La citoyenneté de l’Union : un statut fondamental ? Heurts et incertitudes d’une vocation ou l’art du contrepoint…
p. 499-542
Texte intégral
1« La citoyenneté de l’Union a vocation à devenir le statut fondamental des ressortissants des États membres » mais quels sont les ressorts et le sens de cette vocation, Émile Littré donnant pas moins de sept définitions à ce terme dont celles de « disposition » ou de « talent » ? Pour la Cour de justice, elle permet « à ceux parmi ces derniers qui se trouvent dans la même situation d’obtenir, indépendamment de leur nationalité et sans préjudice des exceptions expressément prévues à cet égard, le même traitement juridique »1. Force est de constater que, de part ces exceptions, le statut des citoyens de l’Union migrants n’est pas assimilable à celui des nationaux sédentaires : il relève, en France, d’un titre spécifique du code sur l’entrée et le séjour des étrangers et conduit à des différences de traitement discutables tant au regard de la volonté de « poursuivre le processus créant une union sans cesse plus étroite entre les peuples de l’Europe », que du principe d’égalité en suscitant des discriminations à rebours à l’encontre des nationaux sédentaires.
2Sur le fond, la jurisprudence de la Cour de justice, fondée sur la combinaison de la citoyenneté de l’Union et du principe de non-discrimination, concerne-t-elle uniquement les migrants, c’est-à-dire les 2,5 % de la population nationale des États membres qui exerce son droit de séjour en franchissant les frontières internes de l’Union2 ? Le troisième considérant de la directive n° 2004/38/CE tente bien de limiter le champ d’application de ce « statut de base » aux citoyens qui « exercent leur droit de circuler et de séjourner librement » ; pour autant, la citoyenneté de l’Union n’est pas l’apanage exclusif des 11,675 millions d’européens nomades3. Sa vocation la conduit à s’abstraire de l’obligation de circuler en franchissant les frontières internes de l’Union pour bénéficier aux sédentaires, à devenir une citoyenneté de résidence ; elle réduit en retour les situations de droit interne qui échappent au champ d’application du droit de l’Union et sont susceptibles de créer des discriminations à rebours4. En ce sens, en dehors de toute obligation de mouvement, l’article 20 TFUE énonce sobrement : « est citoyen de l’Union toute personne ayant la nationalité d’un État membre ». En pratique, la majorité des politiques et des actes de l’Union5 vise les sédentaires, qu’il s’agisse de l’espace de liberté, de sécurité et de justice (ELSJ), du marché intérieur et, bien sûr, de l’union économique et monétaire dont la monnaie est l’euro… En droit interne français, le titre XV de la constitution de 1958 intègre prudemment cette évolution dans la norme fondamentale républicaine, ce à quoi fait écho l’évolution de la jurisprudence du Conseil d’État qui fonde désormais certaines de ses décisions sur l’article 88-1 sans référence, dans les motifs, à l’article 55 relatif aux traités internationaux6.
3Dès lors, les fondements juridiques, formant l’ossature de la citoyenneté européenne, sont-ils aujourd’hui suffisamment robustes pour donner à l’Union la légitimité démocratique indispensable au renforcement prioritaire d’une politique monétaire de nature fédéraliste solidement adossée à une gouvernance économique, c’est-à-dire à une politique budgétaire, fiscale et sociale commune7. Cette solidarité8 entre les composantes politique, économique et monétaire de l’Union fut recherchée dès l’origine par les négociateurs du traité de Maastricht qui consacrèrent une nouvelle partie du traité instituant la Communauté européenne à la citoyenneté de l’Union9. Quelle est, toutefois, la cohérence des statuts juridiques attachés à la citoyenneté européenne10 ? Tracent-ils les linéaments d’un droit constitutionnel européen démotique11 et, faute de « peuple européen », esquissent-ils les contours d’un demos européen ? Sont-ils des excroissances résiduelles, voire discutables ou gênantes, des corpus juridiques nationaux ou complètent-ils avantageusement les citoyennetés nationales ? À l’instar des tensions multiples qui éprouvent la cohésion de la société européenne, les réponses apportées par les juges, européens et nationaux, ne sont pas univoques ; elles traduisent, plus généralement, les ambiguïtés qui pèsent sur l’avenir de l’Union et sur la dimension téléologique du droit communautaire, en tant que droit de l’intégration12, distingué de la coopération intergouvernementale et du droit international classique. Le juriste s’interroge. Inspiré par Simone de Beauvoir, considérera-t-il que « pour atteindre sa vérité, l’homme [l’Union] ne doit pas tenter de dissiper l’ambiguïté de son être, mais au contraire d’accepter de la réaliser : il [elle] ne se rejoint que dans la mesure où il [elle] consent à demeurer à distance de lui-même [d’elle-même] »13. Pour le moins, cette distance aura-t-elle le mérite de le préparer à affronter la complexité du droit européen dans ses rapports avec les droits nationaux.
4Désormais, le pluralisme juridique de l’Union, qui se traduit par le maintien de plusieurs ordres juridiques, étroitement imbriqués, implique que l’interprétation des règles communes ne saurait être le fait d’un seul auteur. « Mais, afin que la diversité des acteurs qui interviennent dans l’élaboration, l’interprétation et l’application du droit de l’Union n’en menacent pas l’efficacité et l’uniformité, un devoir de cohérence s’impose aux membres de la communauté d’interprètes, cohérence horizontale entre les solutions issues des différents ordres juridiques des États membres, cohérence verticale entre celles émanant de l’ordre juridique national et de l’ordre juridique communautaire. Ce n’est que si le droit de l’Union se développe ainsi comme un ‘droit contrapuntique’14 que l’harmonie des différents dessins mélodiques de tous ceux qui en sont les solistes sera assurée »15. Mais l’art du contrepoint s’avère délicat et l’écriture polyphonique des partitions respectives reste difficile, d’autant que les compositeurs sont rarement les musiciens et que le traité de Lisbonne multiplie les chefs d’orchestre… Difficile et ambitieux solfège dont dépend l’avenir de l’Union et de la démocratie européenne.
5Dans le concert des peuples, la vocation de la citoyenneté européenne à devenir le statut fondamental des ressortissants des États membres, ne s’épanouit donc pas dans un seul ordre juridique, elle résulte de la recherche d’une harmonie contrapuntique entre les partitions européennes et nationales formant statuts civils et civiques des personnes… (I). Pour les mélomanes exigeants, les variations juridiques étatiques résultant des « exceptions expressément prévues » dans la mise en œuvre du principe de non discrimination en raison de la nationalité, méritent cependant d’être relevées afin que la vocation, fragile, de la citoyenneté européenne ne s’éteigne pas dans la cacophonie, l’indifférence ou l’incompréhensible étrangeté (II).
I – La recherche d’une harmonie contrapuntique entre les partitions juridiques européennes et nationales
6L’écriture musicale de la citoyenneté européenne, avec ses multiples composantes juridiques, s’inscrit sur une portée commune dont les lignes maîtresses, telles qu’inscrites dans le traité de Lisbonne, forment l’espace de liberté, de sécurité et de justice (A). Mais la clé marquant le degré d’élévation de cette portée, ou d’intégration dans le langage des européanistes, reste encore incertaine, ce qui induit des interprétations aux tonalités dissonantes. Une clé semble toutefois s’imposer : la résidence durable en forme de clé de sol (B).
A – L’espace de liberté, de sécurité et de justice comme « portée » européenne de la citoyenneté
7À la suite du traité d’Amsterdam, les Conseils européens de Tampere, les 15 et 16 octobre 1999, et de La Haye, les 4 et 5 novembre 2004, ont précisé le cadre juridique général de l’ELSJ ; dans ce but, ils ont intégré dans le droit de l’Union les accords de Schengen relatifs à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes. Après l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, la mise en œuvre du programme de Stockholm pour la période 2010-2014, complète ces travaux : la réalisation de l’ELSJ doit conduire à une disparition encadrée des frontières étatiques intérieures à l’Union et contribuer à faire de la citoyenneté européenne « une réalité intangible. L’espace de liberté, de sécurité et de justice doit être avant tout un espace unique de protection des droits fondamentaux ». Cette stratégie d’intégration, grâce au diapason de l’Union, en évoque une autre : celle qui a prévalu pour la constitution des États-Unis d’Amérique (1). Pour autant, l’ELSJ n’est pas celui des États-Unis d’Europe : avec le principe de proportionnalité pour tempo, la Cour de justice, en tant que cour suprême de l’Union, vise à garantir le respect mutuel des identités nationales et européenne (2).
