Lien familial, lien obligationnel, lien social. Livre I
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Le mariage et le contrat à la fin de l’Ancien Régime
Éléments de réflexion tirés de l’histoire du droit1
p. 53-92
Extrait
1La contractualisation des rapports familiaux semble être un phénomène récent. Pourtant le contrat n’a jamais été totalement absent des rapports familiaux. Plus encore, il a occupé une place de choix dans les relations au sein de la famille et a servi d’accélérateur aux transformations de la fin de l’Ancien Régime2. Sur ce point, l’étude du mariage durant cette période est éclairante.
2Immuables et changeantes, telles semblent être les interrogations relatives à la nature juridique du mariage. Le législateur du xxe et du début du xxie siècle a mis en œuvre de profondes réformes autour de lui toutes favorables à la thèse du mariage-contrat : divorce libéralisé, catégories d’enfant naturel et d’enfant légitime abolies, autorité parentale, PACS, mariage pour tous… À ces réformes, et même si l’orthodoxie juridique sépare l’étude des deux matières, il convient d’ajouter la contractualisation du droit patrimonial du couple qui amplifie le phénomène de transformation du droit de la fa
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Lien familial, lien obligationnel, lien social. Livre I
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1 Voir sur ce point nos deux études : « L’instrumentalisation de la notion de contrat : le mariage au xviiie siècle » dans L’idée contractuelle dans l’histoire de la pensée politique, Actes du colloque international de l’AFHIP (6-7 septembre 2007), Collection d’histoire des idées politiques, PUAM, Aix-en-Provence, 2008, p. 239-288 et « Jalons pour une histoire de la liberté du mariage (xvie-xxe siècle) : la liberté du mariage, une liberté rationnalisée » dans La liberté fondamentale du mariage, Actes du colloque de l’université de Pau et Pays de l’Adour du 6 juin 2008, PUAM, Aix-en-Provence, 2009, p. 15-36.
2 Voir sur la contractualisation des rapports familiaux dans la pensée de Hobbes et Pufendorf : A. du Crest, Modèle familial et pouvoir monarchique (xvie-xviiie siècles), Collection d’Histoire des Institutions et des Idées Politiques dirigée par Michel Ganzin, PUAM, Aix-en-Provence, 2002, p. 181.
3 Voir sur ce point la synthèse de F. Terre, « Contractualiser le droit du couple », dans Reconstruire la famille, un droit commun pour le couple, Les Petites Affiches, Numéro Spécial, Actes du Colloque de l’Institut du droit et de l’éthique de l’Université de Lille II du 11 mai 2007, p. 8 et s. (En ligne sur lextenso.fr) et D. Boulanger, « Droit patrimonial du couple et contractualisation » dans Reconstruire la famille, un droit commun pour le couple, op. cit., p. 34 et s.
4 H. Fulchiron, « De l’institution aux droits de l’individu : réflexions sur le mariage au début du xxie siècle » dans Le monde du droit, Ecrits rédigés en l’honneur de Jacques Foyer, Economica, Paris, 2008, p. 396.
5 Anne Lefebvre-Teillard notait ainsi : « Contrat ou institution ? Le législateur hésite toujours entre ces deux conceptions héritées de l’histoire. L’exemple du divorce l’illustre de manière significative : bien qu’une série de lois en facilite depuis 1884 la procédure, il ne perd pas fondamentalement avant 1875 son aspect divorce-sanction, malgré plusieurs tentatives faites pour introduire le divorce par consentement mutuel et une distorsion de plus en plus grande entre le fait et le droit. Précédée par la loi de 1972 qui proclame l’égalité successorale entre enfants légitimes et enfants naturels, cette loi renforce l’aspect contractuel du mariage longtemps déjà survalorisé, pour des raisons politiques que l’on sait » ; A. Lefebvre-Teillard, Introduction historique au droit des personnes et de la famille, PUF., Collection Droit fondamental, Paris, 1996, p. 221.
Il convient d’ajouter que la loi du 3 décembre 2001 a aboli toute discrimination selon la naissance, notamment entre enfants issus du mariage et enfants adultérins. L’article 733 alinéa 1 proclame désormais que « la loi ne distingue pas entre la filiation légitime et la filiation naturelle pour déterminer les parents admis à succéder ».
6 J.-P . Delevoye, « Synthèse des travaux » dans Reconstruire la famille, un droit commun pour le couple, op. cit., p. 51.
7 H. Fulchiron, « De l’institution aux droits de l’individu : réflexions sur le mariage au début du xxie siècle » op. cit., p. 398.
8 Ainsi, « le modèle contractuel semble se porter bien » au point que « de plus en plus nombreux sont les couples qui arrivent à surmonter leurs réactions premières et organiser contractuellement une rupture pacifique » ; C. Neirinck, « Vers un droit commun de la rupture ? » dans Reconstruire la famille, un droit commun pour le couple, op. cit., p. 28.
9 Cf. D. Deroussin, Histoire du droit des obligations, Economica, Corpus Histoire du Droit dirigé par A. Rigaudière, Paris, p. 109.
10 Modestin a laissé une définition du mariage qui a suscité des controverses : « union de l’homme et de la femme, une communauté de toute la vie, la mise en commun de ce qui relève du droit divin et humain ». Cette définition a été reprise au Digeste, (23, 2, 1). Une définition similaire peut être retrouvée dans les Institutes de Justinien (1, 9, 1). Cette conception surprenante pour un juriste du iiie siècle a donné lieu à de nombreuses controverses. La plus probable explication est que la formulation ne relève pas d’une définition juridique mais d’une idée morale ou philosophique. Cette définition a été reprise par le droit canonique médiéval, dans le Décret de Gratien de 114, et a été largement diffusée. Elle a ensuite été « canonisée » par une citation d’Alexandre III à la fin du xiie siècle et par les Décrétales de Grégoire IX. En dépit de leur sens des définitions, les juristes romains ont été plus attentifs aux effets juridiques du mariage qu’à l’union elle-même. Cf. : J. Gaudemet, « La définition romano-canonique du mariage », Speculum iuris et Ecclesiarum, Vienne, 1967, p. 107-114 et du même, Le mariage en Occident, op. cit., p. 15 et Sociétés et mariage, Cerdic-publications, Strasbourg, 1980, p. 428.
11 Comme l’affirmait Ulpien, ce n’est pas l’union sexuelle qui fait le mariage mais c’est le consentement (D. 35, 1, 15). Le mariage romain se formait ainsi par un accord de volontés, celui des intéressés ou celui des personnes qui avaient sur les futurs époux la patria potestas. A défaut de consentement, il ne peut y avoir de matrimonium contractum au sens du jurisconsulte Paul (D. 23, 2, 16, 2). D’où la constatation de ce jurisconsulte à propos du mariage d’enfants in potestate : « Il ne peut y avoir mariage s’il n’y a pas consentement de tous, c’est à dire de ceux qui se marient et de ceux qui ont sur eux la puissance » (D. 23, 2, 2). D’ailleurs, le père de famille, qui intervient pour donner son consentement, ne peut pas obliger l’un de ses enfants à se marier. En ce sens, les juristes romains, tout en faisant état du droit du pater familias résultant de la puissance qu’il détient sur ses enfants, présentent toujours le consentement matrimonial comme émanant des époux. « Le consensualisme est incontestablement l’apport majeur de la tradition juridique romaine au droit du mariage chrétien et, par celui-ci, au droit matrimonial de la plupart des droits modernes » [J. Gaudemet, « Le legs du droit romain en matière matrimoniale » dans Sociétés et mariage, op. cit., p. 343-344]. Ainsi, le droit romain ne faisait pas apparaître le mariage dans la catégorie des contrats, mais les commentateurs médiévaux de la Compilation justinienne ont employé ce vocable et l’ont fait passer à la postérité [G. Le Bras, verbo « Mariage » dans Dictionnaire de théologie catholique, « La doctrine du mariage chez les théologiens et les canonistes depuis l’An mil », colonne 2182 à 2184].
12 On trouve les notions de matrimonium, nuptiae, iustum matrimonium, iustae nuptiae. Cf. : J.- P. Levy, A. Castaldo, Histoire du droit civil, Précis droit privé, Éditions Dalloz, Paris, 2002, p. 83.
Sur le mariage en droit romain : J. Gaudemet, Sociétés et mariage, op. cit.
13 A. Lefebvre-Teillard, Introduction historique au droit des personnes et de la famille, PUF., Collection Droit fondamental, Paris, 1996, p. 145.
