Chapitre IV. La carte est un lieu
p. 75-83
Texte intégral
1 Théoriquement, le statut de l’espace des Terres australes peut être saisi plus clairement en opposition à l’utopie. Les arguments de l’équilibre terrestre, la théorie des glaces, l’utilisation des récits de voyage, la problématicité de la notion d’expérience et l’enthousiasme pour les découvertes géographiques ne sont certainement pas en contradiction avec la position de de Brosses au sein de la Compagnie française des Indes en qualité d’actionnaire. Cela ne fournit pas pour autant une réponse à la question de la compatibilité entre les projets de conquête des Terres australes et le genre littéraire de l’utopie1. Au contraire, l’intérêt colonial lui-même fait de ce rapprochement un contresens.
2La certitude quant à l’existence du Troisième Monde dérive, certes, de son inscription dans les desseins expansionnistes et, d’une façon ou d’une autre, dans un discours politique dont les aspirations cherchent appui sur un argumentaire scientifique. Mais la signification et les conditions de l’espace cartographique excèdent celles du colonialisme, au sens où le pouvoir ne produit jamais une connaissance à la mesure exacte de ses ambitions ; si une telle production de savoir est influencée par la politique, cette dernière ne détermine pas totalement la connaissance du monde. Certaines dynamiques sont bien directement liées aux enjeux du pouvoir politique, qu’il s’agisse d’une souveraineté réellement exercée sur un empire colonial ou dans un lieu situé « nulle part ». Mais le Troisième Monde ne rentre pas dans ce cadre : il apparaît plutôt comme témoin du régime de spatialité qui l’a produit. Cet élément, qui échappe à la raison conquérante tout en la précédant d’une certaine manière, relève de l’épistémologie de l’exploration, dont le postulat implicite affirme : il y a toujours quelque chose qui dépasse l’empirique.
3L’excédent de l’expérience du monde n’est pas nécessairement perçu comme un savoir spéculatif, produit par l’inexactitude des récits, car un tel dépassement renvoie à une expérience censée se vérifier ailleurs, dans l’avenir d’un espace à découvrir. Ce prolongement de l’expérience, tant évoqué par les voyageurs, sort du domaine empirique et dépasse la connaissance immédiate du monde. La carte se présente non seulement comme ce qui précède l’espace à explorer, mais aussi comme la continuation de l’expérience au-delà de son propre domaine, à travers la puissance du regard aérien du langage cartographique. Rapprocher le projet de Charles de Brosses, de Paulmier ou de La Popelinière avec l’utopie revient à éluder la nature essentiellement topographique qui se dégage d’une telle épistémologie. Il n’y a pas d’utopie dans le régime de spatialité auquel appartiennent ces desseins, lesquels partagent une logique propre qui les éloigne de ce genre littéraire. Autrement dit, la singularité où se logent ces propos expansionnistes ne s’accorde pas avec l’utopie comme genre, et l’inexistence d’un grand continent établie a posteriori ne peut pas non plus légitimer l’adjectif « utopique » associé à ces entreprises.
4Bien que nécessairement liée à l’imaginaire du voyage, la littérature utopique demeure étrangère à cette production de l’espace dans la mesure où pour définir son identité, elle a besoin d’un élément de rupture, d’une césure ontologique qui est absente des projets de colonisation des Terres australes. Lorsque Paulmier affirme : « Cecy n’est point une conjecture », il se place dans un discours géographique épistémologiquement proche de l’histoire. Depuis la création du genre par Thomas More, l’utopie désigne l’espace de « nulle part », qui n’existera en aucun temps ni en aucun lieu, car elle est en effet porteuse d’une désignation anhistorique soustraite à toute topographie, et se présente comme fuite dans une société idéale. L’île de l’utopie ne fait pas partie des terres à découvrir, on la présente généralement comme déjà découverte, mais surtout comme une dimension de la politique et de la morale ayant l’avantage de se montrer entièrement ouverte et disponible à l’exégèse d’un regard enquêteur, comme un objet qui tire sa propre transparence de son statut fictionnel. Elle se trouve non seulement hors des limites du monde connu, mais aussi hors de la notion géographique d’inconnu, au sens de l’économie spatiale de l’exploration proprement dite. Si cette économie est matérialisée sur la carte, l’utopie n’a de lieu propre ni dans l’espace cartographique ni dans le temps historique, précisément par le fait qu’elle est construite et présentée comme une fiction fondée sur le renversement des topographies.
