Chapitre I. L’action politique des avocats jusqu’en 1870
Une réalité locale hétérogène
p. 423-446
Texte intégral
1Lors de la rapide succession des régimes monarchiques, impériaux et républicains, dans les années 1830 - 1870, il apparaît que Marseille se retrouve de façon presque systématique, dans l’opposition au gouvernement en place, ou du moins dans les premiers temps de son installation. Déjà, en 1793 - 1794, la cité phocéenne avait été girondine face à une Convention jacobine, en 1814 elle est royaliste face à un gouvernement impérial en proie à la crise, en 1830, elle devient libérale lorsque le gouvernement est royaliste, et enfin, en 1852, elle demeure républicaine alors que l’Empire renaît.
2Ce positionnement marginal et provocateur de la Cité semble rejaillir sur les passions politiques locales en les exacerbant. Les avocats de Marseille, lorsqu’ils s’investissent dans la vie publique, témoignent de ce particularisme phocéen. De même, il semble que leur activité politique soit plus forte pendant les phases de rupture de la période (1830, 1848, 1851, 1870), comme si les avocats investissaient mieux le champ politique en temps de crise, qu’en temps de fonctionnement normal des institutions. Il est vrai que les parcours politiques des avocats ont tendance à se pérenniser au fur et à mesure de l’avancée du siècle. Mais, force est de constater qu’il existe une nette séparation entre, d’une part, plusieurs figures de proue du Barreau, dont la personnalité, la forte aspiration à la vie politique, ajoutées à des conditions propices, leur permettent de s’élancer durablement dans “ la valse des régimes ” et de lui survivre avant de revenir à la barre, et d’autre part, une grande majorité d’avocats marseillais qui n’ont aucun engagement politique notable, sauf lorsqu’il s’agit de participer collectivement à la défense des intérêts et les libertés de leur profession.
3La présentation de l’étendue de la place offerte aux avocats par des conditions politiques favorables à partir de l’année 1830 (I), est le préalable nécessaire à l’analyse des parcours publics de certains avocats marseillais entre République et Empire (II).
I - L’OUVERTURE POLITIQUE A PARTIR DE 1830
4C’est à partir de la revendication victorieuse de l’autonomie professionnelle que se déclinent, dès le début des années trente, les premières manifestations d’une liberté politique des avocats de Marseille, suite aux dispositions favorables de l’ordonnance d’août 1830 (§ 1). Cette liberté retrouvée permet enfin aux avocats de briller à la Tribune à laquelle leurs qualités oratoires les prédestinent depuis toujours. Entre les années 1830 et 1848, ils commencent à investir le champ politique et à briguer, ponctuellement, divers mandats : ils sont conseillers, parfois députés, mais pas encore maires (§ 2).
§ 1 : L’ordonnance de 1830 : une ouverture politique décisive
5Comme l’a noté André Damien,
“Le barreau s’était montré en 1830 très révolutionnaire (...) les avocats avaient refusé 6de plaider devant la magistrature de la Restauration jusqu’à ce que celle-ci ait été épurée par le nouveau régime”1790
6L’ordonnance du 27 août 1830 est promulguée à la suite des événements de la révolution de juillet1791, et elle peut être perçue comme une “ récompense ” accordée à l’ensemble du Barreau par la monarchie de Louis-Philippe1792, pour son soutien politique pendant la crise. Toutefois, la Monarchie de Juillet, une fois instaurée, ne bénéficie pas, du moins au sein du barreau parisien, d’un soutien spontané et inconditionnel, ou du moins, comme l’écrit Karpik, “ la période de grâce sera de courte durée ”1793. Effectivement, les avocats “ versent dans une opposition multiforme que renforce l’arrivée d’une nouvelle génération ”1794.
7Mais, le bilan demeure sur le plan politique, extrêmement positif, car l’expérience de la Monarchie de juillet, le retour de la liberté et de l’indépendance, marque pour les avocats une ouverture sur la vie publique qui préfigure celle de la Troisième République, d’autant plus que la plupart des grands avocats acteurs des transformations sociales et politiques de la période 1870 - 1890 sont formés à l’école de la libéralisation des années 1830 - 1850.
8Incontestablement, pendant cette période charnière, les avocats parviennent aux plus hautes sphères du pouvoir, à l’échelle nationale. Si auparavant, seules quelques individualités passaient les portes de la politique, à partir de l’ordonnance de 1830, “ la notoriété acquise dans les prétoires, l’influence du verbe, l’activisme politique sont désormais consacrés par l’élection ”1795.
9Un écho local particulièrement intéressant sur la question de l’indépendance politique des barreaux sous le régime orléaniste, est donné par une délibération du conseil de l’Ordre de Marseille de 1833. Il s’agit d’un témoignage collectif de soutien adressé par l’Ordre de Marseille au Bâtonnier de l’Ordre des avocats de Paris,
“ poursuivi par le Procureur général près la cour royale de la même ville, à raison d’un discours qu’il aurait prononcé le 28 nov embre dernier à la séance d’ouverture de la conférence des avocats ”1796.
10A l’unanimité de ses membres, le Conseil de l’Ordre de Marseille adopte l’envoi d’une lettre de soutien au Bâtonnier incriminé. Le contenu de cette lettre est extrêmement révélateur de la liberté d’expression exercée par les avocats. Tout d’abord, la solidarité entre barreaux semble jouer pleinement :
“ le barreau de Marseille s’empresse de vous témoigner sa reconnaissance [car] vous avez été le digne interprète de nos sentiments, de nos vœux, de nos impérieux besoins ; dans le cercle de vos belles fonctions, vous avez rappelé aux magistrats qu’eux aussi ont des devoirs à remplir envers ces hommes indépendants et laborieux qui consacrent leur vie au culte de la Justice ; mais vous n’avez cessé de conserver pour la magistrature ce respect dont les convenances autant que la loi défendent à l’avocat de s’écarter ”1797.
11Puis, les événements politiques sont directement évoqués, avec objectivité et une critique à peine voilée :
“ un mois s’était à peine écoulé depuis la mémorable révolution de juillet, et déjà le gouvernement reconnaissait que de justes et nombreuses réclamations s’étaient élevées depuis longtemps contre les dispositions réglementaires qui régissent l’exercice de la notre profession ; qu’une organisation définitive exigeait nécessairement quelques retards mais qu’il y serait procédé dans le plus court délai possible. Que sont devenues ces solennelles promesses ? ”1798.
12Ici, les membres du conseil de l’Ordre de Marseille ne se privent pas de stigmatiser la lâcheté du gouvernement qui ne se décide pas à mettre en œuvre une réforme en profondeur de la profession, que Louis-Philippe avait expressément promise1799 :
“ Qu’a-t-on fait pour apaiser nos justes plaintes, pour déterminer d’une manière claire et précise l’étendue de nos attributions ? N’était-ce donc point assez de trois ans pour obtenir enfin l’entière émancipation dont on nous avoit flatté ? Faudra-t-il éprouver la douleur de la voir infiniment ajournée ?”1800.
13Le Barreau de Marseille s’en prend alors à la magistrature, rappelant que “ la Révolution a fait sortir [ses chefs] des rangs [du barreau] pour les placer au pouvoir ”. Or, il semble que ces derniers aient oublié leurs origines, “l ‘austère et véridique langage [des avocats] ” et les avocats de Marseille d’ironiser : “ que ne poursuivent-ils pas tous les signataires de votre énergique protestation ? ”1801. Les avocats de Marseille manifestent leur soutien inconditionnel à la réclamation du bâtonnier parisien, en parfaite adéquation avec les intérêts de tous les barreaux. Cette réclamation en appelle à une réglementation à la fois libérale et définitive, et les avocats de Marseille s’y joignent avec ferveur :
“ nous nous associons hautement à tous les sentiments que vous avez exprimés ; nous acceptons la solidarité de vos paroles et de vos actes, et nous ne cesserons de répéter avec vous : l’union des avocats français fait notre gloire ; elle est notre force ; elle sera notre salut ”1802.
14Cette dernière formulation n’est pas sans rappeler la vieille “ théorie des classes ” parlementaire1803, que les barreaux, épris de solidarité et dont tous les membres partagent des valeurs communes spécifiques, n’hésitent pas à s’approprier.
15Cri de ralliement professionnel, défi politique, injonction de légiférer au pouvoir en place, tout ceci prouve, de façon presque surabondante, la vivacité des avocats de Marseille et leur penchant de ses membres pour l’action politique. La particularité de leur intervention tient ici au mélange subtil et finalement légitime qu’ils opèrent entre des enjeux purement professionnels et l’exercice d’une liberté politique à peine recouvrée.
