Chapitre I. La nation politique en mouvement
p. 399-473
Texte intégral
1Le peuple français à l’état de chrysalide en 1788 accède, à l’aube de la Révolution française, à une de ses formes définitives : la nation politique. D'ailleurs, il faut se rendre à l'évidence car c'est parce que la nation est en mouvement qu'elle peut devenir politique. Ainsi, le fameux « tout » national s’érige et s’enrichit dans un univers où l’ensemble doit tendre vers l’unité. Cette récente harmonie ne peut alors faire l’économie d’une régénération patriotique salvatrice.
I - LA NATION, UN « TOUT » POLITIQUE
2Pour que la nation devienne un « tout » politique, il a fallu que le peuple fasse l’objet d’un investissement politique de la part de tous les courants présents pendant la période. D’une alliance précaire entre le peuple et la Couronne, la nation ne devait atteindre son unité propre sans faire, petit à petit, table rase de toutes les formes de privilèges. Ainsi, sous l’impulsion d’un large mouvement littéraire, la modernité de la relation nation-tiers état ne pouvait que prendre le pas sur un régime monarchique absolu quelque peu défaillant.
§ 1 - L’alliance ponctuelle du peuple et de la Couronne
Rejeter avant tout la rhétorique parlementaire
3Pour une partie des libelles pré-révolutionnaires, il y a une concorde dans le combat contre les Parlements : les absolutistes reprochent aux magistrats leurs oppositions stériles et les tenants du tiers état attaquent des juges royaux désormais démasqués3033. En effet, le Parlement de Paris perd la confiance de tous les citoyens en demandant le 23 septembre 1788, pour l’assemblée des trois ordres, la forme de 1614, c’est-à-dire le vote par ordre et le refus du doublement du tiers état3034. Cette décision fut lourde de conséquence car elle fit exploser le rythme des publications anonymes. En Franche-Comté, par exemple, les parlementaires sont violemment attaqués par une littérature nationale leur reprochant d’avoir adopté le 27 janvier 1789 un plan conservateur privilégiant la noblesse à propos des États de la province3035. Néanmoins, la grande difficulté est de faire la part des choses entre le mouvement royaliste absolutiste et le mouvement partisan du tiers état3036 car il y a bien un ralliement de circonstances entre les deux partis. À ce sujet, un anonyme défenseur de la monarchie absolue indique
« que les vrais citoyens et les vrais patriotes cessent donc d’appeler cause nationale, la cause des corps destructifs de l’ordre ; que l’intérêt des citoyens royalistes et celui des citoyens nationaux ne forment plus désormais qu’une seule cause, qu’un seul intérêt ; tels sont les vœux que forme un citoyen national et royaliste »3037.
4Il faut donc analyser séparément les deux tendances.
5À l’intérieur de la défense absolutiste proprement dite, il y a deux schémas à expliquer. Il y a celui de la nécessaire moquerie, de la polémique et de l’insulte avec souvent l’avocat Linguet parlant de « robinocratie »3038 et celui de l’analyse sérieuse, juridique, argumentée avec entre autre Pierre-Paul Leroy de Barincourt. Linguet remet en cause l’attitude des parlementaires car, selon lui, ils sont « insensibles à la misère du reste de la nation »3039 et privilégient leurs corps3040. Il ne comprend pas que des magistrats s’emploient à demander la convocation des États généraux3041 car on n’a pas besoin, dit-il, de la nation dans l’état actuel3042. Linguet reproche aux juges d’avoir miné le régime et d’être les principaux responsables des maux qui corrodent le royaume. À travers ses écrits, se dégage une véritable haine personnelle contre l’inconscience d’officiers de justice. Sur un autre plan, Leroy de Barincourt, conseiller au Grand Conseil, essaie d'analyser juridiquement la déviance parlementaire et, s'attachant à la procédure de l'enregistrement stricto sensu, en examine les dérives. Les cours souveraines ont complètement dénaturé le mot de « sanction », c’est-à-dire « attacher des peines à la violation des lois » par « le droit d’imprimer aux lois une consécration interne »3043. Ce juriste met de côté son aversion légitime et déploie un argumentaire raisonné et efficient. Cependant, ces deux auteurs sont secondés par un mouvement relatif dans le nombre des opuscules diffusés.
6Les deux arguments principaux propagés par cette tendance sont ceux de l’origine royale des cours souveraines3044 et ceux de la fonction de juge exécutant3045. On n’hésite pas à dire que les Parlements rendent des arrêts séditieux contre « les droits sacrés de la nation »3046 : une nation éminemment monarchique. Les magistrats représentent une « justice à vendre »3047, ils ne sont finalement que des « cours de judicature »3048 voire souvent « des mercenaires »3049. Les juges, à l’orée de la Révolution, sont accusés d’avoir détruit le système naturel d’une justice royale dont ils font partie. Les paroles de Louis XV à la séance de la flagellation prennent ici toutes leurs vigueurs. La liaison Parlement de France - Parlement d’Angleterre est bien sûr censurée. Pour l’auteur d’un pamphlet de 1788, adepte d’une « monarchie pure »3050 et d’un roi omniprésent3051, on abuse du mot « nation »3052 surtout, à l’instar de Voltaire, lorsque les Parlements de France, se prenant pour ceux de l’Angleterre3053, signent « le code public de la révolte et le formulaire national de la désobéissance »3054. Les contre-attaques privilégiant la monarchie absolue ne font que reprendre les thèmes traditionnels des juges officiers au service du roi comme chef de la nation voire la nation même3055. Autant, une grande partie des cours souveraines se sont retournées de fait et de droit contre celui qui les a créées autant, une grande partie du troisième ordre n’oublie pas leurs origines royales !
7Pour le mouvement national, les Parlements sont synonymes, selon Condorcet, de « despotisme judiciaire, union monstrueuse du pouvoir de juger (…) débris du régime féodal »3056. On reproche aux juges de mentionner la nation en faveur de leurs compagnies, de leurs privilèges et des grands propriétaires3057. Les magistrats ne sont plus la « sauvegarde » mais simplement organe de la loi. Ils ne sont plus que « la bouche qui [seulement] prononce » si non ce « serait un véritable attentat aux droits de la nation » selon l’avocat grenoblois Jean-Jacques Lenoir-Laroche3058. La pensée de Montesquieu est donc ramenée à sa plus juste expression. Les juges n’ont plus que l’ombre de leur puissance à revendiquer d’après le futur conventionnel Jérôme Pétion3059. Le « parti » national, par l’intermédiaire de Jean- Alexis Borelli en juin 1789, affirmera que les parlementaires se sont arrogés le pouvoir des États généraux surtout en cas de vacance du trône3060. L’épisode de l’affaire des légitimés en 1717 raisonne comme l’aveu d’une substitution partiale et malhonnête. Les robins ne symbolisent que l’image imparfaite d’une représentation qui jadis avait été tolérée par la nation3061. Si ceux-ci continuent à demander la médiation par le biais de l’interprétation des lois, cela reviendrait à admettre une érosion du vœu strictement national3062. Ils n’ont pas le caractère représentatif et, de ce fait, « on ne peut tenir pour constitutionnelle leur existence comme corps intermédiaire »3063. Le comte de Mirabeau prétend d’ailleurs qu’ils sont « un hors-d’œuvre dans la constitution nationale »3064 ! Ainsi, le discours pré-révolutionnaire dépasse complètement des juges artificiellement comptables envers la nation mais naturellement et normalement tournés vers le monarque et la société de privilèges. L’esprit de corps est par nature un défaut péremptoire pour le député du tiers état d’Anjou Constantin-François Volney3065 et même pour Mignonneau3066. Le caractère de l’institution parlementaire est brocardé et disqualifié nationalement. En définitive, c’est un libelle comtois de 1788 qui aura une vision assez juste de l’opinion nationale contre les magistrats :
« Ah ! S’il fallait punir les Parlements, Sire, c’était lorsque, sans doute, par un excès de zèle, ils se substituaient aux légitimes représentants de la nation pour agir, sinon contre son vœu, au moins contre ses droits ; lorsqu’ils attaquaient sa propriété en enregistrant des impôts qu’elle n’avait point accordés, et non pas dans le moment où, par une espèce d’amende honorable à la nation (pour nous servir de l’expression d’une de ses cours), ils lui faisaient oublier une faute, qui fût celle des temps et des circonstances »3067.
8Sur la même ligne politique, les Parlements, qu’ils soient confirmés dans leurs fonctions ou réformés3068, font l’objet dans les cahiers de doléances d’un investissement national dans le sens où il revient certainement aux États généraux de les déclarer ou non légaux et « constitutionnels »3069. Les juges ne doivent jamais modifier ni restreindre les lois que les députés leur envoient surtout en matière fiscale3070. Ainsi, l’officier n’a la possibilité que de constater matériellement la réalité de la norme législative nationale3071 alors que les lois d’origines royales peuvent être vérifiées, preuve de la hiérarchie partiale contre le roi au profit de la nation3072. Le contrôle de la loi et la représentation nationale ne constituent plus un modèle opérant. Il y a donc une délégitimation à la fois politique et juridique. Celle-ci se vérifiera jusqu’en juin 17893073.
9Comme on peut l’observer, les deux camps rejettent totalement la vision nobiliaire traditionnelle. Cette censure permet dès lors un rapprochement mais la rencontre est éphémère à cause d’une divergence fondamentale, celle de la place du roi dans l’organigramme institutionnel. Barnave aura à ce sujet une bonne analyse lorsqu’il sera emprisonné pendant la Révolution. Selon lui, « l’influence de la puissance royale, longtemps opprimée par l’aristocratie, a appelé le peuple à son secours. Le peuple sert longtemps d’auxiliaire au trône contre leurs ennemis communs »3074.
Le roi-peuple, un consensus de circonstances
10En 1788, une pensée limpide est émise par le marquis Charles de Casaux sur la liaison naturelle entre le roi et le peuple :
« L’idée de roi suppose nécessairement celle de peuple ; mais l’idée de peuple ne renferme pas nécessairement celle de roi ; elle suppose, au contraire, dans le cas le plus favorable à la royauté, qu’il existait avant elle un nombre d’hommes qui pouvaient se donner ou ne pas se donner un roi. C’est peut-être de ce petit nombre de trivialités sensibles à la première exposition, qu’on a conclu dans plusieurs pays, la supériorité du peuple sur le prince. Les Français, au contraire, établissent l’identité du prince et du peuple, aussitôt que le prince est reconnu pour tel : on dirait qu’ils considèrent le peuple comme le prince divisé et le prince comme le peuple réuni dans un seul individu. Il n’est donc pas étonnant qu’ils prononcent l’indivisibilité de leurs intérêts, l’impossibilité de blesser l’un sans offenser l’autre, et la nécessité d’une assemblée générale aussitôt que les intérêts de l’un ou de l’autre paraissent affectés par quelques mesures ministérielles. Les Français ont raison, c’est le seul moyen de joindre les avantages d’une république à la force d’une monarchie, sans redouter les inconvénients de l’une ou de l’autre »3075.
11La fusion roi-nation dans l’unité recherchée contre les corps intermédiaires fait l’objet d’une profusion de libelles entre une partie des absolutistes et le tiers état. Tout ceci se fait contre ces médiateurs qui détériorent le lien qui existe entre le monarque et ses sujets. C’est une question de paix civile3076. Ainsi, « les lois constitutives sont l’ouvrage du roi et de la nation ; tout ce qui tient à la constitution doit se traiter directement du roi à la nation et de la nation au roi »3077. Les corps intermédiaires sont « un principe de destruction »3078 et ne sont « pas de l’essence de la monarchie »3079. C’est de nouveau la fonction de médiation qui est rejetée car ce rouage dénature le régime3080 de par son fondement trop ancien basé sur la fonction des ordres et sur la division de la société en trois3081. Dès lors, le prince et la nation aspirent à être unis3082. La perspective bien connue du despotisme est renversée contre ces mêmes corps qui au départ en bénéficiaient3083. Reprenant l’organigramme « féodal » du roi concepteur de la loi, de la nation consentante et de la proclamation parlementaire3084, l’avocat grenoblois Jean-Joseph Mounier en 1788 - archétype d’ailleurs de cette tendance roi-nation - refuse tout intermédiaire car « le prince et le peuple traitant ensemble sans médiateurs, ne laissaient point entre eux de place pour la calomnie »3085. En effet, plusieurs libelles rendent très bien compte de cet accord et véhiculent la même symbiose roi-tiers état : « C’est la cause royale, c’est la cause populaire (…) c’est celle de la patrie »3086. La fusion paraît parfaite. Tout ceci doit s’articuler à l’intérieur d’une machine politique équilibrée3087 puisque
« heureux le pays où il n’y a que des citoyens et qui ne se trouve ni morcelé, ni divisé en classes différentes ! Moins de contrepoids sont nécessaires : c’est une machine qui n’a qu’un ressort ; tous les leviers servent au même mouvement ; une partie de la force nationale n’est pas distraite pour l’équilibre de l’ensemble »3088.
12La régénération de la monarchie par les États généraux avec un monarque à sa tête3089 est « une forme constitutionnelle et nationale » devant anéantir l’aristocratie3090. Il est donc intéressant de remarquer que la défense absolutiste stricto sensu agit, dans un premier temps, pour la promotion de cette liaison roi-peuple. J.-N. Guyot écrivait d’ailleurs en 1787, à propos de la séance de la flagellation, que « le roi n’est qu’un avec son peuple. Nous parlons donc, en quelque sorte de toute la nation, en nous occupant de lui »3091. Les partisans de la monarchie absolue, comme le premier commis à la chancellerie de l’Ordre du Saint Esprit Gabriel de Brizard, veulent retrouver en 1788 l’unité d’une monarchie nationale en osmose et refusent une société de corps comme alibi au conservatisme et à la tradition3092. Le « liberum veto de la Pologne » doit être rejeté3093. « Les vrais intérêts [de la nation] ne peuvent être séparés de ceux de son souverain et les vrais intérêts du souverain ne peuvent être séparés de ceux de la nation » indique un libelle monarchiste3094 à l’image d’un second promouvant le développement de citoyens nationaux et royalistes3095. En ce sens, le député du tiers état de Nîmes Rabaut Saint-Etienne - autre archétype du mouvement roi-nation - refusant la distinction des ordres et la société tripartite, se prononce en 1788 en faveur de l’union de la nation autour de son roi. « Cette distinction [dit-il] n’est pas la définition de la monarchie qui est un État d’une nation et d’un roi. La nation est le corps dont le roi est la tête »3096. Mais l’exemple le plus symptomatique est celui de Linguet et dans une moindre mesure celui d’un pamphlet de l’absolutiste et lieutenant criminel au présidial de Rennes Michel-Ange Mangourit3097. L’avocat Linguet reconnaît que le tiers état est la nation3098, nation qui ne doit pas être dépendante d’un corps comme celui du Parlement3099 mais unie autour du roi3100. Toujours selon lui, « le roi et le peuple sont d’un côté et de l’autre, le Parlement et quelques partisans auxquels il tient. Le roi et le peuple n’auront jamais qu’une cause et qu’un intérêt »3101. Le rebond de l’écho national ne faillit pas car l’avocat au barreau de Paris et député du tiers état de Paris Target parle volontiers du « roi-peuple »3102.
13Les parlementaires sont par conséquent visés en premier à travers le schéma de l’unité. Unité, voilà le mot d’ordre d’un rassemblement précaire et conjoncturel entre la nation et son monarque ; osmose bien perçue par certains nobles voyant la force d’une telle idée et essayant par dépit de la reprendre à leur compte3103. La réunion du peuple avec son roi partait d’une relative bonne intention dans le cadre d’une réforme en profondeur de l’organisation monarchique, d’abord contre les officiers puis au profit d’un gouvernement véritablement harmonique proche de chaque individu de la nation. Toutefois, la réalité absolutiste prend quand même le pas sur l’existence d’une nation autonome accompagnée par le roi3104.
14La rhétorique monarchiste absolutiste unitaire et originaire dégagée par le dominicain Charles-Louis Richard et l’avocat au Parlement de Paris Pierre-Louis Gin, privilégie une symbiose roi-nation avec un ascendant pour le monarque3105. D’ailleurs, selon un auteur anonyme, rappelant en 1787 la séance de la flagellation3106, déniant toute existence d’un quelconque contrat3107 et privilégiant l’absolutisme du roi3108,
« les rois de France sont rois sur leurs peuples et non point mandataires de leurs peuples. Notre réunion ne change pas notre qualité de sujets et ne leur fait rien perdre des prérogatives de la royauté »3109.
15Admettre la fusion, oui, mais le versant absolutiste doit l’emporter car, sans parler du cas des parlementaires devant une totale obéissance au roi et à la patrie3110, les États généraux n’ont de légitimité qu’à donner des conseils3111 : ce n’est pas « l’anarchie »3112. De plus, un proche de Linguet, l’abbé Jean-François Féraud tire à boulets rouges sur les philosophes imbus d’Angleterre, ces « anti-nationaux » qu’il accuse d’être aussi les principaux responsables de la situation politique3113. La royauté ne doit en définitive bénéficier que du consilium et ne permettre qu’une liaison verticale du pouvoir. Les écrits révolutionnaires de Barnave indiqueront que le roi pensait réellement, en vain, que le prolongement des débats sur la forme des États généraux allait fatiguer la nation qui par conséquent se rallierait naturellement à l’arbitrage royal3114. Ainsi, si l’on pousse plus loin cette symbiose, on se rend compte à brève échéance d’un craquèlement de l’union du côté national.
16Malgré les volontés de le Mercier de la Rivière de mettre à équidistance le roi et la nation3115 et d’Antoine Diannyère d’intégrer cet état de fait et de droit dans le jeu constitutionnel pour le pouvoir législatif3116, le divorce roi-peuple commence à poindre à la fin de l’été 1788. En effet, rapidement, la prééminence du peuple, de la nation dans cette fusion par l’intermédiaire du troisième ordre est établie par le futur constituant et député du tiers état d’Annonay en Languedoc François-Antoine Boissy d’Anglas3117. Il ne faut pas se tromper quant au sens de la réforme institutionnelle puisque que la source du pouvoir ne peut être que nationale et doit faire fi de tous ces vestiges absolutistes. Le troisième ordre doit être le socle de la constitution pour le bien du roi reprend le député du tiers état de Riom Pierre-Victor Malouet3118. Selon Morellet, cette réciprocité a comme fondement le peuple qui a le rôle le plus important, celui de la continuité du régime. En effet, si la noblesse a dans une époque donnée permis au roi de régner, il revient naturellement au peuple de l’aider et de le soutenir3119. Selon un anonyme en 1788,
« tant que le corps de la nation ou le tiers état, ce qui est la même chose, a été admis dans les assemblées du champ de mars ou de mai, l’autorité royale s’est soutenue et agrandie ; c’est à mesure que le tiers état a été écarté, que les évêques et les chevaliers se sont mis à sa place »3120.
17Ainsi et subrepticement, on observe un double glissement. D’une censure des parlementaires au profit de la symbiose roi-nation, on dépasse cette fusion en faveur d’une autre unité : celle de la nation. D’ailleurs, la progression s’établit logiquement étant donné que la théorie des corps intermédiaires est reprise aussi par une autre entité : les États généraux. Ces assemblées redeviennent les médiateurs potentiels entre le roi et son peuple3121. La place fondamentale du prince est alors remise en cause par le député de la noblesse du Languedoc Emmanuel-Louis d’Antraigues par exemple3122. Le monarque est de ce fait accusé, par un libelle, de s’être servi des Parlements pour éviter d’assembler la nation3123.
18La nation s’est petit à petit déliée de tous les obstacles à son autonomie. Le pallier consensuel avec les royalistes contre la fonction nobiliaire est franchi allègrement. L’ouverture des États généraux ne sera que le flagrant significatif d’un paysage politique faisant tomber les masques les uns après les autres3124. La nation a été pendant un laps de temps assez court l’objet d’une réunion de vues passagères entre les absolutistes et les nationaux mais les potentialités d’un peuple uni prennent rapidement le pas sur toutes formes de privilèges qu’elles soient liées au pluralisme ou plus généralement à l’échelle de tout le territoire.
§ 2 - L’unité nationale contre les privilégiés
La persistance de la double naturalité française
19Il existe à la veille de la Révolution un particularisme avéré à cause surtout du problème fiscal3125 : les cahiers de doléances sont là pour en témoigner3126. Sans parler du cas de la « nation » corse3127, il faut continuer à reconnaître la diversité du peuple français comme par exemple avec le Gévaudan3128, la Franche-Comté3129 ou la Provence3130. Pour une compréhension d’ensemble et d’une manière liminaire, on peut prendre des exemples tirés de quatre libelles. L’un décrit en ce sens l’existence d’un droit romain, d’un droit écrit, d’un droit coutumier, participant à la richesse juridique française et développant l’image d’un royaume attaché à son pluralisme3131. Un second affirme qu’il y a beaucoup de coutumes opposées, de mesures différentes et qu’essayer de les remettre en cause serait utopique3132. Un troisième admet, et ce n’est pas nouveau, que la France est composée de « différentes peuplades qui ont leurs lois, leurs coutumes »3133. Un quatrième de Pétion signale avec un grand regret que
« la France est gouvernée par plus de trois cents coutumes, la plupart opposées les unes aux autres dans leurs dispositions. Indépendamment de ces coutumes, combien de lois éparses dans ses fragments plus ou moins incomplets, sous les titres d’ordonnances, d’édits, de déclarations ! À mesure que des circonstances imprévues se présentent, on en fait de nouvelles, on interprète les anciennes, qu’on laisse toujours subsister dans les parties non réformées, de sorte que sur la même matière on trouve vingt lois différentes et inconciliables. Combien de formation puérile et dont la plus légère omission rompt les mesures les plus sages, détruit les contrats les plus sacrés »3134 !
20D’ailleurs, un travail d’unification des coutumes est selon Gin plus difficile qu’il y a deux ou trois siècles3135. La France, les « Frances » sont donc très présentes et n’ont, a priori, aucune raison de se détacher du phare que constitue le roi étant donné que ce dernier tolère leurs libertés.
21Néanmoins, le particularisme en 1788 ne veut toujours pas dire autonomie, loin de là. L’idée de la nation bretonne, par exemple, ne doit pas cacher non plus que celle-ci recouvre encore le thème de la province de France3136. Le Breton ne renie pas sa patrie locale mais il ne se détache pas non plus de la nation française3137 même si la Bretagne véhicule historiquement un fort pluralisme. Ainsi, un pamphlet permet à la province de rappeler le rôle du roi dans la garantie de ses droits et franchises3138 et de renforcer le poids de ses demandes par l’utilisation de la nation3139. La nation en général sert de tremplin pour les libertés locales à travers le concept de constitution. Un parallélisme des formes est encouragé mais avec un ascendant pour la province.
« Le vœu de la province, celui de toute la France, c’est le rétablissement de l’ordre public. Le vœu manifesté par tous les ordres en Bretagne, c’est le maintien de la constitution particulière de la province ; c’est l’exécution des contrats passés entre les commissaires de V.M. et les États, qui garantissent la sûreté des droits respectifs du souverain et de ses sujets. Les États stipulent la conservation de leurs droits et des formes anciennes de leur administration, en accordant librement et volontairement au souverain, les contributions nécessaires à la défense de la patrie »3140.
22Le député du tiers état de Nantes Joseph-Marie Pellerin, partant du principe que « les Gaulois formaient une république » avant la conquête romaine3141, admet d’ailleurs que « les Bretons formaient un corps de nation lorsque les Francs étaient encore sur les bords du Rhin »3142. Ainsi, dès le début, la Bretagne jouissait d’une souveraineté où existait une assemblée chargée « des affaires générales de la nation »3143. La « nation bretonne »3144 a toujours perçu le traité passé avec le roi de France comme insuffisant3145. La carence de l’union fait que ses rois, comtes ou ducs prenaient le consentement de la nation ou de ses représentants, pour tout ce qui avait rapport à l’ordre public3146. Toutefois, la nation bretonne, dans un élan patriotique quant à la fibre maternelle de la terre nourricière, ne comprend dès lors, en 1788, « que des enfants nourris dans son sein, qu’elle paie de la sueur du cultivateur indigent et des larmes du peuple » selon un anonyme3147. À contre-courant des dires du pasteur Rabaut Saint-Etienne3148, Volney atteste que « le tiers état compose à lui seul la nation bretonne, et qu’à ce titre il dût avoir une majorité de représentants »3149. À l’image du Dauphiné, l’interaction entre les demandes de réformes nationales et l’implication de celles-ci à l’échelle provinciale ne fait aucun doute, le sentiment identitaire persistant encore. Néanmoins et toujours dans un cadre pluraliste, une autre province mérite l’attention : la Normandie.
23Un anonyme, défendant le Parlement de Rouen et se référant à la sulfureuse charte aux Normands3150, reconnaît d’une part, le continuum historique entre la cour souveraine et l’ancien Échiquier de la province3151 et d’autre part, se prononce pour que ledit Parlement soit de nouveau réuni. Le thème de la « nation normande » est utilisé pour asseoir les arguments juridiques d’une telle demande :
« Si ce corps était criminel, serait-ce la nation qu’il faut punir ? (…) D’ailleurs les membres de ce corps sont tous du choix du roi, c’est Sa Majesté qui les a reçus ; s’il y avait à redire dans leur conduite, ce ne serait pas à la nation qu’il faudrait s’en prendre »3152.
24Ainsi, la nation normande doit manifestement être prise en considération car elle est aussi particulière que le royaume de France ; le Parlement et les États provinciaux étant ses éléments naturels3153. La Normandie continue à s’illustrer dans des revendications locales tenant pour fondamentaux une histoire originale, un peuple unique, une constitution viable, des libertés anciennes, en somme une nation à l’intérieur de la nation.
25Les deux exemples breton et normand ne sont que les illustrations presque parfaites d’une forte spécificité française à l’aube de la réunion des États généraux. En effet, l’un et l’autre veulent soit le maintien, soit le rétablissement des États. Il faut rappeler que les magistrats hostiles aux assemblées provinciales se prononçaient volontiers pour ces mêmes institutions qui par nature et pour l’essentiel conservaient les privilèges de la noblesse3154. La double naturalité des provinces ayant des États s’établit clairement dans un libelle de 1788 s’attachant à la distinction nation locale-nation générale :
« Les provinces qui sont pays d’État par leur constitution particulière et originaire, sont autant intéressées que les autres au maintien de la véritable constitution française, quoiqu’on ait annoncé que leurs franchises ne seront point altérées par les nouveaux plans. En effet, les pays unis et non subalternés existent sous deux rapports : comme formant chacun une société distincte et séparée ; et comme formant entre tous une société plus grande, composée de toutes ces sociétés particulières. Chaque province unie, comme formant un État distinct, a l’objet de se maintenir dans sa constitution et dans ses privilèges. Comme associée à d’autres États et à un plus grand tout, elle a nécessairement un intérêt plus compliqué et plus étendu. Elle doit désirer le bien général de l’association ou de la confédération politique (…) Chaque province unie, dont la constitution particulière est d’être pays d’État, a donc deux espèces de droits : celui de consentir en corps de nation et de répartir les impôts, d’après les formes de sa constitution intérieure ; et celui d’avoir des députés dans les États généraux du royaume, qui sont, pour ainsi dire, la diète de la confédération »3155.
26L’existence de la distinction entre les pays d’États et les pays d’élection au profit des premiers n’est pas, entre 1788 et 1789, lettre morte comme le professe un opuscule3156. D’ailleurs, il est très caractéristique de remarquer là aussi un parallélisme des formes entre les demandes nationales et les demandes locales. Ces demandes concernent le doublement du tiers état que ce soit pour les États généraux ou pour les États particuliers selon le futur député à la Convention de l’Aveyron et partisan de la souveraineté nationale Louis Louchet3157. Ainsi, Servan montre que
« puisque le roi et la nation s’occupent à réformer les États généraux du royaume, pourquoi la nation, dans chaque province, ne pourrait-elle pas, avec l’autorité du roi, réformer les États particuliers »3158 ?
27À travers la description de cette architecture institutionnelle, il est remarquable qu’une telle vision, relayée par un discours local traditionnel, tranche avec les dires très violents d’un libelle artésien. L’auteur anonyme reconnaît que la nation artésienne constitue à elle seule une famille3159, qu’elle doit encore jouir de franchises3160 et prône, in fine, l’intolérance :
« L’homme qui n’est pas né dans un pays ou au contraire le hasard, l’intérêt et les circonstances l’ont conduit, y garde presque toujours, ses préjugés, ses opinions, ses prétentions, toutes les idées qu’il a apportées d’ailleurs ; celles surtout qu’il est allé ramasser dans les cours ou auprès des grands. Artésiens ! Garantissez-vous des effets funestes d’une transplantation morale. Si vous me demandez quel est le titre qui forme l’éligibilité personnelle, je vous répondrai que c’est celui de citoyen. Mais ne regardez comme citoyens que vos compatriotes, défiez-vous de tous les êtres transplantés parmi vous ; ils ne sont pas des descendants de vos pères »3161 !
28Cette pensée visant à l’exclusion de tout élément étranger ne doit pas être en définitive l’arbre qui cache la forêt. La France est un pays divers apte à vivre en relation avec ses différentes composantes. L’équilibre est certes fragile en 1788 mais il est bien réel et allègrement retranscrit dans nombres d’opuscules. Pourtant, la double naturalité française est amodiée par un discours dauphinois prônant clairement, pour l’essentiel, un modèle de nation en miniature. Tous les regards sont tournés vers cette province en 1788.
L’intermédiaire national du Dauphiné
29Le Dauphiné « est dans le royaume et non pas du royaume »3162. Il y a clairement dans la pré-Révolution un transfert du local vers le national grâce en grande partie à la province du Dauphiné comme par exemple avec Mounier3163 contre l’argumentaire absolutiste3164. Deux courants existent à l’époque entre d’une part, les libertés delphinales promouvant le « transport » à la France effectif depuis le xivème siècle et d’autre part, une tendance, qui l’emporte à Vizille, celle d’une conception générale et nationale3165. Le transport est, pour schématiser à outrance, l’ensemble des chartes et conventions entre la monarchie française et le Dauphiné. Si le premier courant persiste naturellement, le second s’incarne dans la volonté d’une réforme en profondeur des institutions locales. Mounier, contre la réforme Lamoignon et chef de file de la révolte dauphinoise3166, décide d’assembler des nobles et des avocats afin de censurer ce qu’il appelle le « despotisme ministériel ». À cette occasion, il annonce la convocation des États du Dauphiné qui bénéficiaient déjà du doublement du troisième ordre : c’est l’assemblée de Vizille. Cette assemblée réclamera la restauration des Parlements, des États provinciaux, la convocation des États généraux avec le consentement à l’impôt et le siège en commun des trois ordres3167. Les effets de la réunion dauphinoise, préfigurant les États de Romans3168, auront une large place dans le débat national et seront repris dans les écrits de Barnave pendant la Révolution3169 et les mémoires de Chateaubriand en 18213170.
30Ainsi, la pré-Révolution loue la « constitution delphinale », celle qui selon d’Antraigues, à l’instar de Sieyès3171, limite le pouvoir des États provinciaux et qui décide qu’ils ne pourront consentir à aucun impôt que lorsqu’il aura été délibéré dans les États généraux3172. L’exemple du Dauphiné influence fortement le comte d’Antraigues. En effet, les États étant les organes du peuple du Languedoc, il ne revient pas au roi de les nommer3173 à l’instar de ce qui se passe en Dauphiné3174. Cette province est encensée par toute une littérature voyant en elle un palladium national attrayant comme en Bretagne3175, en Franche-Comté3176, en Provence3177 et en Saintonge3178. Un libelle n’hésite pas à dire que « cette province a fait plus dans le conseil de sa nation car enfin une province est comme une nation, elle a médité la loi qui lui convenait »3179. Même Lanjuinais reconnaît pour la Bretagne l’attitude des Dauphinois dans la définition de la nation, c’est-à-dire le tiers état3180, c’est-à-dire « presque tous les citoyens »3181, « c’est-à-dire les dix-neuf vingtièmes des citoyens »3182, « comme pour le cas du Dauphiné »3183. L’unité politique de la nation clamée par les Grenoblois rejaillit fortement sur les débats et irradie les pensées. Ainsi, on voit écrit
« que les trois ordres du Dauphiné ne sépareront jamais leur cause de celle des autres provinces et qu’en soutenant leurs droits particuliers, ils n’abandonneront pas ceux de la nation »3184.
31Tous les thèmes sont abordés sans retenue. Mounier utilise à merveille la transposition entre la nation française et la nation locale par l’intermédiaire des États car le premier
« attentat des rois fut d’enlever à la nation la libre expression de ses vœux ; au roi ses vrais conseillers ; au peuple ses représentants : c’est dans ces vues qu’ils cessèrent, au commencement du siècle dernier, d’assembler les États généraux du royaume, et qu’ils suspendirent bientôt après ceux de la province de Dauphiné »3185.
32Les privilèges ne doivent pas être regardés comme « constitutionnels » par la nation dauphinoise selon le Grenoblois3186 et, de ce fait, son compatriote Lenoir-Laroche montre que le principe constitutionnel du consentement à l’impôt doit être national3187. Toujours selon cet auteur, « le Dauphiné a du moins posé la première pierre de ce grand édifice »3188. La littérature pamphlétaire propage l’idée que la province, dans une action patriotique libre et ordonnée3189, s’est offerte à la monarchie française3190. Le Dauphiné a su résister au despotisme et créer « au milieu de la guerre, une constitution dont la sagesse et les principes, profondément nationaux, sont faits pour servir de modèles à tout le royaume »3191. D’ailleurs, toujours selon Lenoir-Laroche en 1789, « une province dont la sage constitution va servir de modèle aux autres provinces du royaume » ne peut être que le Dauphiné3192. La puissance de cet exemple transparaît même dans certains cahiers de doléances comme celui du tiers état de Blois3193.
33L’intermédiaire d’une nation dauphinoise n’est pourtant que le premier stade à une évolution plus large, celle de la patrie commune française. La contrée dauphinoise a été en quelque sorte un laboratoire national et constitutionnel qui a permis l’établissement d’un socle générateur, d’un prisme montrant la voie à suivre aux autres provinces vers la patrie commune. Il y a un double mouvement entre un fort sentiment provincial et un sentiment national en progression grâce à certains notaires, avocats, gros propriétaires, médecins, notables de village et de bourg3194. Mounier était de ceux-ci, détournant ses compatriotes de l’exclusivisme des privilèges locaux en direction d’un esprit national général3195. Ainsi, d’embryonnaire, l’idée de patrie commune détachée de son référent royal ultime s’imposera après le 5 mai 1789 grâce aussi au marche-pied dauphinois3196.
La patrie commune française
34Loin de la majorité, certains royalistes absolutistes, tout en agissant en faveur de l’unité traditionnelle d’une nation unie autour de son roi, remettent en cause les particularismes comme synonymes de déstructuration de la patrie monarchique. Selon l’avocat au présidial de Nîmes Bertrand Verlac, le terme même de peuple ne doit pas s’entendre au sens de province particulière mais de nation entière3197. Mangourit, faisant un parallèle entre nations et généralités administratives, affirme en 1788 que les différentes provinces forment « trente deux nations » dirigées par des tyrans remettant en cause l’équilibre d’une organisation territoriale monarchique3198. Ange Goudar va plus loin dans la contre-attaque et écrit :
« On cite éternellement les Bretons, dont le Parlement veille sur les droits de la nation, mais ce sont des Anglais et nous sommes Français ; leur constitution est différente de la nôtre »3199 !
35Le paradoxe de cette attitude renforce quelque part l’unité nationale - monarchique certes - mais en retour elle nie la réalité pluraliste française. Ainsi, elle est un renfort pour ceux qui aspirent à l’unité nationale avec un roi amoindri. L’ironie est que même certains parlementaires participent à cet élan et succombent à la tentation unitaire. Le Parlement de Pau en 1788, à l’instar de son homologue breton3200, cède à l’attraction d’une représentation unie entre les intérêts particuliers de sa province et les intérêts généraux de la nation, de la grande patrie, pas totalement en opposition à la petite patrie locale. La cour souveraine du Béarn est circonscrite à l’intérieur d’un ressort territorial déterminé afin de rendre la justice ordinaire mais a en même temps un devoir envers la nation en général3201 : « Le Béarn et la Navarre ne refusèrent point leurs secours à la patrie commune »3202.
36Cependant, l’unité de la nation française, celle du futur programme de Sieyès3203, est désormais perçue comme un objectif à court terme par les partisans de la réforme en profondeur du régime et a une forte audience dans les colonies françaises. Elles sont des provinces de France à part entière et doivent, comme les autres, participer à l’assemblée nationale3204 car « les habitants de l’Amérique et ceux de la métropole ont la même patrie, le même roi, les mêmes lois ; ils concourent également au soutien de la cause commune »3205. En ce qui concerne justement la métropole, la nation est une famille unie, Béarnais, Bretons, Dauphinois doivent voler au secours de la patrie et faire preuve d’un attachement au nom français3206. « Sans être, à proprement parler, compatriotes, nous sommes tous Français » indique un libelle en 17883207. Cette conception est partagée par Barnave pour qui la patrie d’un Français est dans la France entière3208 ainsi que par Servan3209 et Dupont de Nemours3210. La patrie commune est célébrée par nombre de libelles ne voyant en elle qu’une issue obligée dans la future représentation nationale3211. Pourtant, l’idée générale est que la province ne doit pas tout sacrifier sur l’autel de la réunion nationale.
