à une société commerciale. Ce montage présente l’avantage de la souplesse, car les parts ou actions des deux sociétés n’appartiennent pas forcément dans la même proportion aux mêmes personnes »330.
154Les groupes de sociétés ont certains avantages, mais aussi des inconvénients. Elles facilitent la gestion en déconcentrant les organes de gestion tout en centralisant les objectifs. Elles permettent l’obtention de certaines avantages fiscaux, par exemple en essayant de faire obtenir les bénéfices les plus importants du groupe par les sociétés les moins lourdement imposées , le cas échéant recourir à la création de filiales en territoires étrangers dans le cadre de paradis fiscaux. Les groupes de sociétés permettent un certain partage de risques dans la mesure où chaque société du groupe à sa propre personnalité juridique et donc son propre passif, qui ne répond pas des dettes des autres. Elles permettent la mise en place de structures simples et adaptables.
155Quant aux inconvénients elles sont aussi nombreuses, mais on peut en citer quelques-unes. L’empire du poids économique peut être un danger réel. Les créanciers peuvent être paralysés en cas d’insuffisance d’actif d’une filiale alors qu’ils pensaient contracter avec un groupe puissant. Les salariés peuvent également être paralysés dans leur droit en se voyant employés dans d’autres filiales avec des conventions moins avantageuses. Quant à l’État il peut y perdre par le jeux des évasions fiscales.
156L’étude des structures des sociétés nous conduit à l’analyse de leur fonctionnement.
b) Le fonctionnement des sociétés
157La rationalisation de la gestion est l’un des enjeux fondamentaux de l’Acte uniforme. En tant que contrat la société commerciale est soumise, pour sa constitution, à des conditions de fond et de forme. C’est la nullité qui sanctionne l’inobservation des conditions de formation des contrats de droit commun. Cette sanction est en principe prononcée de manière automatique selon Jean Carbonier « que ces conditions soient réunies, le contrat est formé, qu’elles manquent, il est nul ».
158En ce qui concerne le contrat de société, non seulement les causes de nullité sont spécifiées par l’Acte uniforme331, mais le régime de l’action en nullité est très réductif. En effet, l’Acte uniforme prévoit en son article 246 que l’action en nullité est éteinte lorsque la cause de nullité a cessé d’exister le jour où le tribunal statue sur le fond en première instance, sauf si cette nullité est fondée sur le caractère illicite de l’objet social. C’est une exception au principe selon lequel « le tribunal se place au jour de l’assignation pour apprécier les éléments du litige. Il s’y ajoute que pour favoriser la régularisation, l’article 247 de l’Acte uniforme permet au tribunal saisi d’une action en nullité de fixer, même d’office, un délai pour couvrir la nullité. Il ne peut pas prononcer la nullité moins de deux mois après la date de l’exploit introductif d’instance. »
159L’adoption du régime de la nullité traduit la volonté du législateur de protéger les tiers qui ont contracté de bonne foi avec une société qu’il croyait valable et de préserver cet outil de développement économique qu’est la société, mais il faut noter également la volonté du législateur de circonscrire l’intervention du juge dans la vie des sociétés. Il faut dire qu’il ne pouvait en être autrement, puisque les rapports entre associées ou actionnaires reposent sur un contrat qu’engendre une personne morale. La société elle-même noue des relations avec les tiers par le biais des contrats. Or en matière contractuelle, l’autonomie de la volonté a une forte présence qui diminue d’autant les possibilités d’immixtion du juge. Mais il y’a simplement diminution et non interdiction puisque l'objectif global est de faire des sociétés commerciales des instruments efficaces et fiables du développement économique des pays de l’espace ohada, et rend souhaitable l’intervention du juge.
160Cette possibilité d’intervention permet en effet au juge de prendre des mesures tendant à assurer le fonctionnement des sociétés commerciales ou de mettre fin à la vie des sociétés qui ne présentent plus de garanties de fiabilités ou qui prennent trop d’écarts par rapport aux principes fixés par les textes en vigueur. Ainsi l’intervention du juge peut se faire de plusieurs manières.
161Le juge peut intervenir dans la vie des sociétés pour combler la carence ou le refus des organes. C’est le domaine d’intervention le plus large, car plusieurs dispositions de l’Acte uniforme donnent compétence au président de la juridiction compétente (à bref délais) pour désigner à la demande de tout associé un mandat chargé de provoquer des consultations entre associés. A ce niveau, il faut relever que l’intervention du juge devait constituer à une méthode de prévention des abus par l’action mise souvent à la disposition des minoritaires qui peuvent par exemple demander la convocation d’une assemblée générale.332 L’expérience a montré cependant333, que le droit de provoquer la convocation n’est pas un moyen de protéger les minoritaires, car si ceux-ci sont véritablement minoritaires, la réunion d’une assemblée générale ne servira à rien. Le droit de convocation est au contraire, selon lui le moyen pour les nouveaux majoritaires c’est-à-dire pour ceux qui viennent de perdre le contrôle de la société, de concrétiser leur pouvoir en révoquant les dirigeants.
162Il peut intervenir aussi afin d’accomplir une formalité334, de donner une autorisation ou accorder une dispense. Son intervention peut porter sur la prolongation de délai ou ordonner une régularisation ou authentifier un acte. Le plus souvent, le juge intervient pour exercer un pouvoir de dissolution de liquidation d’annulation ou de révocation mais également pour mettre fin ou éviter des blocages. Comme on le voit, l’appui du juge en qualité d’appui du fonctionnement des sociétés commerciales a été bien réglementé. Ainsi la désignation d’un administrateur provisoire est nécessaire en cas de conflit entre les gérants d’une société ou les administrateurs d’une société anonyme. Les juges peuvent désigner les organes dirigeants, par la désignation d’un tiers. Il s’agit là d’une manifestation éloquente de l’intervention du juge dans la vie des sociétés. En effet, c’est une mesure grave consistant à écarter les dirigeants. Plusieurs dispositions de l’Acte uniforme prévoient également la désignation d’un mandataire, chaque fois que les associés ne parviennent pas à s’entende pour désigner soit parmi les associés, soit un tiers pour l’accomplissement d’un acte prévu par la loi335.
163Le recours à l’expertise de gestion est également une prérogative conférée au juge et lui permet face à une question technique dépassant le cadre strictement juridique, de désigner un homme chargé de lui donner des renseignements ordonnés. De manière générale, le recours à l’expertise est requis chaque fois que le juge est confronté à une question technique qui dépasse sa compétence judiciaire. En cas de révocation du gérant, l’article 280 prévoit que celui-ci peut se retirer de la société en demandant le remboursement de ses droits sociaux dont la valeur est fixée à défaut d’accord entre les parties, par un expert désigné par le président de la juridiction compétente à brefs délais. Il est indéniable que le législateur communautaire devrait permettre au délégué du personnel de participer à l’expertise de gestion. Ce droit devrait également être ouverte à la Commission bancaire de l’uemoa. Le juge peut également intervenir à l’égard des dirigeants des entreprises. Ainsi la responsabilité civile des dirigeants sociaux, est du ressort du juge, il en va de même de leur responsabilité dans le cadre de la gestion courante, en cas d’abus de bénéfices sociaux et en cas de contrôle. Après l’analyse de l’uniformisation de la réglementation des sociétés, voyons à présent celle de l’activité commerciale.
2. L’uniformisation de la réglementation de l’activité commerciale
164La réglementation de l’activité commerciale est régie par l’Acte uniforme sur le droit commercial général, adopté par le Conseil des Ministres du 17 avril 1957 et entrée en vigueur le 11 janvier 1998. La pluralité et la diversité des systèmes juridiques nationaux africains constituaient sans nul doute un véritable obstacle à la « libre circulation » des échanges internes et internationaux. La législation applicable au Droit Commercial général était marquée par deux étapes avant et après les indépendances. La lecture de l’Acte uniforme sur le droit commercial général révèle un certain nombre d’innovations, ainsi on note un effort de simplification et de modernisation par rapport au droit antérieur. Pour illustrer ces innovations, nous traiterons du statut du commerçant personne physique, des intermédiaires du commerce et de la vente internationale de marchandises, etc.
a) Le statut du commerçant
165En ce qui concerne la vie commerciale, il est important d’analyser les règles qui régissent l’accès à la profession commerciale et son exercice. A la lecture de l’article 2, de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général, l’impression qui se dégage est qu’il suffit d’accomplir les actes de commerce pour devenir commerçant, mais l’examen de l’article 6 et suivants démontre le contraire. En effet, en plus des conditions liées à l’activité, il y a celles liées à la personne. En ce qui concerne celles relatives à la personne, elles sont de deux ordres : la protection de ceux qui veulent devenir commerçants et l’assainissement des professions commerciales. L’inexpérience et la défaillance des facultés mentales de certaines personnes exigent leur protection dans le cadre des activités commerciales.
166C’est pour pallier cette situation que les rédacteurs de l’Acte uniforme ont exclu le mineur ordinaire de l’activité commerciale, mais cette exclusion ne concerne pas le mineur émancipé336.
167L’Acte uniforme n’a pas clarifié la situation du majeur incapable, contrairement au droit Sénégalais qui prévoit trois régimes pour celui-ci. Le régime de la protection de justice, le régime de la curatelle et celui de la tutelle.
168En ce qui concerne la femme l’Acte uniforme, n’a prévu aucune disposition pour sa situation, la raison est que « auparavant seule l’incapacité de la femme était prise en compte pour savoir si elle pouvait exercer un commerce indépendant en association ou sous la direction de son mari »337.
169Pour l’assainissement de la profession commerciale, il existe deux conditions négatives : ne pas faire l’objet d’interdiction (article 10), et ne pas exercer une profession incompatible avec la profession commerciale (article 9).
170Quant aux conditions liées à l’activité, l’Acte uniforme dans son article 2 reprend la définition classique, et considère comme commerçant celui qui accomplit les actes de commerce et en fait sa profession habituelle. « En effet, l’Acte uniforme reprend, une définition qui existait dans les législations de la plupart des pays d’Afrique noire francophone exceptés le Gabon, le Mali et le Tchad ; et pour le Burkina-Faso code de commerce (français) de 1807 et ordonnance n° 81-26 du 26 Août 1981 ; pour le Mali code de commerce (loi n° 86-13 du 21 mars 1986) ; pour le Tchad code de commerce de 1807 et ordonnance n° 6 du 12 Avril 1984 ; pour le Sénégal code de commerce de 1807 et code des obligations civiles et commerciales (loi n° 63-62 du 10 juillet 1963 et loi n° 66-70 du 13 juillet 1966) ».338
171Dans l’Acte uniforme sur le droit commercial général, il n’a pas été retenu l’idée de substituer à la notion d’actes de commerce, la notion d’actes économiques. Durant les travaux préparatoires, la question avait été soulevée en vue d’abandonner la définition classique et de lui préférer la notion d’activité économique, qui à notre avis serait meilleure, car avec la mondialisation, la transformation de plusieurs activités est devenue une réalité « En effet, la notion d’activité économique vise tous les actes professionnels, y compris ceux des artisans, des agriculteurs et les professions libérales à l’exclusion seulement des actes intéressés »339. L’accès à la profession commerciale est subordonné à l’accomplissement d’actes de commerce. Après avoir défini le commerçant par l’exercice de la profession, on devait s’attendre à la définition de l’acte de commerce, mais en réalité l’acte n’a fait qu’énumérer. Plutôt, il s’est agi d’une liste des actes de commerce dressée par l’article 3 et 4. Le premier vise les actes de commerce par nature340 et le deuxième vise les actes de commerce par la forme341.
172Cependant, il y a eu un accroissement des opérations qui constituent des actes de commerce par nature. Il faut noter que l’énumération faite par l’article 3 de l’Acte uniforme est plus complète que celle énoncée à l’article 632 du Code de Commerce. On peut noter quelques innovations, car l’article 4 vise limitativement quelques actes de commerce par la forme que sont la lettre de change, le billet à ordre et le warrant. La conséquence en est que l’Acte uniforme consacre des solutions nettes et claires sur les points où l’article 632 du code de commerce reste flou. En retenant le billet à ordre ou le warrant comme acte de commerce, le législateur communautaire a été plus clair que le législateur Français, car les solutions retenues par le droit français manquent d’homogénéité, le warrant ou le billet à ordre peut être civil ou commercial342.
173Il est important de distinguer les actes de commerce par la forme et les actes de commerce par nature, car seule l’accomplissement de cette dernière catégorie d’actes, peut conférer la qualité de commerçant. C’est pourquoi il faut tenir compte des modes d’accomplissement des actes de commerce. Un simple particulier peut accomplir occasionnellement des actes de commerce : il n’en acquiert pas pour autant la qualité de commerçant. L’article 2 vise la profession habituelle, il y a une redondance, la profession implique l’habitude de certains actes. Mais ceci n’est pas vrai, on peut accomplir les actes habituellement sans les faire professionnellement343. En utilisant cette expression les rédacteurs de l’Acte uniforme veulent simplement dire que l’accomplissement d’acte de commerce ne confère la qualité de commerçant que si l’intéressé en tire des revenus.
174Il faut également noter que l’accomplissement des actes de commerce doit être indépendant, même si l’Acte uniforme ne le précise pas. Quant à l’exercice de la profession commerciale, il n’est pas possible d’affirmer de manière absolue que le droit commercial est devenu le droit des commerçants, on est obligé d’admettre qu’il existe un corps de sa règle applicable aux seuls commerçants. Cet ensemble de textes, donne aux commerçants un statut particulier. Cette particularité apparaît lorsqu’on examine la condition et les biens du commerçant.
175En ce qui concerne la facilité d’exercice de l’activité commerciale, les commerçants ont la possibilité de prouver par tous moyens344 les opérations conclues avec leurs pères. L’Acte uniforme reprend un vieil adage selon lequel, en matière commerciale la preuve est libre. L’Acte uniforme s’est inspiré de l’article 109 du code de commerce français aux termes duquel « à l’égard des commerçants, les actes de commerce peuvent se prouver par tous moyens ». Il faut remarquer que l’Acte uniforme consacre la liberté totale de mode de preuve en matière commerciale, contrairement au code commerce qui réserve cette liberté de mode de preuve en l’absence de dispositions législatives contraires. Quant au droit reconnu aux commerçants pour assurer leur protection, ils doivent être protégés contre leurs concurrents, qui tentent de leur prendre leur clientèle en utilisant les méthodes déloyales et leur bailleur. L’Acte uniforme ne comporte aucune disposition destinée à protéger les commerçants contre ces concurrents. Il existe cependant une série de textes ayant pour but de protéger les commerçants contre leur bailleur.
176Les articles 91 et 102 de l’Acte uniforme sur le droit commercial général consacrent au profit des commerçants le droit au renouvellement du bail dont il faut préciser les conditions et la mise en œuvre. L’article 69 de l’Acte uniforme réglemente les conditions liées aux locaux, l’alinéa 1 de cet article vise les lieux clos et sont alors exclues les installations mobiles tels que les kiosques ou baraques345 etc.
177Quant aux locaux accessoires prévus à l’alinéa 2, il faut noter que le libellé de l’article 584 alinéa 2 COCC du Sénégal paraît meilleur, que la réglementation Française en la matière qui est différente346 ..
178S’agissant des terrains nus, l’Acte uniforme a maintenu certains éléments qui figurent dans la loi du 30 juin 1962 relatives, aux beaux commerciaux. L'article 584 alinéa 3 du code des obligations civiles et commerciales du Sénégal peut amener des interprétations ou des confusions pour la jurisprudence. La législation Française347 a elle aussi réglé cette situation.
179Il faut noter également que l’Acte uniforme a apporté des innovations importantes quant à la durée du bail, qui dorénavant a un même régime.
180Quant à la conclusion du bail, le statut des baux commerciaux a été étendu à des personnes non commerçantes, aux artisans et aux professionnels. Il faut noter également que l’article 71 énumère ceux permettant de distinguer le bail commercial. Ce qui à l’analyse permet d’exclure d’autres contrats commerciaux348. En ce qui concerne la nature de la convention écrite ou verbale, et sa preuve, l’Acte uniforme s’est beaucoup inspiré de la jurisprudence française349.
181Pour les obligations des bailleurs350, l’alinéa 1 reprend, le texte de l’article 547 du COCC. En la matière le droit Français définit l’obligation de délivrance par l’article 1720 du Code Civil. L’alinéa 2 pose le problème de l’obligation de la preuve de délivrance. La problématique de la réparation par le bailleur ne manquera pas de se poser, car investir est une chose, mais assurer l’entretien des ouvrages en est une autre. L’article 74 dispose que l’entretien incombe au bailleur surtout pour les gros œuvres, contrairement au droit antérieur Sénégalais (article 548 COCC).
182Car il serait illusoire de mettre toutes les répartitions à la charge du bailleur351. L’article 80 et suivants de l’Acte uniforme réglementent les obligations du preneur. Quant au loyer, il est donné aux parties de le fixer librement, mais l’Acte uniforme impose une possibilité de révision tous les trois ans. Nous pensons que cela est une aberration car les parties doivent être libres de réviser leur contrat comme elles le souhaitent. Le régime de la cession du bail prévu par l’Acte uniforme est plus strict que celui prévu par le droit français352. Les conditions du renouvellement du bail sont régies par l’article 91 de l’Acte uniforme.
183En ce qui concerne la résiliation, l’Acte uniforme ne prévoit pas expressément le recours au juge des référés, mais il protège suffisamment les locataires en ce qu’il impose que la résiliation soit prononcée par une décision de justice. Il faut noter également que le commerçant est soumis aux obligations comptables qui sont prévues par les articles 13 et 17 de l’Acte uniforme et aux obligations d’immatriculation au registre de commerce.
184C’est l’article 14 qui fixe les règles de tenue des livres, mais ce texte ne vise que le journal et le livre d’inventaire qui doivent être cotés et paraphés par le Président de la juridiction compétente ou le juge délégué à cet effet et doivent être tenus sans altération et mentionner le numéro d’immatriculation au registre de commerce et du crédit immobilier. Les rédacteurs de l’Acte uniforme n’ont retenu qu’une seule technique d’utilisation des livres en justice : la représentation353. Il y a en plus de l’obligation de tenue des livres, l’obligation d’établir des documents de synthèse, la lecture de l’article 17 semble inspirer qu’il s’agit de « toute personne morale » à l’exclusion des personnes physiques, il faut noter que cette position est erronée pour plusieurs raisons354. Il est important de noter que l’Acte uniforme a exclu les entreprises soumis à la comptabilité publique355. Il est également important de souligner que les livres comptables ont une force probante.
185Mais elle n’est pas uniforme, elle varie en fonction des personnes en présence pour le régime des preuves, il faut noter que les livres de commerce peuvent valoir de preuve en faveur de ceux qui les tiennent, mais seulement entre les commerçants et pour les effets de commerce.356 Sur cette question dans le cadre de la jurisprudence française, le juge apprécie souverainement357 la preuve. Il est important également de noter le silence de l’Acte uniforme sur la communication, dans l’ancienne législation elle ne pouvait se faire que dans certaines affaires du fait de son caractère grave.
186Pour ce qui concerne l’obligation de se faire enregistrer au registre du commerce, il faut noter que c’est l’ancienne loi française du 18 mars 1919 qui constitue le cadre juridique applicable au registre de commerce dans les pays de la Zone Franc sauf au Gabon, en Guinée, au Mali, au Sénégal et au Togo. Il est important de noter qu’en la matière l’Acte uniforme a introduit des innovations importantes, par rapport au rôle qui était antérieurement dévolu au registre de commerce. Le registre de commerce et du crédit mobilier « RCCM » a pour objet de recevoir l’immatriculation des personnes et l’inscription des sûretés mobilières. L’Acte uniforme a apporté une nouvelle réglementation dans les législations africaines à savoir l’inscription des investissements, des actions et des parts sociales, des clauses de réserves de propriétés et des contrats de crédits de baux. Dorénavant l’Acte uniforme permet une plus grande information sur la situation juridique et financière des partenaires commerciaux, ainsi que sur la garantie juridique.
187Pour une meilleure gestion du registre de commerce et du crédit mobilier, l’Acte uniforme a prévu trois documents : le registre tenu au greffe de la juridiction compétente est surveillé par le Président ou le juge désigné à cet effet ; le fichier national tenu dans chaque État partie et le fichier régional qui est tenu par la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage et qui centralise les renseignements consignés dans chaque fichier national. Il est à souligner que l’article 20 de l’Acte uniforme reprend en substance les dispositions du décret Sénégalais n° 76-780 du 23 juillet 1976, qui s’était inspiré lui aussi de l’article 4 du décret français du 30 mai 1984. Contrairement à l’article 3 du décret Sénégalais qui exige trois exemplaires, l’article 22 de l’Acte uniforme exige lui quatre exemplaires, la justification de ce quatrième exemplaire peut être trouvé dans la création d’un fichier régional. Quant au fonctionnement du registre de commerce, il convient de voir l’immatriculation et les opérations postérieures, ainsi que les conditions de l’immatriculation sont déterminées par les articles 25 et 26 de l’Acte uniforme.
188Conformément à l’article 5 et 6 du décret Sénégalais du 23 juillet 1976, les mentions exigées par l’Acte uniforme sont d’une grande utilité, car la publicité de l’état patrimonial du commerçant est un instrument de renseignement pour les tiers. Quant aux sociétés et autres personnes morales le régime de leur immatriculation est précisé par les articles 27 et 28 de l’Acte uniforme. Il est bon de souligner que l’ensemble des mentions exigées par ces articles sont prévus par le décret Sénégalais (article 7). Ainsi comme on le voit, il s’agit de personnes physiques ou morales ayant la qualité de commerçant, ainsi que les succursales de sociétés étrangères. A l’exception du GIE qui peut avoir un objet civil, toute personne immatriculée au RCCM est présumée avoir la qualité de commerçant. Il est à noter que l’immatriculation a un caractère personnel et que plusieurs effets peuvent y être attachés.
189En ce qui concerne les biens du commerçant, les rédacteurs de l’Acte uniforme ont sacrifié le critère traditionnel accordé aux biens car dans l’Acte uniforme, il n’est question que du fonds de commerce. Les articles 103 et suivants fixent les règles applicables aux éléments, à l’exploitation et à la cession du fonds. Par rapport aux éléments du fonds de commerce, les rédacteurs de l’Acte uniforme ont innové en donnant une définition du fonds de commerce dans l’article 103 : « Le fonds de commerce est constitué par un ensemble de moyens permettant à un commerçant d’attirer et de conserver une clientèle ». Cette entreprise n’est cependant pas sans danger, compte tenu des risques de contradiction. Cette contradiction apparaît d’ailleurs lorsqu’on combine cet article 103 et avec l’article 104. Alors que l’article 103 semble faire de la clientèle, un élément extérieur au fonds de commerce, l’article 104 en fait un élément obligatoire au même titre que l’enseigne ou le nom commercial, elle traduit une certaine hésitation des rédacteurs de l’Acte uniforme au moment de faire le choix. A côté des éléments obligatoires, il y a des éléments facultatifs énumérés par l’article 105. L’Acte uniforme a innové en ce qui concerne l’exploitation et la cession du fonds.
190Après l’analyse du statut du commerçant, voyons à présent celui des intermédiaires de commerce.
b) Les intermédiaires du commerce
191Les rédacteurs de l’Acte uniforme sur le droit commercial général ont consacré dans le livre IV, une série de dispositions relatives à une catégorie particulière de commerçants, les intermédiaires de commerce qui interviennent dans les relations commerciales pour faciliter la circulation des produits. Il convient de noter que cette réglementation n’est pas nouvelle, car le code des obligations civiles et commerciales du Sénégal avait prévu dans son livre deuxième chapitre II la réglementation de ces intermédiaires. Il est important de noter que la comparaison entre les deux réglementations, l’article 473 du Code et l’article 137 de l’Acte uniforme, révèle des divergences profondes, qui bouleversent les habitudes.
192Il résulte donc de la combinaison de ces deux textes que le statut d’intermédiaire de commerce ne peut être reconnu à celui qui intervient dans la conclusion d’un contrat n’ayant pas pour objet la vente de marchandises entre commerçants. Cette différence d’approche ne peut pas avoir de répercussions sur le régime juridique applicable aux intermédiaires de commerce. C’est ce qui explique les importantes innovations introduites par les rédacteurs de l’Acte uniforme, mais aussi l’adoption de règles générales qui sont applicables à tous les intermédiaires et que l’on pourrait qualifier de droit commun de l’intermédiaire commercial.
193Les rédacteurs de l’Acte uniforme ont véritablement innové en regroupant, les règles communes aux intermédiaires de commerce. Ces règles concernent l’accès à la profession, l’exercice de l’activité et la fin du mandat. Ils ont introduit d’importantes innovations dans la réglementation spécifique applicable aux différents intermédiaires.
i) Le Commissionnaire
194L’article 160 de l’Acte uniforme donne la définition du Commissionnaire, mais il faut noter que ce texte est légèrement différent de l’article 478 du COCC- qui avait le même objet.
195Alors que l’article 479 du COCC visait tous ceux qui « font profession de négocier en leur propre nom des opérations commerciales pour le compte d’autrui », l’article 160 de l’Acte uniforme ne semble reconnaître le statut de commissionnaire qu’à ceux qui se chargent d’opérer en leur propre nom, mais pour le compte d’autrui, la vente ou l’achat de marchandises. Le texte doit être complété par les articles 172 et 174 qui font référence à d’autres types de commissionnaires qui interviennent en dehors de la conclusion d’opérations d’achat ou de vente tels que les commissionnaires expéditeurs, les commissionnaires agréés en douanes. Le commissionnaire, au sens de l’article 160, est tenu de certaines obligations qui étaient ignorées du COCC.
196Il doit exécuter les opérations conformément aux directives du commanditaire. Cette obligation était prévue dans le COCC, mais pas dans les mêmes termes que l’Acte uniforme qui permet au commissionnaire de s’écarter des directives dans certains cas. Le contrat de commission se distingue du mandat en ce sens que le commissionnaire agit en son nom propre ou sous un nom social qui n’est pas celui de son commettant358. Contrairement aux courtiers, aux agents commerciaux, les commissionnaires agissent pour le compte d’autrui, mais en leur propre nom.
ii) Le Courtier
197C’est l’intermédiaire qui fait profession de mettre en rapport des personnes, en vue de faciliter ou de faire aboutir la conclusion de contrats. A la différence du COCC, l’Acte uniforme ignore la catégorie des « courtiers responsables ».
198Le courtier qui doit demeurer indépendant des parties, ne peut personnellement intervenir dans une transaction sans l’accord des parties, ni réaliser des opérations de commerce directement ou indirectement pour son propre compte. Selon l’article 139 de l’Acte uniforme, la profession de courtier est, elle même, une profession commerciale. L’article 632 alinéa 7 du code de commerce a retenu la même définition. Les courtiers sont alors des commerçants, même s’ils interviennent pour la conclusion d’opérations civiles359. Dans le cadre de ces obligations, le courtier est responsable de ses fausses déclarations360 (article 178 alinéa 2). Comparé au droit Français, le courtier doit garantir à son donneur d’ordre l’identité et même, selon certains auteurs arrêtés, la qualité de cocontractants361
iii) Les agents commerciaux
199Contrairement au code des obligations civiles et commerciales qui en fait un salarié, l’Acte uniforme le considère comme un mandataire qui, à titre de profession habituelle, négocie et éventuellement conclut des contrats de vente, de location ou de prestation de services au nom et pour le compte de son mandat ou d’agents commerciaux sans être lié par un contrat de travail.
200L’Acte uniforme a minutieusement définie la notion d’agent commercial. A la différence de URP, les agents commerciaux sont des auxiliaires indépendants qui négocient et concluent des contrats pour le compte d’un ou plusieurs mandants362, de par leur autonomie et la faculté qu’ils conçoivent de faire des actes de commerce363. Le contrat d’agence n’est pas un contrat de travail, mais un mandat364. Contrairement à la jurisprudence française qui refuse aux agents commerciaux la qualité de commerçant, l’Acte uniforme en son article 3 qualifie les opérations des intermédiaires de commerce d’acte de commerce. L’article 185 de l’Acte uniforme a réglementé de manière minutieuse les rapports entre l’agent commercial et son mandat.
201Le mandat d’intérêt commun est consenti dans le double intérêt du mandat et du mandataire365. Il faut noter que l’Acte uniforme a généralisé le droit à indemnité et exprime ainsi de façon complète et cohérente le concept de mandat d’intérêt commun. Il a également réglementé la vente commerciale.
c) La vente commerciale
202La vente commerciale est régie par les articles 202 à 289 de l’Acte uniforme. Il faut noter qu’aucun des États-parties au traité n’avait signé la Convention Internationale de Vienne du 11 Avril 1980. Par ailleurs, il n’existait pas de réglementation en matière de vente commerciale. Seul le Sénégal, dans son décret du 7 décembre 1970, avait édicté une réglementation des contrats d’exclusivité de vente ou d’achat. La particularité de cet Acte uniforme est qu’il se démarque de la convention de Vienne, car le nouveau droit de la vente s’applique obligatoirement dans tous les États-parties, alors que dans la Convention de Vienne la liberté est laissée aux parties d’exclure l’application de la Convention de Vienne selon l’article 6. Ainsi les caractères supplétifs et impératifs s’opposent dans les deux textes.
203Il faut noter également que l’Acte uniforme ne s’applique qu’aux opérations de vente internationale de marchandises, excluant les autres catégories de vente. L’intérêt de la réglementation de l’Acte uniforme se situe d’une part au caractère obligatoire, qui doit favoriser les échanges commerciaux tant entre les membres de l’ohada qu’avec d’autres opérateurs économiques extérieurs qui craignaient les dispositions législatives et, d’autre part, du fait que de nombreux États n’avaient pas ratifié la Convention de Vienne. L’innovation essentielle de l’Acte uniforme est d’introduire dans le droit positif des États parties des dispositions largement inspirées de la convention de Vienne du 11 avril 1980, aujourd’hui ratifiée par la plupart des grands pays opérateurs du commerce international.