1 – La disparition graduelle des frontières internes ou l’Union pour diapason
8Selon l’article 3 du traité sur l’Union européenne (TUE) : « l’Union offre à ses citoyens un espace de liberté, de sécurité et de justice sans frontières intérieures, au sein duquel est assurée la libre circulation des personnes, en liaison avec des mesures appropriées en matière de contrôle des frontières extérieures, d’asile, d’immigration ainsi que de prévention de la criminalité et de lutte contre ce phénomène ». Ainsi défini, l’ELSJ représente le second objectif de l’Union, avant le marché intérieur et l’union économique et monétaire dont la monnaie est l’euro. Pour la Commission européenne, « la liberté, la sécurité et la justice sont des valeurs clés qui constituent des composantes majeures du modèle de société européen. Elles sont une des pierres angulaires du modèle d’intégration européen. L’Union européenne a déjà mis en place pour ses citoyens un marché unique, une union économique et monétaire, et la capacité de faire face aux défis politiques et économiques globaux. Elle a également réalisé des progrès importants dans l’établissement d’un espace de liberté, de sécurité et de justice ; la priorité doit maintenant être de mettre le citoyen au centre de ce projet »16. Le Conseil européen, avec le programme de Stockholm adopté le 2 décembre 2009, valide cette approche : il « considère comme une priorité pour les années à venir la prise en compte des intérêts et des besoins des citoyens. La difficulté consistera à garantir le respect des libertés fondamentales et l’intégrité de la personne, tout en assurant la sécurité en Europe ». Et d’ajouter : « Toutes les actions futures devraient être centrées sur le citoyen et les autres personnes à l’égard desquelles l’Union a une responsabilité » Dans ce but, il définit quatre priorités politiques : faire de la citoyenneté européenne une réalité intangible ; approfondir l’ELSJ afin de dépasser sa fragmentation actuelle ; développer une stratégie de sécurité intérieure ; concevoir le rôle de l’Europe et de son ELSJ à l’heure de la mondialisation17. Le programme de Stockholm fait l’objet de mesures concrètes déclinées par le plan d’action présenté par la Commission le 10 avril 201018. Ce plan s’articule en six priorités, dont la seconde vise, une fois encore, à « faire de la citoyenneté une réalité tangible », c’est-à-dire à garantir le plein exercice de la libre circulation avec le suivi de la mise en œuvre de la directive n° 2004/38/CE, à offrir une protection dans les États tiers et à renforcer la participation à la vie démocratique de l’Union19. Le programme de la Commission pour cette seconde priorité manque toutefois d’originalité alors que les actions visant à assurer la sécurité de l’Europe sont d’une tonalité nouvelle…
9Les liens entre la citoyenneté et ELSJ ne sont pas sans analogies avec l’article IV de l’accord, ratifié et entré en vigueur le 1er mars 1781, pour établir la Confédération dénommée « États-Unis d’Amérique ». Selon ce traité, « Afin de garantir et de perpétuer l’amitié mutuelle et la compréhension parmi les peuples des différents États de cette Union, les habitants libres de chacun de ces États, à l’exception des indigents, des vagabonds et de ceux qui fuient la justice, auront droit à tous les privilèges et immunités des citoyens libres des autres États ; et les habitants de chaque État auront toute liberté d’entrer et de sortir de chacun des États, y bénéficieront des mêmes libertés de commerce et d’établissement, y seront soumis aux mêmes obligations, impositions et restrictions que les autres habitants, à condition que ces restrictions n’aient pas pour effet d’empêcher le transport de biens importés d’un l’État dans un autre État où résiderait le propriétaire ; à condition également qu’aucune imposition, obligation ou restriction ne soit établie par un des États sur une propriété des États-Unis, ou la propriété de l’un d’entre eux. Si une personne coupable ou accusée de trahison, félonie ou autre grand crime, fuit la justice, et si elle est trouvée dans un des États unis, elle sera à la demande du gouverneur ou du pouvoir exécutif de l’État qu’elle a fui, remise à l’État dont elle relève pour ce délit. Toute confiance et tout crédit seront accordés, dans chacun des États, aux documents, décisions et actes de procédure émanant des magistrats et des juridictions des autres États »20. Les rédacteurs des articles de la Confédération n’entendaient pas dissoudre les États dans l’Union et, au regard du code de la nationalité, il fallut attendre l’actuelle constitution des États-Unis et son XVIe amendement ratifié le 9 juillet 1868, c’est-à-dire trois ans après la fin de la guerre civile américaine, pour que les conditions d’acquisition de la citoyenneté des États-Unis relève définitivement de la Fédération, avec l’ensemble des conséquences juridiques qui en découlent au regard, notamment, du principe d’égalité de traitement : « Toute personne née ou naturalisée aux États-Unis, et soumise à leur juridiction, est citoyen des États-Unis et de l’État dans lequel elle réside. Aucun État ne fera ou n’appliquera de lois qui restreindraient les privilèges ou les immunités des citoyens des États-Unis ; ne privera une personne de sa vie, de sa liberté ou de ses biens sans procédure légale régulière ; ni ne refusera à quiconque relève de sa juridiction l’égale protection des lois »21.
10Cette comparaison trop succincte met néanmoins en exergue, qu’outre l’exercice de la souveraineté, la mise en œuvre du principe d’égalité de traitement reste un critère majeur pour évaluer la conflictualité et la complémentarité des relations entre la citoyenneté d’une Union et celles de ses États membres. En vue de fonder les États-Unis d’Amérique, l’article IV de la Confédération consacrait déjà la libre circulation et l’égalité de traitement des citoyens de « l’Union perpétuelle », à l’exception notoire « des indigents, des vagabonds et de ceux qui fuient la justice ». L’exclusion des indigents et des vagabonds n’est pas sans rappeler, en des termes plus choisis, les limites instituées par le droit de l’Union et la jurisprudence de la Cour de justice. Certes le droit communautaire admet « une certaine solidarité financière des ressortissants de cet État avec ceux des autres États membres, notamment si les difficultés que rencontre le bénéficiaire du droit de séjour sont d’ordre temporaire »22 ; toutefois, afin d’éviter que les bénéficiaires du droit de séjour ne deviennent « une charge déraisonnable pour les finances publiques de l’État membre d’accueil », il exclut « le tourisme social » des inactifs23. Cette différence de traitement n’est pas assimilable à une discrimination illégale dans la mesure où la différence de nationalité se traduit par une solidarité financière moindre au regard des charges non contributives de l’État d’accueil ainsi que par l’absence de « lien réel avec la société de cet État »24. Cette importante limite économique et sociale à la vocation fédéraliste de la citoyenneté de l’Union, souligne, par contraste, le statut européen privilégié des actifs migrants, bénéficiaires originels du droit communautaire. En l’absence d’une union fiscale et budgétaire intégrée, la notion de solidarité financière demeure une solide frontière économique et sociale interne à l’Union ; elle résulte également de l’absence de consentement direct à un impôt européen donc, en l’état, de la faiblesse de la démocratie et du parlementarisme européens... Et pourtant, le respect mutuel des identités nationales et européennes repose sur la proportionnalité des droits et des obligations des citoyens de l’Union au regard des ordres juridiques complémentaires dont ils relèvent.
