Chapitre I. Les comportements fautifs du créancier
p. 221-255
Texte intégral
1230- Illustrations. Bien que le contrat de cautionnement s’analyse comme un contrat unilatéral, le créancier n’est pas exempt d’obligations, notamment quant à l’information de la caution. Il doit veiller à l’intégrité de son consentement en lui faisant connaître l’étendue de son engagement ainsi que les modalités de sa révocation. En effet, à titre principal792, l’article L. 313-22 du Code monétaire et financier (ancien article 48 de la loi du 1er mars 1984), édicte que « les établissements de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l’année précédente au titre de l’obligation (cautionnée), ainsi que le terme de cet engagement. Si l’engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.
2Le défaut d’accomplissement de la formalité prévue à l’alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l’établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu’à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l’établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette »793.
3Le non respect de l’obligation d’information de la caution par le créancier est une illustration du mécanisme contractuel du fait ou de la faute du créancier. Aujourd’hui, par-delà les lois spéciales, le droit commun a imposé l’obligation supplémentaire pour le créancier de veiller à ce que l’engagement de la caution soit proportionnel à ses facultés patrimoniales. Devoir d’informer (Section 1) et proportionnalité (Section 2) sont les deux terrains où peut se manifester le comportement fautif du créancier.
SECTION 1. LE NON RESPECT DE L’OBLIGATION D’INFORMATION
4231- Droit spécial et droit commun. L’article L. 313-22 du Code monétaire et financier est le siège de l’obligation d’information dans le contrat de cautionnement. Ce texte spécial consacre une protection légale (§ 1) de la caution contre le créancier qui n’aurait pas exécuté son obligation avec diligence. Toutefois, le droit commun de la responsabilité contractuelle peut constituer un complément utile de la sanction légale (§ 2).
§ 1- Une protection légale
5232-Étendue de l’étude. Après avoir analysé le régime général de l’obligation d’information (A) on s’attachera à l’obligation particulière qui pèse sur le dirigeant social (B).
A/L’obligation d’information dans le texte
6233-Champ d’application de l’article L. 313-22 C. mon. et fin. Les créanciers visés par ce texte sont les établissements de crédit auxquels la jurisprudence assimile les établissements d’affacturage794. L’État795, les établissements de crédit-bail796 et les sociétés de caution mutuelle797 doivent être exclus du champ d’application de cette disposition. En revanche, l’établissement de crédit qui se porte caution de la dette d’une entreprise n’est pas tenu d’informer la sous-caution, car la solution inverse impliquerait de considérer que l’obligation de la caution de premier rang est un concours financier apporté au débiteur principal, ce qui semble difficile à envisager798.
7234-Objet de l’article L. 313-22 C. mon. et fin. Les établissements de crédit doivent avoir « accordé un concours financier à une entreprise ». La notion de concours financier est ambiguë. Dans certaines hypothèses, ce concours financier est évident : ainsi, en est-il des crédits accordés pour les besoins de l’exploitation d’un fonds de commerce799. A l’opposé, un crédit consenti à un débiteur à titre personnel ne peut être qualifié de concours financier à une entreprise800.
8La jurisprudence récente de la Cour de cassation adopte une interprétation conforme à l’esprit du texte favorable à la caution. En effet, par trois arrêts de principe du 12 mars 2002801, la première Chambre civile de la Cour de cassation a apporté une contribution significative à la définition de l’entreprise à laquelle le législateur de 1984 s’était référé sans aucune précision. Dès 1997802, la Chambre commerciale avait tenu en échec la tentative de considérer l’entreprise bénéficiaire du crédit comme un groupement de personnes et de moyens, ce qui aurait eu pour conséquence directe d’exclure les cautionnements donnés pour un entrepreneur individuel. En 2002, la première Chambre civile a opté à trois reprises pour un critère fonctionnel souple, consistant à qualifier d’entreprise toute activité présentant « un caractère économique ».
9Ce critère a permis à la première Chambre civile de considérer qu’une activité libérale803, une association804 ou encore une société civile immobilière805 soit considérée comme soumise à la loi.
10235- Condition de l’article L. 313-22 C. mon. et fin. La formulation légale semble indiquer que l’obligation d’informer la caution ne pèse sur l’établissement de crédit qu’à la condition singulière que l’octroi du concours financier ait été subordonné à la souscription d’un cautionnement806. Cette exigence a été jugée « bien maladroite »807 et « malheureuse »808. On peine à comprendre pour quelle(s) raison(s) le bénéfice d’une information de la caution sur sa situation et l’évolution de la dette principale devraient être subordonné au moment de la souscription de la garantie809. En outre, cette exigence « source de difficultés insondables, donne lieu à une interprétation capricieuse »810 et il faut donc espérer qu’elle « soit laissée en sommeil »811.
11Au sens de ce texte, la caution destinataire de cette information peut indifféremment être « une personne physique ou une personne morale ». On peut dès lors, se demander si les cautions dirigeantes doivent être informées ou s’il faut faire une application sélective de l’article L. 313-22 du Code monétaire et financier. Est-il excessif de considérer que les dirigeants d’une personne morale, garantissant leur société sont, de par leur fonction informés, de l’évolution de la dette garantie ? Il ne faut toutefois pas oublier que l’information de la caution a pour but de lui rappeler sa faculté de résiliation. D’ailleurs, le législateur ne fait aucune distinction selon la qualité de la caution. Ainsi, « devant le laconisme de la loi, l’obligation doit avoir un domaine large »812. La jurisprudence de la Cour de cassation est logiquement en ce sens813.
12236- Contenu de l’information. L’objet de l’information est fixé par la loi. Le créancier ne satisfait pas à ses devoirs si l’information ne contient pas toutes les mentions spécifiées814. Après une période d’incertitude, la Chambre commerciale815, suivie par les Chambres civiles816, précise désormais que la durée pendant laquelle l’information doit être délivrée s’étend jusqu’à l’extinction de la dette garantie et ne s’interrompt pas pendant l’instance introduite par le créancier contre la caution. Logiquement, il est décidé qu’en cas de décès de la caution, l’obligation d’information survit au bénéfice des héritiers817.
13237- Preuve de l’information. Selon le droit commun et l’article 1315 du Code civil, la charge de la preuve pèse sur l’établissement de crédit, débiteur de l’information. Comme tout fait juridique, la preuve de l’exécution de cette obligation peut être rapportée par tous moyens et reste soumise à l’appréciation souveraine des juges du fond. Il en découle que la notification de l’information peut être faite de diverses manières sans que ne soit imposée une forme particulière818. En pratique, les établissements informent les cautions par lettre simple, les lettres recommandées avec avis de réception n’étant pas utilisées en raison de leur coût819.
14La Cour de cassation a en effet récemment admis la preuve de l’exécution de l’obligation d’information par lettre simple. Ce moyen ne permet pas cependant à l’établissement de crédit de rapporter la preuve de la réception par la caution de cette information. Aussi, la Cour de cassation a-t-elle considérablement allégé la charge de la preuve du débiteur de l’information en décidant qu’« il n’incombe pas à l’établissement de crédit de prouver que la caution a effectivement reçu l’information envoyée »820.
15On peut par ailleurs s’étonner de la jurisprudence qui admet le jeu de présomptions en ce qui concerne l’envoi de l’information. Est-il en effet suffisant pour un établissement de crédit de verser aux débats les copies des lettres qu’il prétend avoir adressées à la caution, étant précisé qu’aucune présomption ne permet de douter de leur envoi821 ? Il reste qu’en toute hypothèse, l’établissement de crédit doit fournir la preuve de la conformité de l’information aux exigences légales822.
16238- Sanction. L’inexécution de l’obligation d’information823 emporte, selon l’article L. 313-22 du Code monétaire et financier, « déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu’à la date de communication de la nouvelle information ». Il s’agit d’une déchéance partielle des droits du créancier vis-à-vis de la caution, puisque limitée aux intérêts échus824 depuis la précédente information. Il est à préciser qu’une information tardive, c’est-à-dire, selon la lettre du texte, postérieure au 31 mars de chaque année, relève néanmoins le créancier de la déchéance pour l’avenir.
17En la matière, la combinaison des textes du droit commun et d’une solution jurisprudentielle relative à l’imputation des paiements partiels faits par le débiteur entre les mains du créancier a abouti à une solution logique, mais aux conséquences paradoxales puisqu’elle permettait aux établissements de crédit d’échapper à la sanction de l’ancien article 48 de la loi du 1er mars 1984. C’est pourquoi, la loi du 25 juin 1999 a mis fin à cette jurisprudence en complétant l’article L. 313-22 du Code monétaire et financier d’un second alinéa aux termes duquel ces paiements partiels « sont réputés dans les rapports entre la caution et l’établissement de crédit, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette ». En effet, selon l’article 1254 du Code civil, le paiement partiel effectué par le débiteur d’une dette portant intérêts s’impute, sauf volonté contraire du créancier, en priorité sur ces intérêts. En bonne logique, la caution qui se prévaut de l’inexécution de l’obligation d’information à son égard ne voit peser sur sa tête, après déchéance des intérêts échus, qu’un engagement portant sur le seul capital pour la période d’inexécution de l’obligation d’information.
18D’où cette jurisprudence825 : les paiements partiels effectués par le débiteur principal devaient d’abord s’imputer sur les intérêts de la dette.
19Cette solution avait pour conséquence de faire échapper les débiteurs de l’obligation d’information à la sanction prévue par la loi à hauteur des paiements effectués par le débiteur principal. C’est pourquoi la solution inverse est désormais posée par l’alinéa second de l’article L. 313-22 du Code monétaire et financier susvisé. De manière dérogatoire, et pour la période pendant laquelle l’information n’est pas fournie, les paiements partiels obtenus du débiteur, dans les rapports entre le créancier et la caution, s’imputent prioritairement sur le capital de la dette, c’est-à-dire sur la partie cautionnée, ce qui réduit l’engagement de cette dernière. Ainsi, l’efficacité de la sanction est rétablie nonobstant les paiements effectués par le débiteur principal.
20Qu’en est-il de l’étendue de l’information due à la caution ayant la qualité de dirigeant social ?
B/L’absence d’obligation d’information sans texte
21239- Droit prétorien. La jurisprudence a dû prendre position sur la question de l’information du dirigeant social caution.
22Trois cautions826, - l’une était président directeur général et les deux autres, actionnaires de la société débitrice principale - étaient poursuivies en paiement par le créancier, après avoir cédé la totalité de leurs actions et obtenu le cautionnement du nouveau dirigeant. Elles soutenaient que l’engagement du nouveau dirigeant opérait novation mais furent déboutées de leur demande.
23L’argument du pourvoi était judicieux : « Le banquier, tenu d’une obligation d’information et de conseil à l’égard de son client, doit rapporter la preuve qu’il a informé la caution qu’elle restait tenue de ses engagements sauf clause contraire expresse ». Or, il était allégué que la banque avait constaté la cession des actions et avait de surcroît obtenu l’engagement du nouveau dirigeant. Il était soutenu que dans ces conditions, la Cour d’appel ne pouvait se contenter d’énoncer que les cautions « auraient dû solliciter l’extinction de leurs engagements de caution » et ne pouvaient, en raison de leur propre négligence, reprocher à la banque « d’avoir entretenu l’incertitude sur la novation, sans rechercher si la banque avait satisfait à son obligation de conseil et d’information sur ces points ».
24En l’espèce, la question était de savoir si une banque, garantie par les dirigeants d’une société, engage sa responsabilité contractuelle lorsqu’elle n’attire pas l’attention des cautions cédantes sur l’absence de novation résultant de la cessation de leurs fonctions alors qu’elle a connaissance d’une part, d’une cession totale des actions de la société débitrice et, d’autre part, du cautionnement du nouveau dirigeant ?
25La réponse à ces questions présentait un intérêt majeur. En effet, certains juges du fond827 avaient été tentés de recourir au droit commun pour faire échapper les dirigeants au sort rigoureux qui leur est habituellement réservé lorsqu’ils cessent leurs fonctions. Pour les cautionnements généraux, les tribunaux refusent de faire jouer à la cessation des fonctions des dirigeants sociaux le rôle d’un terme implicite de leur obligation de couverture828. Plus généralement, la Cour de cassation829, exprime nettement cette sévérité en posant que « la cessation de ses fonctions par un dirigeant ne met pas fin aux obligations du cautionnement qu’il a contractées pour une durée indéterminée afin de garantir les dettes de la société, dès lors qu’il n ‘a pas fait de l’exercice de ses fonctions une condition de son engagement »830 ; d’où l’importance de cet arrêt quant à la recherche d’un équilibre entre les intérêts des établissements de crédit et la protection des cautions, fussent-elles dirigeantes.
26La Chambre commerciale rejette le pourvoi au motif que « la banque (n’est) tenue ni d’une obligation d’information ni d’une obligation de conseil sur la persistance, faute de novation, des engagements de caution des (cédants) à la suite de la cession de leurs actions aux (cessionnaires) ». La Cour de cassation approuve la Cour d’appel d’avoir retenu qu’il « appartenait aux cédants de solliciter de la banque l’extinction de leurs engagements de caution, ce qu’ils n’ont point demandé, en préalable à la cession de leurs titres ».
27L’affirmation a d’autant plus de portée que les Hauts magistrats ont volontairement écarté du débat un argument supplémentaire évoqué par les juges du fond et qui tenait à une faute du créancier. La Cour d’appel de Grenoble ajoutait effectivement que les cautions « étaient assistées d’une tierce personne lors de la réunion au cours de laquelle une garantie supplémentaire fut accordée par le cessionnaire principal des titres », considération plutôt confuse que le pourvoi s’était empressé de critiquer dans la première branche du moyen. Voulant poser une solution nette : « pas de nouvelle obligation prétorienne d’information à la charge du créancier »831, la Chambre commerciale juge le motif « surabondant ».
28240- Portée de la solution. La Chambre commerciale, par sa solution, manifeste clairement son refus de consacrer une obligation d’information ou de conseil envers la caution dirigeante sur le maintien de son engagement en cas de cessation de ses fonctions, notamment suite à une cession de contrôle et au cautionnement corrélatif du cessionnaire. C’est dire la faible perméabilité de la Chambre commerciale aux idées de solidarisme ou de loyauté contractuelle832 qui fondent d’autres décisions promptes à étoffer la liste des devoirs ou obligations à la charge de certaines parties au profit d’autres plus faibles. Il est vrai qu’en l’espèce il s’agissait de cautions dirigeantes et averties. On remarquera toutefois avec un auteur que « le moins que l’on puisse dire est que l’établissement de crédit ne s’était pas montré très loyal envers le dirigeant démissionnaire et ses parents également engagés »833. Mais cette considération factuelle n’est visiblement pas suffisante pour fonder l’ajout d’une obligation d’information ou de conseil à la charge du créancier, dans le contrat de cautionnement.
29241-Technicité juridique. Deux raisons plus techniques semblent expliquer la rigueur d’une telle position de la Chambre commerciale.
30En premier lieu, il serait difficile d’envisager l’idée d’une obligation d’information ou de conseil portant sur l’absence d’effet novatoire de la substitution du nouveau dirigeant consécutive à la cession de contrôle.
