Quatre questions sur la violence1
p. 165-177
Texte intégral
1L’utilisation de la notion de violence dans le débat anthropologique français a été marquée dans les dernières années par deux moments importants. Le numéro spécial d’Études rurales dirigé en 1984 (n° 95-96) par Élisabeth Claverie, Jean Jamin et Gérard Lenclud, Ethnographie de la violence, abordait les problèmes centraux pour saisir anthropologiquement les situations de violence de la qualification logique, du relativisme éthique et de l’enquête ethnographique. Puis un renouveau d’intérêt suivit la publication en 1996 et 1999 du séminaire de Françoise Héritier au Collège de France, De la violence1. Parmi de nombreux exemples plus récents, citons les travaux de Jackie Assayag ou de Didier Fassin2. Le recueil de textes destiné à servir de manuel qu’ont édité Nancy Scheper-Hughes et Philippe Bourgois permet de faire le point sur le développement parallèle du débat américain, puisqu’il se donne pour objet « le champ des études sur la violence qui s’appuient sur l’anthropologie3 ».
2Or, à peine proposé, ce champ de recherche semble se déliter, tant la définition même du concept est délicate. Élisabeth Claverie, tout en notant que « chacun sait bien ce que violence veut dire », renvoyait d’abord aux « actes qui atteignent directement l’intégrité corporelle4 ». Pour Philippe Bourgois et Nancy Scheper-Hughes, la violence est à la fois une atteinte au corps, à la personne, à la dignité et aux valeurs5. Si une telle progression semble inévitable pour accéder aux multiples dimensions de l’expérience de la violence, elle n’en est pas moins problématique. Peut-on dire par exemple que la violence « physique » se confond avec l’atteinte à l’« intégrité » corporelle ? Le seul concept d’« intégrité » engage déjà toute une métaphysique des conceptions implicites du « nœud obscur qui attache ce corps à ce je », pour reprendre une expression de Pierre-Henri Castel6. Ou encore, comment situer dans ces définitions minimales de la violence les faits qui relèvent de l’insulte, de la violence morale, de la violence symbolique, dont on doit immédiatement dire qu’ils ne sont ni similaires aux violences physiques, ni inexistants ? L’élargissement ou la restriction du concept pose toujours la question de sa possible déréalisation, comme de la banalisation ou de l’occultation de faits de violence. On sait qu’un des enjeux théoriques de la polémique qui a accompagné la publication des résultats de l’Enquête nationale sur les violences envers les femmes en France (ENVEFF) portait précisément sur les conditions de légitimité scientifique d’un indice global de violence7, c’est-à-dire sur la question de la continuité entre les différents registres d’expériences et de faits rassemblés sous ce concept.
3On pourrait de la même manière s’interroger sur la façon dont le concept de « violence symbolique » place le consentement du côté de la violence8, en en faisant l’effet d’une emprise plus forte encore que la violence physique, et qui influe sur les âmes, les habitudes corporelles, la structure des comportements, le jugement de l’individu sur lui-même. Le profond remaniement qu’opère Pierre Bourdieu à partir de l’opposition althussérienne entre ce qui « fonctionne à la violence » et ce qui « fonctionne à l’idéologie9 » laisse ainsi planer l’incertitude la plus grande quant à la consistance même de la notion de violence. On peut aussi questionner la définition extrêmement englobante que propose Françoise Héritier – « toute contrainte de nature physique ou psychique susceptible d’entraîner la terreur, le déplacement, le malheur, la souffrance ou la mort d’un être animé ; tout acte d’intrusion qui a pour effet volontaire ou involontaire la dépossession d’autrui, le dommage ou la destruction d’objets inanimés » : à quelles conditions peut-on rassembler les objets inanimés, les animaux et les humains dans un même registre d’expérience ? Ou est-ce alors à dire qu’il ne faut pas penser la violence comme expérience10 ?
