Introduction à la deuxième partie
p. 235-236
Texte intégral
1454. La dignité, qui fait de l’être humain une personne, est liée à sa nature humaine, elle est intrinsèque à l’individu. En tant que telle, la personnalité humaine ne peut qu’être distincte de la personnalité juridique qui, elle, est une qualité attribuée à l’individu. L’être humain est une personne, humaine, avant et indépendamment de ce que le droit lui attribue la personnalité juridique.
2455. L’intérêt de distinguer les deux personnalités n’est tangible et n’a de conséquences pratiques que lorsqu’elles ne coïncident pas et qu’il faut alors restituer à chacune son régime et ses effets. Depuis l’abolition de l’esclavage et de la mort civile698, une telle circonspection semblait inutile et les juristes ont pris l’habitude de se contenter d’une notion assez floue de personne, tendant à confondre les notions de personne humaine ou juridique, assimilant le terme de personne à celui de sujet de droit.
3456. Facilitée par cette proximité terminologique, la confusion est en outre aisée car les deux personnalités ne sont pas étrangères l’une à l’autre, « à moins de soutenir que ce n’est que par hasard que le même terme a été employé dans les deux cas »699. D’ailleurs, différenciées dans leur compréhension, les deux notions se rejoignent dans leur extension car il est habituel que les personnes humaines soient également des personnes juridiques, de même qu’il est habituel que les personnes juridiques soient des personnes humaines, même si ce n’est pas toujours le cas.
4457. Aujourd’hui la situation des individus dépourvus de personnalité juridique, c’est-à-dire les enfants à naître ou nés non viables, exige que l’on précise la notion de personne. On ne peut plus se permettre de confondre personne et sujet de droit car il y a, maintenant, intérêt à savoir si les normes applicables à la personne concernent ces individus dépourvus de personnalité juridique. En effet, l’imprécision de la notion de personne conduit, le plus souvent, à se fonder sur un défaut de personnalité juridique pour écarter des normes applicables à la personne humaine ou, plus rarement, à se fonder sur la qualité de personne humaine pour exiger des prérogatives qui sont réservées aux personnes juridiques. En raison des conséquences attachées à chacune de ces deux qualités, écarter ou retenir l’une ou l’autre a des conséquences graves pour un individu. Il faut donc les rétablir chacune dans son ordre et les distinguer (titre I) ; de cette manière la qualité de personne humaine peut produire les conséquences que le droit lui attache, en particulier lorsqu’elle ne coïncide pas avec la personnalité juridique (titre II).
Notes de bas de page
698 Loi du 31 mai 1854, portant abolition de la mort civile, D., 1854, Lois annotées, p. 99 ; DUVERGER, Collection des lois, tome 53, 1854, Paris, p. 282. Article 1er de la loi : « La mort civile est abolie ».
699 R. ANDORNO, La distinction juridique entre les personnes et les choses à l’épreuve des procréations artificielles, Thèse, Université Paris XII, L.G.D.J., 1996, p. 68.
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La notion de personne
Étude visant à clarifier le statut juridique de l’enfant à naître
Aude Bertrand-Mirkovic
2003
Le couple et la convention européenne des droits de l’homme
Analyse du droit français
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2004
Des comportements fautifs du créancier et de la victime en droit des obligations
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