31En second lieu, ceci heurterait le principe posé à l’article 1273 du Code civil selon lequel « la novation ne se présume point ; il faut que la volonté de l’opérer résulte clairement de l’acte ». Comme l’a expliqué M. Aubert : « l’intention de nover - animus novandi - constitue l’élément décisif de la qualification de novation [...] ; c’est elle, aussi, qui permet de ne pas confondre une novation avec la création d’une obligation nouvelle destinée à s’ajouter - à se juxtaposer - à une obligation ancienne. [...] C’est en réalité une intention tripartite qui comporte à la fois volonté d’éteindre l’obligation ancienne, volonté de créer une obligation nouvelle, et volonté de lier indissolublement l’extinction et la création ainsi voulues »834.
32242-Appréciation de la solution. Au regard de ces principes, applicables également aux cautions dirigeantes dès lors qu’elles ont les moyens de se renseigner, était-il loisible à la Cour de cassation de répondre comme elle l’a fait ?
33La doctrine a évoqué l’idée que la « sévérité (de la Chambre commerciale) pourrait, certes, être justifiée par le fait que, le créancier étant tenu d’une obligation annuelle d’information à l’égard de la caution, en application de l’article L. 313-22 du Code monétaire et financier, l’ancien dirigeant social a peu de chances d’oublier l’existence de son engagement de caution et pourra toujours résilier celui-ci si la situation financière de son ancienne entreprise se détériorait »835. Il semble que cette analyse puisse être discutée. D’une part, si telle est la logique de la Chambre commerciale, il faut alors convenir avec M. Crocq, que « ce serait oublier qu’il peut arriver que cette obligation d’information annuelle ne soit pas respectée par le créancier et qu’en ce cas, la jurisprudence considère que, sauf dol ou faute lourde du créancier, seule la sanction de la déchéance du droit aux intérêts est applicable, la caution ne pouvant obtenir de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1382836 du Code civil. Ces deux jurisprudences sont dès lors difficilement conciliables et le refus d’une obligation d’information au profit de la caution ayant perdu sa qualité de dirigeant social fait [...] ressortir davantage encore les inconvénients de la limitation à la seule déchéance du droit aux intérêts de la sanction de la violation de l’article L. 313-22 du Code monétaire et financier ». D’autre part, il ne s’agit pas, en l’espèce, du préjudice éventuellement causé à la caution par la perte d’une chance de résilier plus tôt son engagement de sorte que le passif garanti ait pu être limité. 11 est question du préjudice causé à la caution qui a cru que le cessionnaire s’était engagé en ses lieux et place à la demande expresse de l’établissement bancaire, le préjudice résidant dans la survie même de son engagement.
34Si cette interprétation de l’arrêt devait être retenue, il faudrait y voir l’analyse classique prise par la Chambre commerciale, qui n’applique le droit commun de la responsabilité contractuelle pour violation d’une obligation d’information que dans le cas où le créancier s’abstient de communiquer des informations que la caution pouvait légitimement ignorer ; dès lors que cette abstention la met dans l’impossibilité d’éviter une aggravation de sa situation. Mais le principe, vérifié avec cette décision dans laquelle l’objet de l’obligation d’information prétendue était l’absence d’effet novatoire de la substitution de garantie au profit de la caution, est le devoir de se renseigner837 : « Il appartient avant tout à la caution elle-même de veiller à ses propres intérêts en s’informant de la portée de son engagement et de la situation du débiteur »838.
35Il reste que la solution est sévère si l’on veut bien se souvenir que, dans cette affaire, la loyauté du banquier était plus que douteuse. La justification de la solution par M. Legeais semble logique : « La caution concernée est un professionnel », cependant, parce qu’une « obligation de conseil existe bien en la matière au profit de la caution. [...] elle est mise à la charge de son conseil. Des avocats et des notaires ont ainsi engagé leur responsabilité pour ne pas avoir informé leurs clients »839.
36Par delà le texte spécial, le droit commun peut-il permettre une sanction complémentaire du créancier ?
§ 2- Un complément de la sanction spéciale
37243- Problématique. Les textes de droit spécial qui édictent l’obligation d’information du créancier à l’égard de la caution sont-ils exclusifs de toute possibilité de voir engagée la responsabilité du créancier sur le fondement du droit commun ? Cette question qui pouvait donner lieu à diverses approches théoriques (A) a été résolue par la jurisprudence (B).
A/ L’approche théorique
38244-État des questions. La sanction, constituée par la déchéance du droit aux intérêts, encourue, en application de la loi, par le créancier n’ayant pas respecté son obligation d’information à l’égard de la caution peut-elle se cumuler avec une responsabilité contractuelle de droit commun ? Dans le silence de la loi, sur la nature et la portée de la sanction édictée, plusieurs solutions ont été envisagées.
39245-Solutions envisageables. Une première solution, dont on a dit qu’elle s’imposait « immédiatement à l’esprit »840, consiste à déduire du silence des textes, par un raisonnement a contrario, le caractère exclusif de la sanction constituée par la déchéance du droit aux intérêts échus. Selon cette logique, l’application de cette sanction, sans mention du préjudice causé effectivement à la caution, manifesterait la préférence du législateur pour un mode de sanction déconnecté des « difficultés inhérentes à l’évaluation du préjudice »841 dans la responsabilité civile. On a précisé que, ce faisant, le législateur aurait « ainsi recherché un compromis. Avant 1984, les établissements de crédit n’étaient tenus d’aucune obligation à l’égard des cautions. En sanctionnant le non-respect de l’obligation d’information par la déchéance du droit de percevoir les intérêts, le législateur aurait donc voulu inciter les établissements de crédit à respecter cette obligation sans pour autant les pénaliser trop lourdement en cas de non-respect »842. Outre le fait qu’elle ne s’impose pas immédiatement à l’esprit, l’argumentation n’est pas décisive.
40Une seconde solution consiste à considérer que la sanction légale se cumule avec le droit commun. A défaut d’exclusion expresse, le droit commun de la responsabilité doit s’appliquer. Par conséquent, si le législateur a prévu une sanction, cette dernière ne constitue qu’un minimum légal. Il n’en demeure pas moins que la violation d’une obligation légale est constitutive d’une faute. A supposer que les autres conditions du droit commun soient réunies, rien ne semble alors s’opposer à la mise en œuvre de la responsabilité de l’établissement de crédit, débiteur de l’information843.
41Il existe une troisième solution, intermédiaire entre les deux précédentes. Il est considéré que la sanction légale prévue par l’ancien article 48 de la loi du 1er mars 1984 joue à la manière d’une clause pénale844. Or, la clause pénale est une évaluation forfaitaire des dommages et intérêts dus en cas d’inexécution d’une obligation contractuelle, même en l’absence de préjudice consécutif à l’inexécution845. Mais elle cède, dans l’hypothèse d’une inexécution du débiteur commise par dol ou faute lourde. D’où cette conclusion que le recours subsidiaire au droit commun de la responsabilité civile (et l’obtention d’une réparation complémentaire) est conditionné par la preuve d’une faute dolosive ou d’une faute lourde commise par le débiteur.
42La Cour de cassation a donc dû choisir parmi les solutions envisageables celle qui avait sa préférence.
B/ L’évolution jurisprudentielle
43246-Ancrage jurisprudentiel. Classiquement, la Chambre commerciale de la Cour de cassation considérait que « la sanction de l’article 48 de la loi du 1er mars 1984, en ce qui concerne l’obligation d’information de la banque s’ajoute à la sanction de droit commun »846. Au visa de l’article 1147 du Code civil, elle donnait donc toute son ampleur à l’application du droit de la responsabilité contractuelle.
44La doctrine en déduisait que les conditions du droit commun devaient être réunies. Ainsi, « seule la faute de la banque sera facilement rapportée »847. Il faudra ensuite que la caution fournisse la preuve de l’existence et de l’étendue de son préjudice848 ainsi que du lien de causalité.
45247- Revirement de jurisprudence. Par un arrêt en date du 25 avril 2001849 la Chambre commerciale de la Cour de cassation a opéré un revirement en affirmant qu’il « résulte de l’article 48 de la loi du 1er mars 1984 que, sauf dol ou faute lourde du dispensateur de crédit, l’omission des informations prévues par ce texte est sanctionnée par la seule déchéance des intérêts ». Dès lors, le recours à la responsabilité civile de droit commun n’est possible qu’en présence d’une faute qualifiée de la banque : faute dolosive ou faute lourde.
46248- Positions doctrinales. En premier lieu, une partie de la doctrine a approuvé cette solution en estimant que « pour un établissement financier dont les ressources proviennent des intérêts des sommes prêtées, l’interdiction de les réclamer à la caution constitue une sanction suffisamment sévère pour ne pas avoir à y ajouter la perte totale ou partielle de la créance contre la caution »850. Ensuite, les mêmes auteurs ont émis le souhait que cette solution soit étendue à « toutes les obligations d’information qui, comme l’article L. 313-22 du Code monétaire et financier, prévoient une sanction spéciale (art. 2016 al. 2, C. civ. ; art. L. 341-1 C. consomm. ; art. 47 de la loi du 11 février 1994) »851.
47La doctrine s’est également interrogée sur la portée de ce recours restreint au droit de la responsabilité civile et, plus précisément, sur l’appréciation de la faute dolosive, et surtout de la faute lourde. En droit commun, la faute dolosive implique la mauvaise foi du débiteur et est assimilée à la faute intentionnelle. Deux conceptions du dol existent. La première, stricte, consiste à exiger que l’auteur de la faute ait non seulement voulu l’acte dommageable, mais également la réalisation de celui-ci. La seconde, plus large852 , qui sera certainement préférée en l’espèce, s’entend du refus délibéré par le débiteur d’exécuter ses obligations, même si ce refus n’est pas dicté par l’intention de nuire853.
48S’agissant de la faute lourde, la doctrine relève son caractère diffus et imprécis, tout en précisant qu’il s’agit d’une faute moins grave que le dol.
49Selon une conception objective, la faute lourde est caractérisée par l’inexécution d’une obligation essentielle. Mais l’application de ce critère se révèle assez complexe. D’une part, comme certains auteurs l’ont justement remarqué854, voir dans le devoir d’information une obligation essentielle conduit à considérer que l’omission des informations prévues engage systématiquement la responsabilité de l’établissement de crédit. Or, telle n’est pas la volonté de la Cour de cassation puisqu’il s’agit précisément de restreindre le recours subsidiaire à la responsabilité civile, contrairement à la solution posée en 1992855. D’autre part, dans un contrat unilatéral tel que le cautionnement, l’obligation d’information présente un caractère singulier. La caution ne s’engage pas en considération d’une telle obligation et surtout elle n’est « porteuse d’aucun gain véritable pour son créancier [...] (la caution est) seulement apte à limiter le poids de sa propre obligation »856. On a d’ailleurs remarqué que l’objet de l’obligation d’information pouvait être facilement réalisé par « une démarche personnelle (de la caution) »857 ce qui rend douteux qu’elle puisse constituer une obligation fondamentale.
50Selon une conception subjective, la faute lourde suppose un comportement anormal, révélant une inaptitude du débiteur à exécuter ses obligations. Cette conception paraît malaisément transposable à l’obligation d’information, d’exécution facile par un professionnel averti. C’est pourquoi les auteurs ont émis le souhait que la Cour de cassation prenne en compte le caractère total ou partiel du manquement et exige un comportement particulièrement grave qui dénote une impéritie manifeste confinant à la mauvaise foi contractuelle858.
51249- Nature du mécanisme et de la sanction. On peut s’interroger sur le point de savoir si le système de recours restreint à la responsabilité civile de droit commun ainsi mis en place par la Cour de cassation est l’interprétation la plus conforme au texte ? S’agit-il, comme le précise M. Théry, d’« un retour au texte »859 ? La réponse commande de savoir comment interpréter la sanction prévue par la loi au regard du droit commun. Comme le suggérait un auteur au lendemain de l’arrêt, « La cour ne se rangerait-elle pas finalement à l’avis des professeurs Cabrillac et Teyssié ? »860.
52On observera déjà que la sanction légale de déchéance des intérêts représente en toute hypothèse un coût financier, qu’ensuite la solution « évite que des textes spéciaux ne soient totalement vidés de leur substance par le recours aux règles générales de la responsabilité susceptibles de subvertir tout le droit positif ou presque ». Plus généralement, on remarque que « la responsabilité civile de droit commun forme [...] un complément subsidiaire à la sanction plafonnée prévue par la loi, de sorte que le compromis réalisé ne doit être rompu qu’en présence de certains manquements et non de n’importe quelle carence de l’établissement de crédit, au risque sinon de briser l’idée même de compromis »861
53« Compromis », « sanction plafonnée », ces notions éclairent sur la nature de la sanction, « constitutive d’une clause limitative de la responsabilité de l’établissement de crédit débiteur de l’obligation d’information [...] Instituant une obligation nouvelle et exorbitante du droit commun du cautionnement à la charge de certains créanciers, la sanction forfaitaire de son inexécution doit normalement être la seule, sauf à ce qu’un comportement particulièrement grave de l’établissement de crédit lui fasse perdre le bénéfice de ce compromis »862.
54L’exigence d’une faute dolosive ou lourde n’étant pas nécessaire à la mise en œuvre de la responsabilité contractuelle863, cette gradation des fautes ne peut avoir de sens que « lorsque la victime se trouve confrontée à une règle légale ou à une clause contractuelle venant restreindre le nombre ou l’intensité des obligations pesant sur le débiteur et/ou le quantum de la réparation due en cas de manquement à l’une ou l’autre des obligations contractuellement définies »864. C’est pourquoi certains auteurs retiennent, à partir de la solution du 25 avril 2001, la qualification de clause limitative de responsabilité865.
55Cependant, M. Aynès, tout en jugeant la solution « raisonnable », écarte la qualification de clause limitative de responsabilité pour s’en tenir à celle de déchéance et éclaire son mécanisme par comparaison avec celui de la clause pénale, ce qui lui permet de ne pas s’étonner que soit indifférent, au plan du régime de la sanction légale, l’existence d’un préjudice de la caution866.
56Sur ces bases, il convient de préciser que M. Crocq867 n’admet le fondement de la restriction du recours à la responsabilité qu’à condition de considérer que « la perte du droit de percevoir les intérêts subie par le créancier constitue une réparation du préjudice subi par la caution. Or, il n’en est rien puisque le législateur [...] a employé le terme de déchéance, laquelle constitue non pas une réparation d’un préjudice subi mais une sanction d’un comportement fautif. La preuve en est que cette déchéance est susceptible de s’appliquer même lorsque la caution n’a subi aucun préjudice ce qui permet à la jurisprudence de faire bénéficier de ce texte la caution dirigeant social de l’entreprise débitrice principale alors même que cette caution est parfaitement au fait de l’évolution de la dette garantie. L’affirmation effectuée par la Chambre commerciale semble donc critiquable ».
57250- Position de la première Chambre civile. Après cette décision de la Chambre commerciale, la position de la première Chambre civile était attendue. Elle résulte de deux décisions successives.
58Par un arrêt en date du 6 novembre 2001868, elle estime, sollicitant le droit commun, dans une espèce où l’héritier d’une caution reprochait à la banque l’inexécution de son obligation, que « l’omission des informations prévues par l’art. 48 ne peut, à elle seule, être sanctionnée que par la déchéance des intérêts ». Cette solution diffère sensiblement de celle retenue par la Chambre commerciale. Là où cette dernière réserve les cas de dol et de faute lourde, la première Chambre civile rejette l’application du droit commun et se fonde sur la seule omission des informations prescrites par la loi. Au-delà des mots la réserve avait-elle une portée comparable869 ? La première Chambre civile exigeait-elle au contraire une faute distincte, indépendante de l’omission d’information870 ?