14 J.-P. Levy, « Les idées de Portalis sur le mariage » dans Le Discours et le Code, Portalis, deux siècles après le Code Napoléon, Litec, Paris, 2004, p. 115.
15 A. Lefebvre-Teillard, Introduction historique au droit des personnes et de la famille, op. cit., p. 145.
16 Jacques Poumarède note : « Le mariage est certainement l’institution sur laquelle l’Église, en Occident, a cherché à exercer la plus forte emprise […] et elle n’y parviendra réellement qu’à partir du xiie siècle, lorsqu’elle se sera dotée d’un corps de règles cohérent et d’un monopole juridictionnel au profit des cours d’Église – les Officialités – capables de les faire respecter » ; verbo « Mariage » dans Dictionnaire du Moyen Âge, Sous la direction de Claude Gauvard, Alain de Libera, Michel Zink, PUF, Paris, 2002, p. 881.
Dans les derniers siècles de l’Empire romain d’Occident, un droit matrimonial basé sur la technique juridique romaine et sur la morale chrétienne s’était constitué. Le haut Moyen Âge a cependant été marqué par les errements de la matière matrimonial et par les incertitudes et les dissonances entre les coutumes germaniques, les vestiges du droit romain et les préceptes chrétiens. Néanmoins, dans une période où le pouvoir des Princes fait défaut, l’Église a acquis peu à peu une compétence exclusive en matière matrimoniale, tant au plan législatif que juridictionnel [Voir sur ces questions : J. Gaudemet, Le mariage en Occident, op. cit., p. 89-132].
17 « Voici donc que l’homme quittera son père et sa mère pour s’attacher à sa femme, et les deux ne formeront qu’une seule chair : ce mystère est de grande portée ; je veux dire qu’il s’applique au Christ et à l’Église. Bref, en ce qui vous concerne, que chacun aime sa femme comme soi-même, et que la femme révère son mari ».
18 Le mariage est une œuvre divine pour les chrétiens et il est indissoluble selon les Évangiles (Matthieu, XIX, 3 à 9 et Marc, X 2 à 10) : « Ce que Dieu a uni, dit le Christ, que l’homme ne le sépare pas ». L’Église a fait du mariage l’un des sept sacrements. Le mariage trouve son origine dans un passage de la Genèse (II, 24) où après la création d’Ève, Dieu déclare : « C’est pourquoi l’homme quittera son père et sa mère et s’attachera à sa femme et à eux deux ils formeront une seule chair » -» duo in carne una ».
19 C’est Saint Paul le premier qui, en comparant l’union conjugale à celle du Christ et de l’Église, parle de sacramentum. Doctrine développée par les Pères de l’Église, celle-ci devient unanime à l’époque de Saint Grégoire le Grand au viie siècle.
20 Le consentement fait le mariage pour les auteurs chrétiens : pour Tertullien « le mariage se parfait par la volonté » ; Cf. : J. Gaudemet, Le mariage en Occident, op. cit., p. 58.
21 G. Le Bras, verbo « Mariage » dans Dictionnaire de théologie catholique, « La doctrine du mariage chez les théologiens et les canonistes depuis l’An mil », colonne 2196 à 2220.
22 Éditions M. Schnerb-Lièvre, Paris, 1982, Volume II, p. 107-115 et 167-184.
23 J. Gaudemet, Le mariage en Occident, op. cit., p. 58.
On peut consulter l’analyse de ces doctrines dans G. Le Bras, op. cit., colonne 2221 à 2222.
24 A. Lefebvre-Teillard, Introduction historique au droit des personnes et de la famille, op. cit., p. 145.
25 Isambert, Decrusy, Taillandier, Recueil général des anciennes lois françaises depuis l’an 420 jusqu’à la Révolution de 1789, Tome 16, Mai 1610 -Mai 1643, Belin-Leprieur, Libraire-Éditeur, Paris, Septembre 1829, p. 520.
26 J. Gaudemet, Le mariage en Occident, op. cit., p. 317.
27 Jacques Ghestin notait à ce propos : « Les parlements, grâce essentiellement à l’appel « comme d’abus », imposèrent leur jurisprudence en matière matrimoniale et purent ainsi lutter efficacement contre les mésalliances. Pour cela, sans négliger les sanctions pécuniaires instituées par les ordonnances ou les coutumes, ils comprirent cependant, que le seul moyen de réparer l’atteinte portée à l’homogénéité familiale était l’annulation du mariage. Toutefois, en présence de la tradition séculaire de l’Église, qui ne prévoyait aucun contrôle familial sur la formation du mariage, ils durent user de procédés détournés pour parvenir à leurs fins » ; « L’action des parlements contre les « mésalliances » aux xviie et xviiie siècles » dans Revue historique de droit français et étranger, Janvier – Mars 1956, n° 1, p. 77.
28 C.-J. de Ferriere verbo « Appel comme d’abus de la célébration d’un mariage » dans Dictionnaire de droit et de pratique…, op. cit., Tome 1, p. 98.
29 Isambert, Decrusy, Taillandier, Recueil général des anciennes lois françaises depuis l’an 420 jusqu’à la Révolution de 1789, Tome 14, Mai 1574 – Août 1589, Belin-Leprieur, Libraire-Éditeur, Paris, Juin 1829, p. 392.
30 L’article 5 de l’ordonnance de 1639 déclare nuls les mariages célébrés entre la femme ravie et leur ravisseur si l’échange des consentements et/ou celui des parents a lieu « tandis que les personnes ravies sont en la puissance du ravisseur ».
31 Isambert, Decrusy, Taillandier, Recueil général des anciennes lois françaises depuis l’an 420 jusqu’à la Révolution de 1789, Tome 14, Mai 1574 – Août 1589, Belin-Leprieur, Libraire-Éditeur, Paris, Juin 1829, p. 471.
32 Ibid., p. 471-472.
33 J. Ghestin, « L’action des parlements contre les « mésalliances » aux xviie et xviiie siècles », op. cit., p. 74 et s.
Plus récemment : D. Deroussin, Histoire du droit privé (xvie-xxie siècle), Ellipses, Manuel Universités-Droit, Paris, 2010, p. 59-60.
34 R.-J. Pothier, Traité du contrat de mariage et de la puissance maritale, dans Œuvres de Pothier, Nouvelle édition publiée par M. Siffrein, Tome septième, Paris, 1822, p. 142.
35 « La séduction se présume de droit, lorsqu’un mineur s’est marié sans le consentement de ses père et mère, tuteur ou curateur ; et en conséquence, sur l’appel comme d’abus que les père, mère, tuteur ou curateur interjettent de ces mariages, les parlements les déclarent nuls » ; ibid., p. 141-142.
36 Ibid., p. 195.
37 Y. Jeanclos, « Consentement matrimonial et rapt de séduction en France d’après quelques actes de la seconde moitié du xviiie siècle » dans Le droit de la famille en Europe son évolution de l’Antiquité à nos jours, Actes des journées internationales d’Histoire du Droit publiés sous la direction de Roland Ganghofer, Presses Universitaires de Strasbourg, Strasbourg, 1992, p. 269.
38 Ibid., p. 305. On peut voir dans le même sens que « le mariage simplement consensuel apparaît progressivement à travers bon nombre de décisions de juridictions, en France, au xviie siècle » ; Y. Jeanclos, « Consentement et pratique matrimoniale en France au xviie siècle » dans Mémoires de la Société pour l’Histoire du Droit et des Institutions des anciens pays bourguignons, comtois et romands, Volume 58 « Parents et enfants », 2001, p. 309 et s.
39 Voltaire relevait, en effet, au sujet de cet Édit de Louis XIV qu’ : « il est bien singulier que l’on se soit fondé sur les loix de l’église pour annuler des mariages que l’église n’annula jamais. Vous voyez dans cet édit le Sacrement confondu avec le contrat civil ; c’est cette confusion qui a été la source des étranges loix de France sur le mariage » ; verbo « Mariage » dans Questions sur l’Encyclopédie par des amateurs, Huitième partie, 1771, p. 36.
40 Pour une synthèse sur la double nature du mariage voir : J. Poumarède, « Le mariage : de la sécularisation au déclin » dans Itinéraire(s) d’un historien du droit, Jacques Poumarède, regards croisés sur la naissance de nos institutions, CNRS-Université Toulouse-le Mirail, Collection « Méridiennes », Toulouse, 2011, p. 271-278 et du même auteur « Mariage, concubinage ou la quadrature du cercle » dans Les états généraux du mariage : l’évolution de la conjugalité, PUAM, 2008, p. 17-28.
