Chapitre II. La portée pratique des comportements fautifs
p. 95-134
Texte intégral
176 - Étendue de l’étude. De récents développements jurisprudentiels invitent, en premier lieu, à s’interroger sur la question de savoir si les causes d’exonération - que sont le fait du créancier et la faute de la victime - sont susceptibles de connaître une extension de leur domaine pratique. En effet, le schéma classique d’intervention de ces causes d’exonération consiste à permettre au débiteur d’une obligation contractuelle, ou au débiteur d’une indemnité dans le cadre de la responsabilité civile délictuelle, d’invoquer la participation causale d’une « victime »254. Pour que le fait du créancier ou la faute de la victime puisse décharger en tout ou partie ce débiteur, il faut que le comportement de cette victime soit antérieur ou concomitant255 à la production du dommage.
2Mais le droit français subit l’influence des droits voisins. Or, ceux-ci connaissent un mécanisme qui permet d’exonérer le débiteur de sa responsabilité lorsque la victime, postérieurement à la production du dommage, n’a pas contribué, par des efforts raisonnables, à minimiser le dommage qu’elle a subi. D’une part, le droit français va-t-il accepter de transposer cette cause d’exonération particulière ? D’autre part, le comportement fautif postérieur à la production du dommage sera-t-il sanctionné par le corps de règles de la responsabilité civile française ? Enfin, les causes d’exonération que sont le fait du créancier et la faute de la victime ne suffisent-elles pas pour englober, et donc sanctionner, ce type de comportement ? (Section 1).
3En second lieu, il est nécessaire de consacrer une place à la responsabilité des personnes dites incapables. Aujourd’hui, leur incapacité n’est pas prise en compte en cas de participation fautive à la production de leur dommage et notre droit s’avère éminemment sanctionnateur à leur égard. La faute des mineurs et des majeurs incapables doit-elle être un indice de minoration voire de suppression de l’éventuelle indemnité qui leur sera versée ? Ne peut-on pas envisager, en restaurant un équilibre entre l’appréciation objective et subjective de leur faute, de rendre plus juste l’application du droit qui leur est faite ? (Section 2).
SECTION 1. LA SANCTION D’UN COMPORTEMENT FAUTIF POSTÉRIEUR AU DOMMAGE
477 - Problématique. Si l’obligation de minimiser le dommage permet aussi de sanctionner une faute de la victime, postérieure au dommage, cette extension256 reste, en droit français, à « l’état de suggestion »257. Ce qui justifie au moins d’en apprécier la pertinence (§1).
5Jusqu’à récemment, notre Droit était resté imperméable à cet élargissement sans y être pour autant opposé. Mais, depuis un arrêt de 2003258, la position jurisprudentielle est claire. En matière délictuelle, la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation a fermé « résolument la porte à l’introduction en droit privé français, d’une obligation pour la victime de minimiser ses préjudices »259. Ce refus doit-il valoir également en matière contractuelle ? L’exception française permet de le penser (§ 2).
§ 1- La pertinence de l’obligation de minimiser le dommage
678 - Position du problème. Pour apprécier la pertinence de la transposition d’une telle obligation dans notre Droit, encore faut-il en comprendre les deux enjeux majeurs.
7Quelles ont été les étapes de l’émergence de cette notion (A) ? Le principe d’une minoration du dommage, en tant qu’obligation, étant selon nous incompatible avec le droit français ; quels sont les fondements qui permettent déjà à notre Droit de sanctionner des comportements similaires (B) ?
A/ L’émergence de l’obligation de minimiser le dommage
879 - Définition. Prosaïquement, l’obligation de minimiser le dommage apparaît comme « un moyen de faire des économies sur la réparation »260. Plus précisément, cette « soi-disant obligation »261 impose à la victime d’un dommage de prendre les mesures nécessaires pour le réduire ou pour éviter une quelconque aggravation de celui-ci262. La particularité de cette obligation est de ne prendre « naissance qu’après la survenance d’un dommage initial »263, et de permettre la sanction d’une sorte de défaut d’altruisme de la victime à l’égard de l’auteur de son dommage.
980 - Domaine. Pour certains auteurs, l’obligation de minimiser le dommage ne peut relever que de l’ordre de la responsabilité civile contractuelle. Ainsi, pour MM. Gautier264 et Cornu265, « le principe de mitigation of losses » peut être défini « comme l’obligation légale, faite au créancier de prendre toutes mesures de nature à limiter son dommage, tel qu’il résulte de l’inexécution du contrat par le débiteur ». Il semble cependant, que le principe de minimisation du dommage doive s’entendre plus largement. Pour M. Reifegerste266, « le dommage initial peut être indifféremment de nature contractuelle ou extracontractuelle (car) rien ne justifierait que l’obligation de minimiser le dommage se réduise à l’une ou à l’autre des responsabilités contractuelle ou délictuelle ». En effet, le reproche fait à la victime de ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour réduire ou empêcher la production d’un dommage ne recouvre aucune spécificité et suit la nature juridique de l’obligation initialement inexécutée267. Ce type de comportement peut se retrouver tant dans le cadre d’une relation contractuelle que lors de la survenance d’un dommage purement accidentel relevant de la responsabilité délictuelle.
1081 - Création prétorienne. C’est à la jurisprudence anglaise que l’on doit la création de l’obligation de minimiser le dommage. Dans les prétoires, « cette règle de conduite de bon sens » ;268 est apparue dans le premier tiers du xixème siècle. Cependant, ce n’est véritablement qu’en 1872 qu’un principe de minimisation des pertes s’est dégagé en jurisprudence269. Il faudra attendre plus d’un siècle pour voir ce principe jurisprudentiel être intégré au Sale of Goods Act de 1979270 en matière de vente de marchandises qui, dans ses articles 50 et 51, évalue le préjudice réparable des contractants par référence au prix du contrat de remplacement qui aurait dû être conclu. Ainsi, le contractant déçu voit sa réparation évaluée au regard des mesures nécessaires qu’il a, ou qu’il aurait dû prendre, pour diminuer le montant de son préjudice.
1182 - Plébiscite. Dans tous les pays imprégnés de Common Law, mais également sur le vieux continent, l’obligation de minimisation du dommage est consacrée comme l’un des principes fondamentaux de l’évaluation de la réparation. Qu’il s’agisse des États-Unis271, du Québec272, de la Hollande273, des pays germaniques274, de l’Italie275, de la Grèce276, des pays du monde arabe277 ou de la Chine278, tous ont adopté un principe similaire. La France reste en retrait et ne connaît pas ouvertement ce principe.
1283 - Réceptivité du droit français. Très tôt, les auteurs français ont pressenti l’existence de ce qui allait devenir, pour nos voisins, l’obligation de minimiser le dommage. Ainsi, Domat, à propos de l’étendue de la réparation qui devait être allouée, précisait que l’on « doit prendre en considération le fait que le demandeur a eu ou n’a pas eu la possibilité de minimiser sa perte »279. Pothier s’en préoccupa également - par le biais de l’exemple célèbre de la vente d’un cheval à un chanoine280 - de même que des auteurs contemporains comme Demogue281 et Tune282. Cependant, la création d’une obligation de minimiser le dommage en tant que telle n’était pas au centre des préoccupations, les dispositions du droit français apparaissant comme suffisantes pour englober ce type d’hypothèse. L’impact le plus direct sur notre droit se révéla lorsque l’obligation de minimiser le dommage s’y infiltra par le truchement des textes de droit international ou européen.
1384 - Imprégnation du droit français. La ratification des conventions internationales de La Haye du 1er juillet 1964, portant loi uniforme sur la vente internationale des objets mobiliers corporels et celle de Vienne du 11 avril 1980 relative à la vente internationale de marchandises, a imposé « l’obligation de prendre les mesures raisonnables, eu égard aux circonstances, pour limiter la perte, y compris le gain manqué, résultant de la contravention » sous peine de voir prononcer « une réduction des dommages-intérêts égale au montant de la perte qui aurait dû être évitée »283.
14De manière moins impérative, puisqu’ils ne s’imposent aux parties contractantes que si elles en ont émis la volonté expresse, les principes relatifs aux contrats du commerce international, dits principes UNIDROIT284, précisent dans leur article 7.4.8. que « le débiteur ne répond pas du préjudice dans la mesure ou le créancier aurait pu l’atténuer par des moyens raisonnables » et que « le créancier peut recouvrer les dépenses raisonnablement occasionnées en vue d’atténuer le préjudice ». Le droit français, à l’exception d’une disposition du droit des assurances285, ne connaît l’obligation de minimiser le dommage que par le prisme des textes internationaux ou européens. Ce type d’obligation doit-il être intégré à l’ordre juridique français ?
1585 - Pour ou contre la transposition en droit interne ? Seul un auteur est aujourd’hui véritablement en faveur de la consécration de cette obligation de minimiser le dommage en tant que principe autonome de notre droit de la responsabilité civile. M. Reifegerste, propose l’insertion dans le Code civil d’un article 1151-1 qui pourrait, en matière de responsabilité contractuelle, prévoir que « le débiteur ne répond pas des dommages que le créancier aurait pu éviter en prenant des mesures raisonnables », et d’un article 1389-19, en matière de responsabilité délictuelle, qui préciserait que « la personne tenue à réparation ne répond pas des dommages que la victime aurait pu éviter en prenant des mesures raisonnables »286. Cette proposition a récemment reçu le soutien de M. Chazal287, qui reste cependant plus nuancé. Quand bien même il fustige la jurisprudence récente de la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation288, sa critique ne va pas jusqu’à réclamer l’accueil dans le Code civil de cette obligation.
16La doctrine majoritaire reste donc fermement opposée à l’introduction en droit français du principe de minimisation du dommage en tant qu’obligation. Ainsi, Mme Muir-Watt289, précise qu’ « introduite en droit français, pareille solution remettrait profondément en cause la primauté de l’exécution en nature que la doctrine française fait découler, comme une conséquence inéluctable, de la force obligatoire du contrat. C’est alors toute la hiérarchie des remèdes contractuels, voire les ressorts mêmes de la force obligatoire du contrat qui se trouve (raient) bouleversés par la présence d’un simple principe d’évaluation des dommages-intérêts ! ». Pour Mlle Viney, le risque serait, de surcroît, de « rendre notre droit de la réparation plus flou et plus aléatoire encore qu’il ne l’est actuellement »290. Enfin, pour M. Jourdain, introduire l’obligation de minimiser le dommage porterait atteinte à notre conception du droit de la réparation. En effet, « La mitigation of damages [...] se montre [...] extrêmement exigeante pour la victime puisque, évaluant les dommages-intérêts au jour du fait dommageable, elle met à sa charge une éventuelle aggravation ultérieure du dommage. [...] Chargeant systématiquement la victime, la mitigation fait abstraction du fait que c’est le débiteur qui est à l’origine de son dommage, y compris de la fraction qui aurait pu être évitée. [...] Il serait donc inopportun et même inconcevable de l’introduire en droit français »291.
17Au regard de l’ensemble de ces critiques, nous nous rangeons à l’avis de la doctrine majoritaire. En outre, il nous semble que la transposition brute de cette obligation de minimiser le dommage n’est pas nécessaire puisque notre droit peut déjà parer à ce type d’hypothèse par les causes d’exonération de responsabilité que sont le fait du créancier ou la faute de la victime292.
1886 - A obligation, obligation et demie. Le principe de minimisation du dommage n’est pas, en tant qu’obligation, concevable en droit de la responsabilité civile. En droit civil français, la conception de la notion d’obligation est duale. Une obligation suppose l’existence d’un lien juridique entre un débiteur et un créancier qui permet en cas d’inexécution d’engager une procédure d’exécution forcée à l’encontre du débiteur défaillant. Dès lors, le principe de minimisation du dommage ne peut pas recouvrer la force d’une obligation, dans la mesure où il n’y a pas de possibilité d’exécution forcée ; la seule sanction étant la privation de l’avantage réclamé. Ainsi, il apparaît que la minimisation du dommage, en droit français, semble devoir s’analyser en un simple « devoir de bienveillance envers le débiteur »293. A l’inverse du droit allemand, nous ne bénéficions pas de la notion intermédiaire d’Obliegenheit, autrement désignée par le terme d’incombance, qui cernerait au plus juste294 la nature de ce principe de minimisation du dommage. L’incombance désigne une sorte d’obligation non susceptible d’exécution forcée et se réfère à une exigence de comportement altruiste. La notion d’incombance repose sur « la crainte de perdre un avantage juridique »295. Si, par principe, la notion de minimisation du dommage est donc à proscrire en tant qu’obligation, il reste à comprendre les fondements qui permettent déjà à notre droit de sanctionner certains types de comportements y afférents.
B/ Les substituts de l’obligation de minimiser le dommage
1987 - Arcanes. La minimisation du dommage n’est pas inconnue du droit français. Le débat actuel consiste à s’interroger sur la nécessité de le voir consacrer en une obligation de minimiser le dommage. La doctrine majoritaire répond par la négative. Les raisons en sont simples. Il existe déjà dans notre corps de règles les fondements idoines qui permettent la sanction des comportements d’un créancier non diligent. Tant en matière de droit des obligations (a), qu’en matière de causes d’exonération (b), il est possible de trouver des principes préexistants qui permettent de se dispenser de la transposition d’une nouvelle obligation.
a/ Les fondements tirés du droit des obligations
2088 - Domaine de prédilection. C’est essentiellement dans le domaine contractuel que la doctrine s’est interrogée sur les fondements susceptibles de sanctionner le comportement du cocontractant, qui postérieurement à la production du dommage n’a pas pris les mesures raisonnables de nature à diminuer son préjudice.
2189 - Pluralité de fondements. La doctrine fut prolixe quant à la question du rattachement de ce principe de minimisation du dommage aux fondements de notre droit. Tous ne sont pas, en réalité, de véritables fondements. Les notions évoquées sont loin d’avoir la qualité de notions cadres mais sont plutôt des sous-hypothèses d’un fondement plus large : l’obligation générale de bonne foi.
2290 - Fondements récusés. Sous l’impulsion des idées développées par M. Mazeaud296, une partie de la doctrine a pensé rattacher le principe de minimisation du dommage au solidarisme contractuel. Dès lors qu’ « en vertu de ce principe de fraternité contractuelle, chacun des contractants est tenu de prendre en compte, au delà de son propre intérêt, celui de son contractant297 alors, « la solidarité contractuelle pourrait [...] créer un devoir d’arrêter le dommage si on le peut »298.
23Sur la base de l’article 1135 du Code civil, ont également été évoqués comme fondements possibles l’équité299 ainsi que le devoir de loyauté et de coopération300 dans l’exécution des conventions. En effet, selon cet article « Les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature ». Dès lors que l’un des cocontractants n’a pas veillé, au cours de l’exécution, à prendre les mesures nécessaires pour réduire le dommage subi, il pourrait se voir sanctionner, pour n’avoir pas pourvu assez aux suites de la convention qui auraient pu être moindres s’il avait fait preuve d’une diligence suffisante.
24D’autres textes ont été invoqués pour justifier le principe de minimisation du dommage. Ainsi, a-t-on cru voir apparaître « en filigrane »301 dans l’article 1144 du Code civil - qui contraint le créancier insatisfait à remplacer son cocontractant défaillant en faisant « exécuter lui-même l’obligation aux dépens du débiteur »302 - une obligation de modérer le dommage.
25On a soutenu aussi, qu’une application plus rigoureuse de l’article 1151 du Code civil pourrait « priver le créancier de la possibilité d’obtenir l’indemnisation des aggravations du dommage dues à toute autre cause que l’inexécution elle-même, en particulier à sa propre négligence dans la gestion des suites de celle-ci »303.
26Cependant, ces propositions apparaissent comme trop restrictives puisqu’elles sont, d’une part, nécessairement limitées à la période d’exécution de la convention304 et, d’autre part, concurrencées « en ce que l’obligation générale de bonne foi dans l’exécution des conventions permet, semble-t-il, de parvenir au même résultat »305. Ainsi, qu’il s’agisse du principe de solidarité, de loyauté ou de coopération dans l’exécution des conventions, voire de l’équité ou du remplacement, ces propositions n’apparaissent dans l’ensemble que comme des sous-hypothèses, ou des illustrations, de l’obligation générale de bonne foi.
2791 - Fondement discuté. Au terme de l’article 1134, alinéa 3 du Code civil, les conventions « doivent être exécutées de bonne foi ». La bonne foi a plusieurs fonctions306. Celles qui permettent de justifier d’un principe de minimisation du dommage sont les fonctions complétive et limitative de la bonne foi. Sa fonction complétive exige du créancier, qui subit un préjudice du fait de l’inexécution du contrat, d’effectuer avec diligence les actes qui pourraient permettre de voir son préjudice atténué. Cumulée à sa fonction limitative, qui permet au juge de sanctionner un exercice abusif307 d’un droit par le créancier, la bonne foi peut permettre de sanctionner l’exigence d’une minimisation du dommage.
2892 - Application jurisprudentielle. La jurisprudence utilise ce raisonnement pour prononcer la sanction du créancier qui n’a pas été suffisamment diligent. Ainsi, il est classique de voir des garants solidaires de dette de loyers reprocher au bailleur d’avoir tardé à agir contre le preneur en laissant s’accroître la dette de loyer dans son seul intérêt308. La Cour de cassation refuse sévèrement d’accéder aux demandes des bailleurs qui veulent mettre en jeu l’obligation de ces garants. L’espèce suivante en est une illustration. Lors de la cession d’un bail commercial, les locataires sortants se portèrent contractuellement garants du nouveau preneur envers le bailleur. Le preneur ayant été placé en liquidation judiciaire, le bailleur s’est alors adressé aux garants pour obtenir le paiement de ce qui lui était dû. La prétention du bailleur a été rejetée aux motifs que « l’obligation de garantie stipulée à la charge des (cédants) avait pour but de protéger le bailleur contre les défaillances du cessionnaire ; qu’en s’abstenant pendant plus de deux ans de provoquer la résiliation du bail malgré le défaut de paiement des loyers échus [...] tandis que, selon ses dires, aucune activité n’était plus exercée dans les lieux, et en réclamant la totalité des loyers échus [...] aux (cédants), lesquels n’avaient pas la possibilité juridique de faire résilier le contrat, (le bailleur) (n’a) pas exécuté de bonne foi (la) convention [...] dans la mesure où il a cherché à faire supporter par ceux-ci la conséquence de sa propre carence »309.
29Bien que le principe de bonne foi puisse apparaître comme un « fondement idéal »310, Mme Laude met en évidence un obstacle, et précise que : « dès lors que l’inexécution de cette obligation de bonne foi constitue au même titre que l’inexécution des autres obligations contractuelles une faute, elle devrait en cas de violation, être sanctionnée de manière générale sur le terrain de la responsabilité contractuelle. Si ce fondement est séduisant, il a néanmoins une limite puisque l’on retombe inévitablement sur la notion de faute de la victime »311.