59L’incertitude a été levée lorsque, par un arrêt en date du 10 décembre 2002871, elle a affirmé que « l’omission des informations prévues par l’art. L.313-22 du Code monétaire et financier ne peut être à elle seule sanctionnée que par la déchéance des intérêts », et reproche aux juges du fond d’avoir retenu la responsabilité civile de la banque « sans constater le caractère dolosif de l’omission d’information imputée à la banque, ou un manquement distinct de celle-ci ».
60La solution a été réaffirmée par un arrêt du 4 février 2003872, rejetant le pourvoi d’une caution en estimant qu’elle « ne justifiait pas d’un préjudice particulier consécutif au défaut d’information », au motif explicite que « l’omission des informations prévues par l’article L. 313-22 [...] ne peut, sauf dol ou faute distincte, être sanctionnée que par la déchéance des intérêts ; que la cour d’appel ayant souverainement retenu que (la caution) ne justifiait pas d’une telle faute ayant causé un préjudice autre ou plus important que celui réparé par application de l’article précité, le moyen est sans fondement ».
61Il s’en déduit que, seul le dol ou la faute extérieure au manquement à l’obligation légale peut positivement donner prise à la responsabilité civile du créancier. De même, il semble que la première Chambre civile, par la mention du préjudice « réparé par application de l’article » L. 313-22 du Code monétaire et financier, prenne parti pour la qualification de clause limitative de responsabilité ou de clause pénale.
62D’autres questions relatives à la mise en œuvre de la responsabilité de droit commun ont été résolues par la jurisprudence.
SECTION 2. LA MISE EN ŒUVRE DE LA RESPONSABILITÉ DE DROIT COMMUN
63251-Champ de l’étude. Dans le cadre du contentieux relatif à la mise en œuvre de la responsabilité du créancier pour soutien abusif ou retrait brutal de crédit au débiteur principal, une question s’est posée dans le prolongement de certains arguments procéduraux soulevés par les créanciers : Quelle voie procédurale doit emprunter la caution pour engager la responsabilité du créancier non diligent (§ 1) ? Par ailleurs, et plus largement, le créancier doit veiller à la proportionnalité de l’engagement de la caution, sous peine de ne pas pouvoir recouvrer sa créance (§ 2).
§ 1- La voie procédurale
64252-État des questions. Quelle est la nature procédurale de la demande de la caution qui invoque la responsabilité du créancier à raison d’une faute commise à l’encontre du débiteur principal ? La réponse à cette question a évolué : d’une demande reconventionnelle (A) à celle d’une défense au fond (B), la demande de la caution peut emprunter aujourd’hui indifféremment l’une ou l’autre de ces formes (C).
A/L’obligation procédurale
65253- Le système initial. La position initiale de la Cour de cassation résultait d’un arrêt du 16 mars 1993 par lequel la Chambre commerciale873 jugea que : « si une caution est recevable à mettre en œuvre la responsabilité du créancier lorsqu’elle intente à son encontre une action en réparation d’un dommage dont elle se prévaut en raison des conditions dans lesquelles une banque créancière a accordé puis retiré des moyens de financement au débiteur principal, elle ne peut, en dehors du champ d’application de l’article 2037 du Code civil, invoquer une faute du créancier dans ses rapports avec le débiteur à titre d’exception pour se soustraire à l’exécution de l’obligation qu’elle a contractée ».
66Explicitement, cet attendu signifiait que dans le cadre de son recours subrogatoire issu de l’article 2037 du Code civil, quand la caution ne reprochait pas au créancier de ne pas avoir constitué les sûretés suffisantes, mais qu’elle invoquait la faute commise par le créancier dans ses rapports avec le débiteur, celle-ci n’était recevable qu’à la condition de formuler sa prétention par la voie d’une demande reconventionnelle.
67La solution repose sur plusieurs arguments. L’exception du bénéfice de subrogation devait être exclue de ce type d’action en responsabilité du créancier mis en œuvre par la caution. Celui-ci s’analyse en effet comme une cause d’extinction par voie principale de l’obligation de règlement de la caution, puisque cette dernière qui invoquait la perte fautive de droits préférentiels profitait alors d’une décharge directe prévue par le Code civil.
68A l’inverse, lorsque la caution se substitue au débiteur pour engager la responsabilité du créancier en raison de l’octroi ou de la rupture abusive d’un crédit, elle entend obtenir sa libération par voie accessoire en vertu d’un principe d’extinction qu’on a pu qualifier de réflexe874. En effet, la faute du créancier engendre une créance de dommages et intérêts appelée à se compenser avec la créance principale cautionnée ce dont la caution est autorisée à se prévaloir en vertu des articles 1294 et 2036 du Code civil relatifs au mécanisme de la compensation judiciaire.
69Ainsi, les décisions des juges du fond condamnant les cautions au paiement intégral de la dette principale, sans rechercher si la banque avait commis les fautes alléguées, alors que les cautions pouvaient invoquer la compensation considérée comme une « exception inhérente à la dette »875 ont été sanctionnées par la Cour de cassation.
70A coté de la compensation légale prévue par les articles 1289 et suivants du Code civil, la compensation judiciaire est une création prétorienne qui « trouve indirectement une base textuelle dans les art. 70 et 564 du Nouveau Code de procédure civile »876. C’est une sorte de compensation « de rattrapage au profit de la partie qui serait exposée à payer sa dette à découvert si l’on s’en tenait strictement au régime de la compensation légale »877. Ainsi, le juge peut-il opérer une compensation entre des créances dont l’une « ne réunit pas encore toutes les conditions requises pour la compensation légale »878, notamment, les conditions de liquidité et d’exigibilité. Or, la compensation judiciaire ne peut s’opérer qu’au « moyen d’une demande reconventionnelle »879.
71254-Critique processualiste. En dépit de ces justifications, une critique virulente de la solution, fondée sur les concepts de la procédure civile, a été formulée par M. Guinchard880.
72L’auteur conteste que la demande de la caution soit reconventionnelle lorsque la caution invoque la faute du créancier commise à l’encontre du débiteur principal. Aux termes de l’article 64 du Nouveau Code de procédure civile, la demande reconventionnelle se définit comme celle par laquelle « le défendeur originaire prétend obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire », ici le créancier poursuivant. Or, « en présentant sa demande de dommages et intérêts, la caution cherche seulement à annihiler la demande en paiement du créancier, sans rien obtenir de plus, et si ce mode de défense réussit, elle aura fait échec à cette demande en paiement, mais elle n’aura pas obtenu de dommages et intérêts supplémentaires »881. Dès lors, au sens de l’article 71 du nouveau Code de procédure civile « la demande de la caution n’est pas une demande reconventionnelle mais une défense au fond, par laquelle le défendeur se contente de combattre la prétention du créancier »882.
73255-Critique civiliste. On a aussi privilégié exclusivement la demande reconventionnelle, au motif que, censée avoir payé le créancier par compensation, la caution serait théoriquement en droit de recourir contre ses cofidéjusseurs ou contre le débiteur principal. Ainsi, « la responsabilité du créancier aurait [...] pu lui permettre de s’enrichir, en récupérant des fonds non déboursés, résultat évidemment inacceptable »883.
74L’analyse peut surprendre. La position initiale de la Chambre commerciale consistant à imposer la voie de la demande reconventionnelle trouvait sa justification dans le fait que la compensation était invoquée entre la dette de la caution et la dette du créancier, née dans ses rapports avec le débiteur principal, de sorte que cette compensation ne devait pas lui ouvrir droit à recours. Il n’y avait pas lieu, dès lors, de redouter que la caution puisse s’enrichir suite à la compensation.
75En réalité, l’hésitation est permise car progressivement, les auteurs ont eu tendance à considérer que la caution n’invoque pas un préjudice par ricochet, mais un préjudice direct884 et que, corrélativement, la responsabilité du créancier apparaît comme une responsabilité contractuelle fondée sur l’exigence de bonne foi, qui préside à la formation et à l’exécution du contrat de cautionnement885.
76Dès lors, deux positions sont concevables : soit, il faut considérer que « la prise en compte d’un préjudice personnel prétendument subi par la caution, dans le type de situations étudiées, reste discutable ; l’analyse de ce préjudice comme étant exclusivement dérivé de celui subi, d’abord, par le débiteur principal, en permettant une compensation dans les seules relations créancier-débiteur, éviterait les inconvénients d’une compensation dans les relations créancier-caution évoquées précédemment ; elle serait seule en mesure de préserver l’essence du contrat de cautionnement autant que l’équilibre de son régime »886 . Soit, il faut penser que « la responsabilité du banquier pour octroi abusif ou retrait brutal de crédit se rattache à son devoir d’exécuter le contrat de cautionnement de bonne foi et que la faute est ainsi commise à l’encontre de la caution elle-même ». Dans le prolongement de ce raisonnement, la décharge de la caution doit consister en une sanction directe « tenant lieu de réparation en nature du préjudice causé »887.
77Ainsi, la voie de la demande reconventionnelle, qui induit l’idée de compensation judiciaire, laisse apparaître un risque d’enrichissement de la caution, par l’exercice de son recours. Le contexte ne pouvait être plus propice à la réception de la critique processualiste qui, sans aller jusqu’à parler de déchéance directe, s’en tenait à la compensation légale888, consacrant une voie de décharge directe de la caution, compatible avec le qualificatif de défense au fond. Encore fallait-il officiellement annoncer le revirement de jurisprudence qui accorderait alors à la caution une décharge directe par voie principale, à l’instar d’autres déchéances légales889.
B/ L’option procédurale
78256- Affirmation du principe. L’arrêt Echaudemaison, rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 26 octobre 1999890, a opéré ce revirement de jurisprudence. Au visa des articles 64 et 71 du nouveau Code de procédure civile, la Chambre commerciale a jugé que, « poursuivie en paiement par le créancier, la caution qui demande à être déchargée de son obligation en raison de la faute commise par celui-ci à l’encontre du débiteur principal, sans prétendre obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire, peut procéder par voie de défense au fond ; qu’elle peut aussi, par voie de demande reconventionnelle, demander à être déchargée indirectement en sollicitant des dommages-intérêts puis la compensation entre le montant de la dette et celui de ces dommages-intérêts ». La Chambre commerciale ouvrait ainsi à la caution une option, chacune de ses branches produisant un effet différent891.
79257- Intérêts et justification du revirement. Le revirement présente l’intérêt d’éviter à la caution d’être sanctionnée par l’exercice d’une défense au fond. De plus, il lui permet d’invoquer la faute du créancier à tous les stades de la procédure. La solution est motivée par la recherche d’une simplification. La caution, ayant malencontreusement emprunté la voie de la défense au fond, n’a plus à redouter d’être sanctionnée ni d’avoir à engager une seconde procédure, dispositif dont la lourdeur avait d’ailleurs été relevée par M. Guinchard892.
80Le visa choisi par la Chambre commerciale indique bien le raisonnement adopté : c’est parce que la caution ne prétend pas « obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire » qu’elle peut procéder par la voie de la défense au fond. La solution se fonde donc sur l’argument développé par M. Guinchard. Le résultat de la démarche de la caution ne correspondant pas en tous points à la définition de la demande reconventionnelle retenue par le nouveau Code de procédure civile, il est apparu possible à la Chambre commerciale de ne plus considérer comme irrecevables les cautions qui invoquaient la faute du créancier par la voie de la défense au fond. Pourtant, contrairement à ce que préconisait M. Guinchard, la Chambre commerciale ne se réfère pas à la compensation légale, mais semble édicter une décharge directe : « La caution n’obtient plus réparation de son préjudice par des dommages-intérêts. Il y a réparation en nature »893.
81Les auteurs estiment que le jeu de la compensation mérite d’être approuvé car il fait obstacle aux recours de la caution contre le débiteur principal ou les cofidéjusseurs, générateur d’enrichissement. Mais on ne peut manquer de s’interroger : la Chambre commerciale ne limite-t-elle pas le domaine de l’option procédurale à la libération de la caution fondée sur « la faute commise par (le créancier) à l’encontre du débiteur principal » ?
82A cet égard, on peut estimer que la Cour de cassation a voulu essentiellement simplifier le régime de la défense de la caution en lui permettant d’invoquer une faute du créancier. Mais alors pourquoi la caution peut-elle invoquer cette faute du créancier à l’encontre du débiteur principal ? On ne peut expliquer la solution que par une interprétation large de la notion d’exception inhérente à la dette, la caution ayant subi un préjudice par ricochet puisqu’elle est appelée à régler la dette de manière accessoire. Dès lors, après avoir noté la similitude de cette situation avec les déchéances légales sanctionnant en nature des fautes commises par le créancier à l’encontre de la caution, la solution devait être étendue. Ainsi, la décharge pourrait constituer la « sanction directe tenant lieu de réparation en nature du préjudice »894.
83Au contraire, on peut mettre en avant « qu’il est tout à fait possible de soutenir que la responsabilité du banquier pour octroi abusif ou retrait brutal de crédit se rattache à son devoir d’exécuter le contrat de cautionnement de bonne foi et que la faute est ainsi commise à l’encontre de la caution elle-même »895. Il s’ensuit que la solution posée par l’arrêt Echaudemaison896 est susceptible d’être généralisée à l’hypothèse de fautes commises par le créancier à l’égard de la caution elle-même, dès lors qu’elle « interdit à la caution de prétendre qu’ayant payé sa dette par compensation, elle est en droit de recourir, à due concurrence, contre le débiteur principal ou d’autres cofidéjusseurs »897. Il suffit alors de constater que, dans les hypothèses légales de fautes commises par le créancier contre la caution, la loi parle précisément de décharge898.
84258- Constat. Sur ces bases variables, la seconde branche de l’option - procéder par voie de demande reconventionnelle débouchant sur une libération indirecte par voie de compensation - paraissait toujours critiquable et appelée à disparaître, soit que l’on considère qu’elle faisait perdurer le risque d’enrichissement de la caution, soit que l’on constate que désormais, « la décharge invoquée par une défense au fond présente beaucoup plus d’intérêts pour la caution que la compensation invoquée par voie de demande reconventionnelle »899. Ainsi, « il existait de solides arguments en faveur d’une fermeture de la voie procédurale de la demande reconventionnelle en compensation »900.
C/L’indifférence procédurale
85259-Réaction de la première chambre civile. Un arrêt de la Chambre mixte de la Cour de cassation901 est venu relancer le débat que l’on pensait clos.
86En l’espèce, à la suite de la défaillance de l’emprunteur, la banque prêteuse assigna le débiteur principal et la caution puis réalisa la garantie hypothécaire qu’elle détenait en vendant l’immeuble du débiteur principal. Le prix de vente n’ayant pas permis de couvrir la totalité de la dette, la banque fit délivrer un commandement de payer à la caution, contre lequel elle forma opposition.
87Pour rejeter cette opposition, l’arrêt déféré retenait que, en dehors du champ d’application de l’article 2037 du Code civil, la caution n’était recevable à agir en responsabilité à l’encontre du banquier que par voie de demande reconventionnelle et que ses prétentions, fondées sur de prétendues fautes de la banque dans le recouvrement de sa créance, constituaient un simple moyen de défense au fond.
