Chapitre I. La terre comme abstraction imagée
p. 17-25
Texte intégral
1 Toute la Terre se présente sous les yeux de Ménippe, dont le singulier voyage sur la Lune est motivé par « un grand embarras, causé en premier lieu par ce que les philosophes appellent précisément le cosmos1 ». Depuis l’astre nocturne, le personnage voit apparaître pour la première fois sous son regard la Terre habitée dans sa totalité. Si le contenu de cette image contient quelque chose qui n’est pas de l’ordre de l’évidence et dépasse sans doute le caractère fictionnel du voyage, comment doit-on comprendre, alors, l’abstraction imagée de la Terre et la mise à distance que cette singulière construction suppose ?
2Dès ses origines, la géographie semblait incarner cette double nécessité : rendre compte de la surface terrestre et représenter son territoire. Pourtant, les savoirs géographiques se sont toujours orientés vers des objets qui, loin de s’épuiser empiriquement, suscitaient des questions sur l’identité de ces derniers, sur la constitution du monde et sur la nature de ses limites. L’art et la technique géographiques se concentrent sur un objet dont la connaissance empirique n’est pas une condition nécessaire. L’expérience de cet objet n’est pas toujours un critère lorsque la géographie pose son regard sur une étendue qu’elle conçoit, prolongeant ainsi l’espace empirique dans l’hypothèse. Or cette prolongation peut coïncider avec la construction d’un point de vue extérieur. Le regard géographique n’est paradoxal qu’en apparence, car les grands espaces dont il se fait l’interprète correspondent à des espaces abstraits où l’empiricité s’estompe. L’espace sensible est en quelque sorte déplacé et construit par un procédé suivant lequel l’ici a moins d’importance que l’ailleurs. À la Renaissance, cet ailleurs assume la fonction singulière et privilégiée d’un prisme à travers lequel observer le monde : « S’il est ainsi que la terre soit comme un globe tout rond, pendu au milieu de l’univers, il faut nécessairement qu’elle soit regardée du ciel de tous côtés2. »
3Les savoirs confluant dans la pensée géographique ne suivent pas tous l’impératif selon lequel, pour écrire ou dessiner le monde, il faut le mesurer. Strabon insiste sur l’importance du lien entre géographie et philosophie, et rappelle que les premiers philosophes pouvaient être aussi des géographes, comme Anaximandre de Milet qui, au vie siècle avant J.-C., dessina le premier une carte du monde. En outre, en affirmant le caractère philosophique de la géographie3, Strabon souligne l’affinité entre ces deux domaines qui partagent souvent tant leur objet que le public auquel ils s’adressent. La terre habitée est représentée à travers la puissance de la carte qui, dans l’abstraction de l’espace réel, représente des lieux sur un plan en établissant des rapports spatiaux. Ce regard géographique ne contemple pas nécessairement des espaces effectivement parcourus pour les dessiner, ni même des endroits vus de loin près de la ligne d’horizon ; la science de l’espace terrestre saisit la démesure que les premiers penseurs de l’étendue du monde se sont efforcés de dessiner.
4L’espace géographique apparaît ainsi comme une spéculation fixée sur une carte, permettant de bannir le rapport physique entre le corps humain et son espace naturel : il s’agit en fait de se tenir à distance de la Terre pour la contenir dans un champ visuel correspondant à une abstraction imagée. Une carte de la Terre présente l’espace en élargissant la perspective : le regard s’élève et un champ visuel se crée au-dessous de l’œil du zénith, capable de transformer le ciel même en plan zénithal. Cette image de la Terre, qui ne correspond à aucun point de vue empirique, est perceptible par une perspective dont le pouvoir consiste à dilater son champ visuel jusqu’aux confins du monde pour être ensuite projeté sur la rétine humaine. Cette dernière, ne perçoit alors plus l’espace vécu et traversé par la corporéité, mais sa construction théorique, l’ici reconfiguré ailleurs, où la Terre devient potentiellement un reflet cartographique. Le pouvoir de la carte est enraciné dans un rêve archaïque de l’homme, à savoir voler dans le ciel, s’éloignant ainsi de sa nature d’animal terrestre pour devenir un être aérien, habitant la totalité et demeurant dans la fiction d’une perspective omnisciente. Un tel vol n’est réalisable qu’au prix du détournement de toute topologie empirique : « Voir le monde s’étaler sous son corps est un vieux phantasme que les cartes géographiques permettent de réaliser métaphoriquement, c’est-à-dire au prix d’un détour, si léger qu’il n’en paraît guère problématique, grâce au double analogique de la réalité4. »