41 Entre formalisme et consensualisme « la doctrine des derniers siècles de l’Ancien Régime a-t-elle tôt fait de trancher : en France, c’est le consentement qui fait le contrat » ; E. Chevreau, Y. Mausen, C. Bougle, Introduction historique au droit des obligations, Litec, Paris, 2007, p. 126.
42 En effet, Joseph, dans l’Évangile de Mathieu (1, 18 à 22), est qualifié d’époux de Marie et Marie d’épouse de Joseph alors qu’il ne semblent être que fiancés et avant même qu’ils « eussent mené vie commune » : « Or telle fut la genèse de Jésus Christ. Marie, sa mère, était fiancée à Joseph : or, avant qu’ils eussent mené vie commune, elle se trouve enceinte par le fait de l’Esprit Saint. Joseph, son mari, qui était un homme juste et ne voulait pas la dénoncer publiquement, résolut de la répudier sans bruit. Alors, qu’il avait formé ce dessein, voici que l’Ange du Seigneur lui apparut en songe et lui dit : « Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ta femme : car ce qui a été engendré en elle vient de l’Esprit Saint ; elle enfantera un fils, et tu l’appellera du nom de Jésus car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés ».
43 Pour Grotius et pour Pufendorf, le mariage est une société qui fonde le contrat. Grotius affirme ainsi que : « Le droit qu’on acquiert sur les personnes en vertu du consentement, vient ou d’une association ou d’un assujettissement. L’association la plus naturelle apparaît dans le mariage » ; H. Grotius, Le droit de la guerre et de la paix, édité par D. Alland et S. Goyard-Fabre, PUF, Collection Léviathan, Paris, 1999, p. 225. (Livre II, Chapitre V, VIII, 1).
44 S. von Pufendorf, Le droit de la nature et des gens ou système général des principes les plus importans de la morale, de la jurisprudence, et de la politique, Traduit du latin par Jean Barbeyrac avec notes du traducteur, Tome second, Chez henri Schelte, Amsterdam, 1706, p. 135.
45 S. von Pufendorf, Le droit de la nature et des gens, op. cit., Tome second, p. 137.
46 Ibid., p. 152
47 Ibid., p. 137.
48 Cf. A. Dufour, Le mariage dans l’école allemande du droit naturel moderne au xviiie siècle, Les sources philosophiques de la Scolastique aux Lumières-La doctrine, LGDJ, Bibliothèque d’histoire du droit et droit romain, Tome XVIII, Paris, 1972 et du même auteur Mariage et société moderne, Les idéologies du droit matrimonial moderne, Éditions Universitaires Fribourg Suisse, 1997, p. 25.
49 Marqué par la morale chrétienne et se référant directement à l’épître de Saint Paul aux Ephésiens (V, 23) [« En effet, le mari est le chef de sa femme, comme le Christ est chef de l’Église, lui le sauveur du corps » ; La Bible de Jérusalem, Fleurus-Cerf, 2001, p. 2379], Grotius constate qu’à cause de la différence de sexe, l’autorité n’est pas égale et selon le droit de nature : « le mariage est une cohabitation de l’homme et de la femme, qui place la femme comme sous les yeux et sous la garde de l’homme ». la cohabitation est pour ce dernier inégale et fortement hiérachisée ; H. Grotius, Le droit de la guerre et de la paix, op. cit., p. 225. (Livre II, Chapitre V, VIII, 1 et 2).
Même si, comme Grotius, Pufendorf qualifie le mariage de société, qu’il le range dans la catégorie des « sociétés simples », la position de Pufendorf est moins tranchée. S’il admet à l’instar de son prédécesseur que le mariage constitue une alliance inégale du fait de la supériorité naturelle du mari sur la femme, il refuse cependant de « considérer la suprématie masculine comme une condition suffisante de l’autorité maritale » ; A. du Crest, Modèle familial et pouvoir monarchique (xvie-xviiie siècles), op. cit., p. 181.
En effet, Pufendorf n’hésite pas à affirmer que : « Tous les hommes sont naturellement égaux, en sorte qu’aucun d’eux n’a aucune autorité sur les autres, s’il ne l’a acquise en vertu de quelque acte, ou de leur part ou de la sienne. Car, quoi que d’ordinaire les hommes surpassent les femmes à l’égard de la force du Corps et de l’Esprit, cet avantage par lui-même ne donne point au sexe masculin l’empire sur le féminin ». Une fois encore c’est dans la notion de contrat qu’il trouve une justification à son propos. Pour le tenant du droit naturel, « on ne dépend pas de l’empire de quelqu’un par cela seul que l’on est obligé de se conformer en certaines choses à sa volonté : car on peut être dans cette nécessité par l’effet d’une simple convention […]. Ainsi, quoi que, dans ce qui concerne particulièrement le mariage, la femme soit tenue de se régler sur la volonté de son mari ; il ne s’en suit pas de cela seul, qu’elle dépende nécessairement de lui dans toutes ses autres actions » ; S. von Pufendorf, Le droit de la nature et des gens, op. cit., Tome second, p. 132 et 134.
50 S. N. H. Linguet, Légitimité du divorce justifiée par les Saintes Écritures, par les pères, par les Conciles, Etc, aux États-Généraux, Bruxelles, 1789, p. 38.
51 A. du Crest, Modèle familial et pouvoir monarchique (xvie-xviiie siècles), op. cit., p. 182.
52 Ibid. p. 185.
53 Janety, Journal du Palais de Provence ou recueil des arrêts rendus depuis les derniers journalistes par le Parlement et la Cour des Aides de cette province, Années 1779, Chez André Adibert, imprimeur du Roi, Aix, 1782, Arrêt LXIII, p. 493-494.
54 J.-J. Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, Charpentier Libraire-Éditeur, Paris, 1845, p. 211.
Voir notre article à paraître sur « Rousseau et le droit de la famille » dans les actes du colloque qui s’est déroulé à Genève en septembre 2012 à l’occasion du tricentenaire de la naissance du philosophe, co-édition des presses universitaires de Genève et des PUAM, p. 29-56.
55 R.-J. Pothier, Traité du contrat de mariage, op. cit., p. 19.
56 Ibid., p. 20.
57 Ibid., p. 24.
58 Ibid., p. 25.
59 Ibid., p. 21. Toutefois, l’avocat provençal Gassier ne néglige pas la phase de négociation, précédant l’échange des consentements, notamment entre les familles des futurs époux, étape qui correspond à une sorte de coutume commerciale permettant d’aboutir à la conclusion du contrat. En effet, les liens du mariages ne peuvent être rompus pour une erreur portant sur « l’état de fortune » d’un des conjoints. Cette méprise n’est d’ailleurs pas un moyen de séparation pouvant être invoqué devant les tribunaux. « Ce cas se présente tous les jours » affirme t-il un peu agacé. « Ce n’est pas que le soussigné prétende l’autoriser et rendre cette démarche légitime, mais il est peu de mariage où de part et d’autre on ne vante les facultés respectives au-delà de la réalité » ; AD BDR, Marseille, 10 F 106, n° 43, Consultation de l’avocat Gassier du 29 septembre 1787 pour le sieur Chapesain contre le sieur Jaine.
Cependant, la convention par laquelle les parents des mariés organisent le mariage de leurs enfants sans que le consentement des futurs époux n’intervienne, au moins tacitement, « ne sont pas de véritables fiançailles » et ne constituent pas un contrat. Le consentement des parents est toutefois nécessaire pour la validité fiançailles chaque fois qu’il est nécessaire pour la validité du mariage ; R.-J. Pothier, Traité du contrat de mariage, op. cit., p. 21.
60 H. de Boniface, Arrests notables de la Cour de Parlement de Provence Cour des comptes aydes et finances du mesme pays, Tome premier, Jean Guignard et René Guignard, Paris, 1670, Livre V, Titre I, Chapitre I, p. 357
61 Maximes du Palais sur les titres les plus utiles des Institutes et du Code, par un ancien magistrat au Parlement de Provence, avec des observations sur chaque maxime, conférées avec la jurisprudence des Parlemens de Droit Ecrit, et plus particulièrement avec celle des Parlemens de Toulouse et de Provence, par Monsieur G. Bonnemant, Avocat au Parlement de Provence, Tome premier, Chez Castor Belle, imprimeur du Roi, Nîmes, 1785, p. 94.
62 Gassier atteste que « le principe de la matière est que les promesses de mariage même entre majeurs ne doivent jamais être forcées, mais ces promesses se résolvent en dommages et intérêts » ; AD BdR, 10 F 92, Fonds Gassier, Consultation de l’avocat Gassier n° 10, Pour la demoiselle Brun contre le sieur Bouillony, Saint Julien, 28 mai 1780.