204Par ailleurs l’Acte uniforme prévoit également, dans l’esprit très proche de la réalité économique africaine, des solutions relatives à diverses situations et opérations caractéristiques de ce domaine, le transfert de propriété, le transfert de risque ou la prescription.
205L’instauration d’une telle réglementation marque un progrès d’autant plus remarquable que le texte s’applique obligatoirement et uniformément dans toute la zone géographique que recouvre le traité. Afin d’éviter des conflits entre les lois nationales, l’Acte uniforme exclut de son domaine certains biens pouvant être qualifiés de marchandises, mais également la vente au consommateur, c’est-à-dire la vente de marchandises achetées pour un usage personnel, familial ou domestique. Elle ne régit donc que les ventes qui s’inscrivent dans le cadre d’une activité professionnelle. Les ventes portant sur les effets de commerces sont également exclues du domaine de l’Acte uniforme. Il faut noter qu’il ne faut pas perdre de vue que c’est la seule législation à s’appliquer à la vente de marchandises.
206L’article 205 prévoit aussi l’applicabilité des règles de droit commun en la matière. Toutefois s’il y a contrariété entre les dispositions de l’Acte uniforme et celles des législations nationales, c’est le droit uniforme qui l’emportera.
207Quant à la formation du contrat, il faut noter que toute proposition de conclure un contrat adressé à une ou plusieurs personnes ne constitue pas uniquement une offre366. Certaines conditions définies par l’article 210 doivent être remplies pour qu’une proposition ait la valeur juridique d’une offre. Il faut noter une similitude entre l’article 210 de l’Acte uniforme et l’article 14 de la Convention de Vienne, la révocabilité est régie par l’article 211 de l’Acte uniforme367, les obligations des parties sont régies par les articles 219 à 223, l’obligation de livraison des marchandises a été préférée à celle de délivrance, commune en droit français368.
208Contrairement au COCC, qui ne comporte qu’une seule disposition consacrée au lieu de la délivrance (article 237), l’acte uniforme a réglementé de manière détaillée cette matière.
209Les sanctions de l’inexécution sont prévues aux articles 245 à 282 qui précisent les conditions dans lesquelles les parties non fautives peuvent obtenir du tribunal l’autorisation de différer l’exécution de ses propres obligations, ou la résolution du contrat, ainsi que les dommages et intérêts, hormis les cas d’exonération de responsabilité de l’autre partie au contrat. Le délai de prescription est de deux ans à partir de la date à laquelle l’action peut être exercée. Quant aux effets du contrat, ils portent essentiellement sur le transfert d’une partie des risques. En liant le transfert de propriété à la livraison de marchandise, l’Acte uniforme s’aligne sur le droit de la Convention de Vienne et se démarque de la législation des pays Africains et du droit français.
210L’analyse de l’uniformisation de la réglementation commerciale nous conduit à l’étude de la réglementation des sûretés.
3. L’uniformisation de la réglementation des sûretés
211L’Acte uniforme portant organisation des sûretés, adopté par le Conseil des Ministres du 17 avril 1997, est entré en vigueur le 1er janvier 1998. Hormis le Sénégal, aucun des États parties de l’ohada n’a réformé le droit des sûretés, ils appliquaient les dispositions du code civil français de 1804. Ainsi, les raisons de la réforme de ce droit se justifient par la vétusté et les lacunes qui affectent les textes antérieurs.
212Selon l’article 1er de l’Acte uniforme, « les sûretés sont des moyens accordés aux créanciers par la loi ou par la convention des parties pour garantir l’exécution des obligations du débiteur, quelque soit la nature juridique de celle-ci ». Cette définition de l’Acte uniforme relatif aux suretés met en relief la compréhension du législateur africain, que sans les sûretés, il n’y aura pas de crédit, et sans crédit, il n’y aura pas d’investissement. Le crédit est indispensable dans tous les rouages de la vie économique, de la production à la consommation, ce qui permet également aux investisseurs d’avoir des garanties. Le législateur de l’ohada dans l’Acte uniforme a apporté des innovations importantes. Mais, il faut noter que l’Acte uniforme a exclu de son domaine les sûretés propres au droit fluvial, maritime et aérien qui font l’objet de dispositions spéciales issues de conventions internationales.
213S’agissant du domaine ayant fait l’objet d’uniformisation pour l’ensemble des États-parties au traité, il faut noter : les sûretés personnelles, les sûretés réelles mobilières, les sûretés réelles immobilières et les privilèges généraux etc.
a) Les sûretés personnelles
214En ce qui concerne les sûretés personnelles, on peut noter qu’il existe deux types : le cautionnement et la lettre de garantie.
i) Le cautionnement
215Le cautionnement est régi dans l’Acte uniforme par les articles 3 à 27. « le cautionnement a subi des mutations profondes que l’Acte uniforme sur les sûretés a voulu prendre en compte369 ».
216Aux termes de l’article 3 de l’Acte uniforme « le cautionnement est un contrat par lequel la caution s’engage envers le créancier qui accepte, à exécuter l’obligation du débiteur, si celui-ci n’y satisfait pas lui-même. Cet engagement peut-être contracté sans ordre du débiteur et même à son insu ». Le cautionnement dont les règles n’ont pas été modifiées depuis 1804, contribue à apporter la lumière aux nombreuses réponses apportées par la jurisprudence et les doctrines depuis près de 200 ans aux problèmes majeurs posés par cette sûreté.
217Mais de l’analyse du régime, il en découle que les caractéristiques de l’Institution sont les mêmes qu’autrefois, mais, il faut noter que le cautionnement présente principalement trois caractères370. Il s’agit en plus du caractère accessoire, le caractère unilatéral et le caractère consensuel.
218Quant aux parties au contrat, le cautionnement trouve sa source dans le cautionnement qui unit le créancier à la caution. « La caution s’engage envers le créancier qui l’accepte ». Le débiteur n’est donc pas parti au contrat. Mais, il faut noter que le cautionnement est souscrit par la caution sur l’existence du débiteur. Cependant, c’est un engagement unilatéral, et l’acceptation du créancier est nécessaire371.
219S’agissant de la caution, il faut noter que l’Acte uniforme a prévu deux aspects qui attestent la profondeur de l’engagement de la caution.
220Le premier signe a pour support un souci de transparence, qui se manifeste à travers l’article 4 qui « dispose, que le cautionnement ne se présume pas. Désormais, il faut attirer l’attention de la caution sur la portée de son engagement… ».
221Nul ne peut être caution à son insu, sur les seaux d’une acceptation qui sera implicite, mais, nul ne peut plus invoquer son absence de consentement pour échapper à ses engagements de caution l’exigence de ce caractère express exclut les zones d’incertitude de jadis. En effet, l’alinéa 3 de l’article 4 dispose : « la caution qui ne sait lire, ou écrire, doit être assistée par un témoin qui certifie dans l’acte de cautionnement son identité et sa présence atteste en outre, que la nature et les effets de l’acte lui ont été précisés ».
222En vertu de ce texte, il existe une obligation précontractuelle de renseignement, dans la mesure où les cautions analphabètes ne peuvent s’engager que si, au préalable les témoins certificateurs ont attiré leur attention sur la portée de l’engagement qu’elle envisage. Il y a manifestement une exigence de transparence parce qu’on vise à attirer l’attention des cautions.
223En effet, il résulte des articles 13 et 14 de l’Acte uniforme, que le créancier est désormais tenu d’aviser la caution de l’évolution de la situation, notamment de la défaillance du débiteur au prorata du terme. Aussi, dans cette situation, aucune caution ne peut invoquer son ignorance, qui réduit davantage les risques de contentieux.
224Mais la sécurité du contrat de cautionnement est surtout davantage renforcée par deux autres dispositions, l’article 10 de l’Acte uniforme et d’autres dispositions.
225L’article 10 de l’Acte uniforme consacre une inversion de tendance. Il dispose que le cautionnement est réputé solidaire372. Le créancier pourra poursuivre la caution pour la totalité de la dette, parce que la caution va être placée au même titre que le débiteur principal, mais, cette assimilation doit être relativisée, parce que la caution, bien que solidaire, demeure toujours un débiteur de second rang.
226Mais, ce qui résulte surtout de la solidarité du cautionnement, c’est qu’il détermine les moyens de défense de la caution solidaire. Celle-ci en effet va prendre deux exceptions généralement reconnues à la caution simple : c’est l’exception de discussion373 et l’exception de décision.
227Quant au cautionnement omnibus, qui accentue également la profondeur de la caution, cela veut dire qu'avec l’Acte uniforme, une caution ne peut s’engager des dettes présentes, mais aussi des dettes futures d’un débiteur, ce qu’on appelle le cautionnement général de toutes les dettes. C’est un cautionnement qui présente des dangers, parce que la caution ne maîtrise pas la situation du débiteur. C’est pourquoi par ailleurs un tel cautionnement a été contesté dans sa validité, avant d’être admis avec réticence, mais l’Acte uniforme le reconnaît expressément, même s’il s’agit d’une reconnaissance encadrée.
228Quant à l’existence du cautionnement, il faut noter que le cautionnement, en tant que contrat, n’échappe pas à la condition de validité des contrats.
229S’agissant de l’auteur, il y a la capacité, car certains cautionnements, tels que ceux faits par les sociétés anonymes avec Conseil d’Administration ou Administrateur en faveur de leurs dirigeants sont interdits, d’autres sont soumis à une autorisation préalable, celle qu’une société anonyme fait au tiers.
230En ce qui concerne la solvabilité et le domicile374, l’article 5 de l’Acte uniforme exige à la caution de trouver un domicile sur le ressort territorial de la juridiction où elle doit être fournie et pour l’efficacité du cautionnement, il faut faire une distinction entre le régime de la poursuite de la caution, de celui de la poursuite de la caution déclarée en cessation de paiement, et de celui du régime de la réaction de la caution. S’agissant de l’extinction du cautionnement, il faut distinguer entre l’extinction par voie accessoire et l’extinction par voie principale (article 5). Pour le paiement de la dette principale, il est évident que son paiement entraînera ipso facto l’extinction du cautionnement. L’extinction du cautionnement peut être effectuée par plusieurs moyens.
231Après l’analyse du cautionnement, voyons à présent la lettre de garantie.
ii) La lettre de garantie
232Le régime de la lettre de garantie est prévu par les articles 28 à 38 de l’Acte uniforme.
233« L’Acte uniforme OHADA portant organisation des sûretés constitue, dans les États-parties, la première consécration législative de la lettre de garantie ou garantie autonome comme sûreté personnelle375 ».
234Ainsi, la réforme du droit des sûretés a été l’occasion d’introduire au plan législatif, afin de les organiser, les garanties autonomes, et, en particulier la garantie à première demande, en raison de son importance grandissante dans les relations d’affaires et des nombreux problèmes qu’elle pose dans la pratique, souvent délicats à régler en raison du vide législatif total en la matière.
235Selon Isaac Yankhoba NDIAYE, « l’Acte uniforme portant organisation des sûretés apporte une innovation importante aux législations nationales préexistantes en codifiant sous la dénomination de lettre de garantie ou de contre garantie, les garanties autonomes ou indépendantes ».376 Née de la pratique contractuelle dans les années 1970, elle a fini par être consacrée par la jurisprudence française à travers deux arrêts dit : Banque de Paris et des Pays-Bas.377 Il faut également noter que la Chambre de Commerce internationale avait, pour combler le vide juridique et résoudre de nombreux problèmes posés par la pratique de ces garanties, élaboré en 1978, les « Règles uniformes pour les garanties contractuelles ».
236Ainsi, fortement inspiré des acquis de la jurisprudence française en la matière, l’Acte uniforme a également pris en compte les « Règles uniformes pour les garanties contractuelles de la Chambre de commerce internationale ». En effet, la caractéristique fondamentale de la lettre de garantie réside dans son autonomie c’est-à-dire son indépendance par rapport au contrat de base. Cette caractéristique se reflète à travers l’article 29 de l’Acte uniforme alinéa 2, ce qui la différencie ainsi du contrat de cautionnement marqué par son caractère accessoire.378 L’Acte uniforme a également tranché de manière très nette la question relative à la nature de la garantie s’agissant de savoir si c’est un engagement unilatéral ou un contrat379. Si en Belgique, l’engagement unilatéral semble prévaloir380, comme du reste dans les règles élaborées par la Chambre de Commerce internationale à travers l’article 6, disposant que « la garantie prend effet à la date où elle est émise381, il est à noter que l’Acte uniforme a choisi l’option contractuelle retenue par ailleurs par les jurisprudences françaises382
237S’agissant des conditions de forme, l’article 30, contient les dispositions d’ordre public relatives aux mentions : parmi celles-ci l’indisponibilité des exceptions, qui n’est pas propre à la garantie à la première demande, car elle figure également dans la caution solidaire. L’Acte uniforme à travers l’article 25 alinéa 1, interdit aux personnes physiques de souscrire une lettre de garantie ou de contre garantie, à ce niveau les juridictions françaises ont eu la même attitude à l’égard des particuliers.383 Mais il faut noter que les personnes morales peuvent souscrire les lettres de garantie. Comparer au domaine de l’Acte uniforme, il est évident qu’il s’agit d’une avancée significative par rapport à l’hostilité des juridictions françaises à l’application des garanties autonomes.
238S’agissant des conditions de fond de formation de la garantie, il est évident comme toute convention, la lettre de garantie ou de contre garantie est soumise aux conditions générales des contrats prévues par les législations nationales. Du point de vue de ses effets, il faut noter l’étendue du droit à garantir quant à sa durée et le caractère irrévocable ou révocable de la garantie. Dès sa naissance, la lettre de garantie ou de contre garantie créait un droit à garantie au profit du créancier bénéficiaire ou du contre garantie des accords entre les parties. Quant à l’irrévocabilité de la garantie, elle est simple, facultative, il n’en est rien dans les usages internationaux où l’engagement est pratiquement toujours irrévocable pour que la garantie soit efficace. C’est la même technique qui a été utilisée par les règles et usages uniformes en matière de crédit documentaire. Même si la garantie est stipulée première demande, le garant est tenu d’effectuer un paiement utile, seule précaution lui permettant de préserver ses recours éventuels contre le donneur d’ordre. La similitude avec la caution est unanimement forte. On constate que l’Acte uniforme a suivi l’évolution du droit français et l’option de la Chambre de Commerce internationale de Paris.
239En effet, la notion de garantie à première demande motivée est aujourd’hui bien connue, qui signifierait simplement que le bénéficiaire qui doit faire état de ces griefs contre le donneur d’ordre n’a pas apporté la preuve de leur bien fondé.384 Cette tendance a été entérinée par la Chambre de Commerce internationale, selon l’article 20 des règles de CCI qui dispose « l’engagement de payer à première demande justifiée veut dire engagement de payer dès réception d’un appel motivé en dehors de toute justification ». La lettre de garantie est une garantie efficace, qui écarte toute possibilité de contestation, même les contestations fondées. Il s’agit d’une garantie qu’on considère comme un acte abstrait. Un acte abstrait est un acte valable, indépendamment de sa cause, ce qui semble heurter l’exigence de la cause qu’on trouve dans les actes juridiques. Il est évident qu’un contrat ne saurait être valable sans la cause. Ainsi, comment expliquer la validité de la lettre de garantie et son intangibilité, en d'autres termes, concilier cette cause avec l’acte abstrait ?
240Pourtant cette conciliation est très simple, parce que l’acte abstrait n’est pas sans cause. Tout acte juridique doit nécessairement être revêtue d’une cause à moins d’être frappé d’une « insomnie d’esprit », il y a nécessairement un intérêt, un motif immédiat ou médiat qui justifie l’efficacité de l’acte juridique. Il reste à convenir si cet acte abstrait est entouré d’une grande sécurité, parce que le débiteur est totalement désarmé, il est tenu de s’exécuter même en cas d’exécution non avérée. La pratique des actes abstraits a été d’abord utilisée en droit cambiaire avec les effets de commerce, car on sait que le tiré accepteur de la lettre de change, ne peut opposer au banquier escompteur, l’absence de cause de son engagement, parce qu’il y a un principe fondamental, celui de l’inoposabilité des exceptions qui gouverne les rapports cambiaires.
241L’article 29 alinéa 2 de l’Acte uniforme, dispose expressément que la lettre de garantie, est détachée du contrat de base. L’article 36 affirme que le donneur d’ordre ne peut faire défense de payer au garant et contre garant que si la demande de paiement du bénéficiaire est abusive ou frauduleuse. La formulation de cette disposition dénote assurément la volonté de réduire les fraudes. Quant à la mise en œuvre de la garantie, son régime est très strict, et l’Acte uniforme distingue l’appel à la garantie du dénouement de la garantie et les recours judiciaires ouverts aux différentes parties. En plus des sûretés personnelles, l’Acte uniforme a également réglementé les sûretés réelles avec dépossession.
b) Les sûretés réelles avec possessions
242Historiquement les sûretés réelles avec dépossession sont apparues les premières, car leur réalisation est facile. Il suffit simplement de déposséder le débiteur du bien. Les sûretés réelles avec dépossession sont de deux ordres : le droit de rétention et le gage.
i) Le droit de rétention
243C’est le droit qui permet à un créancier, qui détient légitimement un bien de son débiteur, de le retenir jusqu’à complet paiement de ce qui lui est dû (article 41 de l’Acte uniforme). Il faut remarquer que dans les États parties au traité, à l’exception du droit sénégalais qui avait consacré un texte de portée générale sur le droit de rétention385, les autres États faisaient appel aux dispositions du code civil.
244Selon Christian Scapel, « le droit de rétention permet à un créancier de refuser de délivrer une chose tant que la créance dont il est titulaire n’a pas été acquittée par celui qui prétend à cette chose ». Le droit de rétention présente pour le créancier le noble avantage d’une mise en œuvre spontanée ne requérant, en principe, aucune intervention judiciaire. La caractéristique remarquable du droit de rétention résulte du fait que, destiné à obtenir l’exécution d’une obligation, il ne constitue pas une véritable voie d’exécution. Il faut noter que la difficulté de détermination de la nature juridique386 et du régime du droit de rétention résulte de l’absence de texte en la matière. Ainsi, il a été fait recours au droit français qui tire ses sources de la jurisprudence et des hésitations de la doctrine. L’Acte uniforme a apporté des innovations en comblant ce vide juridique.
245Le débat qui dénie au droit de rétention sa qualité de sûreté a été tranché par l’Acte uniforme qui fait du droit de rétention une sûreté réelle qui confère à son titulaire un droit de préférence et un droit de suite. Les conditions d’exercice du droit de rétention déterminent un régime spécifique relatif à la détention de la créance387 qui doit être liquide et exigible et avoir un lien de connexité388 avec la chose déterminée et la rétention389. Le Droit de rétention produit nécessairement des effets qui sont antérieurs au paiement ou, en cas de non paiement, qui constituent une situation dans laquelle le délai n’est pas déterminé mais qu’il faut combler.
246Dans le cadre du droit français, le juge a joué un rôle important dans l’attribution390 du droit de rétention. Il en a ainsi assoupli les conditions, mais il a élargi391 le domaine et a consacré un contrôle sur l’exercice du droit de rétention.
ii) Le Gage
247Il est défini comme le contrat par lequel un bien meuble corporel ou incorporel392 qui existe est remis au créancier ou un tiers convenu entre les parties pour garantir le paiement d’une dette.393 Il est régi par les articles 44 à 62 de l’Acte uniforme. A L’instar du droit de rétention, le gage porte sur un bien remis au créancier ou un tiers convenu entre les parties. Cette très ancienne sûreté a fait l’objet dans l’Acte uniforme d’une mise à jour de ces techniques de constitution, surtout, lorsqu’elle porte sur certains biens incorporels, il se caractérise par son indivisibilité et son caractère réel.
248Du point de vue de la preuve, l’Acte uniforme exige un acte authentique ou sous-seing privé enregistré, alors que certaines législations antérieures telles que celles du Mali n’exigeaient pas un écrit. Il faut noter que la liberté de preuve est admise lorsque la loi nationale l’autorise.
249S’agissant des modalités particulières du gage, l’article 50 fixe les procédures de mise en gage des titres de créance et du récépissé du départ de valeurs mobilières. Lorsqu’il s’agit de titre au porteur, la signification de la cession n’est pas nécessaire. On opère par tradition, c’est-à-dire, de la main à la main. Pour les titres à ordres, le transfert se fait par endossement et pour les titres nominatifs, par la mention du gage sur les registres de la personne émettrice.
250Le gage peut être constitué sur le récépissé du dépôt de valeurs mobilières, dans ce cas, le récépissé est remis au créancier gagiste et le gage est signifié à la personne morale dépositaire. En ce qui concerne les effets du gage, le droit de rétention est reconnu au créancier gagiste jusqu’à son paiement complet, même en l’absence de stipulation contractuelle. Faute de paiement, l’Acte uniforme interdit la vente ou l’attribution du gage sans autorisation de la justice394. Toute clause contraire est réputée non écrite. Lorsque le gage est une créance, une procédure particulière est organisée par l’article 56, alinéa 2. Il s’agit d’une chose consomptible, le créancier gagiste est autorisé à restituer une chose équivalente.
c) Les sûretés réelles sans dépossession
251« Compte tenu des inconvénients majeurs qui s’attachent à la dépossession, et de l’émergence de nombreux biens meubles incorporels de valeur, la pratique a imaginé des sûretés sans dépossession, qui sont généralisées et ont la consécration du législateur grâce, notamment au développement d’un système de publicité fiable destiné à renseigner les tiers395 » Ainsi, par ce mécanisme, plusieurs sûretés ont été consacrées par l’Acte uniforme.
252Pour les nantissements classiques, l’Acte uniforme a mis en place un régime spécifique réglementant toute la constitution des deux sûretés. Pour leur inscription, ils n’ont pas subi de modifications notables. S’agissant du nantissement des droits sociaux et des valeurs mobilières, l’Acte uniforme ohada constitue une innovation par rapport au droit antérieur, car il est mis en phase avec celui des sociétés commerciales. Il est régi par les articles 61 à 65 de l’Acte uniforme sur les sûretés, qui doivent être complétés par les articles 44 et 45 de l’Acte uniforme sur le droit commercial général en ce qui concerne la publicité au RCM et les articles 747 AUSC et 88 et suivants et 236 et suivants AUVE. En ce qui concerne les effets du nantissement, l’inscription permet aux créanciers de le conserver pendant cinq ans à compter de sa date.
253Pour le nantissement des stocks, il est régi par les articles 100 à 105 de l’Acte uniforme. Ce nantissement appelle quelques observations. On constate autrefois, l’existence d’une multiplicité de warrants (agricole, hôtelier, pétrolier….). Chacun était régi par un texte spécial. Cette hétérogénéité et cette dispersion de textex ont été avantageusement réduites par une réglementation commune et uniforme et tous les warrants qui, d’ailleurs à cette accession, ont perdu leur appellation anglaise au profit du texte français plus approprié de nantissement, véritable billet à ordre endossable consacre la création de garantie, et permet la mobilisation de cette créance. S’agissant de la constitution de ce nantissement, outre les conditions de fonds communes à tous les contrats et qui font que le constituant doit être propriétaire des stocks nantis, on doit signaler la particularité des causes susceptibles d'être montrées. Les conditions de fond, elles sont relatives à la force de l’acte constitutif, son enregistrement et son inscription au RCCM.
254Quant aux effets du nantissement, il faut distinguer les effets avant l’échéance de ceux à l’échéance.
d) Les privilèges mobiliers spéciaux
255Ces sûretés sont de trois ordres : ceux reposant sur le fondement de l’introduction d’une valeur dans le patrimoine du débiteur, ceux reposant sur le fondement de la conservation du patrimoine du débiteur, et ceux reposant sur le fondement du gage tacite. Les privilèges sont régis par les articles 106 à 116 de l’Acte uniforme.
e) Les sûretés réelles immobilières – les hypothèques
256L’Acte uniforme n’apporte aucune modification substantielle par rapport au code des obligations civiles et commerciales du Sénégal (COCC), mais il a apporté une meilleure structuration des textes. L’hypothèque est une sûreté réelle, immobilière, conventionnelle ou forcée, qui confère à son titulaire un droit de suite et un droit de préférence396.
257On peut noter globalement que l’Acte uniforme a reconduit les solutions anciennes des droits des États-parties au traité ohada. Il renvoie également à la législation foncière de ces États. Ainsi, l’Acte uniforme dans ses articles 17 à 146 a soigneusement réglementé le régime de l’hypothèque conventionnelle et celui des hypothèques forcées et leur extinction. Les hypothèques conventionnelles constituent le droit commun en la matière, sous réserve des dispositions particulières relatives aux hypothèques forcées.
258La législation de chaque État partie décide de la forme authentique ou sous-seing privé, de la convention d’hypothèque. Mais, en tout état de cause, le rang des hypothèques reste uniformément déterminé pour la date de leur inscription. Le remplacement de tous les privilèges immobiliers par les hypothèques forcées, confère uniformité et cohérence à l’ensemble des hypothèques. L’Acte uniforme organise les hypothèques forcées du vendeur, de l’échangiste, du couple gérant, du prêteur de deniers, de l’architecte et de l’entrepreneur, ainsi que l’hypothèque forcée, notamment celle relevant du droit de la famille et de la comptabilité publique qui est laissée au soin de chaque État Partie. On a pu regretter que les règles ou formalités de publicité des hypothèques (inscription de la constitution, de la mainlevée de la transmission, de la modification) n’aient pas été légalement harmonisées.
259L’hypothèque est un droit réel accessoire qui permet au créancier de saisir l’immeuble en quelques mains qu’il se trouve et de se faire payer par préférence.
260L’Acte uniforme reprend les deux types d’hypothèques tels que consacrés dans le code domanial et foncier du Mali ou du décret du 26 juillet 1932.
261Contrairement au droit des sûretés mobilières, celui des sûretés immobilières applicables dans les États-parties de l’ohada apparaît plus moderne, tel qu’il résulte, notamment, des trois textes coloniaux397 qui définissent le régime foncier et comportent les dispositions relatives à de telles sûretés, et à la publicité foncière.
262S’agissant de la constitution de l’hypothèque conventionnelle, il faut faire la distinction entre les conditions relatives aux parties398, et celles relatives à la stipulation de la garantie.
263Quant aux effets de l’hypothèque, il faut distinguer la situation de l’immeuble entre les mains du constituant de celle de la situation de l’immeuble entre les mains du tiers détenteur.
264Pour le sort de l’hypothèque conventionnelle, il est fixé à l’article 124 de l’Acte uniforme qui détermine le régime de l’hypothèque en tant qu’accessoire de la créance, du fait qu’elle est indivisible.
265S’agissant de l’hypothèque forcée, il faut faire la distinction entre l’hypothèque forcée légale et l’hypothèque forcée judiciaire399
266Pour l’extinction des hypothèques, il faut noter que les causes d’extinction des hypothèques forcées sont les mêmes que celles des hypothèques conventionnelles qui sont relatives à la présentation des inscriptions400 et à la radiation des inscriptions401.
f) Les privilèges généraux
267La liste des privilèges généraux du code civil était devenue archaïque, abondante et désordonnée.
268Leur assiette mobilière et immobilière, ainsi que leur classement étaient déterminés de façon confuse par le législateur français, et, cela d’autant que la liste en avait été élargie démesurément depuis deux ans. Il s’est avéré donc nécessaire de réduire cette liste en éliminant les privilèges qui ne correspondent ni à l’Afrique ni à notre époque et de déterminer de façon exacte leur assiette entre eux d’abord, et parmi toutes les autres sûretés. C’est l’objet des articles 106 à 108 de l’Acte uniforme. S’agissant de l’énumération des privilèges généraux, il faut distinguer ceux non soumis a publicité, tels que frais d’inhumation, frais de dernières maladies, etc…, et à ceux soumis à publicité, tels que les formalités de publicité et les effets de la publicité. Quant au régime juridique, entre des privilèges généraux, il faut également faire la distinction uniquement, les privilèges généraux comme suite légale et ceux qui confèrent unique un droit de préférence.
g) Les distinctions et le classement des prix
269Il est régi par les articles 147 à 149 de l’Acte uniforme, se démarquant opportunément du droit français, jugé confus en matière de classement des sûretés. L’acte uniforme établit séparément un classement des sûretés en matière immobilière en énumérant, dans l’ordre où elles doivent être servies des différentes sûretés qui auront été prévues et autorisées par les textes du droit uniforme.
270Si par exemple un État partie adopte ultérieurement une disposition spécifique créant par exemple un privilège général au profit de telle personne jugée digne d’intérêt, il devra indiquer un autre privilège du droit unique déjà répertorié et classé, faute de quoi le rang de cette sûreté nouvelle sera automatique, celui du dernier privilège précédant immédiatement les créanciers chirographaires. Après l’étude de la rénovation du droit interne, nous traiterons à présent de celle du droit processuel.
B. La rénovation par l’uniformisation du droit processuel des affaires dans la zone franc
271Cette nouvelle réglementation du droit processuel des affaires dans la Zone Franc a été une innovation importante, car le droit des procédures est extrêmement important et les États sont le plus souvent jaloux de leur droit interne dans certaines situations. Les matières ayant fait l’objet d’uniformisation sont relatives au droit du recouvrement des créances et des voies d’exécution, aux procédures collectives des entreprises en difficulté, aux procédures d’arbitrage et aux procédures comptables.
1. La simplification des procédures de recouvrement des créances et le renforcement des voies d’exécution
272L’Acte uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement des créances et les voies d’exécution a été adopté par le Conseil des Ministres à Libreville et il est entré en vigueur le 10 juillet 1998.
273A part le Sénégal qui est doté d’un code de procédure civil moderne402, la plupart des États membres de l’ohada, continuaient à appliquer les textes de droit français en la matière. Cette diversité de textes ne facilitait pas les échanges. Malgré la consécration de cet Acte uniforme, il faut noter dans ce domaine une survivance des législations nationales.