2 – Le respect mutuel des identités nationales et européenne ou la proportionnalité pour tempo
11Le jugement discuté de la Cour constitutionnelle fédérale de Karlsruhe, du 30 juin 2009, réduit singulièrement toute « vocation » de la citoyenneté de l’Union au nom de la souveraineté du peuple allemand25 ; il souligne, en retour, l’impérative nécessité de préciser sa signification pour en garantir les fondements démocratiques transnationaux. Certes, une première lecture du traité de Lisbonne incite à la prudence quant au statut de la citoyenneté européenne dans ses relations avec les citoyennetés et les parlements nationaux. Le nouvel article 20 TFUE modifie la rédaction du traité CE (TCE) : désormais, la citoyenneté de l’Union ne « complète » plus mais « s’ajoute à la citoyenneté nationale » qu’elle ne remplace pas. Faut-il voir là un encadrement renforcé de la citoyenneté de l’Union, les rédacteurs du traité modificatif souhaitant marquer sa nature seconde, dérivée, et confirmer ainsi la déclaration no 2 relative à la nationalité d’un État membre, telle qu’annexée au traité de Maastricht ? Au contraire, ce changement, qui reprend les termes de l’article I-10 du traité constitutionnel, fait-il « disparaître l’idée de subordination et le caractère subsidiaire de la citoyenneté européenne »26 ? Face à l’ambiguïté des textes, les arrêts Rottmann27 et Ilonka Sayn-Wittgenstein28, rendus en 2010, précisent le raisonnement de la Cour de justice : l’un relatif aux conséquences de la perte de la nationalité d’un État membre, l’autre portant sur l’attribution du nom et la tenue des registres nationaux d’état civil. Dans le respect de l’article 4, §2 TUE, la cour suprême de l’Union trace les contours, plus que les limites, de son dynamisme jurisprudentiel et compose, par notes successives, le champ d’application de la citoyenneté de l’Union dans sa vocation à devenir le statut fondamental des ressortissants des États membres.
12L’arrêt Rottmann est significatif du jeu d’équilibre, provisoire par nature, que les sages du plateau de Kirchberg recherchent entre les ordres juridiques nationaux et communautaire. Dans son dispositif final, la grande chambre dit pour droit que : « Le droit de l’Union, notamment l’article 17 TCE, ne s’oppose pas à ce qu’un État membre retire à un citoyen de l’Union européenne la nationalité de cet État membre acquise par naturalisation lorsque celle-ci a été obtenue de manière frauduleuse à condition que cette décision de retrait respecte le principe de proportionnalité ». In cauda venenum, crieront les souverainistes. En se fondant sur la déclaration no 2 relative à la nationalité, la Cour réaffirme les prérogatives de souveraineté des États membres en matière d’attribution ou de retrait de leur nationalité, « toutefois, le fait qu’une matière ressortit à la compétence des États membres n’empêche pas que, dans des situations relevant du droit de l’Union, les règles nationales concernées doivent respecter ce dernier » (point 41), qu’il s’agisse d’une réglementation nationale en matière de sanction et de procédure pénale29, d’attribution du nom30, de fiscalité directe31, de reconnaissance du droit de vote et d’éligibilité aux élections européennes32 voire de la nationalité. Pour la Cour, « Il est manifeste que la situation d’un citoyen de l’Union qui, tel le requérant au principal, est confronté à une décision de retrait de la naturalisation adoptée par les autorités d’un État membre le plaçant, après qu’il a perdu la nationalité d’un autre État membre qu’il possédait à l’origine, dans une situation susceptible d’entraîner la perte du statut conféré par l’article 17 TCE et des droits y attachés relève, par sa nature et ses conséquences, du droit de l’Union » (point 42). Or, ainsi qu’elle « l’a relevé à plusieurs reprises, le statut de citoyen de l’Union a vocation à être le statut fondamental des ressortissants des États membres (voir notamment, arrêts du 20 septembre 2001, Grzelczyk, C-184/99, Rec. p. I-6193, point 31, ainsi que du 17 septembre 2002, Baumbast et R, C-413/99, Rec. p. I-7091, point 82) » (point 43). Ainsi, « les États membres doivent, dans l’exercice de leur compétence en matière de nationalité, respecter le droit de l’Union (arrêts 7 juillet 1992, Micheletti e.a., C-369/90, Rec. p. I-4239, point 10 ; 11 novembre 1999, Mesbah, C-179/98, Rec. p. I-7955, point 29 ; du 20 février 2001, Kaur, C-192/99, Rec. p. I-1237, point 19, ainsi que du 19 octobre 2004, Zhu et Chen, C-200/02, Rec. p. I-9925, point 37) » (point 45). Et la Cour d’ajouter qu’il « appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si la décision de retrait en cause au principal respecte le principe de proportionnalité en ce qui concerne les conséquences qu’elle comporte sur la situation de la personne concernée au regard du droit de l’Union, outre, le cas échéant, l’examen de la proportionnalité de cette décision au regard du droit national » (point 55). Dans le droit fil du principe de coopération loyale, les États membres ne peuvent donc totalement s’abstraire du contrôle de la Cour au motif qu’ils exercent leurs compétences exclusives : il y a là un embryon de fédéralisation du droit de la nationalité33.
13De manière plus feutrée, l’arrêt Ilonka Sayn-Wittgenstein, rendu par la deuxième chambre le 22 décembre 2010, illustre l’importance du principe de proportionnalité pour concilier le respect de la citoyenneté de l’Union avec celui de l’ordre public constitutionnel des États membres34 ; la Cour de Luxembourg encadre ainsi ses jurisprudences Grunkinet Paul35 ainsi que Garcia Avello36 relatives à l’attribution du nom et à la tenue des registres d’état civil. Aux points 86 et 87 de l’arrêt Ilonka Sayn-Wittgenstein, la Cour a d’abord « itérativement rappelé que la notion d’ordre public en tant que justification d’une dérogation à une liberté fondamentale doit être entendue strictement, de sorte que sa portée ne saurait être déterminée unilatéralement par chacun des États membres sans contrôle des institutions de l’Union européenne (voir arrêts du 14 octobre 2004, Omega, C-36/02, Rec. p. I-9609, point 30, et du 10 juillet 2008, Jipa, C-33/07, Rec. p. I-5157, point 23) ». Il « en découle que l’ordre public ne peut être invoqué qu’en cas de menace réelle et suffisamment grave, affectant un intérêt fondamental de la société (voir arrêt Omega, précité, point 30 et jurisprudence citée) ».
14Cependant, par analogie avec le principe du changement des circonstances de fait et de droit, elle ajoute au point suivant qu’il « n’en reste pas moins que les circonstances spécifiques qui pourraient justifier d’avoir recours à la notion d’ordre public peuvent varier d’un État membre à l’autre et d’une époque à l’autre. Il faut donc, à cet égard, reconnaître aux autorités nationales compétentes une marge d’appréciation dans les limites imposées par le traité (voir arrêt Omega, précité, point 31 et jurisprudence citée) ». Au point 92, elle prend également soin de « rappeler que, conformément à l’article 4, paragraphe 2, TUE, l’Union respecte l’identité nationale de ses États membres, dont fait aussi partie la forme républicaine de l’État » avant de dire pour droit, dans son dispositif final, que les États peuvent prendre des mesures restrictives au regard de l’article 21 TFUE « dès lors que les mesures prises par ces autorités dans ce contexte sont justifiées par des motifs liés à l’ordre public, c’est-à-dire qu’elles sont nécessaires pour la protection des intérêts qu’elles visent à garantir et proportionnées à l’objectif légitimement poursuivi ».
15La recherche d’un rapport de proportionnalité entre les limites apportées au statut des citoyens de l’Union et le respect de l’ordre public des États membres a une autre conséquence : elle relativise l’obligation de circuler, en tant que condition de mise en œuvre du droit communautaire, et refonde la citoyenneté de l’Union sur un critère de résidence : au sens propre, ce dernier devient la clé de sol de la citoyenneté européenne.
B – La résidence durable comme « clé de sol » de la citoyenneté européenne
16Pour les européanistes, il convient de ne plus envisager les relations entre les notions de nationalité et de citoyenneté de l’Union en termes conflictuels mais complémentaires, ce à quoi nous invitent les conclusions de l’Avocat général M. M. Poiares Maduro, présentées le 30 septembre 2009, dans l’affaire Janko Rottmann c/ Freistaat Bayern : « en faisant de la nationalité d’un État membre une condition pour être un citoyen européen, les États membres ont voulu marquer que cette nouvelle forme de citoyenneté ne remet pas en question l’allégeance première à nos communautés politiques nationales. De la sorte, ce lien avec la nationalité des différents États membres constitue une reconnaissance du fait qu’il peut exister (en fait, qu’il existe) une citoyenneté qui n’est pas déterminée par la nationalité. Tel est le miracle de la citoyenneté de l’Union : elle renforce les liens qui nous unissent à nos États (dans la mesure où nous sommes des citoyens européens précisément parce que nous sommes des nationaux de nos États) et, en même temps, elle nous en émancipe (dans la mesure où nous sommes à présent des citoyens au-delà de nos États) » (point 23). Plusieurs arrêts récents de la Cour, d’une ambition variable, indiquent sur quelle ligne de la portée placer cette clé de sol, entre la gravité séculaire des territoires nationaux et les hauteurs spéculatives d’un espace sans frontières intérieures… Patiemment, la Cour s’attache à garantir la jouissance effective des droits attachés à la citoyenneté de l’Union, sans que l’obligation de circuler mais également la nationalité du bénéficiaire constitue des contraintes intangibles (1). Pour autant, elle ne feint pas d’ignorer le chœur des États membres et le champ persistant des situations de droit interne (2).