30Le fait du créancier en matière contractuelle, et la faute de la victime en matière délictuelle, ne seraient-ils pas des fondements plus adéquats qui permettraient, comme causes d’exonération, la sanction d’un devoir pour les cocontractants de minimiser leur dommage ?
b/ Le fondement tiré de la responsabilité civile
3193 - Terminologie. Les causes d’exonération de responsabilité civile, telle que la faute de la victime et le fait du créancier, peuvent apparaître comme le fondement le plus adapté pour permettre la sanction du principe de modération du dommage. Bien que les causes d’exonération soient distinctes, nous procéderons à leur étude simultanée puisqu’en matière de minimisation du dommage la nature délictuelle ou contractuelle de ce principe dépendra de la nature initiale de l’obligation312. Dès lors, ce n’est pas tant leur nature contractuelle ou délictuelle qui est intéressante, mais leur vertu exonératoire, laquelle permettra, après quelques adaptations, de justifier, si cela était nécessaire, l’existence du principe de minimisation du dommage.
3294 - Récusation. L’affirmation selon laquelle la faute de la victime, ou le fait du créancier, serait le fondement le plus adapté d’un principe de minimisation du dommage, ne reçoit pas les faveurs de la doctrine majoritaire. En effet, pour récuser ce fondement, les auteurs313 se basent essentiellement sur le fait que ces causes d’exonération interviennent antérieurement à la production du dommage alors que le principe de minimisation du dommage implique la prise en compte d’un comportement qui ne peut se produire que postérieurement à la survenance de ce dommage. Cet élément temporel serait donc rédhibitoire et écarterait de facto toute possibilité de voir en la faute de la victime ou le fait du créancier un quelconque fondement possible pour justifier de la minimisation du dommage.
3395 - Contradiction. Certains auteurs affirment, au contraire, qu’au regard du principe de minimisation du dommage « le premier rapprochement (à opérer) est la prise en compte de la faute du créancier/victime »314. En outre, de l’aveu même des auteurs qui réfutent ces causes d’exonérations « on retombe inévitablement sur la notion de faute de la victime »315 car « de toute façon, le manquement à cette obligation constitue une faute de la victime, mais une faute qui, cette fois, ne concourt pas à la production de son dommage et, en tout cas, pas à la production de l’entier dommage ; une faute commise après le fait dommageable »316. Ainsi, la seule modification à apporter à ces causes d’exonération, afin qu’elles puissent sanctionner le devoir de minimiser le dommage, consiste à « reconnaître la spécificité de la faute de la victime postérieure au fait dommageable initial et contributive au seul dommage final »317. Cette modification, qui opère un glissement sur le terrain de la causalité, s’avère-t-elle impossible à envisager ? Nous ne le pensons pas.
3496 - Contre-argument. Quand bien même M. Chazal est favorable à la transposition dans notre droit d’une obligation autonome de minimiser le dommage, sa réflexion peut être utilisée a contrario pour justifier l’inutilité de cette transposition au regard de la suffisance de la faute de la victime ou du fait du créancier.
35Ainsi, précise-t-il318 : « Que ce soit en matière contractuelle ou en matière extra-contractuelle, le comportement de la victime postérieurement à l’apparition du dommage n’est [...] pas indifférent quant à l’établissement du rapport de causalité entre le fait dommageable et les préjudices qui en découlent. Si par une décision arbitraire, la victime laisse consciemment aggraver son propre dommage, elle rompt ainsi le lien de cause à effet, de sorte que le surcroît de préjudice ne peut plus être rattaché au fait dommageable initial ».
36Or, aujourd’hui, notre droit de la responsabilité a explicitement adopté la théorie la plus libérale pour définir le lien de causalité. En effet, la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation, par son arrêt en date du 27 mars 2003319, a mis en évidence l’existence du lien causal « par application du principe de l’équivalence des causes dans la production du même dommage en matière de responsabilité délictuelle ».
3797 - Causalité et victime fautive. En confrontant l’analyse de M. Chazal à cet arrêt, ne peut-on pas penser que la théorie de l’équivalence des conditions permettrait efficacement d’établir que le comportement de la victime postérieur à la survenance du dommage, et qui a contribué à aggraver le préjudice, a rompu le lien causal ?
38Certes, il s’agirait d’une conception extensive de la causalité, déjà comprise largement par la jurisprudence, mais nous ne voyons pas quels arguments dirimants pourraient interdire ce type de raisonnement. L’inclusion d’un comportement postérieur à la survenance d’un dommage dans l’analyse du rapport causal nous semble possible par le biais de l’équivalence des conditions320.
39Ceci aurait, d’une part, la vertu d’établir au plus juste la part causale de chacun dans le préjudice. En effet, quand bien même l’attitude de la victime est postérieure à la production du dommage, elle s’avère éminemment causale si, par l’absence de mesures raisonnables, le préjudice initial s’est aggravé.
40D’autre part, ce raisonnement, s’il devait être adopté, permettrait, par le prisme de la causalité essentiel à l’analyse de la faute de la victime, de justifier pleinement d’un fondement du principe de minimisation du dommage dans l’ordre délictuel de la responsabilité.
41Notre Droit, dispose donc « d’ores et déjà de la possibilité de sanctionner, par une réduction de l’indemnité, l’attitude négligente de la victime ou du créancier qui a laissé le dommage se développer sans réagir »321. Cependant, pour certains322, « l’isolement du droit français [...] ne peut qu’être préoccupant » mais cette impertinence du droit français, qui s’évertue à ne pas adopter l’obligation de minimiser le dommage, est largement compensée par l’imagination judiciaire déployée pour pallier cette absence.
§ 2 - La résistance à l’obligation de minimiser le dommage
4298 - Refus de soins. C’est particulièrement en matière médicale que la jurisprudence a eu à se prononcer. La question qui a jalonné le xxème siècle323 est la suivante : un patient qui a refusé les soins médicaux propres à réduire son dommage doit-il se voir reprocher son comportement ? L’hostilité catégorique de la jurisprudence (B) à voir une quelconque responsabilité du patient, a succédé, depuis peu, à une longue période d’incertitude (A).
A/ La période d’incertitude
4399 - Appréciation des risques. Pendant la première moitié du xxème siècle, la solution jurisprudentielle apportée à la question du refus par le patient de recevoir les soins qui lui permettraient un mieux-être, voire une guérison, reposait sur l’appréciation des risques liés aux traitements ou à l’opération chirurgicale envisagés.
44100 - Opérations et soins bénins. Quand le refus du patient portait sur une opération ou des soins bénins, sans risque majeur réel, le patient-victime se voyait privé de la possibilité de faire peser sur le responsable l’entière réparation du dommage constaté. Par exemple, à la victime d’un accident de la circulation qui s’était refusée à subir les risques d’une intervention chirurgicale bénigne, le Tribunal de Grande Instance de Laval324 objecte que : « si la victime d’un accident dont les blessures sont consolidées, mais dont les lésions persistantes pourraient être très améliorées par une intervention chirurgicale, use d’un droit incontestable en refusant de s’y soumettre si une telle opération n’est pas exempte de risques - et si, dans ce cas, l’auteur responsable doit indemniser le préjudice actuel sans qu’il soit tenu compte, dans l’évaluation des dommages, de l’amélioration que l’opération serait susceptible d’apporter - il en va différemment lorsque cette opération est simple et sans risque sérieux ; -Attendu que, dans ce cas, le refus opposé par la victime constitue une faute dont elle doit supporter les conséquences ; qu’il ne doit alors lui être allouée qu’une indemnité proportionnelle à l’incapacité qui aurait subsisté après l’opération, sans gravité préconisée ».
45La sanction de ce comportement était fondée sur l’abus de droit325 commis par la victime, qui alors devait en subir les conséquences.
46101 - Opérations et soins graves. A l’inverse, le patient pouvait exiger la réparation intégrale de son préjudice, par l’auteur du dommage, même lorsque son dommage aurait pu être atténué, dès lors que l’intervention ou le traitement nécessaire à cette amélioration comportait des risques ou inconvénients graves, et présentait des chances hypothétiques de guérison. La cour d’appel de Paris326 eut à connaître d’une espèce dans laquelle la victime d’un accident de la circulation, qui souffrait d’encéphalites aiguës suite à un coma prolongé, s’était refusée à subir des traitements lourds - le risque était de provoquer un état de coma dépassé - qui auraient pu, sans grande certitude, améliorer son état. Les juges du fond sont catégoriques : « Considérant [...] qu’il ne peut absolument être fait grief à cette malade [...], de persister à n’accepter guère d’autre traitement que ceux, notamment, par neuroleptiques, prescrits par ses médecins traitants [...] et de refuser de prendre les risques qui subsistent de cure de sakel en hospitalisation et qui peuvent aboutir à un coma dépassé ; qu’il n’en demeure pas moins que, [...] l’état de (la victime) est, très éventuellement, susceptible avec ou sans soin, de stabilisation, voire d’amélioration dans la proportion d’une chance sur trois ou, dans quelques rares cas, d’aboutir plus exceptionnellement, à guérison. [...] Condamne le prévenu [...] et confirme le jugement déféré ».
47102 - Opposition doctrinale. Ces solutions suscitèrent une opposition doctrinale entre Carbonnier d’un côté, Tunc et les frères Mazeaud de l’autre.
48Pour la doctrine majoritaire, la jurisprudence de l’époque est équilibrée, et repose sur le reproche d’une faute au patient qui s’est refusé à une intervention bénigne. Ainsi, « la victime est en droit de se refuser à toute intervention qui lui fait courir un risque [...] Elle peut également s’opposer à toute opération ou traitement que son caractère douloureux ferait appréhender à un individu normal. En dehors de ces situations, son refus constitue une faute »327.
49Pour Carbonnier328, l’atteinte au corps humain étant une question d’ordre public, le refus du patient est toujours de droit et, il ne saurait y avoir une gradation de sa réparation en fonction de la gravité de l’intervention. En effet, « S’il faut concevoir l’inviolabilité de la personne humaine comme une liberté immatérielle, qui a son siège moins dans le corps que dans la personnalité, on croira malaisément qu’il devient plus acceptable, au regard des principes, d’imposer une opération à un individu par cela seul que cette opération est bénigne. Qu’importe qu’il n’y ait pas mutilation, que l’incision dans les chairs soit superficielle ? Ce n’est pas la chair qui est protégée, mais un sentiment, un quant-à-soi, une liberté, et ils seront blessés d’identique manière, quelle que soit la nature de l’intervention envisagée [...] nous ne sommes donc pas en droit, si l’ordre public peut légitimer une atteinte au corps humain, de nous contenter d’un ordre public au rabais, d’un ordre public moins impérieux, sous prétexte que l’atteinte à légitimer est plus légère ».
50103 - Intermède jurisprudentiel. La Cour de cassation, sensible à l’analyse de Carbonnier, opéra un revirement qui consacra l’obligation de réparation intégrale du préjudice souffert par la victime, indépendamment de l’analyse de la gravité ou non des soins ou opérations envisagés. L’attendu de principe formulé par la Chambre criminelle329 précisait que : « Les juges sont sans pouvoir pour imposer à la victime une opération à laquelle celle-ci refuse de se prêter ; qu’ils ne sauraient, dès lors, en se fondant sur ce refus, modérer les dommages-intérêts accordés, sans violer le principe selon lequel le préjudice souffert par la victime doit être intégralement réparé ».
51Cet arrêt suscita la critique. En effet, pour Savatier330, même si toute référence à la notion de comportement fautif du patient à refuser une opération bénigne est absente, il paraît impossible « sous prétexte que les juges sont dans l’impossibilité de contraindre un malade résistant à s’imposer des soins, [...] d’en déduire qu’ils se trouvent dans l’impossibilité de reconnaître une faute à sa charge ». De plus, « Ne pas le reconnaître c’est méconnaître la technique de notre droit [...] La liberté de l’homme bloque les pouvoirs matériels du juge ! Mais elle ne le désarme pas sur les conséquences d’une inaction fautive ». Cinq ans plus tard, la Chambre criminelle de la Cour de cassation fit marche arrière.
52104 - Retour au principe. Par un arrêt de 1974, la Chambre criminelle de la Cour de cassation331 revint au principe antérieur de sanction du comportement fautif du patient qui se refuse à une opération bénigne. En l’espèce, la victime d’un accident de la circulation, dont l’auteur avait été reconnu seul responsable, avait été transportée à l’hôpital. Elle présentait une hémorragie interne grave mais, en raison de son appartenance à un mouvement sectaire, refusa les transfusions sanguines jugées nécessaires par les médecins et décéda quelques jours plus tard. Les juges de la Cour d’appel, mirent à la charge de l’auteur de l’accident la réparation de l’entier préjudice, en énonçant qu’il « est sans intérêt de rechercher si le comportement de la victime caractérise ou non une faute, car une telle faute ne pourrait être prise en considération que si elle avait, d’une manière certaine, exercé une influence sur le processus fatal ». Les juges de cassation censurèrent cet arrêt aux motifs « qu’en statuant ainsi la cour n’a pas justifié sa décision ; qu’en effet elle a refusé de rechercher si la victime avait pu, par sa faute, se priver d’une chance d’amélioration ou de survie, en n’acceptant pas sciemment les soins que nécessitait son état ; qu’une telle faute doit être retenue pour la réparation du préjudice subi lorsque ce refus a concouru à la réalisation du dommage ».
53Conformément à la critique qu’il avait précédemment adressée à l’arrêt de 1969, Savatier approuva cette fois la position de la Cour de cassation. En effet, la raison en était simple : « Il serait choquant que ce refus (de soins) créât, pour les ayants cause de son auteur, un droit à indemnité intégrale »332.
54Dans la mouvance de Carbonnier autrefois, M. Mourgeon333 exprima une réserve quant à cette analyse et surtout, quant à la qualification du refus de soins comme relevant d’un comportement fautif. Il précisa que : « Si un homme commet une faute en préférant le risque de mort à l’application d’une thérapeutique contraire à ses convictions philosophiques ou religieuses [...], cela signifie que l’Homme n’a plus le droit de disposer de sa vie : la mort par refus de soins ou le suicide deviennent des fautes civiles ». Toutefois, il se rallia en partie à l’analyse de Savatier, puisqu’il concluait qu’« il est incontestable que la victime de blessures par imprudence, dans lesquelles elle n’a aucune part de responsabilité, qui, atteinte d’hémorragie interne, sachant que sa vie est en danger et que la transfusion sanguine préconisée par les médecins est susceptible de la sauver, refuse néanmoins cette transfusion parce que contraire à ses convictions religieuses, est en partie responsable de sa mort »334.
55Ce retour au principe fut accueilli favorablement par la jurisprudence335 qui l’adopta sans résistance. Toutefois, les juridictions administratives durcirent leur position et firent craindre que le droit au refus de soins ne doive plus s’apparenter qu’à « une peau de chagrin »336.
56105 - Durcissement du principe. Par un arrêt de 1994337, le Conseil d’État a radicalisé sa position quant au refus de soins par le patient. En l’espèce, un médecin avait informé sa patiente qu’elle était atteinte d’un cancer du sein. Cette dernière refusa le traitement proposé, qui consistait en l’ablation du sein malade suivie d’une radiothérapie. Elle signa, à la demande du praticien, une attestation par laquelle elle reconnu avoir refusé ce traitement et avoir été informée des risques encourus. Le médecin, pour pallier les douleurs, lui prescrivit alors un traitement à base d’homéopathie et d’acupuncture. Apprenant cela, le Conseil départemental de l’Ordre des médecins interdit au médecin en cause d’exercer la profession pendant six mois.
57Le Conseil d’état, saisi par le médecin, approuva la décision du Conseil de l’Ordre et estima que le médecin traitant « avait commis une faute de nature à justifier une sanction en acceptant de [...] traiter (cette patiente) par des remèdes illusoires qui l’ont privée d’une chance de guérison ou de survie ».
58Un second arrêt du Conseil d’État en 2001338 s’inscrit dans cette mouvance. La Cour administrative d’appel de Paris339 avait considéré qu’en cas d’urgence vitale, le médecin avait l’obligation de passer outre le refus du patient qui, adepte des témoins de Jéhovah, s’était refusé à toute transfusion sanguine. Le Conseil d’État, saisi d’un recours, tout en cassant cette décision, et en considérant que l’obligation pour le médecin de sauver la vie de son patient ne devait pas prévaloir sur le respect de la volonté de ce dernier, a admis que le choix du médecin d’accomplir cette transfusion, indispensable à la survie du patient, ne constituait pas, en l’espèce, une faute340.
59106 - Critiques doctrinales. Que ce soit la doctrine civile ou administrative, le consensus se fit sur la base d’une critique assez radicale de ces décisions. La critique consiste, en premier lieu, à voir, dans cette série d’arrêts « la résurgence d’un paternalisme médical »341. En effet, le choix du médecin, certes professionnel de santé, s’impose à son patient quand bien même celui-ci a exprimé son refus à l’intervention.
60D’autre part, le devoir du médecin de procurer au malade les meilleurs soins ne permettent au praticien, en cas de refus du patient, que d’infléchir cette décision. En aucun cas, cela ne devrait l’autoriser à outrepasser la décision prise, en toute connaissance de cause, par le patient342. De surcroît, ces décisions viennent contredire l’article 36 alinéa 2, du Nouveau Code de déontologie médicale343 qui précise que « lorsque le malade en état d’exprimer sa volonté, refuse les investigations ou le traitement proposés, le médecin doit respecter ce refus après avoir informé le malade des conséquences ». Ainsi, sous l’impulsion de la jurisprudence administrative, la possibilité pour le patient de refuser une intervention comportant des risques conséquents ou graves se voit, en pratique, anéantie, puisque par ces décisions les médecins se voient d’une part, autorisés à outrepasser le refus de leur patient, mais d’autre part, incités à ne pas respecter l’avis de leur patient sous couvert du risque de se voir infliger des sanctions disciplinaires. Cependant, la jurisprudence civile a réagi dans une dernière volte-face.
B/ La levée de l’incertitude
61107 - Prodrome du changement. Sous l’impulsion du législateur, la jurisprudence a pu fonder ses solutions sur le principe du respect de l’intégrité du corps humain. L’article 70 de la loi du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain344, a été inséré dans l’article 16-3 du Code civil qui précise dans son deuxième alinéa, que pour toute intervention médicale : « le consentement de l’intéressé doit être recueilli préalablement ».
62Sur cette base et, dès l’année 1997345, la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation, posa le principe selon lequel « il résulte de l’article 16-3 du Code civil que nul ne peut être contraint, hors les cas prévus par la loi, de subir une intervention chirurgicale ». Cet attendu, aussi clair qu’expéditif, suscita immédiatement une question : fallait-il voir dans cet arrêt l’abandon de la jurisprudence, qui hiérarchise la gravité des soins pour admettre ou sanctionner le refus du patient ?