274Cet Acte uniforme comprend 344 articles et se présente en deux parties :
les procédures de recouvrement des créances
les voies d’exécution.
a) Le régime des deux procédures de recouvrement consacrées par l’Acte uniforme
275S’agissant des procédures du recouvrement des créances, leurs régimes sont déterminés par les articles 1 à 8 de l’Acte uniforme pour la procédure d’injonction de payer, et par les articles 19 à 27 pour la procédure de livrer ou de restituer. L’innovation importante réside dans le fait que jusqu’à une date récente, les États parties au Traité ne connaissaient qu’une seule procédure de recouvrement des créances. Selon Koffi Alexis AQUEREBURU, « la procédure d’injonction de payer est un mécanisme qui permet à un créancier d’obtenir du juge un titre exécutoire contre un débiteur par simple dépôt d’une requête contenant l’indication précise du montant de la créance litigieuse et son fondement accompagnés de pièces justificatives ».403 Quant à la procédure d’injonction de délivrer ou de restituer, elle concerne l’obligation de délivrer une chose que le débiteur doit remettre en exécution d’un contrat ou restituer celui-ci après résolution ou résiliation de celui-ci. Cette procédure est une innovation importante de l’Acte uniforme.
276En ce qui concerne les domaines d’application des deux procédures, ils varient selon qu’il s’agit de l’injonction de payer ou de délivrer. Pour l’injonction de payer, on note une restriction de son champ d’application, car dorénavant, la créance doit être contractuelle, ou l’engagement du débiteur doit résulter de l’émission ou l’acception de tout effet de commerce ou d’un chèque. Antérieurement, toute créance, qu’elle soit civile ou commerciale pouvait faire l’objet de procédure d’injonction de payer. Désormais cette faculté est supprimée, ainsi, sont exclus du domaine d’application de la procédure, les créances fondées sur un délit ou quasi délit, un contrat ou quasi contrat, telles que la gestion d’affaire ou la répétition de l’indu. Il en va de même des créances résultant d’un engagement unilatéral de volonté, d’une obligation de caractère statutaire ou de l’indemnisation d’une victime d’un accident dû par l’assureur. La procédure d’injonction de payer exige également que la créance soit certaine, liquide et exigible, car, il s’agit pour le poursuivant d’obtenir un titre exécutoire, ce qui fait qu’elle est une procédure qui peut être rapide dès que ces conditions sont remplies.
277En ce qui concerne l’injonction de délivrer ou de restituer un meuble corporel déterminé l’article 19 de l’Acte uniforme précise son domaine d’application. Cette procédure constitue une véritable innovation apportée par l’Acte uniforme, car dans l’ensemble, elle était inconnue des législations antérieures des États-parties. Le domaine de cette procédure est ouvert seulement au créancier d’une obligation de délivrance ou de restitution d’un bien meuble corporel déterminé, ce qui exclut les immeubles et les meubles incorporels. Contrairement à l’injonction de payer, le créancier ne poursuit pas ici le paiement d’une somme d’argent, mais l’exécution en nature d’une obligation de faire de manière générale. Cette voie est désormais ouverte à l’acquéreur d’un bien meuble corporel qui a payé le prix du bien sans en obtenir la délivrance dans un contrat de vente. L’obligation de restituer peut être utilisée dans le contrat de dépôt par le déposant qui n’obtient pas de son dépositaire, la restitution de l’objet déposé. Son domaine est plus vaste que celui de l’injonction de payer.
278Les législateurs de l’ohada ont réglementé leurs procédures en les consacrant dans les articles 20 à 25. Elles sont quasiment identiques. La juridiction compétente404 pour l’injonction de payer est celle du domicile ou le lieu où demeure effectivement le débiteur ou l’un d’entres eux en cas de pluralité de débiteurs, il en va de même pour l’injonction de délivrer ou de restituer. L’Acte uniforme a ainsi consacré une solution classique. En effet, le juge du domicile ou de la résidence du débiteur saisi est mieux placé pour être informé de la situation de ce dernier. Cette solution garantit au débiteur un minimum de droit. Mais, il faut noter que l’Acte uniforme a apporté une innovation, car désormais, les parties peuvent convenir de l’élection de domicile405 pour une juridiction compétente.
279L’incompétence territoriale ne peut être soulevée que par la juridiction saisie de la requête ou par le débiteur406, il en va de même pour l’injonction de délivrer ou de restituer. Dans ces cas les parties peuvent déroger, et élire domicile, car les règles ne sont pas d’ordre public. La décision de la juridiction compétente peut constituer soit une décision de rejet de la requête d’injonction de payer ou d’injonction de livrer ou de restituer. Pour la décision de rejet de la requête de payer, le Président du Tribunal peut rendre une décision partielle ou totale, dans l’un ou dans l’autre elles sont sans recours. Pour la décision de rejet de la requête d’injonction de restituer ou de délivrer, elle est également sans recours. Quant à la décision d’injonction de payer, l’Acte uniforme a réglementé une procédure minutieuse, car plusieurs phases et les délais doivent être respectées407.
280Dans les deux procédures, des innovations importantes ont été apportées par l’Acte uniforme, car il a réglementé le contenu de la décision et précisé la nécessité de la signifier408 au débiteur de l’injonction de payer. L’opposition409 a été consacrée comme voie de recours contre la décision de procédures410. Les effets ont été également réglementés. Pour la décision portant injonction de livrer ou restituer, si la demande est fondée, la décision rendue par le président doit la signifier au débiteur, le recours contre la décision est l’opposition. Cette opposition doit à peine de nullité être faite au Greffier du Tribunal qui a rendu la décision411.
b) Le régime des voies d’exécution
281L’Acte uniforme a amélioré et simplifié les voies d’exécution par une simplification de ses procédures, apportant ainsi des innovations importantes par rapport aux systèmes antérieurs.
i) Les dispositions communes à toutes les saisies
282Les dispositions communes ont été consacrées par les articles 28 à 58 de l’Acte uniforme. Ces dispositions sont de deux natures, celles précisant les conditions générales à toute saisie et celles déterminant les règles relatives aux opérations de saisies. Mais, il faut noter l’existence d’une nuance entre le droit de saisir et l’exercice de ce droit. En effet, le droit de saisir appartient à tous les créanciers qui ont la capacité et le pouvoir de saisir. L’article 28 de l’Acte uniforme réglemente le principe du droit de saisir. On peut remarquer que cet article n’est que l’équivalent de l’article 1er de la loi française du 19 juillet 1991, relative aux voies d’exécution, mais, il s’en démarque, du fait qu’il permet aux créanciers saisissant le choix entre l’exécution forcée ou les mesures conservatoires.
283Quant aux dérogations au droit de saisie, elle sont précisées par l’article 2 de l’Acte uniforme ; il s’agit de celles concernant des créanciers chirographaires412 et celles concernant les créanciers hypothécaires413.
284L’exercice du droit de saisir pose la problématique de la capacité de saisir et celui des pouvoirs de saisir414 au cas où la saisie est pratiquée par une personne autre que le créancier originaire415. Il faut noter curieusement que l’Acte uniforme n’a pas déterminé la nature juridique de la saisie.
285S’agissant de la saisie pratiquée contre le débiteur lui-même, l’Acte uniforme consacre en la matière le principe selon lequel tout débiteur peut être saisi, mais il faut noter que ce principe416 a prévu des dérogations417 et des atténuations418.
286Quant à la saisie pratiquée contre des personnes assimilées au débiteur saisi, trois personnes peuvent en être assimilées, il s’agit des représentants légaux419 et conventionnels420 du débiteur, ainsi que du conjoint saisi421. L’innovation apportée par l’Acte uniforme est relative à l’institutionnalisation du tiers qui devient le troisième personnage dans la procédure de saisie. Les sujets de la saisie étant précisés, on peut remarquer que l’Acte uniforme a réglementé de manière précise les causes de celle-ci. La cause de la saisie est la créance qui la justifie, c’est celle du créancier saisissant contre le débiteur. Elle peut résulter d’un contrat de prêt, d’un contrat de vente ou d’un bail, etc. Les articles 31 à 34 de l’Acte uniforme déterminent les conditions de fond422 et de forme423 de ces saisies. L’objet de la saisie est constitué par tous les biens qui composent le patrimoine du débiteur qui sont en principe tous saisissables424, sauf, ceux déclarés insaisissables425 par les lois nationales de chaque État partie.
287Pour les opérations de saisies, l’Acte uniforme a consacré plusieurs articles relatifs au personnel de la saisie et la mise en œuvre. Le personnel de la saisie est composé généralement des huissiers426 de justice et des agents d ‘exécution427 de l’autorité judiciaire428 mais également de la force publique429
288La mise en œuvre des saisies est précisée dans l’Acte uniforme. Son régime est relatif au déroulement des opérations de saisie430 et les conséquences générales à toute saisie431.
ii) Le régime des saisies particulières
289L’étude du régime des saisies particulières se fera selon que le bien objet de la saisie est un bien meuble ou un bien immeuble.
290Les saisies mobilières sont des mesures d’exécution forcées portant sur les meubles corporels ou incorporels du débiteur et sont de plusieurs ordres. La saisie à fin d’exécution regroupe la saisie vente mobilière432, les saisies des créances et la saisie-appréhension. Les saisies conservatoires433, sont des saisies qui ont simplement pour but de soustraire les biens mobiliers du débiteur à la disposition de ce dernier afin de les conserver au profit du créancier. Elles sont régies434 par les articles 54 à 90 de l’Acte uniforme par rapport à la législation antérieure dans la plupart des États, il a apporté des distinctions entre les saisies conservatoires de biens meubles corporels et des biens meubles incorporels, il a innové également en consacrant des dispositions communes entre les deux types de saisies et des dispositions particulières.
291S’agissant des conditions générales de la procédure commune, l’Acte uniforme a établi les conditions générales relatives à l’objet et à la créance. Pour l’autorisation judiciaire préalable, l’Acte uniforme a fait la distinction au niveau de la procédure des saisies conservatoires, selon que le créancier saisissant est muni ou non d’un titre exécutoire. Les articles 54 et 55 de l’Acte uniforme ont déterminé le domaine, la procédure et la décision du juge. Les incidents communs aux deux types de saisies sont relatifs à la mainlevée435 et les autres incidents436. Quant aux dispositions particulières, une distinction existe entre les saisies conservatoires de droit commun et les saisies conservatoires particulières. Dans le cadre de celles de droit commun, l’innovation porte sur la différence faite entre les mains du débiteur ou entre les mains d’un tiers détenteur.
292Les saisies conservatoires spéciales de biens meubles corporels, ont été innovées par l’Acte uniforme, contrairement à la législation antérieure. L’Acte uniforme n’a retenu que la saisie foraine. Parmi les saisies antérieures figure la saisie gagerie437. Certaines législations antérieures avaient réglementé la saisie foraine438 et la saisie revendication439. L’Acte uniforme a institutionnalisé d’autres saisies telle que la saisie conservatoire de créances440, la saisie conservatoire des droits d’associés et des valeurs mobilières441. Ces nouvelles saisies prennent en compte la nouvelle composition des patrimoines des débiteurs.
293L’Acte uniforme désigne désormais, la saisie exécution sous le vocable « saisie vente ». Ainsi, contrairement à la législation antérieure des États-parties, l’Acte uniforme fait une distinction entre les saisies vente de meubles corporels et la saisie vente de meubles incorporels. A l’instar des législations antérieures, l’Acte uniforme a adopté la distinction classique, entre la saisie vente de droit commun442 et la saisie sur pied de récolte qui est une saisie vente particulière. Quant à la saisie vente des droits d’associés et des valeurs mobilières, contrairement aux législations antérieures des États parties, l’Acte uniforme a prévu pour elle une réglementation d’ensemble. La procédure et les incidents ont été bien précisés.
294L’Acte uniforme a également réglementé les saisies conservatoires de créance à des fins d’exécution. Sous l’empire des législations antérieures des États-parties, la saisie des créances à fin d’exécution était essentiellement connue sous la dénomination de saisie arrêt. Une distinction a été faite entre la saisie arrêt de droit commun, la saisie arrêt des salaires et les procédures spéciales des créances d’aliments.
295S’agissant de la saisie arrêt elle avait une nature hybride car la phase de blocage correspondait à une saisie conservatoire et la phase d’attribution de la somme d’argent ou prix de vente des meubles était la phase d’exécution. L’Acte uniforme a adopté des terminologies nouvelles. On distinguait deux sortes de saisies de créance à fin d’exécution : la saisie attribution443 et la saisie et cession des numéraires.444
296L’Acte uniforme a opéré ainsi une nouvelle dénomination de l’ancienne saisie arrêt, à travers cette saisie, il apporte une innovation en faisant de la saisie attribution une procédure moins finaliste445, plus rapide et plus efficace que l’ancienne saisie arrêt.
297Pour ce qui est de la saisie et la cession des numéraires, à l’instar des législations antérieures, l’Acte uniforme assure aux travailleurs la protection de leur numéraire446 en réglementant la saisie et la cession des numéraires, mais contrairement à ces législations, l’Acte uniforme a abandonné l’appellation saisie-arrêt des salaires en prévoyant une procédure simplifiée pour les créances d’aliment447.
298L’Acte uniforme a également apporté des innovations importantes, en ce qui concerne les saisies aux fins de remise ou de restitution d’un bien meuble corporel. Ces nouvelles saisies qui sont au nombre de deux, la saisie appréhension448 et la saisie revendication, ont pour objet d’assurer l’exécution d’une obligation de faire et non une obligation de payer. L’Acte uniforme a fait une distinction au niveau de la procédure selon que l’appréhension est faite entre les mains du débiteur de l’obligation de restitution ou de remise ou entre les mains d’un tiers. Les saisies mobilières ne sont pas les seules saisies particulières, il y a également les saisies immobilières.
299La saisie immobilière est la voie de droit par laquelle un créancier fait mettre en vente les immeubles appartenant à son débiteur afin de se faire payer sur leur prix. De toutes les procédures de saisie, celle de la saisie immobilière449 est la plus complexe, la plus longue et la plus coûteuse, c’est la raison pour laquelle, les tribunaux jouent un rôle prépondérant. Mais, il faut noter que l’Acte uniforme a apporté plusieurs innovations, qui sont relatives à l’état450 de l’immeuble, la mise à prix451, la constitution d’avocats452, les délais. Les formalités de la procédure de saisie immobilière sont décrites dans les articles 246 à 364 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement des créances et des voies d’exécution, qui l’ont bien réglementé.
300S’agissant des conditions de la saisie immobilière, il faut faire la distinction entre les conditions liées à la qualité des personnes impliquées qui sont le saisissant et le saisi et celles liées à la nature des biens. Dans la situation du saisissant, il faut noter que « la vente forcée de l’immeuble ne peut être poursuivie qu’en vertu d’un titre exécutoire contactant une créance liquide et exigible453 ». Pour le saisi qui est défendeur dans la procédure de saisie, il peut être le débiteur454 propriétaire de l’immeuble, mais, aussi une autre personne autre que la débiteur455.
301En ce qui concerne les conditions liées à la nature de l’immeuble, il y a un principe de saisissabilité de tous les immeubles du débiteur. Mais ce principe est atténué par deux limites, car il existe des immeubles qui ne peuvent pas faire l’objet de saisie456, il faut noter également que les droits des créanciers sont limités.
302Quant au déroulement de la saisie immobilière, plusieurs actes doivent être accomplis. Deux phases sont à distinguer ; le déplacement de l’immeuble sous main de justice et la réalisation de l‘immeuble. Cette phase comporte l’établissement du commandement, la signification au débiteur, sa publication et sa signification au tiers détenteur. Concernant la réalisation de l’immeuble, il faut noter l’existence d’une phase préparatoire, relative à la rédaction et au dépôt du cahier des charges, la sommation de prendre sa connaissance, des dires et observatoires et sa publicité, mais également la phase d’adjudication qui comprend le moment de l’adjudication, son déroulement et ses suites et la surenchère. En ce qui concerne les incidents de la saisie immobilière, il faut préciser la notion d’incident457 et le régime des incidents458.
303Pour la notion d’incident, l’Acte uniforme dans son article 298, a repris les articles 2718 et suivants de l’ancien code de procédure civil français, il soulève les mêmes difficultés que les textes qui leur ont servi de modèle. L’incident de la saisie immobilière est toute demande née au cours de la procédure de saisie est de nature à exercer une quelconque influence. Pour le régime des incidents, deux types de règles le régissent : les règles communes qui se rattachent à la compétence459 et à la procédure, les voies de recours, et les règles propres à chaque type d’incidents. Les règles propres à chaque type d’incidents sont de quatre ordres, selon l’Acte uniforme : les incidents nés de la pluralité de saisie460, les demandes de destructions461, les demandes en annulation462 et les folles enchères463.
304Après l’étude des procédures de recouvrement de créances et les voies d’exécution, voyons à présent l’adoption des procédures d’apurement du passif des entreprises en difficultés.
2. L’adaptation des procédures d’apurement du passif des entreprises en difficultés
305La vie des entreprises, comme la vie humaine ne se déroule pas toujours comme on le souhaite. Des difficultés peuvent surgir à des moments inattendus, si certaines difficultés sont passagères et peuvent être surmontées aisément, d’autres, par contre, peuvent entraîner de véritables crises, compte tenu des implications possibles sur la situation des créanciers. Le droit des procédures collectives, que ce soit en Afrique ou en France, a connu une évolution mouvementée. En France, l’évolution a connu plusieurs étapes.464 Il en va de même dans les États membres de l’ohada465 qui ont influencé les rédacteurs de l’Acte uniforme adopté le 10 avril 1998 à Libreville et comportant plusieurs innovations. Il faut cependant noter que les rédacteurs de l’Acte uniforme n’ont pas jugé utile de consacrer certaines notions relatives à la détection des difficultés des entreprises qui sont précisées dans d’autres actes uniformes.466.
306Pour résoudre les importants problèmes liés aux défaillances des entreprises dans la sous-région, l’Acte uniforme « portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif », s’est attaché à rechercher les solutions les mieux adaptées à son contexte juridique, économique et social, en précisant le domaine de procédures, les sanctions qu’il faut infliger aux débiteurs fautifs et les juridictions compétentes. Le domaine couvre l’activité consistant à la prévention des difficultés par la consécration de la procédure du règlement préventif et au traitement des difficultés par la mise en œuvre des procédures de règlement judiciaire et de liquidation des biens.
a) La prévention des difficultés
307Tel que défini à l’article 2 de l’Acte uniforme, le règlement préventif est une procédure destinée à éviter la cession des paiements ou la cessation des activités de l’entreprise et à permettre l’apurement de son passif au moyen d’un concordat préventif. Il s’agit en fait de prévenir les difficultés pour éviter si possible, le caractère public et quelque peu, infamant, pour le débiteur, d’une procédure collective traditionnelle. La procédure du règlement préventif est consacrée par les articles 5 à 24 et, est destinée à toutes les entreprises quelle que soit la forme. Mais, avant d’aborder cette procédure, il faut souligner auparavant que l’alinéa 2 de l’article 2 de l’Acte uniforme a déterminé la nature juridique des personnes sur lesquelles cette procédure est applicable.467 L’ouverture du règlement préventif exige un certain nombre de conditions, l’absence de cessation de paiement, « bien que l’entreprise connaisse des difficultés économiques, sa situation ne doit pas être irrémédiablement compromise », l’autre condition est relative au délai et est régie par l’article 5 de l’Acte uniforme. Le règlement préventif a le même champ d’application que le règlement judiciaire et la liquidation des biens. Il est également pertinent de le rapprocher du règlement amiable de la loi française du 1er mars 1984.
308Le déroulement du règlement préventif connaît plusieurs phases. L’initiative de l’ouverture du règlement préventif n’appartient qu’au débiteur, la demande de règlement est faite sous forme de requête adressée au Président du Tribunal, qui dans les États parties au traité, peut être appelé, Tribunal de Grande Instance, Tribunal de Première Instance ou Tribunal régional. Dans sa requête, il doit exposer et justifier les raisons de sa demande, respecter les conditions exigées aux articles 6 et 7 de l’Acte uniforme et préciser les modalités de continuation de l’entreprise. En ce qui concerne le délai, il doit respecter les conditions exigées par l’Acte uniforme. Après cette formalité le Président rend une ordonnance s’il estime que les prétentions du débiteur sont fondées et désigne un expert chargé de lui faire la situation et les perspectives. Ses travaux, l’expert les dépose au Greffe avec le rapport contenant le concordat préventif dans les deux mois de saisine sauf prorogation d’un mois du Président.
309En vue de garantir l’égalité des créanciers, le débiteur bénéficiaire de la décision de suspension provisoire de poursuite individuelle ne peut accomplir certains actes qu’avec l’autorisation motivée du Président du Tribunal, sauf s’il s’agit des créances salariales.468 Dans les huit jours du dépôt du rapport de l’expert au Greffe du Tribunal, l’affaire est appelée en audience publique. Cette fois-ci, siégeant collégialement après audition du débiteur et éventuellement de certains créanciers, le Tribunal peut à tout moment prononcer le redressement judiciaire ou la liquidation des biens s’il constate la cessation des paiements. Dans le cas contraire, le Tribunal rend alors un jugement de règlement préventif et homologue le concordat en veillant scrupuleusement aux délais469, aux remises consenties par les créanciers tout en ordonnant au débiteur des mesures de redressement judiciaire.
310Le concordat produit des effets et aboutit à la mise en place d’organes pour veiller à son exécution. Le Tribunal désigne ainsi un syndic, un juge commissaire ou des contrôleurs. L’homologation du règlement préventif rend celui-ci obligatoire pour tous les créanciers. La résolution du concordat préventif peut être prononcée en cas d’inexécution par le débiteur de ses engagements concordataires, ou lorsque le débiteur est frappé d’interdiction d‘exercer une activité commerciale. Le concordat est annulé en cas de doute résultant d’une diminution d’actif ou une exagération du passif. Il faut noter que l’Acte uniforme a prévu dans ses articles 22 à 24 l’ouverture des voies de recours. Cette réglementation vise la célérité et l’efficacité du règlement préventif et donc, le sauvetage des entreprises en difficulté. Pour ce qui est du reste, les articles 23 et 24 invitent à distinguer selon qu’il s’agit de décision de la juridiction compétente ou de celle de son Président. La prévention des difficultés peut réussir. Dans ce cas, l’entreprise pourra ainsi continuer ses activités. Mais il peut arriver que ces difficultés persistent et, dans ce cas, il faut les traiter.
b) Le traitement des difficultés des entreprises
311Pour traiter les difficultés, le législateur de l’ohada a prévu deux procédures : le redressement judiciaire et la liquidation des biens. Ainsi, nous traiterons d’abord des conditions d’ouverture de ces procédures et ensuite de leurs effets.
i) Les conditions d’ouverture du redressement judiciaire et de la liquidation des biens
312S’agissant des conditions d’ouverture, le professeur Yves Guyon affirme qu’elles produisent des effets graves, en ce sens qu’elles limitent les pouvoirs du débiteur au double niveau de l’administration de ses biens et de leur disposition ; les droits des créanciers sont également restreints. Toutes ces exigences posent des conditions nécessaires à l’ouverture de ces procédures. En ce qui concerne les conditions de fond, elles sont de deux ordres. Ce sont celles relatives à la perte partielle de la qualité de commerçant et celles relatives aux conditions économiques et financières.
313Pour la qualité de commerçant, l’Acte uniforme, contrairement au droit français470, a retenu un domaine plus restreint, les personnes physiques commerçantes, les personnes morales de droit privé, commerçants ou non, et les entreprises publiques471 ayant la forme d’une personne morale de droit privé. La qualité de commerçant est déterminée par référence à l’article 2 de l’Acte uniforme, relatif au droit commercial général, selon lequel « sont commerçants ceux qui accomplissent des actes de commerce, et en font leur profession habituelle ».
314Aux termes de l’article 30, de l’Acte uniforme qui s’inspire de la loi française du 4 mars 1989, la situation du commerçant décédé exige un régime spécifique. Il en va de même du régime d’un débiteur radié du Registre du Commerce. Il faut noter que les interdictions et incompatibilités prévues dans l’Acte uniforme sur le droit commercial général n’empêchent pas l’ouverture de procédures collectives surtout pour la liquidation des biens. Il en va ainsi du conjoint, des majeurs sous tutelles et des curatelles qui n’échappent pas aux procédures collectives lorsqu’ils sont impliqués dans l’exercice de l’activité commerciale. .A ce titre, nous pensons que l’Acte uniforme devrait, à l’instar de certains pays, étendre le domaine au secteur informel vu son importance en Afrique et surtout dans les pays membres de l’ohada.
315Peuvent également, selon l’Acte uniforme, faire partie des procédures collectives, les personnes morales de droit privé commerçants472 ou non, poursuivant ou non un but lucratif. L’Acte uniforme sur le droit des sociétés commerciales et du Gie a défini de manière précise cette catégorie juridique.473 La catégorie de personnes morales de droit privé non commerçantes, est différente de celles des personnes morales de droit public474 et de celles des personnes morales de droit privé commerçantes. Cette catégorie intermédiaire peut poser des problèmes, quand il s’agit de personnes mixtes à mi-distance entre les personnes de droit public et celles de droit privé.
316Si le législateur ohada n’a pas pris soin de donner un contenu à la notion de « situation économique et financière difficile, mais non irrémédiablement compromise », il a néanmoins pris soin de définir celle de cessation de paiement, à travers l’article 25 de l’Acte uniforme contrairement aux législations antérieures, se soustrayant ainsi des griefs fait à l’encontre de l’article 1er de la loi française 1989. La cessation de paiement, est une condition indispensable de l’ouverture d’une procédure collective de redressement judiciaire ou de liquidation des biens, il revient ainsi au juge de vérifier si cette condition est remplie475, s’il le constate, le débiteur doit déposer une requête au greffe de la juridiction compétente contre récépissé dans un délai de trente jours.
317Ainsi, contrairement aux législations antérieures, l’Acte uniforme a innové en apportant une définition légale de la cessation des paiements. L’analyse de la notion permet de constater l’existence de deux thèses, celle dite dualiste, qui consacre la cessation des paiements ouverte476 et la cessation de paiement déguisée477, celle dite unitaire consacrée par une évolution lente tant en France qu’en Afrique. La jurisprudence478 et la doctrine ont manifestement aidé au développement de la conception unitaire fondée sur une définition légale. L’article 28 de l’Acte uniforme autorise l’assignation du débiteur en ouverture d’une procédure collective quelle que soit la nature de la créance, fût-elle civile. Cependant, la créance impayée doit être certaine, liquide et exigible, elle doit également être une créance de somme d’argent.
318S’agissant de l’insuffisance de l’actif disponible, elle renvoie à la trésorerie de l’entreprise479, qui peut être disponible immédiatement ou être réalisé à tout moment480. A propos de l’actif réalisable et disponible et du passif exigible, Emmanuel De Pontavice rappelait que : « le tableau doit clairement montrer si l’entreprise est en mesure de payer le passif échu et le passif exigible à vue avec le réalisable et disponible. Sans doute, si elle n’en est pas capable, elle est proche de la cessation des paiements, (puisque, celle-ci est la comparaison entre le disponible seul et le passif échu ou exigible à vue) et donc de la phase de traitement des difficultés de l’entreprise… »481.
319Bien que définies, les incertitudes sur la notion de cessation de paiement combinées avec la tendance naturelle des débiteurs à repousser le dépôt de bilan ont contraint le législateur communautaire à obliger le juge à fixer la date de cessation des paiements qui ne peut être antérieure de plus de dix mois au prononcé du jugement. Les conditions de fond étant précisées, voyons à présent les conditions de procédures. Il faut constater que dans la plupart des législations, le principe est que l’existence d’une procédure collective valable, nécessite l’existence d’un jugement, mais dans la pratique, ce principe souffre d’un certain nombre d’exceptions. S’agissant du jugement nécessaire au prononcé de la procédure collective, il serait nécessaire de poser les règles de compétence, les modes de saisine et les règles relatives au jugement d’ouverture.
320Pour les règles de compétence, il faut noter les compétences internes, qui s’analysent soit en compétence d’attribution 482ou en compétence territoriale483, soit en compétence internationale484. Quant aux modes de saisine, elles sont relatives à celles faites par les débiteurs ou celles faites par les créanciers, celles faites d’office par la juridiction compétente ou par le Ministère public. Les règles relatives au jugement d’ouverture comprennent le contenu du jugement de procédure à savoir, le choix de la procédure485 et le dispositif486 ; le caractère,487 la publicité488 et les voix de recours. Les exceptions au principe sont relatives aux « faillites de fait489 », aux solutions de l’Acte uniforme490, aux solutions administratives et aux solutions informelles491.
ii) Les effets du redressement judiciaire et de la liquidation des biens
321Le prononcé du règlement judiciaire ou de la liquidation des biens produits plusieurs effets. Comme le préconise l’article 52 de l’Acte uniforme, et le décret français du 21 avril 1988, article 2, le jugement produit immédiatement ses effets492 à l’égard du débiteur. Cette illustration a été consacrée par la Cour de cassation française.493 Ainsi, le débiteur est dessaisi de l’administration de son patrimoine et les créances se réunissent en masse, cette nouvelle situation exige la mise en place et l’intervention d’un certain nombre d’organes494, que sont les syndics, les organes judiciaires et ceux des créanciers. Pour la juridiction compétente, il faut retenir que l’Acte uniforme n’a pas précisé son appellation, se contentant seulement de la notion de juridiction compétente. En effet, dans les pays membres de l’ohada, cette notion a reçu plusieurs appellations495 et elle a deux fonctions, celle relative à l’administration de la procédure (article 59 de l’Acte uniforme) et celle relative à la centralisation des contestations (article 3).
322En ce qui concerne le juge Commissaire, autre organe de la procédure, il joue un rôle important dans les procédures collectives et à ce titre, il dispose d’attributions précises, qui se sont accrues avec le nouvel Acte uniforme, il a des moyens d’investigations extrêmement importantes. Ainsi, il a des pouvoirs de contrôle, de surveillance et d’investigation. Le juge Commissaire, dans le cadre de ses activités, rend des ordonnances. Selon l’article 40 de l’Acte uniforme, le juge commissaire statue sur les demandes en contestations et revendications, relevant de sa compétence, dans le délai des 8 jours à partir de sa saisine.