88La Cour de cassation censura les juges du fond au motif qu’« en statuant ainsi alors que les demandes reconventionnelles et les moyens de défense sont formés de la même manière à l’encontre des parties à l’instance, la Cour d’appel, qui devait répondre à la demande de la caution quelle qu’en fût la qualification procédurale, a violé les articles 4, 64, 68 et 71 du Nouveau Code de procédure civile ».
89260-L’appréciation de la solution. On peut se réjouir de cette nouvelle solution qui, quelle que soit la voie procédurale adoptée par la caution, oblige les juges du fond à statuer sur sa demande.
90Cette solution permettra de mettre fin aux contentieux dans lesquels les créanciers entendaient tirer partie de la qualification procédurale des prétentions des cautions. Il devient alors possible de se concentrer sur les conditions de fond de la responsabilité du créancier, notamment celle de savoir si la faute commise l’est à l’encontre du débiteur principal ou de la caution.
91Non content d’avoir largement ouvert la voie procédurale à la caution, la jurisprudence a accru le fardeau du créancier en l’obligeant à veiller à la proportionnalité de l’engagement de la caution.
§ 2- La voie de la proportionnalité
92261-Exégèse. Le principe de la proportionnalité est issu des textes (A) mais a été étendu par la jurisprudence laquelle, par le flux (B) et le reflux (C) de ses décisions, a dressé les contours d’un principe prétorien de proportionnalité.
A/ La proportionnalité légale
93262-L’exigence de proportionnalité. Si l’exigence de proportionnalité a fait son apparition il y a peu dans le droit des contrats en s’imposant rapidement comme l’un des piliers du solidarisme contractuel902, elle reste étrangère à la philosophie du Code civil en général et en matière de cautionnement, en particulier. L’article 2018 du Code civil dispose certes que « le débiteur obligé à fournir une caution doit en présenter une qui ait la capacité de contracter, qui ait un bien suffisant pour répondre de l’objet de l’obligation et dont le domicile soit dans le ressort de la cour d’appel où elle doit être donnée ». Cependant, il s’agit d’une règle protectrice du créancier auquel une caution est présentée et non d’une règle protectrice de la caution elle-même903.
94263- Proportionnalité dans les textes. L’exigence de proportionnalité est, dans un premier temps, apparue dans le domaine des vices du consentement. Toutefois, la Cour de cassation a énoncé que « la disproportion entre les ressources de la caution et le montant de son engagement n’est pas constitutive d’une erreur sur la substance »904. Si l’annulation semblait pouvoir être prononcée, c’était uniquement lorsque la disproportion s’accompagnait d’autres circonstances permettant d’établir l’existence d’une atteinte à l’intégrité du consentement de la caution905.
95Une question s’est pourtant récemment présentée aux magistrats : peut-on, en l’absence de circonstances particulières, tolérer que la situation patrimoniale de la caution soit compromise du fait d’un engagement excessif ?
96Dans une vision consumériste la réponse négative s’imposa spontanément pour la caution profane, et le législateur a finalement consacré l’exigence de proportionnalité aujourd’hui posée par l’article L. 313-10 du Code de la consommation906 qui prévoit que les droits du créancier garanti, dans le cadre d’un crédit à la consommation, se trouvent bridés par la protection due à la caution profane. Le but recherché était907 de prévenir l’endettement excessif des particuliers, et « d’éviter que les banques n’aient systématiquement recours au cautionnement (sûreté radicale s’il en est) notamment dans les relations de famille »908
97Par ce biais, fut donc consacré un nouveau devoir du créancier, celui de veiller à ne pas solliciter des cautionnements disproportionnés. La loi n’a cependant pas érigé cette exigence en condition de validité du cautionnement. Comme le texte l’indique, la sanction s’opère au stade de la poursuite de la caution, laquelle peut seulement se soustraire à son obligation de paiement à condition que la disproportion n’ait pas disparu à ce moment. Cette disposition réserve le cas d’un retour à meilleure fortune, ce qui rend le mécanisme plus souple et prouve incontestablement qu’il ne s’agit pas d’une condition de validité909, le créancier voit donc son droit d’action paralysé.
98Une controverse s’est toutefois élevée sur le point de savoir si cette paralysie du droit d’agir contre la caution était temporaire ou définitive. Dans le second cas, il s’agirait d’une pure et simple déchéance. La première solution, qui permet au créancier de réitérer son action contre la caution dès que la situation de cette dernière s’améliore, « aboutit à faire peser sur la caution une obligation pratiquement imprescriptible. Aussi bien, il semble préférable de considérer que la violation de l’art L. 313-10 expose le créancier à une perte définitive de ses droits, c’est-à-dire à une déchéance »910.
99Compte tenu des termes de la loi, il s’agit d’une déchéance totale, et non d’une déchéance partielle se traduisant par un simple rééquilibrage, c’est-à-dire une suppression de l’excès manifeste911. Cette exigence n’est pas restée cantonnée sur le terrain qui lui était assigné.
B/ Le flux jurisprudentiel
100264- Arrêt Macron. Par l’arrêt Macron912 la jurisprudence a mis en place le contrôle de la proportionnalité de l’engagement de la caution.
101En l’espèce, un dirigeant de société, président du conseil d’administration, s’était porté avaliste envers une banque, à concurrence de 20 millions de francs, outre les intérêts et accessoires, de toutes les dettes de sa société, alors qu’au moment de l’engagement, son patrimoine était estimé pour une valeur inférieure à 4 millions de Francs (l/5e du montant total de son engagement) et que la charge des seuls intérêts excédait notablement ses revenus mensuels. Comme l’a judicieusement relevé M. Molfessis, l’espèce « avait tout pour provoquer »913 et étendre par contagion au droit commun le principe de proportionnalité du droit spécial du cautionnement de crédit à la consommation914.
102La Cour de cassation établit la protection des cautions contre les engagements disproportionnés qu’elles peuvent souscrire sur le terrain de la responsabilité civile de droit commun. Les juges du fond avaient condamné la banque à payer à la caution une somme de 15 millions de Francs à titre de dommages-intérêts et ordonné sa compensation avec le montant garanti. Le pourvoi formé par la banque fut rejeté au motif qu’« après avoir retenu que (le dirigeant) avait souscrit un aval [...] manifestement disproportionné à ses revenus [...] et à son patrimoine, la cour d’appel, tout en estimant (qu’il) n’avait pas commis d’erreur, viciant son consentement, a pu estimer, en raison de l’énormité de la somme garantie par une personne physique, que, dans les circonstances de fait, exclusives de toute bonne foi de la part de la banque, cette dernière avait commis une faute en demandant un tel aval [...] ; ainsi, la cour d’appel a légalement justifié sa décision ».
103La Cour de cassation ne vise pas explicitement l’article 1134, alinéa 3 du Code civil, mais il semble assez clair que l’arrêt Macron est fondé sur le principe de bonne foi qui doit animer les relations contractuelles. La bonne foi est ici nettement autonome915 dans la mesure où, tout en relevant que la Cour d’appel avait pu estimer que la caution « n’avait pas commis d’erreur, viciant son consentement », la Haute juridiction admet que le créancier a manqué au devoir de bonne foi en acceptant un engagement disproportionné. Ainsi, l’exigence de proportionnalité s’est nettement déplacée du terrain des vices du consentement à celui de la responsabilité de droit commun916.
104265- Nature de la responsabilité. On s’est toutefois interrogé sur la nature contractuelle ou extra-contractuelle de la responsabilité de la banque dans l’espèce précitée. La Cour de cassation évoque la « faute » de la banque mais elle se garde bien d’en relever l’essence.
105En faveur de la responsabilité contractuelle, il peut être allégué que le contrat avait été conclu et que sa validité n’était pas en cause. De plus, le préjudice résulte précisément de la mise en œuvre du contrat de sûreté. On peut également invoquer l’article 1134, alinéa 3 du Code civil, siège de l’exigence de bonne foi. Pourtant, il ne s’agit pas de la violation d’une obligation préexistante puisque le contrat de cautionnement est unilatéral. Ce qui est ici sanctionné c’est le fait de laisser conclure un contrat de cautionnement disproportionné. Ainsi, la faute se situe au stade de la formation du contrat, avec cette nuance que la déloyauté ne porte pas atteinte à sa conclusion. Dès lors, comme l’a justement précisé M. Casey : « S’il est vrai que la faute déploie ses effets lors de l’exécution de la convention, elle ne provient pas de l’exécution mais de la négociation de celui-ci. Autrement dit, c’est une faute in contrahendo, que le contrat n’a fait qu’entériner, et l’on sait que la jurisprudence n’a jamais consacré la théorie de Ihering sur la nature contractuelle d’une telle faute. La responsabilité délictuelle paraît alors mieux fondée »917.
106266-Renouveau de la règle. Certains auteurs ont estimé que l’idée de faire intervenir le droit de la responsabilité civile « à la remorque du droit spécial » n’était pas appropriée, eu égard aux faiblesses présentées par le texte spécial de l’article L. 313-10 du Code de la consommation. Il serait, selon eux918, nécessaire d’élaborer une règle nouvelle, permettant de prévenir l’hypothèse du concours d’actions. Selon ces mêmes auteurs, le recours au droit commun serait inadéquat. La responsabilité pour faute permettant une compensation de la dette de la caution avec les dommages et intérêts dus par le créancier pour réparation de sa faute, la caution est censée avoir payé, ce qui engendrerait une double conséquence. D’une part, elle disposerait d’un recours contre le débiteur principal ; d’autre part, le créancier, censé avoir été payé par compensation, perdrait son action contre le débiteur principal.
107De là, la caution d’un crédit à la consommation, pourtant déjà protégée par l’article L. 313-10 du Code de la consommation, ne pourrait que vouloir bénéficier des avantages présentés par le droit commun.
108Pour la doctrine, les travers d’une telle option conduisent à élaborer une nouvelle règle, qui tout à la fois, exclurait le recours au droit commun et redéfinirait le régime de l’article L. 313-10 du Code de la consommation919.
109267-Étendue de la sanction. La faute, qui constitue le pivot de cette nouvelle affirmation indirecte de l’exigence de proportionnalité empruntée au droit spécial et importée dans le droit commun, a été diversement appréciée par les auteurs.
110Ainsi pour M. Crocq, à propos de l’arrêt Macron : « La solution retenue ici par la Cour de cassation mérite d’être approuvée car, sans aller jusqu’à mettre à la charge de l’établissement financier un devoir de conseil ayant pour objet l’opportunité de l’engagement souscrit, ce n’est pas trop lui demander que d’exiger qu’il ne fasse souscrire à ses cocontractants que des engagements en rapport avec leurs facultés de remboursement ou de paiement. Ce qui a, déjà, pu être admis par la jurisprudence à propos du débiteur principal devait logiquement l’être également s ‘agissant de la caution »920
111Certains auteurs ont pourtant émis une opinion différente. Ainsi, M. Aynès écrit-il : « On invoque la violation d’un devoir de bonne foi, décidément bonne à tout faire de la responsabilité contractuelle. Y a-t-il dans l’attitude de la banque la moindre déloyauté, par action ou omission ? »921
112Certains ajustements semblaient donc nécessaires. Ainsi, alors que la déchéance prévue par l’article L. 313-10 du Code de la consommation est totale, la sanction indirecte du principe de proportionnalité par le biais de la responsabilité civile doit-elle aboutir à une libération totale ou seulement partielle de la caution ? La dernière solution paraît préférable et les auteurs vont en ce sens lorsqu’ils critiquent les juges du fond ayant libéré totalement les cautions922. La Cour de cassation est récemment venue confirmer la portée ainsi limitée du bénéfice de proportionnalité923. La règle jurisprudentielle ne permet qu’une réduction du cautionnement.
113En effet, « en deçà, de la fraction manifestement excessive, il ne pouvait y avoir ni manquement du créancier au devoir de bonne foi, ni préjudice subi par la caution »924.
114268- Assiette de la sanction. La règle jurisprudentielle ne semble pas interdire la prise en compte de l’évolution de la situation patrimoniale de la caution postérieurement à son engagement, s’agissant notamment d’apprécier l’existence du préjudice.
115En outre, l’incise « dans les circonstances de fait, exclusives de toute bonne foi », présente dans l’arrêt Macron permettait-elle d’envisager une exonération du créancier par la preuve de son ignorance légitime des facultés contributives de la caution ? La dernière solution avait la préférence d’une doctrine autorisée925.
116En dépit des débats qu’il a suscités, l’arrêt Macron n’avait fait l’objet que d’un nombre très raisonnable d’applications, dans des cas où la disproportion était véritablement flagrante, et où de surcroît, la caution n’était pas une caution profane, puisqu’il s’agissait du président du conseil d’administration de la société débitrice principale. Or, la solution posée en 1997 s’est indifféremment appliquée aux cautions profanes et aux cautions dirigeantes, dont on sait pourtant que la jurisprudence estime, à raison, qu’elles sont mieux informées et expérimentées. Au demeurant dans le même arrêt, la Cour de cassation approuve les juges du fond d’avoir écarté l’erreur alléguée par la caution, précisément parce qu’il était un dirigeant d’entreprise. La volonté de la Cour de cassation de faire bénéficier toutes les cautions, personnes physiques du principe de proportionnalité était donc manifeste. La doctrine a tenté de justifier cette indifférence à la qualité des parties, par l’idée d’une faute appréciée in abstracto, « que l’instruction, la position ou la qualité de la victime ne peut excuser ou justifier »926. Il n’en reste pas moins que cette particularité de l’arrêt Macron pouvait choquer.
117Dans ce contexte, la Chambre commerciale a rendu un arrêt Nahoum qui a surpris la doctrine et qui a paru aux yeux de certains auteurs constituer un revirement ou, à tout le moins, un abandon de la jurisprudence Macron.
C/ Le reflux jurisprudentiel
118269- Arrêt Nahoum. Les faits ayant donné lieu à l’arrêt du 8 octobre 2002927 étaient très comparables à ceux de l’affaire Macron. Deux personnes avaient créé et dirigeaient ensemble une société de promotion immobilière à laquelle d’importants prêts bancaires avaient été accordés. La société dont il s’agissait ayant été mise en liquidation judiciaire, la banque prêteuse a poursuivi ses dirigeants en exécution des cautionnements qu’ils avaient souscris en garantie des prêts consentis. Engagés à hauteur de 23 millions et demi de francs, les dirigeants cautions se défendirent en mettant en cause la responsabilité de la banque, lui reprochant notamment de leur avoir fait souscrire des engagements sans rapport avec leurs revenus habituels (30.000 francs par mois). La jurisprudence Macron donnait a priori à ces cautions toutes les chances d’être entendues. Elles ne l’ont pourtant pas été.
119Se fondant sur la considération des importants profits escomptés de l’opération immobilière conduite par la société, les juges du fond ont refusé de retenir la responsabilité de la banque et, saisie d’un pourvoi, la Cour de cassation leur donna raison, substituant toutefois au motif critiqué un motif de pur droit. Les cautions « respectivement président du conseil d’administration et directeur général de la société », n’avaient « jamais prétendu ni démontré que la banque aurait eu sur leurs revenus, leurs patrimoines et leurs facultés de remboursement raisonnablement prévisibles en l’état du succès escompté de l’opération immobilière entreprise par la société, des informations (qu’elles-mêmes) auraient ignorées », et que, par voie de conséquence, elles n’étaient pas fondées à rechercher la responsabilité de cette banque.