« Pour jouir de nos droits nationaux, [affirme un libelle] nous ne devons retenir de nos privilèges particuliers que ceux qui ne peuvent nuire au bonheur de nos concitoyens, et nous devons voir notre patrie dans la France entière. Ne formons plus qu’une même famille. Béarnais, Bretons, Dauphinois, faisons gloire d’être Français, remplissons- en les devoirs et volons au secours de notre patrie »3212.
37À l’intérieur de cette nation française devant compter sur ses composantes provinciales, sont conservées quelques résurgences d’une double naturalité traditionnelle se substituant elle aussi au schéma d’une nation monarchique, unie dans la diversité, vers la patrie nationale : le fédéralisme est en vue3213.
38Malgré la rareté de l’unité et de la solidarité nationale3214, certains cahiers de doléances reprennent quand même cette orientation et font la promotion d’une nation unie comme pour le tiers état de Toul3215 ou celui de la ville de Vienne en Dauphiné3216. D’ailleurs, pour les trois ordres de Langres, dans le cas contraire, « on ne verra point une grande nation, on n’apercevra que des provinces : il n’existera pas une patrie parce qu’il y en aura cent »3217. Cette union ira jusqu’à la promotion de l’appartenance nationale en faveur de tous ceux qui produiront des efforts au service de la patrie parce que résidant en France3218. Mais alors que les derniers vestiges d’une France organisée en corps bénéficiant de privilèges octroyés par le monarque commencent à rendre visiblement l’âme, un mouvement unitaire prend place.
39Selon Antoine-François Prost de Royer, le temps des privilèges où les intérêts locaux primaient sur la nation entière et sur ses « droits communs » est fini3219. La tendance en faveur d’une nation débarrassée de tout héritage, de tout particularisme prend petit à petit le pas sur un peuple anciennement divers selon le futur député de la Convention du Tarn François-Antoine Daubermesnil en 1789 : « Nous devons n’être ni le tiers état, ni le clergé, ni noble, habitant du Languedoc, de la Bourgogne ou du Roussillon mais Français mais membres de la grande association »3220. La « mère patrie » ne doit, in fine, tolérer aucune demande, aucune présentation d’un quelconque contrat passé jadis avec le royaume de France3221. Un nivellement est opéré au profit de la nation unie comme le veut ardemment Charles-Philippe Guiraudet3222. Le mouvement national est très clair et ne laisse aucune place à l’ambiguïté : la nation française, à l’instar de Sieyès, doit être appelée « Grand Tout »3223 et n’abandonnera aucun champ au pluralisme pour un libelle en mai 17893224. La division de la France en départements est alors mise en débat car il faut quand même rationaliser le territoire3225. Dans la continuité, les États généraux doivent être à portée de vue du peuple, Paris étant le centre de ce nouvel organigramme territorial3226. Les germes de la nation une et indivisible sont bien présents en 1788 et annoncent l’article 10 du décret des 5-11 août 1789 abolissant les privilèges mais aussi le décret du 22 décembre 1789 sur les départements.
40La nation « organisée » entre juillet 1788 et mai 1789 s’est vue doucement refondue dans le tamis unitaire vers la fin d’un pouvoir provincial pluriel3227. Cette évolution n’a été que le pendant particulariste d’un mouvement sans précédent, celui de la nation politique.
§ 3 - La décisive reformulation politique de la nation
L’apport fondamental de l’abbé Sieyès
41Annonçant quelque part les utilitaristes tels Bentham3228 et influencé par la mathématique lockienne, la physiocratie3229 et l’empirisme de Hume3230, Sieyès accuse les nobles d’inutilité sociale3231. Evidemment, l’utilité est définie par son contraire : l’inutilité. Classe de la nation dont la « fainéantise » n’est plus à rappeler3232, la noblesse subit de plein fouet les attaques véhémentes de l’abbé à cause de son esprit de « caste »3233 et de son attitude égoïste3234. Entité jouissant de privilèges exorbitants à l’intérieur de la communauté nationale, « la caste des nobles »3235 dénature et dévitalise le peuple de France3236. Il existe une véritable dichotomie entre un second ordre pesant comme « charge »3237 et un tiers état générateur de richesses et d’abondances3238. « Si l’on ôtait l’ordre privilégié, la nation ne serait pas quelque chose de moins mais quelque chose de plus »3239. De ce fait, la scission est par nature irrémédiable étant donné que la noblesse est « déjà un peuple à part dans la grande nation »3240. Ainsi, les conséquences font que cet ordre, à l’instar d’un libelle du 20 septembre 17883241, est une exception à « l’ordre commun »3242. Ainsi, les privilèges sont synonymes d’Ancien Régime3243. Sieyès avait d’ailleurs déjà employé fin 1788 une telle position dans son Essai sur les privilèges3244. Ceux-ci étaient « hors du droit commun » et tendaient à l’avilissement des citoyens3245. En effet, à la réfutation de l’absolutisme par les anciens privilégiés, se substitue la contestation du privilège proprement dit aboutissant à l’affranchissement du troisième ordre.
42La seconde attaque est menée par l’abbé sur le terrain du nombre de la population, position confirmée le 15 juin 1789 à propos de la constitution des communes en assemblée des représentants3246. En effet, comme les deux premiers ordres n’abdiqueront jamais leurs privilèges3247, Sieyès estime venu le temps de déployer la force du référent quantitatif au sein de la future représentation nationale. La nation, qui est le tiers état, représente vingt-cinq millions d’hommes contre deux cent mille individus3248. Le nouveau règne de la pluralité doit l’emporter sur l’ancienne minorité3249. « En effet, la pluralité ne se sépare point du tout ; il y aurait contradiction dans les termes car il faudrait pour cela qu’elle se séparât d’elle-même »3250. La contribution de l’abbé Sieyès a été fondamentale dans le débat mais il est aussi intéressant d’observer qu’il est à la fois le promoteur et le récepteur de l’idée nationale à travers la position du tiers état.
L’unité nationale du peuple dans le tiers état
43Le tiers état, c’est la nation3251, telle est la phrase d’une révolution en puissance. Le tiers état représente « les dix-neuf vingtièmes de la nation »3252. Selon le député du tiers état de Rouen Jacques-Guillaume Thouret, à l’instar d’Antraigues3253, la nation « est un composé de plusieurs millions d’individus »3254. Des chiffres sont lancés comme autant de coups de boutoir forçant une société privilégiant la qualité à s’adapter face à la nouvelle quantité puisque la nation se compose de plus de vingt-deux millions d’hommes3255. Le nombre, la quantité sont, à l’aube de la Révolution, un sujet central et ne sont plus considérés comme le parti pris de la multitude. On le sait, la nation est perçue par Sieyès à la fois comme un corps juridique mais aussi social3256. Les différents opuscules sont clairs : le nombre des députés du tiers état est « le droit national »3257, droit imprescriptible qui permet à la majorité d’agir sur la minorité « puisque cet ordre est aux deux autres comme cent mille est à un »3258. Le cahier de doléances du tiers état de Château-Thierry est net à ce sujet, c’est « la partie la plus utile et la plus nombreuse de la nation » qu’il faut dorénavant prendre en considération3259. Trois opuscules nationaux lèvent alors toute équivoque. On opère une différence fondamentale entre le droit et le fait en ce qui concerne la situation du troisième ordre. Le tiers état est un « peuple opprimé » en fait, en droit il est une « nation complète », en fait le tiers état ne peut que « secouer le joug », en droit il reprend naturellement son pouvoir3260. Les conséquences font que le tiers état n’est pas le tiers de la nation étant donné que l’on veut éviter de subir le rôle réducteur de la troisième partie d’un ensemble plus large. Si dans la future assemblée législative, les deux premiers ordres conservent une voix chacun tandis « que le corps de la nation n’en aurait qu’une »3261 alors ce corps se transformera en « corps d’aristocrates »3262. Le problème est que les termes peuvent prêter à confusion car il faut nier le vocable « tiers » : le peuple dans les premiers États généraux « n’a jamais été réduit au simple tiers »3263. Le troisième ordre veut naturellement signifier qu’il existait une division tripartite de la société3264. Ainsi, le cahier de doléances du tiers état d’Anjou précise que « le mot de tiers état demeurera aboli comme étant la source d’équivoques fâcheuses et remplacé par celui de communes »3265 : l’Angleterre n’est pas loin. L’ouverture des États généraux ainsi que les débats postérieurs poseront le principe d’un troisième ordre prenant le titre de « communes »3266.
44Même les parlementaires dauphinois en 1788, à l’image de leurs homologues rennais en 17893267, font preuve d’un ralliement de façade à l’élévation du troisième ordre contre la Cour plénière. Le jeu politique contre ce qu’ils appellent l’omnipotence ministérielle fait le jeu des nationaux. En effet, selon eux,
« la formation de cette Cour [plénière] n’est qu’une dernière ressource du despotisme ministériel pour éviter l’assemblée des États généraux dont les cours sollicitent la convocation. Qu’on n’y admet point le tiers état, qui forme la portion la plus nombreuse des sujets du roi, à qui on ne peut contester le droit d’entrer aux États généraux »3268.
45Ce « ciment éphémère » entre la noblesse et le tiers état3269 se rencontrait déjà très bien chez les juges bisontins en 17873270. Ainsi, pour certains, l’exclusion de la bourgeoisie « étouffe l’émulation »3271. Si dans un premier temps d’après Saige en 1789, à l’instar de Thouret3272, le tiers état acquiert le pouvoir par une « constitution libre et bien réglée »3273 dans un combat contre la volonté des deux premiers ordres d’écraser le troisième3274, il faut éviter les dissensions nationales3275 parce que ce sont bien les citoyens des trois ordres qui sont appelés à faire fi de leur discorde3276. Il n’a donc pas peur dans un second temps d’en appeler à la noblesse pour montrer le chemin de la réconciliation3277 afin de sauver un « peuple [formant] la masse du corps politique »3278. Ainsi, toute une frange entrouvre la porte de la représentation et pense que le tiers état peut se choisir des représentants parmi la noblesse pour éviter le développement de trois intérêts distincts3279 puisque c’est le mérite et le talent qui doit l’emporter3280. Certains vont encore plus loin car, reconnaissant la position privilégiée de la noblesse dans l’organigramme politique de la monarchie3281, ils indiquent que le tiers état est une partie de cette même noblesse « si non une partie des membres du corps politique qui [la] constitue »3282. Pourtant, la brièveté de l’union ne dure pas entre noblesse et troisième ordre puisque les deux ordres s’arqueboutaient sur les droits féodaux et le « compromis à l’anglaise »3283.
46Le total mathématique sonne le glas d’une société tripartite et annonce l’exclusion des nobles et des ecclésiastiques, synonymes de classes particulières3284 malgré la résistance du baron de Montyon Antoine-Jean d’Auget, par ailleurs conseiller d’État3285. La noblesse représente la « cinquantième partie de la nation » selon Malouet3286. Même si en 1788 le Parlement de Metz3287 et un libelle défendent encore les privilèges ecclésiastiques comme un droit commun et national3288, la pierre d’achoppement reste le problème des privilèges stricto sensu. Laurent-Pierre Bérenger, préfigurant la nationalisation de novembre 1789, affirme que
« le clergé n’a rien ; les biens dont il jouit ont été donnés à l’Église ; ce sont les fidèles qui constituent l’Église ; ce sont les fidèles qui sont propriétaires ; les fidèles forment le corps de la nation. Donc les biens de l’Église appartiennent à l’État »3289.
47Le tiers état est la nation moins la noblesse et le clergé selon Rabaut Saint-Etienne en 17883290. L’idée de corps externe à la nation française et étrangère à celle-ci obsède le Nîmois3291. Sieyès dépasse cependant ce dernier car ce n’est pas seulement une démonstration arithmétique3292. Le tiers état ne peut, selon Sieyès, qu’apporter une positivité à la nation3293 contre « l’aristocracisme »3294 qui constitue un peuple à l’intérieur de la nation3295. L’unité de la nation est une unité politique et non seulement sociologique selon un auteur anonyme :
« La nation est une ; elle n’est point divisée par trois ordres ; mais elle est composée de trois ordres, qui ne font qu’un tout. Cette composition convenable est néanmoins politique et non pas substantielle à la société car la nation pourrait exister et subsister, quand même elle ne serait composée que de la commune ; au lieu que les deux premiers ordres ne pourraient exister par eux-mêmes. Quoiqu’- ainsi composée, la nation n’est donc pas moins une »3296.
48La division de la nation en ordres n’est par conséquent que le fruit d’une distinction civile puisqu’« aucune d’elles ne forment séparément un corps politique, aucune ne peut exprimer séparément les droits de la nation » selon une note manuscrite de Barnave en 17883297. Le cahier de doléances de la ville du Havre est d’un avis identique3298. Même si quelques-uns se posent la question de savoir quelle a été la réalité d’une frontière entre noblesse et clergé riches et tiers état pauvre3299, il n’en demeure pas moins une vaste impulsion d’exclusion à travers une redéfinition nationale nourrissant les attaques négatives contre les deux autres ordres. Les privilégiés, selon le futur journaliste révolutionnaire Jean-Baptiste Salaville sûrement influencé par Rousseau3300, sont des « étrangers [qui] pendant leur séjour se conforment aux lois des pays dans lesquels ils se trouvent »3301. Salaville peut être raisonnablement classé parmi les plus radicaux sous la pré-Révolution en faveur de la souveraineté nationale. Dès lors, les idées du chevalier d’Arcq, appelant à la création d’un quatrième ordre composé par la noblesse, commerçante, sont allègrement évacuées3302. En réaction, il existe pour Volney une nation étrangère qui a des intérêts différents, celle des nobles et des ministres3303. Selon d’Antraigues en 1788, il faut une « mission, un titre national » quant à la possibilité de représenter l’ensemble de la nation et de ce fait les « barons », qui représentent la noblesse, ne peuvent prétendre à ce droit3304. La nation se construit sur le fondement d’une attaque négative contre les privilégiés. Ils sont les images, les protagonistes de tous les maux nationaux, ils sont ainsi comparés à des étrangers préfigurant aussi quelque part l’émigration révolutionnaire même si les privilèges s’épanouissaient normalement au sein d’une nation française unie et pluraliste. D’ailleurs, il est intéressant de noter la mutation du langage pré-révolutionnaire voyant dans les franchises des passe-droits incompréhensibles. Ce vocabulaire sera repris pendant les États généraux. Un libelle violent et haineux de juin 1789 relatera très bien l’évolution sémantique. La noblesse est « une lèpre répandue sur tout le corps politique » et doit être considérée comme distincte et « étrangère » à la nation. Ainsi, la noblesse n’est qu’une « juxtaposition », une « petite nation » face au « tout »3305. La communauté française bénéficie, à terme, d’une homogénéité totale et complète contre la société de corps afin d’atteindre son unité3306.
49Le renversement des valeurs est complet par l’envahissement populaire du champ politique. Dès lors, la sécheresse de l’argument mathématique doit surtout ensuite, pour les partisans du troisième ordre, être revivifiée par la rénovation totale de la masse nationale contre une fronde classique antidémocratique. La réhabilitation du peuple continuera son chemin même après l’ouverture des États généraux avec, entre autre, un pamphlet du 5 juin 17893307. L’opération la plus importante est donc sans nul doute celle qui tend à donner une image plus attrayante d’un peuple si souvent relégué au rôle de bête féroce comme on peut l’observer dans le réflexe capacitaire des futurs libéraux ou dans quelques brochures royalistes. À ce sujet, Chaillon de Jonville confirme les distinctions encore vivaces des préjugés contre la populace. Même si « les peuples [sont] la plus considérable branche de l’État, le nerf de la nation »3308, une interrogation importante demeure :
« Les peuples, dit-on, étaient avant les rois ; ce sont les peuples qui ont fait les rois. Qui en doute ? (…) Mais faut-il en conclure que la souveraineté est restée et réside encore dans la multitude ; que la multitude ait seule le pouvoir législatif »3309 ?
50Avant la convocation des États, les contre-attaques absolutistes étaient intéressantes face à l’argument de la masse nationale : que ce soit par la déficience de maturité du peuple3310, que ce soit par le manque de circonférence sociale3311, que ce soit par la réponse qui consiste à dire que le tiers état ne possède que la moitié des terres du royaume3312 ou que ce soit dans la définition même de la nation comme le comprend Antoine-Louis Séguier. Pour ce dernier,
« une classe n’est pas plus privilégiée qu’une autre mais tous ont la faculté de conserver les droits qui lui ont été garantis : autrement la classe la plus nombreuse serait toujours despote et le peuple serait au-dessus de la nation et du souverain lui-même »3313.
51La force est antinomique à la raison3314, de plus synonyme de « bas peuple »3315. C’est la vraie nation qu’il faut rechercher contre les dires de Sieyès3316. Ainsi, pour Séguier, la place du tiers état aux États généraux « est inconstitutionnelle »3317 puisque c’est une grâce qui devient aujourd’hui une usurpation3318. Il finit par dire que « le peuple fait partie de la nation ; mais il n’est pas la nation »3319. Mais l’argument le plus cynique est sans conteste celui d’un anonyme qui note que le privilégié est l’homme du tiers état car d’esclave, il est devenu libre3320 ! L’argumentaire de l’absolutisme monarchique, en règle générale, reprend à son compte le préjugé du peuple immature3321. « Nous sommes tous frères [affirme un anonyme], tous égaux, dans l’ordre de la nature ; mais celui de la société a nécessité des distinctions que nous devons respecter »3322. Il faut opérer la dissociation entre l’ancien mot populus et le peuple de 1788 dans le combat contre le développement du tiers état ; « cette classe était bien inférieure au populus ou seconde noblesse. Elle était désignée par plebs »3323. L’attaque se situe toujours sur le terrain du vocable peuple, expression véhiculant encore une approche passive, négative au contraire du mot nation. Un auteur influencé par Bossuet, Velly, Coquille, Dumoulin, se pose alors la question suivante :
« Qu’est-ce qu’on entend par ce peuple qui a l’autorité, qui peut faire et défaire les lois, et ceux qui en sont dépositaires ? Est-ce un peuple soumis à quelques règles certaines, au moins pour s’assembler et faire connaître ses volontés suprêmes ? Mais un tel peuple aurait déjà des lois, un gouvernement, des dépositaires de l’autorité, chargés de faire obéir les réfractaires »3324.
52Leroy de Barincourt enfin, dans une diatribe en règle contre le contrat social de Rousseau3325, propage quant à lui l’incapacité politique tenant à la nature humaine3326. Manifestement l’expression quot capita, tot sensu - autant de têtes, autant d’avis - effraie. Pourtant, c’est bien ce schéma qui l’emportera.
53Le peuple français, la nation française, le tiers état possèdent désormais la « lumière », une activité industrieuse et la richesse3327. Cette situation sera confirmée par Barnave pendant la Révolution3328. Pour le mouvement national, le tiers état a « une mission »3329, « une procuration » nationale3330, il est « l’avenir »3331. Le mot peuple est définitivement disculpé par Pétion3332 malgré les différents sens du terme3333. Ainsi, Malouet refuse les termes de « peuple féroce, grossier, faible »3334. Les membres de l’assemblée nationale et provinciale « ont besoin des regards de la multitude » selon Lenoir-Laroche3335 puisque « les idées de la multitude sont saines à la longue »3336. L’objectif de réhabilitation est atteint et implique la prise en compte politique du peuple. La pédagogie politique et nationale porte désormais ses fruits pour le partisan du tiers état Jean Devaines3337. Comme on l’a vu, le siècle des Lumières a préparé le terrain à la métamorphose moderne nationale grâce à l’éducation, la responsabilité, au patriotisme, à l’esprit national mais la contamination se veut aussi locale. Il faut que « le tiers état du Languedoc ne soit plus une vile populace et devienne un grand peuple »3338. On n’a plus peur de faire coïncider les termes de peuple et de nation d’où la continuité de l’ambiguïté. Le peuple est revalorisé, innocenté, il devient un sujet social et un sujet intelligent3339. Ainsi, « la masse du peuple constitue proprement la nation »3340. Rénover définitivement le peuple ne pouvait qu’être effectif car comment résister sur l’argument du nombre si cette même quantité est encore infantile ? À ce sujet, on voit fleurir naturellement une réédition de l’ouvrage de Coyer sur la nature du peuple3341. Des arguments populaires et positifs refont surface comme le peuple en tant que « la plus nombreuse, la plus utile et la plus vertueuse partie des hommes »3342. La presque totalité de la nation que représente le troisième ordre devient désormais la globalité3343. La maturité est reconnue d’autant qu’un autre argument de poids est dévié de son ancienne acception nobiliaire : l’origine historique.
54Il faut noter à juste titre que le référent mythologique, important soit-il dans sa diffusion, ne peut à lui seul posséder une capacité mobilisatrice durable3344 même si « la nation française est sortie des forêts de la Germanie »3345. Dire que la pré-Révolution n’utilise pas les références historiques avec Boulainvilliers, Montesquieu, le Paige, Mably et Sieyès serait une gageure mais affirmer que celles-ci constituent la seule solution réformatrice dans l’accession nationale serait une erreur. Ainsi selon de Casaux, à l’instar de Pierre-Edmé Gautier de Sibert3346 et Camille Desmoulins3347, le tiers état représente les premiers Francs3348. Ces auteurs ne sont pas les seuls à véhiculer une telle idée3349. Souvenons-nous aussi que Sieyès renvoyait les nobles en Franconie. On retrouve ces théories originelles dans quelques cahiers de doléances comme ceux du tiers état de Ballainvilliers3350 ou de la noblesse d’Alençon3351. L’origine pseudo-historique participe elle aussi à cette entreprise positive bénéficiant à un peuple qui a des racines anciennes et donc pouvant faire preuve d’une légitimité politique. Pourtant, elle n’est qu’un complément. Le mouvement national s’attache surtout, plus qu’à un hypothétique passé important soit-il, à formuler un nouveau mécanisme politique. Tout cet arsenal produit des conséquences institutionnelles profondes, le monarque devenant un simple serviteur et exécuteur de la récente volonté nationale souveraine : le prince est désormais « apprivoisé »3352.
Un roi exécutant la volonté nationale
55Pour Prost de Royer, influencé sans nul doute par le Paige3353, le roi n’était, au temps des champs de mars et de mai, « que le rapporteur des grandes affaires », alors que le pouvoir législatif résidait originairement dans la nation3354. L’idée que la nation française est antérieure à son monarque se propage très vite et permet la prééminence du peuple sur son souverain3355. L’expression « un peuple, un roi, des lois » est très significative, par sa hiérarchie, de la mutation institutionnelle en cours3356. Le prince est bien sûr le sujet de toutes les discussions sur sa place dans l’échiquier institutionnel parce qu’il « est contre la nature des choses que le peuple exécute lui-même ses lois »3357. Dans une suite logique, celui-ci est relégué à une simple fonction d’exécution de la loi même s’il est le premier magistrat de la nation3358 : la lignée politique depuis Machiavel, Hobbes, Locke et Montesquieu est reprise ici mais dépassée. Le peuple ne peut, dans une vision rousseauiste marquée, cumuler les deux pouvoirs tout simplement pour éviter une confusion dangereuse dans l’interaction inévitable entre intérêt général et intérêt particulier3359. La nation est reconnue comme un tout dont la représentation est définitivement souveraine à un prince, simple représentant de la nation dans la sphère exécutive. Par conséquent, selon Servan, le roi est « l’ouvrier » choisi par la nation dans la confection de la norme législative, il appartient au peuple français comme la loi3360. En ce sens, c’est un « roi citoyen » que veut Sieyès reprenant l’expression d’Holbach3361. De nombreux libelles emboîtent le pas à l’abbé. N’étant plus que le représentant antique du peuple, il est de ce fait l’image de la législation du passé alors que la nation représente celle du présent. Les causes de cette fonction exécutive royale se trouvent dans la dichotomie pouvoir législatif et pouvoir exécutif malgré la défense absolutiste attaquant la pensée de Volney3362 et la dialectique illusoire de l’union éphémère roi-tiers état3363. Le prince peut alors avoir l’initiative des lois mais dans le respect d’un consentement national a posteriori3364. Le mouvement national, avec l’avocat angevin et futur membre de l’Assemblée législative Joseph Delaunay, propage cette summa divisio devant s’inscrire dans une constitution :
« C’est une loi constitutionnelle de l’État, qui dérive de la nature du gouvernement français, que nul citoyen ne peut être soumis à aucun pouvoir législatif qu’à celui qui est établi par la nation. Or, le souverain n’ayant de force que celle qui lui a été donnée par la volonté générale et la nation ne lui ayant accordé que le pouvoir de faire exécuter les actes authentiques de cette volonté universelle, il en résulte que la puissance législative ne peut émaner que du peuple, que le monarque est soumis à la loi et qu’il n’a de puissance que pour la faire exécuter. Telle est notre constitution. Mais qui l’a faite ? La nation »3365.
56Néanmoins, le mirage d’une fonction royale fondamentale dans le jeu institutionnel est remis en cause par un pouvoir législatif strictement national. Selon Volney, le roi ne dispose du pouvoir exécutif que « parce que la loi est une règle de conduite qui n’a d’effet qu’autant qu’elle est soutenue d’une force qui la fait exécuter : or, cette force réside essentiellement dans la nation »3366. Le roi est un « intendant comptable envers la nation qui [l’a] préposé »3367, il en est « le mandataire » selon Pétion3368, le servant pour Salaville3369, il ne gouverne plus à discrétion d’après Billaud-Varenne3370, c’est un « administrateur »3371, le « premier commis de la nation »3372. Le roi-administrateur se traduit, en définitive, par la définition et la position hiérarchique de la nature du décret :
« Qu’est-ce qu’un prince ? Un membre de l’État, un simple officier du souverain, c’est-à-dire de la nation, qui exerce en son nom le pouvoir dont elle l’a fait dépositaire. Qu’est-ce que l’ordonnance du souverain ? Un décret et pas une loi »3373.
57Le roi se voit donc conférer des attributions régaliennes. Il est le chef des armées3374, il peut passer des traités de paix ou de commerce3375, il est « le représentant de la nation auprès de toutes les puissances étrangères »3376, il peut battre la monnaie selon le futur ministre de Louis XVIII le comte Antoine-François de Ferrand3377, peut recevoir les ambassadeurs des nations étrangères et nommer aux emplois tant civils, militaires qu’ecclésiastiques selon Pétion3378. Ces différents libelles annoncent le titre III chapitre IV de la Constitution du 3 septembre 1791 sur l’exercice du pouvoir3379. Un grand nombre de cahiers de doléances se prononcent identiquement en faveur d’un exécutif royal3380. D’ailleurs, selon le cahier des trois ordres de Bayonne, « le pouvoir exécutif consiste dans ce qu’on appelle en France les droits régaliens »3381. De surcroît et en corollaire à la vision institutionnelle, existe une attaque contre la personne même du roi.
58Le prince est un homme comme les autres et « c’est en vain que la trompeuse flatterie veut persuader [les] souverains qu’ils sont supérieurs à l’espèce humaine »3382. Celui-ci est sujet aux passions et aux erreurs, le préjugé du peuple épars est alors calqué par Pétion sur sa nouvelle personnalité3383. La désacralisation prend donc de l’ampleur et n’épargne aucune faiblesse au prince. Cette perception était déjà en vogue entre la fin du xviième et le début du xviiième siècle3384. Selon le radical national Carra, la nation a crée les rois d’où finalement un monarque humain perçu comme un individu dans la nation3385. Le nombre l’emporte car c’est bien le rex caput regni qui est rejeté, « si la totalité de la nation [dit-il] a distingué une de ses unités pour représenter le tout, cela n’a jamais été que métaphoriquement et fictivement »3386. La fin de la suprématie d’un seul individu contre la massive population nationale n’est que le reflet de la descente en enfer d’une image majestueuse absolue nourrie de religion. La délégitimation est en marche, le roi étant sur le même pied d’égalité que le simple citoyen3387 voire au-dessous de lui pour le virulent Salaville3388. Ainsi, à l’expression « le roi est mort, vive le roi », est substitué par un libelle, « vive la nation » :
« Les rois ne portent le nom de souverain que parce qu’ils sont les images visibles de la cité. Qu’un roi meure, la cité n’est pas moins cité ; que la cité se dissolve, le roi n’est plus qu’un individu »3389.
59La nation permet à l’homme-roi de revêtir le pouvoir restreint d’exécuter ses volontés à travers la norme législative3390. Le cahier de la noblesse de Bugey signale même que « la royauté est un privilège »3391. Ce roi-homme est le produit de la nation et on pouvait s’en apercevoir dès 1781 chez les magistrats bisontins3392. Une pensée de Salaville résume bien la nouvelle fonction de l’exécutif :
« Il s’établit un rapport de mercenarité lorsque l’un paye et que l’autre sert ; il n’en est pas de même lorsque c’est la nation qui paye ; car alors chaque particulier croit recevoir gratuitement, comme individu, les services qu’il a payés comme souverain. D’un autre côté, les membres du pouvoir exécutif, ne devant leur existence qu’à la nation et se trouvant récompensés par elle seule, ne peuvent jamais oublier qu’ils sont les hommes de la chose publique »3393.
60La littérature nationale reprend à souhait l’idée parlementaire du rempart contre le despotisme et la transpose à la dichotomie pouvoir exécutif-pouvoir législatif car là où la nation exerce tous ses droits, il ne peut y avoir d’arbitraire3394. Le schéma roi-nation sera d'ailleurs totalement inversé après l’ouverture des États généraux3395. La nation comme « tout » indestructible a emprunté la pente de l’autonomie et a refusé de se lester du poids d’anciens vestiges ralentissant sa progression. Rien n’a été laissé au hasard. Le dynamisme national s’est toujours articulé contre des corps, des institutions, une histoire afin, tel un phénix, de renaître. Sa transformation en une nation autour de sa principale composante, voire sa seule substance que présente le tiers état, s’est ainsi attachée à sa régénération.
II - UNE RÉGÉNÉRATION PATRIOTIQUE ET NATIONALE
61La charge énergétique du mot régénération apparaît à l’orée de la Révolution comme une seconde naissance même si l’idée n’est pas neuve3396. Le corps national - corps anciennement dévié de sa fonction initiale par les parlementaires - bénéficie d’une révolution salvatrice prenant en compte la nature du peuple. Celui-ci était pour Barnave pendant la Révolution « en état de fermentation »3397. Cette opération patriotique fait le lit à la déstructuration de l’image royale désormais moins apte à représenter métaphoriquement la nation d’où un combat récurrent dans la définition du patriotisme.
§ 1 - La régénération, une révolution positive pour le corps national
La renaissance du corps
62La régénération ne peut s’effectuer correctement sans une analyse succincte des nouvelles attributions du corps physique que constitue la nation au sens figuré comme au sens propre3398. Pour le premier cas, si le philosophe Jacques Barbeu-Dubourg continue à distinguer dans le corps politique la vision traditionnelle du roi-tête, des propriétaires-tronc et des hommes laborieux-membres3399, il faut dire que le peuple français tend à recouvrir ses fonctions vitales et essentielles avec la réattribution de l’âme comme centre unique de commandement selon Salaville3400. En effet, pour ce dernier, « la nation doit être considérée comme un individu, comme une personne morale qui ne peut vouloir que ce qui lui est avantageux »3401. Le roi n’est pas oublié mais il est cantonné au rôle quasi-symbolique d’exécutant. La puissance législative, selon un anonyme plagiant Rousseau,
« est le cœur de l’État. La puissance exécutrice, le cerveau qui donne le mouvement à toutes les parties. Le cerveau, frappé de paralysie, l’individu peut vivre encore ; une fois que le cœur a cessé ses fonctions, l’animal est mort »3402.
63Ainsi, le pouvoir législatif, qui est par essence national, doit suivre les mouvements du corps selon Nicolas Bergasse3403 et Mercier3404. En réaction, la réponse absolutiste se forme autour des assertions de Moreau car selon lui « la nation considérée comme un corps politique ne peut être divisée du souverain »3405. Le monarque est la tête de la nation, l’élément moteur et c’est grâce à ce schéma que le peuple devient une nation3406. En effet, l’auteur distingue clairement les « peuples » de la nation : nation « formant qu’un seul corps, la réunion non seulement de toutes ces associations particulières, mais de tous les individus qui entrent dans la composition de la société générale : voilà ce que j’appelle une nation »3407. Le roi est l’élément fédérateur puisque si la nation veut se passer de lui, elle se désunira forcément et deviendra multitude3408. L’historiographe royal pense bien sûr à la symbiose roi-nation, celle qui vivifie toutes les parties du corps du royaume et permet l’osmose. Le prince est le caput, le chef, le directeur et le docteur du peuple. Cependant, les partisans du mouvement national continuent à véhiculer l’idée d’une nation-homme en passe d’être sauvée par le troisième ordre.
64À l’instar de Sieyès3409, la nation française selon Brun de la Combe est une patiente malade mais l’infection n’est pas incurable3410. Les deux premiers organes du corps que sont le roi [tête] et les États généraux [estomac] vont à peu près bien mais un remède s’impose par une révolution politico-médicale concernant surtout l’appareil digestif3411. D’après Salaville, la nation est « sur un lit de mort [et] toutes les autres nations, les yeux fixés sur son agonie, n’attendent que le moment où elle va rendre le dernier soupir »3412. Mais par une espèce de convulsion, ce corps, près du décès, se redresse grâce au patriotisme3413. Ainsi, la révolution nationale fait œuvre de médicament et de tonifiant. Quelques libelles reconnaissent que ce redressement est une rupture permettant de revigorer un peuple vieilli et de le sortir de la mort3414. C’est l’aspect positif de la révolution qui est prôné et le mot négatif de « rébellion » ne correspond pas à ce bouleversement salvateur3415. Se régénérer fait appel à une révolution complète, à une crise « par les espérances qu’[elle] donne, par la tranquillité qu’[elle] prépare »3416. La table rase est en vue selon un autre brûlot3417. Néanmoins, le discours très violent de Carra ne laisse aucun doute sur de futures heures sombres révolutionnaires :
« La mort est préférable à l’esclavage. Et qu’est-ce que la mort ? Une nuance imperceptible entre l’agitation momentanée du souffle de la vie et le repos éternel. Mais l’esclavage ! L’esclavage ? C’est la honte d’être né »3418.
65Ici aussi la réplique royale est sans appel et ne permet aucun doute sur la paternité des troubles. Les défenseurs de l’absolutisme monarchique ont peur « d’une guerre civile »3419. En effet, reprochant à certains membres du tiers état de vouloir « une constitution sans intermédiaire entre le peuple et le roi », ils craignent une révolution « armée »3420. Servan ne dit-il pas que la révolution est une passion qui peut être incontrôlée car sujette à la découverte et à l’inconnu3421 ? L’organicisme et le principe d’une nation-patiente élargissent alors un discours sémantique propre à la régénération surtout que celui-ci était en puissance dès 1787.
66En effet, le thème de la régénération envahit la dialectique politique et les cahiers de doléances comme celui du tiers état de Draguignan3422. Mais le plus marquant est que les magistrats comme ceux de Pau en 1787 se prononçaient en faveur du rétablissement des États généraux comme « assemblées patriotiques » et comme « le signal d’une régénération »3423. Toutefois, cette formule était synonyme de réforme. Le premier président de la Chambre des comptes de Paris, Aymard de Nicolay, prétendait en 1787 que l’entreprise de grandes économies devait emprunter le chemin de « la régénération »3424 à l’instar du Parlement de Rennes3425. Le Parlement de Metz en 1788 mentionne qu’il revient au roi de « régénérer la nation »3426 sur la même ligne qu’un pamphlet de 17883427. Or, pour le discours national, le tiers état est le porte-drapeau de cette régénération que ce soit dans le cadre général du royaume ou dans le cadre particulier de la province comme celle du Dauphiné. En effet, Lenoir-Laroche écrit que « le tiers état a eu tant d’influence dans la régénération des droits de cette province »3428. Régénérer la nation, au grand désarroi du noble Séguier3429 ou d’un anonyme absolutiste3430, c’est lui permettre de recouvrer tous ses droits perdus ou d’en acquérir de nouveaux, c’est lui donner enfin une « assemblée vraiment nationale »3431 et permanente3432, c’est lui donner une constitution3433, c’est respecter les droits de l’homme3434, c’est détruire les Parlements comme vestiges d’anciens privilèges3435, c’est anéantir la féodalité3436, c’est éliminer les ministres comme « ennemis de l’État »3437, c’est réformer l’impôt3438. Cette régénération du corps de la nation d’une ampleur conséquente ne doit pas faire non plus l’économie d’une introspection quant à son esprit. La nation peut alors receler une substance charnelle et prochaine3439.