5 Il y a de l’extraordinaire dans cet effort spéculatif consistant à produire un regard ne se situant pas sur la surface terrestre, mais qui, au contraire, exige de s’en éloigner. Pour accéder à cette vision globale il faut quitter la perception immédiate du monde donnée par les sens, condition sans laquelle aucun regard cosmographique et aucune vision du ciel de l’extérieur, à la façon des dieux, n’est possible. Strabon avait bien conscience de cet effort et de la difficulté de renverser son propre point de vue. Dissocier le domaine philosophique de la géographie, reviendrait à dissocier la sphère céleste de la sphère terrestre, alors que chacune de ces parties appartient au même système d’intelligibilité. Il faut donc considérer la sphère céleste dans sa relation avec la nôtre : « Une fois qu’on a ainsi élevé sa pensée, il ne faut pas pour autant négliger le globe terrestre5. » Au contraire, dans l’effort philosophique du géographe, l’hétérogénéité des savoirs esquisse une synthèse qui englobe dans son regard les extrémités du monde : « La géographie touche à la fois à l’étude de la cosmographie et à celle de la géométrie, unissant ce qui vit sur terre à ce qui se meut dans le ciel, les ramenant à l’unité comme s’ils étaient tout proches, et non pas séparés6. » Les limites du monde sont poussées quelque part vers ses extrémités, vers un dehors, pour être intégrées dans une perspective hypothétique. Cette construction de la pensée géographique, d’une certaine façon, n’est indépendante ni de la fiction ni de la raison. Saisir cette unité n’est pas chose aisée, car il faudrait s’abstraire du milieu naturel et de sa propre nature d’être terrestre, ce qui est une opération plutôt complexe. L’éloignement de l’environnement humain suppose le point de vue non pas de l’oiseau, mais des astres, comme s’il était question d’adopter leur échelle cosmique et leurs modèles spatiaux. Ce n’est pas une fuite dans le ciel que Ménippe accomplit dans son vol, mais c’est le sol lunaire qu’il cherche à atteindre. Un tel besoin de s’écarter d’une topographie sensible se trouve au point de jonction de l’espace empirique et de l’espace théorique. C’est en quelque sorte le parcours du personnage de Lucien, qui acquiert une perspective depuis laquelle son regard peut parcourir le trajet de son propre voyage. Face à lui, le portrait de la Terre présente des données sensibles qui ne sont pas bannies, mais sublimées dans l’abstraction d’une perspective paradoxale.
6Une fois constitué, le regard géographique ne reste pas isolé. Il intègre d’autres savoirs et se nourrit de l’esprit d’observation géométrique et astronomique des autres sciences :
[…] si l’on ne sait pas ce qu’est une ligne droite, une courbe, un cercle, une surface sphérique ou un plan, si, dans le ciel, on n’a même pas appris à reconnaître les sept étoiles de la Grande Ourse, ni rien d’autre dans ce domaine, il faut ou bien ne pas se plonger du tout dans un ouvrage comme le nôtre, ou bien ne pas le faire tout de suite, mais d’abord acquérir ces bases sans lesquelles on ne saurait se familiariser avec la géographie7.
7Ces « bases » correspondent aux domaines impliqués dans le savoir géographique, qui sont réinvestis dans sa topographie intelligible. Au sein de celle-ci, le statut des entités qui intéressent le géographe peut être analogue à celui des concepts. L’expression la plus éclatante de la mobilité spéculative de ce regard est probablement représentée par la théorie de la sphéricité de la Terre, où l’empiricité ne peut qu’être subordonnée à une pensée géographique transformée en hypothèse. L’idée de la Terre comme sphère entourée par le cosmos, sphérique à son tour, ne relève pas seulement de l’abstraction : elle est le résultat de théories cosmologiques dont le géographe doit tenir compte, car la forme sphéroïdale de la Terre est une conséquence du mouvement du ciel et résulte de la constitution même de l’univers. L’objet du savoir géographique, en effet, s’étend entre la terre et le ciel, et, en se constituant, le « gê » étymologique est dépassé pour que la sphère devienne un modèle du monde. Ce dernier se présente ainsi comme une forme renfermée, mais ouverte aux tentatives de produire une image de l’univers, dans les oscillations allant du fragment d’horizon, qui appelle le navigateur, à la limite offerte au regard dans la contemplation de l’image de la Terre. L’exploration du monde et la lisibilité de ses traces se nourrissent réciproquement, aussi en se rendant incompatibles. Les marins n’ont pas toujours reconnu les terres et les océans qu’ils ont traversés dans une carte trop abstraite, tout comme les cartographes n’ont pas toujours pu identifier les terres et les océans des récits de voyages.