1 – La jouissance effective des droits attachés à la citoyenneté de l’Union
17De manière constructive, l’arrêt Ruiz Zambrano, rendu par la Cour de justice réunie en grande chambre à Luxembourg le 8 mars 2011, marque résolument une nouvelle étape dans la définition d’une citoyenneté européenne de résidence particulièrement protectrice pour les mineurs37. Dans cette affaire, qui prolonge l’arrêt Zhu et Chen rendu en assemblée plénière le 19 octobre 200438, la Cour de justice a répondu à trois questions posées, en substance, par le tribunal du travail de Bruxelles. Un citoyen de l’Union mineur peut-il bénéficier d’un droit de séjour sur le territoire de l’État membre dont il a la nationalité, indépendamment de l’exercice préalable de son droit de circuler ? De manière incidente et dans les mêmes circonstances, un droit de séjour peut-il être octroyé à l’ascendant, ressortissant d’un État tiers, qui assume la charge d’un enfant mineur, possédant la nationalité d’un État membre, et dont il bénéficierait en tout état de cause si l’enfant mineur avait exercé son droit de circuler ? Enfin, quelles sont les conséquences du droit de séjour de l’enfant mineur sur les exigences à remplir, au regard du droit du travail, par l’ascendant de ce mineur, ressortissant d’un État tiers ? Dans le droit fil de sa jurisprudence Garcia Avello, la Cour a dit pour droit que « l’article 20 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’un État membre, d’une part, refuse à un ressortissant d’un État tiers, qui assume la charge de ses enfants en bas âge, citoyens de l’Union, le séjour dans l’État membre de résidence de ces derniers et dont ils ont la nationalité et, d’autre part, refuse audit ressortissant d’un État tiers un permis de travail, dans la mesure où de telles décisions priveraient lesdits enfants de la jouissance effective de l’essentiel des droits attachés au statut de citoyen de l’Union ». Cette jurisprudence, qui accorde un statut dérivé de la citoyenneté de l’Union à certains ressortissants des pays tiers sur le fondement d’une résidence durable, contribue à circonscrire l’obligation de circuler comme critère fondateur du droit de l’Union mais également la nécessité de détenir la nationalité d’un État membre.
18Le solfège de la Cour transcrit les conclusions des Conseils européens mettant en œuvre le traité d’Amsterdam. En précisant les fondements juridiques de l’ELSJ, le Conseil européen de Tampere, des 15 et 16 octobre 1999, a consacré ses conclusions 18 et suivantes à la recherche d’un traitement équitable pour les ressortissants des pays tiers en vue de définir une politique communautaire d’asile et d’immigration : « une politique plus énergique en matière d’intégration devrait avoir pour ambition de leur offrir des droits et obligations comparables à ceux des citoyens de l’Union européenne ». Dans ce but, les ressortissants de pays tiers résidents de longue durée bénéficient d’un statut privilégié et, en application de l’article 79 TFUE (ex 63.4 TCE), la directive n° 2003/109/CE du Conseil du 25 novembre 200339 fixe un cadre juridique pour leur intégration, cette directive étant complétée par le règlement (CE) n° 859/2003 du Conseil du 14 mai 2003 visant à étendre les dispositions du règlement (CEE) n° 1408/71 en matière de sécurité sociale40. L’ensemble de ce dispositif offre aux résidents de longue durée des droits et des obligations en partie comparables à ceux des citoyens de l’Union : les uns comme les autres ne peuvent, notamment, pas faire l’objet de mesures d’expulsion pour des motifs d’ordre économique41.
19Ce parallélisme, fondé sur un critère de résidence durable, vise conjointement les statuts civil et civique européens. Avec l’arrêt rendu en grande chambre le 12 septembre 2006 dans l’affaire Royaume d’Espagne c/ Royaume-Uni, la Cour de justice précise que « si le statut de citoyen de l’Union a vocation à être le statut fondamental des ressortissants des États membres permettant à ceux parmi ces derniers qui se trouvent dans la même situation d’obtenir, indépendamment de leur nationalité et sans préjudice des exceptions expressément prévues à cet égard, le même traitement juridique (arrêt du 20 septembre 2001, C-184/99, Grzelczyk, Rec. p. I-6193, point 31), ce constat n’a pas nécessairement pour conséquence que les droits reconnus par le traité seraient réservés aux citoyens de l’Union » (point 74) ; ainsi, « les articles 189 CE, 190 CE, 17 CE et 19 CE ne s’opposent pas à ce que les États membres octroient ce droit de vote et d’éligibilité à des personnes déterminées ayant des liens étroits avec eux, autres que leurs propres ressortissants ou que les citoyens de l’Union résidant sur leur territoire ». (point 78). L’importance déterminante reconnue par la Cour au critère de résidence pour garantir l’égalité des droits a été confirmée par l’arrêt rendu le même jour dans une affaire concernant l’exercice du droit de vote aux élections européennes par des ressortissants néerlandais résidant à Aruba. La grande chambre a alors dit pour droit que : « En l’état actuel du droit communautaire, si rien ne s’oppose à ce que les États membres définissent, dans le respect du droit communautaire, les conditions du droit de vote et d’éligibilité aux élections au Parlement européen par référence au critère de la résidence sur le territoire dans lequel sont organisées les élections, le principe d’égalité de traitement fait toutefois obstacle à ce que les critères choisis aient pour effet de traiter de manière différente des ressortissants se trouvant dans des situations comparables, sans que cette différence de traitement soit objectivement justifiée »42. Les programmes de la Haye et de Stockholm gardent cette orientation générale, même s’ils accordent désormais une importance renforcée aux questions de sécurité et de lutte contre le terrorisme.