5Dès lors qu’un topos garde sa lisibilité, il fait partie du régime de spatialité qui le produit. Entre la fin du xviiie et le début du xixe siècle, ce régime sera définitivement remplacé par une nouvelle spatialité où les mondes inconnus ne trouveront plus leur place et par conséquent l’utopie changera de statut. La portée toponymique des terrae incognitae subira une transformation profonde, car ils seront expulsés de l’espace cartographique, dont ils étaient pourtant les fondateurs. La Terra australis nondum cognita deviendra une entité étrangère à la géographie, une vue de l’esprit destinée à disparaître et à être dépassée. Mais, même une fois sortie de la carte, son statut de lieu ou sa qualité topographique ne changent pas, car sa fonction épistémologique, son rôle de témoin privilégié du régime de spatialité d’une époque, sa capacité d’orienter l’exploration, son potentiel colonial et l’intérêt qu’elle suscite auprès des puissants empêchent que la Terre australe soit confinée après coup dans le domaine de la fiction utopique sans tomber dans une sorte d’anachronisme. Le « réalisme » de l’utopie réside plutôt dans la normativité de ses structures civiles, dans l’idée de bien public, dans la cohésion d’une communauté politique, dans sa forme de gouvernement, dans son organisation sociale, économique et urbaine, qui constitue une altérité absolue. Le lieu du « nulle part » a besoin d’une coupure topographique qui l’oppose au discours de l’exploration et qui est absente des projets de colonisation du continent austral. La consistance politique de l’utopie, l’envers de sa fuite hors du temps et de l’espace, contribue à sa finalité critique, tandis que l’ailleurs géographique doit être toujours quelque part pour se présenter comme le prolongement du connu. Une île est utopique à condition de s’éloigner des cartes jusqu’à s’en dissocier radicalement et rompre les liens de continuité avec son espace réel de référence, ou encore à condition de se constituer comme étrangère à toute topographie et à toute chronographie. L’utopie est un tout achevé, un règne de l’ordre, tandis que les terrae incognitae sont enracinées dans un sol censé être découvert, où la force de la nature demeure intacte et où les indigènes n’opposeront aucune résistance aux conquérants. Si « ce qui est dit dans l’utopie et comme utopie ne peut se dire autrement2 », les Antipodiens ne se rapprochent alors nullement des Utopiens, sans quoi la signification tant de la persistance que de la disparition du continent austral du plan cartographique demeurerait obscure.
6Ainsi, le savoir géographique réunit les domaines scientifique et littéraire, dont les frontières ne peuvent être définies avec netteté au sein même des connaissances de la république des Lettres où ils s’entremêlent inextricablement. Cette solidarité se manifeste notamment dans des fuites intertextuelles, lesquelles par définition ne sont pas maîtrisables et qui, en dépit du tableau géométrique sur lequel elles sont déposées, échappent à l’objectivation spatiale ; par conséquent, aucune instance de contrôle ne se mettra durablement en place jusqu’à ce que le tableau cartographique s’émancipe de la république des Lettres.
7Dans le régime discursif qui précède cette scission inédite, l’histoire et la géographie ont besoin l’une de l’autre pour se comprendre : « L’Ancienne Géographie n’est pas moins nécessaire pour l’étude des belles Lettres, & de l’Histoire ancienne, que la Géographie nouvelle pour l’étude de l’Histoire moderne3. » C’est justement ce lien qui commence à s’affaiblir après les circumnavigations du globe des années 1760-1770, qui conduisent Buffon à faire un pas en arrière : « Je ne présume pas qu’au-delà du 50e degré, les régions australes soient assez tempérées pour que leur découverte pût nous être utile4. » À partir de ces périples, le continent austral, objet persistant d’ambitieux projets coloniaux, voit ses dimensions réduites au fur et à mesure que les voyageurs reviennent bredouilles au port de départ. Cela est lié au fait que, vers la fin du siècle, le langage de la connaissance géographique du monde commence à s’éloigner de l’écriture humaniste. En effet, une prise de distance s’opère par rapport à l’écriture érudite en matière géographique, autrement dit l’intertextualité entre lettres humaines et sciences de la nature s’affaiblit. Cette prolifération d’objets particuliers, de cabinets de curiosités et de lettres scientifiques se reflète géographiquement lorsque la même île, découverte plusieurs fois par plusieurs explorateurs, donne lieu à plusieurs îles sur les cartes. En revanche, l’esprit des circumnavigations du xviiie siècle commence à effacer des cartes les îles qui n’ont pas été trouvées.