Le renouvellement de l’esprit
67À côté de ces demandes de réformes, se développe un autre sentiment, celui d’une révolution en profondeur. La nation atteignant un haut degré de maturité3440 peut alors se revitaliser et se conserver comme le veulent Salaville3441, Saige3442, Cérutti3443 et Pétion3444. La nation française est un enfant, qui devenu adulte3445, a acquis le discernement nécessaire à sa transformation3446. Le moment est arrivé selon Sieyès où la masse de millions d’hommes « entassés sans ordre et sans dessein » devient une « nation »3447 car mature3448. L’abbé pense qu’il est temps de dire la vérité au peuple sur son sort et son avenir3449. Il faut donc pour Bérenger laisser le peuple travailler à la construction de la nation3450. Le peuple doit atteindre un haut degré de plénitude selon un anonyme3451. L’avocat Etienne Chaillon en novembre 1788, à l’instar de Cérutti3452, pense que les hommes du tiers état ont une mission nationale, celle d’instruire le peuple et particulièrement les enfants :
« Élève tes enfants, [dit-il] dans ces nobles sentiments. Apprend-leur toute l’étendue du mot français qui exclut toute idée d’esclavage. Accoutume-les à bégayer les mots de patrie et de liberté »3453.
68Annonçant un pan de la Révolution française, la réussite de la régénération passe par l’intelligibilité des arcanes éducatifs. La nation a la possibilité désormais de prendre son destin en main. La mise en place « d’une société de penseurs » chargée de composer un code s’intitulant « la raison universelle » au service du peuple est demandée par le futur théoricien de la terreur Jean-Louis Seconds3454 même si Barnave pense en juin 1788 que « la populace humaine n’est point encore faite à une philosophie aussi douce »3455. Voici à l’intérieur du mouvement national une première grande césure entre les radicaux, donnant plein pouvoir au peuple-masse, et les « modérés », se réservant le droit et le choix de distiller la pédagogie nécessaire au soulèvement national.
69Comme on l’observe, l’éducation de toutes les parties de la nation revient au centre du débat de la maturité. Selon Mercier,
« l’esprit d’un peuple s’éclaire quand on veut l’éclairer, quand on ne se refuse pas aux efforts des sages, qui ne demandent qu’à propager les lumières. Le peuple le plus ignorant, est en même temps le plus méchant »3456.
70C’est l’accession à un état politique que la nation doit pouvoir atteindre en s’instruisant3457. L’oratorien Louis-Antoine de Caraccioli, dans une attaque ciblée contre les nobles qu’il compare à des « reptiles »3458 et pour qui « la naissance est une chose fortuite et non une vertu »3459, veut revenir à l’état de l’homme. La raison est simple, comment la plus grande partie de la nation peut grandir et s’auto éduquer si on l’affuble du nom de « canaille »3460 ? En effet, « c’est le tiers état qui tient les écoles publiques, c’est lui qui donne des précepteurs et des maîtres »3461. Le renfort à ce sujet de la presse ne peut que seconder utilement l’entreprise éducative selon l’abbé Morellet3462 et bien sûr Malesherbes3463. L’instruction permet selon certains « d’éclairer sur tous les droits de la nation »3464 et de maintenir « les mœurs (…) l’accord et la justesse des opinions nationales »3465. La philosophie continue à montrer la voie à suivre et permet à l’humanité et au patriotisme de régner3466. Même les cahiers de doléances s’engagent sur l’itinéraire strictement éducatif. L’éducation « fait la force et le bonheur d’une nation »3467. L’instruction doit prendre en compte les caractères de la nation française3468 sans pour autant perdre de vue que c’est à la loi de montrer l'exemple, nomophilie oblige3469. Une opération de formation de l’esprit national est déclenchée, poursuivant l’impulsion du siècle3470 et annonçant la Révolution de 17893471. La traduction en pratique prend effet par l’écriture de livres contenant « les principes élémentaires de la morale et de la constitution fondamentale du royaume »3472 et par l’édition d’un « catéchisme constitutionnel » qui sera lu plusieurs fois dans l’année3473. Ainsi, et d’une manière générale, le citoyen et plus particulièrement l’enfant apprendra dans des « maisons d’instruction (…) le droit des gens et le droit naturel »3474. Le rôle de l’Université et surtout des Facultés de droit n’est pas ici négligeable car selon le cahier de la ville d’Orléans,
« les études dans les Universités seront réformées et régénérées, les professeurs dotés et l’instruction rendue gratuite ; le tout d’après les plans et mémoires qui seront présentés par les différentes Universités du royaume ; notamment dans chacune il sera établi une chaire de droit public et national »3475.
71Pourtant, la régénération de l’esprit par l’enseignement a eu en son sein une frange désacralisatrice voire blasphématrice.
72N’ayant peur d’aucun sacrilège, certains auteurs n’hésitent pas à utiliser et dévier Dieu dans leur argumentation politique afin de légitimer le processus régénérateur institutionnel tel Salaville3476, l’adage thomiste non est potestas nisi a Deo per populum étant alors revisité. Selon Lanjuinais
« l’éternel a gravé dans tous les cœurs qu’on ne peut être juge dans sa propre cause. Il n’y a que la nation ou ses représentants qui puissent prononcer sur la réforme de la constitution »3477.
73Souvenons-nous que Rousseau aimait à dire qu’il « import[ait] que l’État ne soit pas sans religion »3478. La puissance de Dieu est complètement détournée par quelques libelles, preuve aussi d’une réalité chrétienne prégnante en 1788. En effet, l’acquiescement du peuple à toutes tentatives de réformes est le signe de Dieu et de son interprétation3479. La religion « est l’instrument de la politique », la bonne religion est « le lien du culte divin avec l’amour des lois ; c’est elle qui, faisant de la patrie l’objet de l’adoration des citoyens, leur apprend que servir l’État, c’est en servir le Dieu tutélaire »3480. Il y a, avec évidemment des arrière-pensées « populistes », une relation immédiate qui est recherchée entre citoyenneté, patriotisme et religion. La nation possède « la plénitude du pouvoir qu’elle tient véritablement de Dieu même par sa nature »3481 ; tout ceci pour sur-légitimer une « révolte » qui ne veut pas dire son nom3482. Il y a donc la promotion d’un véritable contrat entre la nation et Dieu3483. Les thèses monarchomaques restent visiblement d’actualité. D’après Saige, se basant sur le fameux adage paulien, l’être social « est l’auteur de l’État social »3484. Les conséquences institutionnelles ne se font pas attendre. Pour le richériste et avocat au Parlement de Paris G.-N. Maultrot en 1789, l’origine divine du pouvoir est partagée entre le roi et la nation3485. Ainsi, selon lui,
« il faudra reconnaître au moins que les douze cents députés, choisis par la nation française pour la représenter, auront chacun une portion de la puissance céleste tombée sur eux directement du ciel »3486.
74C’est bien l’avènement du tiers état qui a les faveurs du créateur pour un libelle car « dans cette crise nationale, l’être suprême, qui veille au sort des Empires, a suscité le tiers état, qui n’a point l’âme avilie »3487. Bien sûr la rhétorique absolutiste s’oppose à cette déviation religieuse car pour l’abbé Nicolas-Sylvestre Bergier - qui par ailleurs était chanoine de l’Église de Paris et confesseur du roi - parler de « contrat social », c’est faire justement « insulte » à Dieu3488.
75Néanmoins, pour que la vie de la nation-homme régénérée puisse être viable, il faut s’attacher à sa nature propre et lui reconnaître partialement un déterminisme. Ce fatalisme ne peut alors aller à l’encontre de sa mutation naturelle.
§ 2 - Revenir à la nation par nature
Les mœurs nationales, charpentes idéologiques du régime à réformer
76Aimer et respecter son roi est encore une réalité palpable au sein d’une grande majorité d’écrits. La défense absolutiste projette ce sentiment d’affection et se situe en grande majorité sur des fondements institutionnels comme la succession mâle à la Couronne, « sentiment gravé dans le cœur des Français en caractères ineffaçables »3489. Le caractère français a le devoir de chérir son monarque selon Mignonneau3490 d’autant plus s’il est un « roi indigène »3491. Les tenants de la noblesse, influencés par Montesquieu, continuent eux aussi à reconnaître la France comme une monarchie tenant naturellement « à l’esprit de ses peuples »3492. D’ailleurs, dès 1787, on pouvait lire dans un de leurs brûlots que « la civilisation nécessita[it] la monarchie »3493. Il n’est donc pas étonnant de voir le baron de Montyon, à l’instar du cardinal César-Guillaume de la Luzerne adepte de la séparation des pouvoirs3494, dire en 1788 que Sa Majesté
« peut être assurée que de véritables Français se refuseront toujours à l’idée d’un gouvernement inconciliable avec l’étendue de l’État, le nombre de ses habitants, le caractère national, et les sentiments innés, qui, de tous temps, ont attaché eux et leurs pères à l’idée d’un souverain comme à l’idée d’un bienfaiteur »3495.
77De même, le mouvement national accrédite l’idée et le fait qu’il n’y a aucun doute que le caractère français se porte sur la monarchie3496. Selon le député du tiers état de Bordeaux Paul-Victor de Sèze,
« l’esprit monarchique est tellement fondu dans notre caractère national que si nous parvenions à le dénaturer, nous ne quitterions un maître que pour en prendre plusieurs »3497.
78Pourtant, un tel déterminisme ne doit pas figer l’ampleur d’une mutation nationale empreinte de « naturalité » selon Sieyès3498. En effet, l’abbé entrevoit trois périodes dans la création par le « droit naturel » de la nation, la première étant la réunion des individus, la seconde diffusant une volonté commune et enfin une dernière promouvant un gouvernement exercé par procuration3499. La pureté de l’origine nationale est proclamée et ne doit pas s’incliner devant une quelconque organisation positive : « On doit concevoir les nations sur la terre comme des individus hors du lien social, ou comme l’on dit, dans l’état de nature »3500. Il y a donc à la fois une continuité et une rupture dans l’histoire de la nation : le génie national doit désormais en éclairer les méandres.
79Les mœurs, même particulières, ne sont pas immobiles et peuvent subir l’évolution d’une variation politique et institutionnelle selon beaucoup de cahiers de doléances3501. Ce caractère français, jadis relativement aisé à dévier par les parlementaires, est encore le sujet de controverses. L’esprit national ainsi que son physique peuvent-ils supporter les changements à venir d’après Achard de Germane3502 ? La prise en compte tout au long du siècle de la nature de la nation ainsi que son « humanité » donnent du relief à la réponse. Selon Lanjuinais, le génie de la nation et ses mœurs doivent être consultés pour savoir quelle est la forme à adopter lors de sa réunion3503. L’existence d’une nation pluriséculaire suffit à certains pour produire l’argument d’un caractère national transcendant tout pouvoir. À l’instar de Malouet le 8 juin 17893504, Mirabeau ne dira-t-il pas le 18 septembre 1789 :
« Nous ne sommes point des sauvages arrivant nus sur les bords de l’Orénoque (…) Nous sommes une nation (…) sans doute trop vieille pour notre époque. Nous avons un gouvernement préexistant, un roi préexistant, des principes préexistants »3505.
80Les pamphlets de la pré-Révolution avaient déjà entrepris de répondre à la question de l’ancienneté de la nation. Le peuple français si neuf subsiste depuis douze siècles3506. Il a de ce fait de l’expérience3507. La maturité n’est donc pas en cause car la nation peut se remettre en question et décider elle seule de se changer, de se transformer. À ce propos, le thème des mœurs nationales revient en force en 1788 que ce soit dans l’analyse ethnologique stricto sensu, dans l’étude politique ou au sein du combat dans la rhétorique pour ou contre la noblesse.
81La nation a des mœurs et un caractère qui lui donnent la force de penser pour ses propres intérêts reconnaît Billaud-Varenne, surtout que nombre d’écrits s’attachent à promouvoir une nation douée de sens et d’esprit3508. Pratiquement tous s’accordent à dire que le peuple français accroît une originalité ethnologique face, par exemple, à l’Angleterre dans le domaine de la douceur et de l’urbanité contre la vanité des gens d’outre-Manche3509. La particularité française assoit un génie qui lui est propre, celui de la générosité, de l’amabilité, de la gaieté3510. En ce sens, un auteur inconnu affirme que le génie français est contre toute révolution quelle qu’elle soit, la France étant une « nation douce »3511. Toutefois, le caractère français est dans un premier temps pris comme le vecteur directeur de la future réforme du royaume devant se régénérer grâce à la représentation nationale. Les mœurs politiques pourront alors envahir les États généraux, ces assemblées qui ont « toujours été le thermomètre des mœurs » pour un autre opuscule3512. Enfin, selon l’abbé Charles-François Lubersac de Livron, les États généraux sont « absolument au temps présent, devenus indispensables quant au physique de l’État et encore plus quant à son moral »3513. Les conséquences sont donc toutes trouvées même si au départ c’est plus une analyse ethnologique qui est menée.
82Dans un second temps, le principe politique du génie apte à la réforme est utilisé en pratique. Le don national est le ferment et la source de la liberté des hommes selon le Mercier de la Rivière3514. Même si Montesquieu a trop poussé son raisonnement sur les influences climatiques3515, il n’en demeure pas moins que pour Louis-Sébastien Mercier « le génie est encore le véritable souverain qui commande aux esprits »3516, esprit évidemment « national »3517 par essence antinomique au « gouvernement d’un seul »3518. Ainsi, « les mœurs publiques [sont] le miroir où se réfléchit la véritable constitution d’un État »3519 car « toute loi qui n’aura pas été préparée par l’esprit national, ne réussira point et causera des troubles »3520. Rousseau est encore dans tous les esprits3521. Selon le grand vicaire de Rouen Charles-Constance d’Agoult,
« l’existence d’une constitution n’exige point celle d’une charte où tous les droits particuliers du souverain et des différents ordres de citoyens soient détaillés et adaptés aux différentes circonstances. Un pareil contrat ne peut être considéré que comme le développement de principes constitutionnels, qui, pour être applicables à tous les temps, doivent être aussi simples que peu nombreux et se réduire à ceux qui suffisent pour fixer les relations de la nation au souverain, et celles des citoyens entre eux. Il n’est pas même nécessaire que ces principes soient rédigés en forme de loi, pourvu qu’ils en aient la force, et qu’ils fassent tellement partie des mœurs et du caractère national, que le prince ne puisse jamais les faire constamment oublier, ni en étouffer entièrement l’influence »3522.
83Cette liberté peut se retranscrire en pratique dans le mythe de l’origine franque comme le signalent encore le Mercier de la Rivière3523 et le futur député de Paris à l’Assemblée législative Armand-Guy de Kersaint3524. On observe ainsi la redécouverte de thèmes expliqués tout au long du siècle ramenée aux questions pré-révolutionnaires pouvant dépasser le cadre contractuel. En effet,
« cette influence du peuple sur les lois n’est pas une affaire de concession, de convention, ni même de droit, c’est le résultat nécessaire de la nature des choses. Il n’est pas en son pouvoir de s’en dépouiller. Une force étrangère peut opprimer une nation ; mais elle ne peut se mouvoir utilement que par sa volonté »3525.
84Cette question des relations entre les lois et les mœurs connaîtra d’ailleurs une nouvelle vigueur après le 5 mai 1789. En effet, la loi révolutionnaire sera par ce biais « le premier acte de la régénération » car la Révolution voudra opposer les usages aux mœurs3526.
85Enfin dans un troisième temps, le caractère français doit se soulager de l’ancien « esprit noble ». Si certains tenants d’une noblesse encore à même de peser sur le pouvoir souverain n’hésitent pas à propager le principe selon lequel une nation française « brave, spirituelle, polie » est la noblesse3527, le mouvement absolutiste censure la filiation entre le caractère national français et les parlementaires3528. Naturellement, il y a la même attitude chez les nationaux avec par exemple un libelle de février 1789. Selon lui, il existe une concordance entre les mœurs de 987 où le roi Hugues Capet pose l’idée d’un contrat avec son peuple et les mœurs de 1789 car « le fond du caractère national est resté, malgré les progrès inévitables du luxe, qui ont produit l’insouciance et l’égoïsme »3529. La concordance entre l’esprit national et l’esprit noble semble de ce fait bannie.
86La pré-Révolution n’échappe donc pas à la remise en cause des bases naturelles de la nation et surtout à l’accaparement de celles-ci par les défenseurs de chaque courant. Connaître les caractères, les mœurs du peuple français, donne la possibilité de légitimer ou non une révolution en puissance. La réunion des États généraux sera l’occasion d’asseoir les demandes du tiers état sur ce fondement3530. Le siècle des Lumières a été dans ce domaine très révélateur d’une nouvelle quête de l’homme ramené à son état civil mais aussi politique. Des mœurs françaises définies et admises ne pouvaient en définitive que confirmer un postulat qui a fait son chemin tout au long du xviiième siècle, celui d’une nation autonome qui désormais pense grâce à son opinion.
La nation, un peuple qui pense désormais
87La rhétorique des juges utilisait l’opinion nationale à bon escient pour contrecarrer l’action ministérielle. Loménie de Brienne et Lamoignon
« ont usé des moyens les plus vils pour séduire la classe la moins éclairée des citoyens, pour l’exciter à la plainte et à la révolte, et lui rendre suspects ceux qui n’épargnaient aucun sacrifice pour sa défense »
88affirmaient les magistrats rennais en 17883531. Les magistrats bretons sont désireux de ne pas aller contre la force de cette opinion publique et se plaignent derechef auprès du roi d’un arrêt du Conseil fustigeant son attitude3532. En effet, interprètes de la voix de la nation, ils entendent toujours être les « interprètes fidèles de l’opinion publique »3533. Malheureusement pour ceux-ci, l’invocation de la volonté populaire se retourne contre eux. La question de la forme des États généraux est significative de l’impasse politique recherchée par les juges, bien malgré eux. « Le Parlement [de Paris], effrayé de la force avec laquelle l’opinion publique s’élevait contre son arrêté, et ayant le plus vif intérêt de ne pas devenir odieux à la nation », commence à se poser des questions sur l’éventualité d’une remise en cause des formes de 1614, signale un libelle en octobre 17883534. Evidemment, pour le courant national en général et le physicien et naturaliste Jean-Claude de la Métherie en particulier, les formes des derniers États généraux sont censurées par « l’opinion »3535.
89L’opinion nationale ne peut se déployer et « raisonner » que par l’intermédiaire d’une lente source d’information malgré les doutes de Pierre-Louis de Roederer pour qui « l’opinion peut être un monstrueux préjugé »3536, à l’unisson sur ce point avec la ligne absolutiste3537. Toutefois, l’information véhiculée par les libelles et autres pamphlets fait connaître la situation politique du pays3538. Beaucoup d’auteurs ont très bien assimilé l’importance de cette force populaire. La sphère publique coïncide avec le champ politique, celui-ci étant nourri par une agrégation plus ou moins raisonnable d’attitudes, d’avis, d’idées émises dans la rue, par l’intermédiaire d’une élite parisienne et provinciale avide de reconnaissance. Pouvant ranimer le sentiment patriotique3539 et être un « frein à la puissance »3540, l’opinion est pour Servan la réunion rationnelle des sentiments et des idées de chacun3541. Le sentiment public est alors, d’après Gohier, « le vœu manifeste de la nation »3542. Le peuple pense et peut occuper une place politique qui lui revient naturellement comme le disait Mercier3543. La pré-Révolution a non seulement continué à politiser l’opinion nationale mais l’a inscrite dans le droit. Selon Carra, « l’opinion générale est un droit politique de la nation »3544, c’est une liberté politique d’après un anonyme3545. La nation occupe un espace, une sphère influençant les acteurs de la cité. Camille Desmoulins développe alors le principe que l’opinion est seule capable de défendre ses droits3546. La nation française profite, quelque part, d’une juridicisation de son opinion, éclatée soit-elle. Ainsi, les dires a contrario d’un auteur partisan de l’absolutisme monarchique sont significatifs de l’importance de cette conception. En effet, il compare l’opinion publique à une « loi fondamentale »3547. De surcroît, l’opinion publique a acquis un ascendant universel sur les opérations du gouvernement, comme on peut le distinguer dans l’attitude de Necker toujours à l’affût de l’opinion de la rue. La nation est un tribunal, semblable au tribunal divin3548, voulant instruire « le procès » des ministres3549.
« Aujourd’hui [écrit le noble François-Emmanuel de Toulougeon] l’opinion publique s’est élevé un tribunal, que l’autorité même ne peut pas décliner. Ce tribunal est plus éclairé qu’il ne fut jamais : l’économie politique, les libertés des peuples, le pouvoir des souverains, la connaissance des lois ont passé du cabinet des savants dans les cercles de la société »3550.
90Jean-Baptiste Say ira même jusqu’à transformer cette abstraction en réalité par la création d’un véritable tribunal3551. D’ailleurs, la réunion des États généraux rebondira sur une nécessaire presse active3552. Ce nouveau tribunal, renforcé dans un élan régénérateur en 1788, participera à la déstructuration patriotique de l’image royale.
§ 3 - La déstructuration patriotique de l’image royale
L’attaque de la figure paternelle traditionnelle du roi-patrie
91La rhétorique familiale reste pour l’absolutiste et apologiste Bergier encore très présente en 17883553. Le prince est à la fois le chef et le père de la nation selon de Toulougeon3554. Cette idée prend place dans certains cahiers de doléances à travers le qualificatif de « père du peuple » que l’on donne à Louis XVI3555 ou dans l’union naturelle roi-nation3556. Louis XVI est le père commun de la nation, du peuple français3557, même en ce qui concerne les sujets des colonies3558. Néanmoins, pour une grande partie du mouvement partisan du troisième ordre, la nation-famille doit être prise, à l’instar de la dialectique parlementaire, comme une entité à part entière et douée de relatives prédispositions politiques. Le prince n’est finalement que le père symbolique au sein des États généraux3559 chargé d’aider à réformer les institutions sur la base d’une cohésion parentale coordonnée3560. Il faut donc « bénir ce bon père qui appelle au comité de famille » le peuple français3561. Selon Thouret, « c’est comme Français, comme citoyens et comme membres de la grande famille qui est la nation » que le peuple se régénèrera3562. Cette cohésion est pourtant combattue par une frange plus radicale car la famille, de par surtout des préjugés, devient synonyme de l’Ancien Régime tout d’abord par le bouleversement de la hiérarchie au détriment du roi.
92Le monarque est considéré comme un frère au même niveau que tous ses anciens sujets devenus citoyens3563, la nation France voyant d’un bon œil la rébellion de ses enfants. La famille traditionnelle monarchique est désormais perçue comme le symbole d’une situation d’abus face à la progéniture qui a grandi et qui veut finalement s’assumer. On trouve nettement cette idée dans l’exemple des lettres de cachet avec Camille Desmoulins3564.
93Plus en avant, de Roederer s’attache, comme Volney3565, dans un parallèle évident avec la royauté, à définir les contours exacts de la nation-société « conventionnelle »3566 car il refuse l’idée que la « société civile » soit reconnue comme une espèce de grande famille. Selon lui, « la famille n’est point une société, c’est une domination »3567. Cette famille politique, cette famille sociétale est l’enjeu de sa destruction pour une reconstruction, celle d’une nouvelle nation. D’après de Sèze, « quoique nous composions tous une même famille, le tiers état est formé de membres dès longtemps déshérités »3568. Il y a alors trois positions à adopter, celle de Salaville, pour qui le prince, « père de la nation »3569, recoupe nécessairement l’idée d’un être faible, impuissant et passionné3570. Cette attitude ne peut alors que détrôner la famille classique étant donné que le patriarche n’a plus la possibilité d’occuper une place forte et raisonnable. Cette vision en amène une seconde avec la substitution du troisième ordre. En ce sens, un anonyme prône une inversion du cadre familial en donnant la primauté de la fonction de père au tiers état :
« Le tiers état est votre père… Oui, ingrats, en dépit de morgue, le tiers état est votre père, et il l’est à double titre !… Il vous donna naissance et il vous nourrit par son travail »3571.
94À l’instar des parlementaires au milieu du siècle, les nationaux veulent devenir ces pères, ces guérisseurs au détriment du roi. Cependant, comme souvent, un discours encore plus extrême se greffe au débat et exige, dans une troisième attitude, l’abandon de la rhétorique familiale. La position de Carra correspond à cette résolution car pour lui le choix populaire originaire des chefs de la nation doit être remis en cause par le développement des Lumières3572. Le thème familial doit être banni au profit de la nouvelle entité nationale3573. L’exemple des cahiers de doléances de Semur-en-Auxois permet de comprendre que jusque là, les rapports du monarque avec son peuple étaient pensés au sein de l’organicisme mais qu’à cette image biologique s’est substituée une notion mécanique d’équilibre3574. Pourtant, la métaphore patriarcale n’est pas la seule à subir une délégitimation. Il en est une autre en matière de droit pénal avec le crime de lèse-majesté3575.
Ne pas trahir la patrie : de la lèse-majesté à la lèse-nation (25)
95À partir du 14 juillet 1789, un tribunal de lèse-nation est demandé3576. Ce binôme - « traduction constitutionnalisante de l’ancien crime capital de lèse-majesté [faisant appel] à la catégorie républicaine de majestas populi »3577 - a des origines politiques dès le milieu du xviiième siècle3578. Déjà avec un libelle de 1770, toute action qui se détachait de la patrie était « un crime de lèse-patriotisme »3579. Ainsi le chancelier Maupeou, en cassant le consentement de la nation par sa réforme, « s’[était] rendu coupable de crime de lèse-majesté nationale »3580. D’ailleurs en 1774, un pamphlet parlementaire reprenait à son profit cette locution. Dire que les Parlements faisaient trembler le trône était un « crime de lèse-nation »3581. Parallélisme parfait, le combat judiciaire contre l’autorité royale absolue a permis la genèse politique d’un crime national extraordinaire. Le rétablissement des cours souveraines acquis, Rouillé d’Orfeuil, à l’instar de Vattel en 17583582, et de Louis-Joseph Bourdon des Planches3583, commençait à faire glisser imperceptiblement le crime vers une autre entité : la nation-société3584. Dans la foulée, Joseph-Elzéar Bernadi affirme en 1781 à propos des peines contre les crimes publics qui attaquent l’État :
« Ma plume se refuse à calculer les peines dues à ces forfaits. Je craindrais également de manquer à la société ou à la nature. Je frémis de trouver dans l’histoire le nom d’un crime, dont la seule idée fait horreur et qui sans doute ne reparaîtra jamais. O patrie ! O société ! O pères des peuples ! Non, de tels attentats désormais ne souilleront plus vos annales »3585.
96Avec Servan la même année, cette notion criminelle se faisait néanmoins de plus en plus précise contre la nation mais n’était encore qu’à ses balbutiements quantitatifs3586. Visiblement, la patiente construction d’une peine capable de mettre à l’abri juridiquement la nation commence à poindre. Ainsi, quatre ans plus tard, parlant de constitution dans le sens social des trois ordres, le comte de Du Buat Nançay accuse Necker « du crime de lèse-constitution »3587 et pense que le Suisse n’a rien compris au génie national français3588 lorsque ce dernier essaie de niveler la nation en faisant payer les nobles3589. Cependant, il faut attendre 1787 pour que le député de la noblesse du Dauphiné François-Henri de Virieu écrive :
« Tous doivent donc avoir part à l’administration, ainsi que nous l’avons reconnue, et si la grandeur de l’État ne permet pas à tous d’y voter à la fois, c’est un crime contre la majesté du peuple de songer seulement à le priver d’y concourir, au moins par la faculté de s’élire des représentants et de leur donner des instructions »3590.
97La pré-Révolution sera le réceptacle et le laboratoire du futur crime capital révolutionnaire. De même, il faut savoir que cette évolution se couple à une polysémie ambiante au siècle des Lumières. Ainsi, le terme de patrie coïncide parfaitement avec la nation comme on peut le remarquer par exemple dans un libelle de 1789 employant les termes « de lèse-patrie »3591. Néanmoins, dans les cahiers de doléances, le crime de lèse-majesté est l’objet d’interrogations et de discussions que ce soit pour les cahiers des trois ordres de Montfort l’Amaulry3592, du tiers état du Maine3593 ou du cahier d’Uzès en Cévennes parlant de « crime de lèse-majesté divine et humaine »3594 ; expression par ailleurs assez courante dès le xivème siècle. Dès lors, la plus haute peine en droit pénal collera irrémédiablement à la conjoncture politique et suivra naturellement la progression pré-révolutionnaire.
98La rhétorique parlementaire, dans ce domaine, a nourri la translation comme le rappelle à juste titre une brochure de 1788. Ainsi, « le projet d’affaiblir les Parlements sans rappeler la nation, est, comme l’a dit la Cour des aides de Paris, un crime de lèse-majesté royale et nationale »3595. En effet, dans les remontrances de la Cour des aides de Paris du 2 septembre 1768 était écrit que le silence des cours souveraines « aurait été un crime envers [Sa] Majesté et envers la nation »3596. D’ailleurs, la même cour le 5 mai 1788 reprend à son compte cette peine contre les velléités absolutistes en faveur de la Cour plénière3597 à l’instar des juges rennais parlant de crime de « lèse-patrie »3598. Il faut savoir d’ailleurs que les magistrats du Parlement de Rennes maniaient déjà avec beaucoup de dextérité ce binôme à propos de l’impôt en 1787. En effet, selon les officiers bretons, « la déprédation des finances [était] un crime de lèse-nation qu’il est autant de l’intérêt que de la justice du Seigneur roi de ne pas laisser impuni »3599. Les robins, à ce sujet, préfèrent souvent utiliser la notion de traître à la patrie afin sûrement de mettre sur le même pied d’égalité la violation de l’ordre institutionnel et le meurtre ! Néanmoins, la notion de trahison est sûrement privilégiée à cause de son origine médiévale coutumière s’attachant à l’infidélité, à la félonie et au parjure3600. Ainsi, le Parlement de Grenoble s’insurge en 1788 contre l’arbitraire des lettres de cachet car pour lui « un citoyen qui devient suspect à la patrie, est déféré aux tribunaux, en suivant la marche des lois par une plainte juridique »3601. La dialectique nobiliaire monopolise à merveille l’incrimination qui est en réalité destinée à renforcer l’indépendance des juges. En avril 1788, à propos d’un acte d’autorité contre l’avocat général au Parlement de Toulouse Catellan, les juges dauphinois indiquent que « le magistrat qui défend les lois du royaume, est traité en criminel d’État : le citoyen qui ose élever sa voix pour la patrie, est rayé de la liste des grâces »3602. Dès lors, tous ceux qui prendront la place des magistrats et de leurs fonctions « seront réputés traîtres à la patrie » selon le Parlement de Grenoble en 17883603. Achard de Germane, se référant à Montesquieu3604 et à un arrêt du Parlement de Grenoble du 20 mai 17883605, signale qu’« accepter des places dans les tribunaux, c’est également se rendre traître envers la patrie »3606. Ainsi, « tous ceux qui concourent au succès du système ministériel sont donc traîtres à la nation »3607. Identiquement, un pamphlet utilise les mots « traîtres à la patrie » contre les personnes qui assureront pour lui une « constitution servile »3608, constitution qui ne peut qu’être conforme à la position nobiliaire. Le ferment à la grande accusation révolutionnaire est par conséquent en germe pendant la pré-Révolution surtout dans le cadre parlementaire et sera reprise après le 5 mai 1789 en défaveur des officiers de justice3609 ! Cette explication confirme le rôle important des juges dans le développement du crime de lèse-nation surtout que la notion « de traîtres à la patrie » est reprise dans ce sens par certains cahiers de doléances3610. Toutefois, la littérature politique a permis également au crime de lèse-majesté de s’adapter au schéma du discours politique proprement dit relayé en cela par certains cahiers de doléances.
99Pour les cahiers de doléances, la défense des États généraux est la source principale dans la substitution du crime de lèse-majesté. La trahison concernant le refus de convoquer l’assemblée tripartite est un crime de « lèse-nation »3611 particulièrement si les militaires font tout pour contrecarrer cette tenue. On parle alors de crime de « lèse-nation » pour le cahier du tiers état de Rennes rédigé par Lanjuinais3612, de « lèse-patrie »3613, de « crimes d’État »3614. De même, selon un pamphlet de 1789, il faut assurer
« la liberté et l’indépendance des États généraux par une loi sacrée, qui déclare coupable de haute trahison au premier chef, envers la nation, toute personne qui, sous quelque prétexte que ce fût, coopèrerait à une violence contre les États généraux, ou contre aucun de ses membres en fonction, la dévoue comme telle à la proscription la plus étendue, la retranche de la société civile et religieuse, et enfin la désigne à tous les citoyens comme l’ennemi public »3615.
100Ainsi, pour la littérature politique, la plus haute peine en droit pénal s’accommode très bien de la progression politique vers la nation avec la fonction parlementaire - présente un temps -, la symbiose éphémère du peuple et de la Couronne, et enfin la primauté politique d’une nation unie.
101Les Parlements bénéficient au départ de ce couple à travers la rhétorique du despotisme des ministres3616. Saige note en 1789 à propos des magistrats que « loin d’offenser le prince par leur résistance, ils le servent utilement et leur complaisance déplacée les rendrait vraiment coupables de lèse-majesté nationale »3617. Cependant, l’accaparement nobiliaire est très vite remis en cause par la symbiose du peuple et de la Couronne. L’attaque dont font preuve les juges confère à ce crime une effectivité réelle et est annonciateur de dérives révolutionnaires : le « Parlement de Paris, en faisant brûler le Contrat social et l’Histoire philosophique [a] commis un crime de lèse-majesté publique »3618. Les privilégiés que sont la noblesse et le clergé doivent recevoir « la foudre de l’exhérédation et [être] déclarés traître à la patrie »3619. L’unité du roi et de la nation contre les corps intermédiaires se traduit par conséquent aussi à travers la complémentarité du crime capital : « quel crime de lèse-nation, de lèse-majesté l’enfer projetterait-il ? » affirme un partisan de l’union roi-peuple3620. Le monarque est toujours au centre du cadre politique mais celui-ci voit s’unir à lui la marque nationale. Les cahiers de doléances comprennent cet état de fait étant donné que le prince est loin d’être coupé de la nation. S’attaquer au monarque et violer ses droits sacrés mène au « crime de lèse-majesté et nation »3621. On parle dans ce cas de « forfaiture envers le roi ou la nation »3622. Ce n’est pas la fin du roi « si c’est un crime de lèse-majesté et de lèse-patrie d’attaquer l’autorité légitime, la corrompre est le crime de lèse-humanité »3623. Pourtant, le prince, dans ce cas de figure, n’est plus l’unique élément de la souveraineté, il subit irrémédiablement et progressivement une variation, que ce soit pour certains libelles ou cahiers de doléances, avec la présence pressante d’une nouvelle composante : la nation unie. Le glissement est en cours et les droits sacrés du citoyen seuls profitent au crime3624. Selon le cahier de la noblesse de Comminges,
« les infractions de la charte et des droits de la nation seront réputées crimes de lèse-patrie, et ledit crime de lèse-patrie sera irrémissible comme celui de lèse-majesté »3625.
102Ainsi, l’union des trois ordres pouvant être mise en cause par de probables scissions est un « crime de lèse-patrie »3626. Le peuple français, porté par la vague unitaire et ne désirant plus subir son ancienne composition tripartite, épouse parfaitement les effets d’une telle peine et ce même après l’ouverture des États généraux3627. Les conséquences directes font que le privilège est considéré comme « un crime de lèse-nation et un poids accablant sur le peuple »3628. Certains cahiers sont sensibles aux problèmes fiscaux que peut engendrer la défense de privilèges surannés. Les percepteurs sont poursuivis « comme concussionnaires et criminels de haute trahison » si ceux-ci vont à l’encontre de la loi votée par les États généraux3629. Selon le cahier de la noblesse de Dourdan : « Qu’il ne puisse être fait, par l’administrateur des finances, aucune anticipation ni assignation, que sur les revenus de l’année, sans encourir la peine de lèse-patrie »3630. Les efforts envers la nation se tournent en direction de tous les pans de la société et, dès lors, les magasins volontairement fermés ainsi que les pilleurs sont punis « comme criminels de lèse-humanité »3631. Selon l’avocat au Parlement de Paris Claude-François Chauvau-Lagarde :
« Un de ses égoïstes avares, qui, dans les disettes publiques, tiennent leurs magasins fermés ; vole la patrie à laquelle il doit le secours, non seulement de son bras et de son industrie, mais encore de ses pensées ; et je le regarde comme coupable, non de lèse-majesté mais de lèse-majesté nationale »3632.
103Fait quand même important, le crime de lèse-nation est invoqué sans aucune précision sur les modalités du ou des châtiments et ce même peu de temps après l’ouverture des États généraux3633. À aucun moment, il n'y a la volonté de créer un jury national extraordinaire tout simplement parce que le désir de réforme et les luttes intellectuelles et politiques ont loin d’avoir en tête une quelconque haute cour nationale. Or, nier l’origine parlementaire et politique du crime de lèse-nation en cette fin d’Ancien Régime, c’est se mettre des œillères. Comme souvent, la Révolution française a utilisé la sémantique qui était à sa disposition et en a radicalisé quelquefois les effets. Quoiqu’il en soit, trahir le roi dans sa figure humaine et divine a été pendant longtemps le point d’union entre le politique et le sacré, trahir la patrie, la nation, depuis la fin de l’Ancien Régime, a été le pendant idéal d’une mutation désacralisante, grâce à l’appui nobiliaire et à son dépassement, au profit d’un peuple en quête de régénération. Ainsi, renouveler la nation c’est, in fine, se pencher sur le patriotisme comme ferment et lien humain de toute société.