2 – Le champ persistant des situations de droit interne
20Selon le programme de Stockholm du 2 décembre 2009, « l’accès à l’Europe à l’heure de la mondialisation » s’inscrit parmi les priorités politiques de l’Union, aussi « il convient de faciliter l’accès à l’Europe pour les hommes d’affaires, les touristes, les étudiants, les chercheurs, les travailleurs, les personnes ayant besoin d’une protection internationale et celles ayant un intérêt légitime à accéder au territoire de l’UE. Parallèlement, l’Union et ses États membres doivent garantir la sécurité de leurs citoyens ». Pour sa part, la Commission précise, dans sa communication du 10 juin 2009, que « la liberté de circulation implique aussi des obligations de la part de ceux qui en bénéficient » et qu’elle « examinera comment aider les autorités des États membres à lutter efficacement contre les abus de ce principe fondamental de l’Union »43. La crainte d’un accroissement des mouvements migratoires dans l’Union n’est pas étrangère au choix de ces tonalités graves, plus discrètes jusqu’alors… Elle se traduit par l’affirmation persistante des situations de droit interne échappant à l’ordre juridique de l’Union, les États restant alors libres d’accorder, ou non, leur protection nationale. La Cour de justice, quelle que soit sa créativité, n’étouffe pas le chœur des obligations de droit interne entonné à Bruxelles et dans les capitales des Vingt-sept ; les arrêts Shirley McCarthy contre Secretary of State for the Home Department du 5 mai 201144 et Secretary of State for Work and Pensions contre Maria Dias45 illustrent cette retenue en marquant les limites d’une jurisprudence antérieure plus favorable à l’hymne européen et au statut protecteur des citoyens de l’Union…
21En matière de regroupement familial, avec l’arrêt Shirley McCarthy du 5 mai 201146, la troisième chambre de la Cour se réfère aux jurisprudences innovantes Garcia Avello et Zambrano pour mieux énoncer que les citoyens de l’Union européenne n’ayant jamais exercé leur droit de libre circulation ne peuvent invoquer la citoyenneté de l’Union pour régulariser le séjour de leur conjoint en provenance d’un État tiers. Certes, par référence à sa jurisprudence Schempp47, la Cour précise « que la situation d’un citoyen de l’Union qui, telle Mme McCarthy, n’a pas fait usage du droit de libre circulation ne saurait, de ce seul fait, être assimilée à une situation purement interne » (point 46). À l’appui de son raisonnement, elle précise au point 53 que « dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts Ruiz Zambrano et García Avello, la mesure nationale en cause avait pour effet de priver des citoyens de l’Union de la jouissance effective de l’essentiel des droits conférés par ce statut ou d’entraver l’exercice de leur droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres ». Or, « dans le contexte de la présente affaire au principal, la circonstance que Mme McCarthy possède, outre la nationalité du Royaume-Uni, la nationalité irlandaise n’implique pas l’application de mesures d’un État membre qui auraient pour effet de la priver de la jouissance effective de l’essentiel des droits conférés par le statut de citoyen de l’Union ou d’entraver l’exercice de son droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres » (point 54). Ainsi, tant que le citoyen de l’Union n’est pas privé de son droit de circuler et de séjourner sur le territoire des autres États membres, sa situation ne représente aucun lien avec le droit de l’Union, tant sur le fondement de l’article 3, §1 de la directive n° 2004/38/CE que de l’article 21 TFUE. De manière convergente deux mois plus tard, avec l’arrêt Secretary of State for Work and Pensions contre Maria Dias du 21 juillet 201148, la même troisième chambre précise les limites de sa jurisprudence Secretary of State for Work and Pensions contre Taous Lassal du 7 octobre 201049 en matière de droit au séjour permanent à la suite de l’entrée en vigueur de la directive n° 2004/38/CE.
22Dans l’affaire Lassal, à titre liminaire, la Cour a relevé « que la citoyenneté de l’Union confère à chaque citoyen de l’Union un droit fondamental et individuel de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, sous réserve des limitations et des restrictions fixées par le TFUE et des mesures adoptées en vue de leur application, la libre circulation des personnes constituant, par ailleurs, l’une des libertés fondamentales du marché intérieur, ayant, de surcroît, été réaffirmée à l’article 45 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne » (point 29). Dans le dispositif de son jugement, elle a alors dit pour droit « d’une part, que les périodes de séjour ininterrompu de cinq ans, accomplies avant la date de transposition de la directive n° 2004/38, à savoir le 30 avril 2006, […], doivent être prises en considération aux fins de l’acquisition du droit de séjour permanent au titre de l’article 16, paragraphe 1, de cette directive et, d’autre part, que des absences de l’État membre d’accueil, inférieures à deux ans consécutifs, intervenues avant le 30 avril 2006 et postérieurement à un séjour légal ininterrompu de cinq ans accompli avant cette date, ne sont pas de nature à affecter l’acquisition du droit de séjour permanent au titre dudit article 16, paragraphe 1 ».
23L’affaire Maria Dias qui suivra résulte également de deux questions préjudicielles de la Court of Appeal (England & Wales). Au point 41, à la lumière de l’arrêt Lassal du 7 octobre 201050, la Cour de justice reformule les questions posées par la juridiction de renvoi. Pour la troisième chambre, cette dernière demande en substance « si les périodes de séjour d’un citoyen de l’Union dans un État membre d’accueil, effectuées sur le seul fondement d’une carte de séjour valablement délivrée en vertu de la directive 68/360 et sans que soient satisfaites les conditions pour pouvoir bénéficier d’un quelconque droit de séjour, intervenues avant le 30 avril 2006 et postérieurement à une période de séjour légal ininterrompue de cinq ans accomplie avant cette date, sont de nature à affecter l’acquisition du droit de séjour permanent au titre de l’article 16, paragraphe 1, de la directive 2004/38 » ? Pour répondre à ces questions, la Cour se réfère donc expressément à son dispositif de l’arrêt Lassal (point 35) avant de rappeler que « la délivrance d’un titre de séjour à un ressortissant d’un État membre doit être considérée non comme un acte constitutif de droits, mais comme un acte destiné à constater, de la part d’un État membre, la situation individuelle d’un ressortissant d’un autre État membre au regard des dispositions du droit de l’Union (voir arrêt du 23 mars 2006, Commission/Belgique, C-408/03, Rec. p. I-2647, points 62 et 63) ». Alors, la Cour constate « que les périodes de séjour accomplies avant le 30 avril 2006, sur le seul fondement d’une carte valablement délivrée en vertu de la directive 68/360 et sans que soient satisfaites les conditions permettant de bénéficier d’un quelconque droit de séjour, ne sauraient être considérées comme accomplies légalement aux fins de l’acquisition du droit de séjour permanent au titre de l’article 16, paragraphe 1, de la directive 2004/38 ». Pour ces motifs, la Cour conclut que la simple délivrance d’une carte de séjour est un acte recognitif qui ne suffit pas pour acquérir un droit de séjour permanent au titre de l’article 16, §1 de la directive n° 2004/38/CE si l’ensemble des conditions requises ne sont pas satisfaites.
24Le droit de séjour des citoyens de l’Union migrants est donc fondamental mais pas intangible. Conformément à l’article 21 TFUE, il s’exerce « sous réserve des limitations et conditions prévues par les traités et par les dispositions prises pour son application » ; il peut s’achever sous le coup d’une mesure d’éloignement dont les nationaux ne peuvent faire l’objet sur le territoire de leur État d’origine51. Cette ultime sanction distingue clairement les statuts juridiques attachés à la citoyenneté nationale et à celle de l’Union : les États membres ne pratiquent plus le bannissement. Elle témoigne des différences de traitement qui distinguent le national, le citoyen de l’Union migrant et l’étranger. En l’état actuel du droit, la citoyenneté de l’Union se donne à penser comme une catégorie juridique intermédiaire, ajoutée à la citoyenneté nationale, aux confins du droit des étrangers et, pour les souverainistes, de l’étrangeté quant à ses finalités civiles et civiques… Hors du plateau de Kirchberg, son sort reste étroitement lié aux transcriptions nationales du principe d’égalité dont l’orchestration par les juges n’est pas chose aisée… La citoyenneté de l’Union a-t-elle vocation à acquérir son autonomie européenne tant vis-à-vis des droits des étrangers que des citoyennetés nationales, à s’envoler tel l’Âne de Prévert ?
II – Les variations juridiques étranges résultant des transcriptions en droit interne du principe d’égalité sans condition de nationalité
« Étrange est !
Dit l’ange en tapant du pied
Étranger vous-même
Dit l’Âne
Et il s’envole52 ».
25Dans ses conclusions rendues sur la demande d’avis du tribunal de Cergy Pontoise dans l’affaire Alin Silidor, M. Mattias Guyomar, commissaire du gouvernement, terminait en insistant sur la nécessité de « garantir la spécificité du droit au séjour des ressortissants communautaires. Si celui-ci constitue un droit fondamental individuel, c’est d’abord parce qu’il est de nature à renforcer le sentiment de citoyenneté de l’Union et constitue un élément clef pour promouvoir la cohésion sociale qui est l’un des objectifs fondamentaux de l’Union, pour reprendre les termes mêmes de la directive du 29 avril 2004 (cons. no 17) »53. Pour autant, la vocation de la citoyenneté de l’Union à « constituer le statut de base des ressortissants des États membres lorsqu’ils exercent leur droit de circuler et de séjourner librement », telle qu’elle figure au troisième considérant de la même directive, n’est pas expressément mentionnée, ni l’arrêt Rudy Grzelczyk et son influente postérité jurisprudentielle… Ces tonalités traduisent, pour le moins, les finalités différentes du principe d’égalité dans les partitions nationales et européennes, selon que le citoyen de l’Union reste, ou non, considéré comme un « étranger ». Avec le préambule du traité sur l’Union européenne, les chefs d’État ou de gouvernement s’affirment « Résolus à établir une citoyenneté commune aux ressortissants de leurs pays ». Par ailleurs, selon l’article premier de la convention d’application de l’accord de Schengen relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, désormais intégrée au droit communautaire, « on entend par : étranger toute personne autre que les ressortissants des États membres des Communautés » devenues l’Union. Pour sa part, sur le fondement des articles 18, 20 et suivants TFUE (ex art. 12, 17 et suiv. TCE), la Cour de justice de l’Union européenne dissout les différences de traitement consubstantielles au droit des étrangers en conjuguant le principe de non discrimination en raison de la nationalité et les dispositions relatives à la citoyenneté de l’Union : « Dans le domaine d’application du traité, une telle discrimination est en principe interdite par l’article 6 de celui-ci (18 TFUE). En l’espèce, cet article doit être lu en combinaison avec les dispositions du traité sur la citoyenneté de l’Union pour apprécier le domaine d’application de celui-ci »54.