8Face au déclin progressif des belles-lettres, l’attention s’oriente de plus en plus vers les savoirs jugés utiles5. De nouvelles instances de contrôle et de réduction de cette multiplicité se mettent en place à l’intérieur du système des belles-lettres, instances qui détermineront la fin de la pensée géographique où s’était déployé un certain régime de spatialité, et donneront lieu à la naissance de disciplines relativement autonomes et ainsi, à la mise en place d’une frontière toujours plus claire entre lettres et sciences. Au siècle des Lumières, l’affirmation des frontières non seulement entre un domaine et l’autre, mais aussi à l’intérieur de chacun, entraîne un véritable « tournant linguistique6 », qui se traduit par l’édition de méthodes d’histoire naturelle, de vocabulaires techniques et, surtout, de dictionnaires liés à des domaines spécifiques. Cette transformation culturelle est animée par « la nécessité, à un certain moment de l’histoire d’une communauté de savoir, que les acteurs s’occupent de la langue, de ses propriétés et surtout de sa terminologie, de manière à la contrôler pour ne plus en être dépendant7 ». Une autre remarque est nécessaire : la période des circumnavigations du globe, essentiellement anglaises et françaises, qui impliquent l’achèvement de la carte du monde dans ses grandes lignes, coïncide précisément avec celle où la publication de dictionnaires, qui deviennent de véritables « dispositifs de la découverte8 », atteint son point culminant. Néanmoins, ces dictionnaires n’intégreront pas immédiatement la disparition de la mappemonde inachevée qui était en cours. Avant que cette césure ne s’accentue, les géographes revêtent pleinement leur statut d’hommes de lettres mais surtout, ils apparaissent comme les principaux artisans d’une image de la Terre, celle d’une totalité inachevée. De Bacon à d’Alembert, cette image devient un prisme philosophique en mesure de structurer les connaissances humaines, une caractéristique due à son statut métaphorique.
9La délimitation des champs disciplinaires se précise en définissant des conventions qui traduisent le processus de séparation entre lettres et sciences. Dans ce contexte de redéfinition des critères scientifiques, la botanique et l’histoire naturelle sont les domaines les plus touchés par ces transformations. Cependant, la géographie aussi entre dans cette nouvelle donne, en particulier à travers une précision accrue de la technique de calcul de la longitude, un problème de la navigation moderne demeuré irrésolu pendant des siècles9. L’invention de ce puissant instrument d’objectivation de l’espace cartographique donne un caractère particulier aux circumnavigations du xviiie siècle, notamment à celles de Louis-Antoine Bougainville et de James Cook, qui seront les dernières expressions, désormais affaiblies, de la volonté de conquérir de vastes espaces inconnus. Le désir des gouvernements, rivaux dans la course coloniale, de trouver une autre Amérique, plus grande que celle découverte par Colomb, se manifeste par ces dernières expéditions dont la mission est de découvrir la Terra australis. Reposant sur l’érudition humaniste et le système des belles-lettres encore en vigueur mais en phase d’écroulement, les formes discursives ayant pour objet cette entité géographique seront produites tant que les conditions de visibilité et de lisibilité le permettront, plus précisément jusqu’à ce que la république des Lettres ne soit « engloutie sous l’entreprise du langage standardisé10 », au cours d’un siècle dont l’un des traits épistémologiques fondamentaux est la « mise en discipline des savoirs11 ».
10À l’aube de cette transformation, l’idée selon laquelle « plus on avance, & plus on voit les limites se reculer12 » est à l’horizon même de la représentation de l’espace. L’« œil de l’histoire » perçoit l’ancienne promesse qui tient ensemble les deux sphères de la terre et du ciel, la première étant encore un reflet de la seconde13 et leur science étant constamment vouée à combler l’intervalle cosmologique qui les sépare, en promettant toujours de nouvelles découvertes :
Il nous reste sans doute encore bien des connoissances à acquérir dans l’intérieur du globe terrestre. Sans parler des terres, des côtes & de toutes les isles inconnues ; sans nous exagérer la grandeur d’un nouveau continent, dont la découverte n’est peut-être pas fort éloignée (les Terres Australes), combien de parties de ce globe que le compas du géographe n’a pu jusqu’à présent mesurer, où même il ne peut nous servir de guide14.