63Pour M. Hauser, il était « excessif d’en déduire que la jurisprudence antérieure [...] serait devenue obsolète »346 ; jurisprudence qu’il « serait sans doute raisonnable de maintenir »347. Cette optique était justifiée par les circonstances de l’espèce. En effet, le refus du patient, portait sur la pose d’une prothèse à la hanche. Cette opération pouvait donc entrer dans la catégorie des opérations à risques ce qui, au regard de la jurisprudence passée, relevait du refus justifié du patient.
64Pour d’autres348, cet arrêt semblait renoncer à toute distinction entre les différents types de soins par l’emploi de « termes [...] très généraux »349. Le visa de l’article 16-3 du Code civil qui contribuait à reconnaître au patient un droit absolu au refus de soins, quels que soient leurs caractères350, ne permit pas, à l’époque, de trancher catégoriquement le débat. La solution devait s’expliquer « sans doute par la difficulté de distinguer les soins courants des interventions sérieuses »351.
65108 - Élan législatif. La loi du 4 mars 2002352 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, a permis d’insérer dans le Code de la santé publique les articles L. 1110-5353 et L. 1111-4. Sous l’impulsion de cette loi la jurisprudence a pu récemment donner une solution claire et explicite au problème du refus de soins exprimé par le patient.
66Les alinéas 2 et 3 de l’article L. 1111-4 du Code de la santé publique ont explicitement fait pencher la balance en faveur de la jurisprudence qui consacrait l’absence d’obligation pour le patient de suivre les soins recommandés.
67Ces alinéas précisent que : « Le médecin doit respecter la volonté de la personne après l’avoir informée des conséquences de ses choix. Si la volonté de la personne de refuser ou d’interrompre un traitement met sa vie en danger le médecin doit tout mettre en œuvre pour la convaincre d’accepter les soins indispensables. Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne ».
68Dès lors, il n’y avait plus de place pour l’incertitude.
69109 - Consécration jurisprudentielle. Par deux arrêts en date du 19 juin 2003354, la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation a clos le débat en la matière.
70Dans l’affaire Dibaoui c/ Flamand355 à la suite d’un accident de la circulation, la victime avait été atteinte de troubles psychiques. Des médecins spécialisés lui avaient conseillé une rééducation orthophonique et psychologique, ce qu’elle n’effectua pas. Les juges du fond considérèrent ce refus comme fautif, car il concourait à la persistance de la pathologie, ce qui justifiait, sur le fondement de l’article 1382 du Code civil, une réduction de l’indemnisation. La Cour de cassation censura l’arrêt au motif que « l’auteur d’un accident doit en réparer toutes les conséquences dommageables ; que la victime n’est pas tenue de limiter son préjudice dans l’intérêt du responsable ».
71L’impression, déjà dégagée par l’arrêt de 1997, devient une certitude356. De surcroît, « le refus de sanctionner l’absence de soins n’est plus justifié par une disposition posant le principe d’inviolabilité du corps humain, mais par un motif d’ordre général niant toute obligation de la victime de limiter son dommage »357.
72110 - Extension jurisprudentielle. La solution repose sur un principe général qui réfute toute obligation pour la victime de limiter son dommage. Le deuxième arrêt du même jour n’a effectivement pas pour domaine le refus de soins. Dans l’affaire Lallemand Xhauflaire c/ Decrept358 les exploitants d’une boulangerie furent blessés dans un accident de la circulation. De ce fait, ils n’ont pas été en mesure d’assurer l’exploitation de leur fonds de commerce pendant près de six années. Le fonds ayant perdu toute sa valeur du fait de cette inactivité, les exploitants présentèrent au responsable de l’accident une demande d’indemnisation de leur préjudice économique. Le défendeur refusa de procéder à cette indemnisation, objectant que les exploitants auraient dû faire exploiter leur commerce par un tiers. Les juges du fond, sensibles à cet argument, déboutèrent les demandeurs au motif que la perte de valeur du fonds n’était pas une conséquence de l’accident. Reproduisant le même attendu que dans l’affaire Dibaoui c/ Flamand, la Cour de cassation censura l’arrêt d’appel. C’est la portée générale de ces arrêts qui suscite, aujourd’hui, le débat doctrinal. Les réactions se scindent selon la nature du préjudice : corporel ou économique.
73111 - Préjudice corporel. La vertu élémentaire de l’arrêt Dibaoui c/ Flamand est d’éviter le délicat débat sur le caractère des soins et à leur probable influence sur l’état de santé du patient359. Cependant, s’il est admis que le refus de soins doit, même à défaut du visa de l’article 16-3 du Code civil, s’analyser en un corollaire de l’inviolabilité du corps humain, doit-on pour autant faire disparaître l’obligation de soins lorsqu’il s’agit d’un traitement bénin ? La réponse négative semble s’imposer en doctrine360. En effet, le principe de la réparation intégrale du préjudice a vocation d’une part, à indemniser la victime de l’ensemble des conséquences dommageables de l’accident mais, d’autre part, à veiller à ce que l’auteur du dommage répare seulement le préjudice qu’il a causé. La solution consacrée, cause un déséquilibre qui provoque l’obligation pour l’auteur du dommage initial de réparer les conséquences du choix personnel de la victime. Les auteurs arrivent à une conclusion identique pour un préjudice matériel que pour un préjudice économique.
74112 - Préjudice économique. Par principe, la doctrine souhaite que la victime - qui, par négligence, a laissé se développer ou s’aggraver un dommage matériel ou économique, qu’elle pouvait aisément limiter - voie sa réparation proportionnellement réduite361. Il semble que ce principe ne soit pas a priori exclu par la jurisprudence. En effet, dans l’affaire Lallemand Xhauflaire c/ Decrept, il apparaît que les propriétaires du fonds n’avaient pas délibérément laissé dépérir leur commerce, mais que la cessation d’activité s’était imposée à eux. Ainsi, et en vertu du principe de l’équivalence des conditions, il n’y avait pas rupture de la causalité résultant de la faute des victimes. Dès lors, la causalité entière incombant à l’auteur du dommage, il était nécessaire de faire peser sur lui l’intégralité de la réparation362.
75Par delà ces espèces, notre Droit accepte-t-il ou non la sanction d’un comportement fautif postérieur à la production du dommage initial ?
76113 - Pétition de principe. Depuis, les arrêts de 2003, la position des tribunaux est claire. En matière délictuelle, la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation a refusé d’imposer à la victime une quelconque obligation de minimiser le dommage qu’elle subit363. A cet égard, les réactions de la doctrine sont nuancées.
77Mlle Viney estime « qu’une telle obligation dans notre droit (n’est pas) réellement utile et opportune »364. M. Chazal fustige le refus de notre jurisprudence de voir introduire une obligation de minimisation du dommage et souhaite que « l’Assemblée plénière [...] désavoue sa deuxième Chambre civile en raison de l’injustice de (cette) nouvelle jurisprudence »365. Essentiellement, il estime à raison sur ce point - que le comportement postérieur de la victime d’un dommage n’est pas dépourvu de tout lien causal avec le fait initial366. Cependant, même s’il est juridiquement inexact de refuser la prise en considération de ce comportement dans l’évaluation de la réparation, doit-on pour autant adopter une obligation de minimiser le dommage en tant que telle ?
78114 - Nuance espérée. L’avant-projet de réforme du droit des obligations ouvre la voie à un principe de minimisation des dommages par l’introduction d’un article 1373 dans le Code civil qui préciserait : « Lorsque la victime avait la possibilité, par des moyens sûrs, raisonnables et proportionnés, de réduire l’étendue de son préjudice ou d’en éviter l’aggravation, il sera tenu compte de son abstention par une réduction de son indemnisation, sauf lorsque les mesures seraient de nature à porter atteinte à son intégrité physique »367.
79Mlle Viney368, explicite ce choix : « La reconnaissance de cette possibilité de modération répond au souci de responsabiliser les victimes [...]. On soulignera que, dans le texte proposé, il ne s’agit que d’une possibilité laissée à l’appréciation du juge et que l’exercice de cette faculté est subordonnée à la constatation que la réduction du dommage pouvait être obtenue par des mesures raisonnables et proportionnées. En outre, il est précisé, [...] qu’aucune réduction ne peut être admise lorsque ces mesures seraient de nature à porter atteinte à l’intégrité physique de la victime. Autrement dit, le refus de soins ne peut jamais motiver une diminution de l’indemnisation des préjudices résultant d’un dommage corporel ».
80Il apparaît que cet avant-projet de réforme du droit des obligations a réussi à adopter une approche à la fois nuancée et réaliste de ce principe de minimisation du dommage. En effet, « il est excessif de [...] nier aussi solennellement que le fait aujourd’hui la Cour de cassation »369 la nécessité de la prise en compte de ces comportements. Nous empruntons, à M. Jourdain, deux arguments qui semblent être essentiels à la reconnaissance de ce principe, qu’il soit codifié ou non.
81En premier lieu, la victime qui reste passive quant à l’aggravation de son dommage, qu’il soit corporel, matériel ou économique, ne peut, en toute impunité, réclamer la réparation de l’entier préjudice à l’auteur du dommage. Sur le fondement de la responsabilité contractuelle, le devoir de collaboration, issu de l’interprétation des articles 1134, alinéa 3 et 1135 du Code civil, suffit dès à présent à sanctionner ce comportement. Sur le fondement de la responsabilité délictuelle, l’obligation de veiller à sa sécurité, sanctionnée par la faute de la victime, permet l’appréhension de ce type de comportement. De surcroît, il est purement inéquitable d’exiger de l’auteur du dommage initial de réparer l’aggravation du préjudice alors que la victime ne se voit pas reprocher sa propre négligence.
82En second lieu, selon le principe directeur du procès qui veut que le juge se place au jour où il statue pour apprécier le dommage, la faute de la victime postérieure au dommage, et qui aurait contribué à son aggravation, peut utilement être prise en considération dans l’optique d’une meilleure répartition de la responsabilité.
83De plus, il nous semble qu’un troisième argument puisse être avancé pour justifier la prise en compte d’un comportement postérieur à la production du dommage dans l’évaluation de la réparation. Si la jurisprudence reste campée sur cette position, l’émergence dans notre ordre juridique d’un véritable droit de nuire370 n’est-il pas à craindre ?
84D’une part, par le refus opposé par la Cour de cassation de prendre en considération le comportement de la victime du dommage initial, cette victime se voit conférer ipso facto le droit de nuire à l’auteur du dommage. Celui-ci ne peut aujourd’hui valablement excipé du comportement de la victime qui a contribué, certes postérieurement au dommage, à aggraver son préjudice.
85D’autre part, la victime voit la consécration du droit de se nuire. En effet, son comportement n’est pas pris en considération dans l’évaluation de la réparation. Ainsi, sa conduite pourtant causale, au sens de la théorie de l’équivalence des conditions, n’a juridiquement aucune incidence.
86Il est étonnant de constater que notre droit peut être parfois équivoque. Trop protecteur des intérêts de la victime en l’espèce, il peut être extrêmement sanctionnateur à l’égard d’une autre catégorie de victime : les incapables fautifs.
SECTION 2. L’ATTÉNUATION DE LA RESPONSABILITÉ DES INCAPABLES FAUTIFS
87115 - Tendance radicale. L’exonération de responsabilité, qui résulte de la faute d’une victime capable juridiquement apparaît déjà, dans certaines hypothèses, comme critiquable. Mêlant tour à tour droit et morale, justice et sentiments, l’enjeu de l’exonération dans le procès en responsabilité est exacerbé lorsqu’il s’agit de personnes dites incapables. Le droit qui devrait assurer une protection efficace à ces personnes en état de faiblesse se montre particulièrement sévère lorsqu’il s’agit de discuter de la responsabilité des incapables majeurs (§ 1) ou de celle des mineurs (§ 2).
§ 1 - Les déments responsables
88116 - Étude délimitée. Le comportement d’une personne dite incapable, dans le cadre d’une étude consacrée aux victimes fautives, semble ne devoir être analysé qu’au titre de la responsabilité délictuelle.
89En effet, son défaut de capacité peut avoir une incidence sur sa responsabilité contractuelle mais uniquement lorsque l’incapable est saisi en tant qu’auteur d’une inexécution. Cela suppose donc, pour que l’étude de la faute contractuelle présente un intérêt, que son incapacité soit survenue postérieurement à la conclusion de la convention371. Dans le cas contraire, où l’incapacité serait antérieure à la convention, le contentieux se réduirait à l’annulation de l’acte. Les hypothèses de fautes contractuelles étant déjà considérablement réduites372, il semble opportun de ne pas en traiter ici, d’autant que la possibilité de reprocher au créancier incapable sa faute ou son fait, paraît bien exceptionnelle373. Le propos est donc centré sur la responsabilité délictuelle des incapables majeurs. Les prémices de cette responsabilité (A), qui ont vu la jurisprudence hésiter entre irresponsabilité et responsabilisation, ont laissé place à une claire responsabilité par l’émergence de l’analyse objective de la faute (B).
A/ Les prémices de la responsabilité
90117 - Problématique. Les personnes privées de compréhension et de discernement sont les déments ou encore, selon la terminologie adoptée par la loi du 3 janvier 1968 relative au droit des incapables majeurs, les personnes agissant « sous l’empire d’un trouble mental »374. Il s’agit de savoir comment une telle personne peut être déclarée responsable d’un dommage qu’elle a subi, alors que, par définition, elle ne peut pas commettre de faute.
91A cet égard, la difficulté est de concilier deux intérêts contradictoires. Le premier est celui de cette personne qui, dépourvue de la perception du bien ou du mal, peut difficilement être tenue pour responsable d’une faute375. Cependant, un intérêt contradictoire existe qui recouvre deux aspects. Un aspect général tout d’abord, dans lequel le droit ne peut subordonner la réparation d’un dommage à la qualité de la personne qui le cause. Un aspect particulier ensuite qui est celui de ne pas laisser les victimes376 sans indemnisation377. Dans l’analyse spécifique de la faute de la victime, il s’agit de savoir si le trouble qui affecte une personne doit être pris en compte sur la base des mêmes principes, selon qu’il affecte celui qui est cause du préjudice ou celui qui en est la victime ?
92118 - Le discernement. La question centrale est celle de savoir si une victime privée de discernement peut se voir reprocher sa propre faute. Qui dit faute dit nécessairement « mauvaise action »378. Dès lors, il ne devrait y avoir de faute que lorsqu’il y a aptitude à discerner le bien du mal, la bonne action de la mauvaise. Pour Carbonnier, « le discernement suppose une suffisante intelligence et une certaine force de volonté »379. Or, les personnes privées de discernement sont dépourvues de ces qualités. Pourtant le droit admet maintenant la responsabilité éventuelle de ces personnes qui, par définition, devraient être considérées, au sens commun du terme, comme des personnes irresponsables !
93119- Évolution historique. A l’époque classique, le droit romain considérait les « furiosus »380 comme irresponsables à raison de leur absence de discernement381.
94En écho, l’ancien droit français frappait le « forcené » d’une incapacité presque totale382 en sorte que, par principe, il n’était pas tenu personnellement des dommages qu’il pouvait provoquer : cette responsabilité incombait à son gardien. Cependant, la jurisprudence de l’époque383 pouvait parfois procéder à condamnation d’un insensé en admettant sa responsabilité civile. La doctrine majoritaire de la fin du xviiième siècle384, considérée par les interprètes de l’École de l’exégèse comme l’inspiratrice du Code civil, optait pour l’irresponsabilité des déments.
95A l’avènement du Code civil, les auteurs contemporains385 inclinèrent pour l’absence de responsabilité des personnes dépourvues de la faculté de discernement. La jurisprudence386 qui relayait d’ailleurs cet avis était très largement favorable à l’irresponsabilité du dément. Cependant, en doctrine387 comme parmi les tribunaux388, un mouvement de contestation vit bientôt le jour au motif qu’il était inéquitable389 de laisser sans indemnisation la victime d’un dément parfois démunie du fait du dommage qu’elle subissait.
96Cette tendance s’accentua et les décisions en faveur de l’engagement de la responsabilité du dément se multiplièrent390. Les juges furent sensibles à ces critiques et, pour permettre de procéder à l’indemnisation des victimes, trouvèrent un certain nombre de palliatifs pour nuancer cette irresponsabilité de principe des aliénés.
97Le premier moyen utilisé en vue de réduire les effets néfastes de cette irresponsabilité consistait dans l’adoption d’une conception très restrictive de la notion de démence. L’agent responsable se devait d’être en état de démence complète au moment de l’acte pour se voir reconnaître le bénéfice de l’irresponsabilité391.
98Un second procédé impliquait la responsabilité d’un dément lorsque les causes de sa folie pouvaient être recherchées dans une faute antérieure392.
99Enfin, le dément était déclaré responsable du fait des choses dont il avait la garde393. A cette époque s’opéra le basculement vers l’appréciation in abstracto de la faute qui permit le passage au principe de la responsabilité du dément.
B/ L’objectivation de la responsabilité
100120 - Appréciation in abstracto. La doctrine a acquiescé à la mise en jeu de la responsabilité des déments en raisonnant à partir « d’une définition particulière de la faute, envisagée alors in abstracto d’une manière très poussée, et dépouillée des éléments subjectifs inhérents à l’auteur du dommage »394. Les défenseurs de cette opinion395 estiment que la faute peut exister sans l’exigence de la condition d’imputabilité car pour juger de l’existence d’une faute, il ne faut tenir compte que des circonstances externes. Ainsi, l’absence de discernement constituerait une circonstance interne, par conséquent négligeable396.
101121 - Remise en question. Cette analyse est critiquable. En effet, ces mêmes auteurs, pour apprécier la faute objective, se réfèrent à « l’auteur d’un dommage (qui) n’est responsable que s’il s’est conduit sans la prudence dont fait preuve un individu avisé »397. D’autres, quant à eux, se fondent sur la théorie de la garantie selon laquelle « il faut rechercher la justification de la responsabilité non dans la personne de l’auteur du dommage, en raison de son absence de discernement, mais dans la personne de la victime dans la mesure où elle est munie d’un droit protégé »398. La critique de cette théorie semble être due à Josserand et à Esmein399, qui entraînèrent d’autres auteurs400. La faute dans l’analyse in abstracto est assimilée à une erreur de conduite. Ainsi, comment comparer la conduite d’une personne privée de discernement à celle d’un « bonus pater familias »401 ? Il est critiquable de procéder à la comparaison de deux catégories de personnes en ne tenant pas compte de leurs spécificités propres ou internes. Comment apprécier une erreur personnelle de conduite si l’on ne se réfère pas à la condition de celui auquel on l’impute ?