16Une autre espèce vient confirmer cette analyse. Elle est évoquée dans la séance du Conseil de l’Ordre du 6 mai 1834. Il s’agit d’un avocat, Me André, qui réclame l’assistance de son Bâtonnier, dans une affaire pendante devant la Cour d’assises des Bouches-du-Rhône. Précisément, il est “prévenu d’avoir proféré des discours séditieux dans le cimetière de Saint-Charles, le 20 février dernier”1804. Comparaissant devant le Conseil de l’Ordre, Me André expose les faits ainsi rapportés dans le procès-verbal :
Se trouvant le 20 février dernier aux funérailles du sieur Mestre, artilleur de la garde nationale, il fut prié par plusieurs personnes qui avaient suivi comme lui le convoi, de prononcer quelques paroles d’adieu sur la tombe du défunt ”
17Alors, Me André fait l’éloge de Mestre et ses paroles, rendues
“ de manière infidèle, servent à la rédaction d’un procès-verbal dressé par un commissaire de police ”1805.
18Selon cet acte de police, Me André aurait dit, ce qu’il conteste formellement, “ nous avons perdu un brave, un vrai républicain, il nous eût puissamment aidés dans la grande semaine, la république pouvait compter sur lui ”1806. C’est pour Me André, en raison d’une fausse, et fort partiale, interprétation des faits et surtout des paroles qu’il a prononcées1807, qu’il a été envoyé devant la Cour d’Assises et inculpé du “ délit d’attaque contre les droits que le Roi tient de la nation française ”1808, et même de vouloir provoquer un changement de gouvernement. Il réclame donc l’assistance de son collectif.
19Le Conseil de l’Ordre décide de lui accorder son aide. Les motifs de la délibération sont très intéressants car, manifestement, le Conseil n’entend pas évoquer la nature ou le bien-fondé des opinions politiques de l’avocat André, pour fonder sa décision. Le Conseil offre son assistance à l’avocat, au seul motif qu’il a été ” injustement accusé d’un délit qu’il affirme, formellement et sur son honneur, n’avoir pas commis ”1809. Le Bâtonnier nomme Mes Dumas et Fortoul, membres du conseil de discipline, pour assister Me André à l’audience de la Cour1810. Me André est finalement acquitté1811 et il retrouve sa place au barreau1812. Mais le plus important dans cette espèce, est bien moins le soutien accordé par le Conseil à l’avocat, que les raisons invoquées pour le justifier. A aucun moment, le Conseil n’intervient sur la question politique : il ne manifeste ni réprobation, ni approbation quant aux opinions politiques de Me André. Ce faisant, il exprime sa profonde conviction quant à l’existence d’une totale liberté d’opinion politique, à partir de laquelle, du moins en théorie et dans les limites de la dignité propre à la profession, il laisse chaque membre du Barreau avoir les convictions qu’il désire et les exprimer en toutes circonstances. Cette attitude du collectif est la première condition de l’engagement politique des avocats, sur le plan individuel.
20C’est d’ailleurs l’étendue cet engagement personnel qu’il s’agit d’examiner à présent, ou plus précisément, les signes de la transformation progressive de l’ouverture politique théorique en engagements personnels concrets, toutefois accompagnés d’une prudente réserve du Conseil de l’Ordre sur toutes les prises de positions et les convictions politiques de ses membres.
§ 2 : Les applications personnelles de la liberté politique retrouvée
21Les années 1830 - 1835 sont agitées, marquées à Marseille par des “ combats de rue ” entre les deux mouvements politiques d’opposition au gouvernement monarchique : d’une part les légitimistes ou carlistes “ ayant pour signe distinctif une cravate verte ”, et les républicains “ à la cravate rouge ”. Les bonapartistes sont à cette époque “ en nombre infime à Marseille ”1813.
22Le parcours politique d’Alexandre Clapier1814 est probablement le plus typique pour la période concernée. Après des études au Collège des Oratoriens de Juilly et à la Faculté de Droit de Paris, il décide de revenir à Marseille et est inscrit au Tableau de l’Ordre des avocats phocéens le 17 janvier 1825. Puis, changeant une nouvelle fois brusquement d’orientation, il quitte le barreau pour embrasser la carrière d’avoué1815. Il ne revient au Barreau qu’en 1836.
23Proche de Thiers, Alexandre Clapier a également été un essayiste et un littérateur de qualité. Pendant sa vie parisienne, il publie deux ouvrages sur la profession d’avocat, Le Barreau français, collection des chefs-d’œuvre de l’éloquence judiciaire en France1816 et Le Barreau anglais ou choix des plaidoyers des avocats anglais1817. Mais, son parcours professionnel et ses réussites littéraires n’ont qu’un intérêt fort secondaire par rapport à sa vie publique.
24Clapier a été très tôt partie prenante dans la vie municipale marseillaise : sa carrière politique commence au début de la décennie. Précisément, c’est dans les derniers mois de l’année 1831 qu’il est élu pour la première fois comme conseiller municipal1818. Pendant toute l’année 1832, il fait tantôt partie de la commission municipale chargée d’examiner les litiges en matière de travaux publics1819, tantôt partie de la commission chargée du contentieux1820. Dans ces commissions, il faut relever également la présence récurrente de deux autres membres du Barreau de Marseille : Me Desolliers1821 et Me Fraissinet1822.
25Clapier reste membre de la municipalité jusqu’à la dissolution du Conseil Reynard. La notoriété1823 qu’il y conquiert, lui permet d’accéder au rang de Pair de France1824, après avoir échoué aux élections du 1er août 1846, elles-mêmes consécutives à la dissolution de la chambre des députés, le 6 juillet de la même année. Alexandre Clapier est, à cette occasion, présenté comme l’un des candidats du gouvernement1825.
26Il faut ensuite évoquer le parcours politique de l’avocat Emile Lcpeytre1826. Après des études au lycée de Marseille et à la Faculté de droit d’Aix-en-Provence, il obtient sa licence en droit le 18 février 1820, et après avoir été accepté comme stagiaire et avoir accompli ses trois années de stage réglementaires, il est inscrit au Barreau le 30 mars 1823. Selon son biographe, l’intégrité et l’amour du travail en font rapidement l’archétype du “ vir bonus dicendi peritus ” que se veulent être tous les avocats1827.
27Après la Glorieuse Révolution, Lepeytre s’engage dans les réformes judiciaires et politiques. Le 20 novembre 1830 il est nommé par Thiers, substitut du Procureur, puis Procureur du Roi à Marseille1828, poste qu’il conserve jusqu’en 18471829. Il est ensuite envoyé à Caen comme Procureur Général près la Cour d’Appel. Son discours de présentation lors de sa prise de charge est très remarqué par Guizot, avec qui Lepeytre entame une importante correspondance1830. Et, lorsque interviennent les événements de 1848, Lepeytre est révoqué par Crémieux et retrouve le secret de son cabinet professionnel. Il deviendra bâtonnier en 1857 et 18581831.
28Un troisième exemple, moins probant car trop tardif, est donné par le parcours de l’avocat Drogoul. Dès ses débuts professionnels, “ il se constitua une clientèle nombreuse où voisinaient toutes les classes et tous les partis ”1832, ce qui lui ouvre des portes sur la vie publique. Ainsi, en 1848, il devient juge suppléant près le tribunal civil de Marseille, conservant cette fonction jusqu’en 1876.
29La participation politique des avocats progresse par à-coups malgré une liberté désormais légalement reconnue. Elle se déploie de façon hétérogène entre les années 1848 et 1870, entre République et Empire.
II - LES AVOCATS MARSEILLAIS ENTRE REPUBLIQUE ET EMPIRE
30Dans un discours prononcé à l’occasion d’une séance solennelle de rentrée de la Conférence des avocats de Marseille, qui coïncidait avec le Cinquantenaire de la Seconde République, Me Jean Pianello ne pouvait manquer de se référer avec emphase à l’un des plus célèbres acquis démocratiques :
“ l’égalité avait été proclamée et à devoirs égaux, prérogatives égales : le suffrage universel s’imposait (...) la constitution de 1848 lui donna le jour, mettant sur le même pied le politicien de carrière et le plus humble des cantonniers”1833
31Le suffrage universel, ainsi loué par un avocat de Marseille, a joué le rôle d’un accélérateur de l’engagement politique des avocats à l’échelle nationale. Ainsi, ces derniers investissent le champ politique en grand nombre, à tel point qu’au moment où s’ouvre la IInde République, un député sur cinq est avocat1834. C’est dans une moindre mesure que croît l’implication des avocats dans la vie publique phocéenne. Toutefois, cas exceptionnel dans son histoire, le barreau de Marseille sort de sa réserve politique traditionnelle, pour afficher son adhésion inconditionnelle à la jeune république (§ 1). L’action personnelle des avocats de Marseille entre 1848 et 1870 demeure résolument hétérogène, tout en gagnant en intensité. Certaines grandes figures du barreau accèdent à l’Hôtel de Ville (§ 2).