323Le troisième organe dans les procédures collectives est le Ministère public. L’État ne doit pas rester en dehors des procédures collectives, surtout quand l’ordre public est menacé. Ainsi, pour permettre au Ministère public de mener à bien ses missions, il est prévu un droit de communication réciproque entre le ministère public et le juge commissaire, plusieurs articles de l’Acte uniforme illustrent ce droit de communication. L’Acte uniforme, contrairement à la législation antérieure a consacré l’unité de la notion de syndic, et cela à l’instar du décret du 20 mai 1955 en France. Qu’il s’agisse du règlement judiciaire ou de la liquidation des biens. S’agissant de son statut, le jugement peut désigner au minimum un syndic et au maximum trois syndics. Le statut de syndic exige plusieurs conditions.496
324Quant à la fonction, elle doit être analysée, soit dans le cadre de la liquidation des biens ou de redressement judiciaire. Dans le cadre du redressement judiciaire, le syndic ne remplace pas le débiteur, il l’assiste, et peut faire appel au juge commissaire en cas de difficulté. Ainsi tout acte important requiert pour sa validité le concours du débiteur. Dans le cadre de la liquidation des biens, le rôle du syndic est de conserver les biens et la consistance du patrimoine du débiteur, l’article 52 de l’Acte uniforme détermine l’étendue de ses pouvoirs. Le syndic, dans le cadre de la liquidation des biens, remplace carrément le débiteur et administre les biens, et l’article 45 de l’Acte uniforme détermine le régime des fonds et deniers recueillis par le syndic. Cela peut engager sa responsabilité civile et commerciale. Dans les procédures collectives, les créanciers ont aussi leurs organes, il s’agit de l’assemblée générale des créanciers et des contrôleurs. Pour l’assemblée des créanciers, l’Acte uniforme se rattache plutôt à la réforme française de 1967 et à la loi sénégalaise de 1976. A titre de droit comparé, il faut noter que Emmanuel Thaller a fait une étude intéressante à ce sujet497. L’innovation apportée par l’Acte uniforme est qu’il ne retient qu’une seule assemblée des créanciers chargée de voter le concordat.
325En ce qui concerne les contrôleurs, cette institution trouve son origine dans la politique qui y avait cours. Le législateur l’a reçu pour la première fois dans la loi du 4 mars 1889 sur la liquidation judiciaire et précisément dans l’article 20 qui déclarait l’institution valable pour la faillite. A l’instar de la législation française de l’époque, l’Acte uniforme prévoit, comme une simple possibilité, la désignation d’un contrôleur par le juge Commissaire. La situation des organes étant précisée, voyons à présent la modification de la situation du débiteur. Le redressement judiciaire et la liquidation des biens ont des effets sur les biens du débiteur et sur lui-même. Sur la personne du débiteur, contrairement à la législation antérieure qui retenait l’incarcération, l’Acte uniforme pose le principe de son abandon, mais en maintenant quelques exceptions, il faut noter que l’Acte uniforme se situe dans la mouvance française antérieure.
326Les mesures conservatoires se traduisent par l’apposition des scellés, ce sont des actes conservatoires que le syndic ou le débiteur va accomplir. Quant aux mesures tendant à connaître l’actif, leur régime est déterminé par les articles 55 et suivants de l’Acte uniforme. S’agissant des mesures tendant à l’administration des biens du débiteur, l’Acte uniforme a consacré le dessaisissement et la faillite et l’assistance dans la liquidation judiciaire.
327Quant aux effets, le dessaisissement contrairement, comme on le voit, produit des effets négatifs, à savoir l’inopposabilité à la masse, les effets positifs « l’en saisissement » de la masse. Le redressement judiciaire ou la liquidation n’ont pas d’effets uniques sur le débiteur et son patrimoine, il a aussi les effets sur les biens des créanciers. Dorénavant, le jugement consacre l’uniformisation et l’égalité des conditions juridiques des créanciers. Ce qui affecte d’une part le contenu des créances, et d’autre part, l’exercice des droits à travers la réglementation de la suspension individuelle des poursuites. L’uniformisation atteint le contenu des créances à travers l’exigibilité des créances à terme, qui partiellement abandonnées, l’arrêt du cours des intérêts, ainsi que l’arrêt des inscriptions. Quant à la suspension des poursuites individuelles, compte tenu de son importance, l’Acte uniforme ne pouvait que maintenir cette notion. En plus des effets sur les biens des créanciers, il existe ceux relatifs à la révision des droits des créanciers. Les biens du débiteur peuvent faire l’objet de revendication dont l’admission est rendue difficile du fait que ces biens constituent le gage sur lequel les créanciers chirographaires peuvent légitimement compter. Enfin, l’ouverture de la procédure affecte l’étendue des droits du conjoint du débiteur.
328Le régime de la révision du droit du créancier est précisé et fait noter que l’Acte uniforme a déterminé le régime et la nature des différentes catégories de créanciers, ainsi que leurs droits.
329Les effets du redressement judiciaire et de la liquidation des biens sur le débiteur ou sur le créancier étant cernés, voyons à présent les solutions préconisées pour la survie de l’entreprise ou sa disparition. Dans le cadre de la survie de l’entreprise, deux solutions sont possibles : le concordat et la clôture par extinction du passif. Pour le concordat, la procédure est déterminée par la formation du concordat qui peut revêtir deux natures : le concordat ordinaire et le concordat comportant une cession partielle d’actifs. S’agissant de la clôture pour extinction du passif, elle constitue la solution heureuse de la procédure permettant la survie de l’entreprise. Son régime est précisé par les articles 178 et 179 de l’Acte uniforme. Pour mieux rendre compte de cette institution, la législation française a connu une évolution historique remarquable surtout la jurisprudence.
330Selon le célèbre commercialiste, Emmanuel Thaller, « l’Union ne se vote pas, elle provient de ce que le concordat n’a point réussi, est une solution négative résultant de l’échec, du refus ou de l’absence de tout concordat ». Dès lors, il est urgent de faire la situation du patrimoine du débiteur. A cela, le syndic doit dans le mois de son entrée en fonction remettre au juge commissaire les éléments exigés. Les opérations de l’union sont régis par les articles 146 à 172 de l’Acte uniforme. L’union consacre ainsi la réalisation de l’actif, l’apurement du passif et sa clôture. Quant à la clôture pour insuffisance d’actif. Ses conditions sont précisées par l’article 173, de l’Acte uniforme et suivants. Ces effets sont mitigés, certains sont rattachés à la fin tandis que d’autres sont liés à la survie de la procédure collective. Ce qui fait que l’achèvement des procédures collectives entraîne parfois des sanctions.498
331Ainsi, l’Acte uniforme consacre un acquis définitif des procédures collectives modernes d’apurement du passif en distinguant le sort de l’entreprise du sort des dirigeants de celle-ci, au moyen de sanctions patrimoniales, d’interdictions, de déchéances faillites et de sanctions pénales.
332En ce qui concerne la faillite personnelle, elle est déterminée par les articles 186 et suivants. Il s’agit des interdictions générales de faire le commerce, et, notamment de diriger, administrer ou contrôler une entreprise commerciale à forme individuelle ou toute personne morale ayant une activité économique, d’exercer une fonction politique élective et d’être électeur pour ladite fonction politique, d’exercer toute fonction politique administrative, judiciaire ou professionnelle. La durée de ces sanctions est fixée par le juge ; elle ne peut être inférieure à 3 ans, ni supérieure à dix ans.
333Quant aux sanctions pénales499, elles sont relatives aux infractions de banqueroute, ainsi que celles qui leur sont assimilées. Elles ont été maintenues avec une simplification notable, de manière à réprimer de façon appropriée, le comportement du débiteur et des dirigeants de l’entreprise. Il a été jugé opportun de retenir la distinction entre banqueroute simple et banqueroute frauduleuse pour tenir compte du degré de gravité des actes répréhensibles. Par contre, il a été utile de retenir la distinction entre banqueroute simple obligatoire ou facultative. L’Acte uniforme n’a fait que définir les infractions, les sanctions étant du ressort des États parties.
334Il faut enfin retenir que l’Acte uniforme a consacré les procédures collectives internationales. Les procédures collectives internationales sont traitées par les articles 247 à 256, qui forment le titre VI de l’Acte uniforme, ce qui constitue une innovation. L’inclusion de telles dispositions constitue une originalité de l’Acte uniforme tant pour les États parties au traité ohada que pour la plupart des États du monde. Malheureusement, leur portée semble se limiter aux territoires des États parties au traité de l’ohada, alors qu’il eut été possible de leur conférer une grande portée.
335L’étude de l’adaptation des procédures collectives conduit à présent à l’analyse du droit commun de l’arbitrage.
3. La Consécration d’un Acte uniforme constituant le droit commun de l’arbitrage dans l’espace OHADA
336La multiplication des travaux sur l’histoire de l’arbitrage dans le monde et plus particulièrement dans l’espace ohada ne doit pas surprendre, car les enjeux que couvre cette institution sont nombreux. Il s’agit d’enjeux d’ordre juridique, économique500, politique et institutionnel, mais également culturel. C’est pour faire face à tous ces constats, que les États parties au traité de l’ohada ont considéré l’arbitrage comme une matière rentrant dans le droit des affaires. Aussi, le 11 Mars 1999, fut adopté au Cameroun l’Acte uniforme sur le droit d’arbitrage dans l’espace ohada. Cet Acte uniforme n’est que la consécration de l’idée, avancée dans le préambule du traité, selon laquelle : « les États doivent promouvoir l’arbitrage comme instrument de règlement des différends contractuels ».
337Aussi, l’Acte uniforme dans sa structure pose le problème de son champ d’application de la compétence du Tribunal arbitral, de l’instance arbitrale, de la sentence arbitrale, des voies de recours, de la reconnaissance et de l’exécution des sentences. S’agissant du champ d’application, il s’analyse à deux niveaux de point de vue, spatial et matériel.
338Du point de vue spatial, l’article 1er de l’Acte uniforme dispose que « le présent Acte uniforme a vocation à s’appliquer à tout arbitrage, lorsque le siège du Tribunal arbitral se trouve dans l’un des États parties ». Mais une remarque particulière peut être soulevée à ce niveau car l’Acte uniforme ne définit pas la notion de siège et deux acceptions peuvent être retenues : l’une est relative à la « territorialité » du siège considéré comme lieu géographique où se dérouleront les opérations d’arbitrage ; l’autre voit dans le siège de l’arbitrage, non pas un lieu, mais un environnement juridique choisi par les parties pour leur arbitrage.
339Du point de vue matériel toujours, l’article 1er annonce qu’il « a vocation à s’appliquer à tout arbitrage ». Il résulte de ce texte qu’il s’applique aussi bien aux arbitrages civils, que commerciaux. Les rédacteurs de l’Acte uniforme ont à ce niveau été inspirés par la tendance internationale, dans laquelle la notion de commercialité n’est plus dominante.501 D’ailleurs, la loi type, adoptée par le CNUDCI du 21 juin 1985 ne fait pas de distinction entre arbitrage civil et arbitrage commercial.
340Pour les personnes habilitées à compromettre, l’Acte uniforme a également innové, car l’alinéa 1 de cet article a consacré l’arbitrabilité, en plus des personnes physiques « l’État, les établissements publics et les autres collectivités publiques territoriales502 ». Ce qui se pratique d’ailleurs dans plusieurs États, tels que la Côte d’Ivoire, le Togo et même à titre de droit comparé à la position du Droit français en matière internationale.503 S’agissant de la convention arbitrale, l’Acte uniforme a consacré le principe de l’autonomie de la clause d’arbitrage, essentielle dans le régime juridique de la convention d’arbitrage, elle est substantielle ou juridique. Il faut noter que contrairement à la loi type de CNUDCI du 21 juillet 1985, l’Acte uniforme n’a défini ni l’arbitrage, ni la convention. Les effets de la convention, eux s’analysent à deux niveaux : à l’incompétence des juridictions étatiques et au principe de compétence.
341Concernant la constitution du tribunal arbitral504, l’Acte uniforme reconnaît la primauté de la volonté des parties. L’article 5, alinéa 1er, dispose ainsi qu’ils sont nommés, révoqués, conformément à la volonté des parties. L’alinéa 2 contient des dispositions supplétives en cas de difficultés dans la constitution du Tribunal arbitral, le texte distingue selon que le litige arbitral est composé de trois arbitres ou d’un arbitre unique.
342Dans le premier cas, si l’une des parties ne nomme pas un arbitre dans un délai de 30 jours à compter de la réception d’une demande à cette fin émanant de l’autre partie, ou si les deux arbitres ne s’accordent pas sur le choix du troisième dans un délai de 30 Jours à compter de leur désignation. La désignation est effectuée à la demande d’une partie, par le juge compétent dans l’État du siège du tribunal arbitral. Alors que l’article 5 ne vise que l’intervention du juge, l’article 8 envisage cette possibilité d’une assistance judiciaire et celle qui résulterait d’incidents postérieurs à la constitution. L’Acte uniforme a également précisé les statuts des arbitres en son article 6 qui pose les conditions légales et les conditions d’investitures, mais également leurs responsabilités.
343En ce qui concerne le déroulement de l’instance arbitrale, la primauté de la volonté des parties pour organiser la procédure d’arbitrage leur permet de choisir l’encadrement normatif de leur choix. Ainsi le principe de la liberté des parties505 et les arbitres a été consacré et c’est le règlement proposé par la CNUDCI qui a inspiré les rédacteurs de l’Acte uniforme. Aussi comme tout principe juridique, cette liberté a été limitée506.
344Quant aux mesures provisoires et conservatoires, elles sont relatives aux compétences concurrentes entre juridictions étatiques507 et arbitrales. S’agissant du traitement du fond du litige, son régime est fixé par l’article 15 et suivants de l’Acte uniforme, ce traitement se fait en principe en droit sauf, en cas d’amiable composite508. Pour le choix du droit applicable par la volonté des parties, un certain nombre de principes doivent être observés pour sa validité. Il s’agit de la détermination de son champ d’application qui est précisé par l’article 15 de l’Acte uniforme, l’article 17 du Règlement d’arbitrage de la CCJA et l’article 28, alinéa 3 et 4 de la loi type CNUDCI. Au cas ou les parties ne déterminent pas le droit applicable, les arbitres peuvent de manière abjecte déterminer ce droit. A ce titre, les arbitres disposent d’un pouvoir d’appliquer le principe de règle de conflit, mais, aussi celui des règles issues du droit international privé conflictuel des contrats.
345Il est certain que l’application de ce droit ne sera pas aisé, car des incertitudes existent et qui sont relatives aux systèmes de détermination du droit applicable retenu par les arbitres, aux règles du droit international privé national et aux lois de police. Il faut préciser que l’instance arbitrale aboutira à la prononciation d’une sentence arbitrale et à la consécration de voie de recours. Pour ce qui concerne la sentence arbitrale, son régime juridique est déterminé par les articles 19 et suivants de l’Acte uniforme. Ainsi, les articles 19 et 20 de l’Acte uniforme énoncent les règles de fond de la sentence. Elle doit être rendue à la majorité des voix au cas où le collège arbitral est composé de trois arbitres membres, mais, il n’est pas prévu que le Président ait une voix prépondérante en cas de partage de voix.
346Quant à la forme, elle doit comporter un certain, nombre de mentions obligatoires. Le texte ne mentionne pas si ces mentions sont requises à peine de nullité, en revanche la nullité est encourue si la sentence n’est pas motivée et constitue un cas d’ouverture de recours en annulation. Cette obligation de motivation vaut-elle seulement pour les arbitres régis par l’Acte uniforme, ou s’applique-t-elle également aux sentences rendues à l’étranger et pour lesquelles il n’est pas imposé aux arbitres de motiver leur sentence ? Cela est d’autant plus vrai que de rares cas sont observés en matière d’arbitrage international. Sans doute, serait-elle contraire à l’ordre public international de l’OHADA, dont la CCJA aura défini le contenu. Il semble cependant raisonnable d’admettre, comme le fait par exemple la jurisprudence française et à l’instar de la loi type de la CNUDCI, qu’à défaut de la volonté contraire des parties, ces dernières sont présumées avoir exigé des arbitres qu’ils motivent leurs sentences.
347Pour la signature de la sentence, l’Acte uniforme a repris les termes de l’article 1473 du code de procédure civil français. Quant à la reconnaissance et l’exécution de la sentence509, l’Acte uniforme s’est démarqué des articles 1498 et 1999 du nouveau code de procédure civile français. L’article 30 et suivants de l’Acte uniforme détermine la procédure. Le champ d’application de l’article 25 qui vise le recours en annulation, étant limité aux sentences rendues dans l’un des États membres ohada, les sentences rendues hors ohada demeurent soumises au droit commun de l’arbitrage commercial international de chaque État membre ou aux conventions internationales applicables et ne peuvent faire recours en annulation que devant les juridictions compétentes du siège de l’arbitre.
348En ce qui concerne les voies de recours contre la sentence arbitrale, conformément à ce qui est généralement admis dans l'arbitrage international, la sentence arbitrale ne peut faire l’objet d'appel ou d’opposition. L’Acte uniforme a également exclu le pouvoir en annulation. Ainsi, toutes les voies de recours sont ouvertes contre la sentence, le recours en révision et la tierce opposition.
349Après l’étude de l’arbitrage, la refonte et l’harmonisation du droit comptable des entreprises constituent une innovation.
4. La Refonte et l’harmonisation du Droit comptable des Entreprises
350La comptabilité en tant que science a pour but l’enregistrement en unité monétaire des mouvements de valeurs économiques en vue de faciliter la conduite des affaires financières, industrielles et commerciales.
351Dans l’œuvre d’harmonisation du droit des affaires consacrée par l’ohada, il a été adopté le 24 Mars 2000 à Yaoundé, le droit comptable et le plan comptable général ohada commun applicable aux entreprises. Cet Acte uniforme applicable dans les 16 États parties au traité est entrée en vigueur en deux phases :
le 1er janvier 2001 pour les « comptes personnels des entreprises »
le 11 janvier 2002 pour les « comptes consolidés » et les « comptes combinés ».
352Mais il ne serait pas superflu de s’interroger sur cette décision qui a plusieurs fondements.510 Il faut noter que le système comptable de l’ohada constitue un référentiel qui s’inscrit dans la lignée de l’école Continentale de pensée et de pratique comptable, qui se traduit par une histoire en ce domaine qui a prévalu dans la Zone Franc. Ainsi, avant l’avènement de l’Acte uniforme, plusieurs systèmes ont été consacrés dans la Zone Franc de 1947 à nos jours.511
353S’agissant des caractéristiques du système comptable ohada, elles se résument aux principes de prudence, de transparence, d’intangibilité du bilan de l’exercice, de coût historique, de continuité de l’exploitation, de permanence des méthodes, de spécialisation des exercices, etc.
354En ce qui concerne la composante du système comptable ohada, elle comporte l’ensemble de la réglementation comptable jugée adaptée à la situation des entreprises installées dans l’espace des États parties.
355Compte tenu de la technicité de la matière comptable, notre étude s’articulera uniquement sur le dispositif juridique. Il faut noter que sont exclus du domaine de l’Acte uniforme, la comptabilité relative aux banques, aux Etablissements financiers, aux Compagnies d’assurances, et les entreprises soumises à la comptabilité publique.
356Le dispositif juridique comprend quatre titres composés de 113 articles relatifs aux documents comptables, aux règles d’évaluation et de détermination du résultat et aux états financiers. Le Premier titre est consacré aux dispositions relatives au compte personnel des entreprises, qu’elles soient des personnes physiques ou morales. L’Acte uniforme décrit d’une manière générale toutes les dispositions que doivent appliquer les entreprises concernées, énumérées à l’article 2 de l’Acte uniforme.512 Les dispositions du premier titre permettent au système comptable ohada d’atteindre la majorité des entreprises exerçant dans l’espace ohada et d’uniformiser la pratique comptable dans les 16 États.
357Les entreprises concernées peuvent exercer une activité lucrative ou non, et des activités économiques à titre principal ou accessoire. L’exercice comptable de ces entreprises coïncide avec l’année civile. A la fin de cette période, elles doivent présenter des États financiers du système ohada composés du bilan, du compte des résultats, du tableau financier des ressources et des emplois, ainsi que l’état annexé513. Ainsi, il est fait obligation à chaque entreprise d’organiser sa comptabilité pour un enregistrement exhaustif des opérations, leur traitement chronologique, la remise aux utilisateurs des documents requis dans les délais.
358D’une manière générale, la comptabilité doit servir à mesurer les droits et obligations des partenaires, d’instruments de preuve et d’information pour les tiers. L’Acte uniforme a également prévu que les livres comptables obligatoires que sont le journal, la balance générale, le grand livre et le livre d’inventaire, doivent être tenus, mais également la garantie de la fiabilité des traitements comptables informatiques ou manuels.
359Dans le souci d’assurer la fiabilité et l’authenticité des écritures jusqu’aux états financiers, l’organisation comptable a fait l’objet d’une réglementation particulière. L’article 11 de l’Acte uniforme a également réglementé la tenue des états financiers en fonction de la taille des entreprises. Ainsi, les États financiers sont tenus annuellement selon le système normal, le système allégé ou le système minimal de trésorerie pour les petites entreprises. Il est fait désormais obligation à toutes entreprises d’établir des manuels de procédure, permettant la compréhension et le contrôle du système de traitement. L’article 23 institue la date d’arrêt des États financiers annuels, lequel doit intervenir au plus tard en fin avril. En complément de l’article 140 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et au GIE, qui précise que les états financiers, clôturant l’exercice social de la société commerciale, doivent être approuvés dans les six mois qui suivent la clôture de l’exercice. Les sociétés ayant un Commissaire aux comptes doivent communiquer à ce dernier les états financiers annuels et le rapport de gestion au moins 45 jours avant la date de l’assemblée ordinaire annuelle.
360Les règles relatives au bilan et à sa tenue sont déterminées par les articles 30 à 40 de l’Acte uniforme. Les règles d’évaluation et de détermination du résultat appliquées au système ohada, sont fondées sur les principes généralement reconnus par les normes internationales. Du fait que le système ohada accorde une importance particulière à la prépondérance dans la pertinence des états financiers, il lui consacre d’importants développements dans les articles 35 à 65 de l’Acte uniforme. Les éléments sont inscrits en comptabilité à leur coût historique d’acquisition. Une exception est prévue pour permettre aux entreprises de réévaluer leurs biens, selon les dispositions précisées par l’Acte uniforme. La continuité de l’exploitation est présumée pour l’entreprise, c’est-à-dire qu’elle est considérée devant continuer de fonctionner dans un avenir probablement prévisible, la valeur actuelle du système repose principalement sur ce principe.
361Les applications du principe de prudence sont nombreuses et sont reprises sur le système de consultation des amortissements de prévisions, etc. Le système a introduit également l’enregistrement dans ces comptes d’écart de conversion d’actifs, pertes probables, passifs, gains latents pour la différence de charges constatées sur les dettes en créance, en monnaie libellées, étrangères subsistant au bilan. Pour la valeur probante des documents contrôlés, des comptes collectifs et publicité des informations comptables, elle est réglementée par les articles 66 à 73 de l’Acte uniforme.
362Ainsi, le livre Journal et le livre d’inventaire doivent être cotés, paraphés et numérotés de façon continue par les autorités compétentes, afin de rendre fiables les comptabilités tenues manuellement. Les documents informatiques écrits peuvent tenir lieu de Journal et de Livre d’inventaires à condition qu’ils soient identifiés, numérotés et datés dès leur établissement par les moyens légaux, garantissant la chronologie des opérations, l’irréversibilité et la durabilité des enregistrements comptables. La comptabilité régulièrement tenue constitue un moyen de preuve en justice.
363Chaque entreprise détermine sous sa responsabilité les procédures nécessaires à la mise en place d’une organisation comptable, un contrôle interne, fiable et un contrôle externe. Les entreprises doivent désigner un Commissaire aux Comptes et remettre régulièrement à ce dernier les états financiers, le livre d’inventaire, le rapport de gestion, la liste des conventions réglementées, quarante cinq jours au moins, avant la tenue de l’Assemblée générale. Les documents ci-dessus remis au Commissaires aux Comptes, sont dressés par les organes d‘administration de l’entreprise. Les Commissaires aux comptes ont pour mission de certifier que les états financiers sont réguliers et sincères, et donnent une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et le résultat des opérations de l’exercice écoulé. L’Assemblée générale des associés ou actionnaires doit approuver, dans les 6 mois de la clôture de chaque exercice, les états financiers et le rapport de gestion établis par les organes de direction.
364S’agissant du titre II, de l’Acte uniforme relatif aux comptes consolidés, il faut retenir les comptes consolidés et comptes combinés. Pour les comptes consolidés, ils sont réglementés par les articles 74 à 102 de l’Acte uniforme. La consolidation est désormais instituée par le système comptable ohada, qui tranche sur cette question avec les systèmes antérieurs. A ce niveau, il faut noter que les entreprises américaines ont consolidé leurs comptes depuis 1805. En France, la consolidation a commencé en 1965. L’obligation d’établir des comptes consolidés vise les entreprises qui ont leur siège social ou activité principale dans l’un des États parties et qui contrôle de manière exclusive ou conjointe une ou plusieurs entreprises ou qui exercent sur elle une influence notable. Ces entreprises doivent établir et publier chaque année les états financiers consolidés de l’ensemble constitué par toutes ces entreprises, ainsi qu’un rapport sur la gestion de cet ensemble. L’obligation vaut également pour les sociétés anonymes faisant appel public à l’épargne. Il faut noter que cette obligation est selon l’article 77 de l’Acte uniforme, dispensé à certaines catégories d’entreprises.
365En ce qui concerne les comptes combinés, ils sont réglementés par les articles 103 à 110 de l’Acte uniforme. Ainsi, les entreprises qui forment dans l’espace ohada un ensemble économique soumis à un centre de décision situé hors ohada, sans qu’il existe entre elles, les liens juridiques, de domination, établissent et présentent des états financiers dénommés « états combinés » constituent le périmètre de combinaison. La détérioration du périmètre de combinaison repose sur un critère de cohésion et d’unité devant caractériser l’ensemble économique formé, quelque soit leur activité, leur forme juridique ou leur objet lucratif ou non.
366Les États des comptes combinés sont établis sur la base des mêmes règles que celles relatives aux comptes consolidés. L’état annexé aux comptes combinés précise, notamment, la nature des biens à l’origine de la combinaison et la liste des entreprises, incluses dans le périmètre de combinaison, ainsi que les modalités de détermination, de ce périmètre, la qualité des ayants droits aux capitaux propres et le régime de taxation des entreprises sous le régime de combinaison. Les états financiers et le rapport de gestion de l’ensemble, combinés sont remis aux Commissaires aux comptes qui certifient les états financiers. Les différents Actes uniformes étudiés dans ce § bien que comportant des innovations, ont également des limites.
§ 2. Les limites a l’œuvre d’uniformisation du droit des affaires dans la zone franc
367Malgré la volonté des États-parties au traité de consacrer une œuvre vaste d’uniformisation, on peut se rendre compte qu’il existe en réalité plusieurs limites. Elles résultent soit des opportunités imposées au traité ohada (A), soit de l’application des Actes uniformes (B).
A. Les limites imposées à l’OHADA pour des raisons d’opportunité
368De l’analyse du traité ohada, nous pouvons constater que les auteurs ont posé d’une manière explicite la problématique des aspects pénaux de l’ohada et ont occulté certaines matières du droit des affaires. Mais on peut noter également que certaines dispositions des Actes uniformes ont renvoyé la réglementation de certaines matières aux législations nationales.
1. L’exclusion de certaines matières du droit des affaires réglementées par d’autres organisations sous régionales et la réglementation des aspects pénaux du droit des affaires
369Comme on le sait, le droit des assurances ne peut pas et ne doit pas être exclu du domaine du droit des affaires. Mais à la lecture de l’article 2 du traité relatif à l’énumération du droit des affaires, il n’a nulle part été fait référence au droit des assurances tant au niveau des assurances maritimes qu’au niveau des assurances terrestres. Cette exclusion peut être admise pour les assurances terrestres pour des raisons d’opportunité, car il faut noter que certains États de la Zone Franc sont signataires du traité relatif à la Conférence Interafricaine des Marchés d’Assurance. Ce traité a été signé le 10 juillet 1992 à Yaoundé et institue une Organisation de l’Industrie des Assurances. Ce traité appelé CIMA a ainsi succédé à la Convention de Coopération en matière de Contrôle des entreprises et opérations d’Assurances des États Africains et Malgaches signé à Paris le 27 novembre 1973, laquelle faisait suite à la Convention de Coopération signée également à Paris le 27 juillet 1962. Il faut noter que le traité CIMA est structuré de la manière suivante :
- le traité proprement dit contient les règles d’organisation et comprend 68 articles ;
- deux annexes, la première portant code des assurances des États membres de la CIMA 547 articles et la seconde portant le statut et les missions des Directions Nationales des Assurances 3 articles.
370Ces États membres ont confié au Conseil des Ministres le pouvoir d’adopter la législation unique des assurances, de veiller à son application par les États membres et de définir la politique de la conférence en matière de formation. Il a également été créé une Commission Régionale de Contrôle des Assurances qui est l’organe de régulation de la CIMA. Il ressort de l’analyse du traité et de ses annexes que la CIMA poursuit la réglementation unique des entreprises et opérations d’assurances d’une part, et d’autre part, celle des contrats d’assurances. On peut noter que le domaine de la CIMA ne couvre que les assurances terrestres, ce qui exclut les assurances maritimes et aériennes. Afin d’éviter une concurrence avec le domaine régi par la CIMA, l’ohada n’a certainement pas jugé utile d’uniformiser dans les États parties le droit des assurances. Ainsi la réglementation par la CIMA du droit des assurances peut dans une moindre mesure atténuer la limite de l’uniformisation dans le domaine des assurances terrestres. Cependant cela n’empêche pas de s’interroger sur l’exclusion des assurances maritimes et aériennes.