11Dans l’article « Australe » du dictionnaire de La Martinière, nous lisons : « On a appelé Terres Australes, les terres peu connues qui sont vers le Pôle, opposé à celui du nord15. » Du point de vue de l’économie de l’espace, les énoncés du discours de la découverte se dégagent comme une prophétie inscrite sur la carte, c’est-à-dire sur un monde à cartographier où se rejoignent les espaces découverts et les espaces à découvrir. La particularité épistémologique de cette confluence, d’une part, n’est pas réductible aux raisons du colonialisme et, d’autre part, s’éloigne de l’esprit de l’utopie, y compris de celui des utopies australes16. En effet, ces dernières sont incontestablement étrangères au plan cartographique car le statut de leur espace littéraire ne peut et ne doit être modifié a posteriori, leur matière fictionnelle ne faisant pas l’objet d’une rétractation scientifique comme celle de Buffon.
12L’avenir comme révélation de nouvelles découvertes est ouvert par le pouvoir prophétique des cartes, qui apparaît comme un prolongement singulier de l’espace du récit de voyage. Le temps issu de cet espace à venir renvoie au lien entre l’exploration en cours et une découverte possible, lien fondé tant sur la malléabilité des masses continentales que sur la partialité des récits disponibles. Cependant, les nœuds du binôme formé par l’exploration et la découverte sont défaits par les récits des navigateurs de la deuxième moitié du siècle des Lumières, lesquels substitueront une nouvelle sensibilité scientifique au récit de leurs prédécesseurs, qui avaient regardé les mondes inconnus à travers un miroir grossissant.
13Dans leurs nouveaux périples, après avoir parcouru les mers de l’hémisphère sud, les explorateurs feront des découvertes très modestes au regard des prédictions cartographiques, et mettront définitivement fin à la grandeur des projets coloniaux aux Antipodes en prouvant que l’équilibre entre les hémisphères de la planète était maintenu par la planète elle-même. Alors, un renversement s’opère, subtil mais radical : la Terre ne sera plus un reflet de la carte, et ce n’est que dans la nouvelle épistémologie de la carte comme reflet de la Terre que l’immensité de la Terre australe pourra, injustement, être reléguée au rang des utopies.
Notes de bas de page
1 Le projet de de Brosses a suscité le commentaire suivant : « De l’hypothèse cosmographique à la fiction politique c’est un glissement presque insensible qui s’opère, et dont l’histoire se confond presque avec celle du genre utopique », Jean-Michel Racault, « Résonances utopiques de l’Histoire des navigations aux Terres australes du président de Brosses », dans Mythes et géographies des mers du Sud, op. cit., p. 45 ; quant au projet de Paulmier, il serait l’expression « d’une préconception nettement utopique concernant ces lieux inconnus », Margaret Sankey, « Est ou Ouest : le mythe des terres australes en France aux XVIIe et XVIIIe siècles », dans Kumari R. Issur, Vinesh Y. Hookoomsing (dir.), L’océan Indien dans les littératures francophones. Pays réels, pays rêvés, pays révélés, Karthala/Presses de l’université de Maurice, 2001, p. 13 ; Margaret Sankey affirme aussi que « l’utopisme qui parcourt le texte de Paulmier est non seulement l’élément qui a inspiré l’intérêt en haut lieu, mais c’est aussi la cause de son échec », Jean Paulmier, Mémoires, op. cit., p. 79.
2 Bronislaw Baczko, Lumières de l’utopie, Paris, Payot, 1978, p. 19.
3 Nicolas Lenglet Du Fresnoy, Méthode pour étudier la géographie, op. cit., t. 4, p. II.
4 Buffon, Histoire naturelle. Supplément, t. 5, 1778, p. 269.
5 « Le public lettré reconnaît les retombées concrètes des sciences mathématiques et physiques. Une part du travail de l’Académie des sciences consiste en l’expertise des découvertes, et la fonction de l’institution est précisément de fixer les limites des sciences utiles à la monarchie », Jean-Pierre Schandeler, « République des sciences ou fractures de la république des Lettres ? », Dix-huitième siècle, 40, 2008, p. 325, nous soulignons.