§ 1 : Le principe du collectif apolitique et son exception de 1848
32Il est un événement marquant à noter pour l’année 1848 en ce qui concerne le barreau de Marseille, envisagé d’un point de vue strictement collectif, radicalement distinct de l’engagement politique personnel de certains de ses membres.
33Traditionnellement et depuis sa renaissance, l’Ordre des avocats de Marseille, comme la plupart de ses pairs, rejette toute participation directe à la vie politique, en refusant systématiquement d’être assimilé à un “ corps constitué ”. Il persiste dans ce double refus pendant tout le xixème siècle, répondant par la négative à toutes les invitations qu’il reçoit de la part des autorités à se rendre aux cérémonies officielles. Ainsi, en 1858, le Conseil de l’Ordre et le Bâtonnier sont invités par le maréchal Castellane, commandant les divisions du Sud-Est, à recevoir à ses côtés les autorités civiles. C’est le Préfet lui-même qui transmet la demande du maréchal aux avocats1835.
34Le Conseil examine la demande et décline rapidement l’invitation, au motif que :
“ la mission qu’il remplit est toute intérieure et disciplinaire, qu’il n’a aucune délégation de pouvoirs publics, qu’il doit tenir à rester dans cette condition privée qui a toujours été celle du barreau (...) Décide qu’il n’y a pas lieu d’assister à la réception dont ils s’agit... ”1836.
35La réponse, transmise par le Bâtonnier, ne souffre d’aucune équivoque :
“ Le Conseil de l’Ordre me charge de vous remercier, mais il éprouve le regret de ne pouvoir s’y rendre sans manquer à tous ses précédens. C’est une des traditions de notre Ordre que les avocats ne forment pas un corps constitué (...) Ils sont unis seulement par l’exercice d’une même profession, la pratique des mêmes devoirs et par les liens d’une même discipline (...) Nous ne sommes qu’une agrégation d’individus à laquelle n’a été attribuée aucune délégation de pouvoirs publics”1837
36Le fait qu’il s’agisse d’un régime impérial ou républicain, n’affecte aucunement la position de l’Ordre de Marseille qui reste d’une constance remarquable dans son refus de paraître au rang des corps constitués dans les cérémonies officielles1838.
37Toutefois, l’année 1848 apporte une exception remarquable à ce principe du barreau marseillais. D’autant plus remarquable qu’elle ne souffre d’aucun antécédent dans toute l’histoire de l’Ordre phocéen.
38Dans une séance du 4 mars 1848, le Bâtonnier fait part au Conseil d’une invitation qu’il a reçue. Celle-ci est double. L’Ordre des avocats de Marseille est invité “ à faire une visite au citoyen commissaire du gouvernement provisoire ”, en l’occurrence à Emile Ollivier1839, et il est convié “ au vote d’une somme de mille francs destinée à secourir les ouvriers que la crise actuelle laisse sans travail ”1840.
39Contre toute attente, le Conseil accepte les deux volets de cette invitation, malgré son caractère manifestement politique, dont il a d’ailleurs parfaitement conscience :
“ Considérant que la visite proposée doit avoir le double but d’une adhésion politique au gouvernement provisoire et la remise d’une somme destinée à secourir les ouvriers sans travail ”1841.
40Il s’agit d’un acte d’adhésion et le Conseil s’y prête en pleine connaissance de cause. Faut-il y voir le signe de son attachement à la République, qu’il exprime ici d’une manière aussi claire que lui permettent des décennies d’apolitisme revendiqué et d’indépendance farouchement défendue ?
41Dans les motifs de la délibération, il n’invoque pas son républicanisme, mais la nature des circonstances, tout en insistant lourdement sur le caractère exceptionnel de son acceptation :
“ Considérant que cette visite, bien que contraire, en principe, aux usages du barreau, emprunte cependant, en présence de graves circonstances dans lesquelles nous sommes placés, un correctif tout particulier, tout exceptionnel qui ne saurait être pour l’avenir ni un précédent ni une règle (...) Considérant que la crise qui suit inévitablement une révolution est de nature à occasionner une interruption plus ou moins longue dans les travaux ; que chacun doit selon ses ressources venir en aide aux ouvriers malheureux... ”1842.
42La délibération du Conseil insiste sur un mouvement national de solidarité, auquel “ le barreau ne saurait rester étranger ” car il est dicté par la seule nécessité, et se place au-delà du jeu politique. L’Ordre des avocats de Marseille soulève, un temps, la pesante tenture de ses traditions et sacrifie l’amour de son indépendance au nom d’un acte de civisme désintéressé. Cette révolution dans la Révolution est cependant en totale adéquation avec la figure de l’avocat “ homme de bien ” chère à tous les barreaux depuis l’origine de la profession. Pour étayer le bien-fondé de son attitude marginale, le Conseil de l’Ordre se réfugie derrière l’exemple du barreau parisien, vieux réflexe hérité de l’histoire, dont les barreaux ont toujours eu du mal à se départir, même au plus fort de l’affirmation de leurs spécificités locales. Ainsi, la délibération rappelle-t-elle que :
“ le barreau de Paris, si jaloux de son indépendance, a lui-même donné l’exemple d’une pareille démarche ”1843.
43Est alors votée, à l’unanimité, une somme de mille francs destinée aux ouvriers, dont le montant est explicité par les ressources limitées du barreau, puis le Conseil arrête :
“ qu’une visite sera faite au citoyen Emile Ollivier, commissaire du gouvernement, afin de faire, au nom de barreau, adhésion au gouvernement actuel et de verser entre ses mains le montant de la somme ci-dessus votée ”1844.
44Le plus remarquable, dans cette formulation, est sans doute l’intégrité, tant décisionnelle que fonctionnelle, du barreau marseillais : non seulement la somme et l’adhésion afférente est votée à l’unanimité, mais cette adhésion politique, tout autant radicale, marginale, paradoxale et risquée qu’elle soit, n’est absolument pas masquée dans la délibération. Elle éclate dans tous les mots : “ adhésion ”, “ gouvernement ”, “ commissaire ”, sans que l’Ordre cherche à aucun moment à la minimiser ou même à la détourner. Elle est alors parfaitement assumée. Cette dernière constatation semble constituer une double indication importante : d’une part, celle de la force du collectif et de l’éthique qu’il impose à tous les membres du barreau, et d’autre part, celle de la réalité du progressisme des avocats de Marseille, bien plus républicains qu’ils ne veulent l’admettre. Il est possible d’y voir une preuve dans le fait que la toute première fois où l’indépendance du barreau marseillais sur le plan politique est questionnée par une invitation à se rendre à une cérémonie officielle du gouvernement, celle-ci intervient suite au coup d’Etat du 2 décembre et l’Ordre la décline d’une façon tout aussi univoque qu’il avait accepté celle d’Emile Ollivier. Dans une lettre adressée par le Bâtonnier Onfroy au Préfet, en réponse à l’invitation que ce dernier a transmise à l’Ordre d’assister à une réception officielle en présence du Prince Louis-Napoléon1845, il est écrit :
“Le Conseil n’a trouvé aucun antécédent qui lui assignât une position et un rang parmi les corps constitués. La seule mission qu’il remplisse, en dehors des devoirs de défense, est toute intérieure et disciplinaire, sans aucune délégation de pouvoirs publics (...) Permettez-moi de vous exprimer les profonds regrets [des avocats de Marseille] de ne pouvoir présenter au Prince Président les témoignages de leur respect...”1846
45Il serait possible d’avancer l’idée d’une certaine modulation du principe d’indépendance, encore qu’une telle attitude soit tout à fait incompatible avec les traditions du collectif : en partant de ce postulat, la République se présenterait comme un engagement “ acceptable ” pour les avocats, alors que l’Empire, de par sa nature autoritariste, incarnerait un choix résolument incompatible avec le principe sacré d’indépendance du barreau.
46Toutefois, le fait qu’il soit expressément affirmé par le Bâtonnier qu’il n’existe “aucun antécédent”1847 en contradiction flagrante avec celui de 1848, confirme bien le caractère exceptionnel que revêt l’adhésion à la Seconde République pour les membres du Conseil de l’Ordre, chargés avant tout de perpétuer les traditions tout en protégeant l’exercice de la profession. De ce point de vue, 1848 ne constitue, comme cela a été rappelé dans la délibération du 4 mars 1848, “ ni un précédent ni une règle ”1848.