Il a été jugé par le Parlement de Provence qu’une fiancée « à laquelle quelqu’un auroit consenti une promesse de mariage », n’est pas recevable à interjeter appel comme d’abus de la célébration du mariage que son fiancé aurait conclu avec une autre femme : « C’est ainsi que la Cour le jugea le 15 avril 1723 » ; Maximes du Palais, op. cit., Tome premier, p. 95.
Néanmoins, Bonnemant signale la fréquence de ces oppositions malgré le peu de chance d’être retenues par les tribunaux. Il n’y a que ceux qui ont intérêt à faire prononcer la nullité d’un mariage qui puissent valablement s’y opposer « quand il n’a pas été encore contracté » ; ibid., p. 96.
En vertu des Maximes du Palais, « les présens que le fiancé fait à la fiancée avant ou après les fiançailles ne sont censés donnés qu’à condition si nuptiae sequantur. Il n’est pas nécessaire que cette condition soit exprimée dans l’acte ; elle y est toujours sous entendue ». Au sujet de cette Maxime, l’avocat Bonnemant observe que : « C’est un manque de bonne foi de se dédire après un contrat de mariage, ou des articles signés entre les deux familles. Celui qui romproit ces engagemens préliminaires, est tenu des dépenses auxquelles la foi de ses promesses a donné lieu, à dire d’experts ». Bonnemant rappelle la décision du Parlement de Provence du 3 avril 1705 rapportée par l’arrêtiste Debézieux en vertu de laquelle : « celui qui se dédit d’épouser, après un contrat de mariage ou des articles signés, est tenu de payer les dépenses, nipes et marchandises, à celui qui ne se dédit pas et qui les a achetées sous la foi des articles, contrats ou promesses d’épouser » [B. Debezieux, Arrests notables de la Cour de Parlement de Provence, Chez P.G. Le Mercier, Desaint et Saillant, Jean-Thomas Herissant, Paris, 1750, Livre 5, chap. 1, § 1, p. 317]. Bonnemant ajoute qu’ « il est même des cas où l’on accorde à la partie qui souffre de l’inexécution des promesses faites dans le contrat, des dommages-intérêts ». D’ailleurs, « la dot et les présens de noces ne sont censés donnés que sous condition si nuptiae sequantur. Si le mariage vient à ne point s’effectuer, la partie qui a reçu les présens est tenue de les restituer ; mais il ne sauroit y avoir lieu à la répétition de la part du donateur, si c’étoit par son fait propre et pour cause de refus, que le mariage ne pût s’accomplir […]. Il est vrai qu’il est fort rare qu’une femme retienne des présens de noces d’un homme qui lui fait un pareil outrage ; il est au contraire, de la bienséance et de la nature des procédés de tout rendre en pareil cas » ; ibid., p. 99.
63 On peut se reporter sur ces questions à l’ancienne mais précieuse thèse de : M. Covillard, Le mariage considéré comme contrat civil dans l’histoire du droit français, Thèse Droit Paris, Librairie Nouvelle de droit et de Jurisprudence, Paris, 1899, p. 37 et s. Pour l’abbé Barruel, Launoy avait des adversaires : « Le docteur janséniste trouva des adversaires ; il fut victorieusement combattu par Gervais, dans le Traité du pouvoir de l’église et des princes sur les empêchements du mariage ; il le fut surtout par l’auteur des observations sur le livre de l’Aunoi ». L’ecclésiastique ajoute que l’ouvrage de Jean Launoy n’est qu’une copie de Marc Antoine de Dominis : « il en résulta que l’ouvrage du docteur janséniste n’étoit, comme tous ceux qu’on fait contre l’Église, qu’un tissus d’erreurs, de faux raisonnemens, de textes altérés, falsifiés, ou très mal appliqués, surtout de diatribes servilement copiées du fameux apostat Marc Antoine de Dominis » ; Abbé Barruel, Les vrais principes sur le mariage, opposés au rapport de M. Durand de Maillane et servant de suite aux lettres sur le divorce, Chez Crapart Libraire-Imprimeur, Paris, 1790, p. 4.
64 B. Basdevant-Gaudemet, verbo « Launoy, (Launoi), Jean de Gravé de » dans Dictionnaire historique des juristes français xiie-xxe siècle, op. cit., p. 472.
65 A. Dufour, Mariage et société moderne, Les idéologies du droit matrimonial moderne, Éditions Universitaires Fribourg Suisse, 1997, p. 19-21.
66 Voltaire, verbo « Mariage » dans Questions sur l’Encyclopédie par des amateurs, Huitième partie, 1771, p. 33.
En dernier lieu sur Voltaire et la question du mariage voir : F. Quastana, « Du bon usage du droit romain : Voltaire et la réforme des législations civile et pénale » dans Les représentations du droit romain en Europe aux temps romains, Table ronde du CERHIIP, Aix-en-Provence, 13 octobre 2006, Collection d’Histoire des Idées Politiques dirigée par M. Ganzin, PUAM, 2007, p. 203 et s.
67 Voltaire, verbo « Mariage » dans Questions sur l’Encyclopédie par des amateurs, Huitième partie, 1771, p. 33.
68 En ce sens, l’auteur constate que la France seule interdit les mariages entre personnes de religions différentes et cette interdiction touche notamment les protestants. Il en appelle, à l’appui de sa démonstration, au droit romain qui n’a « jamais proscrit les mariages des personnes d’une autre croyance, lors même qu’ils avaient été contractés par des catholiques ». Voltaire ajoute que l’Empereur Constance fit défense aux juifs, sous peine de mort, d’épouser des femmes chrétiennes. Ses successeurs ont maintenu cette prohibition à l’égard des femmes juives. Toutefois, ces lois sont tombées en désuétude sous le règne de l’Empereur Marcien et Justinien les a rejetées de son Code ; Voltaire, verbo « Mariage » dans Questions sur l’Encyclopédie par des amateurs, Huitième partie, 1771, p. 33.
69 J.-J. Rousseau, Du contrat social ou principes du droit politique dans Œuvres complètes, III, Editions Gallimard, Paris, 1964, p. 469.
70 Rousseau ne parle du mariage que pour justifier l’affirmation selon laquelle : « Partout où l’intolérance théologique est admise, il est impossible qu’elle n’ait pas quelque effet civil » ; ibid.
71 Rousseau avait demandé la suppression de cette note à son éditeur alors que le tirage de son ouvrage était déjà commencé. Cette note figure dans l’édition des œuvres complètes de 1782.
72 J.-J. Rousseau, Du contrat social ou principes du droit politique, op. cit., p. 469 note de bas de page.
73 « Supposons donc qu’un clergé vienne à bout de s’attribuer à lui seul le droit de passer cet acte ; droit qu’il doit nécessairement usurper dans toute religion intolérante. Alors, n’est-il pas clair qu’en faisant valoir à propos l’autorité de l’Église il rendra vaine celle du Prince qui n’aura plus de sujets que ceux que le clergé voudra bien lui donner »73. Si l’Église se rend maîtresse absolue du mariage, elle disposera seule « des héritages, des charges, des citoyens, de l’État même, qui ne saurait subsister n’étant plus composé que de bâtards » ; ibid.
74 Dans la première version du Contrat social Rousseau écrivait : « Les effets du Sacrement doivent être purement spirituels » ; J.-J. Rousseau, Du contrat social ou essai sur la forme de la République (Première version) dans Œuvres complètes, III, Éditions Gallimard, Paris, 1964, p. 343.
75 Voir notre article sur « Rousseau et le droit de la famille » à paraître en 2013 dans les actes du colloque international qui a eu lieu en septembre 2012 à l’Université de Genève.
76 Cf : A. Dufour, Mariage et société moderne, Les idéologies du droit matrimonial moderne, Éditions Universitaires Fribourg Suisse, 1997, p. 11.
77 J. Le Scène Desmaisons, Contrat conjugal ou loix du mariage de la répudiation et du divorce, Neuchâtel, 1783, p. 15.
78 J.-J. Julien, Élémens de Jurisprudence selon les lois romaines et celles du Royaume, Chez Antoine David, imprimeur du Roi, Aix, 1785, p. 13.
79 P. Le Ridant, Examen de deux questions importantes sur le mariage, comment la puissance séculière peut-elle déclarer les mariages nuls sans entreprendre sur les droits d la puissance ecclésiastique ? Quelle est en conséquence l’étendue du pouvoir des souverains sur les empêchements dirimants le mariage ?, 1753, p. 3-6.