4L’anthologie de Philippe Bourgois et Nancy Scheper-Hughes vise le public des étudiants nord-américains : elle représente un support pédagogique dont le souci informatif se double d’une volonté affirmée de susciter une prise de conscience politique chez ses lecteurs – relative à un ensemble d’événements parmi lesquels l’extermination des Indiens de Californie, les lynchages de Noirs dans le Sud des États-Unis, l’extermination nazie des Juifs européens, ou encore le « 11 septembre » (analysé ici par Noam Chomsky et par Nancy Scheper-Hughes). Cette anthologie rassemble des textes philosophiques de référence (Giorgio Agamben, Hannah Arendt, Walter Benjamin, Michel Foucault, Jean-Paul Sartre) ; quelques textes littéraires (Joseph Conrad, George Orwell, Art Spiegelman) ; et un ensemble de textes plus ethnographiques : Philippe Bourgois sur les trafiquants de drogue portoricains d’East Harlem, Carol Cohn sur les représentations de la mort chez les ingénieurs travaillant dans l’industrie de la Défense, Liisa Malkki sur les camps de réfugiés hutus en Tanzanie, Antonius Robben sur la guerre sale en Argentine, Nancy Scheper-Hughes sur la justice populaire dans les townships sud-africains, etc. S’il est impossible de rendre compte des soixante-deux textes rassemblés, ils constituent un corpus permettant de faire ressortir avec acuité quatre questions qui se posent à toute recherche empirique voulant s’inscrire dans le champ de l’étude de la violence.
La catégorisation
5Gérard Lenclud l’avait signalé, la « violence » ne s’observe pas comme un objet matériel : « La violence ne se donne pas d’emblée pour telle, sa spécification résulte d’une procédure toujours ouverte de qualification11. » Plusieurs textes du présent ouvrage permettent d’approfondir les procédures de cette qualification, de mieux saisir ce qui rend visibles ou non, pensables ou non, des faits de violence. Ainsi, en évoquant la nature impartageable de la douleur subie dans la torture, Elaine Scarry thématise l’opposition entre la certitude absolue éprouvée par la victime, et le doute que sa douleur suscite à l’extérieur. Dans un article portant sur son expérience ethnographique au Salvador12, P. Bourgois s’interroge sur le rapport entre le silence des témoins d’un massacre et la culpabilité des survivants. Orin Starn se demande quant à lui ce qui empêcha les anthropologues de penser la violence structurelle présente dans les situations sociales qu’ils étudiaient, au point d’être surpris par l’émergence du mouvement du Sentier lumineux.
6Une deuxième dimension de la catégorisation relève de la spécification de la notion de violence, à travers un ensemble de concepts qui s’y rattachent : les notions de banalité du mal (Hannah Arendt), d’état de siège (Walter Benjamin), de violence symbolique (Pierre Bourdieu), de continuum de la violence (Philippe Bourgois & Nancy Scheper-Hughes), de violence structurelle (Paul Farmer), de bio-pouvoir (Michel Foucault), de souffrance sociale (Arthur Kleinman), de zone grise (Primo Levi), de violence de la vie quotidienne (Nancy Scheper-Hughes) ou de culture de la terreur (Michael Taussig) sont ainsi abordées pour différencier des registres spécifiques d’expériences ou de faits. L’accumulation de ces concepts dans l’ouvrage, dont on ne connaît précisément ni le champ d’application, ni le statut logique et empirique (s’agit-il de types-idéaux ou d’une catégorisation visant l’exhaustivité ?), ni surtout la compatibilité et la cohérence les uns avec les autres appelle toutefois une mise en ordre que l’introduction des deux éditeurs scientifiques du volume ne fait qu’ébaucher. Ils nous permettent de saisir que la notion de violence est moins une catégorie opératoire pour l’analyse que l’index d’un champ d’expériences qui demeurent à spécifier.
L’éthique
7Dans un article qui fit date sur le primat de l’éthique, Nancy Scheper-Hughes13 mettait en avant la nécessité pour l’ethnologue de s’engager, moralement et politiquement, par ses choix d’objet d’étude et de perspective théorique dans l’exercice même de son activité d’anthropologue. Elle développe cette perspective avec Philippe Bourgois dans Violence in War and Peace : il s’agit pour eux de parvenir à faire face à l’insoutenable avec les moyens mêmes de l’anthropologie14. Or, ce positionnement « éthique » d’une science empirique ne laisse pas de rendre perplexe : que le concept de violence ne soit pas un concept simplement empirique mais inclue un jugement éthique avait déjà été signalé. Ainsi, dans le numéro d’Études rurales évoqué plus haut, Élisabeth Claverie écrivait que « la relation des individus avec la violence suppose toujours un modèle explicite ou implicite du juste et de l’injuste15 », et Jean Jamin, avec le vocabulaire d’Austin, qu’il y a un « aspect non pas constatif (qui décrit un événement) mais fortement performatif de cette notion », c’est-à-dire que son emploi « revient à porter des appréciations favorables ou défavorables16 ».