47Quoiqu’il en soit, même sous la Troisième République, après son enracinement institutionnel, le principe d’apolitisme et le refus de paraître au rang des corps constitués se maintiendront, plus stricts que jamais1849. En définitive, le fait qu’il s’agisse d’un régime monarchique, impérial ou républicain, n’affecte pas la position de l’Ordre de Marseille. Excepté l’épisode de 1848, tout aussi flamboyant qu’éphémère, le Conseil reste d’une constance remarquable dans son refus de paraître au rang des corps constitués dans les cérémonies officielles1850. Toutefois, contrairement à l’apolitisme obstiné du collectif, l’engagement personnel des avocats tend à se pérenniser après 1848.
§ 2 : L’engagement personnel des avocats marseillais à partir de 1848
48En plein cœur de la Révolution de février 1848, plusieurs membres du Barreau marseillais s’engagent individuellement dans les mutations politiques et institutionnelles du temps.
49Peu après l’arrivée à Marseille, le 29 février, du Commissaire du gouvernement de la République, le jeune Emile Ollivier1851, certains avocats marseillais acceptent de faire partie de la commission municipale nommée pour remplacer le conseil municipal élu au suffrage censitaire sous le gouvernement de Louis-Philippe1852. Précisément, sur les quinze membres de cette commission rassemblant “ des ouvriers républicains, des bourgeois modérés, légitimistes et orléanistes, les uns et les autres capables et honnêtes ”1853 ; on trouve quatre avocats, à savoir Mes J.-B. Nègre1854, Antoine Lecourt1855, Jules Onfroy et Jules Roux.
50Jules Roux, plus particulièrement, joue un rôle important. Au moment où la République est proclamée, le 24 février 1848, il est non seulement membre du Conseil de l’Ordre1856, mais aussi président de l’Athénée, cercle composé de libéraux qui exerce à Marseille une influence notable. Ce double statut professionnel et social, plus encore que ses qualités d’orateur et de juriste, paraît le prédestiner à devenir “ le tribun qui commanderait aux masses ”1857. Cependant, il ne fut pas celui-là. Il semble qu’il ait, à un moment donné des événements de 1848, choisi entre la carrière politique et l’aboutissement professionnel, puisqu’il devient le nouveau Bâtonnier de l’Ordre des avocats de Marseille, le 26 août 18481858.
51Les avocats phocéens manquent le rendez-vous historique des premières élections législatives au suffrage universel, en date du 23 avril 18481859. Lors du résultat, proclamé le 28 avril1860, il apparaît que trois avocats sont élus députés à la Constituante : deux légitimistes, Pierre Antoine Berryer1861 et Joseph de La Boulie, et un républicain, Louis Pascal d’Aix1862. Aucun de ces trois juristes n’appartient au Barreau de Marseille1863.
52Dans la période qui s’étend de la Révolution de 1848 jusqu’à la défaite de Sedan en 1870, il est possible de relever plusieurs exemples de membres du Barreau marseillais qui, parallèlement à leur vie professionnelle, s’engagent dans la politique. Peu nombreux toutefois, sont ceux dont l’expérience a été pérenne et déterminante, fruit d’une vocation ou moteur d’une révolution. Trois avocats du Barreau de Marseille se trouvent avoir eu des parcours politiques, parfois discontinus mais toujours approfondis, qui embrassent différents régimes et se déclinent tant à l’échelle locale que nationale. Il s’agit de Mes Alexandre Clapier, Jules Onfroy et Emile Lepeytre. Tous trois ont également en commun, d’avoir été bâtonniers, ajoutant un accomplissement professionnel à une carrière politique remarquée.
53Au moment où survient le coup d’Etat de Louis-Napoléon, Alexandre Clapier est président du Conseil Général des Bouches-du-Rhône1864. Refusant de faire acte de soumission à un nouveau gouvernement impérial, il donne sa démission, se place dans l’opposition constitutionnelle1865 et revient au Barreau1866.
54Après une éclipse politique de quelques vingt années, Alexandre Clapier revient une dernière fois à la vie publique en 1871 et, élu député des Bouches-du-Rhône, siège à l’Assemblée nationale. Il y vote notamment pour l’amendement Wallon qui constitue la République à une seule voix de majorité1867. Ainsi, la contribution politique de Me Clapier au moment de cette charnière délicate de l’Histoire constitutionnelle apparaît déterminante1868. Quoi qu’il en soit, dès les élections suivantes, il se retire et réintègre le Barreau de Marseille, cette fois-ci définitivement1869.
55Un autre exemple intéressant de l’implication réelle des avocats marseillais dans la valse des régimes, et particulièrement pendant les périodes de crise, reste probablement le parcours politique de Me Jules Onfroy1870 entre les années 1848 et 1860.
56Inscrit sur le Tableau de l’Ordre des avocats de Marseille dès 1833, Me Onfroy plaide de grandes affaires commerciales, industrielles ou maritimes1871 . Mais, son tempérament et “ses idées libérales ”1872 le portent rapidement vers la politique.
57Sa carrière de tribun commence, presque involontairement, dans le courant du mois d’avril 1849, lorsque le journal républicain “La voix du peuple ” l’accuse, dans un article du 21, d’avoir été “ l’instigateur auprès de M. le Procureur de la République, des poursuites dirigées contre le journal ”1873. Face à cette accusation, fruit d’une “ injuste acrimonie ”1874 , le Conseil de l’Ordre prend fait et cause pour Me Onfroy, en l’autorisant ” à poursuivre correctionnellement le journal à raison de l’article dirigé contre lui ”1875.
58La semaine suivante, après un accord amiable passé avec le Barreau1876, la rédaction de “ La voix du Peuple ” consent à se rétracter, et publie un rectificatif dans le numéro du 26 avril. Mais, c’est véritablement en 1852 que Jules Onfroy entre de plain-pied dans la vie politique. Il est ensuite élu conseiller de ville aux élections municipales des 11 et 12 août 18551877 et remplit cette fonction jusqu’au 23 décembre 1860, date à laquelle se met en place une commission municipale extraordinaire1878. Si le maire du conseil précédent, M. Lagarde1879, demeure en fonction, il est désormais placé sous l’autorité directe de l’administrateur du département, M. de Maupas1880. Face à une telle recomposition de la municipalité marseillaise, Onfroy donne sa démission le 29 janvier 1861.
59Il refuse de se plier aux injonctions de M. de Maupas, sénateur et administrateur des Bouches-du-Rhône1881. Mais, dès le lendemain 30 janvier, un décret impérial le nomme directement maire de Marseille1882, à la grande satisfaction de la population qui “ accueille cette nomination avec ferveur ”1883. L’avocat-maire commence par montrer que ses responsabilités politiques ne lui font pas oublier ses origines :
“ Je ne veux pas cesser de faire partie de l’Ordre ; à partir de ce moment, je n’ai plus qu’une cliente, la ville de Marseille, je ne faillirai pas à mes devoirs ”1884, déclare-t-il lors de sa prestation de serment1885
60Sous l’impulsion de ce nouveau maire, le conseil municipal apporte un développement important à la Cité de Marseille, par une série de grands travaux1886. Mais, les fonctions municipales de Jules Onfroy prennent fin prématurément le 20 février 1862, alors qu’il vient juste de recevoir la croix de la Légion d’honneur, “ consécration de sa vie publique et administrative ”1887. Lassé de la vie publique, désirant réintégrer le Barreau, il donne sa démission, et est remplacé par M. Rouvière, son premier adjoint1888 .
61L’avocat rejoint le Barreau. Il retrouve avec une certaine satisfaction1889 son cabinet, ses clients, et, lors des élections du 9 août 1862, sa place au Conseil de discipline sous le bâtonnat de Berthou1890. Il en restera membre jusqu’en 1865, plaidant encore, en parallèle, plusieurs grands procès commerciaux1891.
62Lorsqu’éclate la Révolution de février 1848, l’avocat Lepeytre dont le parcours a déjà été évoqué pour les années 1830 - 1848, est révoqué par Adolphe Crémieux1892 , alors Ministre de la Justice1893 , et l’avocat demande sa réintégration au Barreau de Marseille, “ au rang qu’il occupait avant son entrée dans la magistrature ”1894. Sa candidature est examinée par le Conseil de discipline, qui requiert l’aide d’une commission composée du Bâtonnier de Chanterac et de Mes Onfroy et Meynier1895. Lepeytre obtient sa réinscription sur le Tableau, dès le 19 avril 1848, la question de son rang demeurant toutefois en suspens, car le Conseil n’est pas prêt à lui conserver le rang qui était le sien lors de sa première inscription1896. En 1851, il est choisi par le maire pour devenir l’avocat attitré de la Ville1897.
63Il existe encore d’autres exemples, moins illustres mais intéressants, d’implication personnelle des avocats de Marseille dans la vie politique locale, au hasard des changements de régimes.