371L’ohada n’a également pas prévu dans son article 2 l’uniformisation du droit de la propriété intellectuelle. L’Organisation Africaine de la Propriété Intellectuelle (OAPI), dont les matières sont traitées par les annexes, font également partie du droit des affaires. Si l’ohada n’a pas prévu d’uniformiser ce droit, c’est certainement à cause de l’existence de cette organisation au niveau de la Zone Franc. Ainsi, on peut remarquer après les indépendances, que les États Africains de la Zone Franc avaient conclu un accord relatif à la création d’un Office africain et Malgache de la Propriété Intellectuelle pour protéger sur leur territoire les droits de la propriété intellectuelle. Cet accord a été par la suite révisé et remplacé par l’organisation de la Propriété Intellectuelle signé le 02 mai 1977 à Bangui entre certains États514 de la Zone Franc. Les États Membres avaient décidé d’adhérer à toutes les organisations internationales de la propriété intellectuelle. L’objectif de l’accord a été d’intégrer le réseau mondial en matière de propriété intellectuelle. L’accord de Bangui a institué une administration et une législation unique de la propriété intellectuelle structurée.
372L’OAPI est une organisation dotée de la personnalité juridique, administrée par un Conseil d’Administration et sa gestion est confiée à un Directeur Général sur la base d’un accord et de 9 annexes. Elle est chargée de l’application des lois uniformes conclues dans les annexes et les règlements y afférents. Ainsi, l’OAPI a consacré en matière de propriété intellectuelle une administration et une législation unique dans la Zone Franc. La législation unique commune est constituée de 9 annexes515.
373Comme on peut le constater l’ohada a exclu délibérément ces matières parce qu’elles sont déjà réglementées. Par ailleurs, pour des raisons d’opportunité, ces limites ont été consacrées. On peut regretter cette situation car dans certains cas on peut assister à un vide juridique. L’OAPI n’a pas réglementé tous les domaines. Il en va de même pour l’ohada516. Si d’une part, on peut constater que l’ohada a occulté certaines matières centrales du droit des affaires, d’autre part, on peut constater que d’une manière explicite elle a posé la problématique des aspects pénaux du droit des affaires
374En effet, une des particularités du Titre II relatif aux régimes des Actes Uniformes réside dans l’article 5 du traité. L’alinéa 2 de l’article 5 dispose « les Actes uniformes peuvent inclure des dispositions d’incrimination pénale. Les États parties s’engagent à déterminer les sanctions pénales encourues ». Ainsi, on constate que l’ohada est, en théorie, compétente pour procéder à des incriminations sans pouvoir déterminer les sanctions applicables qui sont du ressort des États parties. Cette difficile rencontre entre le droit pénal national et le droit communautaire n’est pas récente. En effet, la « difficile rencontre du droit pénal et du droit communautaire517 » a toujours été signalée par ceux qui, spécialistes ou non du droit criminel, ont mené des travaux consacrés en tout ou partie à la place du droit pénal dans la constitution européenne518. Il faut noter que les sanctions des atteintes protégées par le droit communautaire sont nécessaires, mais les États membres d’une communauté acceptent difficilement de laisser la sanction de leur souveraineté en matière pénale entre les mains d’autres institutions. Surtout la détermination des comportements constitutifs d’infractions et les peines qui leur sont applicables.
375En application de l’article 5 du traité de l’ohada, les États-parties s’engagent à fixer le quantum des peines applicables, laissant l’incrimination des sujets à l’organisation sous régionale. Cet abandon de souveraineté a entraîné des conséquences majeures car l’élément légal de l’infraction a été éclaté entre l’organisation communautaire et les États parties, ce qui entraînera son affaiblissement. Si l’ohada, par l’application de l’article 5, a élargie le champ d’application spatial des infractions d’affaires, il a aussi rétréci le champ infractionnel. Cette situation a entraîné une hétérogénéité des sanctions.
376Par la méthode du renvoi législatif, l’ohada a transféré aux États la sanction des incriminations contenues dans les Actes uniformes. Le rattachement des peines aux législations nationales peut être justifié par des raisons juridiques519 et économiques520. Il entraînera des conséquences telles que la disparité des sanctions pénales et l’apparition de paradis pénaux. Pour être efficace, le droit des affaires harmonisé doit être sanctionné. C’est là tout l’intérêt du droit pénal qui ne doit pas être en reste dans l’œuvre d’harmonisation. Le problème n’est pas de mettre le droit pénal au service du droit communautaire afin de permettre les sanctions en cas de faute, mais plutôt comment réaliser cette articulation. Il faut noter que la solution à ce problème n’est pas facile, car à côté de l’impératif d’harmonisation des législations pénales pour sanctionner le droit communautaire, il y a celui du respect de la souveraineté des États qui ne doivent pas être dépossédés de leur pouvoir de légiférer en matière pénale. C’est pour trouver une solution heureuse à ces deux impératifs qu’un compromis a été adopté, consistant à incriminer dans les Actes Uniformes les comportements qui portent gravement atteinte aux intérêts protégés et à renvoyer aux législations nationales la détermination des sanctions.
377Cette rencontre entre les deux ordres juridiques, bien que nécessaire parait difficile. Ainsi l’analyse des dispositions pénales prévues dans les différents Actes uniformes permettra de rendre compte du contenu des incriminations et de la détermination des sanctions. Dans certains Actes uniformes, il a été prévu des dispositions d’ordre pénal. Il s’agit notamment des Actes uniformes relatifs au droit des sociétés commerciales, du groupement d’intérêt économique, à l’organisation des procédures collectives d’apurement du passif et au droit commercial général. Les autres Actes Uniformes ont prévu expressément peu de dispositions pénales. Les dispositions pénales contenues dans l’Acte uniforme sur le droit des sociétés commerciales sont de plusieurs ordres. La Troisième partie de ce texte est intitulée « Dispositions pénales » (article 886 à 905). Il s’agit d’abord des infractions liées à la constitution des sociétés. La législation ohada a prévu un certain nombre de conditions de fond à respecter et des formalités à accomplir pour la constitution de la société.
378Les conditions de fond et de forme sont encadrées par un contrôle préventif de l’autorité administrative et leur violation est parfois réprimée, le cas échéant, par l’autorité judiciaire. Selon l’article 101 de l’Acte uniforme sur les sociétés commerciales et du GIE « Toute société est constituée à compter de la signature de ses statuts ». A ce stade, le droit pénal intervient pour garantir la régularité de la constitution de la société. Ces infractions sont commises soit dans le cadre de la formation du capital social, soit dans le cadre de l’activité d’une société irrégulièrement constituée.
379S’agissant de la formation du capital, l’infraction peut être commise dans sa recherche ainsi que dans la simulation521 des souscriptions ou des versements qui peuvent être faites de même que la publication de faux522.
380Les infractions peuvent également être commises dans la réalisation du capital à travers l’établissement des certificats de dépôts de souscription ou de versements ou la surévaluation des apports en nature. En ce qui concerne l’activité d’une société irrégulièrement constituée, les infractions peuvent être commises dans le cadre de l’émission des actions ou de leur négociation. En matière d’émission d’actions, l’article 886 de l’AUSC dispose « Est constitutif d’une infraction pénale, le fait pour les fondateurs d’émettre des actions avant l’immatriculation, à n’importe quelle époque lorsque l’immatriculation est obtenue par fraude ou que la société est irrégulièrement constituée ».
381Pour la négociation des actions, l’article 888 dispose : « Encourent une sanction pénale, ceux qui auront sciemment négocié :
- des actions nominatives qui ne sont pas demeurées sous forme actions nominatives jusqu'à leur entière libération ;
- des actions d’apport avant l’expiration du délai pendant lequel elles ne sont pas négociables ;
- des actions de numéraire pour lesquelles le versement du quart du nominal n’a pas été effectué ».
382Il est important de faire la distinction entre ces deux articles. Si l’article 886 incrimine l’émission d’actions irrégulières, l’article 888 lui, incrimine par l’inobservation de toutes les formalités de constitution.
383En plus des infractions pénales relatives à la création des sociétés, il existe également ceux relatives à leur fonctionnement.
384S’agissant des infractions relatives au fonctionnement des sociétés, certaines sont commises durant la gestion de la société. Il s’agit des abus dans la gestion par l’usage abusif des biens et crédits de la société, par l’atteinte au droit des sociétés, mais également des infractions relatives au contrôle de la gestion par l’obstacle au contrôle ou le refus de contrôle.
385Dans le cadre de leur fonctionnement, certaines infractions sont commises dans la comptabilité de la société, par des irrégularités comptables, suite à la distribution de dividendes fictifs ou par la communication de la comptabilité.
386Pour la distribution de dividendes fictifs, l’article 889 dispose : « Encourent une sanction pénale, les dirigeants sociaux qui, en l'absence d'inventaire ou au moyen d'inventaire frauduleux, auront, sciemment, opéré entre les actionnaires ou les associés la répartition de dividendes fictifs ».
387Quant à la communication de la comptabilité, l’article 890 de l’AUSC dispose : « Encourent une sanction pénale, les dirigeants sociaux qui auront sciemment, même en l'absence de toute distribution de dividendes, publié ou présenté aux actionnaires ou associés, en vue de dissimuler la véritable situation de la société, des états financiers de synthèse ne donnant pas, pour chaque exercice, une image fidèle des opérations de l'exercice, de la situation financière et de celle du patrimoine de la société, à l'expiration de cette période. ».
388Comme l’article 437 al. 2 de la loi française de 1966, l’Acte uniforme punit le délit de présentation ou de publication des états financiers infidèles.
389Les modifications de capital peuvent également être source de naissance d’infractions soit dans le cadre de l’augmentation de capital par l’émission d’actions nouvelles (article 893), ou le non respect du droit préférentiel de souscription (articles 894 et 895), soit dans le cadre de la réduction du capital (article 628 AUSC).
390Au même titre que le fonctionnement des sociétés, leur disparition peut également entraîner la Commission d’infractions. La disparition de la société peut avoir lieu aux termes fixés mais elle peut également être prématurée. Dans le cadre de la gestion, la société peut connaître des périodes de prospérité ou de difficulté. En cas d’échec, les dirigeants de la société peuvent également être sanctionnés. Ainsi la banqueroute et les infractions connexes sont sanctionnées pénalement.
391Dans le cadre de la dissolution de la société, des sanctions sont généralement prévues soit en cas de perte de la nature du capital (article 736 de l’AUSC) soit dans le cadre de la liquidation de la société.
392Comme nous avons pu nous en rendre compte, la méthode utilisée par l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du GIE consiste à renvoyer la sanction à des textes à créer. Elle est conforme à l’esprit de l’article 5 al. 2 du traité et respecte les prérogatives des États en matière d’établissement des sanctions523. Dans l’Acte uniforme, les formules utilisées pour annoncer les incriminations traduisent la volonté du législateur communautaire de laisser aux États parties toute la liberté de déterminer la sanction qu’ils jugent appropriée.
393S’agissant de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général, les dispositions d’ordre pénal sont peu nombreuses. On peut noter quelques infractions punissables dans cet acte uniforme.
394L’article 43 de l’Acte uniforme sur le droit commercial général se rapporte au non-respect des pénalités d’immatriculation. C’est ainsi que l’article dispose : « toute personne tenue d’accomplir une des formalités prescrites au présent titre et qui s’en est abstenue, ou encore qui aurait effectué une formalité par fraude, sera punie des peines prévues par la loi pénale nationale, ou encore le cas échéant par la loi pénale spéciale prise par l’État partie en application de l’Acte uniforme ». Ainsi, deux faits sont incriminés à ce titre : le fait de s’abstenir d’accomplir une des formalités et le fait d’accomplir frauduleusement un acte. Le second fait constitue une fraude. Les violations des règles de forme relatives aux Actes d’immatriculation présentes dans le titre II articles 25 à 42 de l’Acte uniforme sur le droit commercial général constituent donc des infractions.
395Les manœuvres frauduleuses en matière d’inscription désuète mobilière n’échappent aux actes incriminés par l’ohada. Ainsi le fait de mentionner des infractions, intentionnellement altérées et les inscriptions faites frauduleusement constituent-elles des infractions aux règles d’inscription de sûretés mobilières.
396Selon l’article 68 de l’Acte uniforme, « Toute inscription de sûretés mobilière, effectuée par fraude, ou portant des indications inexactes données de mauvaise foi sera punie des peines prévues par la loi pénale nationale. La juridiction compétente en prononcera la condamnation et pourra ordonner la rectification de la mention inexacte dans les termes qu’il déterminera ». Les mentions inexactes peuvent être, à notre avis, considérés comme de fausses déclarations et doivent être qualifiées de faux et usage de faux. Certains actes formels constatés à l’égard d’un professionnel du commerce, tel le locataire gérant d’un fonds de commerce en l’occurrence, sont pénalement répréhensibles. Le fait de s’abstenir de mentionner la qualité de locataire et le numéro d’immatriculation dans certains documents professionnels énumérés à l’article 108 de l’Acte uniforme constitue une infraction. Cette catégorie peut être classée dans la catégorie des négligences ou omissions.
397L’agent commercial est soumis aux règles de secret professionnel et peut faire l’objet de poursuites pénales. À ce titre, l’article 187 de l’Acte uniforme sur le droit commercial général dispose « l’agent commercial, ne peut, même après la fin du contrat, utiliser ou révéler les informations qui lui ont été communiquées par le mandat à titre confidentiel, ou dont il a eu connaissance à cause du contrat. Lorsqu’une interdiction de concurrence a été convenue entre l’agent commercial et son mandat, l’agent a droit à l’expiration du contrat à une indemnité spéciale ».
398En effet, il lui est interdit de révéler les informations dont il a eu connaissance ou qui lui ont été confiées à titre confidentiel, ou sous le sceau du secret professionnel au cours de l'exercice de ses fonctions de mandataire. On peut donc parler, en terme d’infraction, de violation de secret d’ordre professionnel. Mais le législateur de l’ohada n’aborde pas, dans ce cas, l’aspect pénal. Toutefois, rien ne s’oppose à ce que la partie lésée, en cas de rupture du secret, engage des poursuites pénales pour obtenir une sanction pénale et une réparation du préjudice subi. La technique de pénalisation utilisée dans l’Acte uniforme sur le droit commercial est la même que celle utilisée dans l’Acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises prévues dans les États parties au traité ohada.
399En effet, l’article 111 de l’Acte uniforme sur le droit comptable dispose : « encourent une sanction pénale, les entrepreneurs individuels et dirigeants sociaux qui :
- n’auront pas, pour chaque exercice, dressé l’inventaire et établi les états financiers annuels, ainsi que, le cas échéant, le rapport de gestion et le bilan social ;
- auront sincèrement établi et communiqué les États financiers ne délivrant pas une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l’exercice.
400Les infractions prévues par le présent Acte uniforme seront punies conformément aux dispositions du droit pénal en vigueur dans chaque État partie ». En effet, dans cette disposition, on peut constater que l’incrimination relève de l’Acte uniforme et la sanction relève des États parties.
401Comme le droit des sociétés commerciales, il est admis, aux termes de ces développements, que ces Actes uniformes posent le principe de l’incrimination et laissent aux États parties la sanction et la détermination des peines.
402Pour les autres Actes uniformes, on peut curieusement constater que le législateur ohada renvoie pour les peines à des textes préexistants.
403Il s’agit des Actes uniformes relatifs aux procédures collectives d’apurement du passif, aux Actes uniformes relatifs aux sûretés et aux Actes uniformes relatifs aux voies d’exécution.
404Pour l’Acte uniforme relatif aux procédures collectives d’apurement du passif, en l’occurrence le redressement et la liquidation judiciaire, il existe une réglementation et une organisation précise desdites procédures. Les articles 226 à 246 prévus dans le titre V intitulé « banqueroute et autres infractions » consacrent la qualification des actes que le législateur ohada considère comme des infractions.
405Dans ces Actes uniformes, on peut distinguer une consécration au domaine pénal relatif à la banqueroute proprement dite, (les articles 127 à 229), les actes réputés de banqueroute (articles 230 à 242), les détournements et les différents abus tels qu’abus de confiance, de faiblesse, de pouvoir, de position privilégiée (articles 243 à 245). L’analyse des dispositions pénales de cet Acte uniforme permet de constater que le législateur ohada consacre des incriminations commises par l’ensemble des États membres. Ainsi, on peut plutôt parler de transposition que d’innovation.
406Quant à la recherche de la norme de sanction, elle peut être facilement retrouvée car l’Acte uniforme choisit elle-même la qualification qui existe dans la loi nationale. C’est le cas par exemple de certains actes imputables aux commerçants, personnes physiques et aux sociétés commerciales en cas de banqueroute simple ou frauduleuse. Du fait que les législations nationales comportent des dispositions sanctionnant ces délits, on peut facilement appliquer des dispositions ayant prévu ces sanctions524. Ces mêmes principes peuvent être appliqués aux sanctions prévues pour les personnes physiques et surtout pour les infractions assimilées aux banqueroutes. S’il est aisé, dans certains cas, de trouver la norme nationale applicable, dans d’autres, cela n’est pas facile car les termes utilisés par l’Acte uniforme sont vagues, ce qui ne facilitera pas le choix des dispositions applicables. Ce sont les cas de la répression des agissements imputables au proche du débiteur en cessation des paiements ou aux créanciers, (articles 241 et 244), c’est le cas également des infractions prévues au préjudice d’un incapable, etc.
407Cette difficulté de recherche des textes applicables peut jeter le trouble dans l’esprit du juge national525, en cas de recherche de la peine applicable.
408L’illustration de cette difficulté, peut également être retrouvée dans le renvoi fait par l’article 243 de l’Acte uniforme.
409Cette utilisation de formules vagues pourra entraîner des abus d’interprétation du juge communautaire. S’agissant de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés, l’article 97, dernier alinéa, a prévu que les peines prévues pour le délit d’abus de confiance s’appliquent au débiteur ou à toute personne qui, par des manœuvres frauduleuses, prive le créancier nanti de ces droits ou les diminue. L’Acte uniforme en déterminant par référence à une infraction existante dans les lois nationales, s’est arrogé indirectement le pouvoir de fixer la mesure de la sanction. La méthode de renvoi à un texte préexistant est également prévue dans l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement des créances et des voies d’exécution. Les incriminations et agissements visés sont punis de peines applicables dans la législation nationale.
410Ainsi, la lecture des mentions prévues à l’article 100 de cet Acte uniforme permet de conforter cette position. L’analyse de l’article 109 alinéa 7 et 8 consacrés aux opérations de saisie, vont également dans le même sens.
411D’une manière générale, au cours de l’application des règles portant sur le recouvrement des créances et des voies d’exécution et les règles sur les sûretés, les infractions telles que les fraudes, les faux et usage de faux, l’abus de pouvoir, l’abus de confiance, l’escroquerie, l’abus de blanc seing, le recel, etc., toutes ces infractions peuvent être commises au cours des opérations de procédure prévues par ces deux Actes uniformes. Ces difficultés rencontrées dans la mise en œuvre des règles de fond se rencontrent également dans les règles de procédures526. L’analyse de l’article 14 du traité, qui donne compétence à la Cour commune de justice et d’arbitrage pour se prononcer sur la décision rendue par les juridictions d’appel des États parties, dans les affaires relatives à l’application des Actes uniformes, réserve expressément le cas des décisions appliquant des sanctions pénales. Ainsi, on peut se rendre compte que la technique utilisée dans les trois Actes uniformes que sont l’Acte uniforme sur les sûretés, l’Acte uniforme sur les procédures d’apurement du passif et l’Acte uniforme relatif aux procédures simplifiées de recouvrement des créances et les voies d’exécution, conduit à faire jouer au législateur national un rôle secondaire. En plus de ces limites, le renvoi aux législations nationales constitue également une limite à l’œuvre d’harmonisation.
2. Le renvoi de la réglementation de certaines matières aux législations nationales
412Quelle que soit la grandeur de la volonté d’harmonisation, il est à noter, que dans certains domaines, les lois nationales continueront à s’appliquer, ce qui constituera des limites. Ainsi, à travers les divers Actes uniformes, certaines dispositions renvoient de façon implicite ou explicite aux législations nationales. Dans l’Acte uniforme sur le droit commercial général, plusieurs dispositions consacrent ce renvoi.
413S’agissant du bail commercial, il est consacré par les articles 69, 74, et 81 de l’AUDCG. L’article 69 AUDCG, fixe les conditions d’application du bail commercial, en distinguant les locaux, les immeubles et les terrains nus, ayant pour caractéristique commune d’être tous des biens immobiliers.
414L’article 74 fixe les obligations d’entretien, il impose au bailleur de faire procéder à ses frais dans les lieux donnés à bail, à toutes les grosses réparations devenues nécessaires et urgentes. L’article 81 exige le bon usage des locaux loués. Cet article fait obligation au preneur « d’exploiter les locaux donnés à bail, en bon père de famille, et conformément à la destination prévue au bail, ou, à défaut de convention écrite, suivant celles présumées d’après les circonstances ». Il faut noter que la prescription est redondante, car une exploitation en « bon père de famille » implique, pour le moins, que le preneur se conforme aux destinations prévues au bail. Dans les dispositions pertinentes de ces trois Actes uniformes, le législateur communautaire, bien qu’il ait consacré un droit autonome spécial relatif à la réglementation du bail, n’a pas manqué de consacrer implicitement l’usage.
415Pour la vente commerciale, l’article 115 de l’AUDCG, dispose : « la cession du fonds de commerce obéit aux règles générales sur la vente, sous réserve des dispositions ci-après, et des textes spécifiques à l’exercice de certaines activités ».
416Cet article énonce que la cession du fonds de commerce obéit aux règles générales sur la vente sous réserve des dispositions particulières prévues par cet article ou par les textes spécifiques à l’exercice de certaines activités commerciales. La référence au droit commun de la vente, ainsi que l’absence de dispositions déclarées d’ordre public, font que la cession du fonds de commerce est assez libérale. La réglementation reste tout de même minutieuse en raison de la nécessité de protéger les intérêts en présence. Le contrat de vente est défini par l'article 1582 du code civil français comme la « convention par laquelle, l’un s’oblige à livrer une chose et l’autre à le payer ». Cette définition est différente de celle de l’article 264 du COCC du Sénégal, selon laquelle « la vente est le contrat par lequel, le vendeur s’engage à transférer la propreté d’une chose corporelle ou incorporelle à l’acquéreur, moyennant un prix fixé en argent ». S’agissant du statut des intermédiaires de commerce, ce sont les articles 143, 145 et 150 qui renvoient aux législations nationales.
417En effet, selon l’article 143 « les règles du mandat s’appliquent aux relations entre l’intermédiaire, le représenté et le tiers, sous réserve des dispositions particulières du présent livre ». L’article 143 de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général, tend à rappeler que l’intermédiaire de commerce est un mandataire, lorsqu’il soumet les relations entre l’intermédiaire, le représentent et le tiers aux règles du mandat. Les règles s’appliquent à tout contrat d’intermédiaire, sauf lorsque la loi elle-même aura prévu des dispositions spécifiques dérogatoires au droit commun du mandat.
418Réglementé aux articles 1984, et suivants du Code commerce, « le mandat est généralement présenté comme un procédé permettant aux mandants qui donnent pouvoir à cet effet par contrat, de faire des actes juridiques par l’intermédiaire d’un mandataire et d’être ainsi représenté par ce dernier dans ses rapports avec le tiers…. 527 ». Selon l’article 454 du code des obligations civiles et commerciales du Sénégal, « le mandat est le contrat par lequel, le mandant donne au mandataire le pouvoir de faire à ses lieux et places un ou plusieurs actes juridiques. Le mandat est gratuit ou salarié »
419Ainsi, à travers ces définitions, le contrat de mandat est bien précisé et l’article 143 de l’AUDCG a posé en principe l’application de la théorie générale du contrat de mandat sauf au cas où le législateur communautaire en décide autrement.
420De cette disposition, une remarque importante s’impose. Les pouvoirs de l’intermédiaire découlent du contrat mandat.
421Ce contrat consensuel réglemente les pouvoirs du mandataire. Ces limites sont également fixées par les articles 146 et 147 de l ‘Acte uniforme. En ce domaine, l’Acte uniforme ressemble à l’article 1988 du Code Civil, dont l’alinéa 2 exige un mandat express pour certains actes comme l’hypothèque ou l’aliénation d’un bien.
422S’agissant de l’article 145, il dispose : « le représenté et l’intermédiaire d’une part, l’intermédiaire et le tiers saisi, d’autre part, sont liés par les usages dont ils avaient ou devaient avoir connaissance et qui, dans le commerce, sont largement connus et régulièrement observés par les parties à des rapports de présentation de même type dans la branche commerciale considérée ».
423Ils sont également liés par les pratiques qu’ils ont établies entres eux.
424Selon les termes de l’article 145, la définition des pouvoirs de l’intermédiaire, relève également des usages. Ces usages peuvent être conventionnels, qui tirent leur force obligatoire du contrat528. L’article 145, incorpore les usages comme loi, ce qui les rend obligatoires, lorsque les parties ne les ont pas écartés dans leur convention529.
425Quant à l’article 150 de l’AUDCG, il précise que la responsabilité de l’intermédiaire est soumise aux règles de mandat, sauf disposition contraire. En ce qui concerne le régime juridique de la vente entre professionnels, l’article 205 AUDCG dispose « outre les dispositions du présent livre, la vente commerciale est soumise aux règles du droit commun ».
426Il résulte des articles 205 et suivants, qu’en dehors des dispositions contenues dans le livre V de l’Acte uniforme, d’autres règles ont vocation à s’appliquer. Ainsi, on assiste à la consécration d’une combinaison des règles spéciales de la vente avec les règles du droit commun d’une part, et la combinaison des règles spéciales de la vente avec les usages, d’autre part..
427Quant à la vente commerciale, le renvoi concerne les articles 206, 207, 221, 223 à 225, 231, 272 de l’AUDGG. Selon l’article 206, « en matière de vente commerciale, la volonté et le comportement d’une partie doivent être interprétés selon l’intention de celle-ci, lorsque l’autre partie connaissait ou ne pouvait ignorer cette intention ».
428La volonté et le comportement d’une partie doivent être interprétés selon le sens qu’une personne raisonnable, de même qualité que l’autre partie, placée dans la même situation leur aurait donné.
429Pour déterminer l’intention d’une partie, ou celle d’une personne raisonnable, il doit être tenu compte des circonstances de fait, et notamment des négociations qui on pu avoir lien entre les parties, des pratiques qui sont établies entre elles, voire encore les usages en vigueur dans la profession.
430L’analyse de cet article permet de constater la primauté de la volonté des parties dans l’œuvre d’interprétation des contrats de vente et l’appréciation de la volonté des parties d’une part, et la référence aux éléments liés à la phase précontractuelle aux pratiques et aux usages dans la mise en œuvre de la phase d’interprétation de la volonté des parties, d’autre part.
431Toujours dans le sens de l’article 206, l’article 207 alinéa 1 AUDCG fait également référence aux « usages auxquels, elles ont consenti et par les habitudes qui sont établies dans leurs relations commerciales ».
432L’alinéa 2 de cet article abonde dans le même sens, sauf stipulation contraire des parties dans la convention. L’article 221 de l’AUDCG fait également référence aux usages quant aux dispositions usuellement utilisées dans le contrat de vente de marchandises.
433Les articles 223 à 225 de l’AUDCG renvoient également aux usages et aux dispositions usuellement utilisées dans le contrat de vente des marchandises.
434L’article 231 de l’AUDCG consacre la théorie de la garantie et l’obligation qui pèse sur le vendeur. En effet, les articles 231et 232 distinguent la garantie des vices cachés et la garantie d’éviction.
435S’agissant de la garantie des vices cachés, les auteurs font remonter cette garantie au droit Romain. Elle a été reprise par le code civil de 1804 dans les articles 1641 à 1649. Pour le Sénégal, il résulte de l’article 287 du COCC.
436Cette disposition permet à l’acheteur de recourir à plusieurs moyens, même si elles n’ont pas été prévues par le droit communautaire et qui régissent les régimes du contrat. L’article 272 de l’AUDCG dispose : « l’acheteur qui a perdu le droit de décliner le contrat résolu ou d’exiger du vendeur la livraison de marchandises de remplacement en vertu de l’article précédent, conserve le droit de se prévaloir de tous les autres moyens qu’il tient du contrat ».
437S’agissant des prescriptions, l’article 18 AUDCG retient la prescription générale, en ce qui concerne le droit né des obligations entre les commerçants. Quant aux articles 274 à 282 AUDCG, ils réglementent le régime de la prescription en matière de vente commerciale.
438Dans ces différentes dispositions, le législateur ohada renvoie de façon implicite aux législations nationales en utilisant le concept et mot utilisés dans les États parties. S’agissant des articles 7 à 10 et 138 alinéa 2 de l’AUDCG, il traite de l’incapacité juridique, de l’émancipation, des interdictions et des incompatibilités. Il est évident que le régime des concepts touche l’État et la capacité des personnes. Dans la plupart des États membres de l’ohada, cette réglementation relève de la souveraineté des États, ce qui veut dire qu’il revient aux États parties de déterminer le régime de ces notions et concepts. Quant à l’article 140 AUDCG en son alinéa 3, il traite des dispositions nationales du droit international privé.
439Dans l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et aux GIE, certaines dispositions renvoient aux législations nationales. En ce qui concerne les règles relatives aux causes de nullité des contrats en général et les contrats de société en particulier, le renvoi aux législations nationales est fréquent. L’article 270 AUSC dispose : « la société à nom collectif, est celle dans laquelle, tous les associés sont commerçants et répondent indéfiniment et solidairement à des dettes sociales ». Les associés de la société en nom collectif sont indéfiniment et solidairement responsables du passif social et, ont tous la qualité de commerçant. Cela explique l’existence de règles particulières dans l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique, fixant les conditions exigées pour ce type de société. Ainsi, le consentement et la capacité occupent une place particulière dans la constitution de ces types de sociétés et leur violation est une cause de nullité.
440Quant au domaine de la responsabilité indéfinie et solidaire, il s’applique tant au niveau des associés qui y sont soumis et qu’aux dettes concernées. Les articles 7,8 et 9 AUSC traitent de la qualité d’associé, ils posent ainsi les conditions que doit remplir un associé à une société commerciale. Ces conditions sont réglementées par le droit national de chaque État partie au traité. Le droit communautaire ne doit pas intervenir dans la réglementation de ces conditions. L’article 906 AUSC traitent de la contre valeur de la valeur en monnaie CFA pour les États qui ont leur monnaie en CFA, et précise les conditions exigées pour que le Conseil des Ministres en cas de besoin intervienne pour définir cette parité. Cet article oblige le respect des spécificités nationales.