8 De l’inspiration des hexamètres d’Homère aux prédictions du gnomon d’Anaximandre8, l’intrication des éléments constituant l’espace géographique à grande échelle s’explicite alors : fabrication d’images et description à l’aide des structures narratives du récit, d’une part, et géométrisation à l’aide du calcul mathématique, de l’autre. Ces éléments sont traversés par une syntaxe spatiale qui dessine la continuité entre les récits des voyages aussi bien réels qu’imaginaires. En ce sens, on peut affirmer que l’origine de ce savoir remonte à la poésie en indiquant Homère comme le « promoteur de la géographie9 ». Strabon, et avec lui la géographie grecque, revendique à plusieurs reprises l’exactitude des descriptions homériques et défend le Poète en insistant sur ses connaissances en matière astronomique et géographique. Selon Homère, la terre est entourée par l’océan et sa limite est circulaire, une affirmation attestée par l’expérience des voyageurs ayant atteint les limites de la terre où, nous dit Strabon, ils ont toujours trouvé la mer. Le lien avec la philosophie, les sciences et la paternité homérique sont des caractéristiques essentielles du savoir de la terre et du ciel, dont le but premier ne consiste nullement à fournir des moyens pour l’action humaine dans le monde. Ce savoir se construit à travers des liens avec d’autres domaines, qui lui fournissent des méthodes et des données de nature hétérogène : « L’étude de la géographie comporte aussi toute une part non négligeable de réflexion théorique, soit dans l’ordre de la technique, des mathématiques et de la physique, soit à partir de l’information historique et des récits légendaires10. » Pour Strabon, et pour la culture grecque en général11, ces derniers constituent non seulement une source de connaissance, mais ils contribuent aussi à l’initiation de toutes les sciences concernées par la géographie.
9L’image de la Terre apparaît pour une première fois sur le bouclier d’Achille. Lorsque sa mère, la déesse Thétis, sollicite le dieu Héphaïstos pour qu’il forge des armes destinées à son fils, celui-ci façonne
[…] un bouclier grand et solide, aux ornements variés, avec un contour triple et resplendissant et une attache d’argent. Et il mit cinq bandes au bouclier, et il y traça, dans son intelligence, une multitude d’images. Il y représenta la terre et l’Ouranos, et la mer, et l’infatigable Hélios, et l’orbe entier de Sélènè, et tous les astres dont l’Ouranos est couronné : les Pléiades, les Hyades, la force d’Oriôn, et l’Ourse, qu’on nomme aussi le charriot qui se tourne sans cesse vers Oriôn, et qui seule, ne tombe point dans les eaux de l’Okéanos […] puis, Hèphaistos, tout autour du bouclier admirablement travaillé, représenta la grande force du fleuve Okéanos12.
10En démiurge, Héphaïstos travaille la matière avec le feu, véritable outil capable à la fois de donner un ordre à l’univers et de rendre toute sa beauté à l’image du bouclier, dont le symbolisme cosmique contient déjà le « coup de force intellectuel » de ceux qui élèveront leur pensée pour contempler le monde du dehors, suivant un parcours d’abstraction où la raison s’éloigne de l’empiricité et trouve un point d’appui dans les structures du récit. Aussi la géographie ne pourra-t-elle oublier cette image représentant l’extrémité des astres autour d’une terre entourée par l’océan : Strabon considère que « [Homère] a représenté le monde habité baigné de tous les côtés par l’océan, ce qui est la stricte vérité13 ».