8La violence est-elle un concept descriptif, ce qui légitimerait son usage dans les sciences sociales ? La qualification d’un fait comme « violence » constitue-t-elle une proposition scientifique, véridictionnelle, éventuellement soumise à corroboration, critique, infirmation ou réfutation –, ou plutôt « un jugement éthique17 » ? Considérons un texte extrait des notes prises par Friedrich Waismann au cours de conversations avec Ludwig Wittgenstein : « [La sociologie] ne peut que relater ce qui arrive. Mais, dans la description du sociologue, la proposition : “telle ou telle chose signifie un progrès” ne doit pas apparaître18. » Peut-on paraphraser et inverser, pour ce qui concerne notre propos, la dernière phrase de ce texte en : « Dans la description de l’anthropologue, la proposition : “telle ou telle chose constitue une violence” ne doit pas apparaître » ?
9La rigueur analytique de Wittgenstein rejoint ici la position qui avait été critiquée par Leo Strauss comme étant celle de Max Weber, et plus généralement des sciences sociales et de leur historicisme, tendant au nihilisme éthique. Un texte bien connu – et qui porte précisément sur la violence – permet de saisir la critique qu’opère Strauss de l’opposition entre faits et valeurs :
L’interdit prononcé contre les jugements de valeur en science sociale conduirait aux conséquences suivantes. Nous aurions le droit de faire une description purement factuelle des actes accomplis au su et au vu de tous dans un camp de concentration, et aussi sans doute une analyse, également factuelle, des motifs et mobiles qui ont mû les acteurs en question, mais il nous serait défendu de prononcer le mot de cruauté. Or chacun de nos lecteurs, à moins d’être complètement stupide, ne pourrait manquer de voir que les actes en question sont cruels. Une description factuelle serait en réalité une satire féroce, et notre compte rendu, qui se voulait direct et objectif, s’avérerait un tissu de circonlocutions. L’auteur ferait délibérément abstraction de son savoir le plus sûr ou, pour employer l’expression favorite de Weber, il commettrait un acte de malhonnêteté intellectuelle. Disons simplement, pour ne pas gaspiller nos munitions sur des choses qui n’en valent pas la peine, que le procédé rappelle le jeu d’enfants dans lequel vous perdez si vous prononcez certains mots que vos compagnons s’efforcent de vous arracher19.
10Si on saisit la « malhonnêteté intellectuelle » qu’il y aurait à se passer d’un concept qui n’est pourtant pas strictement descriptif, la confrontation des textes de Wittgenstein et de Strauss implique de dépasser l’opposition entre description et jugement, et donc, a minima, de se demander de quelle position d’autorité (morale), ou de quel sens commun, s’autorise l’anthropologue pour qualifier un fait, un acte comme « violence ». Que la question du mal soit une question anthropologique (au sens disciplinaire, empirique, du terme), est loin de constituer une évidence pour une discipline dont les axiomes demeurent « anti-anti-relativistes20 ».
La pratique de l’enquête ethnographique
11Le texte de Joseba Zulaika reproduit dans cet ouvrage permet d’approfondir la question de la place de l’enquêteur dans une situation marquée par la violence. En s’interrogeant sur les formes du dialogue que l’ethnographe est conduit à nouer avec des praticiens de la violence (en l’occurrence, des membres de l’ETA au Pays basque espagnol), en décrivant la position inconfortable qu’il occupe et l’image relativement mystérieuse ou peu déterminée que ses interlocuteurs peuvent avoir de lui, il rejoint l’analyse comparable qu’avait proposée Jeffrey Sluka au sujet de ses relations avec l’IRA en Irlande du Nord21. L’inconfort lié à un contexte violent d’enquête interroge le rapport entre observation directe, « participation », et usage de récits ou de témoignages22 dans la pratique ethnographique, ou – ce qui revient au même – à la relation entre enquête judiciaire et enquête ethnographique23. On retrouve ici le problème que soulevait Jean Jamin en 1984 : « L’ethnographe ne pourra généralement procéder que par reconstitution et instruction (au sens judiciaire des expressions) de ce qui est censé être des faits de violence, non par observation directe – à moins de s’y impliquer totalement et inconditionnellement au risque, dans ce cas, de ne plus pouvoir faire d’ethnographie du tout (à la démarche de laquelle préside une certaine forme de distanciation)24. » On ne dira pas pour autant que l’ethnographie se déroule nécessairement dans l’après-coup de la violence : ainsi Philippe Bourgois raconte comment il a été pris, dans le cours même de ses enquêtes, sous le feu des troupes gouvernementales au Salvador, et comment il a assisté en personne à un meurtre, une fusillade et à plusieurs bagarres à Harlem25. Et nombreux sont les ethnologues à avoir été témoins de formes plus communes de violence ordinaire.