§ 4 - Patriotisme et sentiment national : une coïncidence parfaite ?
L’amour de la patrie entre syncrétisme et « cacophonie »
104À partir de 1788, il existe une difficulté sémantique supplémentaire mais logique dans la progression : celle de la coïncidence nation-patrie que l’on se place du côté des libelles de tendances « vulgaires » et « grand public » ou que ce soit du côté des brochures dont les auteurs veulent construire plus sérieusement un système politique cohérent. Ainsi, d’un côté la patrie, « c’est la nation, c’est la généralité des citoyens »3634 alors que pour Mounier, « c’est la communion d’intérêt, c’est l’observation des mêmes lois »3635. L’axe fédérateur de la fusion est la citoyenneté politique. Cette réalité développe et charge d’affectif le peuple épars et le rend responsable de son nouveau devenir : « L’amour de la patrie, cette âme des nations » affirme, le partisan de Montesquieu, de Murat de Montferrand en 17893636. Il n’est donc pas étonnant d’entendre dire par Thouret que « c’est le sentiment du patriotisme pur et désintéressé qui doit présider à la rédaction du cahier de chaque assemblée »3637. À l’instar de Rousseau, le patriotisme permet à la nation de prendre corps et, selon un libelle,
« quand on a (…) le malheur de ne pas croire aux élans de l’amour de la patrie, ni qu’il puisse en exister dans un royaume peuplé de vingt-cinq millions d’individus, c’est rapporter à sa mesure tous les Français et d’une grande nation faire un peuple de Pygmées »3638.
105Pourtant, cette tendance générale ne doit pas faire illusion sur un sentiment patriotique unanime à l’orée de la Révolution. Quatre affections existent à travers les différents courants pré-révolutionnaires : le patriotisme royal, le patriotisme nobiliaire, le patriotisme en faveur de l’union roi-peuple et enfin le patriotisme « national », celui qui finalement emportera la vision moderne révolutionnaire.
106Pour les absolutistes, le roi n’est pas séparé d’une façon aussi nette de la source patriotique qui tend à se dégager3639. L’amour de la patrie doit s’incarner dans le monarque, amour devant éviter le « suicide » de la nation3640 car dans le cas contraire ce serait établir la république3641. Un patriote est un homme qui défend par tradition son prince, sa patrie contre des corps intermédiaires destructeurs de l’absolutisme monarchique3642. D’ailleurs, le roi réaffirme en avril 1788 la symbiose qui l’unit à la nation. En effet, selon lui,
« si la pluralité dans mes cours forçait ma volonté, la monarchie ne serait plus qu’une aristocratie de magistrats, aussi contraire aux droits et aux intérêts de la nation qu’à ceux de la souveraineté »3643.
107La Cour plénière voulue en mai 1788 est un rempart patriotique, une « élite de la nation », afin de défendre la patrie royale contre « la robe d’écarlate »3644. La réforme Lamoignon échouant, l’arrêt du Conseil d’État portant convocation de l’assemblée des notables pour le 3 novembre 1788 parle, à cette occasion, de « véritable esprit de patriotisme »3645. Les tenants de l’absolutisme ne font que reprendre ici la tendance qu’ils ont toujours défendue pendant le xviiième siècle contre un autre mouvement, celui du patriotisme nobiliaire.
108Sans s’attarder sur les nuances subtiles évoquées par le député de la noblesse d’Agen Philibert de Fumel pour qui « le principe du gouvernement n’est point l’amour de la patrie, c’est l’honneur »3646 ou encore sur les principes de vertus d’un anonyme refusant au peuple tout pouvoir car n’ayant « point idée de la véritable grandeur d’âme »3647, pendant la pré-Révolution, le patriotisme nobiliaire au service du roi et de la nation est toujours très présent. Les Parlements de France s’obstinent à professer un tel sentiment avec les magistrats bordelais3648, palois3649 et parisiens en 17883650. D’ailleurs, la Cour des aides de Paris la même année affirme à propos du dixième que « Louis XVI obtient du patriotisme français ce que son autorité ne pouvait faire »3651. En ce qui concerne la littérature politique stricto sensu, secondant ces remontrances, un anonyme signale que le patriotisme, qui est l’amour du roi, doit avoir comme renfort des « héros pour sa défense »3652, héros qui permettent de faire le lien entre le monarque et ses sujets3653. Ces hommes sont les nobles attendu que
« l’humble citoyen ne peut remplir ni s’occuper des idées sublimes qui conduisent aux vertus et talents patriotiques. Le laboureur dans son champ, le marchand dans sa boutique, voit peu au-delà (…) C’est par la noblesse que le peuple tient à la patrie, c’est par ce lien qu’il est attaché au gouvernement et à son chef »3654.
109La noblesse française « est considérée comme une nation »3655. Les robins sont l’appui patriotique du roi et de la nation selon d’Auget3656 afin, selon un anonyme, de dresser une barrière contre le despotisme ministériel3657. En réaction à la promotion de la Cour plénière par le camp absolutiste, la noblesse de robe se distingue par son « esprit patriotique » face à cette cour composée de « pensionnaires [que le roi établit] sur les fleurs de lys, pour y parler le langage de la servitude et pour bannir le patriotisme »3658. Cependant, la position nobiliaire, malgré quelques cahiers de doléances3659, est sur ce terrain combattue à son tour par l’éphémère liaison entre le roi et son peuple3660.
110En effet, la « vraie constitution est fondée sur l’amour de son pays et de son roi » selon la future rédactrice de la déclaration des droits de la femme et de la citoyenne Olympe de Gouges3661. L’élan roi-nation demande à ce que le patriotisme royal fusionne avec le zèle national puisque le monarque et le peuple de France « sont unis et qu’ils sont inséparables comme l’âme l’est au corps »3662. La symbiose patriotique semble donc exister face au développement du sentiment national coupé du souverain vers l’objectif d’un vœu national commun3663. Ainsi,
« la patrie et la constitution sont sœurs : la patrie n’est qu’une même chose avec le roi et le peuple : elle n’est rien sans le roi : elle n’est rien sans le peuple : elle est tout entière en eux »3664.
111Le thème du bon roi patriote n’est de ce fait pas totalement abandonné mais seulement mis en adéquation au service de la nation à qui il faut rendre une partie de son autorité perdue3665. Le monarque, père de la patrie, s’établit toujours au profit d’un gouvernement équitable3666. Malgré cela, la fusion patriotique roi-nation un temps caressée est encore outrepassée par un mouvement exclusif, celui du tiers état.
112Selon un écrivain anonyme, la régénération passe par le renouvellement du sentiment patriotique lui-même3667. En effet, partant du principe que le patriotisme ne peut avoir de réelles chances d’épanouissement que dans le gouvernement populaire3668, démocratique3669, l’auteur fustige le gouvernement royal et l’accuse de tous les maux : trop mystérieux et fabricant d’ignorants3670. Toutefois, loin quand même d’une telle extrémité, le patriotisme saisi par Mercier est un « amour social »3671. Celui-ci doit, en quelque sorte, se moderniser et se couper de la courante affection royale. Ainsi,
« l’amour de la patrie, recommandée comme vertu morale, est un commandement chimérique, si le citoyen n’est pas attaché à cette patrie par la sûreté et le bien-être qu’il y trouve. C’est un sentiment romanesque, quand il tient uniquement à la gloire d’un monarque qui passe. Autre chose est d’aimer sa patrie ou les lois de la patrie. L’amour du bien public dérive de la connaissance nette des avantages de telle loi politique sur telle autre. L’amour de la patrie peut nuire à l’amour de l’humanité, ainsi que l’amour de soi nuit à la générosité ; mais l’intérêt de la patrie doit l’emporter sur tout autre intérêt, et les hommes y sont plus ou moins forcés, quand même ils ne raisonneraient pas par cet amour »3672.
113Le tiers état est le promoteur à lui tout seul de l’idée de patrie. Déjà en 1787, un pamphlet révélait que le mot « patrie » ne correspondait plus pour la noblesse qu’à un mot sans aucun sens3673, le patriotisme devant revenir à ses origines comme « étant dans la nature humaine »3674 et emprunter le chemin de l’intérêt public contre l’intérêt particulier3675. C’est dans le peuple comme « partie la plus saine de la nation » que doit renaître un tel sentiment3676. Selon un autre brûlot, le troisième ordre est « véritablement l’âme de la patrie »3677. En définitive, la partie la plus nombreuse, privée de presque tous ses pouvoirs, se comporte à son tour négativement envers les autres ordres étant donné qu’elle se considère comme la source originelle du sentiment3678. Si le troisième ordre est le fondement de toute émotion patriotique alors il peut employer et utiliser à son compte les différentes acceptions du terme et s’ériger, comme on l’a vu, en « père de la patrie » selon Carra3679. Le futur maire d’Arles Pierre-Antoine d’Antonelle, utilisant volontiers le glissement sémantique de la patrie-mère nourricière, reconnaît que le tiers état est « le père nourricier de l’État, son défenseur le plus généreux »3680. Le pont est baissé entre les termes de patrie et de nation à travers le référent patriarcal et ce même lorsque les États généraux s’ouvriront pour un libelle de 17893681.
114Ainsi, les trois premiers courants - patriotisme royal, nobiliaire et royal national - ne doivent de la sorte pas dissimuler une direction capitale et pleinement moderne, celle de la cristallisation de la citoyenneté par le patriotisme national, le tiers état étant le modèle à suivre.
La cristallisation de la citoyenneté par le patriotisme national
115La citoyenneté finit, à l’aube de la Révolution, de recevoir ses lettres de noblesse quant à la réalité de son activité contre la passivité de la sujétion. Une telle passation était en germes depuis les années 1770. Selon Carra, il faut que les membres de la future assemblée nationale cessent « d’être sujets » et de faire « des supplications humiliantes »3682. Selon un anonyme, « pour un citoyen la patrie est tout : pour un sujet la patrie n'est rien »3683 au grand désarroi de Caraccioli3684. Cette distinction finit de s’éclaircir avec Mercier pour qui la nation est présente en faveur du citoyen alors que le roi-patrie le fut en faveur du sujet3685. Le citoyen est le nouvel homme dont la nation a besoin dans ce corps social qui tend à devenir abstrait3686, l’éducation, l’instruction, étant l’élément moteur dans le façonnement de la citoyenneté patriotique et nationale3687. La nation doit montrer l’exemple, se reprendre et s’aimer elle-même3688. L’esprit public, somme des intérêts particuliers qui tendent à la satisfaction de l’intérêt général, doit sauver le royaume du « naufrage » politique3689. Le citoyen doit alors montrer un véritable entrain, il a l’obligation de prouver son amour et doit participer à la construction nationale vers l’unité3690. L’homme nouveau ne peut s’acquitter de ces tâches qu’avec son patriotisme : le volontarisme est en vue.
116Ainsi, le patriotisme national se confond avec la citoyenneté politique car l’esprit public est le maître mot de l’appartenance nationale3691. Selon d’Antraigues en 1788, il faut ranimer le ressort qui permet aux Français de former un ensemble cohérent et « d’imprimer à la France le titre honorable de patrie »3692. Pour Sieyès, la patrie sert de filtre à la citoyenneté car la véritable séparation à opérer se trouve dans le service que l’on rend à la patrie, à l’humanité3693. Mais l’apport fondamental de l’abbé est que cette patrie sert finalement à propager le sentiment populaire :
« Laissez, laissez le public dispenser librement les témoignages de son estime. Lorsque dans vos vues philosophiques vous la considérez, cette estime, comme une monnaie morale, puissante par ses effets, vous avez raison (…) C’est un bien du public, c’est sa propriété et la nature plus philosophe que vous, n’a attaché le sentiment de la considération, qu’à la seule reconnaissance du peuple. C’est là, et là uniquement que réside la patrie »3694.
117Le patriotisme royal est mis de côté ad nutum car promouvant l’intérêt particulier3695. « Dans le berceau des Francs se trouve cette vérité : là où le monarque est tout, et où la nation n’est rien, il n’y a pas de citoyen » affirme un libelle3696. C’est l’intérêt général comme « service de la chose nationale » qui étend le patriotisme et vice versa3697. La modernité de la fusion entre sentiment national et affection patriotique est alors consommée. Celle-ci recueille les fruits d’une quarantaine d’années d’idées, de discours, de débats, d’affrontements politiques. Selon Target, à l’instar de Thouret3698, les lumières ne suffisent pas, « c’est de patriotisme, de désintéressement et de vertu » dont la nation française a besoin3699 et ne faisant qu’un avec l’abolition de tout « esprit de corps »3700. D’après un écrivain anonyme, l’esprit public national connote donc une vision unie, celle qui s’attaque irrémédiablement à tout esprit de corps3701. La vénalité des charges tue l’esprit national et l’émulation3702. Bergasse dira même que « l’esprit public ne peut se développer que chez un peuple où le mérite, qui a le droit de prétendre à tout, n’a aucune espèce d’humiliation à redouter »3703 malgré une parade quelque peu pathétique d’un libelle nobiliaire3704. Certains parlementaires continuent d’ailleurs à percevoir les effets de la signification du mot citoyen et se proclament encore à la fois magistrats et citoyens3705. On observe la même idée mais à l’échelon local dans les protestations des avocats de Rennes en 17883706. Toutefois, le mouvement national, à l’image d’Olympe de Gouges en juin 17893707, est convaincu de la liaison, de la fusion définitive entre le citoyen du troisième ordre et la patrie : l’image du corps humain est en ce sens d’une grande utilité.
118D’après Target, « l’esprit national » est facile à recréer car « il faut [le] rattacher à ce qui existe dans le cœur de l’homme »3708. L’organicisme aide volontiers le discours politique à montrer que la passion n’est plus l’apanage de la noblesse mais au contraire celle du peuple dans son entier. Le patriotisme est, selon le rousseauiste J.-B. Raup de Baptestin, le ressort fondamental qui fait se mouvoir les hommes dans la nation et qui garantit l’ordre dans l’État3709. Concevoir « un ordre du mérite patriotique »3710 ne peut qu’exciter l’émulation parmi tous les citoyens3711. Augurant les années révolutionnaires, la communion nationale est recherchée par nombre de pamphlets puisque c’est un gage de stabilité institutionnelle en faveur du gouvernement, de la nation, de la patrie, du peuple français3712. Cette volonté s’approprie le cœur des hommes, des citoyens au service de la cause nationale3713. Le cœur est « le signal de ralliement et des efforts de la nation »3714. Le cœur des citoyens est l’endroit où se rencontrent toutes les volontés patriotiques dans un État libre3715. Mais à côté de cet organe diffusant la passion et le sang, il y a aussi l’âme promouvant l’esprit public contre l’esprit de corps3716. Les Français « doivent être animés d’une seule âme, d’un seul cœur, d’un seul esprit et que sans doute ils ne voudront plus être distingués que par la noble émulation de faire éclater leur patriotisme »3717. D’ailleurs, Brun de la Combe ajoute à ce sujet qu’élever « l’âme, vivifier le génie, ranimer et perpétuer les bonnes mœurs et l’amour de la patrie, est la cause nationale »3718. Pourtant, l’argumentation organique du corps physique national n’est pas la seule à diffuser le principe d’une citoyenneté en symbiose avec le référent patriotique car aimer son pays, c’est aussi le défendre.
119Annonçant Dubois-Crancé le 12 décembre 17893719, le patriotisme pré-révolutionnaire véhicule, pareillement, le thème de la sauvegarde territoriale, le citoyen-soldat devant se tenir prêt à défendre sa nation3720. Il ne faut pas oublier qu’à travers l’union tant voulue, la nation est composée de citoyens de toutes les provinces et, selon un anonyme en septembre 1788, c’est à « la loyauté des Bretons, à la valeur des Dauphinois, au courage des Béarnais, que l’État doit son salut »3721. Cette agrégation particulariste pour la cause commune doit ainsi se généraliser et tendre vers le même but, celui de la défense de la patrie nationale. Selon Barnave en 1788, « le soldat est un citoyen destiné aux armes ; le devoir du soldat est le devoir du citoyen, pour la défense de la patrie »3722. Ainsi, se pose très vite la question, pour quelques libelles, « d’une milice nationale [comme] moyen le plus sûr d’unir la liberté publique et la sûreté de l’État »3723. Les futurs discussions sur les gardes nationales ont elles aussi leurs origines dans la pré-Révolution3724. Néanmoins, il faut faire la différence entre les milices citoyennes et une armée citoyenne. Evidemment, il revient en grande partie au tiers état de fournir le plus grand nombre de militaires car « que feraient les officiers sans les soldats »3725 ? Une armée nationale est un projet coupant le cordon ombilical entre le roi et la nation ou du moins poussant à la transformation de l’ancienne armée royale en armée nationale3726. Les soldats ne sont plus des mercenaires car, en même temps qu’ils servent militairement la nation, ils sont aussi « citoyens avant d’être militaires (…) [ainsi] ce n’est point le roi, personnellement mais la nation qui paye et les entretient »3727. La séparation et la mutation militaires se trouvent dans le serment que les soldats doivent prêter aux États généraux contre les prévaricateurs et les ennemis nationaux3728. Ce divorce n’est bien sûr pas partagé par tout le monde et surtout pas par le partisan roi-nation Cérutti, pour qui, les militaires doivent au contraire prêter serment au « chef suprême des armées »3729. En effet, « tout soldat qui sépare le roi d’avec la patrie, est plus près de la désertion que de l’obéissance »3730. Ce n’est pas le prince qui est en cause, ce sont plutôt les ministres qui auraient une influence néfaste selon Servan3731. Cette armée nationale citoyenne est pourtant le terreau d’un patriotisme agressif :
« Oui, [dit Sieyès] nous pouvons maintenant haïr tout haut les ennemis internes de la nation. Ce sentiment patriotique se communique rapidement et devient comme un acte de justice publique »3732
120et la pensée de Gabriel Sénac de Meilhan en 1787 s’éclaire tout d’un coup3733. Citoyenneté et patriotisme ne font en définitive que nourrir l’obligation à chacun d’appartenir à la nouvelle communauté nationale comme pour le clergé.
121La citoyenneté patriotique et politique doit pousser les ecclésiastiques à professer un « culte national »3734. Même si Boissy d’Anglas redoute la « tyrannie épiscopale »3735, la grande majorité des libelles nationaux ne développe aucunement une haine féroce envers le premier ordre jusqu’à l’ouverture des États généraux mais souhaite seulement trouver une nouvelle fonction aux représentants du culte catholique. Bergasse pense en 1789, dans un souci éducatif et citoyen, établir dans chaque quartier de Paris, une école chrétienne dont la moralité doit être sans faille. Ainsi, « la génération naissante donnerait de meilleur citoyen (…) le bonheur de la nation en dépend »3736. Une brochure anonyme signifiait au roi en 1787 que les ecclésiastiques étaient « les préposés à l’instruction et à l’édification publique de ses sujets »3737. Le plus important est que le clergé ne doit pas se mettre hors de la nation ou se prétendre « étranger à la nation »3738. Les hommes d’Église « qui sont chargés que de choses spirituelles » dans une constitution bien réglée, ne peuvent « empêcher le bonheur temporel des nations »3739. Le premier ordre de la nation doit désormais se fondre au sein d’une organisation unique, celle du peuple et se cantonner à sa fonction principale, celle de la foi3740. Pourtant, dès l’ouverture des États généraux, les ecclésiastiques, à l’instar des nobles, sont accusés de bloquer la volonté nationale commune par le repli sur leurs prérogatives. Certains pamphlets sont d’une violence inouïe. Cérutti, aux alentours du 6 mai 1789, fustige les « croix d’or pendantes sur les poitrines épiscopales »3741. On regrettera vers le 20 mai 1789 les « astuces archiépiscopales et le faux patriotisme de certains sérénissimes »3742. On assure début juin 1789 que le clergé est « l’instrument aveugle de la haine des nobles »3743 et traître envers la nation3744. Les débats sur la réunion des ordres a permis l’éclosion de haines irrépressibles sur le fondement d’un patriotisme national devant commencer à se délester de tous les obstacles à son épanouissement.
122Le peuple français, à l’image d’une chaîne dont les anneaux on été enfilés un par un, s’est transformé en nation. L’impression en trompe-l’œil d’un schéma ordonné saute aux yeux étant donné que ce peuple si décrié mais si choyé, tout au long du xviiième siècle, a connu en 1788 les joies d’un plébiscite sans précédent. Néanmoins, la solution nationale s’est construite à force de rejets politiques logiques déniant, par souci pratique, la réalité pluraliste de la France. Grâce à des hommes comme Sieyès, Mounier, Thouret, Servan, Barnave, Volney, d’Antraigues, ces hommes qui feront la Révolution de 1789, la nation a fondé son indéfectible unité. Régénérer son corps et son esprit pour que celle-ci pense, agisse afin de se délier de son chef traditionnel et permette à ses différents éléments de s’unir grâce au patriotisme, est le résultat du « tout » national. Le cortège des différents protagonistes de cet élan a amassé et densifié le référent national afin d’huiler un système monarchique grippé. Aussi irrévérencieuses soient-elles, ces idées permettront de dire un jour pas très lointain que le patriotisme est l’amour de la Révolution. La nation politique, par son renouvellement, ne pouvait alors prendre pied qu’à travers la sécurité juridique d’une organisation constitutionnelle.
Notes de bas de page
3033 B.-C. Shafer, « Bourgeois nationalism », op. cit., p. 36.
3034 L’innovation utile ou la nécessité de détruire les Parlements ; plan proposé au roi, s.l., 1789, BN Lf25 10 p. 9. « La convocation des États généraux sur le pied de 1614, demandée par le Parlement de Paris ; convocation qui a perdu pour jamais le Parlement dans l’esprit de la nation et qui peut perdre le plus long avenir de la nation elle-même », (M-J. Servan, Avis au public et principalement au tiers état, Paris, Robin, 10 novembre 1788, p. 15).
3035 J. Egret, « La révolution aristocratique en Franche-Comté et son échec (1788-1789) », RHMC, 1954, t. 1, p. 264.
3036 V.-R. Gruder, « Un message politique adressé au peuple », op. cit., pp. 190-193.
3037 La chute des trois corps, s.l.n.d. BN Lb39 768 p. 1.
3038 S.-N. Linguet indique, dans une politique du pire, que les parlementaires aspirent à détenir le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. Ce sont des menteurs et n’ont avec eux que des projets obscurs et mensongers. Ils donnent pour preuve le prétexte des formes de 1614 afin de soutenir les privilèges des nobles, faire alliance avec le clergé contre le tiers état, tromper le peuple. C’est une « robinocratie » qui un jour pourra « arrêter » le roi. Ainsi, le Parlement pourra accuser qui il voudra et sera, en parallèle à l’image de la substitution nationale, un « souverain au petit pied », (Catéchisme des Parlements, s.l.n.d. BN Lb39 936 pp. 3, 4-5, 6, 8, 11).
3039 S.-N. Linguet, La France plus qu’anglaise, Bruxelles, 1789, p. 125.
3040 Ibid., p. 127.
3041 Ibid., pp. 61-65.
3042 « Je cherche, dans les fastes de la monarchie, quelles sont les différentes raisons qui ont déterminé nos rois à convoquer les États généraux ; je trouve que les guerres de la nation, les besoins extrêmes de l’État, les difficultés qui s’élevaient pendant les minorités, ou au sujet de la succession à la Couronne, les abus qui s’étaient introduits dans l’ordre judiciaire, ont été, dans tous temps, les motifs de ces sortes d’assemblées », (S.-H. Linguet, Catéchisme des Parlements, op. cit., p. 22).
3043 P.-P. Leroy de Barincourt, La monarchie parfaite ou l’accord de l’autorité d’un monarque avec la liberté de la nation qu’il gouverne, Paris, Briand, 1789, BN Lb39 1296 p. 75.
3044 Instructions sur les assemblées, tant générales que particulières, depuis le commencement de la monarchie jusqu’à nos jours, Paris, Royez, 1787, BN Le1 7 pp. 70-71 ; Observations sur les Parlements, s.l., 1789, BN Lb39 937 p. 4 ; Recherches sur les États généraux, s.l.n.d. BN Lb39 725 pp. 15, 18-19 ; À la noblesse bretonne, s.l.n.d. BN Lb39 597 p. 13 ; J. Lescène Desmaisons, Qu’est-ce que les Parlements ?, La Haye, 1788, BN Lb39 575 pp. 16, 31-32, 45. Lescène Desmaisons sera d’ailleurs juge de paix du Faubourg de Montmartre.
3045 A. Goudar, L’autorité des rois de France est indépendante de tous corps politiques, Amsterdam, 1788, BN Le4 60 p. 38.
3046 Au peuple sur les vrais intérêts, s.l.n.d. BN Lb39 6351 p. 2.
3047 Ibid., p. 4.
3048 Ibid., p. 9.
3049 Ah ! ah ! Conférences sur les affaires du temps, op. cit., p. 9.
3050 Mémoire au roi, s.l.n.d. BN Lb39 6458 p. 7.
3051 Ibid., p. 11.
3052 Ibid., p. 3.
3053 « Une équivoque a-t-il pû séduire votre orgueil ? Ce mot de Parlement, qui signifie en Angleterre États généraux, a-t-il pû vous faire penser que vous représentiez les États généraux de la France jusqu’à ce moment » ? (ibid., p. 23).
3054 Ibid., p. 10.
3055 Cf. la thèse en préparation de M. Stéphane Baudens : « Défenses et justifications de la monarchie absolue en France, (1715-1789) ».
3056 J.-A. de Condorcet, Sur les fonctions des États généraux et des autres assemblées nationales, t. 2, s.l., 1789, BN Lb39 1299 p. 254.
3057 Réclamations du tiers état au roi, s.l.n.d. BN Lb39 570 p. 5.
3058 J.-J. Lenoir-Laroche, Dénonciation au public d’une prétendue protestation de quelques membres de la noblesse et du clergé du Dauphiné, Paris, 28 février 1789, pp. 16-17. Lenoir-Laroche est député du tiers état de Paris hors-les-murs et sera un futur constituant.
3059 « Les cours souveraines sont des corps toujours subsistants par la nature de leurs fonctions, mais elles n’ont que l’ombre de la puissance. Elles ont donné plus de preuves de courage et de patriotisme dans plus d’une circonstance ; plus souvent encore elles ont trahi la cause de la nation, celle du peuple surtout, pour la conservation de leurs intérêts personnels, de leurs prérogatives, de leurs droits », (J. Pétion de Villeneuve, Avis aux Français sur le salut de la patrie, s.l., 1788, BN Lb39 755 p. 30).
3060 J.-A. Borelli, Examen des droits respectifs du monarque et de la nation, Paris, Laurent, 1789, BN Lb39 1842 pp. 17-18.
3061 Réflexions sur les pouvoirs et instructions à donner par les provinces à leurs députés aux États généraux, s.l.n.d., p. 11.
3062 « Les magistrats ne sont essentiellement que les exécuteurs des lois ; leur donner le pouvoir d’interpréter la loi, de la modifier, c’est leur donner la puissance législative. Leur permettre d’admettre ou de rejeter une loi, c’est les exposer à la tentation d’admettre des lois qui leur sont favorables, et ne le sont pas au public ; de rejeter des lois utiles à la nation, et dangereuses pour eux. Les magistrats doivent, comme les autres hommes, mériter l’estime générale, par leurs talents, leurs vertus, leur conduite privée et publique », (A. Diannyère, Rêve d’un bon citoyen sur les lois, sur un code national et sur les Parlements, à l’usage de ceux qui veillent pour la nation, s.l., 1789, BN Lb39 1362 p. 28). Diannyère est médecin.
3063 De la constitution française ou les lois fondamentales du royaume, par MM.***, Lausanne, 1789, BN Lb39 1293 p. 35.
3064 H.-G. Riquéti de Mirabeau, Suite de la dénonciation de l’agiotage, s.l.n.d., p. 73.
3065 C.-F. Volney, Des conditions nécessaires à la légalité des États généraux, s.l.n.d., BN Lb39 672 p. 10.
3066 E. Mignonneau, Observations sur l’égalité de représentation prononcée par le roi en faveur du tiers état, s.l., 1789, BN Lb39 991 pp. 24-26.
3067 Mémoires de la noblesse de Franche-Comté, s.l., 1er octobre 1788, p. 14.
3068 Cahier de la noblesse du Bourbonnais, (A.P., t. 2, section III, art. 2, p. 446) ; cahier de la sénéchaussée de Quimper, (A.P., t. 5, chap. IV, art. 2, p. 515).
3069 Cahier du tiers état du pays de Rivière-Verdun, (A.P., t. 5, art. 10, p. 586).
3070 Cahier du tiers état de Lannes, (A.P., t. 3, art. 8, p. 106).
3071 Cahier de la noblesse d’Anjou, (A.P., t. 2, art. 8, p. 33) ; cahier de la noblesse d’Aix, (A.P., t. 1, p. 694) ; cahier de la noblesse de Bigorre, (A.P., t. 2, art. 2, p. 360) ; cahier du tiers état d’Auch, (A.P., t. 2, art 5, p. 94). Dans le cahier de doléances du tiers état du Bourbonnais, 1ère section, art. 6, est écrit : « Qu’aucune cour de la nation ne puisse se dire mandataire du peuple pour consentir ou modifier la loi passée aux États généraux, mais seulement pour en recevoir le dépôt, la rendre publique et en maintenir l’exécution », (D. Chassenieux, Les élections, les députés et les cahiers de doléances des trois ordres de la province du Bourbonnais aux États généraux de 1789, Le Mayet de Montagne, Editions des Cahiers Bourbonnais, 1979, p. 51).
3072 Cahier de la noblesse de Comminges, (A.P., t. 3, p. 22).
3073 Aux trois ordres, s.l.n.d. BN Lb39 7193 p. 1. « L’enregistrement des édits dans les cours - formalité purement matérielle lorsqu’il y a des États généraux et dont on peut se dispenser - formalité qui est une usurpation du pouvoir national lorsqu’on veut suppléer par elle aux assemblées nationales », (Un plébéien à M. le comte d’Antraigues sur son apostasie, sur le schisme de la noblesse et sur son arrêté inconstitutionnel du 28 mai 1789, s.l., juin 1789, BN Lb39 1772 p. 7).
3074 A.-P. Barnave, Introduction à la Révolution française, in Œuvres de Barnave, t. 1, notes de B. de la Drome, Paris, J. Chapelle, 1843, p. 80.
3075 C. de Casaux, Différence de trois mois en 1788, s.l., 1788, pp. 15-16. De Casaux est membre de la Société royale de Londres.
3076 Inspiration de la grâce suffisante et qui suffira au tiers état, À l'Orient, 1789, BN Lb39 1081 p. 11.
3077 Ultimatum d’un citoyen du tiers état ou mémoire des princes présenté au roi, 2ème édition, s.l., 1789, BN Lb39 912 pp. 11-12.
3078 Ibid., p. 13.
3079 Ibid., p. 15.
3080 « Si nous n’avons pas en France de corps intermédiaires, à plus forte raison n’avons nous pas de premiers sujets car, par premiers sujets vous entendez, Messeigneurs, des individus que la naissance revêt d’une certaine portion d’autorité publique, qui les rend, pour ainsi dire, médiateurs entre le roi et la nation. Ce sont, Messeigneurs, ces espèces de médiateurs nés que la monarchie rejette de son sein », (ibid., p. 17).
3081 Ibid., p. 18.
3082 Ibid., p. 25.
3083 Le despotisme des Parlements ou lettre d’un Anglais à un Français sur la révolution opérée dans la monarchie française par l’enregistrement de la déclaration du 23 septembre 1788, Londres, 1788, BN Lb39 635 pp. 27-28 ; Entretiens politiques d’un père et d’un fils ou supplément aux doléances de la nation envoyé aux trois ordres de l’État convoqués par le roi à Versailles le 27 avril 1789, s.l.n.d. BN Ms Fr. 10235 f° 13.
3084 J.-J. Mounier, Lettre écrite au roi par les trois ordres de la province de Dauphiné sur les États généraux, Romans, 8 novembre 1788, p. 3.
3085 Ibid.
3086 Avis aux bons français de tous les ordres, s.l.n.d. BN Lb39 6691 p. 10.
3087 Ibid., p. 11.
3088 Ibid., p. 14.
3089 Credo du tiers état ou symbole politico-moral à l’usage de tous les amis de l’État et de l’humanité, s.l.n.d. BN Lb39 1102 p. 17.
3090 Ibid., p. 12. Cf. aussi De la puissance monarchique et du pouvoir judiciaire, s.l.n.d. BN Lb39 6465 pp. 15-17.
3091 J.-N. Guyot, Traité des droits, fonctions, franchises, exemptions, prérogatives et privilèges, Paris, Visse, 1787, pp. 1-2.
3092 « Ce n’est plus seulement la noblesse maintenant, ce sont tous les citoyens qui sont prêts à voler sur les pas de leur roi à la défense de la commune patrie », (G. Brizard, Modestes observations sur le mémoire des princes faites au nom des 23 millions de citoyens français, Paris, Imprimerie Nationale, 22 décembre 1788, BN Lb39 872 p. 25).
3093 Ibid., p. 29.
3094 La chute des trois corps, op. cit., p. 1.
3095 « Que les vrais citoyens et les vrais patriotes cessent donc d’appeler cause nationale la cause des corps destructifs de l’ordre ! Que l’intérêt des citoyens royalistes et celui des citoyens nationaux ne forment plus désormais qu’une seule cause, qu’un seul intérêt ! Tels sont les vœux que forment les citoyens nationaux et royalistes » (Canevas des délibérations des États généraux de l’année 1789, s.l., 1788 BN Lb39 740 p. 35).
3096 J.-P. Rabaut Saint-Etienne, Considérations sur les intérêts du tiers état adressées au peuple des provinces, s.l., 1788, BN Lb39 758 p. 33.
3097 « Quelle est la nation française ? C’est une portion d’hommes la plus utile et la plus nombreuse, qui, depuis Brennus jusqu’à la Fayette, n’a cessé de remplir l’univers du bruit de ses exploits militaires et de sa générosité ; c’est ce peuple, qui, après avoir gémi quatre siècles sous le joug des moines et des brigands, fut réintégré dans le premier droit de la nature par ses rois bienfaisants ; c’est ce dernier de tous les ordres, pépinières des deux autres, qui, depuis le berceau de la monarchie jusqu’aux plus hautes périodes de sa splendeur, n’a cessé d’être écrasé dans ses foyers, par ceux-là qu’il enrichissait. C’est cette classe toujours active et laborieuse, toujours enchaînée, toujours avilie, qui, lasse enfin de tant d’opprobres, a connu sa vigueur, sa puissance et le droit qu’elle a de les employer », (M.-A. Mangourit, Le tribun du peuple au peuple, Paris, 1788, BN Lb39 6460 p. 6).
3098 S.-N. Linguet, Protestations de M. Linguet contre les arrêts du Parlement de Paris des 25 et 27 septembre 1788, Bruxelles, 7 novembre 1788, BN Lb39 6617 p. 10.
3099 Ibid., p. 9.
3100 « Français honnêtes, Français sensibles, Français vrais patriotes, Bretons, Parisiens, Provençaux, Bordelais ou autres membres de la grande confédération qui forme sous ce nom envié, mais révéré, la première monarchie de l’univers ; peuple qu’aucun désastre n’a encore pu abattre, aucune infortune déshonorer ; peuple dont l’union a jusqu’ici fait la force, la fidélité et la grandeur, voyez donc où vous en êtes, et vers quel abîme vous précipite une facilité funeste à embrasser des intérêts qui vous sont étrangers », (S.-N. Linguet, Réflexions sur la résistance opposée à l’exécution des ordonnances promulguées le 8 mai 1788, Bruxelles, 1788, BN Lb39 6454 p. 25).
3101 Avis au peuple, s.l.n.d. (AN K 160 pièce imprimée 740 p. 3).
3102 G.-J. Target, Suite de l’écrit intitulé : Les États généraux convoqués par Louis XVI, s.l.n.d. BN Lb39 1174 p. 36).
3103 « Nous sommes Français, nous sommes nobles, nous revendiquons nos droits ; mais pour qui ? Pour l’avantage commun et du roi et de la nation. Eh ! Ne savons-nous pas qu’en France ils sont inséparables », (Lettre d’un gentilhomme bourguignon à un gentilhomme breton, sur l’attaque du tiers état, la division de la noblesse et de l’intérêt des cultivateurs, s.l., 1789, BN Lb39 625 p. 18).