11Selon la tradition, la carte d’Anaximandre de Milet est la première représentation de l’œcoumène, ou terre habitée. Héritière du cosmos forgé par Héphaïstos, ce n’est pas non plus aux voyageurs qu’elle s’adresse : sa finalité n’est pas pratique, mais contemplative. La carte représente l’ensemble de la terre habitée dont elle montre graphiquement la distribution des parties. De même, la théorie de la sphéricité de la Terre chez les pythagoriciens s’efforçait de représenter le monde en suivant la géométrie symétrique et parfaite de la sphère qui, comme le bouclier, était divisée en cinq zones14. Le savoir illustré dans cette image est ainsi l’expression d’un intérêt pour l’espace au-delà de la surface terrestre. L’inspiration comme la force du bouclier sont profondément géographiques puisque, traduisant une image en mots, il parvient à combiner la double signification étymologique de « dessiner » et d’« écrire ». Dans cette dynamique inclusive, l’expérience humaine sert alors à confirmer une spéculation géographique. Démontrer la sphéricité de la Terre par l’expérience ne serait qu’une démonstration a posteriori, reposant notamment sur des preuves optiques, telle que la perception, attestée par les voyageurs, de la ligne d’horizon comme une ligne courbe. Cette courbure de l’océan, élargie à plus grande échelle par la pensée, forme une sphère géométrique parfaite pouvant constituer l’objet d’une science. Bien qu’impliquée dans cette construction, l’expérience ne peut fournir qu’une démonstration limitée et de la sphéricité de la terre et de la présence, tout autour, de l’eau, car « là où il n’est pas donné aux sens de nous le faire admettre, le raisonnement le démontre15 ». La raison géographique, quant à elle, peut prouver la forme sphérique de la Terre, mais elle ne reste pas étrangère aux recours poétiques impliqués dans cette abstraction imagée. Celui qui entreprend ce vol spéculatif vers une topographie hypothétique constate ainsi que la condition première de cette même topographie, la métaphore de la sphère, existait déjà dans l’univers créé par le Poète. En effet, sur la Lune, Ménippe observe la Terre et constate que « le simple fait de tout voir demandait un gros effort. Pourtant les principales scènes que l’on observait ressemblaient à celles qui, selon Homère, figuraient sur le bouclier16 ».
12La pensée géographique combine la mesure de l’espace à travers sa géométrisation et le récit de l’espace à travers sa syntaxe. Le premier aspect est contenu dans l’idée que « toute chose est nombre », dans l’espace représenté par les signes mathématiques de son intelligibilité, où la figure métaphorique de la sphère assume la fonction d’une puissante idéalité. Pourtant, ni chez les Anciens ni chez les Modernes, les principes qui gouvernent l’univers ne s’énoncent exclusivement dans une logique géométrique. Le mode opératoire de la pensée géographique ne suppose pas nécessairement des passages des prémisses aux conséquences, ni la construction de démonstrations où les énoncés successifs dérivent des énoncés précédents. Par son ouverture même à l’hypothèse, l’espace spéculatif du monde, faisant partie de sa géographicité, ne saurait aboutir à des géométries immuables, car il est impossible d’affirmer avec certitude si la sphère est cause ou effet. La syntaxe de la Terre ne contredit pas la tentative de saisir la sphère par ses qualités mesurables, constantes ou éternelles. Elle contribue à construire l’espace pour rendre possible sa mesure à travers la production d’un discours censé interroger la manière dont les lieux parcourus et à parcourir se combinent en formant des surfaces à l’échelle des masses terrestres et océaniques.
13Il ne s’agit ni de sous-estimer l’espace réel, effectivement parcourable, physique, historique ou politique, ni de concevoir la pensée géographique exclusivement à travers des espaces à petite échelle ; il est plutôt question d’examiner l’hypothèse selon laquelle la source de la géosyntaxe n’est pas l’ici, mais l’ailleurs et ses confins. Un domaine historique de la pensée est alors créé, muni d’une logique propre, à partir de laquelle l’approximation des masses terrestres et océaniques acquiert une orientation et une disposition particulière dans l’espace du globe. Dans ce passage du chorographique au géographique, la syntaxe de l’espace s’ouvre au calcul de ses corps hypothétiques et s’inscrit dans la mobilité des interstices entre les continents et les mers.
14Il y a, entre la Renaissance et l’âge classique, une duplicité constitutive dans la manière de connaître et représenter le globe, tantôt quantitativement, tantôt qualitativement. D’une part, la tradition ptoléméenne, où il est question de fixer les coordonnées d’un point déterminé sur la surface d’une Terre géométrisée ; de l’autre, la tradition plinienne, qui s’efforce d’en tracer le portrait. L’une traduit l’espace en nombres, l’autre en mots. D’une part l’astronomie et l’abstraction des mathématiques, de l’autre, l’histoire naturelle et la narrativité de l’expérience du voyage : la première correspond à une « problématique de la mesure », la seconde à une problématique de la « description et de la collection17 ».