441L’article 43 AUSC réglemente le règlement des apports en numéraire d’un associé. Selon cet article, « en cas de retard dans le versement, les sommes restant dues à la société partie de plein droit au taux légal, à compter du jour où le versement devrait être effectué, sans préjudice de dommages et intérêts, s’il y a lieu ». Ce texte ne dit pas dans quel État s’applique ce taux légal de sorte que des conflits de loi sont possibles.
442L’article 916 AUSC réglemente la particularité des sociétés à statut particulier. Pour ces sociétés, l’Acte uniforme n’abroge pas les dispositions législatives auxquelles sont assujetties les sociétés soumises à un régime particulier (banques, assurances, sociétés nationales ou d’économies mixtes…).
443Dans cette disposition, on peut constater que les législations nationales continueront à régir la forme législative de ces sociétés. Ainsi, on constatera que la coexistence de deux ordres juridiques dans la gestion de ces sociétés, un ordre juridique national et un ordre juridique communautaire.
444Une remarque particulière doit être faite quand l’Acte uniforme utilise la notion de juridiction compétente. Cette notion, que le législateur communautaire utilise dans l’Acte uniforme sur le droit des sociétés commerciales et du GIE, n’est qu’un subterfuge pour ne pas trop entrer dans les détails, car dans plusieurs États parties, les dénominations ne sont pas les mêmes. Cette notion de juridiction compétente est consacrée dans plusieurs articles530. S’agissant de la réglementation des succursales, plusieurs dispositions renvoient dans certaines531 situations aux droits dérogatoires des États parties.
445Dans l’Acte uniforme portant organisation des sûretés, plusieurs dispositions renvoient au droit national des États parties.
446En ce qui concerne les règles de preuve, l’article 49 AUS dispose « quelle que soit la nature de la dette garantie, le contrat de gage n’est opposable aux tiers que s’il est constaté par un écrit dûment enregistré, contenant indication de la somme due, ainsi que l’espèce, la nature et la quantité des meubles donnés en gage. Toutefois, l’écrit n’est pas nécessaire dans les cas où la loi nationale de chaque État partie admet la liberté de preuve, en raison du montant de l’obligation ».
447Cet article traite de la formalité de l’écrit, cette formalité est exigée pour permettre son enregistrement afin de rendre le gage opposable aux tiers532.
448Le texte ne précise pas la nature de l’écrit, mais il peut s’agir vraisemblablement d’un acte sous-seing privé, autrement, la formalité de l’enregistrement ne s’expliquerait pas.
449Il faut noter, que l’exigence de l’écrit n’est qu’un principe. En effet, l’alinéa 2 de cet article, pose l’hypothèse de la « non nécessité de l’écrit au cas ou la loi nationale de chaque État admet la liberté de preuve en raison du montant de l’écrit ».
450Il en est précisément ainsi, en raison de la faible importance de la dette. En apportant cette précision, les textes ne tiennent pas compte de l’exception relative de la qualité des parties.
451L’article 25 AUS dispose : « l’extinction partielle ou totale de l’obligation principale entraîne, dans la même mesure, celle de l’engagement de la caution. »
452La dation en paiement libère définitivement la caution même si le créancier est ensuite évincé de la chose acceptée par lui. Toute clause contraire est réputée non écrite. La vocation de l’obligation principale par changement d’objet ou de cause, la modification des modalités ou sûretés dont elle était assortie libèrent la caution à moins qu’elle n’accepte de reporter sa garantie sur la nouvelle dette. Toute clause contraire, stipulée avant la novation, est réputée non écrite.
453Les engagements de la caution simple ou solidaire passent à ses héritiers uniquement pour les dettes nées antérieurement au décès de la caution. La plupart des concepts ou règles utilisés dans cet article sont empruntés au droit commun national, ce qui peut entraîner les risques de conflit, en cas de divergence entre le droit communautaire et les droits nationaux. Parmi les différentes dispositions qui traitent de l’extinction du cautionnement, l’article 25 en est la principale. Dans son alinéa premier, il dispose que : « l’extinction partielle ou totale de l’obligation principale entraîne dans la même mesure celle de l’engagement de la caution ». Le droit commun de l’imputation des paiements prend parti pour l’extinction de la dette cautionnée, qui est celle que le débiteur a le plus intérêt à éteindre.
454La dation en paiement constitue une exception à la règle de l’identité du paiement et de l’objet de l’obligation. La novation suppose un élément objectif qui se traduit par le changement d’objet ou de partie ou de cause. L’article 46 AUS traite des meubles corporels ou incorporels. Selon cet article, « tout bien meuble, corporel ou incorporel, est susceptible d’être donné en gage ». Les parties peuvent convenir de la subrogation, en cours d’exécution du contrat, de la chose gagée par une autre chose. Le gage peut également porter sur des sommes ou des valeurs déposées à titre de cautionnement par les fonctionnaires, les officiers ministériels ou toute autre personne pour garantir les abus dont ceux-ci pourraient être responsables, et les prêts consentis pour la constitution de ce cautionnement. On peut noter également que les dispositions de cet article renvoient de manière implicite aux droits communs nationaux.
455On peut noter également que ces renvois aux droits spéciaux nationaux peuvent être illustrés par les articles 148 al. 2 et 149 al. 3 en ce qui concerne les créanciers de salaires super privilégiés. Ces éléments dépendent des rémunérations de chaque pays et échappent à l’uniformisation préconisée par le droit communautaire et, à ce titre, le renvoi concerne le domaine judiciaire. En réalité, le super privilège des salaires est une création du droit du travail. Il est organisé par ce droit autonome sur la base de la convention n° 95 de 1949 de l’O.I.T. concernant la protection du salarié.
456L’article 53 AUS constitue une disposition dans laquelle le droit communautaire renvoie aux règles spéciales reconnues aux sûretés. En effet, cet article dispose « les propriétés incorporelles sont mises en gage dans les conditions prévues par les textes particuliers à chacune d’entre elle. A défaut des dispositions légales ou de stipulation contraire, la remise au créancier du titre qui constate l’existence du droit opère délaissement du constituant ».
457Ce respect des spécificités du droit des sûretés est manifeste dans l’alinéa 2 de l’article 1er de l’AUS car, selon ce texte, des sûretés propres au droit fluvial, maritime et aérien font l’objet de législations particulières.
458L’article 106, AUS dispose dans son alinéa 2 : « les textes spéciaux créant des privilèges généraux doivent préciser le rang de ceux-ci en déterminant par rapport aux dispositions de l’article 107 ci-après. A défaut le rang de ces privilèges est le dernier de celui établi par l’article 107 ». A la lecture de cet alinéa les États parties peuvent, avec des textes spéciaux, mettre en place un régime spécifique pour les privilèges généraux surtout en matière mobilière.
459En matière immobilière, c’est l’alinéa 3 de l’article 132 AUS qui détermine son régime. En effet, cet alinéa dispose que « les hypothèques forcées autres que celles prévues par le présent Acte uniforme sont régies par les dispositions particulières de la loi nationale de chaque État partie ». Cet alinéa ouvre d’autres possibilités en matière de création d’autres hypothèques par les États parties en cas de nécessité. Ce renvoi au droit national a été consacré à l’alinéa 2 de l’article 122 AUS, qui dispose « l’inscription confère au créancier un droit dont l’étendu est défini par la loi nationale de chaque État partie et les énonciations du titre foncier ». Dans l’Acte uniforme portant les procédures simplifiées de recouvrement de créances et des voies d’exécution, plusieurs dispositions renvoient aux législations nationales des États parties.
460S’agissant de la détermination des biens et des personnes saisissables, de la quantité de l’exécution provisoire, du caractère exécutoire, de la décision de justice et autres titres, ils sont laissés à la souveraineté des États. L’article 27 AUVE dispose : « en l’absence d’opposition dans le délai prescrit à l’article 16 ci-dessus, le requérant peut demander au président de la juridiction compétente, l’opposition de la formule exécutoire sur la décision. Les conditions de la demande sont celles prévues par les dispositions 17 et 18 du présent Acte uniforme ». Dans cette disposition, on peut constater que l’expression de juridiction compétente renvoie aux juridictions nationales qui peuvent prendre des dénominations diverses selon les États533. L’alinéa 3 de l’article 17 parle de réglementation de la certification des copies. Au Sénégal, cette réglementation résulte des dispositions de l’article 28 du COCC. L’article 30 traite de l’immunité d’exécution accordée à certaines entreprises publiques. L’alinéa 3 de cet article dispose que : « l’exécution forcée et les mesures conservatoires ne sont pas applicables aux personnes qui bénéficieront de l’immunité d’exécution ».
461Au Sénégal, l’immunité d’exécution est prévue par l’article 194 du COCC. Selon l’alinéa 3 de cette disposition « toutefois, les dettes certaines, liquides et exigibles des personnes morales de droit public ou des entreprises publiques, quelle qu’en soit la forme et la mission, donnent lieu à compensation avec les dettes également certaines, liquides et exigibles de quiconque sera tenu envers elles, sous réserves de réciprocité ».Cet alinéa pose le problème de la compense, qui est le régime qui sera déterminé par la loi de chaque État partie. Quant à l’alinéa 3, il dispose que « les dettes des personnes et entreprises créées, en vertu de l’alinéa précédent ne peuvent être considérées comme certaines au sens des dispositions du présent article que si, elles résultent d’une reconnaissance par elle de ces dettes ou d’un tiers ayant un caractère exécutoire sur le territoire de l’État où se situe lesdites personnes ou entreprises ».
462Dans cet article, l’alinéa 3 confère aux États parties la reconnaissance de dette. En effet, une créance n’est certaine qu’au sens de cet alinéa 3 qui, elle résulte notamment de la reconnaissance par les personnes morales de leurs dettes. La certitude peut également résulter du fait que la créance invoquée figure sur un titre ayant une créance exécutoire sur le territoire de l'État où se situent lesdites personnes morales ou entreprises publiques.
463L’article 50 AUVE dispose que « les saisies peuvent porter sur tous les biens appartenant au débiteur, alors même qu’elles seraient détenues par des tiers, sauf s’ils ont été déclarés insaisissables par la loi de chaque État partie ». Elles peuvent également porter sur les créances conditionnelles, à terme ou à exécution successive. Les modalités propres à ces obligations s’imposent au créancier saisissant. Cet article pose le principe selon lequel tous les biens appartenant au débiteur peuvent être saisis. Mais, il faut noter que ce principe est assorti d’une exception. En effet, certains biens mobiliers du débiteur ne pourront exceptionnellement être saisis, parce qu’ils auront été déclarés biens insaisissables par la législation nationale de chaque État partie.
464L’article 51 AUVE dispose : « des biens et droits insaisissables, sont définis par chacun des États parties ». La détermination de la quotité saisissable et de la fraction insaisissable du salaire est laissée par l’article 51 au pouvoir souverain de chaque État partie. Ainsi, selon l’appréciation de chaque État, certains biens seront déclarés insaisissables afin de laisser au débiteur saisi le minimum vital. Ces insaisissabilités légales seront fondées sur la nécessité d’assurer la protection du débiteur saisi, concernant tout d’abord les biens nécessaires à la vie quotidienne et au travail du débiteur saisi et de sa famille. Les insaisissabilités légales, peuvent également avoir pour fondement la protection de l’intérêt général.
465L’article 33 AUVE précise que « les décisions auxquelles la loi nationale de chaque État partie attache les effets d’une décision judiciaire » constituent un titre exécutoire.
466L’article 4 AUVE pose le problème du dépôt de la requête au Greffe de la juridiction compétente. La représentation en justice est réglée par la loi de chaque État partie. L’article 120 AUVE précise dans son alinéa premier, que la vente forcée est effectuée par un auxiliaire de justice habilitée par la loi nationale de chaque État-partie534.
467L’analyse des articles 15, 174 in fine, 42, 46 et 47 AUVE renvoie pour l’application de certaines dispositions aux dispositions similaires des États parties.
468L’article 253 AUVE relatif à l’immatriculation préalable, renvoie à la législation foncière de chaque État partie535. L’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif contient également des dispositions qui renvoient aux biens nationaux de chaque État partie. L’article 67 AUPC traite de la compense et, de ce fait, renvoie aux dispositions préexistantes. Les articles 166 et 167 AUPC traitent de l’assiette des supers privilèges et renvoient aux lois nationales pour leur détermination. La deuxième série de limites à l’œuvre d’harmonisation, résulte de l’application des actes uniformes.
B. Les limites résultant de l’application des Actes uniformes
469L’application des Actes uniformes doit être analysée, soit dans le temps, soit dans l’espace.
470Le fondement de cette application résulte des articles 9 et 10 du traité ohada.
1. L’application dans le temps des Actes uniformes
471Selon l’article 9 du traité « les Actes uniformes entrent en vigueur quatre vingt dix jours après leur adoption, sauf modalités particulières d’entrée en vigueur prévue par l’Acte uniforme. Ils sont opposables, trente jours francs après leur publication aux Journaux Officiels des États parties ou par tout autres moyens appropriés ». Au regard de ce texte, les Actes uniformes entrent en vigueur 90 jours après leur adoption par le Conseil des Ministres, sauf dispositions contraires et opposables, 30 jours après leur publication. Il est également prévu que les Actes uniformes doivent être appliqués aux journaux officiels des États parties ou par tous autres moyens. À notre avis, ces dispositions sont superflues. La publication au journal officiel de l’ohada est suffisante du fait du caractère supranational de cette institution. L’exigence de faire publier dans le journal Officiel des États parties sans fixer le délai pourrait entraîner des disparités dans l’application des actes.
472L’application dans le temps des Actes uniformes est consacrée par leurs dispositions abrogatoires et transitoires. Si dans certains Actes uniformes ces dispositions posent des problèmes, dans d’autres, il faut noter qu’il n’y a pas de problèmes particuliers. Ainsi, pour mieux cerner les limites de ces dispositions, nous allons analyser tour à tour certains Actes uniformes.
473L’Acte uniforme sur le droit commercial est entrée en vigueur selon l’article 289 infini le 1er janvier 1998. Selon cet article, « après en avoir délibéré, le Conseil des Ministres adopte le présent règlement à l’unanimité des États parties présents et votants conformément aux dispositions du traité du 17 octobre 1993relatif à l’organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires. Le présent Acte uniforme sera publié au Journal officiel de l’ohada et des États parties, il entre en vigueur le 1er janvier 1998 ».
474En plus de cet article qui pose le problème de l’entrée en vigueur, nous avons l’article 1er qui pose le problème du champ d’application de cet Acte uniforme.
475Selon l’alinéa 3 de cet article « les personnes physiques ou morales et les groupements d’intérêts économiques, constitués ou en cours de formation à la date d’entrée en vigueur du présent Acte uniforme, doivent mettre des conditions d’exercice de leur activité en harmonie avec la nouvelle législation dans un délai de deux ans à compter de la publication du présent Acte uniforme au journal officiel de l’ohada ».
476Au regard de ces deux textes, l’application de l’Acte uniforme sur le droit commercial général se fait en deux étapes. La première étape est celle qui permet l’application des textes antérieurs qui s’appliquent à certaines situations jusqu’à l’épuisement de leurs effets. Cette situation peut entraîner la suppression de textes applicables aux droits nationaux sources de complications. La deuxième étape est celle qui subordonne l’application des règles concernant les conditions d’exercice des activités des commerçants à un délai de deux ans, afin que ceux-ci puissent se conformer aux exigences de l’Acte uniforme. La sanction qui résulterait du non-respect de ce délai serait la saisine par la partie lésée d’un Tribunal pour ordonner la régularisation sous astreinte.
477A notre avis, cette sanction bien que dissuasive n’est pas convaincante car elle laisserait subsister des situations irrégulières en cas non saisine de la juridiction compétente. Au regard de ce qui précède, il faut noter que l’Acte uniforme a consacré le principe de la non-rétroactivité.
478Comme toute norme juridique, le principe de la non-rétroactivité se pose également pour les Actes uniformes, du fait que ce sont les principes du droit commun qui gouvernent généralement les Actes uniformes.
479Bien que l’application du principe de non-rétroactivité soit une source de sécurité juridique, la prolongation des délais de conformité et la survivance des droits nationaux jusqu’à l’épuisement des effets de certaines situations juridiques, peut poser des problèmes aux pratiquants du droit et au sujet du droit, car deux ordres juridiques d’une même matière lui seront applicables, surtout s’agissant de la matière contractuelle, car le principe est à ce niveau la survivance de la loi ancienne, sauf disposition contraire d’ordre public.
480L’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du GIE est entré en vigueur le 1er janvier 1998. En effet, selon cette disposition « Après en avoir délibéré, le Conseil des Ministres adopte le présent règlement à l’unanimité des États et votants conformément aux dispositions du traité du 17 octobre 1993, relatif à l’organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires. Le présent Acte uniforme sera publié au Journal Officiel de l’ohada et des États parties. Il entrera en vigueur le 1er janvier 1998 ».
481Les dispositions de l’article 907 et suivants contiennent des dispositions transitoires très complexes, selon la date de constitution des sociétés par rapport à l’entrée en vigueur de l’Acte uniforme536.
482En effet, s’agissant des sociétés ou GIE constitués après le 1er janvier 1998, l’article 907 de l’Acte uniforme dispose « le présent Acte uniforme est applicable aux sociétés et aux Groupements d’intérêt économique, qui seront constitués sur le territoire de l’un des États parties à compter de son entrée en vigueur dans ledit État partie. Toutefois, les formalités constitutives accomplies antérieurement n’auront pas à être renouvelées ». Cette disposition pose deux problèmes, celui du régime des sociétés constituées antérieurement à l’entrée en vigueur de l’Acte uniforme et celui des sociétés constituées après son entrée en vigueur.
483Pour les sociétés constituées définitivement avant l’entrée en vigueur de l’Acte uniforme, elles ne seront pas renouvelées, car elles restent valablement constituées, même si les formalités constitutives ont été accomplies avant le principe de la reconnaissance de leur constitution, bien que salutaire, cette situation n’a pas manqué d’entraîner les conséquences pour certaines sociétés. Pour les sociétés constituées après l’entrée en vigueur de l’Acte uniforme, il ne se pose pas de problème majeur.
484En ce qui concerne les sociétés et les GIE constitués avant l’entrée en vigueur de l’Acte uniforme ils ne peuvent plus être soumis à l’Acte uniforme pour leur constitution mais plutôt pour leur fonctionnement, leur modification et leur dissolution. A cet effet, l’article 908 AUDSC impose la mise en harmonie de leur statut dans un délai de deux ans, c’est-à-dire, avant le 1er janvier 2000.
485Le régime de la mise en harmonie est réglementé par les articles 908 et suivants. Simples dans leur principe, les dispositions transitoires relatives à l’Acte uniforme sur les sociétés commerciales et les GIE sont d’une compréhension difficile et méritent d’être interprétées537 pour une bonne compréhension. Ainsi, en fonction de la position de l’interprète, plusieurs contentieux pourront naître dans certains domaines régis par cet Acte uniforme.
486Le défaut de la mise en harmonie doit entraîner les sanctions selon les situations en cause. Aux termes de l’article 915 de l’Acte uniforme, le défaut de mise en harmonie des statuts entraîne que certaines clauses statutaires sont considérées comme non écrites.
487Pour les sociétés en commandite par actions, l’Acte uniforme exige leur transformation en sociétés anonymes après le délai de deux ans sinon leur dissolution doit être prononcée538. Cette dissolution est de plein droit pour les SA et SARL, dont le Capital sera inférieur au Capital exigé539 à l’expiration de la période transitoire.
488S’il n y a pas de doute sur la gravité de ces sanctions, la question qu’on est en droit de se poser porte sur la durée prévue pour la mise en œuvre de ces sanctions et qui aura une influence sur leur effectivité. A notre avis, ce délai, même s’il est persuasif, paraît insuffisant dans le contexte africain, surtout avec la lenteur de nos administrations, les mentalités africaines et leur comportement à l’égard de la justice. Comparé à la France, s’agissant de la loi du 11 mars 1984 qui avait porté le Capital minimum de SARL de 20 000 à 50 000 FF, le délai imparti pour la mise en conformité était de 5 ans.
489Malgré cette durée supérieure à celle prévue par l’ohada, certaines sociétés n’ont pas respecté ce délai en dépit de la culture juridique des citoyens français. Ainsi, comme le souligne le professeur Abdalah CISSE, « plutôt que de consacrer un traitement différentiel, difficilement justifiable au sujet des mesures transitoires applicables au droit des sociétés commerciales et au droit commercial général, on gagnerait à harmoniser le droit transitoire en généralisant la solution plus réaliste de l’Acte uniforme sur le droit commercial général540 ». A ce sujet, il serait intéressant de voir l’effectivité de l’application dans le temps de cet Acte uniforme après l’expiration de la période transitoire.
490L’Acte uniforme sur les sûretés est entré en vigueur le 1er janvier 1998. Deux dispositions de cet Acte uniforme traitent de la question. Il s’agit des articles 150 et 151. Selon l’article 150 : « sont abrogées toutes les dispositions antérieures, contraires à celui du présent Acte uniforme. Celle-ci n’est applicable qu’aux sûretés consenties après son entrée en vigueur. » Les sûretés consenties, ou constituées, ou créées antérieurement au présent Acte uniforme et conformément à la législation d’alors en vigueur, restent soumises à cette législation jusqu’à leur extinction. Quant à l’article 151, il dispose : « après en avoir délibéré, le Conseil des Ministres adopte le présent Acte uniforme à l’unanimité des États parties présents et votants conformément aux dispositions du traité du 17 octobre 1993 relatif à l’organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des Affaires. Le présent Acte uniforme sera publié au journal Officiel de l’OHADA et des États parties. Il entre en vigueur le 1er janvier 1998 ».
491L’alinéa 2 de l’article 150 fixe, lui, le régime des sûretés consenties ou constituées antérieurement à l’entrée en vigueur de l’Acte uniforme. Au regard de la combinaison des dispositions des articles 150 et 151 de cet Acte uniforme, des limites réelles se posent dans la pratique qu’il faut interpréter finement, ce qui pose un manque de clarté541.
492L’Acte uniforme sur les procédures collectives d’apurement du passif est entré en vigueur le 1er janvier 1999 selon l’article 258. Quant à l’article 257, il dispose : « sont abrogées toutes les dispositions antérieures contraires à celles du présent Acte uniforme. Celui-ci n’est applicable qu’aux procédures collectives ouvertes après son entrée en vigueur ».
493Au regard de ces deux dispositions, on peut remarquer deux régimes juridiques entraînant l’application de deux ordres juridiques pour le droit des procédures collectives : un régime issu de l’ancien ordre juridique pour les procédures collectives nées avant l’entrée en vigueur de l’Acte uniforme, et un autre, résultant de l’application de l’Acte uniforme sur les procédures engagées après l’entrée en vigueur de l’Acte uniforme. Ainsi, dans cet Acte uniforme on notera, durant une longue période, une dualité de régime juridique source probable de conflits. L’Acte uniforme sur le droit de l’arbitrage est entré en vigueur par l’application de l’article 9 du traité le 11 juin 1999. Il est à noter également que dans cet Acte uniforme, on assistera à la dualité d’ordre juridique applicable source de conflits.
494L’Acte uniforme sur les procédures harmonisées de comptabilités, est entré en vigueur selon l’article 113 « Pour les comptes personnels des entreprises, le 1er janvier 2001 : opérations et comptes de l’exercice ». « Pour les comptes consolidés » et les comptes combinés, le 1er janvier 2002, opération et compte de l’exercice à cette date ». Cet Acte uniforme pose le problème de l’entrée en vigueur en deux étapes. Ce qui, certainement, et pour des raisons évidentes, est fait de manière prudente. Dans l’adoption de certains Actes uniformes542, le législateur ohada a consacré le principe unanimiste. Le propre de toute organisation régionale c’est qu’elle tend, dans une plus ou moins large mesure, à dépasser le cadre exigu de l’État national et à lui substituer progressivement un cadre politico-juridique et économique plus étendu et destiné à assurer une grande viabilité et un grand développement de l’ensemble ainsi intégré. Cet objectif fondamental, ne peut être atteint que par une intégration, dans les limites consenties par les États membres, des droits nationaux et par la superposition à ces ordres juridiques nationaux d’un droit communautaire directement applicable dans le cadre national. Ainsi, le traité ohada, dans l’adoption de ce droit communautaire, a consacré le principe de l’unanimité.
495Les inconvénients du principe ont fait traditionnellement l’objet de vives critiques dans le cas des institutions internationales, mais, sont plus graves dans le cas des institutions régionales supposées être la manifestation et le refuge d’une solidarité interétatique, plus puissante que les institutions internationales générales. Ce principe constitue un sérieux obstacle pour le bon fonctionnement des instances communautaires. Ainsi, selon l’ancien secrétaire général de l’ALALE, « l’unanimité se convertit souvent en un obstacle important pour la dynamique de l’association. La nécessité d’aboutir constamment à des transactions laborieuses et les efforts ardus visent à obtenir le compromis indispensable aux décisions conduisant souvent à l’immobilité et obscurcissent le texte confus, difficile à interpréter. »543
496Les dangers de l’unanimité dans un cadre régional se situe à un autre niveau, il vient en droite contradictoire avec le but même de la création d’une communauté économique régionale. Celle-ci implique la prise de conscience et la volonté de consolider une solidarité collective devant une situation que l’on admet implicitement n’avoir pas affronté séparément. Elle implique donc que les États membres acceptent de mettre quelque chose en commun par la concession au profit de l’instance communautaire créée, des compétences jusque là exercées par les États souverains exclusivement. Le principe unanimiste s’inscrit en porte-à-faux avec cette logique. L’application dans le temps des Actes uniformes conduit également à l’application matérielle des Actes uniformes.
2. L’application matérielle des Actes uniformes
497L’abrogation du droit interne par les Actes uniformes doit se faire soit à partir de l’article 10 du traité ohada, soit à partir des dispositions abrogatoires de chacun des Actes uniformes. Aux termes de l’article 10 du traité « les Actes uniformes sont directement applicables et obligatoires dans les États-parties, nonobstant toute disposition de droit interne, antérieure ou postérieure ».
498L’article 10 du traité ohada contient des règles de supranationalité puisqu’il prévoit l’application directe et obligatoire des Actes uniformes dans les États-parties et leur suprématie sur les dispositions de droit interne antérieur ou postérieur. En vertu du principe de supranationalité, l’article 10 contient une règle relative à l’abrogation du droit interne par les Actes uniformes. Le processus d’intégration régionale a engendré, dans les relations entre États qui ratifient le traité, l’avènement de la supranationalité. Robert Schuman définit la supranationalité « comme l’intermédiaire entre l’individualisme étatique et le fédéralisme ». L’évolution contemporaine est marquée très fortement par l’affirmation du concept d’État souverain. Depuis le moyen âge, en passant par les traités de Westphalie, jusqu’à la pratique Royale, jusqu’à la révolution de 1789 à nos jours, l’évolution du concept d’État souverain a subi de nombreuses évolutions. L’évolution de la société internationale est caractérisée d’une part, par la persistance de l’État souverain et l’inter-étatisme, d’autre part, par une tendance au dépassement de l’inter-étatisme. Depuis le milieu des années 1990, la configuration de l’économie mondiale a changé de nature avec le développement massif des mouvements de capitaux. L’État souverain apparaît de plus en plus comme un mythe. Nous assistons impuissamment au développement de la mondialisation qui dépouille les États souverains d’une partie de leur souveraineté.
499La lecture de l’article 10 du traité ohada appelle deux interprétations. Selon Joseph Issa Sayegh, « le premier réflexe consiste à interpréter cette disposition comme consacrant l’interdiction, pour tout État partie, d’adopter une disposition de droit interne s’opposant au principe d’une application directe et immédiate obligatoire des Actes uniformes. À supposer que ce soit le cas, il semble qu’il faille doubler cette interprétation d’une autre. La seconde interprétation consiste à dire qu’en raison du principe de la supranationalité, les Actes uniformes sont directement applicables et obligatoires sans passer par le truchement d’un quelconque instrument juridique national, décret d’application par exemple. Il s’ensuit qu’ils deviennent obligatoires nonobstant toutes dispositions contraires de droit interne ». Ces deux interprétations d’un éminent juriste nous conforte que cette disposition peut, à certains égards, poser des problématiques car, en réalité, quelles sont les dispositions d’un texte national antérieur ou postérieur ? Où s’arrêtent l’autorité de toutes les dispositions du droit national contraire aux dispositions des Actes uniformes ayant le même objet ?
500Toutes ces interrogations prouvent qu’il n’est pas aisé d’interpréter ces dispositions abrogatoires du droit interne, donc sources de difficultés. Pour anéantir ces difficultés, il a fallu un avis de la CCJA sur la question544. Ainsi, pour rendre compte des difficultés de l’application matérielle, nous étudierons tour à tour les dispositions abrogatoires des différents actes uniformes.
501L’Acte uniforme sur le droit commercial Général a posé le problème en son article 1er. En effet, l’alinéa 1er de cet article dispose que « tout commerçant est soumis aux dispositions du présent Acte uniforme ». Son alinéa 2 dispose également : « en outre, tout commerçant demeure soumis aux lois non contraires au présent Acte uniforme, qui sont applicables dans l’État partie où se situe son établissement ou son siège social ».
502En règle générale, l’application des lois dans l’espace pose le problème des conflits de lois. La règle de conflit permet de partager les systèmes juridiques en concurrence en opérant un choix, c’est-à-dire, en rattachant la situation à l’un des systèmes juridiques concernés. A priori, du fait du caractère supranational du droit de l’ohada, les Actes s’appliquent de manière uniforme dans tous les États parties. Il ne se posera pas de problèmes particuliers en ce qui concerne les règles matérielles545 régies par l’Acte uniforme mais un problème peut surgir, car on sait que l’Acte uniforme n’abroge pas totalement les droits nationaux dans les matières qu’il régit, mais seulement, celles de leurs dispositions qui lui sont contraires.