80 B. Basdevant-Gaudemet, verbo « Le Ridant (Leridant), Pierre » dans Dictionnaire historique des juristes français xiie-xxe siècle, op. cit., p. 496.
81 P. Le Ridant, Examen de deux questions importantes sur le mariage, op. cit., p. 48.
82 J. Basdevant, Des rapports de l’Église et de l’État dans la législation du mariage du Concile de Trente au Code civil, Thèse Droit Paris, Librairie de la société du recueil général des Lois et des Arrêts, Paris, 1900, p. 47.
83 P.-C. Lorry, Essai de dissertation ou de recherche sur la mariage, en sa qualité de contrat et de sacrement, Paris, 1760, p. 190.
84 Verbo « Mariage » dans Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers par une société des gens de lettres, mis en ordre et publié par M. Diderot et par M. d’Alembert, http://encyclopedie.inalf.fr/ (il s’agit d’une version très sûre de l’Encyclopédie numérisée et mise en ligne par le CNRS et l’ATILF).
85 C.-J. de Ferrière, verbo « Mariage » dans Dictionnaire de droit et de pratique…, op. cit., Tome 2, p. 181.
Toutefois, il existe néanmoins trois cas dans lesquels « les mariages sont valables quant au sacrement et sont nuls quant aux effets civils seulement ». Des « loix politiques » déclarent nuls quant aux effets civils : les mariages tenus secrets, les mariages faits in extremis et les mariages contractés par des personnes mortes civilement. Pothier partage exactement le même point de vue ; C.-J. de Ferrière, verbo « Mariages nuls quant aux effets civils » dans Dictionnaire de droit et de pratique…, op. cit., Tome 2, p. 189.
86 C.-J. de Ferriere, verbo « Mariage » dans Dictionnaire de droit et de pratique…, op. cit., Tome 2, p. 181.
87 C.-J. de Ferrière, verbo « Mariage contracté par une crainte qui ôte absolument la liberté du consentement rend le mariage nul » dans Dictionnaire de droit et de pratique…, op. cit., Tome 2, p. 185.
88 Verbo « Mariage » dans Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers par une société des gens de lettres, mis en ordre et publié par M. Diderot et par M. d’Alembert, http://encyclopedie.inalf.fr/
89 J.-B. Denisart, verbo « Mariage » dans Collection de décisions nouvelles, op. cit., Tome 2, p. 130.
90 Ibid., p. 127. Et Denisart de préciser : « Je ne prétends pas cependant conclure de là qu’on puisse valablement contracter un mariage en France, sans qu’il soit suivi de la bénédiction nuptiale ; sans le Sacrement, dont le propre curé est le ministre, il n’y a point de mariage ; ceux qui se contractent autrement n’ont aucun effet ». Il convient toutefois de noter que Denisart défend cette position en prenant en référence un texte royal et non un texte émanant du pouvoir ecclésiastique : l’ordonnance de Blois.
91 R.-J. Pothier, Traité du contrat de mariage, op. cit., p. 1.
92 J. Gaudemet, Le mariage en Occident, Les mœurs et le droit, Cerf, Paris, 1987, p. 332. Pothier ne joue pas, à la fin du xviiie siècle, le rôle de « simple compilateur ». En effet, comme le reconnaît Jean-Louis Thireau, si Pothier emprunte beaucoup et à des sources variée « il ne se borne pas à colliger et à reproduire les opinions des autres ; il les évalue, les discute, parfois les réfute avec une grande indépendance d’esprit […]. Les écrits de Pothier révèlent une conception du droit qui, sans être très neuve, lui est propre » ; verbo « Pothier Robert-Joseph » dans Dictionnaire historique des juristes français xiie-xxe siècle, sous la direction de P. Arabeyre, J.-L. Halpérin, J. Krynen, PUF, Quadrige, Paris, 2007, p. 637-638.
93 Comme l’a démontré Jean-Louis Thireau : « Chez Pothier, le droit naturel, en dépit de son omniprésence, ne joue qu’un rôle théorique : il sert à fonder les normes positives, à les justifier, donc à les renforcer, bien plus qu’à en amoindrir l’autorité ». De plus, « à contre-courant de l’antiromanisme des « Lumières », il a contribué à répandre, au moins chez le juristes, une image bien plus moderne et plus flatteuse des lois romaines, non plus celle de vieilles règles complexes, confuses et désuètes, que donnait d’elles la routine universitaire, mais celle d’un droit axiomatique et systématique, conforme aux grands principes individualistes et volontaristes qu’exaltait le xviiie siècle » ; « Pothier, le droit romain et le droit naturel » dans Les grands juristes, Actes des journées internationales de la Société d’Histoire du Droit (Aix-en-Provence, 22-25 mai 2003), PUAM, Aix-en-Provence, 2006, p. 128.
94 R.-J. Pothier, Traité du contrat de mariage, op. cit., p. 1.
95 L’ambiguïté vient du fait que, pour désigner deux réalités bien distinctes dans leur esprit, les juristes de l’Ancien Droit utilisent la même expression « contrat de mariage » qu’ils emploient pour désigner le mariage et les conventions matrimoniales. Denisart réserve l’expression contrat de mariage à l’« acte qui règle les conditions de la société qui se forme entre les futurs époux ». Il distingue l’union des époux des conventions faites dans le but de cette union et ce même s’il considère le mariage, non pas seulement comme un sacrement, mais aussi comme un contrat ; J.-B. Denisart, verbo « Contrat de mariage » dans Collection de décisions nouvelles et notions relatives à la jurisprudence actuelle, 5e édition, Tome 1, Chez Desaint, Paris, 1766, p. 285 et s.
P. Roussilhe fait de même dans son Traité de la dot : « Nous entendons ici par contrat de mariage l’acte qui se passe pour régler les conventions des parties » ; Traité de la dot à l’usage des pays de droit écrit et de celui de coutume, Tome premier, Imprimerie Antoine Delcros, imprimeur du Roi, Clermont-Ferrand, 1785, p. 66.
La même définition se retrouve dans le dictionnaire de Guyot : « C’est l’acte que passent les futurs conjoints pour régler les conditions relatives au mariage qu’ils vont contracter » ; verbo « Contrat de mariage » dans Répertoire universel et raisonné de jurisprudence civile, criminelle, canonique et bénéficiale, Nouvelle édition corrigée et augmentée, Chez Visse libraire, Paris, 1784, p. 611.
96 C.-J. de Ferrière, verbo « Contrat de mariage » dans Dictionnaire de droit et de pratique contenant l’explication des temes de droit, d’Ordonnances, de Coutumes et de Pratique avec les jurisdictions de France, Tome 1, Nouvelle édition revue, corrigée et augmentée par M. ***, Chez la Veuve Brunet, imprimeur-Libraire, Paris, 1769, p. 369.
On retrouve la même définition dans la Nouvelle introduction à la pratique du même auteur : « Contrat de mariage se prend pour le consentement solennel prêté par le mari et la femme en face d’Église ; mais ordinairement par contrat de mariage, on entend l’acte ou contrat qui précède la bénédiction nuptiale et qui contient les clauses et conventions faites par rapport au mariage » ; C.-J. de Ferrière, verbo « Contrat de mariage » dans Nouvelle introduction à la pratique contenant les termes de pratique de droit et de coutume avec les juridictions de France, Nouvelle édition revue, corrigée et augmentée, Tome premier, Chez Joseph Saugrain, Paris, 1745, p. 424.
97 R.-J. Pothier, Traité du contrat de mariage, op. cit., p. 1.
98 Ibid., p. 3.
99 Ibid., p. 8.
100 Ibid., p. 9.
101 Pour Pothier, le mariage demeure un contrat et « ne peut, de même que tous les autres contrats, être formé que par le consentement des parties » ; ibid., p. 188-189.
102 E. Chevreau, Y. Mausen, C. Bougle, Introduction historique au droit des obligations, op. cit., p. 127.
103 « C’est déjà prendre quelques distances avec la doctrine du mariage parfait », notait Jean Gaudemet ; Le mariage en Occident, op. cit., p. 332.
104 R.-J. Pothier, Traité du contrat de mariage, op. cit., p. 3.
Ceci étant, le contrat entraîne l’obligation pour chacun des époux « d’accorder à l’autre ce commerce charnel, lorsqu’elle lui demande ». Cette obligation résulte des fins mêmes du mariage ; ibid., p. 4.