3104 « Oui, Français, ce système qui semble élever l’âme de tout citoyen, est absolument dangereux ; car supposant que les États généraux puissent disposer de la Couronne, le peuple en serait-il moins soumis au joug ? Il faut, de nécessité, que la souveraineté existe quelque part ; or il est mathématiquement prouvé qu’un corps en abuse davantage qu’un roi : ce serait admettre deux souverains », (Entendons-nous ! Dissertation sur le mémoire des princes présenté au roi par M. B. de C***, Paris, Lagrange, 1789, BN Lb39 911 p. 5).
3105 Face à la tentative d’unité royale nationale, une autre tendance, monarchiste absolutiste, se déploie par l’intermédiaire du théologien C.-L. Richard et de P.-L. Gin. Pour le premier, « l’unité de Dieu, unité de foi, unité de roi, unité de législateur, unité de loi, unité de tête pour dresser la loi, unité de tribunal pour enregistrer la loi, unité de pouvoir pour faire exécuter » doivent primer, (Lettres flamandes à un ami français sur les différends du monarque de France avec ses Parlements, Lille, s.d. BN Lb39 577 p. 30). Pour Gin, le roi, bienfaiteur de ses peuples, « législateur » et « père de famille », doit permettre l’unification de tous les intérêts particuliers « dans le seul intérêt public ». S’il reconnaît que le vœu de la nation « ajoute à l’autorité des lois » par l’intermédiaire de « l’opinion publique », cette reine du monde, il n’oublie pas de dire que « la monarchie étant l’image du gouvernement paternel, les assemblées nationales sont, s’il est permis de parler ainsi, comme indigènes à cette constitution », (Nouvelle lettre d’un patriote à un magistrat sur les questions agitées à l’occasion de la prochaine tenue des États généraux, s.l.n.d. BN Lb39 713 pp. 28, 11, 26, 15). Gin était avocat au Parlement de Paris en 1747, secrétaire du roi en la grande chancellerie entre 1753 et 1786, conseiller au Parlement Maupeou et conseiller au Grand Conseil de 1774 à 1791.
3106 Lettre d’un conseiller au Parlement de Paris à un conseiller du Parlement de Normandie, Londres, 16 août 1787, BN Lb39 6331 p. 15.
3107 Ibid., p. 17.
3108 « Notre monarchie est absolue ; nos rois renferment la toute puissance dans leur personne ; notre gloire est de nous identifier tellement avec eux que la nation ne puisse faire qu’un seul corps avec son roi », (ibid., p. 14).
3109 Ibid., p. 12.
3110 Ibid., p. 1.
3111 Ibid., pp. 23, 28.
3112 Ibid., pp. 12.
3113 J.-F. Féraud, Dictionnaire critique de la langue française, v° « Anti-national », t. 1, Marseille, Jean Moissy, 1787-1788, p. 113.
3114 A.-P. Barnave, Introduction à la Révolution française, op. cit., p. 93.
3115 « L’idée d’un roi débiteur à sa nation et d’une nation créancière de son roi, ne peut jamais s’adapter au système monarchique qui veut absolument que le souverain et ses sujets ne forment ensemble qu’un seul corps », (P.-P. le Mercier de la Rivière, Les vœux d’un Français ou considérations sur les principaux objets dont le roi et la nation vont s’occuper, Paris, Vallat la Chapelle, 1788, BN Lb39 743 p. 128).
3116 « La puissance législative appartient au roi et à la nation ; le roi et la nation doivent confier la puissance exécutrice à des hommes qui leur conviennent mutuellement. Ainsi une province, pour chaque place vacante, présenterait trois personnes au roi qui en choisirait une. Toute autre nomination qui ne rentre pas dans celle-là, est nécessairement absurde, illégale et anticonstitutionnelle », (A. Diannyère, Rêve d’un bon citoyen, op. cit., p. 29).
3117 F.-A. Boissy d’Anglas, Adresse au peuple languedocien par un citoyen du Languedoc, s.l.n.d. BN Lb39 6542 p. 21.
3118 P.-V. Malouet, Avis à la noblesse, s.l.n.d. BN Lb39 770 p. 16.
3119 A. Morellet, Projet de réponse à un mémoire répandu sous le titre de mémoire des princes, s.l., 21 décembre 1788, BN Lb39 868 pp. 37-38.
3120 Le tiers état éclairé ou ses droits justifiés, s.l., 1788, BN Lb39 6703 p. 8.
3121 Le plus fort est fait, les droits du peuple sont reconnus au tiers état et particulièrement aux membres de cet ordre qui seront députés aux États généraux, s.l., 1789, BN Lb39 1352 p. 37.
3122 « Jamais le roi n’a prétendu ni pu prétendre au droit de choisir les représentants de la nation, encore moins peut-il prétendre au droit de vendre la place de représentants », (E.-L. d’Antraigues, Second mémoire sur les États généraux, s.l., 1789, BN Lb39 1164 p. 68). Le comte s’attaquait surtout au despotisme, c’est-à-dire à l’absolutisme monarchique incarné par les ministres. Il veut donc une alliance entre toutes les couches de la population contre ce fléau, (R. Barny, Le comte d’Antraigues : un disciple aristocrate de J.-J. Rousseau, Oxford, The Voltaire Foundation, 1991, p. 127).
3123 « Treize corps despotes dans le royaume et un procureur-syndic des Français dont le ministre se borne à proposer modestement aux cours ce qu’il croit avantageux à ses commettants (…) C’est leur coupable facilité à enregistrer les intérêts qui ne tombent que sur le peuple, qui donna l’idée à nos souverains de négliger de l’assembler ; il est effectivement bien plus commode d’écraser le tiers état que de le consulter », (Le despotisme des Parlements ou lettre d’un Anglais à un Français, op. cit., p. 24).
3124 En effet, si l’on ne devait prendre que deux exemples, les cas du comte d’Antraigues et de Linguet seraient idéaux. Adepte d’une promotion nationale sans équivoque en 1788, le comte d’Antraigues, par plusieurs discours en mai 1789, changera totalement de direction et privilégiera son ordre naturel, (discours du 11 mai 1789, A.P., t. 8, pp. 32-34 ; discours du 28 mai 1789, A.P., t. 8, pp. 52-55). Trois libelles de juin 1789 le regretteront amèrement, (Avis à M. le comte d’Antraigues, député aux États généraux pour la noblesse dans la sénéchaussée de Villeneuve-de-Berger Vivarais, s.l.n.d. BN Lb39 1774 pp. 1-4 ; Lettre à M. le comte d’A…, député de la noblesse aux États généraux, écrite par un de ses amis le 8 juin 1789, s.l.n.d. BN Lb39 1817 pp. 3 et s ; Un plébéien à M. le comte d’Antraigues, op. cit.). En ce qui concerne l’avocat Linguet, virulent partisan d’une politique royale absolue unie au peuple, la trahison au profit du seul tiers état sera consommée le 12 juin 1789 dans un libelle intitulé : Serait-il trop tard ? Aux trois ordres, s.l., 1789, BN Lb39 1830.
3125 Parmi d’innombrables brochures, un libelle nancéen indique que le poids de la fiscalité est « un système destructeur, attaquant la constitution de l’État, menaç[ant] d’anéantir, avec elle, les franchises de la nation, les privilèges des provinces et les droits individuels de chaque citoyen », (Examen du système de législation établi par les édits du mois de mai 1788, op. cit., p. 3).
3126 Cahier comtois du tiers état de Dôle, (A.P., t. 3, chap. XVI, art. 1, p. 166) ; cahier de Vauchoux, (M. Godar et L. Abensour, Cahiers de doléances du bailliage d’Amont, t. 2, Besançon-Auxerre, 1927, p. 431) ; cahier de la noblesse de Dignes, (A.P., t. 3, art. 16, p. 347) ; cahier de la noblesse de Rouen, (A.P., t. 5, art. 9, p. 594) ; cahier de la noblesse d’Artois, (A.P., t. 2, section III, art. 1, p. 83) ; cahier de la noblesse d’Avesnes, (A.P., t. 2, art. 4, pp. 150-151) ; cahier du clergé de Caux, (A.P., t. 2, p. 573). Enfin, les Alsaciens de la ville d’Obernai dans leur cahier de doléances, 1ère section, art. 1, se disent également « Français et citoyens » lorsqu’il faut payer l’impôt, (R. Steegmann, Les cahiers de doléances de la Basse Alsace, Strasbourg, Editions Oberlin, 1990, p. 222). Les revendications des cahiers de doléances se situent alors en règle générale « dans l’ambiance de la monarchie française », (C. Courvoisier, « Autonomie et unité dans les cahiers de doléances », Révolution et décentralisation. Le système administratif français et les principes de 1789, Paris, 1992, p. 34).
3127 Discours à la nation corse, assemblée pour l’élection des députés aux États généraux, s.l., 1789, BN Lb39 7129 pp. 25, 26, 27, 60.
3128 De Siran, Mémoire à l’appui de la réclamation du pays de Gévaudan, pour être maintenu dans le droit d’être convoqué aux États généraux, À Mende, Imprimerie J.-B. Lacombe, 1788, BN Lb39 646 p. 4.
3129 « La constitution d’un pays est la forme de gouvernement adoptée pour procurer aux citoyens ces avantages inestimables, qui font le but et le fruit de toute société bien ordonnée. C’est donc des changements à faire dans la constitution que doivent s’occuper d’abord les États généraux, ensuite des moyens qui assurent à la nation la jouissance de ses droits. La province de Franche- Comté n’ayant point été pleinement incorporée à la France, puisqu’elle s’est réservée sa constitution particulière par capitulation, elle doit demander avant tout la reconnaissance formelle de ses droits et privilèges par les États généraux », (Projet d’instructions à donner aux députés de Franche-Comté aux États généraux, Grenoble, 31 janvier 1789, p. 33). Cf. les Réclamations des lois anciennes de Franche-Comté publiées sous le règne des ducs et comtes de Bourgogne, des empereurs et des rois d’Espagne, contre la répartition actuelle des charges publiques et locales, s.l.n.d.
3130 Les nobles « sont Français, Provençaux (…) ; comme Français, l’intérêt de la nation excite leur zèle. Comme Provençaux, celui de la patrie réclame leur sollicitude », (cahier de doléances de la noblesse de Forcalquier, A.P., t. 3, p. 328). On retrouve la même phrase dans le cahier des avocats marseillais, (J. Fournier, Cahiers de doléances de la sénéchaussée de Marseille pour les États généraux de 1789, Marseille, 1908, p. 25).
3131 De la constitution française ou les lois fondamentales, op. cit., p. 24.
3132 Réflexions d’un citoyen, Paris, Devaux, s.d. BN Lb39 1186 pp. 44 et s.
3133 Réflexions patriotiques d’un magistrat sur la tenue des États généraux, s.l.n.d. BN Lb39 1179 pp. 44-45.
3134 J. Pétion de Villeneuve, Avis aux Français, op. cit., pp. 45-46.
3135 X. Martin, « L’unité du droit français à la veille de 1789 : une aspiration modérée ? », Il Pensiero Politico, 1986, n° 3, pp. 319-320.
3136 L.-J. Gohier, Mémoire pour le tiers état de Bretagne, s.l., 1789, p. 71.
3137 C.-L. Bauvau, Avis au tiers état, suivi de trois lettres sur la forme des États généraux, Londres, 1788, BN Lb39 760 p. 1. On remarque la même idée dans un autre pamphlet d’août 1788 qui dispose : « Ce n’est pas seulement comme Bourguignons, Sire, c’est comme Français que nous prenons la liberté de porter au pied du trône les justes plaintes de la nation contre la tyrannie des ministres », (Lettre d’un gentilhomme bourguignon à un gentilhomme breton, op. cit., pp. 28-29).
3138 Mémoire adressé au roi par la commission intermédiaire des États de Bretagne sur la réponse de Sa Majesté du 31 juillet 1788, Rennes, N.-P. Vatar, 1788, (AN K 160 pièce imprimée 72 p. 14). Il faut aussi se reporter au Mémoire remis au roi, le 30 juillet 1788, par les députés et commissaires des États de Bretagne, En Bretagne, 1788, BN Lb39 615 p. 2.
3139 « Toute la province attendait avec sollicitude, le succès d’une démarche dont le but était d’exprimer à Votre Majesté le vœu de la nation, de défendre la cause commune au tribunal du magistrat suprême, de remettre les intérêts de la chose publique entre les mains de son protecteur naturel », (Mémoire adressé au roi par la commission intermédiaire des États de Bretagne, op. cit., p. 5).
3140 Ibid., p. 14.
3141 J.-M. Pellerin, Mémoire historique sur la constitution des États de Bretagne adressé aux gentilshommes bretons, s.l., novembre 1788, BN Lk2 527 p. 6.
3142 J.-M. Pellerin, Droit public de la province de Bretagne, s.l., 1789, BN Lk2 532 p. 2.
3143 J.-M. Pellerin, Mémoire historique sur la constitution, op. cit., p. 7. « La constitution ancienne de la Bretagne n’appelait à ses assemblées nationales que les barons et les autres grands vassaux du Duché », (ibid., p. 49).
3144 J.-M. Pellerin, Droit public de la province, op. cit., p. 19.
3145 Ibid., p. 20.
3146 Ibid., p. 39.
3147 Précis de la réponse du roi aux États de Bretagne et réponse des États de Bretagne à celle du roi, s.l.n.d. (AN K 160 pièce imprimée 79 p. 7).
3148 « Provinces, défiez-vous de votre esprit particulier ; car, sous un certain aspect, les provinces sont aussi des corps : Bretons, Provençaux, Dauphinois », (J.-P. Rabaut Saint-Etienne, Considérations, op. cit., p. 105).
3149 C.-F. Volney, La sentinelle du peuple, [10 novembre-25 décembre 1788], in Œuvres, t. 1, textes réunis par A. et H. Deneys, Paris, Fayard, 1989, p. 16. De plus, il ajoute que « le tiers état n’est point un ordre, il est la nation ; c’est un corps entier et complet dont la noblesse et le clergé ne sont pas même les membres utiles », (ibid. p. 35).
3150 On peut se référer, autour de la même période, à la publication d’un ouvrage anonyme s’intitulant Charte aux Normands, avec ses confirmations, Caen, G. le Roy, 1788, BN Lk2 1291.
3151 Au roi, essai historique sur les droits de la province de Normandie, suivi de réflexions sur son état, s.l.n.d. BN Lk2 1283 p. 43.
3152 Ibid., pp. 60-61.
3153 Observations d’un homme impartial, relatives à la province de Normandie, s.l.n.d. BN Lk2 1282 p. 18. « On reconnaît aisément combien est grand, pour une province régie par une seule coutume, une seule loi pour un peuple qui comporte [une] analogie de mœurs et de caractères, l’avantage d’une seule administration politique et économique, le régime des États provinciaux en Normandie, l’avantage même qu’en retirerait la grande administration du gouvernement, dans les rapports et les correspondances que les intérêts réciproques et l’utilité publique exigeaient », (Aperçu des cahiers des États généraux de Normandie, s.l., 1788, BN Lk2 1284 p. 22).
3154 J. Egret, La pré-Révolution, op. cit., p. 216.
3155 Réfutation approfondie des édits du 8 mai 1788, s.l.n.d., p. 34.
3156 « Il existe dans le royaume, vous le savez, une distinction essentielle entre les provinces qui le composent ; les unes lui sont réunies de toute ancienneté et de toute ancienneté en font partie ; elles n’ont d’autres droits que ceux que leur donne le titre de françaises ; les autres réunies à des époques différentes, participent aux mêmes avantages, mais en ont conservé ou en ont acquis qui leur sont propres, résultant ou d’une capitulation formelle, ou d’une constitution ou des concessions expresses de leur réunion au royaume : le souverain n’a pas plus le droit de les enlever qu’elles n’ont celui de se séparer du corps auquel elles sont réunies », (Avis aux Normands, s.l., 1789, BN Lb39 933 pp. 7-8).
3157 L. Louchet, Le tiers état au roi, Rodez, 20 décembre 1788, BN Lb39 863 p. 45 note 1.
3158 M-J. Servan, Réflexions sur la réformation des États provinciaux, s.l., 1789, BN Lb39 796 p. 10.
3159 Avertissement à la nation artésienne, s.l., février 1789, BN Lb39 1251 p. 3.
3160 Ibid., p. 7.
3161 Ibid., p. 5.
3162 Lettre d’un gentilhomme du Dauphiné à M. le comte de***, op. cit., p. 7.
3163 « Sire, le Dauphiné, fidèle aux principes qui ont déjà dicté ses résolutions relativement à l’octroi de l’impôt, s’empressa lui-même de donner l’exemple ; mais dès ce moment animés du même zèle et du même esprit, c’est en qualité de Français, c’est en réunissant leurs suffrages que les représentants de tous les ordres et de toutes les provinces doivent délibérer sur le sort de la France entière ; non, Sire, ils n’oublieront pas qu’ils sont Français, et ce titre leur rappellera que notre nation associa toujours sa gloire à celle du monarque », (J.-J. Mounier, Lettre écrite au roi par les trois ordres de la province de Dauphiné sur les États généraux, op. cit., pp. 13-14).
3164 « La nation réunie a-t-elle chargée le Dauphiné d’être son commun législateur ? Ou pensez-vous qu’il n’existe aucune autre constitution légitime ou salutaire que celle que vous avez nouvellement imaginée ? », (Première lettre d’un citoyen aux trois ordres de Dauphiné, en réponse à la lettre des trois ordres du roi, s.l., 8 décembre 1788, BN Lb39 837 p. 3).
3165 R. Chagny, « De la province à la nation, le Dauphiné dans la Révolution », Dauphiné France, de la principauté indépendante à la province, xiième-xviiième siècle, contributions réunies par V. Chomel, Collection La Pierre et l’Écrit, Grenoble, PUG, 1999, pp. 159-160. « Les libertés provinciales ne doivent pas être défendues en tant que privilèges d’un État indépendant, mais comme l’expression en Dauphiné des droits de la nation. Cela leur permet de conférer une dimension nationale à leurs revendications », (M. Mathieu, Des libertés delphinales aux droits de l’homme, t. 2, op. cit., p. 497). « La journée des tuiles » le 7 juin 1788 voit Grenoble subir une insurrection populaire faisant corps derrière son Parlement. Plus qu’une révolte à l’échelle locale, c’est un véritable programme politique qui est lancé par, entre autre, Barnave et Mounier voulant la convocation des États du Dauphiné avec un nombre égal de tous les ordres et des élections libres : c’est l’assemblée du 21 juillet 1788 à Vizille, (J. Egret, Le Parlement de Dauphiné, t. 2, op. cit., pp. 223-239).
3166 J. Egret, La révolution des notables, Mounier et les monarchiens, 1789, Paris, A. Colin, 1950, p. 9.
3167 R. Halevi, Dictionnaire critique de la Révolution française, v° « Monarchiens », op. cit., p. 395 et plus généralement J. Egret, Le Parlement de Dauphiné, t. 2, op. cit., pp. 281-297.
3168 Cf. J. Egret, Les derniers États de Dauphiné, Romans (septembre 1788-janvier 1789), Grenoble, 1942.
3169 Les assemblées dauphinoises « furent célébrées dans tout le royaume ; elles concoururent, avec le courage de quelques autres provinces, à presser le moment de la révolution (…) [et] posaient les premières bases d’une révolution démocratique », (A.-P. Barnave, Introduction à la Révolution française, op. cit., p. 97).
3170 F.-R. de Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe, t. 1, op. cit., p. 193.
3171 E.-J. Sieyès, Qu’est-ce que le tiers état ?, op. cit., p. 43.
3172 E.-L. d’Antraigues, Second mémoire sur les États généraux, op. cit., p. 74.
3173 Ibid., p. 59.
3174 « Combien donc est sage cette disposition des États du Dauphiné, qui limite le pouvoir même des États de la province, et qui décide qu’ils ne pourront accorder aucun impôt, consentir aucun emprunt que lorsqu’il aura été délibéré dans les États généraux. Voilà le gage de la liberté ; voilà le palladium de la nation unis aux États généraux par cette salutaire institution », (E.-L. d’Antraigues, Mémoire sur la constitution des États de la province de Languedoc, Imprimé en Vivarais, s.d. BN Lk2 858 p. 74).
3175 J. Egret, « Les origines de la Révolution en Bretagne (1788-1789) », RH, 1955, t. 213, pp. 189-215.
3176 J. Egret, « La révolution aristocratique en Franche-Comté », op. cit., p. 255.
3177 J. Egret, « La pré-Révolution en Provence, 1787-1789 », AHRF, 1954, t. 26, pp. 97-126.
3178 J.-M. Augustin, La Révolution française en Haut-Poitou, op. cit., p. 34.
3179 Exhortations pressantes aux trois ordres du Languedoc, s.l., 1788, BN Lk2 849 p. 5.
3180 J.-D. Lanjuinais, Le préservatif contre l’avis à mes compatriotes, avec des observations sur l’affaire présente, par un membre des États du Dauphiné, s.l.n.d. BN Lb39 665 p. 22.
3181 Ibid., p. 3.
3182 Ibid., p. 4.
3183 Ibid., p. 22.
3184 Assemblée des trois ordres de la province du Dauphiné, s.l.n.d. BN Lb39 614 p. 6.
3185 J.-J. Mounier, Lettre écrite au roi par les trois ordres de la province de Dauphiné, assemblés à Romans le 14 septembre 1788, s.l.n.d. BN Lb39 633 pp. 4-5.
3186 J.-J. Mounier, Lettre écrite au roi par les trois ordres de la province de Dauphiné sur les États généraux, op. cit., p. 12.
3187 « De tous les articles de cette constitution [fonctions et pouvoirs des États] celui qui n’intéresse pas la nation entière, c’est celui par lequel il est dit que les États ne pourront accorder aucun subsides, ni établir aucune taxes (…) que lorsque les représentants de la province en auront délibéré dans les États généraux. La province de Dauphiné donne ici une nouvelle preuve de son zèle pour l’intérêt de la nation », (J.-J. Lenoir-Laroche, Observations sur les principes de la constitution des États de Dauphiné, contenant leur examen et leur développement pour servir aux États généraux, s.l.n.d. BN Lb39 575 p. 53).
3188 Ibid., p. 83.
3189 Faure, Essai sur l’histoire du Dauphiné et sur celle des grands hommes de cette province, Genève, 1788, BN Lk2 649 p. 6.
3190 Ibid., p. 7.
3191 Esprit des opérations des trois ordres du Dauphiné, depuis le 10 mai 1788 jusqu’à nos jours, s.l., 1er octobre 1788, p. 2.
3192 J.-J. Lenoir-Laroche, Dénonciation au public d’une prétendue protestation, op. cit., p. 1.
3193 F. Lesueur, A. Cauchie, Cahiers de doléances du bailliage de Blois et bailliage secondaire de Romorantin, t. 1, Blois, E. Rivière, 1907, p. 12.
3194 P. Sagnac, « L’idée de nation en France, (1788-1789) », RHPC, 1937, t. 1, pp. 160-161.
3195 J. Egret, La révolution des notables, op. cit., p. 19.
3196 L’importance de la révolte dauphinoise sera encore dans tous les esprits après l’ouverture des États généraux et il n’est qu’à voir un libelle de 4 pages du 18 juin 1789 dont le titre est sans ambiguïté : Allez à Vizille, consultation médico-patriotique, s.l.n.d. BN Lb39 7289.
3197 B. Verlac, La voix du citoyen, s.l., mars 1789, BN Lb39 1188 p. 10.
3198 M.-A. Mangourit, Les gracches français, suite du tribun du peuple au peuple, Paris, 1788, BN Lb39 649 p. 5.
3199 A. Goudar, L’autorité des rois de France est indépendante, op. cit., p. 68.
3200 Remontrances du 24 juillet 1788 du Parlement de Rennes, BN Lb39 6501 p. 14.
3201 Remontrances du 28 janvier 1788 du Parlement de Pau, BN Lb39 495 p. 6.
3202 Remontrances du 26 juin 1788 du Parlement de Pau, BN Lb39 601 p. 21. Mais attention, ce désir de rapprochement ne peut s’opérer qu’avec le consentement des assemblées particulières du Béarn. « Le Béarn a toujours été et n’a point cessé d’être une souveraineté distincte, sans assujettissement au royaume de France : que l’édit d’union de ces États, en 1620, n’opérera point d’autre effet que de rendre les deux Couronnes inséparables, en excluant les princesses de la succession à la souveraineté du Béarn ; que le consentement des États, nécessaire pour consommer cette dérogation aux fors du pays, fut borné à cet unique objet : ainsi qu’il résulte du cahier des États de l’année 1624 (…) que si de nouvelles considérations devaient déterminer aujourd’hui le pays à s’unir d’une manière plus intime à la France, un changement d’une aussi grande importance dans le gouvernement du Béarn, ne pourrait être délibéré que dans son assemblée nationale, la même qui a toujours concouru avec le prince à tous les actes du pouvoir législatif. Que la convocation de ses habitants, faite dans une forme inusitée, pour les attirer aux États généraux de France, tendrait à lui incorporer, par voie de fait, une nation indépendante, en substituant l’usage du pouvoir arbitraire aux formes antiques », (arrêté du Parlement de Pau du 13 mars 1789, BN Lb39 7024 pp. 4-5).
3203 Cf. V. Azimi, « La nation contre les petites nations. L’organisation de la France selon l’abbé Sieyès », L’administration territoriale de la France, 1750-1940, actes du colloque d’Orléans des 30 septembre-2 octobre 1993, textes réunis par M. Pertué, Orléans, PUO, 1998, pp. 365-378.
3204 Vœu patriotique d’un Américain sur la prochaine assemblée des États généraux, s.l.n.d. BN Lb39 708 p. 4.
3205 Ibid., p. 2. De plus, la colonie de Saint-Domingue invoque le même but afin que celle-ci fasse « corps avec la nation » et refuse la situation où elle serait « montrée étrangère à la nation [afin d’éviter que] la nation se montre étrangère à la colonie ». On peut donc parler « d’enfants d’une même patrie », (Mémoire sur l’importance de la colonie de Saint-Domingue d’avoir des représentants à l’assemblée des États généraux, Paris, 1788, BN Lb39 643 pp. 2, 12).
3206 Réflexions sur la constitution de la province du Dauphiné, sur la députation de cette province aux États généraux et sur le mandat remis à ses députés, s.l.n.d. BN Lb39 6606 pp. 55-56.
3207 Réfutation approfondie des édits du 8 mai 1788, s.l.n.d., p. 23.
3208 A.-P. Barnave, Esprits des édits enregistrés militairement, op. cit., p. 3 et Très respectueuses supplications que présentent au roi les notables citoyens de la ville de Grenoble, s.l.n.d. pp. 8-9.
3209 M-J. Servan, Régénération de la France par les États généraux, par M***, avocat en Parlement, s.l., 1788, p. 38.
3210 « L’esprit de corps peut donc gagner à séparer les ordres ; et l’esprit national, l’amour de la patrie peuvent y perdre le suffrage de plusieurs citoyens très respectables », (cahier du tiers état de Nemours, A.P., t. 4, p. 167).
3211 « Tous les vœux, toutes les facultés doivent se réunir pour l’avantage de la patrie commune. Tout député aux États généraux, doit penser que, quoique d’une province quelconque, il n’est pas député comme Normand, par exemple, par la Normandie, mais Français, comme membre d’une province nommée Normandie, qui forme une partie de l’Empire français », (Mourgue de Mont- Redon, Vues d’un citoyen sur la composition des États généraux, s.l., 1788, BN Lb39 825 pp. 37-38). D’ailleurs, un pamphlet de 1789 ajoute que dans le cas du mandat impératif, « qui jugera des droits dont la nation particulière est le seul arbitre, et peut consentir la modification ou la cession ? Le Basque jugera-t-il le Breton ? Celui-ci décidera-t-il de l’affaire du Provençal ? Le Normand de celle du Dauphinois ? », (Questions de la dernière importance, préalables à celles qui seront traitées aux États généraux, s.l., 1789, BN Lb39 6820 p. 4).
3212 Lettre écrite par plusieurs citoyens du clergé, de la noblesse et des communes de Dauphiné à Messieurs les syndics-généraux des États de Béarn, Grenoble, 24 octobre 1788, (AN K 160 pièce imprimée 725 p. 6).
3213 « Je n’entends pas dire que les nations ou provinces doivent s’isoler. J’ai déjà dit, je pense, et tout bon français le pense avec moi, que les Français sont tous frères ; et que les divers peuples qui composent la France, sont des nations unies et confédérées pour la conservation et la défense de ce beau tout », (Constitution de la France ou droits du roi et des sujets, s.l.n.d., p. 28).
3214 1789, les Français ont la parole, cahiers des États généraux, présentés par P. Goubert et M. Denis, Paris, Julliard, 1964, p. 51 ; X. Martin, « L’unité du droit français », op. cit., p. 321.
3215 « Les provinces de France (…) sont les branches du même arbre, de manière à les incorporer toutes et si intimement au tronc national. Que tous les sujets du roi soient vraiment Français par le gouvernement, comme ils le sont tous par l’amour qu’ils portent à leur souverain. Qu’il n’y a point de préférences ou de prérogatives pour certaines provinces », (A.P., t. 6, art. 1, p. 9).
3216 « Il est à désirer que les provinces fassent à la nation le sacrifice de leurs constitutions particulières, de leurs capitulations, de leurs traités ; et que la France ne soit, à l’avenir, qu’un grand corps de monarchie sous un seul roi », (A.P., t. 3, p. 83).
3217 A.P., t. 3, p. 435.
3218 Cahier du tiers état de Clichy-la-Garenne, (A.P., t. 4, art. 19, p. 447) ; cahier du tiers état de Versailles, (A.P., t. 5, art. 47, p. 182).
3219 A.-F. Prost de Royer, Dictionnaire de jurisprudence et des arrêts de Brillon, v° « Assemblée des notables », t. 1, Lyon, Aimé Delaroche, 1781-1788, p. 261.
3220 F.-A. Daubermesnil, Expression du vœu d’un citoyen, s.l.n.d. BN Lb39 1361 p. 2.
3221 Ibid., p. 10. Selon l’Avis à la nation assemblée, Londres, 1789, BN Lb39 1737 pp. 37-43, le contrat d’union breton est un pacte abusif privilégiant les libertés nobles. En Languedoc, les États subissent le « despotisme épiscopal » très attaché à ses biens. La Bourgogne subit une constitution féodale. Ainsi, il est important de changer cet état de droit et d’abolir toutes formes de privilèges. D’ailleurs, juste après l’ouverture des États généraux, Cérutti affirmera que les exemptions pécuniaires, les capitulations et les privilèges provinciaux, devront être sacrifiés sur l’autel de « l’assemblée nationale », (Consultation épistolaire touchant l’opinion par ordre ou par tête, s.l.n.d. BN Lb39 1690 pp. 9-10). Néanmoins, c’est un opuscule de juin 1789 qui sera le plus violent dans une uniformisation à outrance : « La multiplicité des lois est une marque de la corruption des peuples : nous avons simplifié nos lois, elles ne sont plus ce chaos que la vie d’un homme, avec toute la sagacité possible, parvenait rarement à débrouiller. Dans votre siècle, chaque province, chaque canton, chaque ville même avait ses lois, ses coutumes, ses mesures ; aujourd’hui ces bigarrures ont disparu, tout est uniforme », (États généraux de l’an mil neuf cent quatre-vingt-neuf. Dédiés à l’Assemblée nationale. Par un député des communes, s.l., 1789, BN Lb39 1736 p. 18).
3222 « Au lieu de présenter de pareils titres, chaque province ne devrait-elle pas plutôt rougir de ces contrats où il n’est fait mention que de quelques individus et jamais d’elle, du prince et non du peuple : par lesquels les hommes y sont vendus, échangés, transmis avec la glèbe qu’ils arrosent de leurs sueurs, et tout aussi peu consultés sur leur destination que les animaux qui la cultivent avec eux ; et c’est d’après des chartes aussi humiliantes qu’elles affecteraient une entière indépendance (…) Si cette prétention était fondée, il faudrait regarder la France comme un composé d’États libres », (C.-P. Guiraudet, Qu’est-ce que la nation et qu’est-ce que la France ?, s.l., 1789, BN Lb39 1289 pp. 66-67).
3223 « Je dis, que toutes les autres provinces doivent se réunir contre celle qui réclame des privilèges, des exemptions ! Je dis que ces provinces réclamantes sont composées de lâches égoïstes ; que nous sommes tous les membres égaux, et que l’un ne doit pas être surchargé pour alléger l’autre. Eh ! Grand Tout, les Champenois, qui paient tant de droits, qui n’ont aucun privilège, sont-ils donc moins Français que les Bretons et les Dauphinois ? Quoi ! Les Berruchons fourniront à tous les besoins de l’État et les Aquitains seront privilégiés », (B.-V. Noillac, Le plus fort des pamphlets. L’ordre des paysans aux États généraux, Noillac, 26 février 1789, BN LB39 1235 p. 19).
3224 « En général, c’est une arme très faible, et pourtant très usitée, que ce reproche de nouveauté qu’on fait aux meilleures idées de ce siècle. La coutume et l’usage sont les arguments de la tyrannie et de l’ignorance. Il est fâcheux que ces arguments si faciles et si dangereux aient été fortifiés quelquefois par l’autorité des grands écrivains », (Portrait des députés aux États généraux qui s’y sont déjà distingués, s.l., Chez les Marchands de Nouveautés, 1789, BN Lb39 1785 p. 15).
3225 « Les provinces de la France ayant toutes leurs administrations particulières soumises aux mêmes lois, régies par les mêmes formes, formant différentes parties d’un même tout, seront tellement divisées, qu’elles aient à peu près la même étendue, selon que les bornes naturelles, telles que les rivières et les montagnes, rendront cette division praticable. La circonférence n’excédera pas soixante à quatre-vingt lieues ; le diamètre étant de vingt à vingt-trois lieues, et le chef-lieu de chacune d’elles se trouvant au centre ou à peu près, la correspondance des lieux dépendants sera facile, prompte et dispendieuse », (le Prince, Essai sur la formation d’un code public national, par M. Ecnir’pel, membre du tiers état, s.l.n.d. BN Lb39 6979 p. 30).
3226 Ils n’avaient pas encore tout dit, s.l.n.d. BN Lb39 6668 p. 13.
3227 Cf. M.-L. Legay, « La fin du pouvoir provincial, (4 août 1789-21 septembre 1791) », AHRF, avril-juin 2003, n° 332, pp. 25-53.
3228 C. Clavreul, L’influence de la théorie d’Emmanuel Sieyès sur les origines de la représentation en droit public, t. 1, thèse dactyl. de l’Université de Paris I, 1982, p. 111.
3229 J.-D. Bredin, Sieyès, op. cit., p. 85.
3230 J. Guilhaumou, « Sieyès, l’individu et le système », op. cit., pp. 49-51.
3231 C. Bruschi, « Citoyenneté et universalisme », op. cit., p. 162.
3232 E.-J. Sieyès, Qu’est-ce que le tiers état ?, op. cit., p. 13.
3233 Ibid., p. 8.
3234 Ibid., p. 140.
3235 Ibid., p. 12.
3236 Ibid., p. 12 note 1.
3237 Ibid., p. 11.
3238 « Tels sont les travaux qui soutiennent la société. Qui les supporte ? Le tiers état », (ibid., p. 6).
3239 Ibid., p. 10.
3240 Ibid., p. 13. « Ils ont osé prononcer le mot de scission. Ils en ont menacé le roi et le peuple. Eh ! Grand Dieu ! Qu’il serait heureux pour la nation qu’elle fût faite à jamais, cette scission si désirable ! », (ibid., p. 137).
3241 « Mon penchant pour le tiers état n’est qu’une disposition universelle pour ma patrie, parce que, suivant moi, le tiers état est véritablement le seul corps de la nation ; les deux autres classes ne sont que des exceptions à l’ordre général ; exceptions fondées sur des privilèges, des concessions », (Lettre à un plébéien au sujet de l’assemblée des États généraux, s.l., 20 septembre 1788, BN Lb39 6550 p. 43).
3242 E.-J. Sieyès, Qu’est-ce que le tiers état ?, op. cit., p. 21. « Tout privilège, on ne saurait trop le répéter, est opposé au droit commun (…) J’entends par privilégié tout homme qui sort du droit commun, soit parce qu’il prétend n’être pas soumis en tout à la loi commune, soit parce qu’il prétend à des droits exclusifs », (ibid., pp. 22-23, 166).
3243 P. Bastid, Sieyès et sa pensée, nouvelle édition, CNRS, Paris, Hachette, 1970, pp. 344-358.
3244 S.l.n.d. BN Lb39 781.
3245 Ibid., p. 3.
3246 Orateurs de la Révolution française, t. 1, textes présentés par F. Furet et R. Halevi, La Pléiade, Paris, Gallimard, 1989, p. 1002.
3247 « Inutilement le tiers état attendrait-il du concours des ordres la restitution de ses droits politiques et la plénitude de ses droits civils », (E.-J. Sieyès, Qu’est-ce que le tiers état ?, op. cit., p. 136).
3248 Ibid., pp. 142, 147.
3249 « Or, n’est-il pas monstrueux de composer une assemblée de manière qu’elle puisse voter pour l’intérêt de la minorité ? N’est-ce pas là une assemblée à revers ? », (ibid., p. 149).