64Ainsi, sous le Second Empire, parmi les avocats qui participent à la vie politique et qui sont très majoritairement dans l’opposition, on compte Me Henri Amat1898, membre du barreau marseillais, qui incarne bien la participation des avocats de Marseille à cette “ valse des régimes ”, puisqu’il est à la fois un ancien proscrit de 1851 et un futur député à l’assemblée nationale de 18711899. Entre ces deux dates, il est effectivement, en 1865, “ l’organisateur de la lutte contre l’Empire sur le terrain municipal ”1900. Lors du plébiscite du 8 mai 18701901, la ville de Marseille et les Bouches-du-Rhône renvoient un désaveu de l’Empire sous la forme d’une forte majorité de votes négatifs1902. Et, quelques jours avant la défaite de Sedan, les comités réunis de la démocratie marseillaise “ comprenaient les éléments les plus notoirement républicains ”1903, dont Henri Amat, membre du Barreau de Marseille1904.
65Il faut également évoquer les avocats marseillais qui ont pris part à la vie municipale sous le second régime impérial, tantôt au poste de maire, tantôt à celui d’adjoint ou simplement en tant que conseillers municipaux1905. Ainsi, l’avocat De Chantérac fut le maire de Marseille de 1850 à 1854 et l’avocat Rouvière qui fut maire en 1863 et 1864 ; ainsi les avocats Nègre et Maurandi qui furent adjoints respectivement en 1850 et de 1856 à 1860, notant que Maurandi sera à nouvau adjoint de 1866 à 1870 ; comptent enfin parmi les avocats conseillers municipaux les plus importants, Me Sauvaire-Jourdan, conseiller de 1850 à 1852, Me Massol d’André, conseiller en 1853, en 1854, et enfin de 1861 à 1865, et Me Fraissinet, conseiller de 1856 à 1860.
66La présence des avocats dans la vie publique locale, traditionnelle depuis le siècle précédent, semble donc se maintenir. En revanche, à l’exception d’une très courte période à la fin de l’Empire, entre les années 1866 et 1870, où pas moins de sept avocats de Marseille participent simultanément à la vie publique locale1906, il n’est pas possible de constater une réelle augmentation de la présence des membres du barreau phocéen. Il y a plus stagnation que croissance. Les avocats se contentent de rester ce qu’ils étaient déjà : des notabilités éclairées qui accèdent facilement à la municipalité.
67L’ultime exemple de participation politique des avocats marseillais, sous des dehors anecdotiques, marque toute la force de l’engagement politique tant individuel que collectif que manifestent les avocats à l’encontre d’une décision politique qu’ils jugent inopportune ou contingente. Ce que l’on pourrait appeler “l’affaire des barbes et des moustaches ” intervient en 1859, sous l’impulsion et sous le bâtonnat de Me Ferdinand Meynier1907.
68Dans les faits, il s’agit d’une circulaire que le Ministre de la Justice envoie en 1859 à tous les procureurs généraux de France pour leur ordonner de veiller à ce que les avocats plaidants ne paraissent plus à l’audience avec la moustache ou la barbe1908. Le Bâtonnier Meynier prend la décision, avec l’accord du Conseil de l’Ordre, d’accepter cette mesure triviale. Mais, cette acceptation est faite en des termes plutôt empreints d’ironie, comme en témoigne la lettre qu’il adresse personnellement au procureur impérial :
“ si le port des moustaches et le plus ou moins de longueur de la barbe sont choses sur lesquelles ne puisse s’exercer le pouvoir disciplinaire des tribunaux, les avocats voulant faire acte de déférence envers les magistrats, s’empresseront de déférer à ce désir, ne voulant pas troubler la bonne harmonie qui, depuis de longues années, n’a cessé de régner entre la magistrature et le barreau ”1909.
69A l’issue de l’analyse de la période 1848 - 1870, il est apparu clairement que la participation des avocats à la vie municipale, véritable cheval de bataille du barreau phocéen depuis l’Ancien Régime, ne s’étiole pas au xixème siècle, mais ne manifeste aucun développement. Et, en ce qui concerne l’échelle nationale, les avocats marseillais semblent ne pas être aussi combatifs que leurs confrères parisiens. Au-delà de quelques destins d’avocats-tribuns, rien n’est véritablement représentatif, dans ces années, d’un âge d’or en préparation. Dans ces conditions, il faut mettre l’expression entre guillemets et la confronter à la situation des avocats phocéens en période de crise politique. La Commune de 1871, point paroxystique de la gestation de la République, montre toute l’ambiguïté de la place politique des avocats de Marseille.
Notes de bas de page
1790 A. DAMIEN, Essai sur la vie quotidienne des avocats du temps passé, op. cit. , p. 244. Sur l’épuration de la magistrature au début de la Monarchie de Juillet, voir Jean-Pierre ROYER, Histoire de la Justice en France, op. cit., p. 481.
1791 Ibid. L’a. insiste sur le caractère quasi immédiat de la promulgation de cette ordonnance favorable au barreau, ” si voisine des derniers coups de canons de la révolution de juillet... ".
1792 DUVERGIER, op. cit., tome 24, pp. 169-176.
1793 Lucien KARPIK, Les avocats entre l’Etat, le Public et le Marché, op. cit., p. 175.
1794 Ibid. : A côté de l’opposition dynastique que mène Odilon Barrot, les républicains se divisent entre, d’une part, les libéraux, avec les Marie, Crémieux, Arago groupés autour du National et tous les autres, Mauguin, Garnier-Pagès, Bethmont, Baroche, Liouville, auxquelles viennent s’ajouter Jules Favre, Jules Grévy, et d’autre part, les démocrates qu ‘anime, avec Ledru-Rollin ou Michel de Bourges, une volonté de transformation sociale ”.
1795 Ibid., p. 176.
1796 A.O.A. MARSEILLE, D.C.D., vol. 3 (fo non numérotés) : Séance du 9 décembre 1833.
1797 Ibid.
1798 Ibid.
1799 Le texte de l’ordonnance, pris en son article 5, prévoit en effet que : “ Il sera procédé dans le plus court délai possible à la révision définitive des loix et règlements concernant l’exercice de la profession d’avocat ”, voir A.O.A. MARSEILLE, D.C.D., vol. 3 (fo non numérotés).
1800 A.O.A. MARSEILLE, D.C.D., vol. 3 (fo non numérotés) : Séance du 9 décembre 1833.
1801 Ibid.
1802 Ibid.
1803 Jean-Louis HAROUEL, Histoire des institutions de l’époque franque à la Révolution, op. cit., pp. 413, 531.
1804 A.O.A MARSEILLE, D.C.D., vol. 3, (fo non numérotés) : Séance du 26 mai 1834.
1805 Ibid.
1806 Ibid. Le procès-verbal ajoute que, suite à cet éloge, des cris de “ vive la république ” auraient retenti parmi l’assistance.
1807 Ibid. : Me André affirme sur son honneur au Conseil que les paroles qu’on lui prête dans l’acte d’accusation n’ont point été prononcées lors des funérailles de Meistre, qu’il a dit seulement sur sa tombe que “ Meistre était un bon fils, un bon frère, un bon ami, c’était un bon et franc républicain, un excellent citoyen qui s’il en eût l’occasion se serait montré dans la grande semaine ”. Il est possible qu’il ait dit ce dont il n’est pas bien mémoratif, “la république aurait pu compter sur lui ”, mais il affirme au conseil que ni lui personnellement, ni aucun des assistans n’ont fait entendre les cris de “ vive la république ”, et que les phrases improvisées ont été complètement dénaturées ”.
1808 Ibid.
1809 Ibid. Le conseil feint de considérer qu’il ne lui “ appartient pas de juger un débat soumis à la Cour d’assises ”
1810 Ibid.
1811 A.D. BDR. (dépôt d’Aix-en-Provence), 163 U 8 (1833 - 1834) : Ordonnance d’acquit du 5 juin 1834 : “Nous Jean Joseph Auguste Paul Raymond Castellan, conseiller en la Cour royale d’Aix, président de la Cour d’assises du département des Bouches-du-Rhône pendant le deuxième trimestre de la présente année, Vu la déclaration du juri portant que le nommé Louis André, n’est pas coupable d’avoir le 20 février 1834, par un discours proféré dans un lieu public à Marseille, sur la tombe de l’artilleur Mestre, en présence des artilleurs de la garde nationale et de plusieurs autres spectateurs (...) dans lequel discours se trouvaient les phrases suivantes ou leur équivalent, “ Nous avons perdu un brave, un vrai républicain, il nous eût puissamment aidés dans la grande semaine, la République pouvait compter sur lui ” : 1) provoqué à commettre un attentat, dont le but aurait été soit de détruire, soit de changer le gouvernement, sans que cette provocation ait été suivie d’effet ; 2) provoqué quelques uns des spectateurs à faire entendre les cris séditieux de Vive la République I, qui ont été alors publiquement proférés ; 3) commis une attaque contre les droits que le Roi tient de la Nation française, exprimés dans la déclaration du 7 août 1830 et de la Charte constitutionnelle. En vertu des pouvoirs qui nous sont conférés par l’article 358 du Code d’instruction criminelle, déclarons que le dit Louis André est acquitté de l’accusation portée contre lui. Ordonnons qu’il soit sur-le-champ mis en liberté, s’il n ‘est retenu pour autre cause. Fait et prononcé à Aix, au Palais de Justice, en audience publique, le 5 juin 1834 ”.