26En droit interne français, l’entrée et le séjour des citoyens de l’Union migrants relèvent cependant de dispositions spécifiques inclues dans le code de l’entrée et le séjour des étrangers et du droit d’asile et, selon l’article L. 111-1 intitulé Dispositions générales applicables aux étrangers et aux ressortissants de certains États : « Sont considérées comme étrangers au sens du présent code les personnes qui n’ont pas la nationalité française, soit qu’elles aient une nationalité étrangère, soit qu’elles n’aient pas de nationalité ». Ce n’est qu’en matière de documents et visas exigés pour l’entrée des étrangers sur le territoire européen de la France, que l’arrêté du 10 mai 2010, pris en application de l’article R. 211-1, énonce que « le terme « étranger » s’entend comme tout individu qui n’est pas un citoyen de l’Union européenne au sens de l’article 17, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ».
27Pour sa part, le Conseil constitutionnel français considère « qu’aucun principe non plus qu’aucune règle de valeur constitutionnelle ne confère aux étrangers des droits de caractère général et absolu d’accès et de séjour sur le territoire national »55 ; en outre, il réaffirme, contrairement aux attentes des requérants56, sa jurisprudence classique57 selon laquelle « l’appréciation de la constitutionnalité des dispositions que le législateur estime devoir prendre ne saurait être tirée de la comparaison entre les dispositions de lois successives ou de la conformité de la loi avec les stipulations de conventions internationales mais résulte de la confrontation de celle-ci avec les seules exigences de caractère constitutionnel »58. Or, l’article 88-3 de la constitution du 4 octobre 1958, ne distingue pas, de manière exhaustive, le statut des citoyens de l’Union et celui des étrangers mais il reconnait, pour mieux l’encadrer, le statut constitutionnel des citoyens de l’Union en matière de droit de vote et d’éligibilité aux seules élections municipales. La vocation de la citoyenneté de l’Union à devenir le statut fondamental des ressortissants des États membres, si elle devait se réaliser, supposerait une démarche plus ambitieuse conduisant à définir conjointement la citoyenneté nationale et la citoyenneté de l’Union, les deux se complétant mutuellement sans se confondre. En droit interne français, la citoyenneté calédonienne, telle qu’introduite au titre xiii de la constitution de la Ve République, témoigne de la flexibilité du principe d’indivisibilité et pourrait inspirer cette évolution avec, pour objectif, le renforcement du lien entre l’Union européenne et ses États membres59. Une telle perspective, envisageable à l’échelle européenne dans le cadre d’une coopération renforcée ou d’une coopération plus étroite hors traité, confirmerait les fondements démocratiques de la zone euro ou de l’espace Schengen dont les citoyens sont astreints à une solidarité économique, budgétaire et sociale renforcée, qu’ils soient migrants ou sédentaires, agents économiques ou inactifs60...
28Pour autant, en l’état de l’intégration de l’Union et selon la Commission européenne, « le gouvernement (français) a adopté le 16 juin dernier les modifications législatives exigées par la Commission pour assurer le respect de la directive sur la libre circulation, y compris les garanties qui protègent les citoyens de l’Union contre les expulsions arbitraires et les traitements discriminatoires »61. Parmi ses 111 articles modifiant deux ordonnances ainsi que les codes civil, général des collectivités territoriales, du commerce, du travail, du service national, du cinéma et de l’image animée, de la sécurité sociale, de l’action sociale et de la famille, de procédure pénale, de justice administrative, de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, la loi no 2011-672 du 16 juin 2011 introduit dans le CESEDA plusieurs nouvelles dispositions visant expressément les citoyens de l’Union : il s’agit plus particulièrement de l’article L. 121-4-1 relatif au droit de séjour sans constituer « une charge déraisonnable pour le système d’assistance sociale », de l’article 511-3-1 précisant l’obligation de quitter le territoire français dans un délai, en principe, de trente jours ainsi que de l’article L. 521-5 portant sur les mesures d’expulsion.
29La protection communautaire résultant de la citoyenneté de l’Union demeure ainsi liée, plus ou moins étroitement, à l’obligation de franchir les frontières internes de l’Union en détenant des « ressources suffisantes » et, de manière circonscrite, elle peut conduire à des discriminations à rebours à l’encontre des citoyens de l’Union sédentaires. Dans cette optique, plusieurs décisions du Conseil d’État méritent d’être rapprochées car la jurisprudence administrative du Palais royal ne semble pas définitivement établie mais varie selon que le statut des citoyens de l’Union s’applique, directement, aux ressortissants des autres États membres migrants en France (A) ou indirectement, par ricochet, aux français sédentaires afin d’éviter les discriminations à rebours (B).
A – Le citoyen de l’Union migrant en France, un « étranger » privilégié
30Loin des audaces jurisprudentielles de la cour suprême de Luxembourg, le citoyen de l’Union migrant en France reste-t-il, tout compte fait, un étranger privilégié quant à son intégration dans la société nationale ou est-il personnellement et directement détenteur d’un patrimoine juridique qui transcende les clivages nationaux, renforce la solidarité européenne et préfigure l’émergence d’un demos européen ? Cette ambiguïté conceptuelle ménage la typologie binaire classique qui distingue « les nationaux » et les étrangers »62 mais, par son minimalisme, elle s’éloigne de la lettre des articles 9 TUE et 20 TFUE : « la citoyenneté de l’Union s’ajoute à la citoyenneté nationale et ne la remplace pas », l’une et l’autre sont juridiquement indissociables et complémentaires, qualités que ne peut pas revendiquer le droit des étrangers dans ses rapports avec la citoyenneté nationale…
31La loi no 2011-672 du 16 juin 2011 et l’évolution récente de la jurisprudence du Conseil d’État ne tranche pas ce dilemme européen : elles précisent les conditions de mise en œuvre du droit de séjour des citoyens de l’Union (1) et encadrent les mesures d’éloignement nécessaires au maintien de l’ordre public (2) sans pour autant extraire clairement leur régime juridique du droit des étrangers.
1 – L’encadrement spécifique du droit de séjour des citoyens de l’Union
32La constitution française reconnaît donc une place spécifique au droit communautaire car, selon l’article 88-1, plusieurs fois révisé depuis 1992 et le traité de Maastricht, « La République participe à l’Union européenne constituée d’États qui ont choisi librement d’exercer en commun certaines de leurs compétences en vertu du traité sur l’Union européenne et du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, tels qu’ils résultent du traité signé à Lisbonne le 13 décembre 2007 ». S’inspirant directement de la jurisprudence de principe de la Cour de justice dans l’arrêt Costa Enel du 15 juillet 196463, le Conseil constitutionnel en déduit, dans sa décision no 2004-505 DC du 19 novembre 2004, « que le constituant a ainsi consacré l’existence d’un ordre juridique communautaire intégré à l’ordre juridique interne et distinct de l’ordre juridique international »64 et que, selon sa décision no 2004-496 DC du 10 juin 2004, il en résulte une obligation de bonne application du droit communautaire, notamment de transposition correcte des directives65. Le Conseil d’État a précisé certaines conséquences de cette obligation. Dans sa décision d’assemblée du 8 février 2007, Sté Arcelor Atlantique et Lorraine et autres, il a considéré « que le principe d’égalité, dont l’application revêt à cet égard valeur constitutionnelle, constitue un principe général du droit communautaire ; qu’il ressort de l’état actuel de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes que la méconnaissance de ce principe peut notamment résulter de ce que des situations comparables sont traitées de manière différente, à moins qu’une telle différence de traitement soit objectivement justifiée ; que la portée du principe général du droit communautaire garantit, au regard du moyen invoqué, l’effectivité du respect du principe constitutionnel (d’égalité) en cause »66. Ainsi, tant vis-à-vis de la constitution que du traité de Lisbonne, le Conseil d’État justifie objectivement les différences de traitement entre les nationaux et les citoyens de l’Union par leurs différences de situations juridiques et politiques respectives, l’inégalité de traitement fondée sur la nationalité ne devant pas constituer une discrimination au sens de l’article 14 CESDHLF67. Mais, ce traitement privilégié contribue-t-il à confirmer ou à circonscrire la vocation de la citoyenneté de l’Union en tant que statut fondamental des ressortissants des États membres ?