120270- Incidence. L’arrêt a été diversement interprété. L’opinion de M. François, est que « dans cet arrêt, la Chambre commerciale tournait le dos au principe de proportionnalité, puisque celui-ci était précisément fondé sur une comparaison entre le montant du cautionnement et le patrimoine de la caution au jour de l’engagement »928. Les conditions de mise en œuvre de la responsabilité du créancier font donc sur ce terrain l’objet d’un durcissement. Une simple disproportion ne suffit plus. Il faut désormais un autre élément qui peut être qualifié d’intentionnel. Celui-ci se matérialise par une faute non directement déduite de la disproportion, même manifeste. Il est nécessaire de démontrer que la banque savait que les cautions ne seraient pas en mesure de rembourser, compte tenu soit de leurs facultés propres, soit du projet financé par l’opération principale, et qu’en outre, la caution ait ignoré ces mêmes éléments.
121La sanction par la responsabilité civile des engagements manifestement disproportionnés de cautionnement exige donc de rapporter la preuve d’une dissymétrie d’informations. En effet, « un établissement de crédit n’engage sa responsabilité que s’il possède des informations que (la caution) ne possède pas. L’établissement de crédit est alors fautif s’il obtient le cautionnement ou s’il accorde l’emprunt car il ne peut ignorer que l’opération est vouée à l’échec »929.
122En pratique, avec l’arrêt Nahoum, le principe de proportionnalité est abandonné à l’égard des cautions dirigeantes. En effet, les cautions aux engagements disproportionnés, pour espérer voir retenue la responsabilité de la banque créancière devront à l’avenir, rapporter une double preuve : d’une part, que l’établissement de crédit était conscient du caractère irréaliste du projet financé, ou que les chances de remboursement étaient minimes par rapport au chiffre d’affaires escompté ; d’autre part, qu’il leur était impossible de connaître cette réalité. Or, pratiquement, cette double exigence ne pourra jamais être satisfaite pour les cautions dirigeantes930.
123Il ne s’agit pas, cependant, d’un abandon pur et simple de la jurisprudence Macron. Il existe deux possibilités pour la caution de mettre en jeu la responsabilité de l’établissement de crédit selon sa qualité.
124Les cautions non dirigeantes continuent, après l’arrêt Nahoum, de pouvoir bénéficier du principe dégagé par la jurisprudence Macron931, sauf à ce que les juges du fond précisent « en quoi l’intéressé avait exercé au sein de la société des fonctions qui l’auraient privé de la possibilité de mettre en cause la responsabilité de l’établissement de crédit ».
125Le principe n’est donc pas abandonné, mais il est complété par l’exigence d’une double preuve supportée par la caution, qui s’ajoute à celle qui porte sur la disproportion manifeste, lorsque cette dernière présente la qualité de dirigeante.
126271- Réaction de la première Chambre civile. Par un arrêt du 9 juillet 2003932, la première Chambre civile de la Cour de cassation s’est introduite dans le débat sur le principe de proportionnalité.
127En l’espèce, à la suite de la défaillance d’emprunteurs qui s’étaient engagés pour un montant de près de 6 millions de francs, la société prêteuse avait délivré un commandement aux fins de saisie immobilière à la caution solidaire et hypothécaire pour une somme de près de 10 millions de francs. Pour accueillir la demande de la caution, fondée sur la disproportion de son engagement par rapport à son patrimoine et à ses revenus, et condamner le prêteur à lui verser, à titre de dommages et intérêts, une somme correspondant à la créance garantie, l’arrêt attaqué constatait qu’ « au moment où elle s’est engagée, la caution était propriétaire d’un bien immobilier d’une valeur de 600.000 FF et percevait une pension de retraite de 150.000 FF par an ». Il en résultait que la caution bien que disposant d’un patrimoine et de revenus afin de garantir la créance du prêteur ne s’était pas proportionnellement engagée au regard de son patrimoine. Cependant, au visa de l’article 1382 du Code civil, la Cour casse cette décision et reproche aux juges du fond de ne pas avoir fixé le montant du préjudice subi par la caution, lequel ne pouvait être équivalent à la dette entière, mais seulement à la mesure excédant les biens que la caution pouvait proposer en garantie.
128La responsabilité du créancier est donc de nature délictuelle puisque l’arrêt vise l’article 1382 du Code civil933. La prescription applicable est donc la prescription décennale, alors que celle relevant de l’article L. 313-10 du Code de la consommation est une prescription biennale934.
129Il faut approuver ce raisonnement : la faute commise lors de la conclusion du contrat signale un comportement déloyal, qui bien que n’atteignant pas le consentement de la caution (et partant la validité du contrat de cautionnement), est à la source d’un contenu contractuel disproportionné qui va causer le préjudice subi par la caution. En outre, bien que le préjudice découle de la mise en œuvre de la sûreté, il ne s’agit pas de l’inexécution d’une obligation contractuelle préexistante - le contrat de cautionnement est unilatéral - mais d’une faute in contrahendo. La caractérisation de cette faute « corrige donc une disproportion, mais sanctionne un devoir de modération »935, violé lors de la conclusion du cautionnement.
130272- Détermination du préjudice subi par la caution. « Le préjudice, en bonne logique, ne peut provenir que de la fraction excessive des prévisions contractuelles, telle qu ‘imputable à la faute du créancier ». Comme le précise la Cour de cassation, le préjudice « ne pouvait être équivalent à la dette toute entière mais seulement à la mesure excédant les biens que la caution pouvait proposer en garantie »936. Cette dernière précision devrait tarir le contentieux issu de la contestation de décisions des juges du fond plutôt généreux quant à la libération de la caution.
131Demeure la question suivante : à partir de quand le cautionnement est disproportionné ? Le texte nouveau composant l’article L. 341-4 du Code de la consommation exige une disproportion « manifeste », ce qui laisse persister une incertitude. Comment combiner cette forme de proportionnalité avec celle du Code de la consommation ? Cette question invite à terminer notre propos par l’étude du nouveau principe légal de proportionnalité posé par l’article L. 341-4 du Code de la consommation937 dans sa rédaction issue de la loi du 1er août 2003.
132273- La nouvelle proportionnalité légale. Avec ce nouveau texte, la circonvolution est désormais bouclée. Le principe jurisprudentiel de proportionnalité était inspiré de l’article L. 313-10 du Code de la consommation ; les arrêts Macron et Nahoum ont considérablement fait évoluer les conditions de la responsabilité du créancier. Désormais, la loi énonce à l’article L. 341-4 du Code de la consommation un nouveau principe, dont le champ d’application, s’il recouvre le principe dégagé par la jurisprudence, révèle néanmoins certaines insuffisances.
133Le nouveau dispositif rend quasiment caduc l’édifice jurisprudentiel. Ce texte, qui figure le nouveau droit commun en la matière, vise le cautionnement souscrit par une personne physique au bénéfice d’un créancier professionnel, sans considération de ses compétences ou de sa qualité de dirigeant social. Ainsi, si l’engagement d’une caution, personne physique -profane ou non -, envers un créancier professionnel apparaît disproportionné, celle-ci invoquera le dispositif légal, et non la faute génératrice de responsabilité. La caution sera totalement libérée, alors que sous l’empire du droit antérieur à la loi du 1er août 2003, comme le rappelle l’arrêt de la première Chambre civile de la Cour de cassation en date du 9 juillet 2003938, la libération de la caution ne pouvait qu’être partielle.
134On ne conçoit donc d’application du principe jurisprudentiel de proportionnalité que pour les cautionnements consentis à des créanciers non professionnels ou par des personnes morales.
135Le texte révèle d’autres imperfections qui ne manqueront pas de susciter un contentieux nourri. Comment définir un cautionnement « manifestement » disproportionné ?, un créancier « professionnel » ? Comment combiner l’article L. 341-4 du Code de la consommation avec l’article L. 313-10 du même Code939 ? Le principe de proportionnalité n’a assurément pas fini de faire parler de lui quand bien même il a opéré sa révolution et celle des principes gouvernant le contrat de cautionnement.
136274- Conclusion Chapitre I. Le contrat de cautionnement est, par essence, unilatéral. Seule la caution a l’obligation de garantir la dette envers le créancier qui l’appellerait en paiement. Cependant, l’article L. 313-22 du Code monétaire et financier impose au créancier l’obligation d’informer annuellement la caution sur l’étendue de son engagement à peine d’être déchu du droit de percevoir les intérêts de la dette. Par-delà ce texte, la jurisprudence a de surcroît imposé au créancier certains devoirs envers la caution.
137S’agissant de l’obligation d’information tout d’abord, les tribunaux ont eu à résoudre de délicates questions.
138D’une part, il fallait déterminer si cette information devait être délivrée à une catégorie particulière de cautions, dites intégrées. Par un arrêt remarqué1, la Chambre commerciale de la Cour de cassation a refusé, en l’absence de texte le prévoyant, de faire peser sur le créancier l’obligation d’informer les dirigeants-cautions sur l’étendue de leur engagement.
139D’autre part, on s’est demandé si la sanction de la déchéance légale des intérêts pouvait se cumuler avec une sanction sur le fondement du droit commun de la responsabilité civile ? Après quelques hésitations, la jurisprudence décide aujourd’hui2 que l’octroi de dommages et intérêts ne peut être obtenu sur le fondement du droit commun que s’il existe un dol ou une faute extérieure au manquement à l’obligation légale d’information.
140Ensuite, et toujours dans le cadre du contentieux relatif à la mise en œuvre de la responsabilité du créancier, la question s’est posée de savoir quelle voie procédurale devait emprunter la caution pour engager la responsabilité du créancier non diligent. Fort logiquement, il a été jugé que la caution pouvait indifféremment emprunter la voie de la demande reconventionnelle ou celle de la défense au fond pour se prévaloir du fait du créancier.
141Enfin, le créancier s’est vu ajouter l’obligation de veiller à la proportionnalité de l’engagement de la caution sous peine d’être déchu de ses possibilités de recouvrer sa créance. Les arrêts Macron et Nahoum ont construit l’édifice jurisprudentiel qui aujourd’hui se trouve pour partie repris par l’article L. 341-4 du Code de la consommation issu de la loi Dutreil du 1er août 2003.
142S’agissant d’enserrer le comportement du créancier relativement à son obligation d’information, la jurisprudence a été prolixe. Plus largement, le comportement fautif du créancier va inciter la caution à réclamer sa décharge sur le fondement du bénéfice de subrogation de l’article 2037 du Code civil.
Notes de bas de page
792 D’autres textes imposent au créancier une obligation d’information : L’article 47-II de la loi du 11 février 1994, dite loi Madelin, qui a étendu l’obligation d’information annuelle de l’article 48-II avec la sanction de la perte des pénalités ou intérêts de retard échus entre la date du premier incident et la date à laquelle elle a été donnée à tout créancier quel qu’il soit ; l’article 101 de la loi du 29 juillet 1998 relative à l’exclusion intégrée à l’article 2016, alinéa 2 du Code civil prévoit une obligation d’information annuelle au profit de la personne physique qui a consenti un cautionnement indéfini ; les articles L. 313-9 et L. 341-1 du Code de la consommation qui astreignent un établissement de crédit à prévenir la caution du premier incident de paiement non régularisé dans le mois suivant sous peine de déchéance des pénalités et intérêts de retard.
793 Le projet de réforme des sûretés envisage la refonte de cet article en un nouvel article 2307 du Code civil qui précise : « Le créancier professionnel est tenu, avant le 31 mars de chaque année, de faire connaître à toute caution personne physique le montant du principal de la dette et de ses accessoires restant dus au 31 décembre de l’année précédente, sous peine de déchéance des intérêts accessoires échus depuis la date de la précédente information et jusqu’à celle de la communication de la nouvelle information. Dans les rapports entre le créancier et la caution, les paiements effectués pendant cette période sont imputés prioritairement sur le principal de la dette » ; V. :
http://www.justice.gouv.fr/publication/rapport/avantprojetdetexteissudurapportgrimaldi.pdf, art. 2307 v. spéc, Rapport Grimaldi : pour une réforme globale des sûretés, Les sûretés personnelles, par Ph. Simler, Droit et patrimoine, 2005, n° 140, p. 58.
794 Cass, com., 30 novembre 1993 : Bull. civ. IV, n°434 ; Cass. com. 14 décembre 1993 : Bull, civ. IV, n° 467.
795 Cass, com., 23 novembre 2004 : JurisData n° 2004-025861.
796 Cass, com., 30 novembre 1993 : Bull. civ. IV, n° 435 ; Cass. com. 12 décembre 1995 : Bull, civ. IV, n° 457. La solution est, en réalité, davantage liée à la notion de concours financier qui figure comme autre critère du champ d’application de la loi, le contrat de crédit-bail ne constituant pas un concours financier, au sens de la cette loi. V. également, L. Aynès, et P. Crocq, Cours de droit civil, Les sûretés - La publicité foncière, éd., Defrénois, 2004, p. 121, n° 295, note 157, qui indiquent que « cette interprétation stricte est peut-être justifiée par la fusion du capital et des intérêts dans le loyer, et l’impossibilité de faire jouer la sanction de l’article 48 ».
797 CA Toulouse, 6 octobre 1997 : Rev. Droit. Banc, 1998, p. 66.
798 En ce sens, v. CA Paris, 29 avril 1997 : D. Aff., 1997, jur. p. 761 ; RTD civ. 1997, p. 704, obs. P. Crocq.
799 Cass. 1ère civ., 4 février 2003 : Bull. civ. I, n° 34, (solution implicite) ; v. récemment Cass. 1ère civ., 15 mars 2005 : JurisData n° 2005-027566 et n° 2005-027611, pour l’octroi d’un crédit à une société civile immobilière en vue de l’acquisition de biens immobiliers destinés à la location.
800 Cass. 1ère civ., 9 mai 1996 : Bull. civ. I, n° 192.
801 Cass. 1ère civ., 12 mars 2002 : 3 espèces, Bull. civ. I, n° 86.
802 Cass. com., 18 février 1997 : Bull. Joly, 1997, p. 414, note Ph. Delebecque.
803 Dans le premier arrêt, la cour d’appel de Nîmes avait estimé que les dispositions de l’article 48 de la loi du 1er mars 1984 n’étaient pas applicables s’agissant d’un prêt personnel destiné à une activité libérale de portefeuille d’assurances. La Cour de cassation censure l’arrêt au motif que « l’exercice d’une activité économique libérale constitue, au sens du texte susvisé, une entreprise, peu important qu’elle soit en voie de création, la cour d’appel a violé le texte susvisé » ; v. également CA Versailles, 24 mars 2005 : Inédit, n° RG 04/2195, qui applique ce critère à l’exercice de la médecine à titre libéral.
804 Dans le deuxième arrêt, il s’agissait d’un prêt consenti à l’association chrétienne mission internationale. Le pourvoi incident reprochait à la cour d’appel de Bordeaux d’avoir appliqué l’article 48 à une association qui ne pouvait être considérée comme une entreprise. La Cour de cassation a approuvé les juges du fond d’avoir relevé que « l’association avait une activité employant trente-sept personnes », de sorte que « la cour d’appel a constaté le caractère économique de l’activité de l’association et, par là même, a caractérisé l’existence d’une entreprise, peu important qu’il n’y ait pas de recherche de bénéfices ».