503Ainsi, il serait permis de constater que le droit commercial général pourrait éventuellement être composé de la coexistence de deux dispositions, celles issues des dispositions de l’Acte uniforme et celles issues du droit commercial interne non contraire. On peut alors constater que les rapports juridiques internes dans l’espace ohada, peuvent engendrer des conflits de lois dans le cadre des rapports juridiques relatifs aux aspects des matières régies par les dispositions législatives nationales non contraires à l’Acte uniforme s’il ne peut pas abroger.
504L’Acte uniforme sur le droit des sociétés commerciales et du GIE, a posé le problème de l’abrogation du droit interne par la combinaison de plusieurs articles. L’interprétation des articles 919 al. 1er, de l’article 916 al. 1er 2ème et de l’article 1er de cet Acte uniforme autorise à affirmer la coexistence de deux ordres juridiques dans les régimes des sociétés commerciales. Le régime mis en place par l’Acte uniforme et le régime résiduel des législations nationales non contraires546. Cette coexistence peut entraîner des conflits dans la pratique. D’abord à quelle compétence pourrait-on soumettre lorsqu’il y a un pourvoi contre un droit national non contraire des cours de Cassation nationales ou à la CCJA ? Ensuite quand un État décide de ne pas abroger une disposition contraire, quelle sanction peut-on lui infliger, du fait de la non-existence de la possibilité de recours en manquement dans le droit ohada.
505L’Acte uniforme sur les sûretés dispose en son article 150 : « sont abrogées toutes les dispositions antérieures, contraires à celles du présent Acte uniforme. Celui-ci n’est applicable qu’aux sûretés consenties ou constituées après son entrée en vigueur. Les sûretés consenties ou constituées ou créées antérieurement au présent Acte uniforme et conformément à la législation nationale alors en vigueur, restent soumises à cette législation jusqu’à leur extinction ». Dans son alinéa 1er, l’article 150 précise qu’elle s’applique à toutes les sûretés organisées par lui, quelle que soit la nature de l’obligation garantie.
506En abrogeant toutes les dispositions antérieures contraires, l’article 150 reprend textuellement l’article 10 du traité. Mais, il faut noter que cet article ne règle pas la question de savoir ce qu’on entend par-là, que l’Acte uniforme abroge tous les textes législatifs et réglementaires nationaux ayant ce même objet que lui ou seulement les dispositions de ces textes qui seraient contraires aux siens. Il serait également possible de préciser que les dispositions de l’Acte uniforme qui ne seraient pas d’ordre public, seraient susceptibles d’aménagement contractuel (mode de désignation du tiers détenteur, pouvoir du gardien de la chose, obligation d’information de la caution par le créancier et le débiteur garanti).
507Il faut noter également que l’Acte uniforme a exclu de son champ d’application les sûretés relatives au droit fluvial, maritime, ou aérien (article 1er al. 2). Aux termes des articles 52, 53, et 57, plusieurs sûretés sont exclues de son application. Enfin, il faut noter qu’aux termes de l’article 106, l’Acte uniforme laisse aux États la possibilité de créer de nouveaux privilèges généraux ou spéciaux. Ainsi, on peut affirmer qu’en matière de sûreté, la coexistence de deux ordres juridiques, nationaux et communautaires, est affirmée, ce qui pourrait engendrer des conflits de lois.
508L’Acte uniforme sur le recouvrement des créances dispose en son article 337 que « le présent Acte uniforme sera applicable aux mesures conservatoires, mesures d’exécution forcée et procédure de recouvrement engagée après son entrée en vigueur ». Mais on peut se demander quel sera le sort réservé aux mesures engagées avant son entrée en vigueur. On peut estimer que c’est le droit interne des États qui s’applique jusqu’à épuisement des effets. Il faut noter que les matières des voies d’exécution régies par d’autres organisations internationales telles que la convention de Rome sur l’unification de certaines règles en matière de saisies des aéronefs et la convention de 1952 sur la saisie conservatoire des navires demeurent appliquées.
509L’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage dispose en son article 35, « le présent Acte uniforme tient lieu de loi relative à l’arbitrage dans les États partis ». Cette disposition abrogatoire peut poser des problèmes d’interprétation. Certains auteurs comme Philippe Boulanger, pensent que cet Acte uniforme a voulu se substituer aux droits nationaux de l’arbitrage.
510Pour Joseph Issa Sayegh, cet Acte uniforme doit se substituer aux lois internes relatives au droit de l’arbitrage, or il comble le vide juridique existant en cette matière dans les pays qui n’étaient pas dotés d’une législation en matière d’arbitrage. Cette différence d’interprétation peut poser des problèmes pratiques, car on peut se poser la question de savoir dans quelle mesure l’Acte uniforme peut se substituer aux droits nationaux de l’arbitrage.
511L’Acte uniforme sur les procédures collectives d’apurement du passif dispose en son article 257 : « sont abrogées toutes les dispositions antérieures contraires à celles du présent Acte uniforme. Celui-ci n’est applicable qu’aux procédures collectives ouvertes après son entrée en vigueur ». Cette disposition est muette sur les procédures collectives ouvertes avant son entrée en vigueur. On peut penser que les procédures ouvertes avant son entrée en vigueur seront régies par le droit interne des États jusqu’à leur épuisement. On assistera ainsi à une coexistence de deux ordres juridiques internes et communautaires qui peuvent poser des problèmes aux praticiens du droit.
512L’Acte uniforme sur les procédures de droit comptable dispose en son article 112 : « sont abrogés à compter de la date d’entrée en vigueur du présent Acte uniforme et son annexe toutes dispositions contraires ». Cet article pose également le problème des dispositions contraires.
513L’étude de la dualité dans le cadre des sources juridiques doit nous conduire également à l’étude de cette dualité dans le cadre des systèmes institutionnels.
Notes de bas de page
244 Etienne CEREXHE et Louis HARDY DE BEAULIEU, Op. cit. p. 99.
245 Traité CE, art. 240 ; Traité CEEA, art. 161 ; Traité CECA, art. 14.
246 Traité CEDEAO, art. 9 et 12 ; Traité CEA, art. 10.
247 Traité UEMOA, art. 16.
248 CJCE, 11 Juin 1991, Commission soutenue par le parlement européen c/ conseil, aff. C. 300/89 « dioxydes de titane » 2895.
249 CJCE, 16 Juin France c/Commission, aff. C. 325/91, 1-3283.
250 Traité UEMOA, art. 38.
251 Traité UEMOA, art. 44.
252 CJCE, 12 février 1996, Belgique c/Commission affaire C-56/93 rec. 1-17-23.
253 TPI, arrêt du 18 septembre 1996, Asia Motor France c/ Commission, affaire T.38/84, Rec. II 961.
254 Arrêt du 26 Novembre 1981, Michel c/Parlement affaire 180, Rec. 2861.
255 TPI, arrêt du 12 décembre 1966, Rendo. Ea c/Commission affaire T16/91 RV, Rec. II 1897.
256 CJCE, 9 janvier 1990, C-337/88,9 SAFA, C337/88, I P 1.
257 CJCE, 20 Juin 1994, König, 185/75, p. 607.
258 Arrêt du 25 Janvier 1979, Rack c/ Haupt Zolant Marinz, Affaire 98/87 rec. 69.
259 CJCE, 13 novembre 1990, The Queen c/Ministry of agriculture Fisheries and food, ex partie Fedesa, affaire c/33/881 4023.
260 CJCE, 14 Mai 1975, CNTA, aff. 74/74-533
261 CJCE, 13 juillet 1965, Lemmery Work c/harte autority de la CECA affaire 111/63 835.
262 Traité UEMOA, art. 60
263 Traité UEMOA, art. 27.
264 Acte additionnel n° 0486/instituant un régime tarifaire préférentiel transitoire des échanges au sein de l’UEMOA et son mode de financement.
265 Voir Etienne CEREXHE et Louis LE HARDY DE BEAULIEU, Op. cit. p. 101.
Voir Jean Claude GAUTRON, Droit européen, 9ème édition, Dalloz 1995, p. 155.
Voir Jean Victor LOUIS, Op. cit., p. 53.
Voir Jean Paul JACQUE, Op. cit. p. 363.
Voir Jean BOULOUIS, Op. cit. p. 141.
Voir René Joliet, Op. cit. p. 140.
266 Arrêt du 14 décembre 1962, Confédération générale des producteurs de fruits et légumes c/ Conseil, affaire jointe 16 et 17/62 rec. 909.
267 CJCE 21 Juin 1958, Wirschaftsvérinigung EISEN - und standchlindustrie, 13/57, p. 261.
268 CJCE, 14 décembre 1962, Fédération nationale de la boucherie en gros 1962, p. 943, GA, I p. 7.
269 CJCE, 20 mars 1959, Nold 18/57, p. 89.
270 CJCE, 11 Juillet 1968, Zukerfabrik Watenstedt, 6/68, p. 596.
271 CJCE, 16 avril 1970, Cie fr. Com. Et fin, 63/69, p. 205.
272 CJCE, 29 Janvier 1985, Blenderer, 14783, p. 257.
273 Arrêt du 7 février 1973, Commission c/ Italie affaire 39/72, rec. 115.
274 CJCE, 19 février 1979, Granaria, aff. 101/78, p. 623.
275 Jean BOULOUIS, Op. cit. p. 215.
276 CJCE, 5 février 1963, NV. Algemène Transport en expéditie Onderneming Van Gend en Loos c/administration fiscale Néerlandaise, Affaire 26/62, Rec. P. 1.
277 R. KOVAR, Ordre juridique communautaire, structure de l’ordre juridique, sources écrites, JCP ‘Europe, fasc. 410, p. 20 n° 83.
278 R. KOVAR – opcit J-cl (europe) facis. 410 – pg 21. N° 85
279 CJCE, 14 décembre 1971, Politi, affaire 43/71, 1039
280 CJCE, 17 Mai 1972, Leonesio, aff. 93/71.287.
281 D. SIMON, Le système juridique communautaire n° 218, n° 210.
282 CJCE, 18 février 1970, Bollman, affaire 40/69-rec. 69.
283 CJCE, 27 septembre 1979, Eidania, aff. 230/78, p. 2749.
284 Règlement n° 06/98/CM/UEMOA, portant création du fonds de compensation des moins-values de recettes douanières, et fixant les régles de fonctionnement ; Règlement d’exécution n° 10/98/CM/UEMOA, modifiant l’article 2 du règlement d’exécution 08/96/COM/UEMOA/8 juillet 1996 fixant la composition et les règles de fonctionnement du Comité consultatif de recrutement et d’avancement (CCRA) de la Commission UEMOA ; Règlement n° 01/2000/CDJ abrogeant et remplaçant le règlement 1/96/CDJ relatif au règlement administratif de la Cour de justice de l’UEMOA ; Règlement n° 03/97/CM/UEMOA, portant adoption du tarif extérieur commun de l’UEMOA ; Règlement 03/97CM/UEMOA, instituant un Conseil permanent de la profession comptable dans l’UEMOA.
285 Voir Jean Victor Louis, Op. cit., p. 54.
Voir Jean Paul JACQUE, Op. cit., p. 264.
Voir Jean BOULOUIS, Op. cit., p. 144.
Voir René JOLIET, Op. cit., p. 145.
286 Les États membres de l’UEMOA peuvent utiliser la voie législative.
287 Les États membres de l’UEMOA peuvent également utiliser la voie réglementaire.
288 O. PESCATORÉ, L’effet des directives communautaires « une tentative de mystification », DS. 1980, P 171.
289 CJCE, 22 février 1984, Kloppenburg c/ Finamt. Leer, aff. 70/83,1075
290 J.V. LOUIS, Les actes des institutions, in commentaire Mégret, Bruxelles, VLB, 1983, vol. 10 p. 478.
291 Cette théorie dualiste est contraire à la théorie moniste.
292 CJCE, 22 septembre 1976, Commission c/Italie, aff. 10/76 -1359.
293 CJCE, 5 avril 1979, Ratti Aff. 148/78 - 1645, point 44.
294 CJCE, 17 septembre 1987, Commission c/Pays-Bas, affaire 291/87 - 3483.
295 R. KOVAR, Op. cit., ICL Europe, n° 905.
296 P. PESCATORÉ, Op. cit., p. 176.
297 PESCATORÉ, Op. cit., p. 176.
298 R. KOVAR, La contribution de la Cour de justice, à l’édification de l’ordre juridique communautaire, RCADE, 1993, Volume IV, pp. 155, 555.
299 CJCE, 15 Juillet 1964, COSTA C/ ENEL, aff. Rec. P-1141- p. 1158.
300 Il convient d’observer à cet égard que l’objet de l’effet directe des directives consiste dans la possibilité des particuliers de faire valoir à l’encontre de l’État définissant les droits qu’il tient des directives (invocabilité de substitution) et dans la possibilité de démontrer au juge d’écarter l’application des dispositions nationales non conformes aux directives qui découlent déjà du principe de règle de droit communautaire – intègre de plein droit dans l’ordre juridique communautaire applicable au territoire de chaque État membre.
301 R. KOVAR, Les critères du droit communautaire, non directement applicable in mélanges, F. DEHOUSSE, Paris, Bruxelles, Nathan-Labor, val 2 1979, p. 227 & s.
302 CJCE, 26 février 1986 Marshall 1, affaire 152/84, Rec. p. 233 - pt. 48.
303 R. KOVAR, Observations sur l’intensité normative des directives, Mélanges PESCATORE, p. 395 & s.
304 Outre la formule de transposition, le juge utilise indifféremment, semble-t-il, les termes d’introduction de traduction, de transposition, ou encore de termes généraux d’application d’exécution ou de mise en œuvre des directives.
305 La distinction entre les sujets est fondamentale pour déterminer le régime juridique.
306 CJCE, 14 décembre 1962, Confédération des producteurs de fruits et légumes C/Conseil aff. Jtes 16 et 17/62.901.
307 CJCE, 14 décembre 1962, Fédération nationale des boucheries en gros et du commerce en gros en viande et autres c/Conseil aff. Ite 19 22/62.942.
308 Ces normes ont-elles aussi un caractère communautaire.
309 F. REGAUX, Rapport belge sur le problème des dispositions directes applicables – 2ème Colloque international de droit européen. 2 vol., 1966, pp. 182-183.
310 CJCE, 13 décembre 1989, Grimaldi c/F.M.P., affaire 322/88.4407.
311 Pierre MAILLET, La construction européenne. pp. 33.38.
312 Accord conclu par l’UE et les pays ACP, accord OMC. La mixité de l’accord est l’expression, sur le plan international de la répartition des compétences entre la Communauté et les États-membres.
313 CJCE, 30 avril 1994, Hacgeman II aff. 181/449.
314 CJCE, 14 Octobre 1980, Attorney Général c/ Bungoa, aff. 812/2787.
315 Yves GUYON, Traité de droit des affaires, Tome 1, 8ème édition, p. 13.
316 J. Issa SAYEGH et Jacqueline LOHOUES-OBLE, Harmonisation du droit des affaires, Editions Bruylant, Bruxelles 2002.
317 Cette deuxième partie qui traite des dispositions consacrées aux différentes sociétés commerciales comprend les articles 270 à 885 de l’Acte uniforme relatif aux sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique.
318 Les sociétés anonymes sont de deux sortes, l’une comprend un Conseil d’Administration et un Président Directeur général ; l’autre, réservée aux sociétés comprenant un actionnaire, est constituée d’un Administrateur Général qui doit être obligatoirement une personne physique.
319 OPPETIT et SAYEGH, « les structures juridiques de l’entreprises », traité élémentaire de droit commercial cité par Jean René GOMEZ.
320 Le législateur français a consacré dans la loi du 11 juillet 1985, la société unipersonnelle dénommée EURL (Entreprises à responsabilité limitée). La formule a été reprise par la directive européenne du 21 décembre 1989.
321 Traité OHADA, art. 494.
322 Cf. Rapport d’étude établi à la demande de la Commission de l’Union européenne au sujet de la simplification de la réglementation sur les fonctionnements des SA, dans l’Union européenne. Cabinet Ernest et Young, décembre 1995, p. 45.
323 321 Traité OHADA, art. 494.
324 La loi 85-40 du 29 juillet 1985 relative aux sociétés commerciales.
325 Yves GUYON, Droit des affaires Tome 1. Droit commercial Général et des Sociétés 8e édition p. 549.
326 Règlement n° 21.37/85 du Conseil des Communautés européennes du 25 Juillet 1985.
327 Voir décision du 29 Octobre 1978, GVL JOCEL 370 du 28 décembre 1978 – p 49 confirmé par l‘arrêt CJCE en date du 2 Mars 1983. Off. 7/82 CVL Recueil p. 483.
La « 3ème étape allait être atteinte à l’occasion d’une question préjudicielle posée à la Cour à propos de l’office Almand pour l’emploi.
328 Traité OHADA, art. 173.
329 Voir RIPERT et ROBLOT, traité du droit commercial, Tome I, Edition LGDJ 1989 N° 711, p. 550 et n° 713, p. 556.
Voir Contin HOVASSE, L’autonomie patrimoniale des sociétés, D. 1971, chron., p. 197, com. 4 novembre 1987, Rev. Sociétés 1988, p. 393, novembre 1934, S. 1936, I P. 289, Note Rousseau.
- Com. 28 Mai 1991 Rev. Sociétés 1991, p. 764.
- Com. 12 février 1980, Bull. 1V n° 73, p. 57.
330 Yves GUYON, op. cit. p. 581.
331 Traité OHADA, art. 242 à 245.
332 Traité OHADA, art. 337 pour la SARL et 516 pour la SA.
333 Yves GUYON, op. cit. p. 464.
334 314. Acte uniforme sur le droit commerce sur le droit commercial, art. 250.
335 315. Cour d’Appel Dakar 21-01-2000 SC /Teranga c/ Kms SA n° 44.
336 Acte uniforme sur le droit commercial général,art. 7alinéa 1er.
337 Alain FENÉON et Jean René GOMEZ, Droit commercial général, commentaires éditions FFA-EDICEF 1999, p. 18.
338 Alain FENÉON et Jean René GOMEZ, op. cit. p. 13.
339 Alain FENÉON et Jean René GOMEZ, op. cit. p. 13.
340 Acte uniforme sur le droit commercial général, art. 3.
341 Acte uniforme sur le droit commercial, art. 4.
342 RIPERT et ROBLOT, cité par Germain, n° 321-323.
343 GERMAIN, Traité de droit commercial, Ripert et Roblot, Tome I, p. 108.
344 Civ. 3 février 1904, DT. 1904-1.215 – voir comm. 21 juillet 1988 RTD, com.1988/60 – observation Derrupé.
345 TGI Paris, 13 janvier 1967, JCP 1967, II 15 096 Note. B.b.
346 Voir décret n° 53960 du 30 septembre 1953 modifié par la loi 65-356 du 12 mai 1965.
347 Voir cass. Soc. 3 octobre 1957, D, 1957.688 ; Voir cass.com. 17 Avril 1961, D. 1961.450 ; Voir civ 12 mars 1963, Gaz Pal. 1936, 1. 107, 13 mars 1950, JCP 1950.2.5549.
348 Voir Yves GUYON ; Op. cit. n° 665 et s.
349 Voir CV-3e, 12 février 1985, Bul. Civ. 3e, N° 29 p. 21.
350 Voir Cass. 3ème Civ., 26 février 1991, Bull. Civ. 3e, N° 147 ; RTD-CIV.1971-867, observations G. CORNU.
351 N. Cass.Com 14 Janvier 1958, JCP, 1958, 11.10466.
352 Voir Paris 6 janvier 1989, RTD Com. 1989, 64 Obs. DERUPPÉ, Acte uniforme sur le droit commercial général, art. 101, al. 2 et 5.
353 Acte uniforme sur le droit commercial général, art. 16.
354 Voir Plaquette Cabinet HSD, Ernest & Young international plaquette de présentation OHADA.
355 Voir G. RIPERT & R. ROBLOT, par M. GERMAIN n° 1453.
356 Com.. 2 juin 1980 Bull. Civ. IV, n° 226, p. 184.
357 Com. 18 mars 1969, D. 1969, 514.
358 Com. 6 juillet 1960, bulletin civ. 111 ; Com. 3 Mai 1965, Bull. Civ. III n° 280 ; Voir aussi Commissionnaire de transport, Com. 3 octobre 1989, RTD. COM 1990.
359 Cass. Com. 11 octobre 1982, D.S. 1982, IR, 536; RTD Com. 1983 57.
360 Cass. Com. 3 avril 1984, Bull. Cass., 1984.4, n° 122, RTD Com. 1985-563.
361 Rennes, 6 février 1952, JCP 1952, 4, 159.
362 HEMARD, Les agents commerciaux, Rev. Trim. Dr. Com. 1969,573.
363 S. DURERTE, Rep. Comm., V° Représentant de commerce, 1988 n° 12.
364 BRUN et GALLAND, droit du travail, bilan de dix années, 1968. Sous l’empire du COCC les agents commerciaux étaient considérés comme des salariés. L’article 439 du COCC disposait, en effet, que « les agents commerciaux sont des salariés qui en raison de leurs fonctions qui leur sont confiées par leur employeur, sont habitués aux représentations à contracter en leur nom » ; Voir Gaz. Pal., 11 au 4 novembre 1995, Numéro Spécial « L’Afrique et le droit d’investir en Afrique » n° 1 Sénégal, p. 20 n° 305-308.
365 Voir décision du 11 février 1991 de la chambre civile de la Cour de cassation Française créant la notion de mandat d’intérêt commun ; Cass. Civ. 11 février 1981, p 1891, 1197 ; Cass. Req. 8 avril 1857, DP 1958.1.137. 6 janvier 1873, DP 1873.1.116.
Voir Cass. Civ. 13 mai 1885, DP 1885.350.
366 Voir l’article 14 al. 1 de la Convention de Vienne ; Vincent HENZÉ, La vente internationale de marchandise ; Jean René GOMEZ, Un nouveau droit de vente commerciale en Afrique.
367 Voir Cass. 1er Civ., 21 décembre 1960, D. 1961.417, obs. Ph. Malauré.
368 Voir Cass. 3e Civ, 10 mai 1989, D 1990 Somm. 37. Obs. Martine ; Voir Jean René GOMEZ, Op cit. n° 82 et s. ; Voir Code civil français, art. 1604.
369 Isaac Yankoba NDIAYE, Sûreté OHADA, Collection droit uniforme Africain, Edition Bruylant Bruxelles 2002, p. 8.
370 Les autres caractères, voir par exemple M. CABRILLAC et C. MOULY, droits des sûretés, Litec 1995, n° 40 et s.
371 Chambre Commerciale 14-12-1976. Bul.Ch. Civil n° 325. Chambre commerciale 13.11.1972, GP 1973 I. 144, note Didier.
372 La première exception permet à la caution simple de retarder la poursuite engagée contre elle, en demandant au créancier de saisir les biens du débiteur principal.
373 La deuxième exception de bénéfice de discussion, suppose une finalité de caution et que la caution présumée demande au créancier de diviser ses poursuites pour réclamer à chaque caution ses parts de contribution.
374 Chambre civile du 7 Juin 1988 – Bull. Civ. I n° 173 ; Com. 7 février 1984, G.P. 1984.2 Panorama.
375 Jean Clary OTOUMOU, La lettre de garantie OHADA. Penant. n° 834.
376 Isaac Yankhoba NDIAYE, op cit. P. 45 ; Com. 20 décembre 1982 D. 1983.365, Vasseur-Clunet 1983.811, Note Jacquemont.
377 RTDM Com. 1983. 4446, note Cabrillac et Teyssie.
378 Com. 20 décembre 1982 précité ; Acte uniforme sur les sûretés, art. 28 al. 1.
379 Voir com. 3 novembre 1992, JCP 1993 II, 22.082, Note DELEBECQUE.
380 Cour de Bruxelles, 15 octobre 1987, D 1988 S-244 Vasseur.
381 Vasseur, Les nouvelles règles de la Chambre de commerce internationale, Revue du droit des affaires internationales 1982 p. 239.
382 Voir Com. 18 février 1991, JCP 91 II, 21.670.
383 Dijon 26 février 1992 S. 399 ;Paris 27 Juin 1990 D.1991. S. 193 ; T. Com. Versailles, 11 décembre 1991, RTD. Com. 1992. 434 Note CABRILLAC et Tryssie.
384 Com 3 Novembre 1892-D.92.3, Note VASSEUR ; Com. 19 février 1991 –JCP 91. 11 21 670 ; Com. 20 février 1985 D.86 - IR 153 ; Paris 24 novembre 1981. Affaire OP. Inter, in D. 1982.296, Note Vasseur.
385 IL s’agit de l’article 326 du code des obligations civiles et commerciales dont sont inspirés les articles 41 et 43. « Voir Joseph Issa SAYEGH « le droit de rétention en droit sénégalais », Revue Penant n° 810 octobre-décembre 1992. R. 261 et suivants.
386 N. CATALA, « De la nature juridique du droit de rétention », Rev. Trim. Dr civ. 1997, pp 9 et S.
387 MARTY et RAYNAUD, Traité de droit civile, Tome 3, 1er volume, 1971 n° 39 pg 24.
Voir Cour d’Appel de Ouagadougou ; Affaire SDV c/Etablissement Iboudou Tintin 8 octobre 1998
388 MARTY et RAYNAUD, op cit.., Tome 3 – 1er Volume n° 32 p. 19.
389 MARTY et RAYNAUD : op cit Tome 3, n° 30 p. 19.
390 CIV 2ème, 28 février 1957, Bull. Civ. 11 P. 181 n° 189. Voir AIX, 10 décembre 1976, Bull arrêt Aix 1976 n° 371.
391 CIV. 3°, 23 avril 1974. Voir MAZEAUD par de JUGLART, p. 123.
392 Acte uniforme sur les sûretés, art. 44.
393 Cf. droit français civ. 13 Mai 1987, JCP, 1988, II n° 20.923 – Voir PH SIMLER et P. DELEBECQUE, « Les sûretés » et la propriété foncière, précis Dalloz 1995, 2° cd. p. 435.
394 Acte uniforme sur les sûretés,art. 56
395 Joseph Issa SAYEGH : Sûreté in juriscope. Edition Bruylant, Bruxelle 2002.
396 Cf. Joseph Issa SAYEGH « Organisation des sûretés » cahiers juridiques et fiscaux, CFCE, 1998 n° 2, p. 351. Voir MARTY (G) et RAYNAUD (P), JESTAZ (Ph), Droit civil. La publicité foncière, Paris Sirey, 2° édition1987 N° 143.
397 Voir le décret du 28 mars 1993, modifié par le décret du 12 décembre 1990 applicable au Congo, au Gabon, au Tchad, en République Centre Africaine.
Voir le décret du 24 Juillet 1906 applicable au Togo.
Voir le décret du 26 juillet 1932 applicable au Sénégal, à la Mauritanie, au Mali, à la Guinée, au Burkina Faso, au Niger, au Bénin et en Côte d’Ivoire.
398 Voir les articles 2124 & 2133 du code civil. Voir Pr MALAURIE et AYNES, droit civil, les sûretés, la publicité foncière Paris, Cujas ed. 199/1984 n° 667. Cass.civ. 13 Novembre 1912-DP, 1913, 1,433. Note de Loynes.
399 Voir Cass. Com. 21 octobre 1964, D. 1965 .239.
400 Cass.civ. 3°, 17 Juillet 1986, Bul. Civ. 111 n° 118.
401 Cass. 19 Novembre 1856, D, 1856, 1, 175, - 1856, 1.145. Voir Cass. civ – 21 octobre 1891, DP…, 1882, 1.221.
402 Décret n° 64-572 du 30 Juillet 1964 portant code de procédure civile.
403 Koffi Alexi AQUEREBURU, La procédure d’injonction de payer telle qu’elle est organisée par l’Acte uniforme de l’ohada, constitue-t-elle un recul par rapport à la loi Togolaise du 20 avril 1988 in Penant n° 831, pp. 287 à 295.
404 Tribunal Première Instance Abidjan, jugement n° 34 du 22 février 2001. Société Rial Tranding c/. SDV-CI In. Ecodroit n° 1 juillet 2001 p. 33.
405 L’Acte uniforme sur les recouvrement des créances, art. 3, alinéa 2.
406 Cour d’Appel d’Abidjan : arrêt n° 443 du 4 avril 2000, LIMBAC C/Mouhamed Ould Barikallah, in Revue Ecodroit AIDD – août/septembre 2001 – p. 51.
407 Tribunal de première Instance de Gagnoa, jugement n° 3 du 14 Janvier 2000, SIF c/. M. NC DI Revue Juris. OHADA, N° 2/2003, Avril/mai/juin 2002 p. 40 ; Tribunal de Première Instance de Lomé : Jugement n° 995 du 28 Juillet 2000 – CMEC/ AFD.
408 Tribunal de Commerce de Bamako, jugement n° 54 du 2 février 2000, Issa Keïta c/ Société Marck-SA.
409 Tribunal Première Instance de Lomé, jugement n° 161 du 1er février 2000, Etablissement Polytra c/ AFD, Tribunal Première Instance Abidjan, jugement n° 35 du 22 février 2001, Société Ebur Néo c/SIB, in Revue Ecodroit ; Tribunal Grande Instance de Ouagadougou, Jugement n° 771 du 15 décembre 1999, Kaboré Issa c/ Entreprise Lompo. O. Richard, CCJA 10 janvier 2002. Société Pari Mutuel Urbain du Mali c/ Marcelle KONE ; Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou pour le jugement du 17 Mars 1998 Sanou S. Michel c/Hien Yukou Lazare.
410 Tribunal de Première Instance de Gagnoa, jugement n° 03 du 14 Janvier 2002.
411 SIF c/ MCDJ, in Revue juridique OHADE, n° 2/2002 -Avril/Mai/Juin ; Cour d’Appel d’Abidjan, arrêt du 9 Mai 2000, société Palmafrique c/ Géant SARL. In Www.ohada.com.
412 Cette dérogation est conforme aux données de la pratique dans la majorité des cas, la saisie des biens immobiliers du débiteur suffit à désintéresser les créanciers chirographaires.