1812 A.O.A. MARSEILLE, vol. 3 (fo non numérotés) : Tableau des l’ordre des avocats de Marseille pour l’année judiciaire 1834-1835.
1813 Encyclopédie départementale des Bouches-du-Rhône, op. cit., Tome V, p. 150.
1814 Louis AMBARD, Les anciens bâtonniers du barreau de Marseille..., Troisième série, op. cit., pp. 17-24 : l’a. note que Me Alexandre Clapier est né à Marseille le 28 août 1798, dans une famille de la bourgeoisie locale. Voir également, à titre complémentaire, l’ Encyclopédie départementale des Bouches-du-Rhône, op. cit., tome XI, p. 127 : Alexandre Clapier (1798 - 1891).
1815 Ibid., p. 18. Louis Ambard relève que “ l’avoué était le conseil et le confident des familles de la grande bourgeoisie marseillaise, c’est lui que l’on consultait en premier et lui qui désignait le plus souvent l’avocat chargé de plaider (...) Me Clapier avait donc entrevu tous les avantages de cette postulation d’avoué... ”.
1816 A Paris, 1823-24.
1817 A Paris, 1824.
1818 Louis AMBARD, Les anciens bâtonniers du barreau de Marseille..., Troisième série, op. cit., p. 20.
1819 A.M. MARSEILLE, 1 D 57, fo 4, Séance du Conseil municipal en date du 6 février 1832 ; fo 42, Séance du Conseil municipal en date du 2 mars 1832.
1820 A.M. MARSEILLE, 1 D 57, fo 154, Séance du conseil municipal en date du 8 mai 1832 ; fo 167, Séance du conseil municipal en date du 25 mai 1832.
1821 Ibid.
1822 Ibid.
1823 Encyclopédie départementale des Bouches-du-Rhône, op. cit., tome XI, p. 128.
1824 Louis AMBARD, Les anciens bâtonniers du barreau de Marseille..., Troisième série, op. cit., p. 20.
1825 Encyclopédie départementale des Bouches-du-Rhône, Tome V, p. 152. Il convient de noter qu’il revient au Barreau à la fin de l’année 1836, comme l’atteste sa présence sur le Tableau de l’Ordre pour l’année judiciaire 1837 - 1838, voir A.O.A. MARSEILLE, D.C.D. vol. 4, (fo non numérotés) : Tableau de l’Ordre pour l’année judiciaire 1837 - 1838 : Alexandre Clapier y paraît au rang n° 62. Ayant doublé sa renommée de juriste d’une solide formation politique, il poursuivra sa carrière politique sous la République et l’Empire. Voir infra, section suivante.
1826 Louis AMBARD, Les anciens bâtonniers du barreau de Marseille..., Troisième série, op. cit., pp. 3-15 : l’a. note que Me Emile Antoine Lepeytre (1797 - 1882) est né à Villefranche, département des Pyrénées orientales, le 2 juillet 1797. Voir à titre complémentaire, l’Encyclopédie départementale des Bouches-du-Rhône, op. cit., tome XI, p. 300.
1827 Louis AMBARD, Les anciens bâtonniers du barreau de Marseille..., Troisième série, op. cit., pp. 3-15
1828 Ibid., p. 7.
1829 Encyclopédie départementale des Bouches-du-Rhône, op. cit., tome XI, p. 300.
1830 Louis AMBARD, Les anciens bâtonniers du barreau de Marseille..., Troisième série, op. cit., p. 7.
1831 Ibid., p. 12.
1832 Encyclopédie départementale des Bouches-du-Rhône, op. cit., tome XI, p. 168 : L.-J. Drogoul (1806 - 1893).
1833 Jean PIANELLO, Le suffrage universel, le vote obligatoire et la représentation proportionnelle, Discours prononcé à la séance solennelle de rentrée de la Conférence des avocats de Marseille, le 23 décembre 1898, Marseille, Imprimerie Barlatier, 1899, p. 3.
1834 Lucien KARPIK, Les avocats entre l’Etat, le Public et le Marché, op. cit., p. 176.
1835 A.O.A. MARSEILLE, D.C.D., vol. 6 (fo non numérotés) : Délibération en date du 13 avril 1858 : “M. le Bâtonnier expose au conseil qu’il a convoqué d’urgence pour lui faire part d’une lettre par laquelle M. le Préfet l’invite, ainsi que le Conseil, à assister à la réunion des autorités civiles par le Maréchal Castellane commandant les divisions du Sud-Est... ”.
1836 Ibid.
1837 A.O.A. MARSEILLE, C.B., vol. 3 (fo non numérotés) : Lettre du Bâtonnier du 13 avril 1858 à Monsieur le Préfet des Bouches-du-Rhône.
1838 Voir A.O.A. MARSEILLE, C.B., vol. 3 (fo non numérotés) : Lettre du 8 septembre 1873 (extrait) : “ L’Ordre des avocats n’est pas un corps constitué (...) il se compose de personnes privées... ” ; D.C.D., vol. 6 (fo non numérotés) : Délibération du 7 décembre 1860 (extrait) : “ se conformant aux traditions de l’Ordre et à sa pratique constamment suivie dans les autres tribunaux, il ne paraîtra pas à une cérémonie où ne l’appelle aucun caractère officiel... ” ; D.C.D., vol. 9 (fo non numérotés) : Délibération du 16 avril 1890 (extrait) : “ l’Ordre des avocats n’étant pas un corps constitué, n’a à paraître dans aucune cérémonie ayant un caractère officiel et qu en conséquence il n’y a pas lieu d’accepter l’invitation de M. le Préfet à l’occasion du passage du Président de la République à Marseille ”.
1839 Encyclopédie départementale des Bouches-du-Rhône, op. cit., tome XI, pp. 374-375.
1840 A.O.A.MARSEILLE, D.C.D., vol. 4 (fo non numérotés) : Délibération du 4 mars 1848.
1841 Ibid.
1842 Ibid.
1843 Ibid.
1844 Ibid. Les origines marseillaises d’Emile Ollivier ont peut-être été déterminantes, tout autant que le contexte de crise sociale ou les données politiques, dans la décision du barreau de rompre momentanément avec son principe de neutralité.
1845 A.O.A. MARSEILLE, C.B., vol. 2 (fo non numérotés) : Lettre du Bâtonnier Onfroy en date du 24 septembre 1852 à Monsieur le Préfet des Bouches-du-Rhône (extrait) : “La lettre en date du 16 de ce mois par laquelle vous voulez bien m’informer que S.A.S. le Prince Président recevra demain, les corps constitués de la nation [et par laquelle vous me conviez] à me rendre à cette réception à la tête du conseil de l’Ordre... ”".
1846 Ibid.
1847 Ibid.
1848 A.O.A.MARSEILLE, D.C.D., vol. 4 (fo non numérotés) : Délibération du 4 mars 1848.
1849 A.O.A. MARSEILLE, D.C.D., vol. 9 (fo non numérotés) : Délibération du 16 avril 1890 (extrait) : “l’Ordre des avocats n’étant pas un corps constitué, n’a à paraître dans aucune cérémonie ayant un caractère officiel et qu’en conséquence il n’y a pas lieu d’accepter l’invitation de M. le Préfet à l’occasion du passage du Président de la République à Marseille ”
1850 Voir encore à ce sujet : A.O.A. MARSEILLE, D.C.D., vol. 6 (fo non numérotés) : Délibération du 7 décembre 1860 (extrait) : “ se conformant aux traditions de l’Ordre et à sa pratique constamment suivie dans les autres tribunaux, il ne paraîtra pas à une cérémonie où ne l’appelle aucun caractère officiel... ” ; C.B., vol. 3 (fo non numérotés) : Lettre du 8 septembre 1873 (extrait) : “ L’Ordre des avocats n’est pas un corps constitué (...) il se compose de personnes privées...”.
1851 Pierre GUIRAL & Félix REYNAUD, Les marseillais dans l’histoire, op. cit., pp. 185-186. Les a. notent qu’Emile Ollivier est né à Marseille le 2 juillet 1825. Son père, Démosthène Ollivier est un républicain et un démocrate convaincu qui, au lendemain de la Révolution de 1830, prête son assistance au révolutionnaire italien Joseph Mazzini réfugié à Marseille. Emile Ollivier, après des études traditionnelles devient avocat, mais commence immédiatement sa carrière politique en étant nommé Commissaire du gouvernement dans les Bouches-du-Rhône et dans le Var.