105 Ibid., p. 194.
106 De ce contrat découle bien évidemment des obligations dont la première est celle de vivre ensemble dans une union perpétuelle et inviolable « pendant tout le temps que durera le mariage, qui ne doit finir que par la mort de l’une des parties » ; ibid., p. 246
107 C. G. de L. de Malesherbes, Mémoire sur le mariage des protestants, 1785, p. 173.
108 Ibid., p. 173-174.
109 « Il n’est donc pas du mariage comme des autres Sacremens. L’Évêque seul ou le Prêtre seul, par l’institution de Jésus Christ, sont les Ministres des Sacremens de la Confirmation, de la Pénitence, de L’Euchatristie, de l’Extrême Onction et de l’Ordre. Le mariage, au contraire, qui existoit avant la Loi de l’Évangile, à la différence des autres Sacremens n’ayant point exigé la présence du Prêtre par aucun texte de l’Écriture, soit comme Ministre ou comme témoin » ; ibid., p. 179.
110 Abbé Barruel, Les vrais principes sur le mariage, opposés au rapport de M. Durand de Maillane et servant de suite aux lettres sur le divorce, Chez Crapart Libraire-Imprimeur, Paris, 1790, p. 9.
111 J. Poumarède, verbo « Mariage » dans Dictionnaire de la culture juridique, sous la Direction de D. Alland et S. Rials, PUF, Lamy, Paris, 2003, p. 798.
112 S. von Pufendorf, Le droit de la nature et des gens, op. cit., Tome second, p. 144.
113 Ibid., p. 146.
114 Ibid., p. 144.
115 Ibid., p. 150.
116 A. Dufour, Mariage et société moderne, Les idéologies du droit matrimonial moderne, Éditions Universitaires Fribourg Suisse, 1997, p. 26.
117 Montesquieu, De l’Esprit des Lois, précédé de l’analyse de cet ouvrage par d’Alembert, Tome premier, P. Pourrat Frères Éditeurs, Paris, 1834, p. 491.
118 J. Le Scene Desmaisons, Contrat conjugal ou loix du mariage de la répudiation et du divorce, op. cit., p. 230-231.
119 Joseph II a autorisé le divorce sans exiger d’autre motif que la volonté constante des deux époux. Cet exemple, d’un mariage simple contrat pouvant être rompu par consentement mutuel des époux « sera suivi par les autres nations de l’Europe, quand elles commencerons à sentir qu’il n’est pas plus raisonnable de consulter sur la législation les théologiens que les danseurs de corde » ; Voltaire, verbo « Adultère » dans Œuvres de Voltaire avec préfaces, avertissements, notes, ect. par M. Beuchot, Tome XXVI, Dictionnaire Philisophique, Tome I, Chez Lefèvre, Libraire, Werdet et Lequien fils, Paris, 1829, p. 108.
120 Ibid., p. 106-107.
121 « Je jette les yeux sur tous les peuples de la terre, il n’y en a pas un seul, excepté le peuple catholique romain, chez qui le divorce et un nouveau mariage ne soient de droit naturel » ; ibid., p. 105.
122 « Le code Justinien, que nous avons adopté en plusieurs points, autorise le divorce ; mais le droit canonique, que les catholiques ont encore plus adopté, ne le permet pas » ; Voltaire, verbo « Divorce » dans Œuvres de Voltaire avec préfaces, avertissements, notes, ect. par M. Beuchot, Tome XXVIII, Dictionnaire Philisophique, Tome III, Chez Lefèvre, Libraire, Werdet et Lequien fils, Paris, 1829, p. 438.
123 « Le divorce est probablement de la même date à peu près que le mariage. Je crois pourtant que le mariage est de quelques semaines plus ancien ; c’est-à-dire qu’on se querella avec sa femme au bout de quinze jours, qu’on la battit au bout d’un mois, et qu’on s’en sépara après six semaines de cohabitation » ; ibid..
124 Voltaire ajoute que toute femme dont le mari, non esclave, mais simplement prisonnier de guerre pendant cinq ans, pouvait, après les cinq années révolues « contracter un autre mariage » ; ibid.
125 Ibid.
126 Ibid., p. 439.
127 Cf. : J. Gaudemet, Le mariage en Occident, op. cit., p. 345.
128 J.-J. Rousseau, Émile et Sophie ou les solitaires dans Œuvres complètes, Chez Th. Lejeune libraire-éditeur, Lettre I, Bruxelles, 1827, p. 193.
Voir sur ce point : J. Gaudemet, Le mariage en Occident, Les mœurs et le droit, Les éditions du Cerf, Paris, 1987, p. 345.
129 Montesquieu, De l’Esprit des Lois, précédé de l’analyse de cet ouvrage par d’Alembert, Tome premier, P. Pourrat Frères Éditeurs, Paris, 1834, p. 493.
130 J. Le Scène Desmaisons, Contrat conjugal ou loix du mariage de la répudiation et du divorce, op. cit., p. 73-81 et p. 231.
131 C.-J. de Ferrière, verbo « Mariage » dans Dictionnaire de droit et de pratique…, op. cit., Tome 2, p. 182.
132 R.-J. Pothier, Traité du contrat de mariage, op. cit., p. 299.
133 J.-L Thireau, verbo « Pothier Robert-Joseph » dans Dictionnaire historique des juristes français xiie-xxe siècle, op. cit., p. 638.
134 « Le juge ecclésiastique est incompétent », précise Pothier ; R.-J. Pothier, Traité du contrat de mariage, op. cit., p. 340.
135 « Il n’y a pas lieu de douter qu’en règle générale les séparations contractuelles, précise l’avocat provençal Gassier, formant une espèce de divorce ne sont pas admises en France, c’est-à-dire qu’il ne dépend pas des parties conjointes de se séparer par le pur effet de leur volonté ; il n’y a que la justice qui puisse prononcer une séparation légale ». Toutefois, précise immédiatement le praticien, l’acte de séparation amiable sert au juge de présomption simple établissant les justes causes de séparation dans la mesure où il existe un consentement mutuel : « Mais comme ces séparations quoique volontaires ont couramment les causes les plus justes puisqu’elles sont cimentées par le consentement des deux parties intéressées, la justice quand l’une des parties méconnoit les loix de la convention, s’occupent toujours des causes qui l’ont produite, et quand elles sont suffisantes et légales, elles manquent jamais de confirmer et de prouver la séparation. On peut même dire que la séparation sert à cet égard de commencement de preuve et l’on présume aisément qu’il devoit exister des causes puisque les deux volontés se sont réciproquement réunies pour opérer et fixer contractuellement la séparation ». En l’espèce, l’acte de séparation a été approuvé par les ascendants respectifs des époux. Le Parlement d’Aix, dans un arrêt du 20 juin 1786, a annulé la séparation amiable mais a prononcé sur les mêmes bases une séparation judiciaire pour 10 ans entre les époux ; AD BdR, 10 F 103, Fonds Gassier, Consultation de l’avocat Gassier n° 50, Pour la dame Tourtour contre son mari, Les Mées, 23 mai 1786.
136 « Les séparations volontaires faites par des actes privés entre mari et femme, si communs aujourd’hui, [...] ne sont points autorisés en justice et à la moindre réquisition de l’un des conjoints, l’autre est obligé de le rejoindre » ; Maximes du Palais, op. cit., Tome premier, p. 219.
Jean-Philippe Lévy signalait qu’à la fin du xive siècle l’Officialité de Paris prononçait des séparations de biens qui n’étaient souvent que la consécration d’une séparation déjà convenue à l’amiable ; « L’Officialité de Paris et les questions familiales à la fin du xive siècle » dans Etudes d’Histoire du Droit Canonique dédiées à Gabriel Le Bras, Tome II, Sirey, Paris, 1965, p. 1279.
Sur les séparations Cf. notre étude : « La demande en séparation de biens en Provence à la fin de l’Ancien régime : une action protectrice de la femme mariée » dans La femme en histoire du droit et des idées politiques, Presses Universitaires de Dijon, Collection Institutions, 2008, p. 61-92.
137 Voltaire, verbo « Adultère » dans Œuvres de Voltaire avec préfaces, avertissements, notes, ect. par M. Beuchot, Tome XXVI, Dictionnaire Philisophique, Tome I, Chez Lefèvre, Libraire, Werdet et Lequien fils, Paris, 1829, p. 106-107.
138 Voltaire, verbo « Divorce » dans Œuvres de Voltaire avec préfaces, avertissements, notes, ect. par M. Beuchot, Tome XXVIII, Dictionnaire Philisophique, Tome III, Chez Lefèvre, Libraire, Werdet et Lequien fils, Paris, 1829, p. 439.