413 Pour les créanciers hypothécaires, ils doivent poursuivre en premier lieu, le bien affecté à la garantie et en cas d’insuffisance de celui-ci poursuivre la vente des autres biens.
414 C’est la loi nationale de chaque État partie qui doit définir le régime du mineur émancipé.
415 Cette saisie peut être faite, soit par un ayant cause du créancier, suite à son décès par ses successeurs, soit par un représentant du créancier, qui peut être un représentant légal ou un représentant conventionnel.
416 Toute personne qui a la qualité de débiteur peut être saisie, l’Acte uniforme impose des obligations dont celles de fournir des renseignements sur l’existence antérieur ou en cours de l’opération de saisie.
417 - Les dérogations sont relatives à l’immunité d’exécution. Elles concernent les établissements publics, mais, il faut faire une distinction, entre les Etablissements à caractères industriels et commerciaux, des sociétés nationales et des Etablissements administratifs.
-Dans certaines législations, les Etablissements publics industriels et commerciaux, qui ont pour mission d’exercer, les activités industrielles et commerciales similaires à celles des personnes privées, sont soumises aux procédures d’exécution forcées sur les biens.
-La solution est différente dans le droit ivoirien, notamment l’article 14 de la loi ivoirienne n° 80-1070 du 13 septembre 1980. Il en va de même de la loi sénégalaise de 2002 qui modifié l’article 194 du code des obligations civiles et commerciales.
-Au Sénégal, désormais les sociétés nationales et les Etablissements publics ne bénéficient plus de l’immunité d’exécution. Sauf l’État et les collectivités publiques bénéficient de cette immunité. Le Tribunal de commerce de Brazzaville ordonnance sur requête du 3 avril 2001. L’Agence nationale de l’Aviation civile (ANAC° et le droit de l’HOHADA, in Bulletin de l’OHADA n° spécial 2001 p. 15 ; CA Niamey, ordonnance de référé n° 164 du 07-08-2001 CBN c/ Ibrahima Bona Amadou.
418 Les atténuations au principe selon lequel tout débiteur peut être saisi, consiste dans la suspension de la procédure de saisie. Cette suspension peut avoir pour cause le prononcé des mesures de grâce, ou des procédures d’apurement du passif.
419 Quand le débiteur est frappé d’une incapacité, la saisie doit être dissipée contre un représentant légalement désigné par celui-ci. C’est généralement le cas d’un mineur non émancipé ou le cas d’un majeur incapable.
420 Le Représentant peut également être conventionnel. Il résulté dans ce cas, de manifestation de volonté du débiteur saisie, majeur capable.
421 Lorsque le débiteur saisi est marié, la consultation des règles qui constituent le régime matrimonial des époux s’avère nécessaire, afin de déterminer contre lequel des époux elles doivent être dirigées et la nature des biens sur lesquels elles doivent porter.
422 Les conditions de fond exigent que la créance soit certaine, liquide et exigible.
423 Les conditions de forme sont relatives à l’existence d’un titre exécutoire, voir Tribunal de Première Instance, Niamey, ordonnance de référé n° 236/2000 du 27 décembre 2000. Adamou Boukary Maïga c/Achats. Service International.
424 La saisie des biens du débiteur n’est valable que si les biens constituant l’assiette de la saisie appartiennent au débiteur saisi et sont disponibles entre les mains. L’Acte uniforme a ainsi consacré une solution classique, l’appartenance des biens au débiteur saisi et la disponibilité des biens.
425 L’Acte uniforme a laissé aux États-parties le pouvoir de préciser les créances insaisissables. Il peut s’agir de gains et salaires des époux versés sur un compte bancaire.
426 L’Acte uniforme consacre ainsi une solution importante, l’huissier de justice est la personne nécessaire, mais cette solution ne manquera pas de poser des problèmes dans les États où cette profession n’est pas réglementée. Cette profession est réglementée par la loi nationale de chaque État-partie.
427 Les agents d’exécution sont des personnes physiques ou morales qui d’une manière habituelle ou occasionnelle procèdent au recouvrement des créances pour le compte d’autrui, notamment dans les États où la profession d’huissier de justice n’existe pas ou n’est pas réglementée. Il peut s’agir des agents de poursuite, des agents de la douane, les ingénieurs et agents techniques des eaux et forêts.
428 S’agissant de l’autorité judiciaire, l’Acte uniforme institue comme juge d’exécution le Président de la juridiction statuant en matière d’urgence, mais, il peut déléguer ses fonctions à un magistrat.
429 L’article 16 de la loi française n° 91-650 du 8 Juillet 1991, prévoit que l’État est tenue de prêter son concours à l’exécution des jugements et autres titres exécutoires, le refus de l’État de prêter son concours donne droit à une réparation ». C’est cette solution qui a certainement inspiré les rédacteurs de l’Acte uniforme.
430 L’Acte uniforme a minutieusement réglementé la procédure de la saisie, le non-respect entraînera la nullité de la procédure.
431 La première conséquence est l’indisponibilité des biens saisis.
432 Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou, jugement n° 303 du 14 avril 1999.
433 Tribunal de première Instance de Yaoundé, ordonnance de référé n° 1135 du 7/09/1999.
434 Tribunal régional de Dakar, ordonnance de référé du 23 Juillet 2001 – SCATT c/NDIR, Revue EDJA N° 50 6 Juillet/Août/Septembre, 2001, p. 25.
435 La mainlevée de la saisie conservatoire est la mise à néant de la saisie pour violation des conditions de fonds et de forme qui le régissent.
436 En dehors de la main levée, la saisie conservatoire peut faire naître d’autres incidents, tels que la réduction ou le cantonnement ; Tribunal de Grande Instance Ouagadougou, jugement n° 303 du 14 Avril 1989 Il Boudou Ambroise c/Vandamme Raphaël.
437 La saisie gagerie, est une saisie conservatoire spéciale permettant au bailleur d’immeubles de placer sous main de justice, les meubles de son débiteur garnissant les lieux loués ; Voir les articles 289 et suivants. du Code de procédure civile ; 473 et suivants du code sénégalais. Voir Tribunal Grande Instance de Ouagadougou, jugement n° 266 – Lompo née Ouédrago Talata c/ Deloche Danielle.
438 La saisie foraine est une saisie conservatoire particulière qui permet à un créancier de placer sous main de justice les biens mobiliers corporels d’un débiteur « forain »,.
439 La saisie revendication, est une procédure par laquelle, le titulaire d’un droit de sûreté sur un bien meuble corporel, le fait place sous main de justice pour en assurer la conservation et en obtenir ultérieurement la remise.
440 A l’exception de la législation malienne, décret n° 84-226/P. R.M. du 28 juin 1994 portant code de procédure civil commercial et social, l’ensemble des États parties à l’OHADA n’avaient pas prévu de dispositions spécifiques à la saisie conservatoire de créance.
441 La réglementation de la saisie des droits d’associés et de valeurs mobilières constitue une innovation de l’Acte uniforme.
442 La saisie vente de droit commun ou saisie vente générale est celle qui vise, tous les biens mobiliers du débiteur en général par opposition à la saisie des récoltes sur pied, laquelle vise un bien mobilier spécifique.
443 Tribunal de Première Instance de Yaoundé, ordonnance de référé n° 183 du 6 décembre 1889, Sté Razel Cameroun c/ Me JP. Bikoum et Dame Douma Ekata ; Tribunal Régional de Niamey, jugement civil n° 119 du 28 février 2001, B.C. c/ Code Mandataire, succession A.S., Revue Nigérienne du droit ; Voir C.A. d’Abidjan, arrêt référé n° 48 du 8 Mai 2001, TEXACO-CI c / SIB, Actualité juridique n° du 17 juillet 2001, p. 6.
444 Tribunal Régional de Niamey, ordonnance de référé n° 67/TR/NY-2001 du 10 avril 2001, Ayant droit Moustapha Kaïlou c/ SONIBANK, ECOBANK et UGAN ; Tribunal de Grande Instance de Brazzaville ordonnance des référés, créance n° 153 DU 30 octobre 2001, Bras. Co. C/ Itou Georges.
445 Tribunal de Commerce de Brazzaville, ordonnance des référés du 12 décembre 2001, ONPT c/Etablissement air-Mer Congolaise et société OTHIIC.
446 Tribunal Grande Instance de Bobo Dioulasso, ordonnance des référés n° 49/99 du 3 Juillet 1999, Traoré M. Martin c/ CNEA ; Tribunal 1ère Instance de Yaoundé, ordonnance des référés n° 218 du 16 décembre 1999, Dame Tegny née KM dem fotso Alice c/ Ngnitembeoua Joseph et BICEC, in OHADA. com. ; Tribunal Première instance de Yaoundé, ordonnance référé n° 403 c/ du 23 mars 2000, Nemba Gabriel c/. Bayemi Mari Madeleine, in http://Www.ohada.com.
447 Contrairement aux législations antérieures de certains États-partie, l’Acte uniforme ne s’est pas contenté de réglementer la saisie arrêt entre les époux, mais à une généralisation de cette saisie.
448 La saisie appréhension, est une saisie qui permet de faire appréhender par un Ministère d’huissier, un meuble corporel entre les mains de celui qui est tenu de restituer ou de délivrer.
449 Tribunal régional Hors classe de Dakar, jugement d’adjudication T.F. N° 20.637/06 Labrex/Sénégal c/ Aly CISSE ; Voir Tribunal Régional Hors classe de Dakar, jugement d’adjudication v. T.F. 20.965 D.G. Robert Tabet c/Ousseinou Chamseidhine.
450 Tant dans la législation ancienne, que dans la nouvelle, l’immeuble, objet de la saisie doit être immatriculé préalablement à l’adjudication, soit par le débiteur, soit par le créancier.
451 Le prix est le chiffre au-dessous du quel aucune enchère ne peut être portée.
452 L’Acte uniforme a imposé la constitution d’avocats opérés de nullité de la procédure.
453 Acte uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement des créances et les voies d’exécution, art. 247, alinéa 1.
454 Le régime de ce débiteur est régi par les articles 249 à 250 et suivants de l’Acte uniforme.
455 Il s’agit du tiers acquéreur et de la caution.
456 L’Acte uniforme a prévu des immeubles qui ne peuvent pas faire l’objet de saisi.
457 Il faut noter une ressemblance entre les articles 298 et suivants de l’Acte uniforme, et 718 et suivants de l’ancien code français. On rencontre les mêmes difficultés d’interprétation, suivant la définition de la notion d’incident ; Voir la jurisprudence Donnier.
458 Deux types de règles ont vocation à régir les incidents. Les règles communes à tous les incidents et les règles propres à chaque type d’incidents.
459 Cass. Civ. 2°. 8 octobre 1986, Bulletin civ. II, n° 132
460 Lorsque plusieurs créanciers poursuivent le même débiteur, il y a le plus souvent la jonction des poursuites qui étaient menées pour le compte de tous par le premier saisissant.
461 La distraction est l’incident de la saisie immobilière par lequel un tiers qui se portent propriétaire de l’immeuble, cherche à la soustraire de la saisie. On peut s’interroger sur l’attitude des rédacteurs de l’Acte uniforme en réservant le droit de soulever l’incident aux seuls propriétaires, comme, si seuls les titulaires du droit de propriété peuvent subir les conséquences de la loi sur la saisie immobilière.
462 Les demandes en annulation constituent les incidents les plus fréquents de la saisie immobilière, car, les conditions de fond et de forme sont très nombreuses.
Voir l’avis consultatif n° 00/99/JN/ du 7 juillet 1999, relatif au régime des nullités prévues par l’Acte uniforme sur les voies d’exécution.
463 La folle enchère est la procédure ayant pour objet de mettre à néant l’adjudication en raison des manquements de l’adjudicataire à ses obligations et de provoquer une nouvelle vente aux enchères de l’immeuble.
464 La faillite, procédure unique, trouve son origine la plus ancienne au Moyen Age, précisément dans les villes italiennes, à la fin du 15ème siècle, notamment dans les statuts de Genève de 1498 réformés en 1588, et dans ceux de Florence, de Milan et de Venise. En France, les premiers textes en matière de procédures collectives sont constitués par les ordonnances royales de 1536, et 1560 et 1673 ; le Code de commerce et la loi du 18 Mai 1938 ; la loi du 4 mars 1899 sur la liquidation judiciaire ; les décrets-lois de 1935 et le décret du 20 mai 1955. Il faut noter également les grandes réformes de 1967, 1984, 1985, 1994 et enfin du 26 juillet 2005.
465 Dans la plupart des États africains, membres de l’ohada, la législation applicable était éparpillée. Les États se sont inspirés de l’exemple français, ce qui a fait naître trois familles :
-ceux qui appliquent le Code de commerce tel qu’il était appliqué pendant la période coloniale et complétée par la loi du 4 Mars 1899. Ainsi, dans ces États, on remarque l’existence de la faillite et de la liquidation judiciaire ;
- ceux qui ont adopté des textes après les indépendances en s‘inspirant de la loi française du 13 juillet 1964. Dans ces pays, le règlement judiciaire coexiste avec la liquidation des biens ;
- Enfin, ceux qui se sont inspirés après l’indépendance de la loi du 1er mars 1984 et 25 janvier 1985.
466 C’est dans les articles 150 et suivants de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés et des groupements d’intérêts économiques qu’a été prévu les procédures d’alerte qui sont de deux sortes, celles prévues par les commissaires aux comptes et celle prévues par les associés. Ces deux procédures ont été définies de manière précise, mais, elles ont malheureusement un domaine limité, parce qu’elles ne concernent que les entreprises individuelles. Selon Yves CHAPUT « L’alerte est bien choisi. Ce n’est pas encore le temps des alarmes ou même des conflits. Il ne s’agit que de prévenir les dirigeants des écueils prévisibles. L’action efficace reste à entreprendre. Mais ne pas alimenter maladroitement les rumeurs ou éveiller les concurrents, les alertes devraient rester confidentielles ». L’alerte a pour but de mettre les dirigeants sociaux devant leur responsabilité. On peut noter par ailleurs l’absence de groupement de présentation aussi bien dans l’Acte uniforme, relatif droit des sociétés que l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives, mais, également les procédures initiées par les institutions représentatives de personnes ou entre le Président du tribunal.
467 Les personnes justiciables sont, selon l’Acte uniforme, les personnes physiques ou morales commerçantes. S’agissant de personnes physiques l’Acte uniforme a préféré leur donner la qualité de commerçant, exclusion faite des artisans et des cultivateurs. Pour les personnes morales, l’Acte uniforme a décidé que toutes les personnes morales de droit privé qu’elles poursuivent ou non un but lucratif sont passibles de procédures collectives.
Les entreprises publiques constituées en la forme de personnes morales de droit privé, sont également assujetties aux procédures collectives.
468 Cour d’Appel d’Abidjan, Chambre civile et commerciale. Arrêt n° 89 du 16 janvier 2001. Société World City c/ Gnodj. Djokouchi Jean.
469 C’est ce même délai qu’a retenu l’ordonnance française du 23 septembre 1967 sur la procédure de suspension provisoire des poursuites.
470 L’analyse du droit français en la matière, a permis de contacter qu’il soumet aux procédures collectives, cf. Loi du 25 janvier 1985 et loi 30 Janvier 1988, les personnes morales de droit privé et les agricultures.
471 Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou, jugement n° 423 du 25 avril 2001, liquidation des biens de la société FASSO FANI
472 Antérieurement, seules les personnes morales commerçantes, étaient assujetties aux procédures collectives.
Désormais, cette procédure est ouverte aux autres personnes morales non commerçantes, l’Acte uniforme à l’instar des autres législations a élargi le champ d’application des procédures collectives.
473 L’Acte uniforme a consacré cette catégorie juridique en définissant le régime et la nature juridique de ces personnes morales.
474 Cette catégorie est constituée par l’État, les collectivités territoriales, et les Etablissements publics.
475 Cass civ., 14 Mai 1930 et 2 mars 1932. DH 1933, I 121 – Note Besson ; Voir Com. 18 novembre 1956. Bull. Cass. 3, n° 396.
476 C’est celle qui exige un arrêt effectif du service de caisse, autrement dit, arrêt matériel des paiements.
477 C’est celle qui consiste à reporter la date de cessation des paiements dans le temps. L’Acte uniforme permet cette possibilité de report à 18 mois.
478 Cass. Com., 23 janvier 1968, Bull. Cass., 1969 – 4. N° 34 – 20 février 1970, D.S., 1980, 4, observation Derida.
479 STOUFFLET, la notion de trésorerie, Rev. Jurisp. Com. N° Spécial novembre 1989, p. 30.
480 Y. GUYON, droit des affaires, 1991, Tome 2, 3° édition – p. 143. Voir Tribunal de Lille 4 mars 1985, Rev. Juris. Comm. 1985 p. 191 et suivants.
481 Emmanuel De PONTAVICE, Les commissaires aux comptes et le décret du 1er mars 1985, in « information et débats n° 14, CRCC de Versailles ».
482 La compétence d’attribution, elle pose la question de savoir qu’elle est parmi les différentes catégories de juridictions existantes sur le territoire nationale, la catégorie de juridiction qui peut connaître d’une affaire en raison de la nature des faits.
483 La compétence territoriale précise, quel est de tous les tribunaux de même catégorie, réparties sur le territoire national, celui qui devra connaître de l’affaire.
484 Les procédures collectives soulèvent en droit international privé deux principales catégories de questions : celle relative à la compétence internationale des juridictions et afférente aux conflits de juridiction, puis celle afférente aux effets des jugements rendus à l’étranger.
485 Quand la cessation de paiement est constatée, la juridiction compétente est tenue de prononcer le redressement judiciaire par la liquidation des biens.
486 Le Président de la juridiction compétente doit avant le prononcé du jugement d’ouverture désigner un juge du siège ou toute personne qu’il estime qualifiée pour établir un rapport.
487 Le jugement prononcé, le règlement judiciaire ou la liquidation des biens est un jugement déclaratif.
488 Le jugement d’ouverture du règlement judiciaire ou la liquidation des biens doit faire l’objet d’une publicité dans le but d’informer les créanciers.
489 Les voies de recours contre le jugement d’ouverture et, d’une manière générale contre les décisions rendues dans le cadre d ‘une procédure collective sont réglementées en tenant compte de la rapidité qui doit caractériser leur déroulement et leur dénouement.
490 « La faillite de fait » a connu en France une évolution qui a tendu à la réduction, puis à la suppression de son rôle
491 L’Acte uniforme a proposé deux solutions, l’une est déterminée par l’article 32 et l’autre la reconnaissance par l’Acte uniforme de la faillite de fait. D’une part, l’État ne peut pas ignorer les difficultés des entreprises. D’autre part, l’État peut intervenir pour renforcer une entreprise. En ce qui concerne les Banques et les Etablissements financiers, il est prévu une réglementation particulière dans le cadre de l’UEMOA à travers la Commission bancaire. Dans le cadre de la réglementation des assurances, l’article 325 du code CIMA détermine le régime du traitement des difficultés de ces entreprises.
492 RIPERT et ROBLOT, op. cit., p. 310.
493 Com. 10 avril 1957, Gaz Pal.., 1957 – 264
494 Yves CHAPUT, Droit de redressement et liquidation judiciaire des entreprises, Puf. 1987, p. 81 à 111 ; Voir Yves GUYON, Droits des affaires, Tome 2 : Entreprise en difficultés, Redressement judiciaire, Faillite, Economica, 1997 n° 1151 et s. ; Voir Emmanuel THALLER, traité élémentaire de droit commercial 6° édition, revu et mise à jour par D. Percerou, Paris Libéria, Artur Rousseau, 1922 p. 1036 et s.
495 Dans certains États on l’appelle Tribunal de Première instance, dans d’autres le Tribunal de Grande Instance. Au Sénégal, c’est le Tribunal Régional.
496 Le choix de la catégorie de personnes qui exerce la fonction de syndic, l’exigence lié au lieu de parenté du débiteur.
497 Voir Emmanuel THALLER, op cit., p. 16.
498 Filiga Michel SAWADOGO, Droit des entreprises en difficultés - collection : Droit uniforme africain, Bruylant Bruxelles, 2002.
499 Filiga Michel SAWADOGO, op cit.
500 Ibrahima Khalik DIALLO, Arbitrage commercial interne et international OHADA Sénégal, Côte d’Ivoire, Guinée, Publication de l’Institut Afrique Mer, p. 39.
501 Kéba MBAYE, La contribution de l’OHADA à l’arbitrage commercial international, in site OHADA. Com.
502 Alain FENÉON, Un nouveau droit de l’arbitrage en Afrique, Penant n° 883, spécial OHADA – mai à Août 2000.
503 CA Paris, 10 avril 1957, Affaire Myrtoa Steamship.
504 Pierre MAYER, Droit de l’arbitrage, Collection Droit uniforme africain ; Bruylant Bruxelles, p. 79.
Voir Antoine DELABRIÈRE & Alain FENELON, Les constitutions du tribunal arbitral et le statut de l’arbitre dans l’Acte uniforme OHADA, in http://Www.ohada.com.
505 A L’instar de l’article 18 de la loi type de la CNUDCI, l’article 9 de l’Acte uniforme impose les parties a être traité au même pied d’égalité.
506 Gaston KENFACK DOUAJNI, Le Juge étatique dans l’arbitrage OHADA, in http://Www.ohada.com.
507 Cass. Civ. 2ème, 13 avril 1972, JCP 1992, Ed.G., 11.17189 Note Pevel ; Gaston KENFACK DOUAJNI, Les mesures provisoires et conservatoires dans l’arbitrage OHADA, in http://Www.ohada.com.
508 Pierre MAYER, op cit p. 187 et s.
509 Philippe BOULANGER, La reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales dans l’OHADA, in http://Www.ohada.com -
510 L’hétérogénéité des référentielles comptables en vigueur dans la zone. On peut en dénombrer au moins cinq :
- les deux plans comptables français de 1957 et 1982 ;
- trois adaptations du plan comptable O.C.A.M ;
- la pluralité des bilans et États financiers qui affecte la fiabilité des informations comptables émanant des entreprises ;
- l’Etablissement des normes comptables au regard des normes comptables internationales qui constituent une exigence pour les investisseurs et les bailleurs de fonds ;
- l’Insuffisance appréhension du secteur productif, due à l’incompétence du secteur informel.
511 Voir avant les indépendances les plans comptables français de 1947 et 1957
Voir le Plan comptable OCAM (Organisation Commune Africain et Malgache adopté en janvier 1970
Voir le Plan Comptable OHADA adopté à Dakar en décembre 1895, mais jamais appliqué
Voir le Plan Comptable général des entreprises du Système comptable Ouest Africain « SYSCOA »
Dans la Zone UEMOA, plusieurs textes communautaires en la matière on été élaborés
Règlement communautaire n° 04/96/CM portant adoption d’un référentiel comptable commun au sein de l’UEMOA, dénommé Système Comptable Ouest Africain
Règlement n° 03/97/CM/UEMOA, instituant « un Conseil Comptable Ouest africain dans l’Union Economique et Monétaire Ouest africain »
Règlement n° 02/97/CM/UEMOA portant création d’un ordre national des Experts comptables et des comptables agréés « dans les États-membres de l’UEMOA
Directives n° 03/97/CM/UEMOA, portant création d’un Conseil national de la comptabilité dans les États membres de l‘Union économique Monétaire Ouest africaine ;
Directive n° 04/97/CM/UEMOA, portant création d’un « Régime des Centres de Gestion Agréées » dans les États membres de l’Union Economique monétaire Ouest Africaine.
512 Acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises installées dans les États-parties ou traité OHADA,art. 2.
513 Acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises installées dans les États-parties au traité OHADA, art. 8
514 Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Centrafrique, Congo, Côte d’Ivoire, Gabon, Mauritanie, Niger, Sénégal, Tchad, Togo ; par la suite le Mali, la Guinée et Djibouti.
515 Les brevets d’inventions (70 articles) ; Les modèles d’unités (46 articles) ; Les marques de produit ou de service (52 articles) ; Les modèles ou dessins industriels (44 articles) ; Les noms commerciaux et la protection contre la concurrence déloyale (17 articles) ; les appellations d’origines (13 articles) ; ; Les droits d’auteurs et le patrimoine culturel (79 articles) ; L’organisme central de la documentation et d’information en matière de brevets (8 articles) ; Les options de modifications offertes aux États (8 articles).
516 Traité OHADA, art. 2.
517 Cette expression est empruntée à Monsieur BORÉ qui a fait une étude justement intitulée « la difficile rencontre du droit pénal français et du droit communautaire » ; Voir Mélanges Vitu Cujas, 1989 p. 25 ; Voir également Jacques BIAN CORELITLI et Dominique MAIDANI, L’incidence du droit communautaire sur le droit pénal des États membres.
518 H LABAYE, L’application du titre VI du traité sur l’Union européenne et la matière pénale, revu. SC crim 1995. 35 ;DELMAS MARTY et P TRUCHE, Uniformité ou conformité des systèmes juridiques nationaux : des règles identiques aux principes directeurs, in Quelle politique pénale pour l’Europe ?, Economica 1993, p. 321. Voir J. ROBERT, L’incrimination par renvoi du législateur national à des règlements communautaires futurs, Mélanges LEVASSEUR, p. 103.
519 Voir l’exposé des motifs de la loi sénégalaise n° 98-22 du 26 mars 1998 portant sanctions pénales applicables aux infractions contenues dans l’Acte uniforme sur le droit des sociétés.
520 Les États-parties au traité de l’OHADA ont conscience qu’ils ne sont pas au même niveau de développement, d’où les disparités économiques dont il faudrait prendre en compte dans leur projet communautaire, la justice a un coût ; surtout il faut noter que la justice pénale est du ressort de l’État ; Voir DELMAS-MARTY, Droit pénal des affaires, T 1, partie générale : Responsabilité Procédure, Sanctions, Paris PNT, 3e édition.
521 Actes uniformes sur les sociétés commerciales et GIE, art. 887 al. 3 et 4.
522 B. MERCADAL estime qu’il s’agit d’un même délit bien, qu’à la lettre, les textes paraissent établir trois incriminations.
523 Le Sénégal a adopté la loi 98 – 22 du 26 mars 1998, JORS, n° 5798 du 26 avril 1998, p. 303.
524 Il s’agit des personnes physiques dirigeantes, des personnes morales assujetties aux procédures collectives et de personnes physiques représentantes permanentes de personnes morales que dirigent elles-mêmes d’autres personnes morales assujetties aux procédures collectives. Les peines qui leur sont applicables, sont celles prévues pour les banqueroutes simples ou frauduleuses.
525 Ndiaw DIOUF, La difficile émergence d’un droit pénal communautaire des affaires dans l’espace OHADA. In Revue Burkinabé de droit des affaires.
526 Ndiaw DIOUF, op cit.
527 Jérôme HUET, Traité de droit civil : les principaux contrats spéciaux, Edition LGDJ, p. 948.
528 RIPERT et ROBLOT : par Michel Germain et Louis Vogel, Traité de droit commercial 1 p. 26 n° 50
529 Cass. Comm., 15 juin 1980, Société ELF, distribution c/ Epoux Dumez.
530 Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du GIE, art. 75, 236, 146, 170 et 175.
531 Acte uniforme sur le droit des sociétés commerciales et du GIE, art. 118 à 120.
532 Mais il faut noter que l’absence d’écrit n’empêche pas la validité du gage entre les parties.
533 Dans presque tous les États parties, ces juridictions ont des dénominations différentes.
534 Au Sénégal, c’est la loi 84.09 du 4 janvier portant création de l’ordre des Avocats
535 Sénégal, décret n° 89.15.74 du 27 septembre 1989. Au Sénégal, Doudou NDOYE « droit foncier, domanial et immobilier EDJA Ed. 1997
536 M. LECEREF, Comment interpréter les dispositions transitoires de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du Groupement d’intérêt économique, Cahiers juridiques et fiscaux, CFCE, n° 2.343. Voir Joseph Issa SAYEGH, Harmonisation du droit des Affaires, Collection droit uniforme africain, Edition Bruylant Bruxelles 2002.
537 Michel LECEREF. op cit p. 345
538 Art. 908 al. 2 AUSCGIE.
539 Art. 914, AUSCGIE.
540 Professeur Abdallah CISSE, Mise en harmonie des sociétés commerciales avec le droit harmonisé des affaires, faire le point sur la régularité des entreprises, in Africajuris, hebdomadaire d’informations juridiques et d’annonces légales n° 00 du 24 au 30 janvier 2002.
541 Voir sur la question l’ouvrage collectif sur les sûretés de François Anoukaha, Aminata Cissé NIANG, Messanvi TOLI, Joseph issa SAYEGH, Isaac Yankhoba NDIAYE, Moussa SAMB, Collection Droit uniforme OHADA. Edition Bryant Bruxelles 2002, p. 1. Voir Joseph Issa SAYEGH : harmonisation droit des affaires, Collection droit uniforme. EDITION Bruylant, Bruxelles 2002.
542 Acte uniforme sur le droit commercial général ; Acte uniforme sur le droit des sociétés commerciales et le GIE ; Acte uniforme sur les sûretés.
543 G. MAZARINE, Ancien Secrétaire Général de l’ALALE cité par Sadock BELAID.
544 Avis n° 002/2000/EP du 19 octobre 2000 de la République de Côte d’Ivoire.
545 Il s’agit des règles relatives aux statuts du commerçant, au Registre du Commerce, et crédit mobilier, au bail commercial et au fonds de commerce, aux intermédiaires de commerce et à la vente commerciale.
546 Joseph Issa SAYEGH, op cit. p. 137 ; Voir l’ouvrage sur sociétés commerciales et du GIE. Collection droit uniforme édition Bruylant, Bruxelles 2002, de plusieurs auteurs, p. 32.
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L’intégration juridique dans l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA) et dans l’organisation pour l’harmonisation du droit des affaires en Afriques (OHADA)
Amadou Yaya Sarr
2008
L’information des actionnaires, source d’un contre-pouvoir dans les sociétés anonymes de droit français et du périmètre O.H.A.D.A.
Louis-Daniel Muka Tshibende
2009