3250 Ibid., p. 151.
3251 Par exemple pour : Le pater du tiers état paraphrasé par M. C… R., roturier angevin, s.l.n.d., p. 5 ; C.-F. Bouche, Droit public du Comté-État de la Provence, op. cit., p. 400 ; J.-A. de Condorcet, Réflexions sur les affaires publiques par une société de citoyens, s.l., 1789, BN Lb39 1183 p. 4.
3252 De l’égalité des représentants et de la forme des délibérations aux États généraux de 1789, s.l., 1789, BN Lb39 992 p. 61.
3253 E.-L. d’Antraigues, Mémoire sur les États généraux, leurs droits et la manière de les convoquer, s.l., 1788, p. 247.
3254 J.-G. Thouret, Vérités philosophiques et patriotiques sur les affaires présentes, s.l., 1788, BN Lb39 6660 p. 17.
3255 Très humbles supplications aux notables patriotes, s.l.n.d. BN Lb39 678 p. 3.
3256 P. Pasquino, Sieyès et l’invention de la constitution française, Paris, O. Jacob, 1998, pp. 61 et s.
3257 Ducloz-Dufresnoy, Encore quelques mots sur la question de savoir : Si le tiers état peut être représenté par des membres des ordres privilégiés ?, Paris, Clousier, s.d. BN Lb39 6643 p. 3.
3258 J.-A. Cérutti, Mémoire pour le peuple français, s.l.n.d. BN Lb39 788 p. 21.
3259 A.P., t. 2, p. 668.
3260 Catéchisme national, En France, De l’Imprimerie des Bons Citoyens, 1789, BN Lb39 6912 p. 123.
3261 Observations sur le vœu des notables, s.l.n.d. BN Lb39 690 p. 6.
3262 Ibid., p. 8.
3263 Ibid., p. 10.
3264 Lors des premiers États généraux, le tiers état « fut appelé dans les assemblées de la nation : on lui donna le nom de tiers état, non parce que dans sa constitution et par la nature du gouvernement, il ne devait avoir que le tiers des représentants, mais parce que, dans la division de l’État, il se trouvait trois ordres, le clergé, la noblesse et le peuple », (Réflexions de Jean-Baptiste, porteur d’eau et, qui plus est, citoyen, avec une apologie des sentiments de la Cour et des prétentions du tiers état, s.l.n.d. BN Lb39 763 pp. 17-18).
3265 A.P., t. 2, art. 3, p. 38.
3266 « Les représentants des communes, c’est-à-dire de 25 millions d’hommes, c’est-à-dire de la nation entière », (Le premier coup de vêpres, avis à la chambre des communes, sur la retraite des privilégiés, s.l., 1789, BN Lb39 1815 p. 11). « Communes, c’est la classe la plus nombreuse, la plus utile, la seule, en un mot, qui puisse procurer des ressources à vos états », (Nouvelle adresse des communes au roi, par un citoyen non député, s.l.n.d. BN Lb39 1824 p. 3). Cf. aussi E. de Salm, Moyen de conciliation entre les ordres sur la question du vote par têtes ou par ordres, Paris, 5 juin 1789, BN Lb39 1794 pp. 4-5 ; O. de Gouges, Discours de l’aveugle aux Français, s.l.n.d. BN Lb39 1846 pp. 6, 8 ; Aux trois ordres assemblés et non réunis, s.l.n.d. BN Lb39 1798 pp. 6 et s. ; Le mot de l’énigme, s.l.n.d. BN Lb39 7295 p. 6 ; Lettre à M. le comte d’A…, op. cit., p. 6.
3267 Arrêté du 22 avril 1789 du Parlement de Rennes, BN Lb39 1707 pp. 6-7.
3268 Arrêt du 20 mai 1788 du Parlement de Grenoble, (ADI série B 2319 f° 45).
3269 M. Morabito, Histoire constitutionnelle, op. cit., p. 27. En effet, on observe dans deux pamphlets, l’un anonyme [Un bon français de l’ordre des patriciens aux bons français de l’ordre des plébéiens, s.l.n.d. BN Lb39 1141 p. 2] et l’autre de Charles-Gaspard de Toustain-Richebourg [Éclaircissements à l’amiable entre la noblesse et le tiers état, s.l.n.d. BN Lb39 778 p. 3], une conciliation entre la noblesse et le troisième ordre, ceux-ci affirmant que le tiers état et le second ordre « sont frères ».
3270 « C’est pour ce peuple si digne d’être mieux traité ; pour cette pépinière de laboureur et de soldats qu’[ils n’ont] cessé d’employer tous [leurs] efforts », (remontrances du 1er septembre 1787 du Parlement de Besançon, AN H1 1596 pièce 150 f° 6 v°).
3271 Cave tibi, popule ! ou instructions au tiers état sur le danger de sa position actuelle, par un noble de fraîche date, s.l., 1789, BN Lb39 1092 p. 9.
3272 J.-G. Thouret, Avis des bons normands à leurs frères, tous les bons français de toutes les provinces et de tous les ordres, sur l’envoi des lettres de convocation aux États généraux, s.l., février 1789, BN Lb39 1249 p. 42. À propos de cet ouvrage, le cahier de doléances du tiers état de Coutances affirme de l’opuscule qu’il est « une production véritablement patriotique », (A.P., t. 3, p. 57).
3273 J. Saige, L’ami des trois ordres, ou réflexions sur les dissensions actuelles par l’auteur du catéchisme du citoyen, s.l., 1789 BN Lb39 1130 p. 4.
3274 Ibid., p. 6.
3275 Ibid., p. 10.
3276 Ibid., p. 4.
3277 « Vous, noblesse fière et généreuse, dont les sentiments d’honneur ont, sous un gouvernement absolu, maintenu dans la nation un reste de son ancienne indépendance : vous, défenseurs de l’État, de la constitution, de la liberté publique, protecteurs nés des autres classes de la société, sauvez le peuple », (ibid., p. 13).
3278 Ibid.
3279 S’il est de l’intérêt du tiers état de se choisir des représentants dans son sein exclusivement, s.l.n.d. BN Lb39 791 p. 5.
3280 Ibid., pp. 4-6.
3281 Mon opinion, ou le vœu d’un gentilhomme normand à la noblesse normande, s.l.n.d. BN Lb39 6615 p. 7.
3282 Ibid.
3283 J.-J. Clere, « État, nation, citoyen », op. cit., p. 102.
3284 Réponse au mémoire de quelques princes de sang, s.l.n.d. BN Lb39 869 p. 3 ; Discours de l’orateur des trois ordres aux États généraux par un député, op. cit., p. 68.
3285 « Mais il est encore des malheurs plus instants : dans un royaume où depuis si longtemps il n’a point existé de dissensions civiles, on ne prononce qu’avec regret le nom de scission, il faudrait pourtant s’attendre à cet événement si les droits des deux premiers ordres ou tous les deux peut-être pourraient méconnaître les États généraux et refuser de confirmer eux-mêmes leur dégradation en comparaissant à l’assemblée », (A.-J. d’Auget, Mémoire des princes présenté au roi, s.l.n.d. BN Lb39 865 pp. 7-8).
3286 P.-V. Malouet, Avis à la noblesse, op. cit., p. 12.
3287 Remontrances du 23 janvier 1788 du Parlement de Metz, (AN K 710 pièce 73 f° 6-6 v°).
3288 J. Chas et H. de Montignot, Réflexions sur les immunités ecclésiastiques considérées dans leur rapport avec les maximes du droit public et l’intérêt national, Paris, Maradan, 1788, p. 88.
3289 L.-P. Bérenger, Les quatre états de la France, s.l., 1789, BN Lb39 1281 p. 59. Cf. Lettre d’un gentilhomme dauphinois à un de ses amis, en Dauphiné, s.l.n.d. BN Lb39 6619 p. 13.
3290 J.-P. Rabaut Saint-Etienne, Considérations, op. cit., p. 29. Il ajoute « en un mot [que] le tiers état (…) composé de vingt millions de citoyens et qui par conséquent compose presque toute la nation », (ibid., p. 7).
3291 « Je ne parle plus maintenant au tiers état, mais à la nation française, puisque vous êtes presque toute la nation : les deux autres ordres sont de la nation aussi mais ils ne sont pas la nation elle-même, puisque leurs assemblées ne peuvent représenter que leur corps », (J.-P. Rabaut Saint-Etienne, Considérations, op. cit., p. 29).
3292 E.-J. Sieyès, Qu’est-ce que le tiers état ?, op. cit., pp. 14-15 note 1.
3293 « Qui donc oserait dire que le tiers état n’a pas en lui tout ce qu’il faut pour former une nation complète ? Il est fort et robuste dont un bras est encore enchaîné. Si l’on ôtait l’ordre privilégié, la nation ne serait pas quelque de chose de moins, mais quelque chose de plus », (ibid., p. 10).
3294 Ibid., p. 12 note 1.
3295 Ibid., p. 13.
3296 Unité dans le roi, dans la nation, dans l’assemblée des États, s.l.n.d. BN Lb39 1363 p. 7.
3297 A.-P. Barnave, Manuscrits personnels, s.l.n.d. BMG N 920 f° 3.
3298 Pour le cahier de doléances de la ville du Havre, art. 1 : « La nation a délibéré en corps, et que la division d’ordre n’a pris sa source que dans les abus et l’usurpation, qui jamais ne doivent former de titre légal », (E. le Parquier, Cahiers de doléances du bailliage du Havre, (secondaire de Caudebec) pour les États généraux, Epinal, Imprimerie Lorraine, 1929, p. 116).
3299 Y. Durand, « Les privilèges selon Sieyès ou le triomphe de la désinformation », HES, 1992, n° 2, pp. 295-323.
3300 Parlant de la noblesse, Rousseau indique que « tout ce qui est étranger à la constitution doit être soigneusement banni du corps politique », (Projet de constitution pour la Corse, in Œuvres, t. 3, op. cit., p. 909).
3301 J.-B. Salaville, De l’organisation d’un État monarchique ou considérations sur les vices de la monarchie française et sur la nécessité de lui donner une constitution, 2ème édition, s.l., 1789, BN Lb39 1271 p. 59.
3302 P.-A. d’Arcq, De la convocation des États généraux et de la nécessité de former un quatrième ordre de l’État par M.L.C.D.S.F., s.l., 1789, BN Lb39 925 p. 32.
3303 C.-F. Volney, La sentinelle du peuple, [10 novembre-25 décembre 1788], in Œuvres, t. 1, op. cit., p. 46.
3304 E.-L. d’Antraigues, Mémoire sur la constitution des États, op. cit., p. 9.
3305 Exposé des principes de droit public, s.l.n.d. BN Lb39 7288 pp. 9, 12, 2.
3306 Cf. P. Rosanvallon, Le peuple introuvable, histoire de la représentation démocratique en France, Bibliothèque des Histoires, Paris, NRF-Gallimard, 1998, p. 35 ; M. Cranston, « The sovereignty of the nation », The french and the creation of modern political culture, t. 2, op. cit., pp. 97-104 ; M. Vovelle, « Entre cosmopolitisme et xénophobie : patrie, nation, république universelle dans les idéologies de la Révolution française », Nations and nationalisms : France, Britain, Irland and the XVIIIs context, édité par M. O’Dea, K. Whelan, Oxford, Voltaire Foundation, 1995, p. 14 ; G. Héraud, « Analyse critique du concept subjectif de nation », Mélanges offerts à Pierre Montane de la Roque, t. 1, Toulouse, Presses de l’IEP de Toulouse, 1986, p. 152. C’est dans ce cadre que Maurice Deslandres pense que la France ne constitue pas une nation sous l’Ancien Régime car l’unité nationale fait défaut à cause de la séparation des ordres, (Histoire constitutionnelle de la France de 1789 à 1870, t. 1, Paris, E. Duchemin, 1977, p. 20).
3307 Le retour de Babouc à Persepolis ou la suite du monde comme il va, À Concordopolis, 1789, BN Lb39 1805 p. 9.
3308 A.-J. Chaillon de Jonville, Apologie de la constitution française, t. 1, op. cit., p. 5.
3309 Ibid., p. 125.
3310 « Les députés du clergé et de la noblesse devront être plus nombreux, à proportion des membres de chaque ordre, que les députés des communes (…) [car il faut la promotion du] maintien de la surêté et de la tranquillité publiques ; les règles doivent être puisées dans les seules raisons de l’intérêt national et individuel », (J.-A. Brun de la Combe, La France régénérée, ouvrage publié par numéros, Londres, Marchands de Nouveautés, 1788, BN Lb39 609 p. 6) ; Observations sur l’arrêt du Conseil du 5 octobre 1788 pour la convocation d’une assemblée de notables au 3 novembre prochain, s.l., 1788 BN Lb39 651 p. 22.
3311 « Le tiers état n’a jamais été un ordre, parce que l’ordre suppose une dignité et le peuple ne peut pas être dit une dignité », (Réflexions d’un magistrat sur le patriotisme, les diverses formes de gouvernement, les caractères de la souveraineté, la nature de l’office dans les États monarchiques, suivies d’observations sur le privilège parlementaire de Bretagne, s.l.n.d. BN Lb39 562 pp. 14-15).
3312 Soliloque d’un patriote touchant la forme de la prochaine assemblée des États généraux du royaume, s.l.n.d. BN Lb39 829 p. 3.
3313 A.-L. Séguier, Façon de voir d’une bonne vieille, op. cit., p. 42.
3314 Ibid., pp. 40, 54.
3315 Ibid., p. 55.
3316 « De ces vingt-trois millions d’individus, dont on fait le dénombrement avec tant d’emphase et qui sont tout, puisque l’élite du peuple français est comptée pour rien, ne faudrait-il pas retrancher les veuves, les femmes, les filles, les enfants, les moines, les religieux et tous ceux qui n’entrent point aux États », (ibid., p. 43).
3317 Ibid., p. 40.
3318 Ibid., p. 38.
3319 Ibid., p. 52.
3320 Lettres patriotiques, s.l., 25 décembre 1788-5 février 1789, BN Lb39 1118 p. 43.
3321 « Comment a-t-on pu se persuader qu’un peuple inconstant et volage, un peuple qui est un chaos de passions, d’idées et de sentiments différents, ait assez de sagesse pour se gouverner lui-même », (Réflexions d’un citoyen adressées aux notables sur la question proposée par un grand roi. En quoi consiste le bonheur des peuples et quels sont les moyens de le procurer ?, s.l., 1787, BN Lb39 6302 p. 7).
3322 Réflexions d’un patriote sur la prochaine tenue des États généraux, s.l., 1789, BN Lb39 1178 pp. 5-6.
3323 Lettres patriotiques, op. cit., p. 14.
3324 Examen patriotique des écrits publiés sur la situation de la France, pour servir d’introduction aux États généraux et à l’ouvrage intitulé : Le Français citoyen, Paris, Marchands de Nouveautés, 1789, BN Lb39 1338 pp. 10-11.
3325 P.-P. Leroy de Barincourt, La monarchie parfaite, op. cit., p. 15.
3326 « Il faut avouer que la plupart des associés civils sont incapables de réflexions et dénués de connaissances. Il faut avouer en conséquence que tout l’ensemble des individus qui composent une nation, est incapable de contracter par lui-même, et de se donner, par la voie des contrats, même par un concours unanime, des administrateurs de son propre droit de souveraineté », (ibid., p. 14).
3327 De l’égalité des représentants et la forme des délibérations aux États généraux de 1789, op. cit., p. 46 ; C.-F. Bouche, Notice historique et abrégé des anciens États, op. cit., p. 45.
3328 « Les deux ordres privilégiés qui formaient encore la machine du gouvernement, s’étaient ruinés par leur luxe et dégradés par leurs mœurs ; le tiers état au contraire avait acquis de grandes lumières et d’immenses richesses », (A.-P. Barnave, Introduction à la Révolution française, op. cit., p. 83).
3329 Le tout est-il plus grand que la partie ? Ou réponse à cette question : Que doit faire le tiers état si les ordres privilégiés refusent de délibérer par tête et examen de l’écrit intitulé : Aux trois ordres de la nation, s.l., 1789 BN Lb39 1128 p. 4.
3330 Ibid., p. 5.
3331 « Pourquoi tous les ordres de l’État sont-ils divisés en France ? Parce que le clergé voudrait ramener le passé, la noblesse retenir le présent et le tiers état réformer l’avenir », (Les pourquoi d’un homme ignorant et les parce que d’un homme sincère, publiés par un homme discret, pour l’instruction du tiers état, s.l., 1788, BN Lb39 773 p. 5).
3332 « La masse de la nation est beaucoup plus instruite sur ses vrais intérêts que dans le dernier siècle ; le goût des sciences utiles s’est répandu, les saines idées morales, de politique, de législation, sont consacrées dans une multitude d’ouvrages ; les révolutions qui se passent dans les États étrangers et avec lesquels nous sommes en communication, ont fait ouvrir les yeux, ont porté les esprits à la discussion », (J. Pétion de Villeneuve, Avis aux Français, op. cit., p. 11).
3333 « C’est le peuple qui demandait l’expulsion des deux ministres ses ennemis et qui applaudit à la justice du monarque qui la lui accorda. C’est le public qui, entassé dans le château de Versailles, fit retentir les appartements des crises redoublés de vive le roi ! C’est la populace qui s’ameuta dans la place Dauphine, y fit des feux de joie. Et c’est la canaille qui brûla en place de Genève l’effigie de MM. de Brienne et de Lamoignon », (J. Charron, Lettre ou mémoire historique sur les troubles populaires de Paris en août et septembre 1788, Londres, 1788, BN Lb39 648 pp. 7-8).
3334 P.-V. Malouet, Avis à la noblesse, op. cit., pp. 13-14.
3335 J.-J. Lenoir-Laroche, Observations sur les principes de la constitution, op. cit., p. 43.
3336 La politique et les vrais intérêt du tiers état. Dédié à tous et à chacun des individus du royaume, s.l., 1789, BN Lb39 1089 pp. 13-14.
3337 « La lumière n’existait d’abord que pour un petit nombre ; elle s’est étendue par degrés ; elle a éclairé toutes les parties du royaume ; l’opinion publique s’est formée », (J. Devaines, Des États généraux et principalement des pouvoirs, s.l., 1789, BN Lb39 1171 p. 5).
3338 Exhortations pressantes aux trois ordres du Languedoc, op. cit., p. 25.
3339 J. Wagner, « Peuple et pouvoir dans le Journal encyclopédique à la veille de la Révolution française », The press in the french Revolution, op. cit., pp. 40-50.
3340 Inspirations de la grâce suffisante, op. cit., p. 8.
3341 G.-N. Coyer, Dissertation critique et philosophique sur la nature du peuple, s.l., 1789, BN Lb39 6977.
3342 Les vices découverts ou avis à mes concitoyens, sur quelques objets importants relatifs à l’état présent des affaires, En France, 1789, BN Lb39 1195 p. 7.
3343 Mémoire des avocats du Parlement de Bretagne sur les moyens d’entretenir l’union entre les différents ordres de l’État, Rennes, 22 décembre 1788, BN Lb39 563 p. 24. En effet, le cahier du tiers état de Châlons-sur-Marne affirme que « le tiers état [est] la portion la plus considérable de la nation ou plutôt qui la compose presque toute entière », (A.P., t. 2, p. 590).
3344 M. Morabito, Histoire constitutionnelle, op. cit., p. 30.
3345 Le droit des nations et particulièrement de la France, fondé sur les principes immuables de la raison et sur l’histoire de la monarchie française, s.l., 1789, BN Lb39 6916 p. 9.
3346 P.-E. Gautier de Sibert, Considérations sur l’ancienneté de l’existence du tiers état, Paris, Barrois, 1789, BN Lb39 1084 p. 31. « Je crois même [dit-il] que toute les fois que l’on ne voit pas dans une délibération le mot populus ou un terme équivalent, c’est une preuve que cette délibération a seulement été faite dans un Grand Conseil et non dans une assemblée nationale », (ibid., p. 52).
3347 « Il est temps que vous leviez la tête et que vous la leviez constamment, il est temps que vous rentriez dans vos droits et que vous recouvriez votre liberté originelle », (Philosophie au peuple cité par L. Lemarié, Les assemblées franque, op. cit., p. 140).
3348 C. de Casaux, Le tiers état entièrement éclairé sur ses droits ou supplément à l’avis important par le même auteur, s.l., 1788, p. 9. De plus, il ajoute : « Or, qu’est-ce qui forme le corps de la nation française ? C’est le tiers état. Pourquoi ? Parce que c’est lui qui représente essentiellement les premiers francs qui ont jeté les fondements de la monarchie ; et il représente essentiellement les premiers francs, puisque, lors de leur irruption, ils n’avaient, parmi eux, ni clergé, ni noblesse », (ibid., p. 6). On retrouve exactement les mêmes phrases dans Le tiers état de Normandie éclairé ou ses droits justifiés, s.l., 1789, BN Lb39 1106 p. 8.
3349 « Jamais la nation n’a donné son consentement à un pareil droit usurpé par la noblesse et le clergé », (De la formation des États généraux, s.l., décembre 1788, BN Lb39 6712 pp. 4-5). Pour un autre libelle, « ce ne fut ni le progrès des lumières, ni l’amour de Philippe le Bel pour le peuple (…) ce fut pour ses propres besoins » que le tiers état avait une voix délibérative aux États généraux de 1302, (Coup d’œil rapide ou notice historique sur les assemblées des États généraux du royaume, depuis l’établissement de la monarchie, Paris, Lagrange, 1788, BN Lb39 724 pp. 31-32). Bien sûr, les défenses absolutistes indiquent que pendant les premiers États généraux, « le tiers état n’y a parut qu’à genoux mais on crut avoir besoin de son consentement », (Esquisse de l’histoire de France, par un philosophe impartial. Ouvrage posthume, s.l.n.d. BN Lb39 6457 p. 14).
3350 A.P., t. 4, art. 35, p. 336.
3351 A.P., t. 1, art. 7, p. 713.
3352 H.-C. Mansfield, Le prince apprivoisé, de l’ambivalence du pouvoir, Paris, Fayard, 1994.
3353 A.-F. Prost de Royer, Dictionnaire de jurisprudence, t. 1, op. cit., p. CIV note 1.
3354 Ibid., t. 7, v° « Assemblée », p. 240.
3355 Discours à la nation sur les principaux objets dont elle doit s’occuper dans la prochaine assemblée pour la régénération de l’État, par un Français, s.l., 1789 BN Lb39 1261 p. 88.
3356 C.-L. de Bauvau, Avis au tiers état, suivi de trois lettres sur la forme des États généraux, op. cit., p. 19.
3357 Avis à toutes les assemblées d’élections par M.H…, s.l., 1789, BN Lb39 1346 p. 13.
3358 Le Prince, Essai sur la formation d’un code public national, op. cit., pp. 93, 26.
3359 « Il n’est pas bon que celui qui fait les lois les exécute, ni que le corps du peuple détourne son attention des vues générales, pour la donner aux objets particuliers. Rien n’est plus dangereux que l’influence des intérêts privés dans les affaires publiques », (J.-J. Rousseau, Du contrat social, in Œuvres, t. 3, op. cit., p. 404). Cf. aussi Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité, (ibid., p. 114).
3360 M-J. Servan, Avis salutaire au tiers état, sur ce qui fut, ce qu’il est et ce qu’il peut être, par un jurisconsulte allobroge, s.l., 1789, BN Lb39 1082 p. 5.
3361 E.-J. Sieyès, Qu’est-ce que le tiers état ?, op. cit., p. 130.
3362 « Oser donc affirmer qu’un roi de France n’a que le pouvoir exécutif, n’en faire conséquemment qu’un ministre de la nation et l’abaisser au niveau d’un simple stadhouder (…) c’est un crime de lèse-majesté », (Avis au tiers état en réponse à l’auteur de la sentinelle du peuple et autres ouvrages qu’il a fait en ce genre, s.l.n.d. BN Lb39 6771 p. 16).
3363 Le roi doit « déposer, en quelque sorte, une portion de son autorité » à la nation afin que celle-ci puisse trouver le bonheur : c’est un acte de charité car le monarque est un roi tout puissant, (Tous ensemble, s.l.n.d. BN Lb39 1139 p. 7). Cf. aussi P.-A. Grouvelle, De l’autorité de Montesquieu dans la révolution présente, s.l., février 1789, BN Lb39 1203 pp. 53, 55 notes 1, 114. Philippe-Antoine Grouvelle était clerc de notaire et secrétaire de commandement du prince de Conti.
3364 Réflexions d’un citoyen sur la séance royale tenue au Parlement le 19 novembre 1787, op. cit., p. 14 ; Catéchisme national, op. cit., p. 7 ; Considérations sur les principaux objets qui doivent occuper l’attention des prochains États généraux, s.l.n.d. BN Lb39 739 p. 13.
3365 J. Delaunay, Analyse de la brochure intitulée : Des conditions nécessaires à la légalité des États généraux, s.l., 1788, BN Lb39 832 p. 4.
3366 C.-F. Volney, Des conditions nécessaires à la légalité des États généraux, op. cit., p. 13.
3367 Arrêté des Provençaux, s.l.n.d. BN Lb39 390 p. 3.
3368 J. Pétion de Villeneuve, Avis aux Français, op. cit., p. 206.
3369 « De ces deux personnes, l’une est souveraine, c’est la nation ; l’autre dépendante, c’est le roi. L’une paye et l’autre sert », (J.-B. Salaville, De l’organisation d’un État monarchique, op. cit., p. 23).
3370 J.-N. Billaud-Varenne, Despotisme des ministres de France, t. 2, op. cit., p. 317.
3371 Constitution de la France ou droits du roi et des sujets, op. cit., p. 13. « Qui emprunte contracte une dette ; cette dette absorbant un capital, ce capital se trouve nécessairement aliéné ; or le roi qui n’est et ne peut être qu’administrateur, ne peut aliéner, par conséquent il ne peut pas emprunter », (Deuxième suite de la conférence du ministre avec le conseiller, op. cit., p. 9). « Plaignons Louis XVI, à qui on n’a peut-être jamais dit que le royaume que ses ancêtres lui ont transmis n’est point une propriété, qu’il n’en est que l’administrateur (…) Que le trésor, appelé très improprement royal, étant le dépôt de tous les tributs volontaires des sujets, appartient à la nation, et que le prince n’en est que le dispensateur et l’économe », (Avis à la nation assemblée, op. cit., pp. viii-ix).
3372 Les réflexions et la résolution d’un roi, En France, 1788, BN Lb39 583 pp. 8-9.
3373 Catéchisme d’un peuple libre, Londres, 1789, BN Lb39 6913 p. 6.
3374 « Le roi doit être le général né, le chef suprême du pouvoir militaire pour tout ce qui regarde la discipline des troupes et leur emploi au dehors contre les ennemis de l’État ; mais il ne peut en faire usage au-dedans contre des citoyens, qu’à la réquisition du pouvoir civil », (F.-H. de Virieu, Dialogue sur l’établissement et la formation des assemblées provinciales dans la généralité de Grenoble, s.l., 1787, p. 152) ; Discours de l’orateur des trois ordres, op. cit., p. 44.
3375 Catéchisme politique, monarchique et français, s.l.n.d. BN Lb39 7111 p. 3.
3376 Réflexions d’un citoyen, op. cit., p. 36.
3377 A.-F. de Ferrand, Essai d’un citoyen, s.l.n.d. BN Lb39 6928 pp. 71-72.
3378 J. Pétion de Villeneuve, Avis aux Français, op. cit., p. 113.
3379 L’article dispose que « le roi est le chef suprême de l’armée de terre et de l’armée navale » ; l’article 2 lui confère le droit de nommer en matière civile, militaire et le droit de surveiller la fabrication des monnaies. L’article 1 section III dispose que « le roi seul peut entretenir des relations politiques au dehors » et l’article 3 section III qu’« il appartient au roi d’arrêter et de signer avec toutes les puissances étrangères, tous les traités de paix, d’alliance et de commerce ».
3380 Cahier du clergé de Pont-à-Mousson, (A.P., t. 2, art. 3, p. 228) ; cahier du tiers état d’Auch, (A.P., t. 2, art. 9, p. 97) ; cahier du tiers état de Chartres, (A.P., t. 2, section II, art. 9, p. 629) ; cahier de la noblesse de Châteauneuf en Thimerais, (A.P., t. 2, art. 1, p. 640) ; cahier du tiers état de Château-du-Loir, (P. Bois, Cahiers de doléances du tiers état de la sénéchaussée de Château-du-Loir, 1960, p. 71).
3381 A.P., t. 3, art. 3, p. 99.
3382 Observations sur divers objets importants, Berlin, 1787, BN Ms Joly de Fleury 1043 f° 49 v°.
3383 J. Pétion de Villeneuve, Avis aux Français, op. cit., p. 38.
3384 J.-I. Engels, « Dénigrer, espérer, assumer la réalité : le roi de France perçu par ses sujets, 1680-1750 », RHMC, juillet-septembre 2003, n° 50-3, p. 105.
3385 J.-L. Carra, Considérations, recherches et observations sur les États généraux, op. cit., p. 5.
3386 Ibid.
3387 Sur cette question : Est-il nécessaire ou utile que les États généraux de 1789 soient convoqués dans la forme de ceux de 1614, s.l., 1788, BN Lb39 820 p. 5 ; cahier de doléances de la noblesse de Clermont-Ferrand, (A.P., t. 2, p. 766).
3388 « Le roi lui-même est individuellement égal aux autres ; il est même inférieur aux citoyens collectivement assemblés ; parce qu’alors la volonté de tous ceux qui constitue le roi, n’est plus dans le roi mais dans cette assemblée », (J.-B. Salaville, De l’organisation d’un État monarchique, op. cit., p. 38).
3389 Axiomes du citoyen de la capitale, op. cit., p. 2.
3390 Considérations sur les principaux objets qui doivent occuper l’attention des prochains États généraux, op. cit., p. 7.
3391 A.P., t. 2, p. 480.
3392 « Le monarque, sujet comme les autres mortels aux faiblesses inséparables de l’humanité, est exposé comme eux aux surprises de la séduction », (itératives remontrances du 24 novembre 1781 du Parlement de Besançon, ADD série B 2845 pièce 7 f° 3 v°).
3393 J.-B. Salaville, De l’organisation d’un État monarchique, op. cit., p. 36.
3394 Les comme si, s.l.n.d. BN Lb39 6464 p. 4.
3395 « Jusqu’à présent c’étaient les peuples qui faisaient des remontrances au souverain : aujourd’hui c’est le souverain qui fait des remontrances à son peuple », (Projet de lettre aux États généraux sous le nom de roi, s.l., 1789, BN Lb39 1799 pp. 14-15).
3396 M. Ozouf, Dictionnaire critique de la Révolution française, v° « Régénération », op. cit., p. 821 ; A. de Baecque, « L’homme nouveau est arrivé », Revue Dix-Huitième Siècle, 1988, n° 20, p. 194 ; M. Gauchet, La révolution des droits de l’homme, Bibliothèque des Histoires, Paris, NRF-Gallimard, 1989, p. 23.
3397 A.-P. Barnave, Introduction à la Révolution française, op. cit., p. 93.
3398 « Une multitude d’hommes ne devient une société, une nation, qu’autant qu’il résulte de leur association une telle union de volontés et de forces, que l’on peut en quelque sorte considérer cette multitude d’individus comme une seule personne morale, un seul corps politique, dont toutes les parties sont tellement liées entre elles, qu’elles n’ont plus qu’un même principe de vie », (Considérations sur les principaux objets qui doivent occuper, op. cit., p. 3). « Qu’est-ce que le corps politique ? Celui qui a deux mobiles, puissance législative et puissance exécutrice, de même que l’homme est composé d’âme et de corps », (Catéchisme d’un peuple libre, op. cit., p. 8). Il y a donc le corps politique - « un » - et de l’autre côté le gouvernement - « un autre ». Le premier se traduit par « la réunion légale des membres d’une association civile, votant et délibérant librement sur leurs intérêts communs », le second par « l’exercice de la force nécessaire, communiqué par le corps politique à un ou plusieurs agents pour mettre en œuvre ses résolutions », l’un « délibère », l’autre « agit », (Les vrais principes constitutionnels, précédés d’une lettre à MM. les députés aux États généraux, sur la distinction des deux pouvoirs, s.l., 1789, BN Lb39 7110 pp. 7-8).
3399 J. Barbeu-Dubourg, Petit code de la raison humaine, s.l., 1789, p. 57. De plus, « le monarque est comme le père ou le patriarche de la nation, qui fait courir ses enfants, grands et petits, au bien commun de la famille », (ibid., p. 67).
3400 J.-B. Salaville, De l’organisation d’un État monarchique, op. cit., p. 44.
3401 Ibid., p. 48.
3402 Catéchisme d’un peuple libre, op. cit., p. 11. Cf. J.-J. Rousseau, Du contrat social, liv. III, chap. 11.
3403 « Le mouvement de la législation me paraît être au corps, ce qu’est au corps humain le mouvement du diaphragme, le mouvement d’inspiration ou de respiration : c’est le mouvement législatif qui constitue la vie du corps politique », (N. Bergasse, Lettre de M. Bergasse sur les États généraux, Paris, 12 février 1789, BN Lb39 1161 p. 17).
3404 « Il faudrait considérer les lois comme sortant du sein de la nation plutôt que de la tête du monarque. C’est la nation qui, presque partout, fait la loi, et qui de plus la confirme. Quand la nation est vicieuse, les lois sont absurdes et tyranniques ; quand le peuple est vertueux politiquement, c’est-à-dire, assez courageux pour faire entendre sa voix, et lui donner un poids respectable, il est toujours libre », (L-S. Mercier, Notions claires sur les gouvernements, t. 1., op. cit., p. 139).
3405 J.-N. Moreau, Maximes fondamentales du gouvernement français ou profession de foi nationale, Paris, Moutard, 24 mai 1789, BN Lb39 1727 p. 16.
3406 « Telle est la nation, dans notre gouvernement ; tous les sujets qui la composent ont des droits, mais dispersée, ni assemblée, elle n’a aucune autorité : elle doit attendre tout du monarque, elle peut tout lui représenter, tout lui demander, et c’est pour cela que cette constitution sur laquelle elle n’influe que par sa liberté, a placé partout à portée d’elle une foule d’agents intermédiaires essentiellement subordonnés par nos lois à la puissance royale ; mais, par nos lois aussi, essentiellement destinées à défendre tous les droits dont elle est la protectrice et la sauvegarde », (J.-N. Moreau, Exposition de défense, t. 2, op. cit., p. 263).
3407 Ibid., p. 216.
3408 « Si, au contraire, vous divisez cette association ; si vous la supposez, non se conduisant comme un corps unique, mais morcelée par la désunion de tout ce qui la compose ; si le mouvement qu’elle éprouve n’est plus que l’agitation intérieure de toutes les parties de la masse ; alors elle n’est ni mue, ni agissante comme nation, et il faut nécessairement que vous en reveniez à y envisager les rapports particuliers ou d’homme à homme, ou de corps à corps, ou des uns et des autres avec la puissance. Il ne s’agira donc plus ni des droits ni des devoirs de la nation, mais des droits et des devoirs d’individus pris un à un », (ibid., p. 219).
3409 E.-J. Sieyès, Qu’est-ce que le tiers état ?, op. cit., p. 180.
3410 J.-A. Brun de la Combe, Le point de ralliement des citoyens français sur les bases d’une constitution nationale et sur les pouvoirs des députés, s.l., 1789, BN Lb39 1285 p. 71.
3411 « Depuis longtemps le malade est dans l’usage capricieux de faire quelquefois quatre ou cinq repas par jour et de rester ensuite quatre ou cinq jours sans rien prendre : il est arrivé de là que les sucs nourriciers se portant en trop grande abondance dans plusieurs parties du corps, ont produit à l’extérieur des excroissances et des plaies douloureuses : et au-dedans ils ont formé un engorgement notable dans les poumons. Le cœur est attaqué de palpitations cruelles qui semblent annoncer que le malade est en danger. Heureusement la tête est en bon état, malgré l’excès d’embonpoint qui gêne les organes des sens, et l’estomac, quoique faible, ne refuse pas encore de remplir ses fonctions », (ibid., p. 72).
3412 J.-B. Salaville, De l’organisation d’un État monarchique, op. cit., p. 54.
3413 Ibid., p. 55.
3414 Catéchisme d’un peuple libre, op. cit., pp. 7-8.
3415 Idées sur les cahiers à faire pour les États généraux de 1789, suivies de maximes sur les gouvernements, s.l.n.d. BN Lb39 6662 p. 20 ; Inspirations de la grâce suffisante, op. cit., p. 1.
3416 Dangers d’une commission intermédiaire des États généraux, s.l.n.d. BN Lb39 6645 p. 2.
3417 « L’époque à laquelle une nation se régénère est bien plus critique que celle où elle prend sa place parmi les autres nations. Ici, elle n’a qu’une opération à faire, qui est de former le pacte social. Lorsqu’elle se régénère, elle en a deux, qui consistent à détruire et ensuite à réédifier », (Intérêts du tiers état de ne choisir ses représentants que dans son ordre, s.l., 1789, BN Lb39 1091 p. 26).