12Nous pouvons relever plus généralement que l’essentiel de ce qu’on apprend dans la situation ethnographique est marqué du fait que l’enquêteur s’y trouve toujours plongé in medias res26, dans la suite d’un certain nombre d’événements qui en définissent le contexte, et dont il n’a que des traces partielles. Les situations de violence font particulièrement bien ressortir le fait que l’ethnographe n’assiste pas à grand-chose de ce dont il parle ; ou, pour reprendre ce qu’écrit Michael Taussig, que la narration sert nécessairement de médiation aux faits de violence, en permettant notamment leur qualification. On peut renvoyer sur ce thème aux deux remarquables ouvrages de Jean Hatzfeld sur le génocide rwandais, en prêtant attention à l’opposition qu’on y perçoit, et que l’auteur thématise, entre les récits qui se suffisent pratiquement à eux-mêmes de ceux qui ont subi les actes de violence27, et les récits des criminels28 que leur motif tissé par un entrecroisement étroit de bonne conscience, de mauvaise foi, de perversité, d’aveu et de mensonge rend proprement illisibles sans le commentaire qui en définit la modalité et le bon registre de lecture.
L’écriture
13Du simple fait qu’en parlant de « violence » l’anthropologie s’inscrit dans un espace qui est à la fois celui des sciences sociales et celui de l’éthique, son écriture se doit d’éviter la dénégation de l’acte et l’effacement de la culpabilité qu’orchestrent les bourreaux. Mais tout en voulant faire valoir la factualité même contre la dénégation, Nancy Scheper-Hughes et Philippe Bourgois nous mettent également en garde contre l’écueil inverse de l’esthétisation de la violence29. Cette préoccupation est avant tout thématisée dans les trois textes de Michael Taussig reproduits dans ce volume, qui s’interroge sur les façons d’« écrire contre la terreur30 », de trouver la bonne distance permettant d’éviter tout voyeurisme, toute « pornographie » de la violence, serait-ce sous la forme de la sophistication rhétorique ou de la subtilité intellectuelle. Car rien n’oblige les anthropologues à écrire sur la violence31 ; et comme le rappelait récemment Didier Fassin, travailler sur la violence ne constitue pas une garantie morale et politique, « comme si les propriétés morales de l’objet étudié se déplaçaient vers celles et ceux qui l’étudient32 ». Au contraire, face à la cruauté, le désir de savoir mérite d’être particulièrement interrogé par « un retour réflexif sur cette fascination révoltée qui attache l’anthropologue à la souffrance33 » : a-t-il pour source l’excitation de l’horreur, la curiosité, l’étonnement, la compassion, l’amitié ? Comment une description anthropologique peut-elle éviter de renvoyer les personnes qui ont subi la violence du côté de leur honte ? À quelles conditions d’écriture et de tact peut-on parler de la violence en évitant son obscénité ?
14La lecture de cette anthologie et l’examen de certaines des nombreuses questions qu’ouvrent les textes qui y sont rassemblés, nous invitent à insister sur l’extrême prudence nécessaire à l’usage du concept de « violence ». Il nous semble en effet que son utilisation éventuelle en anthropologie n’a de sens que s’il est spécifié par la description précise des faits et des expériences vécues auxquels il renvoie. À condition également que cette qualification entraîne une réflexivité éthique et politique sur la position de celui qui qualifie. Et aussi que soient exposés les problèmes pratiques posés par l’enquête, notamment celui de l’articulation entre récit et référence. De telle sorte que l’humanité des personnes en cause dans les faits décrits puisse être préservée par une écriture qu’on aimerait dire pudique.