102122 - Consécration. Pendant un temps, la jurisprudence402 exigeait pour que la responsabilité civile soit engagée, qu’il y ait eu faculté de discernement. Cependant, un revirement de jurisprudence intervint en 1964403 par lequel la Cour de cassation opta pour l’appréciation in abstracto de la faute d’un dément. Grâce à la multiplication des plaidoyers en faveur de cette appréciation, la nécessité de responsabiliser les irresponsables l’emporta. Le législateur adopta la loi du 3 janvier 1968, et intégra l’une de ses dispositions dans l’article 489-2 du Code civil404. Malgré les mises en garde405, la jurisprudence donna à cet article un champ d’application très large. En effet, elle affirma en 1977406 que « l’article 489-2 ne prévoit aucune responsabilité particulière et s’applique à toutes les responsabilités prévues aux articles 1382 et suivants du Code civil ».
103123 - Effet de la loi nouvelle. Ainsi, la loi du 3 janvier 1968 a « aboli simplement le principe d’irresponsabilité civile de l’aliéné »407. Le corollaire de cet abandon fut le rejet de l’imputabilité comme condition de la responsabilité civile. La loi régla le problème de la réparation du dommage causé à autrui par une condamnation objective du dément à réparation. Cependant, les dispositions de l’article 489-2 du Code civil peuvent-elles s’appliquer aussi à la responsabilité de la victime ? A première vue, cela semble difficile car dans la formulation même de l’article, est visée la réparation du dommage causé « à autrui ». De plus, « l’objectif fondamental est incontestablement la réparation des dommages, sans qu’une particularité tenant à la personne de l’agent ne vienne affecter l’indemnisation »408. Si la personne privée de discernement est elle-même victime, comment lui reprocher sa propre faute ? Par définition, elle n’est pas capable de commettre une faute puisqu’elle n’a pas la possibilité de la discerner. L’enjeu est principalement de savoir si le gardien d’une chose peut opposer à un dément victime sa faute pour tenter de limiter ou d’éluder sa responsabilité ? Très justement, un auteur précisait qu’« une position réaliste commande donc d’oublier ce que l’acte aurait de répréhensible chez un adulte ou une personne sensée pour ne songer qu’à ses résultats, pour réparer et non incriminer »409. Il optait pour l’inopposabilité au dément de sa propre faute. Cependant, la jurisprudence opte ouvertement pour la possibilité d’opposer à la victime privée de discernement sa propre faute.
104124 - Extension jurisprudentielle. Par deux arrêts410 de 1989 et de 1999, la Cour de cassation consacre la possibilité pour les incapables de commettre une faute envers elles-mêmes. De plus, elle les rend justiciables de la plus grave des fautes puisque les espèces concernent l’opposabilité de fautes inexcusables au sens de l’article 3, al. 1er, de la loi du 5 juillet 1985. Ainsi, bien que la doctrine reconnaisse la possibilité d’opposer à la victime privée de discernement sa propre faute d’imprudence, elle reste très critique sur ce courant jurisprudentiel, qui exclut son indemnisation en raison d’une telle faute inexcusable, qualifiée de volontaire. Les propos de Mlle Viney sont éloquents : « L’assimilation de l’aliéné à l’homme sensé au regard des effets de la faute (qualifiée) sur l’application des règles de la responsabilité apparaît [...], dans la plupart des cas, illogique et inopportune. Mais il est un domaine où cette assimilation se heurte à une véritable impossibilité rationnelle : c’est celui des effets des fautes volontaires. Chaque fois en effet qu’une règle de responsabilité est subordonnée à la preuve d’une faute dans la définition de laquelle entre nécessairement un élément de conscience ou de volonté, l’appliquer à l’aliéné comme s’il avait été sensé relèverait d’un pur sophisme. L’usage de la fiction ne saurait en effet dépasser certaines limites sans verser dans l’absurdité »411.
105Et le juriste, dubitatif, de poser une question de bon sens, « Comment une personne pourrait-elle enfreindre volontairement une norme qu’elle ne perçoit pas ? »412.
106125 - Perspective. En définitive, si la Cour de cassation permet l’opposabilité de sa faute qualifiée d’inexcusable à une victime privée de discernement, on comprend que, par a fortiori, elle n’hésitera pas à retenir contre elle une faute ordinaire, même légère, semblable à celle requise dans le domaine de l’article 1384, al. 1er, du Code civil. La rigueur de la jurisprudence à l’égard d’un individu en état de démence, « prisonnier innocent du malheur »413, est encore plus contestable lorsque se pose la question de la responsabilité des enfants.
§ 2 - Les petits responsables1
107126 - Innocence et responsabilité. La situation de l’infans - qui désigne juridiquement « le jeune enfant qui n’a pas encore la capacité de discernement »414 - est problématique dans le régime de la responsabilité délictuelle. La plupart des dommages qu’il cause sont produit par l’intermédiaire d’une chose, et relèvent ainsi du régime de réparation de l’article 1384, al. 1er, du Code civil. Son absence de discernement pouvait laisser penser que sa responsabilité à l’égard des victimes de ces dommages ne serait pas engagée ; les critères de la garde de la chose s’accommodant difficilement de ce défaut de clairvoyance. Pourtant, la consécration de la faute objective a imprimé à la sanction des comportements des incapables mineurs un caractère automatique (A). Aujourd’hui, une partie, encore minoritaire, de la doctrine souhaite l’atténuation de la sévérité des solutions actuelles. L’analyse de la jurisprudence laisse à penser qu’un mouvement de subjectivisation de la faute objective permettrait de s’engager dans une voie simple et efficace qui verrait consacrer l’atténuation de la responsabilité de ces petites victimes (B).
A/ L’automatisme de la sanction (par le reproche d’une faute objective)
108127 - Évolution jurisprudentielle. Jusqu’à une certaine époque, la jurisprudence refusait d’admettre la responsabilité du jeune enfant, faute « d’un discernement nécessaire pour être responsable de ses actes »415 ou au motif qu’il ne pouvait être « constaté chez lui le pouvoir de maîtriser la chose »416. Toutefois, dès que l’aptitude de l’enfant à comprendre pouvait être rapportée, sa responsabilité était engagée417. En outre, pour mettre à mal l’exigence d’un discernement suffisant pour voir engager la responsabilité d’un jeune enfant, la jurisprudence reprochait aux enfants victimes leurs faits non fautifs418.
109Les prémices d’un bouleversement se firent sentir dès 1966 lorsque la jurisprudence relative à la responsabilité du dément précisa que « celui qui exerce sur une chose les pouvoirs d’usage de direction et de contrôle conserve la qualité de gardien, même s’il n’est pas en mesure d’exercer correctement lesdits pouvoirs »419. La formule laissait deviner un prochain revirement de jurisprudence dans le domaine, sensible et défendu, de la responsabilité civile des jeunes enfants.
110128 - La « révolution » de 1984. Ce revirement, qualifié de « révolution »420 « spectaculaire »421 s’opéra le 9 mai 1984, par cinq arrêts de l’Assemblée plénière de la Cour de cassation422 que même la doctrine favorable à la responsabilité des déments, reçut avec une sorte de malaise423.
111Et, tels auteurs424 de préciser, ajuste titre, que « s’il est légitime d’admettre la responsabilité de l’enfant envers autrui [...] il est en revanche navrant de devoir priver de tout ou partie de sa réparation un enfant qui survit infirme et auquel on reproche de ne pas avoir adopté le comportement d’un adulte prudent et avisé ». Par ce revirement en effet, la jurisprudence décidait d’opposer sa propre faute même à l’enfant victime pour minorer ou exclure tout droit à indemnisation. Par quel mécanisme la jurisprudence est-elle parvenue à faire qu’ « enfance ne rime plus avec innocence ? »425.
112129 - L’exclusion de l’imputabilité. Le revirement a été rendu possible par l’occultation de l’imputabilité, qui exprime « le lien qui rattache l’acte illicite et dommageable à une volonté libre »426.
113La réforme opérée par la loi du 3 janvier 1968 n’exige plus la condition d’imputabilité de la faute, jusque là requise pour engager la responsabilité des personnes incapables. Or, c’est par le truchement critiquable427 de l’article 489-2 du Code civil, que l’infans, à l’instar des incapables majeurs, peut désormais être reconnu responsable de ses actes fautifs. Par deux des arrêts du 9 mai 1984, la Cour de cassation a étendu le domaine d’application de cet article en précisant que « l’obligation à réparation prévue à l’article 489-2 du Code civil concerne tous ceux -majeurs ou mineurs - qui sous l’empire d’un trouble mental, ont causé un dommage à autrui »428 et que « l’art. 489-2 c. civ. ne prévoit aucune responsabilité particulière et s’applique à toutes les responsabilités prévues aux art. 1382 et s. dudit code »429. Cette solution n’était concevable que dans la situation d’un infans, auteur d’un dommage. Il est conforme, comme le précise M. Jourdain que « l’évolution objective de la responsabilité civile, en ce qu’elle traduit une volonté d’améliorer l’indemnisation des victimes, aboutisse à éviter l’imputabilité morale, qui en représentait une condition à la fois subjective et restrictive »430. Cependant, la suppression de la condition d’imputabilité était, à l’origine, destinée à améliorer le sort et la réparation des dommages de la victime.
114130 - Controverse. Cette appréciation, propre à la responsabilité de l’agent, transposée à la responsabilité de la victime, aboutit à aggraver la situation de cette dernière. En effet, dans le cadre d’une faute de la victime, ce raisonnement conduit à limiter, voire à exclure, son indemnisation. Néanmoins, au sein de la Haute juridiction « un divorce est en train de se produire »431 entre la première et la deuxième Chambres civiles.
115Par deux arrêts de 1996 et 1997, la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation a estimé que le comportement d’une fillette de huit ans qui avait été brûlée432 en heurtant un de ses petits camarades qui transportait une casserole d’eau bouillante, ou blessée par le mouvement d’une balançoire433 « constituait une faute ayant concouru à la réalisation du dommage ». Ces solutions suscitèrent les réactions les plus contrastées. D’aucuns434 estiment que « la solution ne surprend ni par sa fermeté, ni par sa généralité » ; d’autres, à raison, sont beaucoup plus critiques : « qu’on nous permettre de douter du bien fondé de ce système et de demander avec insistance à nos juges de faire preuve de plus d’imagination et d’humanité dans le maniement de cet instrument redoutable qu’est actuellement cette notion de faute de la victime lorsqu’il est mis en avant par les assureurs pour faire réduire la réparation des conséquences des accidents corporels »435.
116Les critiques sont d’autant plus fondées que, dans le même temps, la première Chambre civile de la Cour de cassation « excuse volontiers les imprudences ou négligences courantes chez les enfants »436. Par deux arrêts del996 et 1997, la première Chambre civile de la Cour de cassation a refusé de reprocher à des adolescents une quelconque faute pour avoir été grièvement blessés dans le cadre d’une école d’escalade alors que la victime était descendue d’une falaise en rappel sans être assurée437 ou d’avoir plongé, après avoir perdu l’équilibre, d’un ponton sur lequel la victime circulait en VTT438.
117131 - Vœux pieux. Comme le précise Mlle Viney, « il n’est guère logique de faire varier la conception de la faute de la victime, cause d’exonération, en fonction de l’exigence ou de l’absence d’exigence d’une faute de l’auteur du dommage pour fonder la responsabilité de celui-ci »439. En outre, dans les espèces soumises à la première Chambre civile de la Cour de cassation, la faute des adolescents, sur la base de l’appréciation in abstracto, ne pouvait pas être contestée. Cependant, « la Cour de cassation a préféré nier l’évidence pour éviter l’application de sa propre jurisprudence »440 en statuant en pure équité. Il reste à souhaiter que la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation, qui aujourd’hui encore441, maintient sa position, se ralliera à l’analyse de la première Chambre civile442.
118Les arrêts de la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation, pour entrer en voie de condamnation, évincent la prise en compte de la condition de discernement conformément au précepte posé par les arrêts de 1984. Cependant, n’y a-t-il pas une hypocrisie intellectuelle à revenir indirectement à ce discernement par la prise en compte de l’âge de la victime ?
B/ L’atténuation de la sanction (par la subjectivisation de la faute objective)
119132 - La rémanence de la subjectivité. La prise en compte de l’âge de la victime n’aboutit-elle pas à renouer avec l’appréciation in concreto et à s’écarter sensiblement de l’appréciation in abstracto ?
120C’est l’étude de la jurisprudence qui conduit à cette interrogation. En effet, bien que respectant le dogme édicté par les arrêts de 1984, qui évince la condition du discernement pour voir engager la responsabilité des enfants, les juges remplacent l’analyse du discernement par l’étude de critères similaires. Dans cette optique, les juges de la Cour de cassation censurent les décisions qui concluent à la responsabilité de l’enfant sans s’expliquer sur le caractère volontaire ou involontaire des gestes qu’ils lui imputent. C’est ainsi que le manque de force physique443 ou l’absence de mise en garde444 à l’attention de la jeune victime sont autant de facteurs qui permettent l’atténuation de la responsabilité du jeune enfant. Un arrêt de 1991445 est particulièrement explicite à ce sujet. Dans cette affaire, un syndicat de copropriété a été reconnu entièrement responsable, en sa qualité de gardien, du dommage subi par un enfant mineur découvert la tête coincée entre la paroi métallique de la porte coulissante du garage et le mur. Les parents de l’enfant, victime d’une strangulation suivie d’un coma post-anoxique grave, réclamèrent réparation du préjudice subi. Les juges du fond, approuvés par l’arrêt de rejet de la Cour de cassation, condamnèrent le syndicat de copropriété à réparer intégralement le dommage subi par l’enfant. Le motif décisif consista à préciser que « le simple fait d’avoir pénétré sur le terrain de la copropriété et de s’être approché de la porte du garage, en l’absence de toute interdiction et de toute mise en garde contre un quelconque danger, n’est pas en soi constitutif d’une faute ».
121Il en est de même lorsqu’il est précisé que l’enfant pouvait « normalement penser »446 qu’aucun dommage ne surviendrait ou que « n’ayant pas conscience en raison de son jeune âge »447 du danger, l’enfant ne pouvait prévoir le risque de blessure. Ce courant jurisprudentiel448 suscite les interrogations : « Par ce biais, n’en revient-on pas à apprécier la faculté de discernement de l’infans ? N’adapte-t-on pas ainsi les exigences de la faute à la capacité de l’infans d’évaluer les conséquences de ses actes ? »449.
122La doctrine favorable à l’appréciation in abstracto s’en défend et précise, au sujet de la résurgence de l’âge, que « cette prise en compte n’est que partielle et demeure objective. Et il n’est de toute façon pas question de s’attacher à l’absence de discernement de l’enfant : il s’agit là d’une circonstance interne à l’agent dont on s’abstrait habituellement pour apprécier la faute »450.
123Certains auteurs contestent, avec raison, cette interprétation. En effet, la précision de l’âge des enfants victimes semble être bien inutile dans le cadre d’une appréciation purement objective de la faute451. De plus, dans ce cadre d’analyse in abstracto de la faute « l’appréciation de l’illicéité interdit toute référence à l’âge, au comportement normal que doit avoir un enfant. En un mot, le modèle de comparaison ne peut être rajeuni »452.
124Pour parer à ces reproches, les tenants de l’appréciation in abstracto précisent qu’en prenant en considération l’âge de l’enfant cela permet « l’humanisation du type abstrait de référence (qui) demeure objectif »453.
125Cependant, il semble, malgré les vigoureux démentis, que la prise en compte de l’âge marque très nettement la réintroduction du discernement, et donc de l’imputabilité, comme critère d’appréciation de la responsabilité de l’enfant. Comment atténuer la rigueur de ce principe de raisonnement ?
126133 - Solutions envisageables. La jurisprudence, appuyée par une partie non négligeable de la doctrine, continue régulièrement de sanctionner les petits responsables. Pour éviter ce mouvement de « réification »454 des enfants, plusieurs arguments ont été avancés. Certains auteurs sont catégoriques, et prônent le retour pur et simple à l’appréciation subjective455 de la faute de l’enfant. Aujourd’hui, sous l’empire des arrêts de 1984, cette solution s’avère inenvisageable456. Pour cette raison, MM. Leduc et Radé457 prône une solution non moins catégorique qui est l’abandon pur et simple de la solution issue des arrêts de 1984.
127D’autres, plus modérés458, envisagent, pour pallier l’inéquité des solutions actuelles, de se référer aux dispositions de l’article 1384, al. 4, du Code civil relatives à la responsabilité des pères et mères. L’inconvénient majeur de ce mécanisme étant de ne présumer la faute des parents que pour le dommage causé par les enfants et non pour ceux qu’ils subissent, cet article s’avérait inutile pour régir l’hypothèse particulière de la faute de ces petites victimes envers elles-mêmes.
128Une autre série de moyens, consiste à procéder à l’institution d’une assurance familiale obligatoire459 ou d’un fond d’indemnisation460, qui permettrait tout en indemnisant le préjudice des victimes de ne pas infliger cette lourde responsabilité aux parents, seuls garants solvables, des dommages causés par leur enfant. Une proposition récente voudrait en outre voir instaurer une minorité civile461 jusqu’à l’âge de dix ans, qui bloquerait ainsi toute action en responsabilité contre ces enfants fautifs.
129Enfin, l’avant-projet de réforme du droit des obligations écarte expressément la responsabilité des victimes lorsqu’elles se trouvent privées de discernement car le dommage ne leur est pas « imputable »462.
130Ces solutions ont toutes le mérite de tenter d’atténuer la responsabilité des petites victimes mais impliquent, pour être efficace, l’intervention du législateur. N’y a-t-il pas une solution, qui ne nécessiterait pas d’intervention législative et qui pourrait être appliquée par les juges en charge de ces contentieux ?
131134 - Raisonnement combinatoire. Il semble qu’une solution puisse se dégager en procédant par une combinaison des appréciations in abstracto et in concreto de la faute selon le moment où le comportement de l’enfant est saisi. Notre réflexion est nourrie par l’analyse qu’avait faite Rodière des éléments constitutifs de la faute à l’époque où la jurisprudence exigeait encore l’analyse du discernement et de l’imputabilité pour voir engager la responsabilité des enfants.
132A l’appui de sa démonstration, il précisait que : « La faute comporte trois éléments : 1° l’existence d’un devoir d’action ou d’abstention ; 2° la violation de ce devoir ; 3° l’imputabilité de cette contravention. Or de ces trois éléments, le premier est déterminé par référence aux mœurs, aux usages, aux habitudes des bons citoyens ; c’est par des critères d’ordre objectif et communs soit à tous les individus, soit à une catégorie d’individus [...] que se détermine le contenu des obligations extracontractuelles ; aussi le premier élément de la faute est-il reconnu dans le reproche adressé à l’agent de n’avoir pas fait ce qu’il aurait dû faire, c’est à dire ce qui [...] lui était recommandé par les réactions courantes de l’individu moyen de la catégorie à laquelle il appartient. [...] L’ordre des obligations une fois précisé, la question de savoir si la transgression de son devoir est imputable à l’agent relève de l’appréciation in concreto. A ce stade, il ne s’agit plus de déterminer ce que devait faire l’agent ; son obligation est déjà définie. Il faut maintenant savoir s’il a eu tort de n’y pas satisfaire ; [...] ceci n’engage pas à se demander si l’individu était assez doué pour mesurer et respecter son devoir et laisse donc place à une seule interrogation : l’agent avait-il conscience de son devoir ? »463. Il semble que cette analyse, puisse se retrouver aujourd’hui dans notre jurisprudence contemporaine.