139 « L’homme sage frémit à l’idée seule d’un engagement indissoluble. Les législateurs qui ont préparé aux hommes des liens indissolubles, n’ont guère connu son inconstance naturelle. Combien ils ont fait de criminels et de malheureux ? » ; verbo « indissoluble » dans Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers par une société des gens de lettres, mis en ordre et publié par M. Diderot et par M. d’Alembert, http://encyclopedie.inalf.fr/.
140 AD BDR, 11 F 5, Plaidoyer de l’avocat Lejourdan du 29 janvier 1781 pour la demoiselle Marie Eyssotier épouse du sieur Jacques Bernardi dit Boyol demanderesse en requête du 30 septembre 1780 contre le sieur Boyol, fabriquant de pipes.
141 Ibid.
142 Une nouvelle fois un document judiciaire met en lumière la déchristianisation de la Provence à la fin de l’Ancien Régime décrite par Jean-Louis Mestre ; À propos de la déchristianisation de la Provence au xviiie siècle, dans les Mélanges offerts à Jean Dauvillier, Centre d’Histoire juridique méridionale, Université des sciences sociales de Toulouse, Toulouse, 1979, p. 519-530.
143 Verbo « Divorce » dans Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers par une société des gens de lettres, mis en ordre et publié par M. Diderot et par M. d’Alembert, http://encyclopedie.inalf.fr/
144 Boucher d’Argis, verbo « Dissolution de mariage » dans Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers par une société des gens de lettres, mis en ordre et publié par M. Diderot et par M. d’Alembert, http://encyclopedie.inalf.fr/
145 S. N. H. Linguet, Légitimité du divorce, op. cit., p. 30.
146 Ibid., p. 32.
147 Linguet précise ainsi que : « avant tout, pour recouvrer une ombre de liberté par ce qu’on appelle la séparation de corps, il faut qu’elles se plongent dans une captivité plus étroite. La justice commence par les renfermer dans un couvent, tout le tems qu’elle emploie à peser dans sa balance les raisons qui peuvent l’engager à les soustraire au joug du mari. Si elles ne triomphent pas, le bras de fer les remet impitoyablement à la discrétion d’un despote irrité » ; ibid., p. 38.
148 Et l’avocat de préciser : « Et ne croyez pas que ce soit sur l’incompatibilité des humeurs, sur l’aliénation mutuelle des esprits que la justice se décide à venir à leur secours. Elle ne compte pour rien les douleurs de l’âme, et cette angoisse inexprimable que cause à un cœur sensible la nécessité de vivre sans cesse dans une intimité qui ne devoit être que le prix de l’amour, et de l’estime, avec un objet qu’on ne peut ni aimer, ni estimer. Il n’y a que les dangers physiques de la femme qui puissent l’émouvoir » ; ibid., p. 39.
149 Vers la fin du xvie siècle, le théologien Sanchez défendait l’idée que dans la mesure où le contrat est la matière du sacrement de mariage, le prince séculier peut le priver d’effet « en rendant les parties incapables de le contracter et ainsi rendre le contrat invalide » (Disputationes de matrimonii sacramento, VII, III, n° 8). Voir : J.-P. Levy, « Les idées de Portalis sur le mariage » dans Le Discours et le Code, Portalis, deux siècles après le Code Napoléon, Litec, Paris, 2004, p. 115.
Dès 1620, Marc Antoine de Dominis, dans son De republica ecclesiastica largement diffusé, présentait le mariage comme « un contrat naturel » relevant de la puissance séculière. De même, Hennequin affirmait que le contrat était antérieur au sacrement. Même si le sacrement s’est greffé sur le contrat, celui-ci n’a rien perdu de sa nature civile et reste donc soumis à l’autorité du Prince. Cf. : J. Gaudemet, Le mariage en Occident, op. cit., p. 328.
150 Abbé Barruel, Les vrais principes sur le mariage, opposés au rapport de M. Durand de Maillane et servant de suite aux lettres sur le divorce, Chez Crapart Libraire-Imprimeur, Paris, 1790, p. 7.
151 Œuvres de d’Aguesseau, Tome V, p. 66. Cf. également : J. Basdevant, Des rapports de l’Église et de l’État dans la législation du mariage du Concile de Trente au Code civil, op. cit., p. 38 note 1.
152 P. Le Ridant, Code Matrimonial, ou recueil de toutes les loix canoniques et civiles de France sur les questions de mariage, 2e édition donnée par Camus, Paris, 1770, p. 192-196. Cf. également sur cette lettre : J. Gaudemet, Le mariage en Occident, op. cit., p. 325.
153 Verbo « Mariage » dans Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers par une société des gens de lettres, mis en ordre et publié par M. Diderot et par M. d’Alembert, http://encyclopedie.inalf.fr/
154 J. Le Scène Desmaisons, Contrat conjugal ou loix du mariage de la répudiation et du divorce, op. cit., p. 19.
155 Ibid., p. 27.
156 « C’est pourquoi il dépend de sa puissance de le régler, soit par rapport à l’âge des personnes, soit relativement au pouvoir des pères et mères, tuteurs et curateurs soit par rapport à des dispenses de parenté pour mariage et par rapport à d’autres objets » ; C.-J. de Ferrière, verbo « Mariage » dans Dictionnaire de droit et de pratique…, op. cit., Tome 2, p. 181.
157 Ibid., p. 181.
158 En effet, l’édit du mois de Novembre 1680 en avait appelé aux « canons des conciles » pour justifier l’interdiction faite à tout catholique romain de « contracter mariage avec ceux de la religion prétendue réformée ». Le même texte déclarait de tels mariages « non valablement contractés » et « les enfans qui en viendront illégitimes et incapables de succéder aux biens meubles et immeubles de leurs pères et mères » ; Isambert, Decrusy, Taillandier, Recueil général des anciennes lois françaises depuis l’an 420 jusqu’à la Révolution de 1789, Tome 19, Janvier 1672 -Mai 1686, Belin-Leprieur, Libraire-Éditeur, Paris, 1829, p. 257-258.
Sur l’édit de 1787, Cf. : Isambert, Decrusy, Jourdan, Recueil général des anciennes lois françaises depuis l’an 420 jusqu’à la Révolution de 1789, Tome 28, 1er Janvier 1785 -5 Mai 1789, Belin-Leprieur, Libraire-Éditeur, Paris, Août 1827, p. 472.
159 C. G. de L. de Malesherbes, Mémoire sur le mariage des protestants, 1785, p. 1.
160 Ibid., p. 4.
161 « C’est cependant cette rigueur du Clergé qui est la cause de tout le mal, suivant les magistrats partisans de la fiction, qu’il n’y a plus de protestants en France » ; ibid., p. 18.
162 Ibid.
163 Voltaire relevait déjà à propos des mariages des protestants : « Si nos loix réprouvent les mariages des catholiques avec les personnes d’une religion différente, accordent-elles au moins les effets civils aux mariages des Français protestans avec des Français de la même secte ? On compte aujourd’hui dans le royaume un million de protestants et cependant la validité de leur mariage est encore un problème dans les tribunaux. C’est encore ici un des cas où notre jurisprudence se trouve en contradiction avec les décisions de l’Église et avec elle-même » ; verbo « Mariage » dans Questions sur l’Encyclopédie, op. cit., p. 37.
Dans le même sens, pour l’historien Jacques le Scène-Desmaisons : « La loi qui prohibe les mariages protestans est de la classe des loix nuisibles à la population, puisqu’elle commande le célibat, ou ne fait que des bâtards. Soit des protestants entr’eux, soit de protestans à catholiques, il est inhumain d’annuler les mariages. C’est tyranniser également les sujets des deux croyances. Comment appeler une loi qui dit à une classe de citoyens : je vous défends de vous reproduire, ou je condamne votre descendance au sceau flétrissant de la bâtardise ? » ; Contrat conjugal ou loix du mariage de la répudiation et du divorce, op. cit., p. 174.
Partant de ces constats, l’édit de 1787 a pris acte de la situation des réformés et a établi que : « Notre justice et l’intérêt de notre royaume ne nous permettent pas d’exclure plus longtemps, des droits de l’état civil, ceux de nos sujets ou des étrangers domiciliés dans notre empire, qui ne professent point la religion catholique. Une assez longue expérience a démontré que ces épreuves rigoureuses étoient insuffisantes pour les convertir : nous ne devons donc plus souffrir que nos lois les punissent inutilement du malheur de leur naissance, en les privant des droits que la nature ne cesse de réclamer en leur faveur. Nous avons considéré que les protestants, ainsi dépouillés de toute existence légale, étoient placés dans l’alternative inévitable, ou de profaner les sacrements par des conversions simulées, ou de compromettre l’état de leurs enfants, en contractant des mariages frappés d’avance de nullité par la législation de notre royaume » ; Isambert, Decrusy, Jourdan, Recueil général des anciennes lois françaises depuis l’an 420 jusqu’à la Révolution de 1789, Tome 28, 1er Janvier 1785 -5 Mai 1789, Belin-Leprieur, Libraire-Éditeur, Paris, Août 1827, p. 472-473.