Notes de bas de page
1 Françoise Héritier (éd.), De la violence : séminaire de Françoise Héritier, Paris, Odile Jacob, 2005 (1996 et 1999).
2 Jackie Assayag, « La face obscure de la modernité. Anthropologie et génocides », L’Homme, 170, 2004, p. 231-244 ; Id., « Leçons de ténèbres. Violence, terreur, génocides », Les Temps Modernes, 626, 2004, p. 275-304 ; Didier Fassin, « Et la souffrance devint sociale. De l’anthropologie médicale à une anthropologie des afflictions », Critique, 680-681 (Frontières de l’anthropologie), 2004, p. 16-29.
3 « An anthropologically informed field of violence studies », P. Bourgois & N. Scheper-Hughes, Violence…, op. cit., p. 5.
4 Élisabeth Claverie, Jean Jamin & Gérard Lenclud, « Une ethnographie de la violence est-elle possible ? », Études rurales, 95-96 (Ethnographie de la violence), 1984, p. 9-22, ici p. 12.
5 P. Bourgois & N. Scheper-Hughes, Violence…, op. cit., p. 1.
6 Pierre-Henri Castel, La Métamorphose impensable. Essai sur le transsexualisme et l’identité personnelle, Paris, Gallimard, 2003, p. 11.
7 On se reportera notamment à Maryse Jaspard et alii, « Nommer et compter les violences envers les femmes : une première enquête nationale en France », Population et sociétés, 364, 2001, p. 1-4 ; Id., « Violences vécues, fantasmes et simulacres. Comment analyser les violences envers les femmes ? », Les Temps Modernes, 624, 2003, p. 184-195 [et dans Nouvelles questions féministes, 22, p. 72-81] ; Maryse Jaspard (éd.), Les Violences envers les femmes en France : une enquête nationale, Paris, La Documentation française, 2003 ; Marcela Iacub & Hervé Le Bras, « Homo mulieri lupus ? À propos d’une enquête sur les violences envers les femmes », Les Temps Modernes, 623, 2003, p. 112-132 ; Élisabeth Badinter, Fausse route, Paris, Odile Jacob, 2003 ; Dominique Fougeyrollas, Helena Hirata & Danièle Senotier, « La violence, les mots, le corps », Cahiers du genre, 35, 2003, p. 5-20 ; Maria De Koninck & Solange Cantin, « La critique de l’ENVEFF signée par Marcela Iacub et Hervé Le Bras ou l’arroseur arrosé », Nouvelles questions féministes, 23 (1), 2004, p. 72-82.
8 Sur cette paire de concepts, cf. Michel Foucault, « Le pouvoir, comment s’exerce-t-il ? », dans H. Dreyfus & P. Rabinow, Michel Foucault. Un parcours philosophique, Paris, Gallimard, 1984, p. 308-321 ; et Nicole-Claude Mathieu, « Quand céder n’est pas consentir. Des déterminants matériels et psychiques de la conscience dominée des femmes et de quelques-unes de leurs interprétations en ethnologie », dans N.-C. Mathieu (éd.), L’Arraisonnement des femmes. Essais en anthropologie des sexes, Éditions de l’EHESS (« Les Cahiers de L’Homme »), 1985, p. 169-245.
9 Cf. Louis Althusser, « Idéologie et appareils idéologiques d’État [1970] », dans Positions, Paris, Éditions Sociales, 1976, p. 79-137, ici p. 98.
10 F. Héritier, De la violence, op. cit., p. 17 (1996) ; F. Héritier propose une analytique plus complexe p. 339-342 (1999).
11 É. Claverie, J. Jamin & G. Lenclud, « Une ethnographie… », op. cit., p. 10.
12 Ce texte, « La violence en temps de guerre et en temps de paix. Leçons de l’après-guerre froide : l’exemple du Salvador », a également paru dans Daniel Céfaï & Valérie Amiraux (éds), Cultures et conflits, 47 (Les risques du métier : engagements problématiques en sciences sociales), 2002, p. 81-116.
13 Nancy Scheper-Hughes, « The primacy of the ethical : propositions for a militant anthropology », Current Anthropology, 36 (3), 1995, p. 409-440.