3418 J.-L. Carra, L’orateur des États généraux pour 1789, s.l.n.d. BN Lb39 1643 p. 30.
3419 Je ne suis point de l’avis de tout le monde, s.l., 1789, BN Lb39 1169 p. 48.
3420 Réflexions d’un membre du tiers état à ses confrères, s.l.n.d. BN Lb39 1083 pp. 8-9. Il ajoute : « Quoi, vous ne sentez pas qu’en voulant vous détacher du clergé et de la noblesse, vous allumez le flambeau de la discorde dans le royaume, et qu’en voulant les jeter dans le précipice, vous y serez vous-mêmes entraînés avec eux ! (…) Une guerre civile est inévitable », (ibid., p. 9).
3421 « Quand une nation, longtemps subjuguée, commence à se passionner pour une liberté dont elle ne s’est point encore formée une juste idée, il s’élève nécessairement, dans la partie de cette nation la plus opprimée, une fermentation et une chaleur qui lui font exagérer ses plaintes sur le passé et ses espérances pour l’avenir », (M.-J. Servan, Pensées détachées à l’usage de la nation française depuis le 1er mai 1788, s.l.n.d., p. 103).
3422 A.P., t. 3, p. 256.
3423 Remontrances du 14 décembre 1787 du Parlement de Pau, BN Lb39 478 p. 4.
3424 Discours du premier président de la Chambre des comptes de Paris du 19 septembre 1787, BN Lb39 6344 p. 3.
3425 Remontrances du 22 décembre 1787 du Parlement de Rennes, BN Lb39 483 p. 11.
3426 Remontrances du 23 janvier 1788 du Parlement de Metz, (AN K 710 pièce 73 f° 6 v°).
3427 « C’est à la justice, à la vertu et à la modération de notre monarque que la France devra sa régénération », (Considérations sur la prochaine ouverture des États généraux, s.l.n.d. BN Lb39 721 p. 6).
3428 J.-J. Lenoir-Laroche, Observations sur les principes de la constitution, op. cit., p. 41.
3429 « Régénérer la nation ! Est-elle donc si dégénérée ? Demandez-le à cette noblesse, toujours prêtes à servir son roi (…) Demandez-le à ces magistrats qui conservent intact le dépôt qui leur a été confié », (A.-L. Séguier, Façon de voir d’une bonne vieille, op. cit., p. 34).
3430 « On a aujourd’hui la rage de détruire ; mais avant de détruire, il faut avoir le talent de pouvoir mettre quelque chose en place. Nous donnons toujours dans les extrémités », (Je ne suis point de l’avis de tout le monde, op. cit., p. 17).
3431 J. Albisson, Lettre d’un avocat à un publiciste à l’occasion de la prochaine assemblée des États généraux du royaume, t. 1, s.l., 18-24 novembre 1788, BN Lb39 705 p. 4 ; J.-B. Salaville, De l’organisation d’un État monarchique, op. cit., p. 74. Albisson était conseiller d’État, archiviste et membre du Conseil des États du Languedoc.
3432 Du gouvernement national, par M. S*, Neuchâtel, 1789, BN Lb39 1291 p. 11.
3433 C. de Casaux, Quelques idées sur les grandes questions du moment, s.l., 1788, p. 27 ; le Prince, Essai sur la formation d’un code national, op. cit., p. 7.
3434 « La France, au dix-huitième siècle, est en quelque sorte un nouvel Empire ; et, puisque les circonstances ont amené pour elle la nécessité d’une régénération, elle doit l’établir sur une base qui assure le bonheur public, tant pour l’âge présent que pour les âges à venir : en respectant sans doute les droits des différents ordres, mais beaucoup plus ceux de l’homme, qui sont sacrés dans toute association », (Opinions désintéressées sur les affaires présentes, s.l., 1789, BN Lb39 1193 p. 10).
3435 L’innovation utile ou la nécessité de détruire les Parlements, op. cit., pp. 11-12.
3436 « Toute cette rouille du despotisme féodal doit disparaître dans le siècle le plus éclairé, dans un moment où la nation invoque une régénération nouvelle », (E. Chaillon, Aux bons patriotes, salut, s.l.n.d. BN Lb39 686 p. 4).
3437 Le peuple de la Guyenne au roi, s.l., 1788, BN Lb39 6408 p. 14. D’ailleurs, P.-V. de Sèze indique qu’une « suite de fautes dues autant peut-être à la légèreté du caractère national, qu’aux conseils intéressés des courtisans ou à l’imprudence des ministres, nous ont fait sentir le besoin d’une régénération absolue qui, sans dénaturer notre gouvernement monarchique, l’appuyât sur une base solide », (Les vœux d’un citoyen, discours adressé du tiers état de Bordeaux à l’occasion des lettres de convocation pour les États généraux, Bordeaux, 1789, BN Lb39 1009 pp. 8-9).
3438 « Mais maintenant, le premier, l’essentiel pour ne pas dire l’unique objet des États généraux actuels est : la réformation de tous les vices et abus introduits dans les perceptions, recouvrement et administration des finances de l’État (…) en un mot, il s’agit d’une régénération totale et générale de la nation », (La vérité à la noblesse française, s.l.n.d. BN Lb39 6696 p. 7). Cf. aussi le Mémoire des avocats du Parlement de Bretagne sur les moyens d’entretenir l’union, op. cit., pp. 15-16, 49-50.
3439 P. Nora, Dictionnaire critique de la Révolution française, v° « Nation », op. cit., pp. 801-802.
3440 Aux États généraux sur les réformes à faire, s.l., 1789, BN Lb39 1306 p. 4 ; Les comme si, op. cit., p. 2.
3441 « Le premier devoir d’un citoyen n’est-il pas de voter la conservation et la prospérité de l’État ? », (J.-B. Salaville, De l’organisation d’un État monarchique, op. cit., p. 91).
3442 J. Saige, Catéchisme du citoyen, op. cit., p. 2.
3443 « La conservation de soi-même, voilà le droit de la nature. La conservation de nos semblables, voilà le droit de la société. La conservation de l’État et du trône, voilà le droit de la monarchie », (J.-A. Cérutti, Vues générales sur la constitution française, op. cit., p. 151).
3444 J. Pétion de Villeneuve, Avis aux Français, op. cit., p. 11.
3445 « Un corps moral a, comme un corps physique, l’enfance, l’âge viril et la vieillesse. L’enfance d’un peuple dure quelquefois longtemps et la notre en est un exemple ; mais enfin elle a fait place à la maturité », (Discours à la nation, sur les principaux objets dont elle doit s’occuper, op. cit., p. 22).
3446 « La partie même du peuple, qu’on se permet d’appeler populace, a plus de jugement qu’autrefois et plus de perspicacité qu’on ne pense : ce n’est plus le peuple de la Ligue ou de la Fronde », (La paix, l’union, la concorde, s.l.n.d. BN Lb39 1138 p. 13).
3447 E.-J. Sieyès, Vues sur les moyens d’exécution dont les représentants de la France pourront disposer en 1789, s.l., 1789, BN Lb39 1266 p. 4.
3448 Ibid., p. 13.
3449 Ibid., p. 174.
3450 « Sire, traitez le peuple comme on traite l’abeille. On se garde bien de lui ôter tout son miel et toute sa cire : on découragerait son industrie. Pour entretenir son activité, laissez-lui sa part abondante aux fruits de son butin. Souvenez-vous et n’oubliez jamais que les rois ne sont que les pasteurs de leurs peuples. Le troupeau n’est pas fait pour eux ; ils ne sont eux-mêmes tout ce qu’ils sont, que pour notre bonheur », (L.-P. Bérenger, Les quatre états de la France, op. cit., p. 17).
3451 Le vol innocent ou manuscrit d’un gentilhomme breton, op. cit., p. 5.
3452 « L’éducation est le gouvernement de l’enfance. En élevant des enfants, elle doit préparer des hommes (…) Nulle puissance humaine n’a le droit d’arrêter le progrès des lumières. Nulle science ne peut être proscrite sous prétexte qu’elle serait dangereuse. Nulle classe ne doit être exclue des bienfaits de l’instruction », (J.-A. Cérutti, Vues générales sur la constitution française, op. cit., pp. 108-109).
3453 E. Chaillon, Aux bons patriotes, salut, op. cit., p. 8.
3454 J.-L. Seconds, Essai sur les droits des hommes, des citoyens et des nations ou adresse au roi sur les États généraux et les principes d’une bonne constitution, s.l., 1789, BN Lb39 6915 p. 33 note 1. Seconds est cadre des eaux et forets en 1789 et sera député à la Constituante et membre de la Convention. Cf. l’article de Y. Roucaute, « Surtout, surtout. Jean-Louis Seconds, théoricien de la terreur », Déclarations de l’an I, actes du colloque de Poitiers des 2-3 décembre 1993, textes réunis par J.-M. Augustin, Paris, PUF, 1995, pp. 15-35.
3455 A.-P. Barnave, Lettre d’un membre du tiers état dauphinois à un zélé citoyen, s.l.n.d., p. 3.
3456 L.-S. Mercier, Notions claires sur les gouvernements, t. 1., op. cit., p. 125.
3457 « Quand la nation est éclairée et vigilante sur ses intérêts, elle n’est jamais réellement asservie ; elle ne saurait même l’être, parce que la partie qui domine étant incessamment surveillée, ne peut plus agir capricieusement. Il faut que le monarque ou ses représentants conquièrent l’estime d’un peuple qui existe dès lors politiquement. Il est impossible de le traiter avec dureté, avec hauteur, parce que la nation recèle dans son sein un grand nombre d’hommes qui réfléchissent, qui parlent, qui écrivent, qui s’instruisent des devoirs respectifs des membres de l’État, qui en éloignent la stupeur et l’apathie, le vice politique le plus dangereux de tous », (ibid., pp. 134-135).
3458 L.-A. de Caraccioli, Des prérogatives du tiers état par la duchesse de ***, née plébéienne, s.l.n.d. BN Lb39 1085 p. 8.
3459 Ibid., p. 7.
3460 Ibid., p. 15.
3461 Ibid., p. 16.
3462 A. Morellet, Projet de réponse à un mémoire répandu, op. cit., p. 8.
3463 C.-G. de Malesherbes, Mémoire sur la liberté de la presse, op. cit., p. 235.
3464 De la différence qu’il y a entre les États généraux et les assemblées nationales ou principes radicaux de la constitution, s.l., 1789, BN Lb39 1282 p. 26.
3465 D. Thiébault, Mémoire sur la liberté de la presse, suivi de quelques autres mémoires concernant la librairie, s.l.n.d. BN Lb39 6786 pp. 7-8.
3466 Le maréchal de Richelieu aux Champs Élysées, s.l.n.d. BN Lb39 627 p. 12.
3467 Cahier de la noblesse de Château-Thierry, (A.P., t. 2, art. 69, p. 665).
3468 Cahier du clergé de Beauvais, (A.P., t. 2, p. 289).
3469 Cahier du tiers état d’Auxerre, (A.P., t. 2, art. 1, p. 123) ; cahier de la noblesse de Saint-Mihiel, (A.P., t. 2, art. 12, p. 243).
3470 « L’éducation prend l’homme des mains de la nature ; elle forme son esprit et son âme : elle le pénètre de cette morale vraiment sublime qui développe dans son cœur les devoirs de la religion, les règles de mœurs, les principes des sciences et l’amour de la patrie », (cahier du tiers état et du clergé de Bruyère en Lorraine, A.P., t. 4, art. 9, p. 10).
3471 On peut prendre parmi de nombreux exemples un libelle de fin mai 1789 affirmant « que les principes élémentaires de la législation et les droits constitutifs de la nation soient professés et enseignés dans tous les collèges et maisons d’éducation », (Projet de déclaration des droits nationaux, s.l.n.d. BN Lb39 7222 p. 6).
3472 Cahier du tiers état de Riom, (A.P., t. 5, art. 23, p. 571).
3473 Cahier de la commune d’Antony, (A.P., t. 4, art. 22, p. 299).
3474 Cahier du tiers état de Bordeaux, (A.P., t. 2, p. 405).
3475 C. Bloch, Cahiers de doléances du bailliage d’Orléans, t. 2, Orléans, 1907, p. 316.
3476 « Le roi n’est donc qu’un homme, lorsqu’il manifeste sa propre volonté, mais il est un dieu, lorsqu’il est l’organe de la volonté générale. Image de la divinité sur la terre, il est présent à la fois dans toute l’étendue de son Empire parce qu’il est la volonté de tous ceux qui l’habitent », (J.-B. Salaville, De l’organisation d’un État monarchique, op. cit., pp. 38-39).
3477 J.-D. Lanjuinais, Le préservatif contre l’avis, op. cit., p. 20.
3478 J.-J. Rousseau, Lettres écrites de la montagne, in Œuvres, t. 3, op. cit., p. 705.
3479 Avis aux provinces, s.l.n.d., p. 7.
3480 Catéchisme d’un peuple libre, op. cit., pp. 6-7.
3481 Réflexions d’un citoyen sur la séance royale tenue au Parlement le 19 novembre 1787, op. cit., p. 12.
3482 Lettre d’un gentilhomme bourguignon à un gentilhomme breton, op. cit., p. 9.
3483 « Quand j’invoque ici le tribunal de la nation, je n’entends pas seulement l’assemblée des États généraux composée des trois ordres, dont chacun n’a jamais eu en vue que son intérêt particulier mais le peuple même, qui seul est compétent pour juger ce qui lui convient, ou ne lui convient pas, par conséquent pour accepter ou rejeter les lois qui lui sont proposées ; puisque étant les conditions du contrat qui lie les hommes entre eux, elles ne peuvent devenir obligatoires qu’après l’aveu formel et le consentement des différentes parties contractantes. C’est un droit inhérent à tout être libre, droit qu’il ne perd point en passant de l’état sauvage à celui de société, droit contre lequel rien ne peut prescrire, qui a été reconnu de tout temps, et par tous les législateurs, que l’on suit dans tous les actes de la vie civile, droit en un mot dont Dieu même, quoique souverain arbitre humain, ne s’écarta point en formant un traité d’alliance avec sa créature », (Réflexions d’un citoyen adressées aux notables sur la question proposée par un grand roi, op. cit., pp. 54-55 note m).
3484 J. Saige, Code national ou manuel à l’usage des trois ordres et principalement des députés aux prochains États généraux, En France, 1789, BN Lb39 6911 p. 8 note 1.
3485 G.-N. Maultrot, Origine et étendue de la puissance royale suivant les livres saints et la tradition, t. 1, Paris, Le Clère, 1789, p. 19.
3486 Ibid., p. 20.
3487 La politique et les vrais intérêts du tiers état, op. cit., p. 7.
3488 N.-S. Bergier, Quelle est la source de toute autorité ?, s.l.n.d. BN Lb39 6918 p. 47. « Dès qu’une société civile ou nationale est une fois établie, quelqu’en soit le gouvernement, elle est obligée, de droit naturel, à conserver et à protéger toute créature humaine qui naît dans son sein ; elle en est censée la mère, de même que Dieu en est le premier père », (ibid., p. 25). Cf. aussi la brochure Français, qu’allez-vous faire ?, s.l.n.d. BN Lb39 6809 pp. 2, 4.
3489 Essai sur le droit public, Londres, 1789, BN Lb39 1274 p. 80.
3490 E. Mignonneau, Suite des considérations politiques, s.l.n.d. BN Lb39 6334 p. 2.
3491 Ibid., pp. 136-137.
3492 Coup d’œil impartial et notions exactes sur la monarchie française, s.l., 1789, BN Lb39 1295 p. 5.
3493 Correspondance d’un citoyen, s.l., février 1787, BN Lb39 6310 p. 11.
3494 C.-G. de la Luzerne, Sur la forme d’opiner aux États généraux par l’évêque duc de Langres, s.l., 1789, BN Lb39 985 A p. 15.
3495 A.-J. d’Auget, Mémoire des princes présenté au roi, op. cit., p. 11.
3496 Remerciements et supplique du peuple au roi à l’occasion de l’assemblée des notables, Bruxelles, 1787, BN Lb39 6297 p. 7 ; Réflexions impartiales sur la grande question qui partage les esprits concernant les droits du roi et de la nation assemblée en États généraux, s.l., 1788, BN Lb39 818 pp. 6, 8. « Peuple loyal et généreux, dont les manières, les modes, l’esprit d’activité industrieuse servent de modèle à toutes les nations, refuseriez-vous de leur donner aussi l’exemple de la méthode la plus glorieuse de subvenir aux besoins publics ? », (Nouveau plan de législation financière adapté aux circonstances présentes et au génie national, Paris, Veuve Ballard, 1787, BN Ms Joly de Fleury 1043 f° 37). « L’auguste monarchie appartient à notre situation physique et à notre caractère moral », (P.-L. Lacretelle, De la convocation, op. cit., p. 3). « Vive le roi ! est le cri naturel de la nation ; sur terre, sur mer, au loin et auprès, dans tous les cas et sous tous les règnes, sous le votre, Sire ; et si Votre Majesté daigne se montrer dans toutes les provinces, bientôt les petits de la campagne bégayeront vive papa roi ! Santé, force, bon appétit, manière brusque, et dédain de ce que nos anciens appelaient les afféteries mais loyauté, bonté, droiture : Sire, voilà nos mœurs ; seraient-elles capables de vous déplaire ? », (Credo du tiers état ou symbole politico-moral, op. cit., p. 12).
3497 P.-V. de Sèze, Les vœux d’un citoyen, op. cit., p. 22.
3498 E.-J. Sieyès, Qu’est-ce que le tiers état ?, op. cit., p. 57.
3499 Ibid., pp. 106-107. « À sa première époque, elle a tous ceux d’une nation. À la seconde époque, elle les exerce ; à la troisième, elle en fait exercer par ses représentants », (ibid., p. 113).
3500 Ibid., p. 115.
3501 « L’état des personnes en France n’est pas le fruit du hasard, il a été déterminé par le génie de la nation », (cahier du clergé du Nivernais et Dionziais, A.P., t. 4, art. 10, p. 248). Selon le cahier de la noblesse de Montpellier, « la régénération de l’État ne [peut] s’effectuer sans la réformation des mœurs », (A.P., t. 4, art. 17, p. 47). De plus, d’après le cahier du tiers état de Lyon, « il sera formé un code national adapté à nos mœurs », (A.P., t. 3, p. 610). Cf. dans le même ordre d’idée le cahier d’Alençon, (A.P., t. 1, art. 3, p. 708) et le cahier de la noblesse de Castres, (A.P., t. 2, art. 16, p. 565).
3502 « Je n’ai pas dit, Milord, que les lois constitutionnelles d’un peuple, doivent toujours durer et qu’une génération nouvelle doive conserver une stupide vénération envers des lois constitutionnelles qui ne lui conviendraient plus, et qui seraient opposées à ses intérêts. Des mœurs différentes, une révolution physique, des accidents qu’on n’avait pas prévus exigent quelquefois des changements », (A. Achard de Germane, Lettre d’un avocat au Parlement du Dauphiné, op. cit., p. 13).
3503 J.-D. Lanjuinais, Réflexions patriotiques sur l’arrêté, op. cit., p. 26.
3504 « Nous ne sommes point un peuple nouveau sur lequel les lois, les coutumes, les préjugés mêmes n’aient aucune influence », (P.-V. Malouet, Premier discours sur la constitution des communes en Assemblée nationale, 8 juin 1789, in Orateurs de la Révolution, op. cit., p. 448).
3505 A.P., t. 9, p. 33.
3506 C.-P. Coqueau, Examen des moyens adoptés pour augmenter le pouvoir et améliorer le sort du tiers état, s.l., 1789, BN Lb39 1090 p. 73. Claude-Philibert Coqueau est architecte.
3507 « On peut dire de la nation française qu’elle n’est pas libre comme certains peuples, mais qu’elle n’est pas esclave comme plusieurs. Son gouvernement est tempéré comme son climat et son caractère, rien n’y est exagéré, rien n’y est extrême. Le pouvoir absolu a souvent essayé de l’asservir, mais il y a en elle une énergie qui repousse sans cesse le despotisme, et l’esprit national est comme un ressort, qui se rétablit de lui-même aussitôt qu’on cesse de le comprimer », (Idée du gouvernement français, op. cit., f° 6).
3508 J.-N. Billaud-Varenne, Despotisme des ministres de France, t. 2, op. cit., p. 387.
3509 Lettre d’un Suisse aux Français pour concilier les trois ordres, Berne, 1789, BN Lb39 1137 p. 21.
3510 Réflexions modérées d’un citoyen, s.l.n.d. BN Lb39 6810 p. 6.
3511 Matières intéressantes à traiter aux États généraux, s.l., 1789, BN Lb39 1260 p. 11.
3512 Coup d’œil approfondi sur le mémoire de M. le comte d’Antraigues et les États généraux, Amsterdam, 1789, BN Lb39 6779 p. 8.
3513 C.-F. Lubersac de Livron, Le citoyen conciliateur, contenant des idées sommaires politiques et morales sur le gouvernement monarchique de la France, t. 1, Paris, Gattey-Desenne-Croullebois, 1788, BN Lb39 718 pp. 51-52.
3514 P.-P. le Mercier de la Rivière, Essais sur les maximes et lois fondamentales de la monarchie française, Versailles, Vieillard, 1789, BN Lb39 1294 p. 5.
3515 L.-S. Mercier, Notions claires sur les gouvernements, t. 1, op. cit., p. 98.
3516 Ibid., p. 103.
3517 « Il est important d’établir ou de maintenir l’orgueil national quelconque, car c’est lui qui inspire de grandes choses : les coutumes nationales, imprimées dans l’enfance, contractent la force des principes pratiques », (ibid., t. 2, p. 75).
3518 Ibid., p. 113.
3519 Ibid., p. 141. De plus, « la coutume est bien plus dangereuse qu’une mauvaise loi : celle-ci tombe d’elle-même ; l’autre inhérente à la constitution, ne laisse pas toujours l’espérance consolante de la voir anéantir, et dans ce chaos, quand il faut combiner de nouvelles lois toujours incertaines avec des lois anciennes pleines de vigueur, unir l’ancien génie de la nation à des maximes nouvelles, ménager certains abus privilégiés, tandis qu’on en attaque d’autres, que fera-t-on sans le génie national, c’est-à-dire, sans sa volonté qui se réfléchit dans les siècles, pendant que les rois passent ? », (ibid., pp. 226-227).
3520 Ibid., p. 197.
3521 Le Genevois le sera aussi pour un libelle fin mai 1789, le citant à plusieurs reprises à propos de la rédaction de la constitution. En effet, « cependant, comme pour l’établissement de telles ou telles lois constitutives, il faut observer les convenances d’une nation, c’est-à-dire ses mœurs, le climat, la fertilité, la position », (Vœux libres et désintéressés d’un citoyen, adressés à un député aux États généraux, s.l., 1789, BN Lb39 7257 p. 9).
3522 C.-C. d'Agoult, Principes et réflexions sur la constitution française, s.l.n.d. BN Lb39 1284 p. 8.
3523 P.-P. le Mercier de la Rivière, Essais sur les maximes, op. cit., p. 1. En parallèle, Louis-Sébastien Mercier écrit que « l’abbé Mably n’avait pas besoin de rappeler les monuments les plus anciens et les plus respectables de notre histoire, cette assemblée générale, appelée le champ de mars, en qui résidait la puissance reconnue. Quoiqu’on dise de la fortune et des mœurs des Français, quand la liberté nationale n’aurait jamais existé, rien n’empêcherait les Français d’être libres aujourd’hui, c’est-à-dire d’établir une distinction rigoureuse entre le pouvoir des lois et le pouvoir du monarque », (Notions claires sur les gouvernements, t. 1., op. cit., p. 149).
3524 « Les Français tirent leur origine d’un peuple barbare, belliqueux et libre. Douze siècles n’ont pu encore effacer en entier aucun des traits principaux et primitifs de leurs caractères ; leur histoire, leurs mœurs et leur gouvernement en sont la preuve », (A.-S. de Kersaint, Le bon sens par un gentilhomme breton, s.l., 1788, BN Lb39 751 p. 11).
3525 Réponse au mémoire de quelques princes du sang, op. cit., p. 7.
3526 J. Bart, « Le droit, la loi, les mœurs. L’enjeu de la codification », in Du droit de province au droit de la nation, publications du Centre Georges Chevrier, n° 17, Dijon, 2003, pp. 700-703.
3527 Défense de la noblesse de Bretagne contre le tiers état, s.l.n.d. BN Lb39 771 p. 21. D’ailleurs, le Parlement de Bordeaux indiquait que les ministres « os[aient] impunément bouleverser les mœurs, les coutumes et les lois », (arrêté du 24 novembre 1787, BN Lb39 6355 pp. 2-3).
3528 « Par une inconséquence dont on trouverait peu d’exemples, on vantait sans cesse l’esprit national qui avait éclaté en France ; et lorsqu’il s’agissait de l’éprouver, on le croyait entièrement concentré dans l’enceinte des tribunaux », (Fragments sur l’histoire de France. Règne de Louis XVI, Londres, 1788, BN Lb39 6570 p. 7). « Les mœurs sont et seront toujours le rempart des lois. La politique peut régler la forme et la constitution des États mais c’est la morale seule qui doit régler la conduite des particuliers. Quand dans un pays les mœurs domestiques sont perdues, il n’y a plus de mœurs publiques (…) un vil égoïsme a rendu stérile tout sentiment de la nature du patriotisme », (La restauration de la France, s.l.n.d. BN Lb39 754 pp. 31-32).
3529 Réveil d’un Français au temps d’Hugues Capet, Paris, 19 février 1789, BN Lb39 1220 p. 4.
3530 « Si parmi la chambre des communes il s’est élevé quelques prétentions, c’est l’effet du génie national. À chaque séance, l’ordre s’établit, la méthode prend la place de l’enthousiasme », (De la réunion des ordres. Combien il est instant que les ordres se réunissent afin de pourvoir aux besoins pressants de l’État, s.l.n.d. BN Lb39 7191 p. 5). « Tout bon citoyen convient que pour rendre à la France sa bonne constitution, il faut essentiellement s’occuper de la restauration des mœurs », (Dialogue allégorique entre la France et la vérité, dédié aux États généraux, s.l.n.d. BN Lb39 1741 p. 24).
3531 Arrêté du 14 octobre 1788 du Parlement de Rennes, BN Lb39 6589 p. 3.
3532 « Ne devions-nous pas, Sire, nous réunir lorsqu’à ces désordres, qui font gémir et les citoyens et les magistrats, un acte du Conseil, ajoutant l’outrage à la calomnie, nous dénonce à la nation comme des rebelles, des séditieux, cherchant à tromper le peuple ; à rejeter sur lui le fardeau des impôts ; voulant l’écraser sous le poids de leurs privilèges », (remontrances du 24 juillet 1788 du Parlement de Rennes, BN Lb39 6501 p. 7).
3533 Ibid., p. 10.
3534 Lettre d’un citoyen de l’ordre du tiers, s.l., octobre 1788, BN Lb39 6608 p. 4.
3535 J.-C. de la Methérie, De la convocation des États généraux, s.l.n.d. BN Lb39 709 p. 13. Cf. aussi les libelles : Intérêt du tiers état de ne choisir ses représentants que dans son ordre, op. cit., p. 38 et Très humbles supplications aux notables patriotes, op. cit., p. 5.
3536 P.-L. de Roederer, De la députation aux États généraux, s.l., 8 novembre 1788, p. 19. Roederer sera beaucoup plus connu pour sa future pensée républicaine, (I. Rademacher, « La science sociale républicaine de Pierre-Louis Roederer », RFHIP, 2001, n° 13, pp. 25-55).
3537 « L’opinion publique est sûrement d’un grand poids mais elle n’est pas toujours la vérité. Si elle l’était, il faudrait en conclure que la vérité serait variable, suivant le temps, les lieux et les circonstances ; que les opinions religieuses ou politiques seraient vraies ou fausses, suivant les pays et qu’enfin, la vérité ne serait pas la même à Paris, Londres, Pékin, Constantinople. Il faut donc du moins, pour que l’opinion publique puisse influer sur celle de l’homme sensé, que cette opinion soit appuyée sur des bases qui ne soient pas fausses ou destituées de fondement. C’est d’après ce principe que nous allons juger la prétendue opinion publique », (Observations sur l’écrit de M. Target, intitulé : Des États généraux convoqués par Louis XVI, s.l.n.d. BN Lb39 1176 pp. 54-55).
3538 J. Charron, Lettre ou mémoire historique sur les troubles, op. cit., p. 16.
3539 De la formation des États généraux, s.l., décembre 1788, op. cit., p. 10.
3540 N. Bergasse, Lettre de M. Bergasse sur les États généraux, op. cit., p. 49.
3541 « Rien n’unit autant les hommes que des idées communes et des sentiments communs. Vos opinions si impuissantes quand elles sont isolées, une fois rapprochées, auraient acquis ce caractère redouté d’opinion publique ; elles auraient formé ce ressort puissant auquel les lois, les magistrats, les rois mêmes, cèdent insensiblement », (M-J. Servan, Avis salutaire au tiers état, op. cit., pp. 18-19).
3542 L.-J. Gohier, Mémoire pour le tiers état, op. cit., p. ix.
3543 « Ce qu’on appelle lois constitutives sont la base actuelle de la constitution : le consentement général et l’opinion commune forment les lois politiques ; et si elles contredisent la première formation de l’État, elles n’en deviennent pas moins lois constitutives ou fondamentales, quand elles sont le vœu général de la nation », (L.-S. Mercier, Notions claires sur les gouvernements, t. 1, op. cit., p. 49).
3544 J.-L. Carra, Considérations, recherches et observations, op. cit., p. 11.
3545 « On parle de liberté, d’opinion publique. Qu’est-ce que la liberté politique ? La faculté de n’obéir à aucune des lois qu’à celles qu’on a sanctionnées par son approbation. Ainsi, la liberté en dernière analyse sera en raison de l’unanimité dans les opinions particulières, ce qui produirait une opinion publique, boussole du souverain… Mais si cette opinion publique, ou n’existait pas, ou était corrompue, si on n’avait que des intérêts partiaux isolés, l’égoïsme, où serait la boussole ? », (Coup d’œil approfondi sur le mémoire de M. le comte d’Antraigues, op. cit., p. 7).
3546 « Quand je dis qu’un monarque peut seul commander à l’opinion, je n’entends parler que de celui qui, loin de s’arroger un pouvoir arbitraire, ne craint point de subordonner sa puissance aux lois fondamentales de son royaume, qui sont pour lui, comme pour son peuple, la sauvegarde de leurs droits respectifs », (C. Desmoulins, Avis important sur le ministère et sur l’assemblée prochaine des États généraux, s.l., 1788, BN Lb39 12317 pp. 23-24).
3547 Avis au tiers état, en réponse à l’auteur de la sentinelle du peuple et autres ouvrages, op. cit., p. 4.
3548 M. Morabito, Histoire constitutionnelle, op. cit., p. 24.
3549 P.-L. Lacretelle, De la convocation de la prochaine tenue des États généraux, op. cit., p. 2. Cf. Récit fait par un des Messieurs toutes les chambres assemblées, les pairs y séant, le 25 septembre 1788, s.l.n.d. BN Lb39 637 p. 8.
3550 F.-E. de Toulougeon, Principes naturels et constitutifs des assemblées nationales, s.l., 1788, BN Lb39 6646 pp. 13-14. De Toulougeon est député de la noblesse de Lons-le-Saunier, (Franche- Comté).
3551 « Créons un tribunal qui représenterait, en France, cette nation idéale qui s’appelle la république des lettres. Dénomination remarquable, et qui, adoptée par tous les peuples civilisés, montre assez l’opinion générale sur la liberté qu’on doit laisser aux esprits. Ce tribunal, qui aurait la sanction et la confiance publiques, élirait un secrétaire, seul dépositaire et garant du secret des auteurs, et ceux-ci seraient obligés, par la loi, de se déclarer à lui, en livrant à l’impression leur ouvrage », (J.-B. Say, De la liberté de la presse, par M. S***, Paris, 1789, BN Lb39 6787 p. 15).
3552 « Oui, des journaux non dégradés par des paraphes, faits pour instruire le public de tout ce qui se passe aux États généraux, sont d’une nécessité absolue, pour instruire la nation de tout ce qui pourra se tramer de contraire à ses intérêts », (Coup d’oeil sur le discours prononcé par M. Necker à l’ouverture des États généraux, s.l., 1789, BN Lb39 1678 p. 41).
3553 « Il faut absolument distinguer trois espèces de société : la société naturelle entre un homme et son semblable, la société domestique entre un père et sa famille, la société civile et politique entre plusieurs familles réunies en corps de nation », (N.-S. Bergier, Quelle est la source de toute autorité ?, op. cit., p. 9).
3554 F.-E. de Toulougeon, Principes naturels et constitutifs des assemblées nationales, op. cit., p. 46.
3555 Cahier de la communauté de Fos-lès-Martigues, (A.P., t. 6, art. 33, p. 293) ; cahier des habitants de Montaigut, (A.P., t. 5, p. 577) ; cahier du tiers état de Rouen, (A.P., t. 5, art. 95, p. 602) ; cahier du tiers état de Vannes, (A.P., t. 6, p 107).
3556 Cahier du tiers état de Clermont en Beauvaisis, (A.P., t. 2, p. 757) ; cahier du bailliage d’Honfleur, art 3, (A. Blossier, Cahiers de doléances du bailliage de Honfleur pour les États généraux, Caen, 1913, p. 165).
3557 Pétitions nationales. Premier cahier. Première pétition, s.l.n.d. BN Lb39 6658 pp. 1-2.
3558 Que ceux qui ont une âme lisent ceci, Au Cap, Ile de Saint-Domingue, février 1789, BN Lb39 1222 p. 3.
3559 Ultimatum d’un citoyen du tiers état au mémoire des princes, op. cit., p. 10 ; Le peuple de Guyenne au roi, op. cit., p. 10. « Les assemblées nationales sont les images des anciens gouvernements domestiques où toute la famille rassemblée sous les yeux d’un père adoré se plaisait à lui découvrir ses besoins », (A.-F. de Landine, Des États généraux ou histoire des assemblées nationales en France, s.l., 1788, BN Lb39 728 pp. 1-2).
3560 « La patrie est le patrimoine de tous ; chacun y a un droit égal, les citoyens de tous les ordres pris collectivement pour modifier, changer, réformer tout ou partie de sa constitution, en extirper les vices, détruire les abus, faire de nouvelles lois, en supprimer, travailler à sa perfection, ne sont plus indistinctement que des citoyens, que des frères, les uns aînés, les autres cadets ; mais encore une fois, tous ne formant qu’une seule et même famille », (Mon opinion ou le vœu d’un gentilhomme normand, op. cit., p. 11).
3561 Le solitaire des Ardennes ou le médiateur impartial, s.l.n.d. BN Lb39 1135 pp. 13, 11.
3562 J.-G. Thouret, Avis des bons normands, op. cit., p. 33.
3563 Essai d’un citoyen sur les questions d’un bon patriote, s.l.n.d. BN Lb39 6425 p. 6.
3564 « Il serait bien temps de déraciner un préjugé qui porte tous les jours de nouvelles atteintes à la liberté constitutionnelle de la nation française. Confiante envers ses princes, dont elle fut toujours idolâtre, elle vit d’abord sans ombrage leurs ordres privés s’exécuter contre les formes prescrites par la loi, parce qu’elle n’aperçut alors que ceux d’un père qui corrige avec douceur des enfants qu’il chérit ; et dans le vrai, les premières lettres de cachet dont nos rois firent usage, n’eurent d’autre but que celui de mitiger la peine ou d’en sauver la honte à des sujets coupables », (C. Desmoulins, Avis important sur le ministère, op. cit., p. 11).
3565 « Une nation est un faisceau immense d’individus, partagé en corps, en familles, en ordres, qui tous, par un esprit de personnalité, attaché à la nature humaine, tendent à s’appuyer chacun en particulier l’avantage général : et c’est de ce conflit que naissent les révolutions éternelles qui agitent les sociétés. Or, comme l’expérience a prouvé que cette personnalité tend à détruire le corps social, l’objet de toute bonne législation doit être de balancer tellement les intérêts et par conséquent l’effet des volontés que nul individu ou corps n’envahissent l’existence des autres », (C.-F. Volney, Des conditions nécessaires à la légalité, op. cit., p. 16).
3566 P.-L. de Roederer, De la députation aux États généraux, op. cit., p. 7.
3567 Ibid., p. 4.
3568 P.-V. de Sèze, Les vœux d’un citoyen, discours adressé du tiers état, op. cit., p. 16.
3569 J.-B. Salaville, De l’organisation d’un État monarchique, op. cit., p. 39.
3570 Ibid., p. 40.
3571 Décadence des Parlements, du clergé et de la noblesse, op. cit., p. 7.
3572 J.-L. Carra, Considérations, recherches et observations, op. cit., pp. 7-8, 12.
3573 Ibid., p. 18.
3574 R. Robin, La société française en 1789, op. cit., p. 320.
3575 Au xvième siècle, le crime de lèse-majesté englobait « de façon extensive toutes les offenses au prince, à ses proches et à ses droits souverains », (J.-M. Carbasse, Histoire du droit pénal et de la justice criminelle, Paris, PUF, 2000, p. 298).