805 Dans le dernier arrêt, un établissement de crédit avait consenti à une SCI un prêt destiné à l’acquisition d’un bien immobilier à usage professionnel. Sur les poursuites du créancier, l’une des cautions invoquait le non respect de l’obligation d’information annuelle de la caution. La cour d’appel de Rennes a retenu que « l’obligation d’information s’applique à des prêts consentis à des entreprises ou à des commerçants à l’exclusion des sociétés immobilières ». La Cour de cassation censure au motif qu’en « statuant ainsi, sans relever que la SCI RBK n ‘avait pas une activité économique propre à caractériser une entreprise au sens du texte susvisé, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision » ; v. pour la même analyse Cass. com., 15 février 2005 : JurisData n° 2005-027287.
806 ) L’article L. 313-22 du Code monétaire et financier précise effectivement qu’il s’agit de l’octroi d’« un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement ».
807 M. Cabrillac, et C. Mouly, Droit des sûretés, Litec, 6ème éd., 2002, p. 263, n° 272.
808 J. François, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les sûretés personnelles, Tome VII, Economica, 2004, p. 194, n° 217.
809 En ce sens, J. François, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les sûretés personnelles, Ibid : « Tout concours couvert par le cautionnement devrait logiquement donner lieu à l’information légale, sans autre exigence ».
810 M. Cabrillac, et C. Mouly, Droit des sûretés, Ibid : « Si, par exemple, le cautionnement a été exigé lors de l’ouverture d’un compte courant, mais avant tout découvert, a-t-il été une condition du découvert ? Le compte courant n’est-il pas un concours financier même quand il est créditeur ? Si le cautionnement donné lors de l’ouverture du compte courant est un cautionnement omnibus, est-il vraiment une condition du crédit de campagne octroyé quelques années plus tard ? »
811 M. Cabrillac, et C. Mouly, Droit des sûretés, Ibid.
812 L. Aynès, et P. Crocq, Cours de droit civil, Les sûretés - La publicité foncière, éd., Defrénois, 2004, p. 122, n° 295.
813 Cass, com., 25 mai 1993 : Bull. civ. IV, n° 203. L’obligation d’information de la caution doit s’appliquer « même lorsque le cautionnement a été souscrit par un dirigeant de la société cautionnée en connaissant exactement la situation » ; Cass. 1ère civ., 27 février 1996 : Bull. civ. I, n° 109. L’un des arrêts du 12 mars 2002, relatifs à la notion d’entreprise, rappelle d’ailleurs, à propos de l’association Mission Chrétienne Internationale, que « l’obligation d’information prévue par l’article L. 313-22 du Code monétaire et financier (doit) être respectée, même lorsque le cautionnement a été souscrit par un dirigeant de l’entreprise cautionnée qui en connaissait exactement la situation ».
814 L’article L. 313-22 du Code monétaire et financier précise que les établissements de crédit « sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l’année précédente au titre de l’obligation (cautionnée) ainsi que le terme de cet engagement. Si l’engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée » ; v. récemment Cass. 1ère" que la banque avait respecté l'obligation légale d'information de n° 2005-028959, pour la censure des juges du fond qui ont reconnu que la banque avait respecté l’obligation légale d’information de la caution en l’informant des sommes cautionnées sans constater que cette information portait sur la faculté de révocation de son engagement.
815 Cass, com., 25 mai 1993 : Bull. civ. IV, n° 203 ; Cass, com., 2 novembre 1993 : Bull. civ. IV, n° 370 ; Cass, com., 30 novembre 1993 : Bull. civ. IV, n° 434 ; Cass, com., 17 mai 1994 : Bull, civ. IV, n° 176 ; Cass, com., 9 décembre 1997 : Bull. civ. IV, n° 323 ; Cass, com., 25 avril 2001 : Bull. civ. IV, n° 76.
816 ) Cass. 1ère civ., 30 mars 1994 : Bull. civ. I, n° 123 ; Cass. 1ère civ., 6 novembre 2001 : Bull. civ. I, n° 265 ; Cass. 2ème civ., 23 juin 2005 : JurisData n° 2005-029106.
817 Cass. com., 9 décembre 1997 : Bull. civ. IV, n° 323.
818 En ce sens J François, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les sûretés personnelles, Tome VII, Economica, 2004, p. 195 et 196, n° 218.
819 V. Cass. com., 17 juin 1997, Macron : Defrénois, 1997, art. 36703, p. 1424, obs. L. Aynès ; D. 1998, jur. p. 208, note J. Casey ; RTD civ. 1998, p. 157, obs. P. Crocq ; JCP éd. E 1997, II, 10007, note D. Legeais ; RTD civ. 1998, p. 100, obs. J. Mestre ; JCP éd. G 1998,1, 108, obs. Ph. Simler ; qui précise que « L’information prévue par l’art. 48 L. du 1er mars 1984 constitue un fait juridique qui peut être prouvé par tous moyens et notamment par lettre simple ». V. également Cass. com., 17 octobre 2000 : Bull. civ. IV, n° 154 ; JCP éd. E, 2000, p. 1834, obs. P. Bouteiller, qui précise que « l’information constitue un fait juridique qui peut être prouvé par tous moyens ». Selon cet auteur, « ce n’est que dans le cas d’une créance particulièrement importante pour laquelle la banque ne voudrait prendre aucun risque particulier, que l’information est, le cas échéant, réalisée par le truchement d’une telle (lettre recommandée). A ce titre, il convient de saluer le réalisme de la Chambre commerciale de la Cour de cassation qui [...] laisse aux juges du fond le soin d’apprécier librement dans l’exercice de leur pouvoir souverain d’appréciation les modes de preuves allégués par la banque ».
820 Motifs identiques de Cass. com., 25 novembre 1997 : Bull civ. IV, n° 326 et Cass. com., 17 octobre 2000 : Bull civ. IV, n° 154. V. également, Cass. lèreciv., 2 octobre 2002 : Bull civ. I, n° 225 : « Il incombe seulement à l’établissement de crédit de prouver qu’il a effectivement adressé à la caution l’information requise et non d’établir au surplus que la caution l’a effectivement reçue ».
821 Cass, com., 26 octobre 1999 : RJDA 2000, p. 78, n° 93 ; Cass, com., 26 avril 2000 : Rev. Droit. Banc, et Financier, juillet/août 2000, p. 227. n° 148, obs. D. Legeais ; Cass, com., 26 juin 2001 : JCP éd. G., 2002, II, 10043, note F.-X. Licari.
822 Cass. 1ère civ., 17 novembre 1998 : Bull civ. I, n° 321 : « la cour d’appel a relevé, dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation, que, si les documents produits permettaient d’établir qu’une lettre avait bien été adressée à (la) caution, ils ne démontraient pas que celle-ci contenait les informations exigées par l’article 48 de la loi du 1er mars 1984 ».
823 L’inexécution de l’obligation d’information peut être constituée par l’omission de toutes informations de la caution aussi bien que par une information incomplète, en raison d’une absence de ventilation du principal et des intérêts, de l’absence du terme ou du rappel de la faculté de résiliation ou même toutes autres informations inexactes.
824 Cass com 16 novembre 2004 : JurisData n° 2004-025715, qui précise que l’établissement de crédit est déchu de son droit aux intérêts conventionnels sans pouvoir prétendre y substituer des intérêts au taux légal. 821) Cass, civ., 12 janvier 1857 : D. P. 1857, 1, p. 278 ; Cass. com. 5 novembre 1968 : Bull. civ. IV, n° 306.
825 Cass, civ., 12 janvier 1857 : D. P. 1857, 1, p. 278 ; Cass. com. 5 novembre 1968 : Bull. civ. IV, n°306.
826 Cass. com., 29 janvier 2002 : Bull. civ. IV, n° 21.
827 V. notamment CA Versailles, 11 décembre 1997 : Bull. Joly 1998, p. 218, obs. Ph. Delebecque. Cet arrêt, qui invoque une « obligation de loyauté et de bonne foi » avait trait à l’absence de l’information de la caution portant sur « l’augmentation très importante des sommes avancées au débiteur principal ». V. également, sur l’obligation d’information de la caution par la banque du maintien de l’engagement de la caution nonobstant le changement de gérant et l’engagement de ce dernier en qualité de caution, CA Paris, 23 janvier 1998 : JCP 1999 éd. G. IV, 1089 : la responsabilité d’une banque est engagée pour avoir maintenu l’ancien gérant « en la légitime croyance d’une substitution de caution et (omis) de lui faire connaître clairement qu’elle s’opposait formellement à cette substitution, entendant que sa caution soit maintenue nonobstant l’engagement du nouveau gérant », au motif que, « ce faisant, la banque a manqué d’une part, à son obligation d’information et de conseil, laquelle s’applique tant lors de la conclusion du contrat qu’au cours de son exécution et d’autre part, à son obligation d’exécution loyale du contrat, engageant ainsi sa responsabilité contractuelle sur les fondements des articles 1147 et 1134 du Code civil ».
828 Cass. com., 30 mai 1989 : D. 1989, IR, p. 188
829 A. Lienhard, obs. sous. Cass. com., 29 janvier 2002 : D. Aff. 2002, p. 716.
830 L. Aynès, note sous Cass. com., 3 novembre 1988 : D. 1989, jur. p. 185.
831 A. Lienhard, obs. sous. Cass. com., 29 janvier 2002 : eod. op.
832 D. Mazeaud, Loyauté, solidarité, fraternité, la nouvelle devise contractuelle ?, Mélanges en hommage à François Terré, L’avenir du droit, Dalloz, PUF, 1999, p. 603.v
833 A. Lienhard, obs. sous. Cass, com., 29 janvier 2002 : D. Aff. 2002, p. 716, v. spec. p. 717.
834 J.-L. Aubert, Répertoire Civil Dalloz, 1994, V° Novation, n° 46 et 47.
835 Argument de F. Boucard, Les obligations d’information et de conseil du banquier, PUAM, 2002, n° 417, rapporté puis critiqué par P. Crocq, obs. sous Cass, com., 29 janvier 2002 : RTD civ. 2003, p. 124 et 125, n° 2
836 Il est à noter que le visa de l’article 1382 du Code civil n’est pas en conformité avec la solution qui prend visiblement parti pour la responsabilité contractuelle.
837 Pour l’étude d’ensemble de ce devoir, v. P. Jourdain, Le devoir de se renseigner (Contribution à l’étude de l’obligation de renseignement), D. 1983, chron. p. 139.
838 J. François, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les sûretés personnelles, Tome VII, Economica, 2004, p. 192, n° 215.
839 Cass, com., 29 janvier 2001 : Rev. Droit banc, et Financier, mars/avril 2002, p. 72, n° 52, obs. D. Legeais, v. spec. p. 73. L’auteur cite dans le prolongement de son explication un arrêt rendu par la première Chambre civile de la Cour de cassation en date du 15 janvier 2002 ayant approuvé une cour d’appel d’avoir retenu « qu’en sa qualité de conseil, le conseiller juridique était débiteur à l’égard de ses clients d’une obligation de se renseigner sur cet engagement afin d’assurer, peu important qu’il n’eût pas participé à la rédaction de l’acte de cautionnement, l’efficacité de l’acte de cession et de la substitution des cautions ».
840 D. Legeais, note sous Cass. com., 20 octobre 1992 : JCP éd. E., 1993, II, 390, p. 23, v. spéc. p. 24.
841 J. François, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les sûretés personnelles, Tome VII, Economica, 2004, p. 200, n° 222.
842 D. Legeais, note sous Cass. com., 20 octobre 1992 : op. et loc. cit.
843 Ph. Simler, Éditions du Juris-Classeur Civil 2000, Cautionnement, Effets, Rapport entre créancier et caution : règles communes à tout cautionnement : Fasc. 40, n° 30, p. 15 et 16 : « Une réponse négative (à la question de l’exclusivité de la sanction légale) s’est imposée, en particulier parce que la déchéance des intérêts est apparue inapte à sanctionner efficacement le non rappel de faculté de résiliation dans l’hypothèse du cautionnement à durée indéterminée. [...] Il se peut [...] que le défaut de rappel de la faculté de résiliation n ‘ait causé aucun préjudice à la caution, suivant l’appréciation des juges, notamment si, en raison de sa qualité de dirigeant ou d’associé principal de la société débitrice, elle n’était pas, en fait, en situation de pouvoir résilier, sauf à provoquer la rupture du concours financier ».
844 En réalité, il paraît hasardeux d’assimiler le dispositif de l’article 48 à celui d’une clause pénale. Comme le remarque V. Brémond, note sous Cass. 1ère civ., 25 avril 2001 : Defrénois 2001, art. 37439, p. 1407, v. spéc. p. 1413, n° 8, « d’une part, la notion de clause pénale s’accommode mal du caractère légal peu propice à l’adaptation de la clause aux circonstances propres à chaque contrat et aux différents contractants ; d’autre part, si le caractère comminatoire est de l’essence de la clause pénale, force est de constater que ce caractère ne développe pas toujours ses effets dans le cadre de l’application de l’article 48 puisque, comme il a été relevé, la sanction prévue par ce dernier texte est parfois tout simplement inapplicable ».
845 En ce sens, Cass. civ. 3ème, 12 janvier 1994 : Bull. civ. III, n° 5. Cette particularité fait ainsi dire à F. Pollaud-Dullian, De quelques avatars de la responsabilité civile en droit des affaires, RTD com. 1997, p. 349, v. spéc. p. 372, que la sanction dont il s’agit ne « procède pas de la responsabilité civile, car elle n’a pas de nature indemnitaire ».
846 Cass. com., 20 octobre 1992 : Bull. civ. IV, n° 148.
847 D. Legeais, note sous Cass. com., 20 octobre 1992 : JCP éd. E., 1993, II, 390, p. 23, v. spéc. p. 24.
848 Dans cette perspective, la caution devra prouver que, si elle avait été informée, elle aurait bien obtenu la résiliation de son engagement, faculté qui peut parfois être entravée en fait. De plus, s’agissant d’une perte de chance, le montant du préjudice devra être calculé en tenant compte de l’accroissement du passif intervenu depuis la dernière information reçue par la caution. V. ainsi, rejetant la demande en responsabilité formée par la caution ne justifiant d’aucun préjudice réparable, Cass. 1ère civ., 16 janvier 2001 : Bull. civ. I, n° 3.
849 Le caractère majeur de ce revirement s’induit de ce qu’il était loisible à la Chambre commerciale de se placer sur un terrain plus neutre, n’impliquant pas un revirement de jurisprudence, pour justifier la cassation de l’arrêt d’appel. La Cour d’appel avait en effet débouté la banque de sa demande d’exécution envers la caution en se fondant sur l’omission des informations prévues par l’article 48. Or, la jurisprudence a, plusieurs fois, rappelé que « le défaut d’accomplissement de la formalité prévue par le second de ces textes (l’article 48) [...] n’a pas pour effet de décharger la caution de son obligation de payer les autres sommes dues en vertu du cautionnement ». V. en ce sens, notamment, Cass. 1ère civ., 31 mars 1998 : Bull. civ. I, n° 134 et Cass. 1ère civ., 17 novembre 1998 : Bull. civ. I, n° 321. Il faut préciser qu’en l’espèce, la question de l’application éventuelle de la responsabilité civile de droit commun n’était pas posée. En ce sens, V. Avena-Robardet, note sous Cass. 1ère civ., 25 avril 2001 : D. Aff.2001,p. 1795, et V. Brémond, note sous Cass. 1ère civ., 25 avril 2001 : Defrénois 2001, art. 37439, p. 1407, v. spéc. p. 1413, n° 8.