14 Comme le laissent entendre le sous-titre de l’article de Nancy Scheper-Hughes ou les analyses de Paul Farmer sur la « violence structurelle », le champ du politique est dans la perspective des éditeurs de Violence in War and Peace englobé sous la catégorie d’éthique.
15 É. Claverie, J. Jamin & G. Lenclud, « Une ethnographie… », op. cit., p. 13.
16 Ibid., p. 17-18.
17 Ludwig Wittgenstein, « Conférence sur l’éthique », dans Leçons et conversations sur l’esthétique, la psychologie et la croyance religieuse, Paris, Gallimard, 1971 [1929-1930], p. 141-155, ici p. 145.
18 Friedrich Waismann, « Notes sur des conversations avec Wittgenstein », dans Ludwig Wittgenstein, Leçons et conversations sur l’esthétique, la psychologie et la croyance religieuse, Paris, Gallimard, 1971, p. 155-159, ici p. 157.
19 Leo Strauss, Droit naturel et histoire, Paris, Plon, 1954, p. 68-69 ; cf. aussi G. Lenclud, « Le factuel et le normatif en ethnographie », dans M.-O. Gonseth, J. Hainard & R. Kaehr (éds), La Différence, Neuchâtel, musée d’Ethnographie, 1995, p. 13-52.
20 Clifford Geertz, « Anti-anti-relativism », American Anthropologist, 86 (2), 1984, p. 263-278.
21 Jeffrey A Sluka, « Participant observation in violent social contexts », Human Organization, 49 (2), 1990, p. 114-126. Cette question n’est pas spécifique à l’enquête ethnographique ; J. Sluka thématise notamment les relations de celle-ci avec le journalisme de guerre.
22 Je me permets de renvoyer à Michel Naepels, « Dispositifs disciplinaires. Sur la violence et l’enquête de terrain », Critique, 680-681 (Frontières de l’anthropologie), 2004, p. 30-40.
23 Cf. Christopher Browning, « German memory, judicial interrogation, and historical reconstruction : writing perpetrator history from postwar testimony », dans S. Friedlander (éd.), Probing the Limits of Representation. Nazism and the « Final Solution », Cambridge, Harvard University Press, 1992, p. 22-36, pour un questionnement parallèle dans la discipline historique.
24 É. Claverie, J. Jamin & G. Lenclud, « Une ethnographie… », op. cit., p. 20.
25 P. Bourgois & N. Scheper-Hughes, Violence…, op. cit., p. 425.
26 Cf. Jean Bazin, « Interpréter ou décrire. Notes critiques sur la connaissance anthropologique », dans J. Revel & N. Wachtel (éds), Une école pour les sciences sociales. De la 6e section à l’École des hautes études en sciences sociales, Paris, Éditions du Cerf/Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales, 1996, p. 401-420 ; Id., « Science des mœurs et description de l’action », Le Genre humain, 35 (Actualités du contemporain), 2000, p. 33-58.
27 Jean Hatzfeld, Dans le nu de la vie. Récits des marais rwandais, Paris, Seuil, 2001.
28 Jean Hatzfeld, Une saison de machettes, Paris, Seuil, 2003.
29 P. Bourgois & N. Scheper-Hughes, Violence…, op. cit., p. 1.
30 Ibid., p. 39.
31 Peut-être pouvons-nous imaginer que c’est ce que Wittgenstein aurait répondu au texte de Strauss : que les sciences sociales ne sont pas le lieu adéquat pour montrer ou penser la violence.
32 D. Fassin, « Et la souffrance… », op. cit., p. 29.
33 Ibid., p. 28. D’autres sujets impliquent le même questionnement réflexif : la vie privée, l’intimité, les univers moraux, etc.
Notes de fin
1 « Quatre questions sur la violence », L’Homme, no 177-178, janvier-juin 2006, p. 487-495. À propos de N. Scheper-Hughes & P. Bourgois (éds), 2004, Violence in War and Peace. An Anthology, Malden, Blackwell Publishing. Je remercie Julie Biro, Dorothée Dussy, Marie Gaille-Nikodimov, Christine Hamelin, Jérôme Sackur, Christine Salomon et Ivahn Smadja pour leurs remarques sur une première version de cet article.
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