3576 Cf. J.-C. Gaven, Le crime de lèse-nation, histoire d’une brève incrimination politique, 1789-1791, 2 vol., thèse dactyl. de l’Université de Toulouse I, 2003.
3577 R. Martucci, « Qu’est-ce que la lèse-nation ? À propos du problème de l’infraction politique sous la Constituante, 1789-1791 », Déviance et Société, 1990, t. 14, n° 4, p. 379 ; A. Laingui et A. Lebigre, Histoire du droit pénal, t. 1, Paris, Cujas, 1979, p. 200.
3578 Pour une vue extrêmement générale, cf. G.-A. Kelly, « From lèse-majesté to lèse-nation : treason in eighteenth-century France », JHI, avril-juin 1981, n° 2, pp. 269-286.
3579 Essai sur une amitié patriotique où l’on propose des moyens infaillibles pour rendre les hommes plus vertueux et meilleurs citoyens, Londres, J.-P. Costard, 1770, p. 30.
3580 Ibid., p. 102.
3581 Les derniers soupirs du soi-disant Parlement, op. cit., p. 50.
3582 « Attaquer la constitution de l’État, violer les lois, est un crime capital contre la société », (E. de Vattel, Le droit des gens, t. 1, op. cit., p. 33).
3583 « J'ajoute que celui qui tire ces denrées de la main du cultivateur pour nous les survendre, ou pour les transporter chez l'étranger, quand nous ne saurions lui en donner le prix auquel son avarice les a fixées, commet un crime de lèse-nation, une action réprouvée par toutes les lois divines et humaines », (L.-J. Bourdon des Planches, Lettres à l'auteur des observations sur le commerce des grains, Amsterdam, 1775, p. 21).
3584 « La punition des faux témoins ne saurait être, selon moi, trop forte, dans quel gouvernement que ce soit… De deux choses l’une… ou ils font périr un innocent… ou ils font absoudre un coupable… Ils sont également punissables dans les deux cas… Le premier cas est un crime contre nature, qui ne peut être même conçu que par un monstre, indigne de porter le nom d’homme, et qu’on doit rejeter de toute société… Le second est un crime de lèse-société… parce qu’il est nécessaire que les crimes soient punis, l’impunité les multiplie », (A. Rouillé d’Orfeuil, L’alambic des lois, op. cit., p. 255).
3585 J.-E. Bernadi, Les moyens d’adoucir la rigueur des lois pénales en France, Chalons-sur- Marne, Seneuze, 1781, p. 55.
3586 « Dans l’ordre et le dénombrement des délits, quelle législation peut contenter la sagesse ? Je n’en veux pour exemple que la classe des délits les plus importants, les crimes de lèse-majesté : quel code a jamais distingué les crimes contre la nation même, des délits contre la puissance législative. Un ministre, un courtisan qui calomnie un peuple auprès de son roi, n’est-il pas un des plus grands criminels de lèse-majesté ? Ne viole-t-il pas, à la fois, la majesté du roi qu’il veut tromper, et celle du peuple qu’il veut perdre ? », (M-J. Servan, Discours sur le progrès des connaissances humaines, op. cit., p. 94).
3587 L.-G. de Du Buat Nançay, Remarques d’un Français ou examen impartial du livre de M. Necker sur l’administration des finances de France, Genève, 1785, p. 12.
3588 « Un autre inconvénient de la naissance et de l’éducation de M. Necker, fut d’ignorer presque entièrement notre histoire, notre constitution, nos formes, notre agriculture, notre manière de posséder et le génie politique de notre nation. Il regarda le royaume comme un grand domaine, la nation comme un peuple de fiscalins », (ibid., p. 13).
3589 Ibid., p. 30.
3590 F.-H. de Virieu, Dialogue sur l’établissement et la formation des assemblées provinciales, op. cit., p. 90.
3591 L’avocat du peuple, s.l.n.d. BN Lb39 7059 pp. 16-17.
3592 « Que l’on détermine enfin d’une manière précise ce qui est crime de lèse-majesté. Et qu’on établisse quels sont les crimes de lèse-nation », (A.P., t. 4, p. 39).
3593 A.P., t. 3, art. 4, p. 643.
3594 E. Bligny-Bondurand, Cahiers de doléances de la sénéchaussée de Nîmes, t. 2, Nîmes, A. Chastanier, 1909, p. 33.
3595 Lettre d’un gentilhomme du Dauphiné à M. le comte de***, son compatriote, op. cit., p. 13.
3596 L.-A. Dionis du Séjour, Mémoires, op. cit., p. 266.
3597 Arrêté de la Cour des aides de Paris du 5 mai 1788, BN Lb39 553 p. 149.
3598 « Vous obtiendrez l’abolition des lettres de cachet, proscrites par les lois, contraires au vœu de la nature, au système social, à l’équilibre des Empires et auxquelles les ordonnances de nos rois défendent d’obéir. Vous regarderez l’obéissance à ces ordres arbitraires comme une résistance à la justice, aux lois de l’État, comme un crime de lèse-patrie », (arrêté du 8 mai 1788 du Parlement de Rennes, BN Lb39 560 p. 57).
3599 Objets de remontrances du 6 décembre 1787 du Parlement de Rennes, BN Lb39 475 p. 5.
3600 Cf. S.-H. Cuttler, The law of treason and treason trials in later medieval France, Cambridge, CUP, 1981, pp. 5 et s. Pourtant, une seconde explication s’attache à une hypothétique influence anglaise selon l’abbé Féraud en 1788. En effet, pour lui, « les Anglais appellent haute trahison ce que nous appelons crime de lèse-majesté. Les historiens français de l’Angleterre et les traducteurs d’ouvrages anglais se servent de cette expression », (Dictionnaire critique de la langue, v° « Trahison », t. 3, op. cit., p. 718).
3601 Remontrances du 23 février 1788 du Parlement de Grenoble, (ADI série B 2319 f° 27 v°). « Toutes les entreprises, tous les complots, tous les crimes peuvent être réprimés par les lois. Il ne peut dans aucun cas être nécessaire d’avoir recours aux lettres de cachet ; elles ont l’inconvénient de substituer une punition lourde qui révolte, à une punition publique, qui imprimerait une terreur salutaire. En vain on cherche à les autoriser par la facilité qu’elles donnent aux familles de se débarrasser des sujets dangereux, sans être exposées à l’espèce de flétrissure que l’opinion leur ferait partager. L’intérêt des familles particulières doit céder à celui de la famille générale, qui est l’État. La société est en droit de demander le châtiment de tout individu qui en trouble l’harmonie », (ibid., f° 28 v°-29).
3602 Lettre au roi du 26 avril 1788 du Parlement de Grenoble, (ADI série B 2319 f° 38).
3603 Arrêté du 9 mai 1788 du Parlement de Grenoble, (ADI série B 2319 f° 41 v°).
3604 « Le principe de la monarchie se corrompt, lorsque des âmes singulièrement lâches tirent vanité de la grandeur que pourrait avoir leur servitude ; et qu’elles croient que ce qui fait que l’on doit tout au prince, fait que l’on ne doit rien à sa patrie », (C. de Montesquieu, De l’esprit des lois, liv. VIII, chap. 7).
3605 « Le Parlement a dit, dans son arrêté [du 20 mai 1788] que la nouvelle formation des tribunaux ne ferait que jeter l’alarme et la consternation dans le peuple, en substituant à des magistrats, avoués par la nation, et qu’il est accoutumé de respecter des juges qui seraient obligés de renoncer à tout sentiment d’honneur et de patriotisme, pour s’asseoir à des places d’où les repousse l’opinion publique. Ce n’est pas le tiers état que le Parlement a voulu mortifier, mais ceux qui accepteraient ces places, soit qu’ils fussent nobles ou roturiers », (A. Achard de Germane, Examen impartial des réflexions d’un patriote et du cri de la raison, s.l.n.d., p. 37).
3606 Ibid., p. 43.
3607 Ibid.
3608 Arrêt du Conseil du roi contenant des développements nécessaires à celui du 20 juin 1788, op. cit., p. 5. L’auteur ajoute : « Comme si la monarchie française pouvait être détruite en corrigeant quelques lois fondamentales, dont l’expérience avait démontré l’abus ; en simplifiant le jeu d’une machine trop compliquée ; en mettant au même niveau le sort de toutes les généralités pour le bien commun de la mère patrie et en réalisant, à l’aide d’un coup de sifflet, l’imposant spectacle d’un grand État, qui n’a qu’un seul roi, qu’une seule loi et un seul enregistrement », (ibid., p. 2).
3609 Un libelle de fin mai 1789, partisan de l’union roi-peuple, reprochera aux magistrats leurs vaines remontrances détruisant la monarchie. Ainsi, il s’insurgera ironiquement contre le fait que « c’est un crime de lèse-Parlement d’oser seulement porter les yeux sur l’étendue de [leurs] ressorts, sur l’abus criant qui en résultent », (L’aristocratie magistrale ou l’esprit des Parlements de France, s.l.n.d. BN Lb39 1759 pp. 26-27).
3610 Cahier du tiers état du Roussillon, (A.P., t. 5, p. 374) ; cahier de la noblesse de Blois, (A.P., t. 2, art. 2, p. 385) ; cahier de la noblesse de Châteauneuf en Thimerais, (A.P., t. 2, art. 5, p. 643).
3611 Cahier du tiers état de Paris, (A.P., t. 5, p. 282).
3612 Cahier du tiers état de Rennes, (A.P., t. 5, art. 56, p. 541).
3613 Cahier de la noblesse d’Etain, (A.P., t. 2, art. 1, p. 218).
3614 Cahier de l’Université du bailliage d’Orléans, (C. Bloch, Cahiers de doléances du bailliage d’Orléans, t. 2, op. cit., p. 28).
3615 Projet d’instructions à donner aux députés de Franche-Comté, op. cit., p. 36.
3616 « Car parviendra-t-on jamais à justifier que l’on puisse valablement disposer du bien d’autrui ? Or, c’est sûrement ici le cas de dire avec le célèbre Montesquieu que s’il est vrai qu’à mesure que le pouvoir du monarque devient immense, sa sûreté diminue : corrompre ce pouvoir jusqu’à le faire changer de nature, n’est-ce pas un crime de lèse-majesté contre lui, n’est-ce pas un crime de lèse-nation contre les peuples ; en exposant ceux-ci à toutes les vexations de l’arbitraires » ? (J.-N. Billaud-Varenne, Despotisme des ministres de France, op. cit., p. 328). « C’est un crime de lèse-majesté et de lèse-nation, comme les Parlements de France et les provinces l’ont déclaré ; vous avez du remarquer dans leurs défenses l’attachement pour leur souverain, l’unanimité de leurs sentiments et de leurs opinions : leur roi a été trompé », (Catéchisme politique, monarchique et français, op. cit., p. 29). Parlant des ministres des finances, le cahier de la noblesse de Carcassonne indiquait qu’ils étaient des « hommes coupables du crime de lèse-majesté nationale », (A.P., t. 2, art. 20, p. 529).
3617 J. Saige, Code national, op. cit., p. 180.
3618 Arrêté des Provençaux, op. cit., p. 7.
3619 Avis aux Parisiens et appel de toutes convocations d’États généraux où les députés du troisième ordre ne seraient pas supérieurs aux deux autres, s.l.n.d. BN Lb39 830 p. 9.
3620 Unité dans le roi, dans la nation, dans l’assemblée des États, s.l.n.d. BN Lb39 1363 p. 11.
3621 Cahier de la noblesse d’Auxerre, (A.P., t. 2, art. 1, p. 114).
3622 Cahier de la noblesse de Beaucaire, (A.P., t. 4, art. 15, p. 238).
3623 Lettre d’un gentilhomme bourguignon à un gentilhomme breton, op. cit., p. 28.
3624 Cahier du tiers état de Briey, (A.P., t. 2, art. 3, p. 207) ; cahier de la noblesse de Toulouse, (A.P., t. 6, art. 11 et 12, p. 32).
3625 A.P., t. 3, art. 16, p. 23.
3626 À l’auteur de l’ouvrage intitulé : Aux trois ordres de la nation, s.l.n.d. BN Lb39 1129 p. 22.
3627 « Voulez-vous, Sire, faire finir toutes ces dissensions et obtenir de cette assemblée tout le bien que vous avez le droit d’en attendre ? Ordonnez aux trois ordres de ne plus pouvoir s’assembler séparément dans aucune circonstance, sous peine de désobéissance et de crime de lèse-national. Ordonnez-leur de vérifier leurs pouvoirs en commun et de délibérer par tête parce que la nation n’est qu’un », (Nouvelle adresse des communes au roi, op. cit., p. 5). « Que le public qui forme le troisième ordre, le public sera respecté partout, soit dans les Églises, soit dans les spectacles, soit en toute assemblée, et que quiconque aura manqué à ce respect dû au public, sera puni comme criminel de lèse-nation », (Lettre à M. Necker sur son rapport aux États généraux, s.l., 1789, BN Lb39 1676 p. 38). « En Suède, l’ordre équestre a voulu se rendre coupable de lèse-patrie, uniquement pour opprimer le peuple : qu’un roi juste et généreux soutient toujours, parce qu’il forme la majorité ; parce que son zèle et son amour, sont aussi les moins équivoques aux yeux d’un souverain », (L’opinion d’un citoyen indigène ou suite des observations sur le discours de M. Necker, directeur des finances, s.l.n.d. BN Lb39 1681 p. 23).
3628 Le confiteor de la robinocratie, s.l.n.d., p. 12. « Citoyens, devons-nous mettre au jour la politique sourde mais sûre de ce clergé mainmortable ou décimataire, autrefois votre obligé, et qui, devant toutes vos charités, ne les reverse plus sur vous ? Vos concessions ont profité : à l’ombre des murs bénis, vos dons ont pullulé, sans crainte, sans risque ; quand l’État chancèle, ses trésors sont oblitérés dans ses mains ; et l’abus le plus lèse-national qu’ils en commettent, c’est de porter une partie de notre sang, de nos sueurs, à la prétendue métropole d’au-delà des monts », (Idée, s.l.n.d. BN Lb39 831 p. 10).
3629 Cahier de la noblesse de Nancy, (A.P., t. 4, art. 4, p. 78).
3630 A.P., t. 3, p. 246.
3631 Cahier du tiers état du district des théâtres de Paris, (A.P., t. 5, art. 5, p. 316).
3632 C.-F. Chauvau-Lagarde, Théorie des États généraux ou la France régénérée, Paris, Marchands de Nouveautés, s.d. BN Lb39 1300 p. 9.
3633 Selon le député du tiers état de Paris Louis-Marie Lulier, « Sa Majesté jouira du droit de faire grâce à tout criminel, excepté les cas de lèse-majesté nationale et royale », sans donner plus de détails sur les futurs incriminations, (Restauration générale de l’Empire français, Paris, Masson, 1789, BN Lb39 1745 p. 27). Le flou à ce sujet est quand même assez patent et révèle aussi, quelque part, les difficultés à se détacher d’un pouvoir royal encore absolu.
3634 Catéchisme d’un peuple libre, op. cit., p. 19.
3635 J.-J. Mounier, Nouvelles observations sur les États généraux de France, s.l., 1789, BN Lb39 1180 p. 139.
3636 Murat de Montferrand, Qu’est-ce que la noblesse et que sont ses privilèges ?, Amsterdam, 1789, BN Lb39 1069 p. 15.
3637 J.-G. Thouret, Suite de l’avis des bons normands, dédiée aux assemblées des bailliages, sur la rédaction du cahier des pouvoirs et instructions, s.l., février 1789, BN Lb39 1250 p. 8.
3638 Les vingt-six quand ou réponse à l’auteur de la brochure intitulée : Je ne suis point de l’avis de tout le monde, s.l., 1789 BN Lb39 1170 p. 16.
3639 Ce schéma peut se rencontrer dans l’iconographie avec une gravure sur une trinité de l’ère de la nouvelle concorde : LOUIS XVI, PÈRE DE LA PATRIE, ROI D’UN PEUPLE LIBRE, (J. Foviaux, « De l’iconographie royale à l’iconographie républicaine », RHFDSJ, 1989, n° 8, pp. 8-9).
3640 B. Verlac, La voix du citoyen, op. cit., p. 97.
3641 Saint-Aulaire Yriex Beaupoil, De l’unité du pouvoir monarchique, s.l.n.d. BN Lb39 6365 p. 17. Est-ce un membre de la famille du député du clergé du Poitou, Martial-Louis de Beaupoil de Saint-Aulaire, la question reste en suspend ?
3642 Catéchisme patriotique, par une bonne citoyenne, s.l.n.d. BN Lb39 6665 p. 3.
3643 Réponse du roi du 17 avril 1788 aux remontrances du Parlement de Paris, (Recueil des arrêtés, remontrances, protestations des Parlements, Cours des aides, Chambres des comptes, États provinciaux, au sujet des nouvelles lois proposées par le Sieur de Lamoignon, garde des sceaux, au lit de Justice du 8 mai 1788, Londres, 1788, BN Lb39 553 p. 48).
3644 Je m’en rapporte à tout le monde ou réflexions impartiales sur les affaires actuelles, Londres, 1788, BN Lb39 578 pp. 46, 58, 66, 67, 70.
3645 Recueil Isambert, t. 28, n° 2519, op. cit., p. 616.
3646 P. de Fumel, Discours à la nation française, s.l.n.d. BN Lb39 1314 p. 6. De plus, il ajoute qu’un « Français ne peut se dispenser de faire ce que l’honneur prescrit et ne peut faire ce qu’il défend. C’est ce sentiment qui lui fait faire des choses utiles à la patrie et non l’amour de la patrie. Ce ne fut pas l’amour de la patrie qui empêcha les soldats du maréchal de Richelieu de s’enivrer au siège de Port-Mahon ; ils craignirent d’être déshonorés s’ils ne montaient pas à la tranchée et ils furent sobres », (ibid.). Cf. aussi pour le même auteur l’ouvrage Second discours à la nation française, Paris, Lacloye, 1789, BN Lb39 1315 p. 27.
3647 Réflexions d’un magistrat sur le patriotisme, les diverses formes de gouvernement, le caractère de la souveraineté, s.l.n.d. BN Lb39 562 p. 4.
3648 « Ce saint amour de la patrie, inséparable du respect et du dévouement de tout Français pour votre personne sacrée », (remontrances du 4 mars 1788 du Parlement de Bordeaux, BN Lb39 528 p. 4). Cf. la lettre au roi du 23 janvier 1789 du Parlement de Bordeaux, BN Lb39 1008 p. 7.
3649 Remontrances du 21 avril 1788 du Parlement de Pau, BN Lb39 6282 p. 15.
3650 Remontrances du 8 mai 1788 du Parlement de Paris, (J. Flammermont, Les remontrances, t. 3, op. cit., p. 765).
3651 Remontrances du 23 avril 1788 de la Cour des aides de Paris, BN Lb39 544 p. 5.
3652 Ouvrage d’un citoyen gentilhomme et militaire ou lettre sur la noblesse, op. cit., p. 13.
3653 Ibid., p. 28.
3654 Ibid., pp. 16-17.
3655 Ibid., p. 113.
3656 « La puissance royale, plus réglée et conséquemment plus importante et plus paternelle, doit trouver de zélés défenseurs dans les magistrats, qui, dans les temps difficiles, ont toujours été les appuis du trône, et qui savent que les droits des rois et de la patrie sont réunis aux yeux des bons citoyens. Il se montrera encore avec énergie ce sentiment généreux qui distingua toujours les Français ; cet amour pour la personne de leurs rois ; ce sentiment qui dans la monarchie, est un des ressorts du gouvernement, et se confond avec le patriotisme », (A.-J. d’Auget, Mémoire des princes, op. cit., pp. 12-13).
3657 Instructions sur les assemblées nationales, tant générales que particulières, op. cit., p. 5.
3658 Delaulne, Principes et autorités contre l’édit de la Cour plénière, s.l., 1788, BN Lb39 571 p. 53.
3659 Cahier de la noblesse de Crépy, (A.P., t. 3, p. 74) ; cahier de la noblesse de Castres, (A.P., t. 2, art 16, p. 567).
3660 « Quel citoyen impartial pourrait douter que les Parlements ne se sont reconnus impuissants que pour devenir plus puissants par la suite ; que s’ils restituent pour un instant à la nation le pouvoir de veiller elle-même à ses intérêts, pouvoir qu’ils lui avaient usurpé (…) ce n’est que pour mieux la séduire en faisant parade d’un patriotisme, d’une générosité qui n’ont jamais été la base de leurs pouvoirs », (À la noblesse bretonne, op. cit., p. 16).
3661 O. de Gouges, Remarques patriotiques, par la citoyenne, auteur de la lettre du peuple, s.l.n.d. BN Lb39 749 p. 6.
3662 Unité dans le roi, dans la nation, dans l’assemblée des États, op. cit., pp. 8-9.
3663 P.-V. de Sèze, Les vœux d’un citoyen, op. cit., p. 20.
3664 Essai d’un citoyen sur les questions d’un bon patriote, op. cit., p. 30.
3665 F. Soulès, Le vrai patriotisme, s.l.n.d. BN Lb39 748 p. 30.
3666 Mémoire des avocats du Parlement de Bretagne sur les moyens d’entretenir l’union, op. cit., p. 4 ; Avis aux Bretons, s.l.n.d. (AN K 160 pièce 3 f° 2) ; M.-J. le Bruin, Discours prononcé au Parlement toutes les chambres assemblées, les pairs y séant, le 24 septembre 1788, BN Lb39 636 p. 6. Fin mai 1789, un libelle - partisan de la symbiose roi-nation avec une prédilection pour le troisième ordre - reprendra les écrits de Coyer sur ses idées patriotiques. L’anonyme voudra mettre au centre du système politique, l’esprit public et le patriotisme comme « l’amour de la patrie, c’est-à-dire l’amour du gouvernement dont nous faisons partie et de tous les membres qui le composent », (Essais critiques sur l’état actuel de l’esprit public ; ou éléments de patriotisme à l’usage des Français, Paris, Marchands de Nouveautés, 1789, BN Lb39 1748 p. 7).
3667 « Pour faire naître le patriotisme chez une nation riche et voluptueuse, il faudrait pouvoir l’anéantir et la créer de nouveau », (Discours sur le patriotisme, s.l., 1788, p. 59).
3668 Ibid., p. 12.
3669 Ibid., p. 32.
3670 Ibid., p. 24.
3671 L.-S. Mercier, Notions claires sur les gouvernements, t. 1, op. cit., p. 26.
3672 Ibid., p. 241.
3673 Le patriote isolé ou réflexions philosophiques sur l’assemblée des notables et l’état actuel de la France, s.l.n.d. BN Lb39 693 p. 27.
3674 Ibid., p. 51.
3675 Ibid.
3676 Ibid., p. 37.
3677 Réflexions d’un citoyen, op. cit., p. 24.
3678 Il n’y a qu’une seule raison pour que le tiers état choisisse hors de son ordre, « ce serait la certitude de trouver, dans un tel homme, cette réunion de lumières, de vertus, de patriotisme qui attire et justifie la confiance », (Intérêt du tiers état de ne choisir ses représentants que dans son ordre, op. cit., p. 5).
3679 J.-L. Carra, L’orateur des États généraux, op. cit., pp. 28, 41.
3680 P.-A. d'Antonelle, Catéchisme du tiers état à l’usage de toutes les provinces de France et spécialement de la Provence, s.l., décembre 1788, BN Lb39 817 p. 3.
3681 « Tous les députés aux États généraux doivent se regarder comme les pères de la nation ; non seulement comme les tuteurs de la race présente mais encore des races futures ; ils doivent penser que la patrie, étant la mère commune du noble comme du roturier, ils doivent sans distinction concourir à son bonheur et à la félicité publique », (Réflexions d’un patriote sur la prochaine tenue des États généraux, op. cit., p. 5).
3682 J.-L. Carra, L’orateur des États généraux, op. cit., p. 5. De plus, « jusqu’à présent, les États généraux assemblés n’ont été regardés que comme sujets, parce que les membres qui les ont composés n’ont pas eu le courage ou l’occasion de faire valoir les droits de la nation ; car ces droits sont des droits souverains au premier chef, ils sont aussi vrais que l’existence des hommes, aussi anciens que le monde, aussi durables que lui », (ibid., p. 6).
3683 Discours sur le patriotisme, op. cit., p. 34. Cf. Le cri d’un Français citoyen, s.l.n.d., pp. 5-6.
3684 Parlant des représentants : « Si l’on osait demander aux États généraux qui êtes-vous ? Ils répondraient, à coup sûr, Français, et qui encore Français ? Ils répondraient qu’ils ne connaissent ni d’autres avantages, ni d’autres titres que la qualité de sujets du meilleur des rois, qu’ils n’ont d’autres prétentions que le bonheur de se montrer patriotes jusque dans les retranchements les plus coûteux qu’on exigera d’eux », (L.-A. de Caraccioli, Qui mettriez-vous à sa place ?, s.l., 1789, BN Lb39 948 p. 11).
3685 « Du serf au sujet il y a une grande distance ; mais il y a une distance plus grande encore du sujet au citoyen. Pour bien approfondir l’esprit, la justice et les caractères certains de la liberté nationale, pour envisager les ressources de l’économie publique, il faut être citoyen ; mais pour attendre tout d’un homme, pour voir la patrie dans le prince, pour croire que les influences d’un trône repousseront les calamités publiques, alors il faut être sujet », (L.-S. Mercier, Notions claires sur les gouvernements, t. 1, op. cit., pp. 80-81).
3686 J. Guilhaumou, La langue politique et la Révolution française, Paris, Méridiens-Klincksieck, 1989, p. 13.
3687 L.-J. Bourdon de la Crosnière, Plan d’un établissement d’éducation nationale, autorisé par un arrêt du Conseil du 5 octobre 1788 sous le titre de Société royale d’émulation, Orléans, Courbet de Villeneuve, 1788, p. 18 note f.
3688 Le tout est-il plus grand que la partie ? ou réponse à cette question, op. cit., p. 32.
3689 Vœu de plusieurs citoyens des trois ordres et invitations à leurs concitoyens d’y adhérer, s.l.n.d. BN Lb39 785 p. 3.
3690 Opinion sur les remontrances du clergé du 15 juin 1788, s.l.n.d. BN Lb39 11622 p. 4.
3691 « Nous comptons bien sûr sur le patriotisme : c’est là que toutes les distinctions politiques, les prétentions particulières, les petits intérêts de corps et d’ordre viendront se confondre dans le grand titre de citoyen », (G. Brizard, Modestes observations sur le mémoire des princes, op. cit., p. 45).
3692 E.-L. d’Antraigues, Mémoire sur les États généraux, op. cit., pp. 7-8. Il ajoute que « plus l’intérêt national diminue, plus l’amour de la patrie s’éteint ; dès lors les assemblées nationales deviennent plus rares et finissent par disparaître », (ibid., p. 36).
3693 E.-J. Sieyès, Essai sur les privilèges, op. cit., p. 9.
3694 Ibid., p. 10.
3695 « Pénétrez un moment dans les nouveaux sentiments d’un privilégié, il se considère avec ses collègues comme faisant un ordre à part, une nation choisie dans la nation », (ibid., p. 14).
3696 Observations modestes sur le bien public, adressées aux citoyens de toutes les classes, s.l., 1789, BN Lb39 1304 p. 3.
3697 « Au moment où le prince imprime à un citoyen le caractère de privilégié, il ouvre l’âme de ce citoyen à un intérêt particulier et ferme plus ou moins aux inspirations de l’intérêt commun. L’idée de patrie se resserre pour lui ; elle se renferme dans la caste où il est adopté. Tous ses efforts, auparavant employés avec fruit au service de la chose nationale, vont se tourner contre elle (…) Ce désir, malheureusement trop analogue à la constitution humaine, est une vraie maladie anti-sociale », (ibid., p. 13).
3698 J.-G. Thouret, Avis des bons normands, op. cit., pp. 9, 12.
3699 G.-J. Target, Les États généraux convoqués par Louis XVI, s.l.n.d. BN Lb39 1173 p. 1.
3700 Ibid., p. 27. J.-J. Mounier, Nouvelles observations sur les États généraux de France, s.l., 1789, BN Lb39 1180 p. 208 ; C.-J. Huet de Froberville, Catéchisme des trois ordres pour les assemblées d’élection, par un gentilhomme français, s.l., janvier 1789, BN Lb39 1039 p. 2.
3701 « Je crois à l’esprit de patriotisme qui va remplacer l’esprit de corps. À l’union des campagnes, des villes, des provinces et de la France entière, sous Louis XVI, union qui opérera le bien, sacrifiera l’intérêt personnel à l’intérêt général », (Credo du tiers état ou symbole politico-moral, op. cit., p. 15).
3702 « En laissant la carrière de la judicature ouverte à toutes les classes de citoyens, on excite l’amour de la vertu, on bannit l’ignorance si commune dans les gens de robe, on développe le sentiment du patriotisme étouffé par l’humiliation et le dégoût », (Observations modestes sur le bien public, op. cit., p. 35).
3703 N. Bergasse, Lettre de M. Bergasse sur les États généraux, Paris, 12 février 1789, BN Lb39 1161 p. 2.
3704 « Tous vos Athéniens et vos Romains, que vous vantez si fort, n’étaient que des citoyens ; or ce mot citoyen est un mot très bourgeois et il n’est pas étonnant que ceux qui se glorifient de ce titre ne pensent pas et n’agissent pas comme des gentilshommes », (Défense de la noblesse de Bretagne contre le tiers état, op. cit., p. 16).
3705 « Le magistrat appartient à l’État sous deux rapports, et comme simple citoyen et comme magistrat ministre essentiel de la loi », (remontrances du 20 décembre 1787 du Parlement de Grenoble, AN O1 352 pièce 461 f° 5).
3706 « Doublement citoyens et par leur qualité de Bretons et par les fonctions auxquelles ils sont consacrés », (protestations des avocats du Parlement de Rennes du 7 mai 1788, BN Lb39 560 p. 36).
3707 « Le tiers état sera toujours le parti patriotique à qui la France devra son salut », (O. de Gouges, Le cri du sage, s.l.n.d. BN Lb39 1803 p. 8).
3708 G.-J. Target, Suite de l’écrit intitulé : Les États généraux, op. cit., p. 3.
3709 J.-B. Raup de Baptestin de Mourgues, Mémoire sur un moyen facile et infaillible de faire renaître le patriotisme en France dans toutes les classes des citoyens, Paris, Desenne-Gattey-Bailly, 1789, BN Lb39 1247 p. 1.
3710 Ibid., p. 16.
3711 Ibid., p. 27. De plus, « l’ordre du mérite patriotique, porte au plus haut degré l’union de l’intérêt particulier avec l’utilité générale, qu’elle peut donner la plus grande énergie à la nation française ; enfin qu’elle est, peut-être, de toutes celles que l’on pourra proposer, la plus analogue au caractère national », (ibid., p. 65).
3712 Discours sur la constitution française ou réponse à ces deux questions, op. cit., pp. 14-15.
3713 « Il faudrait que les vingt-quatre millions d’habitants, qui couvrent la surface du sol français, ne formassent qu’un seul et même ordre, celui des citoyens (…) Quel titre plus propre à réchauffer le patriotisme glacé », (Décadence des Parlements, du clergé et de la noblesse, op. cit., pp. 24-25).
3714 C.-L. de Sémonville, De la nécessité d’assembler les États généraux dans les circonstances actuelles et de l’inadmission du timbre, s.l.n.d. BN Lb39 377 p. 19. De Sémonville sera sénateur et grand référendaire à la Chambre des pairs.
3715 Dangers d’une commission intermédiaire des États généraux, op. cit., p. 14.
3716 « Ce n’est pas un esprit de corps, c’est-à-dire, le plus souvent, un esprit aveugle qu’il faut apporter dans une assemblée composée de tous les ordres d’un grand royaume, c’est un esprit de discernement et d’impartialité, un sentiment de paix et d’union, un oubli de tout intérêt particulier, un dévouement patriotique », (A.-J. Levrier, Mémoire sur les formes qui doivent précéder et accompagner la convocation des États généraux, op. cit., p. 20) ; E.-L. d’Antraigues, Second mémoire sur les États généraux, op. cit., p. 5 ; J.-G. Thouret, Avis des bons normands, op. cit., pp. 37, 39 ; P.-L. Lacretelle, De la convocation de la prochaine tenue des États généraux, op. cit., pp. 7, 31, 34.
3717 A.-P. de Montesquiou-Fezenac, Aux trois ordres de la nation, s.l.n.d. BN Lb39 1127 p. 30. Anne-Pierre marquis de Montesquiou-Fezenac est député de la noblesse de Paris.
3718 J.-A. Brun de la Combe, Le point de ralliement des citoyens français, op. cit., p. 36.
3719 « Tout citoyen doit être soldat et tout soldat citoyen », (A.P., t. 10, p. 520).
3720 Réflexions d’un militaire sur le paragraphe ci-après du discours de M. de Rollin, s.l.n.d., pp. 3-4 ; L.-J. Gohier, Mémoire pour le tiers état de Bretagne, op. cit., p. 119.
3721 Erreur, ne fait pas compte ou réponse aux réflexions d’un militaire, s.l., Au Temple de la Justice, s.d., p. 9.
3722 A.-P. Barnave, Profession de foi d’un militaire, s.l.n.d., p. 2.
3723 Maximes générales du gouvernement, par M. D.***, Versailles, Baudoin, s.d. BN Lb39 1292 p. 3.
3724 L’article 3 titre III de la Constitution du 3 septembre 1791 sur la force publique dispose : « Les gardes nationales ne forment ni un corps militaire, ni une institution dans l’État ; ce sont les citoyens eux-mêmes appelés au service de la force publique ».
3725 De la différence qu’il y a entre les États généraux et les assemblées nationales, op. cit., p. 15.
3726 Un militaire à la nation, s.l., 1789, BN Lb39 1201 p. 10.
3727 Ibid., p. 25.
3728 Aux États généraux sur les réformes à faire, op. cit., p. 10.
3729 J.-A. Cérutti, Vues générales sur la constitution française, op. cit., p. 83.
3730 Ibid., p. 84.
3731 « En ce qui concerne la constitution des troupes, les députés feront valoir de tout leur pouvoir le vœu de l’assemblée, pour donner à la milice nationale une constitution telle qu’elle sente à l’avenir le lien qui l’attache à la patrie, beaucoup plus que la dépendance qui la soumet aux ministres », (M.-J. Servan, Idée sur le mandat des députés aux États généraux, s.l., 1789, BN Lb39 1455 pp. 23-24).
3732 E.-J. Sieyès, Vues sur les moyens d’exécution, op. cit., p. 93.
3733 « La guerre est un des fléaux de l’humanité et cependant c’est par la guerre que les nations peuvent conserver leurs vertus et le caractère qui leur est propre », (G. Sénac de Meilhan, Considérations sur l’esprit des mœurs, Paris, Marchands de Nouveautés, 1787, p. 112).
3734 P.-A. Grouvelle, De l’autorité de Montesquieu, op. cit., p. 66.
3735 F.-A. Boissy d’Anglas, Adresse au peuple languedocien, op. cit., p. 7.
3736 N. Bergasse, Cahier du tiers état à l’assemblée des États généraux de l’année 1789, s.l., 1789, BN Lb39 918 pp. 56-57.
3737 Remerciements et supplique du peuple au roi à l’occasion de l’assemblée des notables, op. cit., p. 27.
3738 Réveil d’un Français au temps de Hugues Capet, op. cit., p. 17.
3739 La paix, l’union, la concorde, op. cit., p. 8. De plus, il ajoute : « Non, le clergé, dans le siècle où nous sommes, ne séparera point son intérêt de l’intérêt national. Il se déclarera sérieusement citoyen », (ibid., p. 9).
3740 « Le clergé prétend être le premier ordre de l’État : c’est une erreur émanée de l’abandon des lois du christianisme. Leurs fonctions sont toutes spirituelles (…) Il résulte de ce principe qu’ils ne peuvent représenter aucun ordre dans les assemblées nationales », (Injustice des prétentions du clergé et de la noblesse, s.l., 1789, BN Lb39 1058 p. 4).
3741 J.-A. Cérutti, Consultation épistolaire, op. cit., p. 8.
3742 Lettre des soldats composant les troupes françaises adressée à l’assemblée nationale, s.l., 1789, BN Lb39 1768 p. 3.
3743 Le premier coup de vêpres, op. cit., p. 8.
3744 « Chefs de la religion, ministres de la cabale et de la division plutôt que les amis de la paix et de l’union, redoutez et la colère du ciel outragé par votre licence et vos sourdes trahisons et les animosités des peuples irrités par votre dureté et vos mépris insultants. Vos biens, vos trésors, votre abondance est dans leurs mains », (Aux trois ordres assemblés et non réunis, op. cit., p. 3).
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