1852 A.M. MARSEILLE, 1 D 77, fo 391, Révocation d’Elysée André Reynard maire et des adjoints ; nomination d’Emmanuel Barthélémy, maire provisoire, et des membres de la commission municipale.
1853 Encyclopédie départementale des Bouches-du-Rhône..., Tome V, p. 161.
1854 Ibid. : Nomination des membres de la commission municipale.
1855 Louis AMBARD, Les anciens bâtonniers du barreau de Marseille : Me Lecourt, Me Drogoul, Me Roux, Me Berthou, Deuxième série, op. cit., pp. 5-15 : l’a. indique que Me Antoine Louis Hippolyte Lecourt est né à Paris le 27 mars 1797. Après des études au lycée de Marseille, puis à la Faculté de Droit d’Aix-en-Provence, il prête serment devant la Cour royale d’Aix le 8 juillet 1818 et devient stagiaire au Barreau de Marseille sous le bâtonnat de Me Gras-Salicis, le 3 août 1818. Il intègre définitivement le Barreau par son inscription sur le Tableau en 1821 et va notamment se préoccuper des consultations gratuites et de l’assistance aux indigents, en des années riches en mutations de l’exercice professionnel, entre réglementation impériale et nouvelles dispositions posées par l’ordonnance du 20 novembre 1822.
1856 A.O.A. MARSEILLE, D.C.D. vol. 5, (fo non numérotés) : Tableau de l’Ordre pour l’année judiciaire 1847 - 1848.
1857 Louis AMBARD, Les anciens bâtonniers du barreau de Marseille..., Deuxième série, op. cit., p. 29.
1858 A.O.A. MARSEILLE, D.C.D. vol. 5, (fo non numérotés) : Elections générales en date du 26 août 1848 et Tableau de l’Ordre pour l’année judiciaire 1848 - 1849.
1859 Encyclopédie départementale des Bouches-du-Rhône..., op. cit., Tome V, p. 164.
1860 A.M. MARSEILLE, 1 D 77, Délibération du Conseil municipal en date du 28 avril 1848.
1861 Voir à son sujet : Michel PIERCHON, Pierre-Antoine Berryer (1790-1868) ou l’éloquence au service de la nation et des hommes, op. cit. ; E. LECANUET, Berryer, sa vie, ses œuvres, Paris, 1893 ; Pierre GUIRAL et Félix RAYNAUD, Les Marseillais dans l’histoire, op. cit., pp. 55-56. Il est délicat de faire une rapide synthèse sur le parcours extraordinaire de Pierre-Antoine Berryer. Avocat, tout comme son père, il participe à la défense du maréchal Ney et à celle du général Cambronne qu’il parvient à faire acquitter. Opposé à l’Empire et attaché à la Restauration, il est surtout le défenseur de la liberté, à commencer par celle de la presse. Après la Révolution de Juillet, il devient d’un des meneurs légitimistes. Il s’oppose au coup d’Etat de Louis-Napoléon Bonaparte et est élu, trois ans plus tard, bâtonnier de l’Ordre des Avocats de Paris, tout en gagnant son entrée à l’Académie. Le 19 novembre 1868, il écrit au comte de Chambord : “ je meurs avec la douleur de n’avoir pas vu le triomphe de vos droits héréditaires, consacrant l’établissement et le développement des libertés dont notre patrie a besoin ”. Bien qu’il ne soit pas marseillais de naissance et qu’il n’ait jamais été inscrit au barreau de la ville, il existe un lien entre Berryer et la cité phocéenne : par deux fois, il fut son député, en 1848 et en 1863. D’où la statue qui a été érigée en son honneur devant le Palais de Justice en 1875. Mais, il ne faut pas s’y tromper : aussi grand soit-il, Berryer n’est pas un avocat de Marseille.
1862 Encyclopédie départementale des Bouches-du-Rhône..., op. cit., Tome V, p. 165.
1863 Comme l’atteste la consultation du Tableau de l’Ordre des avocats de Marseille pour l’année en cours, voir A.O.A. MARSEILLE, D.C.D. vol. 5, (fo non numérotés) : Tableau de l’Ordre pour l’année judiciaire 1847 - 1848.
1864 Louis AMBARD, Les anciens bâtonniers du barreau de Marseille..., Troisième série, op. cit., p. 20.
1865 Encyclopédie départementale des Bouches-du-Rhône, op. cit., tome XI, p. 128.
1866 A.O.A. MARSEILLE, D.C.D. vol. 5, (fo non numérotés) : Tableau de l’Ordre pour l’année judiciaire 1851 - 1852 : Alexandre Clapier y paraît au rang n° 25.
1867 Louis AMBARD, Les anciens bâtonniers du barreau de Marseille..., Troisième série, op. cit., p. 20.
1868 Il pourrait être intéressant d’imaginer, dans une perspective uchronique, que c’est précisément la voix de cet avocat marseillais qui a permis l’enracinement définitif de la République en France. S’il n’avait pas voté pour cet amendement fondamental, la République ne se serait peut-être concrétisée que bien plus tard. Symboliquement, Clapier incarne le républicanisme de ses pairs en profession.
1869 Ibid., p. 21 et suiv. : l’a. note que Clapier est membre du Conseil de l’Ordre sans discontinuité de 1877 à 1889. Il est également, il faut le rappeler, le dernier Bâtonnier à avoir été choisi par le Conseil de l’Ordre, pour l’année judiciaire 1869 - 1870, car le décret impérial de janvier 1870 emporte l’élection du Bâtonnier au suffrage universel direct de tous les membres du barreau réunis en assemblée générale.
1870 Louis AMBARD, Deux anciens bâtonniers du barreau de Marseille : Me Jules Onfroy, Me Aimé Ailhaud, Imprimerie des ateliers professionnels Don Bosco, Première série, Marseille, 1908 : l’a. note que Me Onfroy est né le 18 janvier 1808 à Marseille. Après des études au lycée de Marseille, il fait des études à la Faculté de Droit d’Aix-en-Provence et obtient sa licence en droit en 1828. Le 2 novembre de la même année, il prête serment et est admis comme avocat stagiaire dans le barreau Marseillais. Il est inscrit au tableau de l’Ordre 1833-1834, et occupe le cabinet d’Emerigon lui-même, rue de la Reynarde, prenant d’une certaine manière la succession du célèbre avocat. Ses succès à la barre lui assurent une clientèle prise dans le haut commerce marseillais, les hommes d’affaires, les plus grands industriels, dont Alphonse Grandval. Il est passionné par les affaires commerciales maritimes. Il est élu membre du conseil de l’Ordre en 1846, 1847, 1848. C’est en 1849 que s’ouvre pour lui une phase d’intense activité politique.
1871 A.O.A. MARSEILLE, D.C.D. vol. 5, (fo non numérotés) : Tableau de l’Ordre pour l’année judiciaire 1833 - 1834.
1872 Louis AMBARD, Deux anciens bâtonniers du barreau de Marseille..., op. cit., p. 9.
1873 A.O.A. MARSEILLE, D.C.D. vol. 5, (fo non numérotés) : Séance du 21 avril 1849 : le Conseil de l’Ordre est saisi de cette affaire par une lettre que lui adresse Me Onfroy, dont le Bâtonnier Jules Roux donne lecture aux membres du Conseil.
1874 Louis AMBARD, Deux anciens bâtonniers du barreau de Marseille..., op. cit., p. 9.
1875 A.O.A. MARSEILLE, D.C.D. vol. 5, (fo non numérotés) : Séance du 21 avril 1849.
1876 A.O.A. MARSEILLE, D.C.D. vol. 5, (fo non numérotés) : Séance du 28 avril 1849. Le Conseil précise que “ il a la satisfaction de terminer à l’amiable l’affaire de Me Onfroy contre La Voix du Peuple ) à la suite d’un article que La Voix du Peuple a inséré dans son numéro du 26 avril dernier, et dont Me Onfroy a accepté la rédaction se déclarant complètement satisfait ”.
1877 A. M. MARSEILLE, 1 D 84, fo 512 : Elections municipales en date des 11 et 12 août 1855 et installation du conseil municipal, nomination de Jean-François Honnorat maire et des adjoints.