133135 - Modernisation prétorienne. Lorsque dans un même contentieux, il s’agit de discuter de la faute d’un individu en tant qu’auteur puis en tant que victime, il apparaît, au vu de la jurisprudence, que se détachent deux moments d’appréciation de la faute.
134Le premier moment, qui concerne l’engagement de la responsabilité, paraît être fondé sur une analyse in abstracto de la faute. Il est discuté de critères d’ordre objectif qui consistent à adresser à l’agent le reproche d’avoir accompli un acte interdit ou de ne pas avoir fait ce qu’il aurait dû faire.
135Le second moment, qui se manifeste par la discussion liée à l’exonération de responsabilité, semble être fortement teinté de subjectivité. A ce moment, il ne s’agit plus de déterminer l’obligation qui devait être accomplie, mais de savoir si cet agent a eu tort d’agir comme il l’a fait pour connaître de l’étendue de sa responsabilité. Un arrêt récent permet d’affirmer que ce raisonnement n’est pas absent de la jurisprudence actuelle.
136136 - Illustration. Un arrêt de la Cour d’appel de Paris464 semble reconnaître l’existence de ce raisonnement combinatoire. En l’espèce, deux adolescents devaient prendre le train. Le premier voyageur monta sans encombre puis le convoi commença à rouler. Le second voyageur resté sur le quai, entreprit de courir dans l’espoir de monter à bord. Les portes s’étaient refermées entre temps, le second voyageur chuta dans sa course et fut blessé. Une action fut engagée aux fins de voir reconnaître la responsabilité de l’entreprise de transport ferroviaire. Les juges du fond ont refusé l’exonération totale de la responsabilité de la S.N.C.F., à l’égard du mineur, au motif que son comportement « s’il constitue certes une infraction à la réglementation de la S.N.C.F., a été commis par un enfant de 15 ans, inapte à en mesurer toute la dangerosité ».
137Il est bien discuté en premier lieu, sur la base de l’appréciation in abstracto, du reproche objectif qui est adressé à la victime de n’avoir pas respecté la réglementation. En effet, il est explicitement précisé que son attitude constituait « une infraction », symbole de la transgression de la norme sociale que le « bon fils de famille » aurait dû respecter. Sur la base d’une appréciation strictement objective, l’analyse devrait s’arrêter là.
138Toutefois, dans un second temps, il est alors discuté de la question de savoir s’il a eu tort de commettre cette infraction. Les juges du fond refusent ainsi de reconnaître un quelconque tort dans son attitude puisqu’ils précisent qu’à l’âge de quinze ans il n’était pas apte à mesurer la dangerosité de son acte. Il y a là une analyse purement subjective qui est opérée au vu tant de l’âge que de l’aptitude à appréhender un danger.
139Cette combinaison aboutit à la réparation intégrale des dommages subis par la victime, alors que, sur le seul fondement de la faute objective, l’exonération du transporteur aurait pu, en théorie465, être prononcée.
140137 - Déduction. Dès lors, il semble que la combinaison des appréciations in abstracto et in concreto soit possible. En effet, « il y a, entre l’appréciation in concreto et l’appréciation in abstracto, moins une différence de nature qu’une différence de degré »466. Ce raisonnement combinatoire, simple à opérer, qui ne nécessite pas de réforme législative, permettrait, comme dans l’espèce analysée, de mieux appréhender la responsabilité des enfants. Peut-être alors, conformément au souhait d’Esmein : « le public (prendra) le droit au sérieux, lui (donnera) son adhésion (et ne ressentira plus) les condamnations prononcées contre un homme en raison de ses agissements [...] comme des malchances ou des abus de pouvoir »467.
141138 - Conclusion Chapitre II. Dans le contexte européen, il semble que notre Droit reste isolé quant à la question de la mise en œuvre de la sanction d’une obligation de minimiser le dommage pour la victime. Pour autant, la prise en compte d’un comportement qui aggrave le dommage postérieurement à sa production n’est pas inconnue de notre jurisprudence. La Cour de cassation vient d’exprimer, en matière délictuelle, un refus catégorique de voir retenir à l’encontre de la victime d’un dommage une quelconque circonstance postérieure au dommage initial de nature à minorer sa réparation. Il est souhaitable de nuancer cette position. En effet, il apparaît inéquitable de faire peser sur l’auteur d’un dommage l’entière réparation alors que le comportement de la victime n’a pas été sans incidence dans la production de celui-ci. De surcroît, par application de la théorie de l’équivalence des conditions pour apprécier le lien de causalité, il apparaît que le comportement de la victime qui a aggravé son préjudice peut s’interpréter comme une rupture de la chaîne causale. S’il n’apparaît pas souhaitable de transposer une obligation de minimiser le dommage telle que la connaissent nos voisins, il semble que la Cour de cassation doive revoir sa position. Par le biais de la faute de la victime sur le terrain de la responsabilité délictuelle, et par la sanction du devoir de coopération dans le cadre de la responsabilité contractuelle, il semble possible de sanctionner un comportement fautif de la victime postérieur à la production du dommage.
142Cette position apparaît d’autant plus atypique, que dans le même temps notre Droit reste éminemment sanctionnateur à l’égard des incapables victimes-fautives. La sanction est radicale car l’analyse de leur faute passe par une appréciation in abstracto de leur comportement. Au regard de la jurisprudence, il apparaît possible d’atténuer la rigueur de notre Droit par une analyse combinatoire qui passe nécessairement par la subjectivisation de l’appréciation objective de la faute de ces victimes incapables. Nous souhaitons qu’en cette matière la jurisprudence s’oriente vers ce raisonnement pour remettre au premier rang de ses préoccupations cette réflexion de Lapoyade Deschamps qui précisait que : « sur le plan humain, toute décision qui accablerait une victime, semble inopportune et dérisoire »468.
143139 - Conclusion Titre I. Certains enseignements peuvent déjà être dégagés quant à une meilleure compréhension théorique et pratique du concept de victime fautive.
144Sur le plan contractuel de la responsabilité civile, le fait du créancier s’analyse comme un événement qui modifie la position du débiteur de l’obligation inexécutée. Lorsque le comportement du créancier devient fautif il se matérialise par sa demande à l’encontre du débiteur d’exécuter la prestation promise alors que lui-même n’a pas exécuté la ou les obligations lui incombant.
145Dans le domaine de la responsabilité civile délictuelle, la faute de la victime s’analyse comme l’intervention alternative ou simultanée de la victime dans la production de l’accident générateur du préjudice subi par elle.
146La question qui se pose aujourd’hui est de savoir si notre droit se doit d’intégrer une sorte d’obligation pour la victime de minimiser son dommage, en procédant à l’extension du domaine de ces causes d’exonération ? La jurisprudence s’y refuse catégoriquement. Certes, on ne peut pas réclamer à une victime une bravoure excessive à s’exposer à une intervention chirurgicale dangereuse, ou à parer un préjudice économique grave. De fait elle est victime et n’a pas choisi de l’être ! L’auteur du dommage se doit donc de réparer le préjudice qu’il a causé. Cependant, il nous semble que ce refus de principe doit être tempéré par l’application, en matière délictuelle, du mécanisme exonératoire de la faute de la victime qui peut tout à fait cerner ce type de comportement sous réserve de l’analyse de la causalité par la théorie de l’équivalence des conditions. En matière contractuelle, bien que la jurisprudence ne se soit pas prononcée pour le moment, l’appréhension de ce comportement semble également pouvoir être pris en considération par la sanction du devoir de collaboration sur la base des articles 1134 alinéa 3 et 1135 du Code civil.
147Ce refus de la jurisprudence, qui en ce domaine protège considérablement la victime, est d’autant plus contestable, qu’en matière de réparation du dommage subi par les incapables fautifs les juges sanctionnent durement ces victimes qui pourtant devraient être mieux protégées de par leur état de faiblesse. Il est à souhaiter que par l’application d’un raisonnement combinatoire qui opère la subjectivisation de l’appréciation objective de leur faute, la jurisprudence tempère les sanctions qu’elle leur inflige.
Notes de bas de page
254 Nous utilisons les guillemets pour le terme de victime qui, bien que très explicite, nous semble inadapté dans le cadre de la responsabilité contractuelle. Par souci d’exactitude, il doit être remarqué qu’en ce domaine ce terme doit s’entendre du créancier de l’obligation inexécutée.
255 Pour la démonstration de cette nécessité v. supra, p. 85 et s., n° 65 et s.
256 S. Reifegerste, Pour une obligation de minimiser le dommage, Préface H. Muir-Watt, PUAM, 2002, v. spéc. p. 18, n° 7 et p. 19, n° 10, qui s’étonne : « Le devoir incombant à la victime [...] ne serait pas obligatoire. La victime, bien que sanctionnée pour sa passivité, ne serait pas pour autant tenue d’agir. [...] L’obligation de minimiser le dommage ne serait-elle donc pas une obligation ? Ou à la rigueur, une obligation de moindre intensité ». V. dans le même sens, C. Witz, L’obligation de minimiser son propre dommage dans les conventions internationales : l’exemple de la Convention de Vienne sur la vente internationale, Faut-il moraliser le droit français de la réparation du dommage ? Colloque du CEDAG de l’Université de Paris V, Petites affiches, Numéro spécial 232, 20 novembre 2002, p. 50, qui précise que « le devoir de minimiser le dommage n’est pas une obligation au sens strict du terme ».
257 B. Fages, Le comportement du contractant, Préface de J. Mestre, PUAM, 1997, v. spéc. p. 306, n° 566.
258 Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : Defrénois, 2003, art. 37845, p. 1574, n° 121, obs. J-L. Aubert ; D. 2003, jur. p. 2326, note J-P. Chazal ; RTD civ. 2003, p. 716, n° 4, obs. P. Jourdain ; Chronique : responsabilité civile, JCP éd. G 2004,1, 101, n° 2, 4°, obs. G. Viney.
259 J-P. Chazal, note sous Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : op. cit., v. spéc. p. 2327.
260 G Viney, Rapport de synthèse, Faut-il moraliser le droit français de la réparation du dommage ? Colloque du CEDAG de l’Université de Paris V, Petites affiches, Numéro spécial 232, 20 novembre 2002, p. 66, v. spéc. p. 71.
261 G. Viney, Chronique : responsabilité civile, JCP éd. G 2004,I, 101, n° 2, 4°, p. 20, n° 12.
262 En ce sens, P. Jourdain, Rapport introductif, Faut-il moraliser le droit français de la réparation du dommage ? Colloque du CEDAG de l’Université de Paris V, Petites affiches, Numéro spécial 232, 20 novembre 2002, p. 3, v. spéc. p. 6, n° 13.
263 S. Reifegerste, Pour une obligation de minimiser le dommage, op. cit v. spéc. p. 19, n° 12.
264 P-Y Gautier, Contre Bentham : l’inutile et le droit, RTD civ. 1995, p. 798, v. spéc. p. 820, n° 38.
265 G. Cornu, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, PUF, Quadrige, Dicos Poche, 6ème éd., 2004, p. 579, V° Minimisation des pertes.
266 S. Reifegerste, Pour une obligation de minimiser le dommage, eod. op., passim, p. 20, n° 14 ; p. 181, n° 327.
267 En ce sens, S. Reifegerste, Pour une obligation de minimiser le dommage, eod. op., p. 138, n° 222 et 223, qui précise que « c ‘est un peu comme lorsque l’accessoire suit le principal ».
268 S. Reifegerste, Pour une obligation de minimiser le dommage, op. cit., v. spéc. p. 109, n° 161.
269 Pour le détail des premières jurisprudences en la matière, v. supra, p. 36, n° 18, note 39.
270 Selon M. Elland-Goldsmith, La mitigation of damages en droit anglais, R.D.A.I., 1987, p. 347, v. spéc. p. 351, n° 16.
271 Articles 2-708, 2-712, 2-713 et 2-715 du Uniform Commercial Code, ainsi que l’article 2002 du Code civil louisianais.
272 Article 1479 du Code civil québécois entré en vigueur en 1994.
273 Article 6 :101 du nouveau Code civil néerlandais entré en vigueur en 1992.
274 Paragraphe 254 du Bgb et articles 44 et 99, alinéa 3 du Code suisse des obligations.
275 Article 1227 du Code civil italien.
276 Article 381 du Code civil hellénique.
277 Article 221 du Code civil égyptien, article 222 du Code civil syrien, article 224 du Code civil libyen et article 182 du Code civil algérien.
278 Article 34 de la loi chinoise sur les contrats économiques du 13 décembre 1981.
279 J. Domat, Les lois civiles dans leur ordre naturel, éd., Rollin et fils, Paris, 1745, Livre III, Titre V, Section III, n° 162, cité par A. Laude, L’obligation de minimiser son propre dommage existe-t-elle en droit privé français ?, Faut-il moraliser le droit français de la réparation du dommage ? Colloque du CEDAG de l’Université de Paris V, Petites affiches, Numéro spécial 232, 20 novembre 2002, p. 55, v. spéc. p. 55, note 7.
280 R-J., Pothier, Traité des obligations, 1761, Tome III, n° 162 : « J’ai vendu mon cheval à un chanoine, et il y avait une clause expresse dans le marché, par laquelle je me suis obligé de lui livrer assez à temps pour qu ‘il pût arriver au lieu de son bénéfice, et à temps pour gagner ses gros fruits. Si dans ce cas, j’ai manqué par ma faute [...] à remplir mon obligation, et que ce chanoine n’ait pu facilement trouver d’autre cheval, ni d’autre voiture, je serai tenu même des dommages intrinsèquement résultant de la perle qu’il a faite de ses gros fruits ».
281 R. Demogue, Traité des obligations en général, Source des obligations, Tome TV, Paris, éd., A. Rousseau, 1924, n° 463bis, précisait : « Lorsque la faute se produit et doit, si la victime ne fait aucun acte spécial, causer un dommage d’une certaine étendue, la victime est-elle en faute si elle ne prend pas d’elle même les mesures nécessaires pour diminuer le dommage ? L’affirmative ne fait pour nous aucun doute [...] L’utilité sociale crée donc un devoir d’arrêter le dommage si on le peut ».
282 A. Tunc, Les récents développements des droits anglais et américain sur la relation de causalité entre la faute et le dommage dont on doit réparation, R. I.D.C., 1953, p. 29, qui précise que « l’idée [...] selon laquelle la victime ne peut assister passive au déclenchement des diverses conséquences de la faute, mais doit réagir de toute sa vigueur d’homme contre ses conséquences dans la mesure où elles aggraveraient le dommage, nous semble incontestable ».
283 Article 77 de la Convention de Vienne du 11 avril 1980 relative à la vente internationale de marchandises, qui doit être soulevé d’office par le juge v. Cour fédérale de justice allemande, Bundesgerichtshof, 24 mars 1999 : D. 2000, som. com. p. 435, obs. C. Witz.
284 Principes UNIDROIT, relatifs aux contrats du commerce international, adoptés à Rome en 1994 par l’institut international pour l’unification du droit privé in JDI 1995, p. 583. L’article 9 : 505, alinéa 2 des Principes européens du droit des contrats, adoptés par la Commission sur le droit européen des contrats, dite Commission O. Lando, s’inspire des principes retenus par les principes UNIDROIT et adopte la même logique.
285 Une sorte de principe de minimisation du dommage peut être décelé dans l’article L. 172-23 du Code des assurances qui précise que « L’assuré doit contribuer au sauvetage des objets assurés et prendre toutes les mesures conservatoires de ses droits contre les tiers responsables. Il est responsable envers l’assureur du dommage causé par l’inexécution de cette obligation résultant de sa faute ou de sa négligence ».
286 S. Reifegerste, Pour une obligation de minimiser le dommage, Préface H. Muir-Watt, PUAM, 2002, v. spéc. p. 95, n° 139.
287 J-P. Chazal, note sous Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : D. 2003, jur. p. 2326. Pour l’analyse détaillée de cet arrêt, v. infra, p. 111, n° 109.
288 Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : Defrénois, 2003, art. 37845, p. 1574, n° 121, obs. J-L. Aubert ; D. 2003, jur. p. 2326, note J-P. Chazal ; RTD civ. 2003, p. 716, n° 4, obs. P. Jourdain ; Chronique : responsabilité civile, JCP éd. G 2004, I, 101, n° 2, 4°, obs. G. Viney.
289 H. Muir-Watt, La modération des dommages en droit anglo-américain, Faut-il moraliser le droit français de la réparation du dommage ? Colloque du CEDAG de l’Université de Paris V, Petites affiches, Numéro spécial 232, 20 novembre 2002, p. 45, v. spéc. p. 47. V. dans le même sens G. Viney, Rapport de synthèse, Faut-il moraliser le droit français de la réparation du dommage ? Colloque du CEDAG de l’Université de Paris V, Petites affiches, Numéro spécial 232, 20 novembre 2002, p. 66, v. spéc. p. 69.
290 G. Viney, Rapport de synthèse, Faut-il moraliser le droit français de la réparation du dommage ? Colloque du CEDAG de l’Université de Paris V, op. cit., v. spéc. p. 70.
291 P. Jourdain, obs sous Cass 2ème civ ; 19 juin 2003 : RTD civ. 2003, p. 716, v. spéc. p. 719.
292 Pour l’analyse détaillée des fondements juridiques qui peuvent pallier l’absence dans notre droit de cette obligation, v. infra p. 99, n° 87 et s.
293 C. Coulon, note sous CA Paris, 22 juin 2001 : D. 2002, jur., p. 843, v. spéc. p. 845, n° 8.
294 En ce sens, C. Witz, L’obligation de minimiser son propre dommage dans les conventions internationales : l’exemple de la Convention de Vienne sur la vente internationale, Faut-il moraliser le droit français de la réparation du dommage ? Colloque du CEDAG de l’Université de Paris V, Petites affiches, Numéro spécial 232, 20 novembre 2002, p. 50, v. spéc. p. 52, qui précise que l’expression à consacrer n’est pas celle d’obligation mais celle « d’incombance de minimiser le dommage ».
295 S. Licari, Pour la reconnaissance de la notion d’incombance, RRJ Droit prospectif, 2002-2, p. 703, v. spéc. p. 706.
296 D. Mazeaud, Loyauté, solidarité, fraternité, la nouvelle devise contractuelle ?, Mélanges François Terré, 1999, p. 603.
297 S. Reifegerste, Pour une obligation de minimiser le dommage, Préface H. Muir-Watt, PUAM, 2002, v. spéc. p. 24, n° 19.