850 Ph. Théry, note sous Cass. civ., 25 avril 2001 : Defrénois 2002, art. 37591, p. 1086, v. spéc. p. 1087. V. également V. Avena-Robardet, note sous Cass. 1ère civ., 25 avril 2001 : eod.op., qui note que « le coût financier pour l’établissement est, au demeurant, assez important puisque la déchéance des intérêts s’étale généralement sur deux ans au minimum ».
851 Ph. Théry, note sous Cass. 1ère civ., 25 avril 2001, eod.op.
852 Dont il semble qu’elle soit, en jurisprudence préférée dans les cas où le dol est invoqué pour tenir en échec une limitation conventionnelle, ou parfois légale de responsabilité civile. En ce sens G. Viney, et P. Jourdain, Traité de droit civil sous la direction de Jacques Ghestin, Les conditions de la responsabilité, LGDJ, 2ème éd., 1998, p. 583 et s, n° 618 et s.
853 Conception souple procédant du célèbre arrêt, v. Cass. 1ère civ., 4 février 1969, Société des comédiens français : D. 1969, jur., p. 601, note J. Mazeaud.
854 V. Brémond, note sous Cass. 1ère civ., 25 avril 2001 : Defrénois 2001, art. 37439, p. 1407, v. spéc. p. 1415 et 1416, n° 15 ; J. François, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les sûretés personnelles, Tome VII, Economica, 2004, p. 201, n° 222.
855 Cass. com., 20 octobre 1992 : Bull. civ. IV, n° 148.
856 V. Brémond, note sous Cass. 1ère civ., 25 avril 2001 : Ibid.
857 V. Brémond, note sous Cass. 1ère civ., 25 avril 2001 : Ibid, v. spéc. p. 1414, n° 12. A noter également, le parallèle établi par l’auteur avec l’obligation qui pèse sur le créancier de conserver l’effectivité du recours subrogatoire de la caution en vertu de l’article 2037 du Code civil : à l’époque où cette disposition n’était pas d’ordre public, la clause de renonciation par la caution au bénéfice de subrogation était de style, mais la jurisprudence admettait qu’elle soit écartée en établissant une faute lourde à la charge du créancier cautionné. Or, la jurisprudence refusait que cette faute lourde soit établie par l’inexécution pure et simple de l’obligation qui découle de l’article 2037 du Code civil !
858 V Bremond note sous Cass 1ère civ, 25 avril 2001 : op. cit., v. spéc. p. 1416, n° 16 ajoute de manière convaincante que « si cela devait se révéler incompatible avec les critères habituellement retenus en matière de faute lourde, il faudrait alors songer à n’ouvrir le recours subsidiaire à la responsabilité de droit commun qu’en cas de dol, tel qu’il est interprété par la jurisprudence dégagée par l’arrêt du 4 février 1969, c’est-à-dire, lorsque de propos délibéré, (le débiteur) se refuse à exécuter ses obligations contractuelles, même si ce refus n’est pas dicté par l’intention de nuire à son contractant ». L’opinion de l’auteur revient à proposer de préciser la solution nouvelle par l’abandon de la réserve de la faute lourde.
859 Ph. Théry, note sous Cass. 1ère civ., 25 avril 2001 : Defrénois 2002, art. 37591, p. 1086.
860 V. Avena-Robardet, note sous Cass. 1ère civ., 25 avril 2001 : D. Aff. 2001, p. 1795.
861 V. Brémond, note sous Cass. civ 1ère. 25 avril 2001 : Defrenois 2001, art. 37439, p. 1407, V. plus généralement, M.-N., Jobard-Bachéllier et V. Brémond, De l’utilité du droit de la responsabilité pour assurer l’équilibre des intérêts des contractants, RTD com. 1999, p. 327.
862 V. Brémond, note sous Cass. civ. 1ère, 25 avril 2001 : op. cit, p. 1407, v. spéc. p. 1411, n° 5.
863 En 1804, le Code civil a rompu avec le système de gradation des fautes, une faute même légère suffisant à engager la responsabilité de celui qui l’a commise, à supposer un préjudice et un lien de causalité.
864 V. Brémond, note sous Cass. civ. 1ère, 25 avril 2001 : eod. op. V. également D. Legeais, Obligation d’information annuelle de la caution : contenu de l’obligation et sanction de son non-respect, JCP éd. E, 2001, II, p. 1276, v. spéc. n° 14 : « De l’assimilation opérée entre le dol et la faute lourde, il est cependant peut-être possible de déduire l’analyse retenue par la Cour de cassation de l’ex-article 48. Il s’agit d’un texte limitant la responsabilité encourue par le créancier ».
865 A noter que le fait de rattacher le mécanisme de l’article 48 à celui d’une clause limitative de responsabilité civile pousse V. Brémond, note sous Cass. civ. 1ère, 25 avril 2001 : eod. op., à considérer qu’il « paraîtrait plus logique que l’absence de préjudice subi par la caution fasse obstacle au prononcé de la déchéance des intérêts prévue par l’article 48, puisque toutes les conditions de la responsabilité de l’établissement de crédit, dont ce texte n’opère qu’une limitation, ne seraient pas réunies ».
866 L. Aynès, obs sous Cass. com., 11 juin 2002 : D. Aff. 2002, som. com., p. 3333 et s., « Cette solution est raisonnable et ne jure pas avec la qualification légale de déchéance. A l’instar d’une clause pénale, celle-ci a une double nature, réparatrice et comminatoire. Sous le premier aspect, la privation du droit aux intérêts que subit le créancier constitue un forfait de réparation, dispensant et empêchant la caution d’établir la réalité et l’étendue de son préjudice. Nul ne saura si ce forfait bénéficie à la caution ou à l’établissement de crédit. Mais conformément au droit commun, le débiteur de l’obligation inexécutée ne peut en bénéficier, s’il a eu l’intention de causer le préjudice (faute dolosive), à laquelle est assimilée traditionnellement la faute lourde ».
867 P. Crocq, obs. sous Cass. com., 25 avril 2001 : RTD civ. 2001, p. 922, n° 2, v. spéc. p. 924.
868 Cass. 1ère civ., 6 novembre 2001 : Bull. civ. I, n° 264.
869 En ce sens, N. Rontchevsky, obs. sous Cass. 1ère civ., 6 novembre 2001 : Banque et droit, janvier-février 2002, p. 38 ; M. Cabrillac, obs. sous Cass. 1ère civ., 6 novembre 2001 : RTD com. 2002, p. 143, n° 13 ; L. Aynès, obs sous Cass. com., 11 juin 2002 : op. cit, p. 3333, qui sans nuances énonce que la première Chambre civile, par cet arrêt statuait « dans le même sens ».
870 En ce sens, V. Brémond, note sous Cass. 1ère civ., 6 novembre 2001 : Defrénois 2002, art. 37527, p. 540, v. spéc. p. 541 : « Faut-il au contraire, comprendre que l’omission de l’information, quelles que soient les circonstances y ayant conduit, ne peut constituer une faute susceptible d’engager la responsabilité de droit commun de la banque, seul un comportement indépendant ou extérieur à l’inexécution de l’obligation légale d’information autorisant la mise en cause de la responsabilité civile de la banque ? C ‘est, à notre avis, l’interprétation la plus probable ». V. également, D. Legeais, note sous Cass. 1ère civ., 6 novembre 2001 : JCP éd. E. 2002,1, 679, p. 718, v. spéc. p. 719 : « La position de la première Chambre civile lui évite par là même d’avoir à prendre des partis délicats. Elle doit donc être préférée car elle a le mérite de la cohérence et de la simplicité. Elle est également de nature à mettre fin à tout contentieux sur ce point ce qui est un avantage non négligeable de la solution. [...] Il apparaît ainsi que la première Chambre civile, par une technique différente de celle utilisée par la Chambre commerciale, en arrive à énoncer une solution qui préserve tout autant les intérêts de la caution. Simplement la première Chambre civile exige la preuve d’une faute principale plus grave commise par le créancier alors que la Chambre commerciale tente de déceler des degrés dans la faute résultant de l’omission d’information ». Pour l’auteur, l’omission jouera comme « facteur d’aggravation des conséquences d’autre manquement », situé au stade de la conclusion (manquement au devoir de contracter de bonne foi, d’information et de conseil) du cautionnement, ou de la poursuite de la caution (poursuite tardive).
871 Cass. 1ère civ., 10 décembre 2002 : JurisData n° 2002-016776.
872 Cass. 1ère civ., 4 février 2003 : Bull. civ. I, n° 35.
873 Cass, com., 16 mars 1993 : Bull. civ. IV, n° 102.
874 Sur lequel V. D. Grimaud, Le caractère accessoire du cautionnement, Thèse PUAM 2001, Préface D. Legeais, p. 142, n° 134, pour qui le principe de l’extinction réflexe est issu de la théorie de l’accessoire.
875 Ainsi Cass, com., 7 janvier 1992 : Bull. civ. IV, n° l ; RTD civ. 1993, p. 624, obs. M. Bandrac. V. également D. Grimaud, Le caractère accessoire du cautionnement, thèse, PUAM 2001, Préface D. Legeais, p. 142, n° 134 : « En dépit de la référence faite à l’article 2036, la qualification d’exception inhérente à la dette n’est ici que d’un faible secours. La faute du créancier, que la Cour de cassation refuse par ailleurs de traiter comme un moyen de défense au fond, ne saurait être a fortiori érigée en exception inhérente à la dette. [...]. De là à conclure péremptoirement que la théorie de l’accessoire est en soi suffisante pour habiliter la caution dans l’exercice des droits et actions du débiteur, notamment dans celui des actions en réparation d’un dommage, il n’y a qu’un pas ; il est aisé à franchir. Nombreux sont les auteurs qui se satisfont de cette explication lapidaire. C’est une nouvelle manifestation de l’effet d’hyperbole qui s’attache au dogme de l’accessoire ».
876 J. François, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les obligations, Régime général, Tome IV, Economica, 1ère éd., 2000, p. 69, n° 80.
877 J. François, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les obligations, Régime général, eod. op.
878 Cass. 1ère civ., 30 juin 1993 : Bull. civ. I, n° 235.
879 Cass. 1ère civ., 30 juin 1993 : op. cit.
880 S. Guinchard, Le droit a-t-il encore un avenir à la Cour de cassation ? Qui cassera les arrêts de la Cour de cassation ?, in L’avenir du droit, Mélanges offerts à François Terré, p. 764 et s.
881 S. Guinchard, Le droit a-t-il encore un avenir à la Cour de cassation ? Qui cassera les arrêts de la Cour de cassation ?, op. cit., v. spéc, p. 765.
882 S. Guinchard, Le droit a-t-il encore un avenir à la Cour de cassation ? Qui cassera les arrêts de la Cour de cassation ?, in L’avenir du droit, Mélanges offerts à François Terré, v. spéc. p. 765.
883 J. François, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les sûretés personnelles, Tome VII, Economica, 2004, p. 332, n°394.
884 Perte de chance de ne pas être inquiétée par la banque, de payer moins ou de disposer d’un recours efficace contre le débiteur principal.
885 Particulièrement nets, à cet égard, sont les développements consacrés par J. François, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les sûretés personnelles, op. cit., v. spec. p. 328 et 329, n° 389 et s. à ces questions. Ainsi, si cet auteur énonce bien qu’en « cas de rupture abusive de crédit, la banque engage originairement sa responsabilité envers le débiteur lui-même », la caution subissant alors « un préjudice réfléchi, c’est-à-dire, par ricochet », il indique clairement, à propos de l’octroi abusif de crédit, qu’il « semble que la jurisprudence s’écarte de cette logique [accessoiriste] : elle se désintéresse apparemment de la relation du créancier avec le débiteur principal pour apprécier directement les conditions de la responsabilité de la banque dans ses rapports avec la caution ». Ces observations débouchent alors sur une analyse explicite aux termes de laquelle, « il n’est pas impossible de rattacher la faute commise par le banquier au contrat de cautionnement. Celui-ci doit être exécuté de bonne foi, ce qui impose que le créancier ne compromette pas les intérêts de la caution. En octroyant inconsidérément du crédit au débiteur ou en le révoquant intempestivement, l’établissement de crédit manque à cette obligation. Dans cette optique, la responsabilité du banquier envers la caution doit être considérée comme contractuelle ». L’analyse est d’ailleurs corroborée par les nouveaux devoirs du créancier qui émergent en jurisprudence - obligation de minimiser le poids de la dette : Cass. 1ère civ., 16 juillet 1998 : JCP éd. G. 1999, II, 10000, note B. Fages, violation d’une obligation d’information : Cass. com., 24 juin 2003 : D. 2003, AJ., p. 2308, et ont trait directement aux rapports créancier-caution, sans détours par la relation principale. Logiquement, en réponse à ceux qui considèrent, que derrière les apparences, la caution ne profite d’une diminution de la dette que par voie accessoire, et que par conséquent, puisqu’il s’agit quasi-systématiquement d’un préjudice réfléchi, il n’y a de risque d’enrichissement par la voie des recours en remboursement de la caution, un auteur oppose que « dans la plupart des hypothèses précédemment recensées, sinon leur totalité, le préjudice dont elle se plaint est direct et non pas réfléchi ». En ce sens v. J. François, Droit civil, Les sûretés personnelles, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les sûretés personnelles, Tome VII, Economica, 2004, v. spéc, p. 332, n° 394.
886 M.-N., Jobard-Bachéllier, note sous Cass, com., 26 octobre 1999 : D. 2000, som. com. p. 340 et s., in fine.
887 Ph. Simler, Cautionnement et garanties autonomes, 3ème éd., 2000, Litec, p. 421, n° 454.
888 S. Guinchard, Le droit a-t-il encore un avenir à la Cour de cassation ? Qui cassera les arrêts de la Cour de cassation ?, in L’avenir du droit, Mélanges offerts à François Terré, p. 764, v. spéc. p. 765, qui précise : « Or, si compensation il y a ici c’est une compensation qui remplit toutes les conditions de la compensation légale ».
889 C’est précisément l’extension des causes de décharge directe que critique M.-N. Jobard-Bachéllier, note sous Cass, com., 26 octobre 1999 : D. 2000, som. com. p. 340 et s., in fine pour laquelle il est difficile de concevoir une décharge directe par voie de compensation légale et surtout par recours à une réparation en nature de son préjudice en raison « du défaut d’explication satisfaisante de l’admission d’une simple défense au fond ». En effet, selon cet auteur, cela aboutirait, par intrusion dans le contrat unilatéral de cautionnement, d’une « forme de réciprocité immédiate », et ainsi à faire disparaître « les causes limitées d’extinction par voie principale de la dette de la caution [...] et ce par l’absorption du droit propre au cautionnement par le droit commun des contrats ; il n ‘est pas certain que l’on doive s’en féliciter ».
890 Cass, com., 26 octobre 1999 : Bull. civ. IV, n° 182.
891 La solution a été réitérée par la suite par la même chambre, v. Cass, com., 26 avril 2000 : Bull. civ. IV, n° 80, et adoptée par la première Chambre civile : Cass. 1 civ., 4 octobre 2000 : Bull. civ. I, n° 233, à propos d’une caution réelle.