33Le droit de séjour des citoyens de l’Union et des membres de sa famille est soumis à des régimes juridiques différents selon que sa durée est inférieure (art. 121-4-1 CESEDA – art. 6 dir. 2004/38/CE) ou supérieure à trois mois (art. L. 121-1 CESEDA – art. 7 dir. 2004/38/CE). En outre, après cinq années de résidence légale et ininterrompue, lui et les siens acquièrent un droit de séjour permanent, mais non définitif, sur l’ensemble du territoire français (art. L. 122-1 CESEDA – art. 16 dir. 2004/38/CE). En effet, une absence pendant plus de deux années consécutives en fait perdre le bénéfice à son titulaire (art. 122-2 CESEDA – art. 20.3 dir. 2004/38/CE). Ainsi, pour le Conseil d’État, le moyen tiré de ce que le citoyen de l’Union « tiendrait des seules stipulations de l’article 8 A du Traité de Rome (art. 21 TFUE) un "droit au séjour" ne peut être accueilli »68. Depuis l’entrée en vigueur de la directive n° 2004/38/CE, la Haute assemblée a développé sa jurisprudence en acceptant de vérifier que les conditions fixées par la législation communautaire sont effectivement remplies69 et en précisant que « l’article 37 de la directive 2004/38/CE du 29 avril 2004 autorise, sans les y obliger, les États membres à maintenir ou à prendre en faveur des citoyens de l’Union et des membres de leur famille des dispositions plus favorables que celles visées par la directive »70. Ces conditions tiennent principalement à la détention de ressources suffisantes (a) et à la détermination de la durée du séjour (b).
a – La définition prudente des charges déraisonnables et des ressources suffisantes
34Les champs d’application des notions de « charge déraisonnable » et de « ressources suffisantes » sont complémentaires et permettent, en France, de distinguer le droit au séjour de moins ou de plus de trois mois. Si le premier admet pour seule réserve que le citoyen de l’Union ne devienne pas une charge déraisonnable, le second suppose d’être travailleur, étudiant ou de disposer de « ressources suffisantes ». Les questions se posent alors de l’opposabilité du caractère suffisant des ressources dès lors qu’un ressortissant communautaire inactif n’est pas pris en charge par le système d’assistance social français ainsi que des modalités d’appréciation de la durée du séjour. Dans son avis de principe Alin Silidor du 26 novembre 200871, le Conseil d’État a répondu à ces questions en un sens certes conforme au droit communautaire mais qui souligne, en creux, la différence de traitement persistante entre la citoyenneté nationale et la citoyenneté de l’Union : sauf exécution d’un mandat d’arrêt international ou européen, le droit de séjour des nationaux est inconditionné ; tel n’est pas le cas pour les citoyens de l’Union.
35Selon le 8e considérant de la directive n° 2004/38/CE, « Les citoyens de l’Union devraient avoir le droit de séjourner dans l’État membre d’accueil pendant une période ne dépassant pas trois mois sans être soumis à aucune condition ni à aucune formalité autre que l’obligation de posséder une carte d’identité ou un passeport en cours de validité ». Ainsi, dès lors qu’ils sont détenteurs des documents exigés (art. R. 121-1 CESEDA - art. 5 dir. 2004/38), les citoyens de l’Union jouissent d’un droit de séjour de moins de trois mois « tant qu’ils ne deviennent pas une charge déraisonnable pour le système d’assistance sociale » (art. L. 121-4-1 CESEDA). Cette précision est conforme aux articles combinés 6, 14 et 37 de la directive n° 2004/38/CE et répond à la jurisprudence du Conseil d’État du 19 mai 2008, dans l’affaire Association SOS Racisme et Ligue des Droits de l’Homme et autres, selon laquelle « le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans sa rédaction issue de la loi du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration, qui a partiellement transposé en droit français la directive du 29 avril 2004, ne contient aucune disposition sur le droit au séjour de moins de trois mois des ressortissants communautaires ; qu’à la date à laquelle a été prise la circulaire, aucune autre disposition législative ou réglementaire ne prévoyait une telle limitation du droit au séjour de ces ressortissants ; que, par suite et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens invoqués, les requérants sont fondés à demander l’annulation des dispositions précitées de la circulaire comme entachées d’incompétence »72. Ainsi, pour en garantir le respect, le nouvel article L. 511-3-1 CESEDA prévoit que « L’autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger un ressortissant d’un État membre de l’Union européenne, d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou de la Confédération suisse, ou un membre de sa famille à quitter le territoire français lorsqu’elle constate : […] que son séjour est constitutif d’un abus de droit. Constitue un abus de droit le fait de renouveler des séjours de moins de trois mois dans le but de se maintenir sur le territoire alors que les conditions requises pour un séjour d’une durée supérieure à trois mois ne sont pas remplies. Constitue également un abus de droit le séjour en France dans le but essentiel de bénéficier du système d’assistance sociale ».
36Après cette période de trois mois, le droit de séjour n’est donc plus inconditionné et c’est bien le contournement des exigences de l’article L. 121-1 CESEDA (art. 7 dir. 2004/38/CE) qui est visé par l’article L. 511-3-1 CESEDA et la notion d’abus de droit. Le citoyen de l’Union doit alors : soit exercer une activité professionnelle ; soit disposer pour lui-même et les membres de sa famille de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d’assistance sociale, ainsi que d’une assurance maladie. Pour les inactifs, la provenance des ressources est sans incidence sur le droit de séjour : elles peuvent être fournies à un mineur par un parent ressortissant d’un État tiers73 ou par un partenaire sans lien familial juridiquement établi74 ; de plus, ils n’ont pas à prouver qu’ils disposent de ressources durables75.
37Toutefois, pour le Conseil d’État, « l’insuffisance des ressources peut être opposée par le préfet pour prendre une décision d’éloignement à l’encontre d’un ressortissant communautaire qui séjourne en France depuis plus de trois mois, alors même que l’intéressé n’est pas encore effectivement pris en charge par le système d’aide sociale »76. Cette position repose sur deux séries de considérations présentées par Mattias Guyomar et résultant de l’interprétation de la directive n° 2004/38/CE. De manière générale, le rapporteur public considère que la logique d’ensemble du régime juridique de la directive n° 2004/38/CE, tel que précisé à l’article 7, a pour objectif « l’absence de charge pour le système social ». Par ailleurs, selon son raisonnement, le considérant no 16 précise que « Les bénéficiaires du droit de séjour ne devraient pas faire l’objet de mesures d’éloignement aussi longtemps qu’ils ne deviennent pas une charge déraisonnable pour le système d’assistance sociale de l’État membre d’accueil. En conséquence, une mesure d’éloignement ne peut pas être la conséquence automatique du recours à l’assistance sociale. L’État membre d’accueil devrait examiner si, dans ce cas, il s’agit de difficultés d’ordre temporaire et prendre en compte la durée du séjour, la situation personnelle et le montant de l’aide accordée, afin de déterminer si le bénéficiaire constitue une charge déraisonnable pour son système d’assistance sociale et de procéder, le cas échéant à son éloignement ». Or la notion de « charge déraisonnable pour le système d’assistance sociale » est moins facile à cerner que celle de « ressources suffisantes » qui repose sur l’appréciation de conditions objectives précisées par l’article R. 121-4 du CESEDA : la décision préfectorale résultera de l’appréciation « de la situation personnelle de l’intéressé. En aucun cas, le montant exigé ne peut excéder le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2 de l’article L. 262-2 du code de l’action sociale et des familles ou, si l’intéressé remplit les conditions d’âge pour l’obtenir, au montant de l’allocation de solidarité aux personnes âgées mentionnée à l’article L. 815-1 du code de la sécurité sociale ». En pratique, l’autorité administrative doit prendre en compte la jurisprudence protectrice de la Cour de justice qui refuse la notification automatique d’un ordre de quitter le territoire adressé a un citoyen de l’Union qui n’a pas produit, dans un délai déterminé, les documents requis pour l’obtention d’un titre de séjour.