298 A. Laude, L’obligation de minimiser son propre dommage existe-t-elle en droit privé français ?, Faut-il moraliser le droit français de la réparation du dommage ? Colloque du CEDAG de l’Université de Paris V, Petites affiches, Numéro spécial 232, 20 novembre 2002, p.g55, v. spéc. p. 55.
299 En ce sens S. Reifegerste, Pour une obligation de minimiser le dommage, eod. op., passim, v. spéc. p. 122, n° 192 et p. 136, n° 219 et 220.
300 Y. Picod, L’obligation de coopération dans l’exécution du contrat, JCP éd. G 1988, I, 3318, v. spéc. n° l et 15, qui précise qu’« Exécuter loyalement [...] c’est non seulement s’abstenir de toute mauvaise foi, mais c’est aussi exécuter en se rendant utile à son cocontractant, en lui procurant la plus grande satisfaction possible, au-delà du cadre strict des stipulations contractuelles ». Et de continuer : « Le critère est simple : chaque fois que le créancier pourra, sans sacrifier ses intérêts, être utile à son débiteur lors de l’exécution de ses obligations, une obligation de coopération lui sera imposée ».
301 Ch. André, note sous CA Douai, 15 mars 2001 : D. 2002, jur. p. 307, v. spéc. p. 312. En l’espèce, le litige opposait la société Auchan à une société chargée, par le distributeur, de mettre en place un système informatique destiné au gardiennage et à la surveillance des hypermarchés. Le fournisseur réalisait 90 % de son chiffre d’affaires avec la société Auchan, qui a rompu ses relations avec son fournisseur. Les juges du fond condamnent la société Auchan pour rupture fautive des relations commerciales, la brutalité de la rupture ressortant de l’absence de préavis écrit dans un délai suffisant, ce qui caractérise une faute obligeant à réparer le préjudice. Cependant, la Cour relève que le fournisseur avait consenti à la subordination économique car elle avait « intérêt à cette subordination ne serait-ce qu’en fonction des revenus procurés. [...] En revanche, (la société fournisseur) ne pouvait ne pas être consciente des risques qu’elle encourait du chef d’une telle dépendance. Ne pouvant - et ne devant - escompter une perpétuation des relations avec la société Auchan, les dirigeants de la société (fournisseur) auraient dû concevoir une solution de remplacement [...] En agissant comme ils ont fait, les dirigeants de la société (fournisseur) ont délibérément accepté un risque [...] La part de ce risque est évaluée à 25 % ».
302 Article 1144, alinéa 1er du Code civil.
303 G. Viney, Rapport de synthèse, Faut-il moraliser le droit français de la réparation du dommage ? Colloque du CEDAG de l’Université de Paris V, Petites affiches, Numéro spécial 232, 20 novembre 2002, p. 66, v. spéc. p. 68 ; v. également du même auteur, Chronique : responsabilité civile, JCP éd. G 2004, I, 101, n° 2, 4°, p. 20, n° 12.
304 En ce sens, A. Laude, L’obligation de minimiser son propre dommage existe-t-elle en droit privé français ?, Faut-il moraliser le droit français de la réparation du dommage ? Colloque du CEDAG de l’Université de Paris V, Petites affiches, Numéro spécial 232, 20 novembre 2002, p. 55, v. spéc. p. 59.
305 S. Reifegerste, Pour une obligation de minimiser le dommage, Préface H. Muir-Watt, PUAM, 2002, v. spéc. p. 122, n° 192.
306 Pour l’analyse détaillée des fonctions interprétative et adaptative de la bonne foi qui ne seront pas développées dans la présente étude v. S. Reifegerste, Pour une obligation de minimiser le dommage, eod. op., v. spéc. p. 135 et 136, n° 217.
307 S. Reifegerste, Pour une obligation de minimiser le dommage, eod. op., v. spéc. p. 139, n° 226 qui précise que « L’invocation immodérée des sanctions contractuelles ou l’exercice intempestif par le créancier d’une action afin de faire sanctionner un manquement par le débiteur à une obligation contractuelle, sans prendre aucune mesure afin de remédier à la situation qui découle de cette inexécution, peut être ressenti comme l’exercice abusif d’un droit contractuel ».
308 En ce sens, Cass. 1ère civ., 16 juillet 1998 : JCP éd. G 1999, II, 10000, note B. Fages ; CA Paris, 22 juin 2001 : D. 2002, jur. p. 843, note C. Coulon.
309 Cass. com., 5 décembre 1995 : RTD civ. 1996, p. 899, obs. J. Mestre. V. également Cass. com., 31 mai 1994 : RTD civ. 1995, p. 105, obs. J. Mestre ; RJDA 1994, p. 871, n° 1129. En l’espèce, un gérant de station service, avec l’agrément de la société pétrolière, avait donné son commerce en location-gérance. Trois ans plus tard, le cessionnaire cessa ses paiements. La société pétrolière a cependant poursuivi ses livraisons sans en aviser le cédant ce qui lui aurait permis de résilier le contrat de location-gérance. Ce comportement est sanctionné par le rejet de la demande de paiement engagée contre le cédant sur le fondement du manquement au devoir de loyauté.
310 C. Coulon, note sous CA Paris, 22 juin 2001 : D. 2002, jur. p. 843, v. spéc. p. 844, n° 4.
311 A. Laude, L’obligation de minimiser son propre dommage existe-t-elle en droit privé français ?, Faut-il moraliser le droit français de la réparation du dommage ? Colloque du CEDAG de l’Université de Paris V, Petites affiches, Numéro spécial 232, 20 novembre 2002, p. 55, v. spéc. p. 59.
312 Pour l’analyse détaillée, v. supra, p. 95, n° 80.
313 En ce sens P. Jourdain, Rapport introductif, Faut-il moraliser le droit français de la réparation du dommage ? Colloque du CEDAG de l’Université de Paris V, Petites affiches, Numéro spécial 232, 20 novembre 2002, p. 3, v. spéc. p. 6, n° 13 et 14 ; A. Laude, L’obligation de minimiser son propre dommage existe-t-elle en droit privé français ?, Faut-il moraliser le droit français de la réparation du dommage ? Colloque du CEDAG de l’Université de Paris V, Petites affiches, Numéro spécial 232, 20 novembre 2002, p. 55, v. spéc. p. 59 ; S. Reifegerste, Pour une obligation de minimiser le dommage, Préface H. Muir-Watt, PUAM, 2002, v. spéc. p. 153, n° 257.
314 P-Y. Gautier, Contre Bentham : l’inutile et le droit, RTD civ. 1995, p. 798, v. spéc. p. 822, n° 44 ; v. également - mais plus nuancée - G. Viney, Chronique : responsabilité civile, JCP éd. G 2004, I, 101, n° 2, 4°, p. 20, n° 12.
315 A. Laude, L’obligation de minimiser son propre dommage existe-t-elle en droit privé français ?, op. et loc. cit.
316 P. Jourdain, Rapport introductif, Faut-il moraliser le droit français de la réparation du dommage ? Colloque du CEDAG de l’Université de Paris V, op. cit., v. spéc. p. 6, n° 13 et 14.
317 S. Reifegerste, Pour une obligation de minimiser le dommage, op. cit., p. 154, n° 258.
318 J-P. Chazal, note sous Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : D. 2003, jur. p. 2326, v. spéc. p. 2328. V. dans le même sens, S. Reifegerste, Pour une obligation de minimiser le dommage, Préface H. Muir-Watt, PUAM 2002, passim, p. 174, n° 313 et 314 et p. 181, n° 327 mais qui utilise cette argumentation pour justifier d’un fondement causaliste de l’obligation de minimiser le dommage.
319 Cass. 2ème civ., 27 mars 2003 : Bull. civ. II, n° 76 ; JCP éd. G 2003, IV, 1935 ; G. Viney, Chronique : responsabilité civile, JCP éd. G 2004, I, 101, n° 3, 1°, p. 20, n° 13.
320 V. en ce sens de manière plus nuancée P. Jourdain, obs. sous Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : RTE) civ. 2003, p. 716, n° 4, v. spéc. p. 717 et 718.
321 G. Viney, Chronique : responsabilité civile, JCP éd. G 2004, I, 101, n° 2, 4°, p. 20, n° 12 ; v. dans le même sens P. Jourdain, Rapport introductif, Faut-il moraliser le droit français de la réparation du dommage ? Colloque du CEDAG de l’Université de Paris V, Petites affiches, Numéro spécial 232, 20 novembre 2002, p. 3, v. spéc. p. 7, n° 16.
322 J-P. Chazal, note sous Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : D. 2003, jur. p. 2326, v. spéc. p. 2327.
323 V. pour les premiers arrêts en la matière : CA Douai, 4 novembre 1900 : D. P. 1901, 2, p. 307 ; CA Rennes, 10 décembre 1901 : D. P. 1902, 2, p. 299 ; CA d’Aix, 17 janvier 1903 : D. P. 1904, 2, p. 97 ; Cass. req., 15 février 1910 : D. 1911, l, p. 303.
324 TGI Laval, 13 février 1967 : D. S. 1968, jur. p. 39, note M. Le Roy.
325 En ce sens M. Le Roy, note sous TGI Laval, 13 février 1967, D.S. 1968, jur p. 39, v. spéc. p. 40.
326 CA Paris, 11 mai 1968 : Gaz. Pal. 1968, 2, p. 118 ; v. également pour une même motivation CA Chambéry, 22 décembre 1947 : D. S. 1948, jur. p. 172. V. enfin Cass. 2ème civ., 13 janvier 1966 : Gaz. Pal. 1966, 1, p. 375, qui admet le refus du père de la victime de faire procéder aux traitements au regard du coût excessif. En l’espèce, un mineur âgé de 16 ans fut blessé au cours d’une partie de chasse. Les juges du fond ont condamné l’auteur du coup de feu à la réparation de l’entier préjudice sans tenir compte, selon les dires de l’auteur du pourvoi, « que l’état de la victime serait une conséquence de l’abstention du père de faire donner à son enfant les soins appropriés, alors qu’une telle abstention, cause pour partie du dommage, aurait conduit à un partage de responsabilité ». Le pourvoi est rejeté aux motifs « qu’il n’est pas loisible à (l’auteur du coup de feu) [...] de reprocher (au père de la victime) de ne pas avoir fait donner à son fils les soins qui apparaissaient nécessaires pour améliorer son état, alors qu’il s’agissait d’appliquer des traitements longs et coûteux dont sa situation de fortune modeste ne lui permettait pas d’assumer la charge ».
327 H. L. et J. Mazeaud, et A. Tunc, Traité théorique et pratique de la responsabilité civile délictuelle et contractuelle, Tome II, 5ème éd., 1960, p. 470, n° 1474-2.
328 J. Carbonnier, note sous Trib. civ. Lille, 18 mars 1947 : D. 1947, jur. p. 507, cité par P-J. Doll, Des conséquences pécuniaires du refus par la victime d’un accident de se soumettre à une opération chirurgicale améliorante après consolidation des blessures, JCP éd. G. 1970, I, 2351.
329 Cass. crim. 3 juillet 1969 : JCP 1970, II, 16447, obs. R. Savatier ; RTD civ. 1969, p. 782, obs. G. Durry.
330 R. Savatier, obs. sous Cass. crim. 3 juillet 1969 : JCP 1970, II, 16447, qui précise que cet arrêt bloque un « certain impérialisme médical ».
331 Cass. crim., 30 octobre 1974 : RTD civ. 1975, p. 107, obs. G. Durry ; JCP 1975, II, 18038, obs. L. Mourgeon ; D. S. 1975, jur. p. 178, note R. Savatier.
332 R. Savatier, note sous CA Lyon, 6 juin 1975 : D. S. 1976, jur. p. 415, v. spéc. p. 416, a).
333 L. Mourgeon, obs. sous Cass. crim., 30 octobre 1974 : JCP 1975, II, 18038.
334 L. Mourgeon, obs. sous CA Lyon, 6 juin 1975 : JCP 1976, n, 18322.
335 Pour exemple, v. TGI Paris, 13 mai 1981 : JCP éd. G. 1982, n, 19887, obs. F. Chabas. En l’espèce, à la suite d’un accident de la circulation, une intervention chirurgicale sous anesthésie locale n’a pu être poursuivie du fait de l’opposition de la victime. Postérieurement sont apparus des signes d’infections qui justifièrent l’hospitalisation. Malgré le comportement agressif du malade, l’intervention nécessaire fut néanmoins pratiquée. Aux dires d’experts « il était inévitable que l’intervention soit refusée parce que cette intervention était douloureuse - que le malade était anxieux et phobique - qu’il ne mesurait pas le danger qu’il courait à ne pas être opéré et qu’il n’avait donc pas son libre arbitre ». Pour le Tribunal de Grande Instance « il n’est possible ni d imposer une intervention à un malade lucide, ni de reprocher à un malade son opposition à une exploration et à une intervention subjectivement inquiétantes, alors que s’il se trouve devant une alternative dont le terme meilleur objectivement lui paraît insupportable, l’origine en incombe à l’auteur responsable des lésions initiales et à leur développement. [...] La seule limite qui puisse être posée à ce principe se situe dans l’excès qui consisterait à refuser des examens et des soins anodins ».
336 I. Lucas-Gallay, Le domaine d’application du droit au refus de soins : une peau de chagrin, Petites Affiches du 13 janvier 1997, n° 6, p. 6.
337 CE, 29 juillet 1994 : R. T. D.S. S. 1995, p. 60 note M. Dubouis ; Gaz. Pal. 1995, 1, pan. p. 72.
338 CE, 26 octobre 2001 : R.F.D.A. 2002, p. 155, note D. De Bechillon.
339 CAA Paris, 9 juin 1998 : R.F.D.A. 1998, p. 1231.
340 Pour la réaffirmation du droit pour le médecin d’imposer des soins à un patient quand il s’agit d’un acte médical indispensable à sa survie, v. CE, 16 août 2002 : D. 2004, som. som. p. 602.
341 I. Lucas-Gallay, Le domaine d’application du droit au refus de soins : une peau de chagrin, Petites Affiches du 13 janvier 1997, n° 6, p. 6, v. spéc. p. 8.
342 En ce sens pour la doctrine civile : Ph. le Tourneau et L. Cadiet, Droit de la responsabilité et des contrats, Dalloz action, 2002/2003, p. 507, n° 1906 ; I. Lucas-Gallay, Le domaine d’application du droit au refus de soins : une peau de chagrin, eod. loc. ; pour la doctrine administrative : M. Dubouis, Doit-on sanctionner le médecin qui respecte le refus du malade de consentir à un traitement ?, R. T. D.S. S. 1995, p. 60.
343 Nouveau Code de déontologie médicale issu du Décret n° 95-1000 du 6 septembre 1995 : D. 1995, leg. p. 452.
344 Loi n° 94-653 du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain : JCP 1994, m, 66973.
345 Cass. 2ème civ., 19 mars 1997 : Bull. civ. II, n° 86 ; RTD civ. 1997, p. 632, obs. J. Hauser et p. 675, obs. P. Jourdain ; JCP éd. G 1997,1, 4070, obs. G. Viney.
346 J. Hauser, obs. sous Cass. 2ème civ., 19 mars 1997 : op. cit., v. spéc. p. 632, n° 2 ; v. dans le même sens D. Fenouillet, Éditions du Juris-Classeur Civil 1997, Respect et protection du corps humain. Protection de la personne, Le corps humain : Fasc. 12, art. 16 à 16-12, p. 10, n° 33.
347 P. Jourdain, obs. sous Cass. 2ème civ., 19 mars 1997 : op. cit., v. spéc. p. 677, n° 7.
348 En ce sens, M-A. Agard, Ne t’aide pas, le ciel t’aidera quand même, Resp. civ. et ass. 2004, chron. n° 2, p. 6, v. spéc. p. 7 ; G. Viney, et P. Jourdain, Traité de droit civil sous la direction de Jacques Ghestin, Les effets de la responsabilité, LGDJ, 2ème éd., 2001, p. 230, n° 123.
349 B. Starck, H. Roland, et L. Boyer, Obligations. I- Responsabilité délictuelle, Litec, 5ème éd., 1996, p. 539, n° 1347.
350 En ce sens, I. Lucas-Gallay, Le domaine d’application du droit au refus de soins : du nouveau ?, Petites Affiches du 8 mars 1999, n° 47, p. 16, v. spéc. p. 17.
351 G. Viney, obs. sous Cass. 2ème civ., 19 mars 1997 : JCP éd. G 1997, I, 4070, v. spéc. n° 30.
352 Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé : JO n° 54 du 5 mars 2002, p. 4118. Pour l’analyse détaillée des apports de cette loi, v. entre autres, L. Angeletti, La responsabilité médicale après la loi du 4 mars 2002, RRJ Droit prospectif, 2003-3, p. 1965 ; A. Laude (sous la direction d’), La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, Petites Affiches du 19 juin 2002, numéro spécial 122 ; Ch. Radé, La réforme de la responsabilité médicale après la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, Resp. civ. et assur., 2002, chron. n° 7, p. 4.
353 L’article L. 1110-5 du Code de santé publique précise que « Toute personne a, compte tenu de son état de santé et de l’urgence des interventions que celui-ci requiert, le droit de recevoir les soins le plus appropriés et de bénéficier des thérapeutiques dont l’efficacité est reconnue et qui garantissent la meilleure sécurité sanitaire au regard des connaissances médicales avérées. Les actes de prévention, d’investigation ou de soins ne doivent pas, en l’état des connaissances médicales, lui faire courir de risques disproportionnés par rapport au bénéfice escompté ».
354 Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : Defrénois, 2003, art. 37845, p. 1574, n° 121, obs. J-L. Aubert ; D. 2003, jur. p. 2326, note J-P. Chazal ; RTD civ. 2003, p. 716, n° 4, obs. P. Jourdain ; Chronique : responsabilité civile, JCP éd. G 2004, I, 101, n° 2, 4°, obs. G. Viney.
355 Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : JCP éd. G 2003, IV, 2427.
356 En ce sens, M-A. Agard, Ne t’aide pas, le ciel t’aidera quand même, Resp. civ. et ass. 2004, chron. n° 2, p. 6, v. spéc. p. 7.
357 P. Jourdain, obs. sous Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : RTD civ. 2003, p. 716, n° 4, v. spéc. p. 717 et 718.
358 Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : JCP éd. G 2003, IV, 2428 ; D. 2003, IR. p. 1881.
359 En ce sens M-A. Agard, Ne t’aide pas, le ciel t’aidera quand même, eod. op.
360 En ce sens M-A. Agard, Ne t’aide pas, le ciel t’aidera quand même, Ibid ; J-L. Aubert, obs. sous Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : Defrénois, 2003, art. 37845, p. 1574, n° 121, v. spéc. p. 1576 ; J-P. Chazal, note sous Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : D. 2003, jur. p. 2326, v. spéc. p. 2329.