15Ne pouvant être vérifiée selon les critères de la science du nombre, la vraisemblance du récit du voyageur repose sur l’espace ouvert de la syntaxe, et non sur l’espace géométriquement clos de la sphère. En tant que langage de la géographie, la cartographie étudie et représente l’ordre et l’économie de la surface terrestre, c’est-à-dire la disposition de ses parties dans ses rapports avec l’univers. Les deux niveaux, celui du nombre et celui des mots, se déploient à proximité l’un de l’autre, se corrigeant, s’équilibrant et se nourrissant réciproquement. Dans leur voisinage, alors que la syntaxe de l’espace contribue à multiplier les mondes, la géométrie les situe dans une surface sphérique et ouverte à des entités géographiques comme celle des Antipodes.
Notes de bas de page
1 Lucien de Samostate, Icaroménippe. Voyages extraordinaires, Paris, Les Belles Lettres, 2009, § 4, p. 193.
2 Frank Lestringant (éd.), Le Brésil d’André Thevet. Les singularités de la France antarctique (1557), Paris, Chandeigne, 2011, p. 291.
3 « Oui, c’est affaire de philosophe, si jamais science le fut, que la science géographique », Strabon, Géographie, Paris, Les Belles Lettres, I, 1, 1, p. 64. Strabon considère que son ouvrage doit servir à celui qui « a suivi le cycle des études et reçu la formation en usage chez les hommes libres et les adeptes à la philosophie », ibid., I, 1, 22, p. 84.
4 Christian Jacob, L’empire des cartes. Approche théorique de la cartographie à travers l’histoire, Paris, Albin Michel, 1992, p. 16. Autrement dit, « la carte symbolise le coup de force intellectuel consistant, pour des acteurs humains, à s’abstraire de leur environnement terrestre pour construire, par la force de la raison et de l’imagination, un point de vue extérieur et zénithal sur la Terre », Christian Jacob, « Géographie », dans Jacques Brunschwig, Geoffrey Lloyd, Pierre Pellegrin (dir.), Le savoir grec, Paris, Flammarion, 2011, p. 365. En ce sens, Peter Sloterdijk considère que « la perception humaine vise toujours à collecter des impressions de situations sous la voûte céleste, et jamais à voir le ciel de l’extérieur. Le globe céleste se révèle ainsi être une figure hyperbolique qui prend du crédit auprès d’une vision supra humaine », Globes. Macrosphérologie. Sphères II, Paris, Pluriel, 2011, p. 70.
5 Strabon, Géographie, op. cit., I, 1, 15, p. 75.
6 Ibid., p. 76.
7 Ibid., 21, p. 84.
8 Diogène Laërce, Vie et doctrine des philosophes illustres, Paris, Librairie générale française, 1999, II, 1, p. 209.
9 Strabon, Géographie, op. cit., I, 1, 10, p. 73.
10 Ibid., 19, p. 80-81.
11 L’éducation en Grèce eut « pendant toute la durée de son histoire, Homère comme texte de base, comme centre de toutes les études », Henri-Irénée Marrou, Histoire de l’éducation dans l’Antiquité, Paris, Seuil, 1981, t. 1, p. 33.
12 Homère, Iliade, XVIII, trad. Leconte de Lisle, Paris, Maxi-Livres, 2002, p. 266-269.
13 Strabon, Géographie, op. cit., I, 1, 3, p. 65. La portée cosmologique de cette image, « la plus ancienne œuvre d’art représentant l’image du monde » (Peter Sloterdijk, op. cit., p. 190), est considérable et impossible à mesurer : « Homère a embrassé toute la genèse de l’univers. Quelles sont les origines premières de cet univers, quel en est le démiurge, comment les diverses parties ont été séparées de la masse, Homère l’expose et le montre clairement lorsqu’il forge avec le bouclier d’Achille, une image du monde sphérique », Félix Buffière, Les mythes d’Homère et la pensée grecque, Paris, Les Belles Lettres, 2010, p. 157.
14 Sur la question du rapport entre les cinq plaques du bouclier d’Achille et la théorie des cinq zones de la sphère terrestre, voir Félix Buffière, Les mythes d’Homère et la pensée grecque, op. cit., p. 158-163.
15 Strabon, Géographie, op. cit., I, 1, 8, p. 71.
16 Lucien, Icaroménippe, op. cit., § 16, p. 213.
17 Jean-Marc Besse, Les grandeurs de la Terre. Aspects du savoir géographique à la Renaissance, Lyon, ENS Éditions, 2004, p. 14.
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