892 S. Guinchard, Le droit a-t-il encore un avenir à la Cour de cassation ? Qui cassera les arrêts de la Cour de cassation ?, in L’avenir du droit, Mélanges offerts à François Terré, p. 764 : « En premier lieu, la sanction de l’irrecevabilité est lourde de conséquences pour la caution qui devra engager un second procès, sanction d’autant plus inadmissible qu’on aurait dû régler l’ensemble de l’affaire dès le premier procès, puisqu’il s’agit bien d’un seul et même litige dans une même instance et non pas de deux litiges distincts dont l’un, la demande en dommages-intérêts de la caution, ne serait admis qu’à titre dérogatoire, dans le cadre des conditions de recevabilité exigées des demandes reconventionnelles (art. 70 NCPC), en raison du lien suffisant qu’il pourrait entretenir avec la prétention originaire ».
893 Ph. Simler, Cautionnement et garanties autonomes, 3ème éd., 2000, Litec, p. 421, n° 454.
894 Ph. Simler, Cautionnement et garanties autonomes, 3ème éd., 2000, Litec, p. 421, n° 454.
895 J. François, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les sûretés personnelles, Tome VII, Economica, 2004, p. 334, n° 395.
896 Cass, com., 26 octobre 1999 : Bull. civ. IV, n° 182.
897 J. François, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les sûretés personnelles, eod. op.
898 Article L. 313-22 du Code monétaire et financier ; articles L. 341-4 et L. 313-10 du Code de la consommation relatifs au cautionnement disproportionné et article 2037 du Code civil relatif au bénéfice de subrogation.
899 D. Legeais, note sous Cass, com., 26 octobre 1999 : JCP éd. G. 2000, II, 10262.
900 J. François, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les sûretés personnelles, Ibid.
901 Cass. Ch. mixte, 21 février 2003 : Bull. ch. mixte, n° 3 ; RTD com. 2003, n° 2, Chron. p. 353, n° 15, obs. D. Legeais.
902 N. Molfessis, Le principe de proportionnalité en matière de garanties, Banque et droit, mai-juin 2000, p. 4 et s. : « Parmi les notions qui sont dans l’air du temps, la proportionnalité occupe une place de choix. Elle renvoie à une règle générale d’équilibre, une exigence d’adéquation bien imprécise entre deux termes qui varient au gré des applications du principe. [...] Jusqu’alors, une telle exigence était en effet restée hors des relations de droit privé, à quelques exceptions près, qui pouvaient apparaître comme dérogatoires - que l’on songe ainsi à la sanction de la lésion en matière de contrat. Toutefois, depuis quelques années, la tendance s’inverse, pour laisser place en maints domaines à l’essor d’un principe de proportionnalité, le plus souvent non formalisé mais bien présent aux côtés - ou à travers - ses bras armés : la bonne foi, l’exigence de loyauté voire de fraternité, la sanction des abus ou des excès, l’exigence de raisonnable. Perçue ainsi de manière bien imprécise, l’exigence de proportionnalité gagne en effet des terrains aussi nouveaux que multiples [...] ainsi au stade de la formation du contrat [...]. L’exigence de proportionnalité se dresse alors à l’encontre de la liberté contractuelle, justifiant le contrôle du contenu de l’acte et de ses stipulations. Dans l’application du contrat, l’idée vient également tempérer la souveraineté des parties. L’exigence de proportionnalité justifie en effet l’intrusion croissante du juge dans le rapport contractuel et la révision du contrat qui s’ensuit [...]. Et la liste pourrait être allongée, qui est faite d’illustrations ayant en commun de battre en brèche le principe de la force obligatoire des contrats au nom d’une conception utilitariste et objective de l’acte juridique. Par son empire, la proportionnalité modifie la conception du contrat, en véhiculant une approche moderne de la justice contractuelle, dominée par une recherche d’un équilibre objectif entre les droits et les obligations des parties [...]. Parce qu’au fond le droit des sûretés est une application du droit des contrats, un droit spécial des contrats appliqué à la matière du crédit, on doit s’attendre à ce qu’un même mouvement vienne l’irriguer et en modifier les contours ».
903 V. en ce sens J. François, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les sûretés personnelles, Tome VII, Economica, 2004, p. 122, n° 143. C’est pourquoi il appartient au seul créancier de se prévaloir d’une insuffisance patrimoniale de la caution. V. en ce sens Cass. 1ère civ., 7 juin 1988 : Bull. civ. I, n° 173.
904 Cass. 1ère civ., 17 juillet 1996 : Rev. Droit. Banc, 1996, p. 205, obs. M. Contamine-Raynaud.
905 L’âge, la maladie, l’illettrisme...
906 Cet article précise qu’« Un établissement de crédit ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement d’une opération de crédit, [...] conclu par une personne physique, dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ».
907 Le fait que le nouvel art. L. 313-10 ait été introduit par la loi Neiertz du 31 décembre 1989 ayant mis en place le premier dispositif de traitement des situations de surendettement en atteste.
908 M.-H. De Laender, L’exigence de proportionnalité, Rev. Droit. Banc, 2003, p. 259 et s.
909 J François, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les sûretés personnelles, Tome VII, Economica, 2004, p. 124, n° 144.
910 J. François, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les sûretés personnelles, eod ;op
911 . François, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les sûretés personnelles, op. et loc. cit.
912 Cass, com., 17 juin 1997 : Defrénois 1997, p. 1425, obs. L. Aynès ; D. 1998, jur. p. 208,note J. Casey ; RTD civ. 1997, p. 157, obs. P. Crocq.
913 N. Molfessis, Le principe de proportionnalité en matière de garanties, Banque et droit, maijuin2000, p. 4 et s.
914 M.-N. Jobard-Bachéllier et V. Brémond, De l’utilité du droit de la responsabilité pour assurer l’équilibre des intérêts des contractants, RTD com. 1999, p. 327, v. spéc. p. 329 : « En matière de cautionnement un exemple récent évident d’attraction du droit de la consommation sur le droit commun est celui de l’article L. 313-10 du Code de la consommation relatif aux cautionnements manifestement excessifs qui a, en effet, indiscutablement inspiré la décision immédiatement très remarquée de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 17 juin1997 ».
915 Et non pas comme dans un arrêt surprenant dans lequel la mauvaise foi est considérée comme une cause autonome de nullité : Cass. 1ère civ., 16 mai 1995 : JCP 1996, II, 22736, p. 465, note F.-X. Lucas.
916 V. J. Casey, note sous Cass. com., 17 juin 1997 : D. 1998, jur. p. 208, qui note qu’un « des aspects les plus intéressants de cette décision est certainement l’emploi gui est fait de la mauvaise foi constatée. Celle-ci, contrairement aux décisions précédemment évoquées, n’a pas servi à démontrer l’existence d’un vice du consentement, mais au contraire à caractériser une faute du créancier de nature à engager sa responsabilité [...] Le fait qu’il n’existe pas de vice du consentement écarte logiquement toute possibilité d’annulation de l’engagement, et prouve donc que la caution ne s’est pas trompée, pas plus qu’elle n’a été trompée. Toutefois, cela ne prouve pas pour autant de façon automatique, et c’est là que réside la nouveauté, que le créancier s’est comporté de manière loyale ».
917 J. Casey, note sous Cass. com., 17 juin 1997 : D. 1998, jur. p. 208. L’auteur manifeste sa préférence pour la responsabilité délictuelle et ajoute un argument par analogie : « On sait que lorsque l’action en nullité pour dol est prescrite, une action en responsabilité délictuelle reste possible. L’impossibilité d’annuler le contrat n’affecte pas la faute de l’auteur du dol, qui reste délictuelle car antérieure à la convention. La situation qui nous occupe n’est pas très différente. L’existence du contrat n ‘altère pas l’antériorité de la faute qui ne peut donc être qu’une faute précontractuelle ».
918 M.-N. Jobard-Bachéllier et V. Brémond, De l’utilité du droit de la responsabilité pour assurer l’équilibre des intérêts des contractants, eod.op.
919 M.-N. Jobard-Bachéllier et V. Brémond, De l’utilité du droit de la responsabilité pour assurer l’équilibre des intérêts des contractants, eod. op. : « C’est pourquoi, il nous paraît nécessaire de repenser la matière et de proposer l’élaboration d’une règle unique en matière de cautionnements excessifs qui serait inscrite directement dans le Code civil. Serait ajouté à l’article 2013 du Code civil, [...] un alinéa 4 permettant à toute caution, au moins toute caution personne physique, de se prévaloir du caractère disproportionné du cautionnement consenti, pour obtenir la déchéance des droits du créancier [...] La déchéance pour cautionnement disproportionné pourrait être totale ou seulement partielle, la garantie due étant rapportée aux facultés pécuniaires de la caution appréciées, en principe, au jour où l’engagement a été pris ».
920 P. Crocq, obs. sous Cass. com., 17 juin 1997 : RTD civ. 1997, p. 157.
921 L. Aynès, obs. sous Cass. com., 17 juin 1997 : Defrénois 1997, p. 1425. V. également, L. Aynès, et P. Crocq, Cours de droit civil, Les sûretés - La publicité foncière, éd., Defrénois, 2004, p. 120 et 121, n° 294 : « En tout cas, la mauvaise foi ne devrait être retenue qu’en présence d’une véritable déloyauté, s’ajoutant à l’excès ».
922 CA Paris, 27 novembre 1998 : JCP 1999, I, 116, n° 6, obs. Ph. Simler ; JCP 1999, éd. G. II, 10092, note J. Casey, qui a accordé à la caution des dommages et intérêts d’un montant égal à celui de son engagement. V. aussi, CA Paris, 27 juin 2000 : D. 2001, p. 1382, note F.-X. Grignon-Derenne, qui a annulé le contrat de cautionnement !
923 Cass. Com., 9 juillet 2003 : Bull. civ. I, n° 167 : « En statuant ainsi, sans fixer le montant du préjudice subi par Mme Rivière, lequel ne pouvait être équivalent à la dette toute entière mais seulement à la mesure excédant les biens que la caution pouvait proposer en garantie, la cour d’appel a violé le texte susvisé [art. 1382 C. civ.] ».
924 J. François, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les sûretés personnelles, Tome VII, Economica, 2004, p. 126 et 127, n° 146.
925 P. Crocq, obs. sous Cass. com., 17 juin 1997 : RTD civ. 1997, p. 157, qui précise : « Une troisième interprétation, intermédiaire, peut aussi être envisagée : elle consiste à analyser l’arrêt comme faisant du critère mathématique de la disproportion manifeste le seul critère de la faute commise par la banque tout en considérant que, par la mention des circonstances de fait, exclusives de toute bonne foi de la part de la banque, la Cour de cassation a souhaité rappeler que la banque conservait la possibilité de s’exonérer de sa responsabilité par la preuve d’une ignorance légitime de la situation économique réelle de la caution ».
926 J. Casey, note sous Cass. com., 17 juin 1997 : D. 1998, jur. p. 208.
927 Cass. com., 8 octobre 2002 : JCP éd. E 2002, p. 1730, note D. Legeais ; JCP éd. G 2002, II, 10017, note Y. Picod ; D. 2003, jur. p. 414, note C. Koering ; RTD civ. 2003, p. 124, obs. P. Crocq ; Defrenois, 2003, p. 456, obs. Ph. Théry.
928 J. François, Droit civil, sous la direction de C. Larroumet, Les sûretés personnelles, Tome VII, Economica, 2004, p. 128, n° 147.
929 D. Legeais, obs. sous Cass. Corn., 8 octobre 2002 : JCP 2002, éd. E, I, 1730, p. 1920.
930 D. Legeais, obs. sous Cass. Corn., 8 octobre 2002 : op. cit., v. spéc. p. 1922, qui précise : « Lorsque la caution est dirigeante ou plus généralement avertie, il lui devient quasi impossible d’envisager une action en responsabilité. Tel est le cas lorsqu’elle est spécialiste de l’activité pour laquelle elle sollicite un financement en tant que dirigeant. La situation est différente si le dirigeant est en réalité un total néophyte ou s’il envisage un financement sans un secteur d’activité qui est nouveau pour lui » ; v. en ce sens Cass. 1ère civ., 11 janvier 2005 : Juris Data n° 2005-026463 ; Cass. com., 15 février 2005 : JurisData n° 2005-027287.
931 Ce que sont venus confirmer des arrêts ultérieurs. V. Cass. com., 11 juin 2003 : Banque et droit, juillet-août 2003, p. 61, obs. F. Jacob ; Cass. com., 25 mars 2003 : JurisData n° 2003-018688 : « En se déterminant ainsi (condamnation des cautions) sans préciser si la caution avait exercé, au sein de la SCI, des fonctions qui I auraient privée de la possibilité de mettre en cause la responsabilité de l’établissement de crédit à défaut d’établir que la banque aurait eu des informations qu’elle-même aurait ignorées sur ses revenus, son patrimoine et ses facultés de remboursement raisonnablement prévisibles en l’état du succès escompté de l’opération immobilière entreprise par la société, et sans rechercher si la banque n ‘avait pas commis une faute en faisant souscrire à la caution, dans des circonstances de fait exclusives de toute bonne foi, un engagement manifestement disproportionné à ses revenus et son patrimoine, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du Code civil ». Il est à noter que ce dernier visa semble indiquer la préférence de la Chambre commerciale pour la responsabilité contractuelle.
932 Cass. 1ère civ., 9 juillet 2003 : JCP éd. G 2003, II, 10167, p. 1879, note J. Casey ; D. Aff. 2004, chron., p. 204, note Y. Picod.
933 V (dernièrement sur ce fondement Cass. 1ère civ., 10 mai 2005 : JurisData n° 2005-028323, pour la responsabilité de la banque qui a « accepté (d’une caution profane) la garantie du remboursement d’un [...] crédit sans s’assurer de sa capacité financière à faire face aux engagements du débiteur en cas de défaillance de ce dernier » ; Cass. com., 18 mai 2005 : JurisData n° 2005-028473, pour la cassation des juges du fond qui ont condamné la caution « sans rechercher [...] si, alors (que la caution) faisait valoir que, mère au foyer, elle n’exerçait aucune activité et ne disposait d’aucun patrimoine, l’engagement litigieux n’était pas manifestement disproportionné à sa situation financière ».
934 En ce sens, Cass. 1ère civ., 24 novembre 1987 : Bull. civ. I, n° 307.
935 J. Casey, note sous Cass. 1ère civ., 9 juillet 2003 : JCP éd. G 2003, II, 10167, p. 1879.
936 Cass. 1ère civ., 9 juillet 2003 : JCP éd. G 2003, II, 10167, p. 1879, note J. Casey ; D. Aff. 2004, chron., p. 204, note Y. Picod.
937 L’article L. 341-4 du Code de la consommation précise que le « créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ».
938 Cass. 1ère civ., 9 juillet 2003 : JCP éd. G 2003, II, 10167, p. 1879, note J. Casey ; D. Aff. 2004, chron., p. 204, note Y. Picod.
939 Le projet de réforme des sûretés préconise l’abrogation de ces articles au profit d’un seul nouvel article 2305 du Code civil, qui précise : « Le cautionnement souscrit à titre non professionnel par une personne physique est réductible s’il apparaît qu ‘il était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné aux revenus et au patrimoine de la caution, à moins que ceux-ci, au moment où elle est appelée, ne lui permettent de faire face à son obligation », V. http://www.justice.gouv.fr/publication/rapport/avantprojetdetexteissudurapportgrimaldi.pdf, art. 2305 ; v. spéc, Rapport Grimaldi : pour une réforme globale des sûretés. Les sûretés personnelles, par Ph. Simler, Droit et patrimoine, 2005, n° 140, p. 57.
Notes de fin
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