361 J-L. Aubert, obs. sous Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : Defrénois, 2003, art. 37845, p. 1574, n° 121, v. spéc. p. 1576 ; G. Viney, obs. sous Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : Chronique : responsabilité civile, JCP éd. G 2004, I, 101, n° 2,4°, n° 12, p. 20.
362 En ce sens J-P. Chazal, note sous Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : D. 2003, jur. p. 2326, v. spéc. p. 2329 ; P. Jourdain, obs. sous Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : RTD civ. 2003, p. 716, n° 4, v. spéc. p 718.
363 V. J-P. Chazal, note sous Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : Ibid, v. spéc. p. 2327 ; P. Jourdain, obs. sous Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : ibid. V. également pour la responsabilité contractuelle Cass. 1ère civ., 15 novembre 2005 : JurisData n° 2005-030720.
364 G. Viney, obs. sous Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : eod. op.
365 J-P. Chazal, note sous Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : Ibidem.
366 J-P. Chazal, note sous Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : Ibid, « A la réflexion, aucun des arguments qui peuvent être avancés à l’appui de cette nouvelle jurisprudence ne sont convaincants. [...] réduire l’indemnisation due à la victime afin de tenir compte de son comportement postérieur au fait dommageable ne porte aucunement atteinte au principe de la réparation intégrale, lequel n’a pas pour effet d’imputer à l’auteur d’un dommage des conséquences dépourvues de lien direct avec le fait causal ».
367 Avant-projet de réforme du droit des obligations (Articles 1101 à 1386 du Code civil) et du droit de la prescription (Article 2234 à 2281 du Code civil), Rapport à Monsieur Pascal Clément, Garde des Sceaux, Ministère de la Justice, 22 septembre 2005, disponible sur http://www.justice.gouv.fr/publicat/rapport/rapportcatalaseptembre2005.pdf, Livre Troisième -Titre III, Des obligations, Sous-titre III - De la responsabilité civile (Articles 1340 à 1386), Chapitre III : Effets de la responsabilité, Section 1 Principes, § 2 - Les dommages-intérêts, art. 1373, p. 162.
368 G. Viney, Avant-projet de réforme du droit des obligations (Articles 1101 à 1386 du Code civil) et du droit de la prescription (Article 2234 à 2281 du Code civil), Ibid, Livre Troisième -Titre III, Des obligations. Sous-titre III - De la responsabilité civile (Articles 1340 à 1386), Exposé des motifs, p. 149.
369 P. Jourdain, obs. sous Cass. 2ème civ., 19 juin 2003 : RTD civ. 2003, p. 716, n° 4, v. spéc. p. 719 et 720.
370 J. Karila de Van, Le droit de nuire, RTD civ. 1995, p. 533, v. spéc. p. 554, qui précise que : « Dans la mesure où le droit a pour but de régenter l’exercice des droits par les individus [...] il est évident qu’il ne saurait admettre l’existence d’un droit de nuire en tant que tel ».
371 Voir en ce sens et pour l’étude détaillée de cette hypothèse, M. Daury-Fauveau, La faute de l’aliéné et le contrat, JCP. éd. G 1998, I, 160 et C. Ophèle, Le droit à dommages-intérêts du créancier en cas d’inexécution contractuelle due à la démence du débiteur, RGDA, 1997, n° 2, p. 453.
372 J. Carbonnier, Essais sur les lois, 2ème éd., 1995, Defrénois, p. 67, note 2, précise qu’« il n’est pas certain [...] que la jurisprudence accepterait d’appliquer le nouvel article 489-2 à une culpa in contrahendo (pour ne rien dire de la responsabilité proprement contractuelle, où c’est le contraire qui semble à peu près certain) ». Dans le même sens J. Massip, obs. sous Cass. 1ère civ., 28 janvier 2003 : Defrénois, 2003, n° 17, art. 37802, p. 1088, n° 83, v. spéc. p. 1089, qui précise qu’« on imagine mal qu’un contractant sous l’empire d’un trouble mental puisse commettre une faute contractuelle qui suppose, nous semble-t-il, la conscience de son auteur ».
373 V. cependant Cass. 1ère civ., 28 janvier 2003 : ibid. En l’espèce, un majeur sous sauvegarde de justice avait effectué simultanément une donation au profit de sa fille et s’était portée caution solidaire et hypothécaire de cette dernière pour le remboursement d’un prêt. Suite à l’aggravation de son état mental, ce donateur-caution a été placé sous tutelle. Son tuteur a demandé l’annulation pour insanité d’esprit des actes de donation et de cautionnement. Les juges du fond ont accueilli ces demandes, et prononcé la nullité des deux actes. Ils ont cependant exigé que l’incapable soit tenu de garantir le prêteur des conséquences de leur annulation aux motifs que l’incapable « avait commis une faute ayant causé un dommage au prêteur dès lors que (sa fille) était sans ressources et que le prêt n’aurait pas été accordé sans l’engagement de la caution ». La Cour de cassation rejette le pourvoi aux motifs que « la cour d’appel avait retenu à bon droit que la nullité du contrat n’excluait pas l’action en responsabilité contre le contractant dont la faute a été, en l’espèce, caractérisée ».
374 Expression consacrée par le législateur dans l’article 489-2 du Code civil.
375 En ce sens v. J. Von Ihering, De la faute en droit privé. Traduction O. de Meulenaere, éd., A. Marescq, 1880, p. 48, qui affirme que « ce n’est que lorsque l’intelligence existe que l’homme peut être rendu responsable de ses actions ». V. également J-J. Burst, La réforme du droit des incapables majeurs et ses conséquences sur le droit de la responsabilité civile extracontractuelle, JCP éd. G 1970, I, 2307, v. spéc. n° 35, qui précise qu’« une faute ne peut être mise à la charge de son auteur que dans la mesure où on peut lui en faire le reproche. Par conséquent, la personne qui ne comprend pas la portée de ses actes ne peut pas se voir imputer de faute ».
376 J-J. Burst, La réforme du droit des incapables majeurs et ses conséquences sur le droit de la responsabilité civile extra-contractuelle, JCP éd G 1970, I, 2307, v. spéc. n° l, qui précise qu’« en face de l’intérêt de la personne à protéger se dressait un intérêt antithétique, celui de sa victime ».
377 Bien qu’il soit peu probable que ces victimes ne soient pas indemnisées, quand bien même la responsabilité des personnes privées de discernement ne serait pas reconnue au regard des mécanismes assurantiels. Pour une démonstration éloquente, v. S. Markesinis Basil, La perversion des notions de responsabilité civile délictuelle par la pratique de l’assurance, RTD comp., 1983, p. 301.
378 Définition proposée par le Dictionnaire Larousse, éd., 1979, p. 1193, V° Faute.
379 J. Carbonnier, Droit civil, Les obligations, Tome 4, PUF, Thémis droit privé, 22ème éd., 2000, p. 415, n° 229.
380 J-Ph. Lévy et A. Castaldo, Histoire de droit civil, Précis Dalloz, Collection droit privé, 1ère éd., 2002, p. 236, n° 197, qui précisent que le régime de l’irresponsabilité du fou furieux posé par la loi des XII Tables (449 av. J-C.) était également appliqué à l’ensemble des individus qui souffraient de troubles mentaux (amentes, dementes, mente capti).
381 J. Macqueron, Histoire des obligations, Le droit romain, Publications du centre d’histoire institutionnelle et économique de l’antiquité classique, Série mémoires et travaux n° l, Aix-en-provence, 2ème éd., 1975, p. 281, explique que dans le Digeste d’Ulpien (223 ap. J-C.) « les fous [...] incapables de discernement ne peuvent commettre (de) délit ».
382 En ce sens v. J-Ph. Lévy et A. Castaldo, Histoire de droit civil, Précis Dalloz, Collection droit privé, 1ère éd., 2002, p. 237, n° 198.
383 V. Orsat, De l’imputabilité en matière de responsabilité civile, Thèse, Paris, éd., A. Rousseau, 1912, p. 79, qui cite un arrêt du Parlement de Paris en date du 10 septembre 1683.
384 R-J. Pothier, Traité de droit civil et de jurisprudence française, Tome 1 et 2, 1781, p. 57, n° l18, qui explique au sujet des délits et des quasi-délits qu’« il n’y a que les personnes qui ont l’usage de la raison qui en soient capables ; car celles qui ne sont pas raisonnables, tels que sont [...] les insensés, ne sont capables ni de malignité ni d’imprudence ».
385 En ce sens, V. Marcadé, Explication théorique et pratique du Code Napoléon, Tome V, 5ème éd., Librairie du Conseil d’État, 1859, p. 265 ; A-M. Demante et E. Colmet Santerre, Cours analytique de Code Napoléon, Tome V, Livre III, éd., H. Plon, 1863, p. 680, n° 364bis, qui précisent qu’« il est nécessaire que l’acte puisse être reproché à celui qui l’a commis, par conséquent, il faut que l’action ou l’omission émane d’une personne ayant la responsabilité morale de ses actes. Un [...] fou n’a pas la conscience de ses actes, et le tort causé par lui n’est pas le résultat de sa faute ».
386 Cass. req., 14 mai 1866 : D. P. 1867, 1, p. 297, qui précise que « par l’emploi de l’expression faute, la loi suppose évidemment un fait dépendant de la volonté, qu’un insensé n’ayant pas de volonté ne saurait être responsable, même civilement, des faits par lui accomplis pendant l’état de démence ». V. également en ce sens CA Lyon, 22 février 1871 : D. 1872, 2, p. 133 ; Cass. req., 21 octobre 1901 : D. P. 1901, 1, p. 524, rapport de M. le conseiller Letellier ; Cass. req., 30 juillet 1906 : D. P. 1907, 1, p. 315 ; CA Montpellier, 22 janvier 1935 : D. H. 1935, jur. p. 140 ; CA Paris, 14 mars 1935 : D. H. 1935, jur. p. 240.
387 En faveur de l’engagement de la responsabilité civile du dément, G. Ripert, Responsabilité d’un épileptique, Rev. crit. législ. et jurisp. 1909, p. 128, qui précise que « C’est une faute d’être aliéné comme c’est une faute d’être maladroit » ; M. Teisseire, Essai d’une théorie générale sur le fondement de la responsabilité, Thèse, Aix, 1901.
388 CA Montpellier 31 mai 1866 : D. S. 1866, 2, p. 259.
389 G. Baudry-Lacantinerie et L. Barde, Traité théorique et pratique du droit civil des obligations, 15ème vol. , 3ème éd., 1908, Tome IV, n° 2859, qui constatent que « l’irresponsabilité des fous peut en pratique, aboutir à des résultats qui révoltent la conscience tant ils sont contraires à l’équité ; un fou millionnaire tue un ouvrier père de famille et dont le travail est la seule ressource du ménage [...] Le fou ne doit aucune réparation et la famille de l’ouvrier se trouvera désormais sans pain ».
390 Trib. civ. Pau, 19 octobre 1945 : S. 1947, 2, p. 25, note Nerson ; Trib. civ. Yvetot, 25 juillet 1946 : JCP 1946, I, 3299, note A. S. ; Trib. civ. Avignon, 23 novembre 1949 : D. 1950, jur. p. 153 ; CA Lyon, 15 octobre 1955 : JCP 1956, I, 9156, note P. Esmein ; CA Riom, 12 décembre 1955 : JCP 1956, I, 9191.
391 En ce sens, Cass. 2ème civ., 15 décembre 1965 : D. S. 1966, jur. p. 393.
392 CA Paris, 14 mars 1935 : D. H. 1935, jur. p. 241 ; Cass. 2ème civ., 15 décembre 1965 : RTD civ., 1966, p. 353, obs. R. Rodière. Dans l’espèce soumise à la Cour de cassation, il s’agissait d’un individu qui, du fait de son état d’ébriété avait tiré deux coups de feu sur un habitant du village. La Cour de cassation décide, en substance, qu’en continuant de s’alcooliser alors qu’il connaissait son état mental, l’auteur du dommage avait commis une faute qui engageait sa responsabilité.
393 Cass. 2ème civ., 30 juin 1966 : Bull, civ., Il, n° 720.
394 F. Terré, Ph, Simler, et Y. Lequette, Droit civil. Les obligations, Précis Dalloz, Collection droit privé, 7ème éd., 1999, p. 654, n° 700.
395 N. Dejean de la Bâtie, obs. sous Cass. 2ème civ., 18 décembre 1964 : JCP 1965, II, 14304.
396 H. L. et J. Mazeaud, et F. Chabas, Leçons de droit civil, Tome II / Premier volume. Obligations, Théorie générale, Montchrestien, 9ème éd., 1998, p. 459, n° 449, qui précisent que « de ce que le type de comparaison doit être placé dans les circonstances seulement externes où se trouvait le défendeur, il résulte en tout cas que le fou ou l’infans peuvent être civilement responsables ».
397 H. L. et J. Mazeaud, et F. Chabas, Leçons de droit civil. Tome Il/Premier volume. Obligations, Théorie générale, op. cit ;, p. 458, n° 448.
398 J-J. Burst, La réforme du droit des incapables majeurs et ses conséquences sur le droit de la responsabilité civile extra-contractuelle, JCP éd. G 1970,1, 2307.
399 L. Josserand, Cours de droit civil positif Tome 2, 3ème éd., 1939, n° 457 ; P. Esmein, La faute et sa place dans la responsabilité civile, RTD civ., 1949, p. 481, v. spéc. n° l : « Quand on déclare fautif l’acte du dément causant dommage à autrui, par le motif qu’il ne s’est pas conduit comme un homme avisé, ou comme un homme normal. [...] quand dans de tels cas on justifie l’obligation de réparer en disant qu’il y a eu faute, on donne à ce mot un sens tout autre que celui qu’il a dans le langage courant. [...] Sans doute, de tout temps, les juristes, pour satisfaire certaines aspirations sans rompre les cadres du droit établi, ont détourné de leur sens les mots ou les institutions, ou créer des fictions. Mais quand on vide les mots de leur sens usuel, on n’est pas compris et on n’est plus soi-même maître de sa pensée ». Du même auteur, v. également obs. sous CA Grenoble, 24 avril 1956 : JCP 1956, II, 9565 et note sous Cass. 2ème civ., 18 décembre 1964 : D. 1965, jur. p. 191, concl. Schmelck.
400 J. Chevallier, obs. sous Cass. 2ème civ., 18 décembre 1964 : RTD civ. 1965, p. 351, v. spéc. p. 453 ; M-K. Gomaa, La réparation du préjudice causé par les malades mentaux, RTD civ. 1971, p. 29, v. spéc. p. 43, n° 37 et 38 ; Ph. le Tourneau, La responsabilité civile des personnes atteintes d’un trouble mental, JCP éd., G 1971, I, 2401, v. spéc. n° 2, qui est hostile à l’analyse in abstracto : « Le droit de la responsabilité repose sur la faute. Il apparaît inconvenant de condamner un aliéné qui, par définition, est inconscient de la portée de ses actes : moralement ces faits sont neutres. Admettre le contraire serait vider la notion de faute de toute sa substance morale, c’est à dire en définitive, ruiner le soubassement de notre société » ; Ch. Radé, Réflexion sur le fondement de la responsabilité civile 1- L’impasse, D. 1999, chron. p. 313, v. spéc. p. 318, n° 15 et p. 319, n° 16 ; R. Rodière, obs. sous CA Paris, 23 juin 1950 : JCP, 1950, II, 5855, v. spéc. n° l.
401 P. Esmein, La faute et sa place dans la responsabilité civile, RTD civ. 1949, p. 481, v. spéc. p. 484, n° 5, qui estime qu’« un tel modèle d’appréciation de la conduite des gens est trop arbitraire pour être exactement pratiqué. Il heurte le sens commun ».
402 Cass. civ., 28 avril 1947 : D. 1947, jur. p. 329, concl. Lenoan, note H. Lalou, qui précise que « tant l’usage et les pouvoirs de direction et de contrôle, fondement de l’obligation de garde, que l’imputation d’une responsabilité présumée impliquent la faculté de discernement ».
403 Cass. 2ème civ., 18 décembre 1964, arrêt Trichard : D. 1965, jur. p. 191, concl. Av. gén. Schmelck, note P. Esmein. A cette date, la Cour de cassation admit « qu’une obnubilation passagère des facultés intellectuelles n’est pas un événement susceptible de constituer une cause de dommage extérieure ou étrangère au gardien ».
404 Cet article oblige l’incapable majeur à réparation, et précise que « Celui qui a causé un dommage à autrui alors qu’il était sous l’empire d’un trouble mental, n’en est pas moins obligé à réparation ».
405 R. Nungesser, J. O. Débat, Sénat, séance du 18 mai 1967, p. 375 : « Je vous rends. Mesdames, Messieurs, attentifs au caractère excessif du texte tel qu’il a été amendé par l’Assemblée Nationale. En effet, il est excessif de passer du principe critiquable de l’irresponsabilité absolue à celui de la responsabilité complète ».
406 Cass. 2ème civ., 4 mai 1977 : D. 1978, jur. p. 393, note R. Legeais.
407 Ph. le Tourneau, La responsabilité civile des personnes atteintes d’un trouble mental, JCP éd. G 1971, I, 2401.
408 C. Lapoyade Deschamps, La responsabilité de la victime, Thèse, Bordeaux, 1975, p. 404.
409 C. Lapoyade Deschamps, La responsabilité de la victime, op. cit., p. 405.
410 Cass. 2ème civ., 7 juin 1989 : D. 1989, jur. p. 559, note J-L. Aubert et Cass. 2ème civ., 12 mai 1999 : Dr. et patrimoine 2000, jur. p. 98, note F. Chabas. L’arrêt de 1999 reprend l’attendu de principe de l’arrêt de 1989, et réaffirme que « l’état mental de la victime qui n’invoquait aucun titre lui reconnaissant un taux d’invalidité au moins égal à 80 % ne peut être pris en considération pour apprécier sa faute civile ».
411 G. Viney, Réflexions sur l’article 489-2 du Code civil. A partir d’un système de réparation des dommages causés sous l’empire d’un trouble mental, une nouvelle étape de l’évolution du droit de la responsabilité civile, RTD civ. 1970, p. 251, v. spéc. p. 259.
412 F. Chabas, note sous Cass. 2ème civ., 12 mai 1999 : Dr. et patrimoine 2000, jur. p. 98.
413 G. Roche, La condition juridique des malades mentaux. Gaz. Pal. 1968, 1, doctrine, p. 12, qui cite H. Bazin, La fin des asiles, éd., Grasset, 1959, p. 17.
414 Ph. le Toumeau, La responsabilité civile des personnes atteintes d’un trouble mental, JCP éd. G 1971, I, 2401, v. spéc. n° 30.
415 CA d’Aix, 19 juin 1877 : D.P. 1879, 5, p. 365, n° 28, pour un enfant de onze ans reconnu non responsable de la blessure mortelle affligée à son oncle qui lui avait confié une arme sans s’être assuré qu’elle ne soit pas chargée ; v. pour un arrêt plus contemporain Cass. 2ème civ., 11 décembre 1974 : Gaz. Pal. 1975, 1, jur. p. 68.