6 Marc J. Ratcliff, « Un seul ne sçauroit tout faire. République des lettres et tournant linguistique du XVIIIe siècle », dans Frank Salaün, Jean-Pierre Schandeler (dir.), Entre belles-lettres et disciplines. Les savoirs au xviiie siècle, Ferney-Voltaire, Centre international d’étude du XVIIIe siècle, 2011. Sur la question des disciplines, voir Martine Groult (dir.), L’Encyclopédie ou la création des disciplines, Paris, CNRS Éditions, 2003.
7 Marc J. Ratcliff, « Un seul ne sçauroit tout faire. République des lettres et tournant linguistique du XVIIIe siècle », art. cité, p. 69.
8 Au sens de Philippe Despoix : « Des discours institutionnels, des objets techniques, des médias de diffusion, des formes de représentation, des déplacements sémantiques : soit la chaîne hétérogène de ce que j’appelle les “dispositifs de la découverte“ », Le monde mesuré. Dispositifs de l’exploration à l’âge des Lumières, Genève, Droz, 2005, p. 11. Pour la publication de dictionnaires au XVIIIe siècle, voir Marc J. Ratcliff, « Un seul ne sçauroit tout faire. République des lettres et tournant linguistique du XVIIIe siècle », art. cité, en particulier les graphiques « Fréquence des dictionnaires par thème de 1700 à 1799 », p. 60, et « Comparaison entre la fréquence des dictionnaires de langue et de science et arts », p. 61, qui montrent que dans la période 1760-1779 se produit l’augmentation la plus significative.
9 Pour une histoire de la longitude, voir Philippe Despoix, Le monde mesuré, op. cit., p. 39-72.
10 Marc J. Ratcliff, « Un seul ne sçauroit tout faire. République des lettres et tournant linguistique du XVIIIe siècle », art. cité, p. 72.
11 « Le XVIIIe siècle a été le siècle de la mise en discipline des savoirs, c’est-à-dire l’organisation interne de chaque savoir comme une discipline ayant, dans son champ propre, à la fois des critères de sélection qui permettent d’écarter le faux savoir, le non-savoir, des formes de normalisation et d’homogénéisation des contenus, des formes de hiérarchisation […] », Michel Foucault, Il faut défendre la société. Cours au Collège de France (1975-1976), Paris, Seuil/Gallimard, 1997, p. 161-162.
12 Bruzen de La Martinière, Le grand dictionnaire géographique, historique et critique, Paris, Chez les libraires associés, 1768, t. 1, p. 1.
13 En tant qu’image de la totalité de l’univers, la cosmologie a toujours représenté les deux sphères ensemble, mais à partir du XIXe siècle ce lien disparaît : « Les globes célestes deviennent alors des curiosités et sombrent peu à peu dans l’oubli », Peter Sloterdijk, Globes. Macrosphérologie. Sphères II, op. cit., p. 68. À l’époque des Lumières, il était accepté ; par exemple, à propos des mutations géologiques des frontières des continents, Voltaire écrit : « […] s’il s’est perdu des étoiles dans l’immensité de l’espace, si la septième des Pléiades est disparue depuis longtemps, si plusieurs autres se sont évanouies aux yeux dans la voie lactée, devons-nous être surpris que notre petit globe subisse des changements continuels ? », Essai sur les mœurs, Paris, Bordas, 1990, « Introduction », p. 4.
14 Bruzen de La Martinière, Le grand dictionnaire géographique, historique et critique, op. cit., p. 1.
15 Ibid., p. 551. Il faut noter la distinction faite entre le pôle Sud proprement dit et le continent austral envisagé comme une large masse terrestre qui l’entoure : « Le Pôle Sud est environné d’une grande Terre & d’Isles qui s’étendent davantage du côté de la Mer du Sud, & que l’on a négligé de découvrir jusqu’à présent », Bernard de La Harpe, Mémoire pour la France, servant à la découverte des Terres Australes, cinquième partie du monde, Rennes, Joseph Vatar, s. d., p. 1.
16 Le recours à la vraisemblance dans les utopies australes rejette la notion d’inconnu et privilégie une description minutieuse de sociétés idéales ; voir à ce propos La Terre Australe connue (1676) de Gabriel de Foigny, Histoire des Sevarambes (1677) de Denis Vairasse, La cité des Césars (1764) de James Burgh et La découverte australe par un Homme-Volant ou le Dédale français (1781) de Restif de La Bretonne. Cette dernière, centrée sur le thème du monde à l’envers, décrit un pays aux antipodes de la France dont la capitale s’appelle Sirap, où se trouve un savant nommé Noffub.
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