164 Ibid., p. 474 puis p. 477-478. Ainsi, précise l’Édit de 1787 : « Ceux de nos sujets ou étrangers établis dans notre royaume depuis un temps suffisant, qui ne seront pas de la religion catholique, et qui voudront s’unir par le lien du mariage seront tenus de faire publier leurs bans dans le lieu du domicile actuel de chacune des parties contractantes, dans celui du domicile que lesdites parties, ou l’une d’elles, auroient quitté depuis six mois, si c’est dans l’étendue du même diocèse, ou depuis un an, si elles ont passé d’un diocèse à un autre, et en outre, si elles sont mineures, dans le lieu de leurs pères, mères, tuteurs ou curateurs.
Il sera au choix des parties contractantes de faire faire lesdites publications, ou par les curés ou vicaires des lieux où elles devront être faites, ou par les officiers de justice desdits lieux, dans la forme ci-après prescrite […] ».
Ainsi, « les parties contractantes se transporteront assistée de quatre témoins, en la maison du curé ou vicaire du lieu où l’une desdites parties aura son domicile, ou en celle dudit juge, et y déclareront qu’elles se sont prises et se prennent en légitime et indissoluble mariage, et qu’elles se promettent fidélité.
Ledit curé ou vicaire, ou ledit juge, déclarera aux parties, au nom de la loi, qu’elles sont unies en légitime et indissoluble mariage ; inscrira lesdites déclarations sur les deux doubles du registre destiné à cet effet, et fera mention de la publication des bans sans opposition, ou de la main levée des oppositions, s’il y en a eu ; des dispenses, si aucunes ont été accordées du consentement des pères, mères, tuteurs ou curateurs ; signera le tout, et fera signer par les parties contractantes, si elles savent signer et par les témoins ».
165 Dictionnaire de droit canonique et de pratique bénéficiale conféré avec les maximes et la jurisprudence de France, 2 volumes, Avignon, 1761, puis 4 volumes, Lyon 1770 et 6 volumes en 1787. On peut voir verbo « Mariage » (idée reprise au verbo « Empêchement ») : « Si l’Église et le Roi ont indépendamment un de l’autre, le droit de faire des lois sur le mariage, l’Église comme sacrement et le roi comme contrat civil, chacun doit avoir aussi respectivement le droit de reconnaître des questions qui s’élèvent sur l’exécution de ces mêmes lois ». Cf. : B. Basdevant-Gaudemet, verbo « Durand de Maillane Pierre-Toussaint », dans Dictionnaire historique des juristes français xiie-xxe siècle, op. cit., p. 294-295.
166 Durand de Maillane ajoute que le contrat et le sacrement : « sont deux choses qu’on aurait jamais dû confondre pour conserver aux deux puissances les droits qui sont propres à chacune d’elles » ; cité par A. Dufour, Mariage et société moderne, Les idéologies du droit matrimonial moderne, Éditions Universitaires Fribourg Suisse, 1997, p. 38.
167 Le problème de l’application de la Constitution en matière de mariage est soulevé pour la première fois le 19 octobre 1791 devant les députés mais ce n’est qu’à partir du 15 février 1792 que les législateurs se sont penchés sur la notion de mariage à l’occasion des débats sur la loi relative au « mode par lequel les naissances, mariages et décès seront constatés ». Les archives parlementaires montrent bien que le principe constitutionnel selon lequel le mariage n’est qu’un contrat civil ne fait plus débat ; cf. : I. Anselme, L’invocation de la Déclaration de Droits de l’Homme et du Citoyen et de la Constitution dans les débats de l’Assemblée Législative (1791-1792), Thèse Droit Aix-Marseille, 2007, p. 62 et s.
168 Archives Parlementaires, Tome 38, 15 février 1792, p. 533. En effet pour Muraire, dont la position a été suivie sur ce point par l’Assemblée, : « Le mariage étant un contrat civil et comme contrat civil appartenant à l’ordre politique, la qualité de sacrement qui survient à ce contrat, mais qui en suppose la préexistence, ne le soustrait pas au droit qu’a la puissance séculière d’en déterminer les formes et d’en régler les empêchements » ; ibid.
169 Voir sur ce point : I. Anselme, op. cit., p. 93-95.
170 I. Théry, C. Biet, « Portalis ou l’esprit des siècles. La rhétorique du mariage dans le Discours préliminaire au projet de Code civil » dans La famille, la loi, l’État, De la Révolution au Code civil, Imprimerie Nationale, Paris, 1989, p. 112.
171 Nous rejoignons les conclusions de Dominique Fenouillet : « Le Discours préliminaire prouve ainsi combien les contemporains qui analysent le mariage comme un contrat synallagmatique soumis à la théorie générale (par exemple de l’exception d’inexécution) commettent un contresens historique en invoquant la terminologie du Code ou du Discours préliminaire » ; « De la vertu familiale naturelle du mariage » dans Le Discours et le Code, Portalis, deux siècles après le Code Napoléon, Litec, Paris, 2004, p. 133.
172 Les citations de Portalis sont reproduites avec un commentaire dans : J.-P. Levy, « Les idées de Portalis sur le mariage » dans Le Discours et le Code, Portalis, deux siècles après le Code Napoléon, Litec, Paris, 2004, p. 113-116.
La position de Portalis, qui analyse « le vœu de perpétuité dans le mariage » comme « un vœu de la nature », marque, pour Dominique Fenouillet, une double rupture. D’une part, Portalis rompt avec le dogme catholique de l’indissolubilité. D’autre part, il se sépare de l’héritage révolutionnaire en refusant « de tenir le mariage pour un contrat de droit commun, il écarte le consentement mutuel ou l’incompatibilité d’humeur et affirme que l’essence du mariage est bien de tendre à la perpétuité » ; « De la vertu familiale naturelle du mariage » dans Le Discours et le Code, Portalis, deux siècles après le Code Napoléon, Litec, Paris, 2004, p. 133.
Le mariage est placé par le Code sous le contrôle de la famille et de l’État : l’officier d’état civil « sanctionne le contrat au nom de la société ». De plus, l’ordre matrimonial est respecté par l’action en nullité ouverte dans certains cas à tous ceux qui y ont intérêt (article 184), par l’institution de la majorité matrimoniale spéciale – avec autorisation parentale jusqu’à 25 ans pour les garçons et 21 ans pour les filles – relayée par des demandes obligatoires de conseils aux ascendants sous le forme des actes respectueux. Enfin, « il importe également à la société que soit banni de la législation tout ce qui peut porter atteinte à la faveur due au mariage. Le divorce n’est donc pas reconnu comme un effet de la liberté individuelle, mais comme un remède extrême que le législateur admet à certaines conditions par respect pour la liberté des cultes ». La rupture du contrat, qui pour Portalis est un « contrat perpétuel par destination » est rendue plus difficile par l’énumération des causes de divorce : d’une part, le divorce pour faute (adultère, excès – sévices ou injures graves – et condamnation d’un époux à une peine infamante) et d’autre part, le divorce par consentement mutuel « entouré de garde-fous destinés à rendre l’usage rarissime » ; J.-L. Halperin, Histoire du droit privé français depuis 1804, P.U.F., Quadrige, Paris, 2001, p. 27.
Cf. également : A. Lefebvre-Teillard, Introduction historique au droit des personnes et de la famille, op. cit., p. 198.
173 La suppression du divorce en 1816 avait une valeur hautement symbolique en pleine Restauration monarchique. Son rétablissement par la loi du 27 juillet 1884 aux articles 229 et suivants du Code civil ne l’était pas moins. À la victoire des républicains, s’ajoutait une volonté de rupture définitive avec le mariage catholique.
174 A. Lefebvre-Teillard, Introduction historique au droit des personnes et de la famille, op. cit., p. 145.
175 J.-P. Levy, « Les idées de Portalis sur le mariage » dans Le Discours et le Code, Portalis, deux siècles après le Code Napoléon, Litec, Paris, 2004, p. 114.
Lien familial, lien obligationnel, lien social. Livre I
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