Introduction au titre I
p. 41-42
Texte intégral
1Le phénomène de la dualité des sources juridiques dans la Zone Franc n’est pas nouveau. Avant les indépendances, il opposait le droit métropolitain au droit coutumier. Après les indépendances, les mouvements de codification et d’uniformisation opposaient le nouveau droit que devaient mettre en place les nouveaux États indépendants et le droit coutumier. L’attitude des nouveaux États africains, à l’égard de la dualité de l’ordre juridique de l’époque, consistait à tendre vers son élimination progressive64.
2Les États africains ont donc très tôt pris conscience de la nécessité de l’uniformisation du droit, et l’inscription de ce problème sur la liste des questions prioritaires n’a soulevé aucune difficulté. En revanche, ce qui posait problème était de savoir lequel des deux types d’ordres juridiques modernes ou traditionnels devait primer l’un sur l’autre. Quelques États ont répondu à cette question en optant résolument pour le modernisme par le droit étranger. Cependant, la plupart d’entre eux ont résisté, et plus particulièrement ceux dans lesquels la religion traditionnelle ou l’islam a une forte emprise. Après avoir laissé les choses en l’état ils ont reconduit, à quelques nuances près, le système de la dualité en instituant notamment l’option de législation et le recours aux modes coloniaux de solution des conflits de lois internes65.
3La dualité des sources juridiques entre l’UEMOA et l’OHADA n’est que le prolongement de la situation antérieure. Ainsi, l’institutionnalisation de deux ordres juridiques dans la Zone Franc, consacrera inéluctablement deux sources juridiques. En effet, les deux traités auront chacun institué un ordre juridique communautaire qui sécrétera ses propres sources qui s’articuleront selon une hiérarchie bien définie dans l’ordonnancement juridique. L’étude des sources du droit communautaire conduira forcément à faire une distinction entre les sources matérielles constituées par le droit communautaire européen (surtout pour l’UEMOA dont les États membres ont imité le système normatif européen), et les sources formelles qui sont caractérisées par leurs diversités. Aussi, pour mieux cerner la question de la dualité des sources des deux ordres juridiques, nous l’examinerons à travers l’analyse des ordres juridiques de l’UEMOA et de l’OHADA.
4A l’instar de la plupart des organisations internationales d’essence communautaire, l’UEMOA et l’OHADA ont secrété chacune leur propre ordre juridique. L’Union économique et monétaire n’est viable que si, entre les États membres, l’unification des règles juridiques est réelle. C’est pour assurer l’unification des espaces économiques et monétaires qu’il a été consacré le traité UEMOA qui n’est qu’un complément de l’UMOA.
5Quant à l’harmonisation du droit des affaires dans la Zone Franc, elle ne peut également être viable sans l’uniformisation des règles juridiques des matières du droit des affaires. Ainsi, de par leur nature conventionnelle (l’accord de volonté des États membres) comme de leur caractère écrit, ces deux traités offrent des cadres précis aux engagements internationaux. Le droit communautaire équivaut au droit né de l’application au plan régional des traités multilatéraux générateurs d’organisme d’intégration économique66. La théorie classique des sources du droit international est le fruit d’une longue pratique des relations entre les États.
6Au xxème siècle, le droit international s’est profondément transformé, longtemps figé, dans son essence, aux règles de relations formelles entre États, il est devenu un droit de contenu. En dépit de l’inégalité des réalisations, le droit économique communautaire est devenu de nos jours très étendu et complexe. Les transferts de compétences, en matière d’édiction de règles juridiques, opérés par les États membres au profit d’organes communautaires, engendrent la création de normes hiérarchisées qui vont constituer, en premier lieu, le droit communautaire originaire ou droit primaire, source fondamentale ; et, en second lieu, le droit dérivé secondaire, fondé essentiellement sur les deux traités et les autres sources. Dès lors, pour atteindre les objectifs qu’ils se sont assignés, les États membres ont consacré le droit originaire (chapitre I) et le doit dérivé (chapitre II).
Notes de bas de page
64 René SEGUIN, Codification et unification du droit in Encyclopédie juridique africaine, NEA, Tome I, p. 453.
65 P. LAMPÜE, La justice civile dans les États d’Afrique francophone, RJGP 1966, p. 155.
66 Direction des affaires juridiques de la BCEAO, Les grands principes constitutionnels en vigueur dans l’UEMOA.
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L’intégration juridique dans l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA) et dans l’organisation pour l’harmonisation du droit des affaires en Afriques (OHADA)
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