1878 Encyclopédie départementale des Bouches-du-Rhône..., op. cit., Tome V, p. 196.
1879 A. M. MARSEILLE, 1 D 89, fo 1 : installation du conseil municipal, nomination de Louis Lagarde, maire.
1880 Encyclopédie départementale des Bouches-du-Rhône..., op. cit., Tome V, p. 196.
1881 Louis AMBARD, Deux anciens bâtonniers du barreau de Marseille..., op. cit., p. 9.
1882 A. M. MARSEILLE, 1 D 89, fo 540 : nomination de Jules Joseph Onfroy, maire.
1883 Louis AMBARD, Deux anciens bâtonniers du barreau de Marseille..., op. cit., p. 9.
1884 Ibid., p.11.
1885 A.M. MARSEILLE, 1 D 89, fo 540 : Séance en date du 1er février 1861 portant installation de Jules Joseph Onfroy, maire.
1886 Voir Raoul BUSQUET, op. cit., pp. 352-353 et Louis AMBARD, Deux anciens bâtonniers du barreau de Marseille..., op. cit., p. 10 : l’a. cite les plus importants de ces travaux d’urbanisation : la rue impériale, prolongement et élargissement de la rue d’Aix, prolongement du cours Bonaparte, achèvement du chemin de la corniche, élargissement de la rue Saint-Ferréol-le-vieux, construction d’un nouvel hôtel de ville, prolongement du Cours Lieutaud jusqu’au boulevard du Musée, jardin botanique, boulevard Notre-Dame de la Garde, nouvelles halles, museum d’histoire naturelle, travaux préliminaire du palais Longchamp.
1887 Louis AMBARD, Deux anciens bâtonniers du barreau de Marseille..., op. cit., p. 14.
1888 A.M. MARSEILLE, 1 D 91, fo 101, Séance en date du 20 février 1862 portant installation de Balthazar Rouvière, maire.
1889 Louis AMBARD, Deux anciens bâtonniers du barreau de Marseille..., op. cit., p. 14.
1890 A.O.A. MARSEILLE, D.C.D. vol. 6, (fo non numérotés) : Elections générales en date du 9 août 1862. Il est intéressant de noter qu’il paraît dans le Tableau pour l’année judiciaire de l’année 1862 - 1863, au premier rang des membres du Conseil, juste après le Bâtonnier, son nom étant accompagné du signe distinctif de la Croix de la légion d’honneur, voir A.O.A. MARSEILLE, D.C.D. vol. VI, (fo non numérotés) : Tableau de l’Ordre pour l’année judiciaire 1862 - 1863.
1891 A.O.A. MARSEILLE, D.C.D. vol. 6, (fo non numérotés) : Tableau de l’Ordre pour l’année judiciaire 1864 - 1865.
1892 A ne pas confondre avec Gaston Crémieux, l’avocat d’Aix, animateur exalté de la Commune marseillaise en 1871, voir infra, chapitre suivant.
1893 Jean-Pierre ROYER, Histoire de la Justice en France, op. cit., p. 519 : l’a. note qu’Adolphe Crémieux, après avoir longuement hésité, “ s’est rallié in extrmis à la révolution de 1848, juste à temps pour pouvoir être nommé ministre de la justice ".
1894 Louis AMBARD, Les anciens bâtonniers du barreau de Marseille..., Troisième série, op. cit., p. 8.
1895 A.O.A. MARSEILLE, D.C.D. vol. 5, (fo non numérotés) : Séance du 17 avril 1848.
1896 A.O.A. MARSEILLE, D.C.D. vol. 5, (fo non numérotés) : Séance du 19 avril 1848 : “ Emile Lepeytre se prévalant d’une inscription antérieure au Tableau de Marseille, demande aujourd’hui à être porté sur le Tableau au rang de sa première inscription (...) considérant que la question de rang demande un examen attentif (...) qu’elle n’est pas d’une urgence telle qu’il faille lui donner une solution immédiate (...) ce qu’il importe pour le moment est de prononcer l’admission au Tableau de Me Lepeytre [car] sa demande est juste et fondée... ”.
1897 Louis AMBARD, Les anciens bâtonniers du barreau de Marseille..., Troisième série, op. cit., pp. 9-15 : l’a précise que Me Lepeytre est resté seul chargé de défendre la municipalité de Marseille dans tous les procès qu’elle a jusqu’en 1870. Il plaide pour la gigantesque expropriation qui permet de créer la rue impériale, avec l’aide de son ami M. Gassend, directeur en chef de la voirie de Marseille. Il le défend même devant le tribunal correctionnel de Marseille, à la suite des travaux visant à faire construire le grand pont de la rue d’Aubagne et une passerelle destinée à traverser le cours Lieutaud. Les travaux étaient exécutés par des entrepreneurs adjudicataires, sous la haute direction de Gassend. La passerelle avait été achevée le 25 et décintrée le 27 juin 1867. Le 5 juillet 1867, sans aucun signe avant coureur, cette passerelle s’écroule sur des ouvriers qui s’étaient réfugiés du soleil sous son arche ombragée. Cinq meurent des suites de l’accident. Le Parquet ouvre immédiatement une instruction contre M. Gassend et contre les entrepreneurs ayant opéré sous ses ordres. Le procès dure longtemps et prend l’allure d’un tournoi d’éloquence qui passionne le public. L’accusation du ministère public par l’intermédiaire du procureur Crépon est à ce point dure et impitoyable que Me Lepeytre chargé de défendre M. Gassend en proie une vive émotion, ne peut se retenir d’exprimer sa colère et son dégoût au début de sa plaidoirie : “ Oui, Messieurs, le langage du ministère public, on l’eût appelé dans la bouche d’un particulier, excitation à la haine et au mépris d’un citoyen ; il s’est fait, Messieurs, parait-il, dans les traditions du ministère public des changements plus graves que ceux qui se sont produits dans les systèmes de construction et que l’on est venu nous reprocher... ”. Me Lepeytre est appuyé par Me Aicard, mais rien n’y fait : Gassend et tous les autres sont condamnés par décision du tribunal du 27 juillet 1867, à l’amende et à la prison. En appel, la Cour impériale d’Aix, par son arrêt du 17 août 1867 confirme le jugement, mais atténue les peines de Gassend et Allard. En 1871, Me Lepeytre fut remplacé par le maire de Marseille comme avocat de la Ville.
1898 Me Henri AMAT est inscrit pour la première fois sur le Tableau de l’Ordre des avocats de Marseille, en 1839 : A.O.A. MARSEILLE, D.C.D. vol. 4, (fo non numérotés) : Tableau de l’Ordre pour l’année judiciaire 1839 - 1840. Il y est toujours dans l’année judiciaire 1850 - 1851 : A.O.A. MARSEILLE, D.C.D. vol. 5, (fo non numérotés) : Tableau de l’Ordre pour l’année judiciaire 1850 - 1851 : Amat y paraît au rang n° 33.
1899 Encyclopédie départementale des Bouches-du-Rhône..., op. cit., Tome V, p. 203.
1900 Ibid.
1901 Encyclopédie départementale des Bouches-du-Rhône..., op. cit., Tome V, p. 208. La formule du plébiscite est : “ Le peuple approuve les réformes libérales opérées dans la constitution depuis 1860 par l’Empereur avec le concours des grands corps de l’Etat et ratifie le sénatus-consulte du 20 avril 1870 ”.
1902 Ibid., p. 209 : l’encyclopédie précise que les Bouches-du-Rhône arrivent immédiatement après le département de la Seine, le résultat du scrutin donnant : inscrits 140.189 ; votants 93.857 ; affirmatifs : 39.534 ; négatifs : 52.982 ; nuls : 1.341.
1903 Ibid.
1904 Voir infra, p. 515.
1905 Nouvel Indicateur Marseillais (guide du commerce) publié par Pierre Blanc, Marseille, Imprim. Barlatier-Feissat & Demonchy, années 1850 à 1870.
1906 Ibid. : il s’agit de Mes Maurandi et Rougemont, adjoints, et Mes Dufaur, Amat, Sauvaire-Jourdan, Ailhaud et Bory, conseillers.
1907 Louis AMBARD, Les anciens bâtonniers du barreau de Marseille : Me Meynier, Me Hornbostel, Me Sauvaire-Jourdan, Me Suchet, Me Blanchard, Me Barthélémy, Me Sénès, Quatrième série, op. cit., pp. 3-10. L’a. note que Me Meynier est né à Marseille le 16 novembre 1809 dans une famille de la haute société marseillaise. Après des études au Lycée de Marseille, puis à la Faculté de droit d’Aix-en-provence, il obtient sa licence en droit le 9 août 1830 et prête serment devant la Cour royale d’Aix le 25 novembre suivant. Le même jour, il demande et obtient son admission au stage, sous le bâtonnat de Me Nègre. Son inscription définitive date de 1834. Plusieurs membre du conseil de l’Ordre, il devient Bâtonnier pour deux années consécutives entre 1854 et 1856. Il est à nouveau Bâtonnier lorsqu’intervient “ l’affaire des moustaches ”.
1908 Ibid., p. 5.
1909 Ibid., p. 6.
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