Le beau et ses traductions
Des quatre définitions du beau dans le Hippias majeur
p. 13
Texte intégral
1Le dialogue dont il sera question ici n’est peut-être pas de Platon ; du moins y a-t-il de sérieux doutes sur son « authenticité1 ». La question de l’auteur du dialogue nous inquiétera d’autant moins ici que nous allons lire ce texte comme une collection savante de lieux communs, les voir ensemble permettant d’en apprécier la teneur et l’action des uns sur les autres. Il y a bien sept définitions du beau proposées à notre intelligence dont les trois premières, prêtées au grand sophiste Hippias, ne semblent pas valoir la peine qu’on s’y attarde, étant donné qu’elles interprètent le beau comme s’il n’était pas une idée, mais une chose : une belle jeune fille, πάρθενος καλή, de l’or, χρύσος, pour ne rien dire de la troisième qui résume l’éthos du bourgeois athénien moyen de l’époque et dont Socrate dit qu’elle mériterait une belle correction, tant elle lui semble stupide. Et pourtant, les deux premières définitions nomment bien ce dont il s’agit en matière de beauté, à savoir de sexualité et de fétichisme, alors que la troisième, qui rappelle les éléments nécessaires à une vie « en beauté », richesse, santé et honneurs, sans oublier la mort qui ne cesse de demander son tribut aux vivants sous forme d’enterrements convenables pour les parents et par les enfants, constitue justement la bienséance derrière laquelle on arrive tant bien que mal à cacher et à refouler le caractère foudroyant de la beauté proprement dite. Mais tout ceci ne nous concernera pas ici, et nous passons aux choses sérieuses, c’est-à-dire aux définitions proprement dites du beau : il y en a quatre.
Notes de bas de page
1 Ce jugement récemment chez Ernst Heitsch dans la préface de son édition du Hippias majeur, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2011 ; voir aussi Ernst Heitsch, Grenzen philosophischer Echtheitskritik : Bemerkungen zum « Großen Hippias », Stuttgart, Franz Steiner, 1999. L’opinion contraire avec un résumé de la littérature plus ancienne chez Maria Teresia Liminta, Il problema della Bellezza in Platone. Analisi e interpretazioni dell’« Ippia Maggiore », Milan, Vita e Pensiero, 1998.
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