416 Cass. 2ème civ., 8 février 1962 : Bull. civ. II, n° 180.
417 Cass. civ., 7 décembre 1931 : Gaz. Pal. 1932, 1, jur. p. 363, pour une espèce dans laquelle une jeune fille mineure trouva la mort par intoxication en allant puiser de l’eau à une fontaine en passant près de cuves de fermentation d’une usine. La Cour de cassation refuse toute réparation en reprochant à la jeune victime d’avoir « commis une faute grave en se rendant, malgré les défenses qui lui avaient été faites, en un endroit dont elle ne pouvait ignorer le danger » ; CA Colmar, 2 février 1954 : Gaz. Pal. 1954, 1, jur. p. 147, pour une espèce dans laquelle la responsabilité d’un jeune enfant de moins de sept ans, blessé par une flèche en bois dépourvue d’embout qu’il a lui-même décochée de son fusil à ressort, a été reconnue au motif « qu’il avait reçu, quelque instants avant l’accident, plusieurs avertissements d’un camarade plus âgé que lui qui l’avait invité à ne plus lancer de flèches sans embout ; qu’il n’a pas tenu compte de cette recommandation, dont la pertinence, très concrète, ne dépasse pas les facultés de compréhension d’un enfant de 6 ans et 11 mois ».
418 Cette époque jurisprudentielle a été clôturée par l’illustre arrêt Desmares, Cass. 2ème civ., 21 juillet 1982 : D. 1982, jur. p. 449, concl. Charbonnier, note Ch. Larroumet. Pour l’étude détaillée de la jurisprudence en matière de fait non fautif v. G. Viney, et P. Jourdain, Traité de droit civil sous la direction de Jacques Ghestin, Les conditions de la responsabilité, LGDJ, 2ème éd., 1998, p. 291 et s., n° 429.
419 Cass. 2ème civ., 30 juin 1966 : Bull. civ. II, n° 720.
420 F. Alt-maes, La responsabilité civile et pénale : un outil de la socialisation des mineurs ?, Petites affiches, 27 juin 2000, n° 127, p. 18, v. spéc. p. 19.
421 F. Terré, Ph. Simler, et Y. Lequette, Droit civil, Les obligations, Précis Dalloz, Collection droit privé, 7ème éd., 1999, p. 697, n° 760.
422 Cass. Ass. plén., 9 mai 1984 : D. 1984, jur. p. 525, concl. Av. gén. J. Cabannes, note F. Chabas ; JCP éd. G 1984, II, 20255, obs. N. Dejean de la Bâtie ; JCP éd. G 1984, II, 20256, note P. Jourdain. C’est la 3ème espèce qui formula l’attendu de principe dans le fameux arrêt Gabillet, et qui précisa qu’en « retenant qu’un jeune enfant, âgé de trois ans, avait l’usage, la direction et le contrôle du bâton par lequel il a causé le dommage, les juges du fond, qui n’avaient pas, malgré le très jeune âge du mineur, à rechercher si celui-ci avait un discernement, justifient légalement leur décision déclarant l’enfant responsable sur le fondement de l’article 1384, al. 1er, C. civ. ».
423 F. Chabas, note sous Cass. Ass. plén., 9 mai 1984 : D. 1984, jur. p. 525, v. spéc. p. 534, où l’auteur s’interroge : « A quoi sert d’avoir réclamé le triomphe de l’appréciation in abstracto totale, d’avoir prôné la responsabilité de l’infans ? Hélas, il est responsable envers lui-même. La logique juridique est un piège ». V. également N. Dejean de la Bâtie, obs. sous Cass. Ass. plén., 9 mai 1984, op. cit., qui constate que « même si on l’a souhaitée de longue date, on accueille sans joie cette victoire de la raison ».
424 H. L. et J. Mazeaud, et F. Chabas, Leçons de droit civil. Tome II / Premier volume, Obligations, Théorie générale, Montchrestien, 9ème éd., 1998, p. 461, n° 449.
425 C. Lapoyade Deschamps, Les petits responsables, D. 1988, chron. p. 299.
426 J. Bosc, Essai sur les éléments constitutifs du délit civil, Thèse, Montpellier, 1901, p. 104, cité par X. Blanc-Jouvan, La responsabilité de l’infans, RTD civ. 1957, p. 28, v. spéc. p. 33, n° 4.
427 V. en ce sens G. Durry, obs. sous Cass. 1ère civ., 20 juillet 1976 : RTD civ. 1976, p. 783, v. spéc. p. 784, qui précise que « cette assimilation nous semble très discutable. Un infans est certes privé de discernement ; il n’est pas pour autant victime d’un trouble mental, condition formellement prévue par le texte. [...] Dans ces conditions, le régime de l’article 489-2 concerne, croyons nous, tous ceux qui sont atteints d’un trouble mental, quel que soit leur âge, mais uniquement ceux là ».
428 Cass. 1ère civ., 20 juillet 1976 : JCP éd. G 1978, II, 18793, obs. N. Dejean de la Bâtie ; D. 1977, IR, p. 114, obs. Ch. Larroumet.
429 Cass. 2ème civ., 4 mai 1977 : D. 1978, jur. p. 393, note R. Legeais.
430 P. Jourdain, obs. sous Cass. 2ème civ., 28 février 1996 : RTD civ. 1996, p. 628.
431 G. Viney, Chronique : responsabilité civile, JCP éd. G 1997, I, 4068, v. spéc. n° 17.
432 Cass. 2ème civ., 28 février 1996 : Gaz. Pal. 1997, 1, jur. p. 86, note P. Jacques.
433 Cass. 2ème civ., 19 février 1997 : Resp. civ. et assur. 1997, com. n° 154.
434 F. Duquesne, note sous Cass. 2ème civ., 28 février 1996 : D. 1996, jur. p. 602.
435 G. Viney, Chronique : responsabilité civile, JCP éd. G 1996, I, 3985, qui assène aux juges de la Cour de cassation une sévère critique, et ajoute : « Il s’agit là en effet d’une sanction véritable dont les conséquences sont des plus graves et devraient être soigneusement dosées et qui n’a, en tout cas, aucune signification et ne présente aucune utilité sociale lorsqu’elle est appliquée à une personne dépourvue de discernement, en particulier à un très jeune enfant ».
436 G. Viney, Chronique : responsabilité civile, JCP éd. G 1997, I, 4068, v. spéc. n° 18.
437 Cass. 1ère civ., 6 mars 1996 : D. 1997, jur. p. 93,note M-C, Lebreton.
438 Cass. 1ère civ., 11 mars 1997 : JCP éd. G 1997, IV, 981.
439 G. Viney, Chronique : responsabilité civile, JCP éd. G 1997, I, 4068, v. spéc. n° 18.
440 M-C, Lebreton, note sous Cass. 1ère civ., 6 mars 1996 : D. 1997, jur. p. 93, v. spéc. p. 94.
441 Cass. 2ème civ., 20 avril 2000 : Juridisque Lamy, Base, Cassation vol. III (1997-2000), Arrêt n° 344, Pourvoi n° 98-18.809. En l’espèce, au cours d’une leçon de motricité, une monitrice s’est fracturée le coude, alors qu’elle expliquait un mouvement aux enfants. Surprise par l’arrivée dans son dos, à quatre pattes, d’une enfant de quatre ans elle a été déséquilibrée et a chuté. Les juges du fond, approuvés par l’arrêt de rejet de la Cour de cassation, pour l’indemniser de son préjudice, précisent que « le fait de déséquilibrer (la monitrice) en arrivant par surprise derrière elle au moment où elle expliquait un mouvement, constitue une faute de nature à engager la responsabilité de son auteur ».
442 En ce sens G. Viney, Chronique : responsabilité civile, JCP éd. G 1997, I, 4068, v. spéc. n° 18.
443 Cass. 1ère civ., 18 février 1986 : Bull, civ., I, n° 32. Sur la chute mortelle de la victime, qui « à la suite d’un simple manque de forces » a lâché la barre de maintien d’une balançoire.
444 Cass. 2ème civ., 21 novembre 1990 : Bull, civ., II, n° 243. En l’espèce, un garçonnet avait pénétré sur un chantier interdit au public sur lequel il avait été blessé. Les juges de la Cour de cassation refusent d’analyser son comportement comme constitutif d’une faute au motif que les liens d’amitié qui s’étaient établis avec l’entrepreneur pouvaient laisser penser que l’interdiction ne s’appliquait pas à la jeune victime.
445 Cass. 2ème civ., 13 novembre 1991 : Juridisque Lamy, Base, Cassation vol. II (1991-1996), Arrêt n° 1178, Pourvoi n° 90-15.813.
446 Cass. 2ème civ., 4 juillet 1990 : RTD civ. 1991, p. 123, obs. P. Jourdain. En l’espèce, un feu d’artifice venait d’être tiré sur une plage lorsqu’un enfant de 9 ans, accompagné d’une personne, ramassa un objet en plastique ayant la forme d’une petite bouteille sans mèche qui le blessa en explosant. La Cour d’appel indemnisa la jeune victime en repoussant le moyen invoqué par le défendeur pris d’une faute de la victime, au motif que celle-ci n’avait pas « commis de faute puisqu’elle n’était pas douée d un discernement suffisant pour apprécier le danger ». Le pourvoi en cassation est rejeté au motif que l’enfant n’avait pas été mis en garde par la personne qui l’accompagnait contre la dangerosité des engins de pyrotechnie, et qu’il pouvait « normalement penser qu’aucune explosion ne pouvait se produire, les fusées ayant déjà été utilisées ».
447 CA Dijon, 24 juin 1994 : JCP éd. G 1995, TV, 36. Les motifs des juges du fond sont explicites : « Les propriétaires d’un chien, attaché dans la cour de leur immeuble, ayant mordu au visage un enfant venu leur rendre visite en compagnie de sa mère, doivent être déclarés responsables dès lors qu’une faute de l’enfant n’est pas établie, celui-ci n’ayant pas conscience en raison de son jeune âge de la férocité de l’animal et n’ayant commis aucun acte de malveillance de nature à provoquer une riposte de l’animal ».
448 V. encore pour illustration des décisions qui font de l’âge de l’enfant une condition de sa responsabilité, CA Paris, 26 février 1986 : D. 1986, IR, p. 168 : « un enfant de douze ans [...] a un âge suffisant pour se rendre compte » ; CA Rouen, 14 avril 1986 : Gaz. Pal. 1987, 1, som. p. 35 : un enfant « âgé de huit ans, (est) doué d’un certain libre arbitre et d’un début de conscience du danger » ; CA Poitiers, 8 avril 1992 : D. 1993, som. p. 27, obs. J. Penneau : « aucune faute ne saurait être retenue à l’encontre d’un enfant de huit ans, irresponsable par définition ».
449 F. Duquesne, note sous Cass. 2ème civ., 28 février 1996 : D. 1996, jur. p. 602, v. spéc. p. 603.
450 P. Jourdain, obs. sous Cass. 2ème civ., 28 février 1996 : RTD civ. 1996, p. 628, v. spéc, p. 630 ; v. également dans le même sens N. Dejean de la Bâtie, note, sous Cass. 1ère civ., 7 mars 1989 : JCP 1990, II, 21403.
451 En ce sens M-C. Lebreton, L’enfant et la responsabilité civile, Préface de Y. Flour, Publications des Universités de Rouen et du Havre, 1999, p. 403, n° 339.
452 P. Jacques, note sous Cass. 2ème civ., 28 février 1996 : Gaz. Pal. 1997, 1, jur. p. 86, v. spéc. p. 87.
453 P. Jourdain, obs. sous Cass. 2ème civ., 28 février 1996 : RTD civ. 1996, p. 628, v. spéc., p. 630 ; v. également dans le même sens N. Dejean de la Bâtie, note, sous Cass. 1ère civ., 7 mars 1989 : JCP 1990, II, 21403.
454 En ce sens, H. Groutel, L’enfant mineur ravalé au rang de simple chose ?, Resp. civ. et assur. 2001, chron. n° 18, v. spéc. p. 5 ; D. Mazeaud, Famille et responsabilité (Réflexions sur quelques aspects de « l’idéologie de la réparation »), Études offertes à Pierre Catala, Le droit privé français à la fin du xxème siècle, éd. Litec, mai 2001, p. 569, v. spéc. p. 576, n° 13 ; Ph. Delebecque, obs. sous Cass. 2ème civ., 25 janvier 1995 : D. 1995, som. com. p. 232.
455 F. Niboyet, Consécration du caractère autonome de la responsabilité des parents du fait de leurs enfants, Petites affiches, 3 décembre 2001, n° 240, p. 10, v. spéc. p. 13.
456 Contra J. Carbonnier, Droit civil, Les personnes, PUF, Thémis droit privé, Tome 1, 1992, p. 257, n° 170, dont les propos peuvent laisser penser le contraire : « le langage de la Cour de cassation n’est pas exempt d’ambiguïté. Si elle n’impose pas aux juges du fond la recherche du discernement, elle ne leur interdit pas de s’y livrer. De sorte qu’elle n’aurait fait, en 1984, que leur reconnaître un banal pouvoir d’appréciation sur une notion, qui, assurément, n’a jamais eu de définition légale ».
457 F. Leduc note sous Rennes, 6 octobre 2004 : Resp. civ. et assur. 2005, com. n° 47, p. 19, v. spéc. p. 19 et 20, qui précise à propos des arrêts de 1984 : « Cette redéfinition de la faute, en soi contestable, nous semble aujourd’hui totalement inutile compte tenu des dernières évolutions intervenues en matière de responsabilité parentale. Les parents sont responsables de l’enfant même si ce dernier n’a pas commis de faute. [...] Il n’est donc plus nécessaire de considérer aujourd’hui l’enfant privé de discernement comme fautif, ou gardien, puisque la victime obtiendra de ses parents l indemnisation de ses dommages. Pourquoi alors s entêter à le considérer comme fautif, au risque de l’exposer à devoir indemniser personnellement la victime ou à perdre une partie de l’indemnisation ? [...] ne serait-il pas temps de revenir sur les arrêts rendus en 1984 et de protéger les très jeunes enfants, privés de discernement contre les conséquences de leur jeune âge ? » ; C. Radé, note sous CA Chambéry, 12 avril 2005 : Resp. civ. et ass. 2005, com. n° 314, p. 18 : « L’utilité des arrêts rendus en 1984 n’est [...] plus vérifié puisqu’il est possible de condamner les parents de l’enfant responsable sans que le fait causal de ce dernier n’ait à être qualifié de fautif. Dans ces conditions, l’abandon de la conception purement objective de la faute, qui constitue un défi au bon sens, et des solutions dégagées en 1984 permettrait de protéger le jeune enfant victime sans sacrifier les intérêts des victimes du jeune enfant ».
458 C. Lapoyade Deschamps, La responsabilité de la victime, Thèse, Bordeaux, 1975, p. 405 à 411.
459 C. Lapoyade Deschamps, Les petits responsables, D. 1988, chron. p. 299, v. spéc. p. 305 ; D. Mazeaud, note sous Cass. 2ème civ., 19 février 1997 : D. 1997, som. com. p. 290, v. spéc. p. 291 ; G. Viney, La réparation des dommages causés sous l’empire d’un état d’inconscience : un transfert nécessaire de la responsabilité vers l’assurance, JCP éd. G 1985, I, 3189, v. spéc. n° 22.
460 C. Radé, Réflexion sur les fondements de la responsabilité civile 2- Les voies de la réforme : la promotion du droit à la sûreté, D. 1999, chron. p. 323, v. spéc. p. 326, n° 9 et 10.
461 M-C. Lebreton, L’enfant et la responsabilité civile, Préface de Y. Flour, Publications des Universités de Rouen et du Havre, 1999, p. 324, n° 276.
462 Avant-projet de réforme du droit des obligations (Articles 1101 à 1386 du Code civil) et du droit de la prescription (Article 2234 à 2281 du Code civil), Rapport à Monsieur Pascal Clément, Garde des Sceaux, Ministère de la Justice, 22 septembre 2005, disponible sur http://www.justice.gouv.fr/publicat/rapport/rapportcatalaseptembre2005.pdf, Livre Troisième -Titre III, Des obligations, Sous-titre III - De la responsabilité civile (Articles 1340 à 1386), Chapitre 1 : Dispositions préliminaires, p. 152. Ceci résulte de la combinaison de deux articles de l’avant-projet. D’une part, l’article 1340 alinéa 1er qui dispose que « Tout fait illicite ou anormal ayant causé un dommage à autrui oblige celui à qui il est imputable à le réparer » et, d’autre part, l’article 1351-1 qui précise que « Les exonérations prévues [...] ne sont pas applicables aux personnes privées de discernement ».
463 R. Rodière, obs. sous CA Paris, 23 juin 1950 : JCP 1950, n, 5855, v. spéc. n° 2.
464 CA Paris, 6 juin 2000 : Resp. civ. et assur. 2000, com. n° 73, note L. Grynbaum ; v. déjà en ce sens CA Paris, 3 janvier 2000 : Resp. civ. et assur. 2000, com. n° 291, pour une décision qui écarte, dans les mêmes termes, la responsabilité d’un enfant qui s’était précipité sur la route et avait été blessé par un cycliste.
465 L’évocation de cette exonération de responsabilité du transporteur sur le fondement de la seule appréciation objective de la faute du voyageur peut apparaître comme une simple hypothèse d’école eu égard au durcissement de la jurisprudence en matière d’obligation de sécurité (cf. Supra, p. 54, n° 43 et s. Cependant, nous nous focalisons sur le comportement du voyageur pour démontrer l’existence de ce raisonnement combinatoire en éludant, délibérément pour ce faire, le fondement de la solution de l’espèce qui est la sanction du transporteur au regard de l’inexécution de son obligation de sécurité de résultat.
466 F. Terré, Ph. simler, et Y. Lequette, Droit civil, Les obligations, Précis Dalloz, Collection droit privé, 8ème éd., 2002, p. 701, n° 729.
467 P. Esmein, note sous Cass. 2ème civ., 11 mars 1965 : D. 1965, jur. p. 575, v. spéc. p. 576.
468 C. Lapoyade Deschamps, La responsabilité de la victime, Thèse, Bordeaux, 1975, p. 410.
Notes de fin
1 Nous empruntons le titre d'un article publié par M. le professeur Lapoyade Deschamps, à la revue Dalloz 1988, chron. p. 299.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
La notion de personne
Étude visant à clarifier le statut juridique de l’enfant à naître
Aude Bertrand-Mirkovic
2003
Le couple et la convention européenne des droits de l’homme
Analyse du droit français
Patrice Hilt
2004
Des comportements fautifs du créancier et de la victime en droit des obligations
Yannick Le Magueresse
2007