38Reste encore à déterminer à qui incombe la charge de la preuve de la durée du séjour et, après trois mois, du respect des conditions requises. De manière protectrice, le Conseil d’État décide qu’il incombe à l’autorité préfectorale d’opposer au citoyen de l’Union soit la durée de son séjour, soit le défaut des conditions fixées pour son séjour supérieur à trois mois. Dans le deuxième cas, « l’administration peut notamment s’appuyer sur des données émanant des organismes pourvoyeurs d’aide lorsqu’elle invoque la charge que constitue le ressortissant communautaire pour le système d’aide sociale, ou sur les déclarations préalablement faites par l’intéressé »77. Le citoyen de l’Union, qualifié d’étranger, pourra « apporter tout élément de nature à en contester le bien-fondé, selon les modalités habituelles de l’administration de la preuve »78. Dans le premier cas, en revanche, à défaut d’enregistrement, la contestation de la durée du séjour est plus difficile.
b – La détermination délicate de la durée du séjour
39En application de l’article 8 de la directive n° 2004/38/CE, l’article L. 121-2 du CESEDA dispose désormais que « Les ressortissants visés à l’article L. 121-1 qui souhaitent établir en France leur résidence habituelle se font enregistrer auprès du maire de leur commune de résidence dans les trois mois suivant leur arrivée. Les ressortissants qui n’ont pas respecté cette obligation d’enregistrement sont réputés résider en France depuis moins de trois mois ». La jurisprudence du 15 mars 2000, Préfet des Pyrénées-Atlantiques c/ Jésus Maria Bidaola Achega79, selon laquelle « les ressortissants d’un État membre de l’Union européenne souhaitant résider en France au-delà d’un délai de trois mois doivent, dans tous les cas, demander un titre de séjour » n’est donc plus applicable sur ce point. Pour autant, la présomption d’une durée du séjour inférieure à trois mois n’est pas irréfragable, d’autant que l’obligation d’enregistrement se heurte à une difficulté juridique interne au droit français. L’article R. 121-5 précise que : « Une attestation, conforme au modèle fixé ‘par arrêté du ministre chargé de l’immigration’, est remise immédiatement par le maire aux ressortissants qui se soumettent à l’obligation d’enregistrement prévue à l’article L. 121-2 » et l’article 6 du décret no 2007-371 du 21 mars 2007 indique que « les dispositions de l’article L. 121-2 relatives à l’obligation d’enregistrement s’appliquent aux ressortissants entrés en France postérieurement à l’entrée en vigueur de l’arrêté prévu à l’article R. 121-5 », or cet arrêté n’est pas encore paru80.
40La situation est d’autant plus gênante que, dans l’avis Silidor, le rapporteur public a émis des doutes sur la compétence du juge national à déterminer les règles de fixation de la durée du séjour. Certes, selon ses observations, « la demande d’avis ne se réfère qu’au droit national mais celui-ci n’est que l’exacte transposition de la directive du 29 avril 2004. En matière d’établissement des ressortissants communautaires sur le territoire des États membres, nous croyons particulièrement nécessaire d’assurer l’application uniforme du droit communautaire. (…) Nous craignons que des modalités divergentes d’appréciation de la durée du séjour selon les États membres engendrent de fortes disparités dans l’application de la directive de 2004 de nature à provoquer des appels d’air dans tel ou tel État aux dépens de l’équilibre de son système d’assistance sociale. En d’autres termes, rien ne sert de bâtir un droit commun du séjour si les modalités pratiques qui en permettent l’exercice divergent au sein de l’espace communautaire ». Aussi après avoir, selon une jurisprudence classique81, écarté la compétence du Conseil d’État pour saisir la Cour de justice d’une question préjudicielle à la suite d’une demande d’avis, il avait suggéré de « répondre au tribunal administratif que la question qu’il pose soulève une difficulté sérieuse dans l’interprétation du droit communautaire à charge pour lui, s’il s’y croit fondé, de poser une question préjudicielle à la Cour de Luxembourg ». Cette solution ne fut pas retenue…
2 – Le maintien de l’ordre public et le contrôle renforcé des mesures d’éloignement
41Avec la réforme du CESEDA, en date du 16 juin 2011, l’objectif légitime de maintien de l’ordre public est également encadré par les nouveaux articles L. 511-3-1 et L. 521-5 portant respectivement sur les obligations de quitter le territoire (OQTF) ou les mesures d’expulsion : les unes et les autres doivent résulter d’un « comportement personnel » représentant « une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société ». Cette formulation, inscrite à l’article 27, 2 de la directive n° 2004/38/CE reprend directement la jurisprudence de la Cour de justice régulièrement rappelée depuis l’arrêt Rutili du 28 octobre 197582. Conformément à la jurisprudence européenne Pecastaing83, les justifications détachées du cas individuel sont irrecevables. En outre, la mesure répressive adoptée doit être proportionnée au comportement du citoyen de l’Union84 : le simple trouble à l’ordre public ne peut suffire à fonder une mesure d’éloignement dès lors que le comportement est toléré des nationaux ou que d’autres mesures, de nature administrative ou préventive, peuvent être prises85. En ce sens, la deuxième phrase de l’article L. 521-5 transcrit, presque mot pour mot, l’article 28, 1° de la directive n° 2004/38/CE car « Pour prendre de telles mesures, l’autorité administrative tient compte de l’ensemble des circonstances relatives à leur situation, notamment la durée de leur séjour sur le territoire national, leur âge, leur état de santé, leur situation familiale et économique, leur intégration sociale et culturelle dans la société française ainsi que l’intensité des liens avec leur pays d’origine ». En outre, les citoyens de l’Union et les membres de leur famille bénéficiant du droit de séjour permanent ne peuvent faire l’objet d’une OQTF (art. L. 511-4, 11°) et, conformément à l’article 28 de la directive n° 2004/38/CE, ils « ne peuvent faire l’objet d’une mesure d’expulsion que si cette mesure constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l’État ou la sécurité publique » (art. L. 521-2, 6°). Pour autant, « le droit communautaire n’impose pas aux États membres une échelle uniforme de valeurs en ce qui concerne l’appréciation des comportements [...] contraires à l’ordre public »86 ; à titre d’exemple, les États membres restent libres d’encadrer ou de sanctionner la prostitution ou la consommation de cannabis…
42Dans l’affaire Pecastaing c/ État belge, la Cour de justice a également indiqué que les citoyens de l’Union devaient bénéficier des mêmes garanties procédurales que les nationaux : « un État membre ne saurait, sans méconnaître l’obligation imposée par la directive 64/221, subordonner l’admission d’un recours, par les personnes visées par la directive, à des exigences de forme ou de procédure particulières moins favorables que celles qui s’appliquent aux recours introduits par les nationaux contre les actes de l’administration [...] à l’inclusion s’il y a lieu, de la suspension des actes sujets à recours »87. Parmi les garanties procédurales instituées par les articles 5 à 8 de la directive n° 64/221/CE, modifiées par les articles 30 et 31 de la directive n° 2004/38/CE, il convient de souligner l’obligation de communication des motifs de la décision faisant grief, ainsi que le droit au recours juridictionnel et, le cas échéant, administratif à l’encontre des décisions de refus de renouvellement du titre de séjour ou des décisions d’éloignement du territoire. Le nouvel article 511-3-1 CESEDA introduit en droit interne les garanties procédurales dont doivent bénéficier les citoyens de l’Union en obligeant l’administration à communiquer les motifs d’une OQTF. Telle n’était pas la situation résultant de la loi no 2007-1631 du 20 novembre 2007. Dans l’avis Alin Silidor, le Conseil d’État avait suivi les conclusions de son rapport public pour aligner partiellement le régime juridique du contradictoire applicable aux citoyens de l’Union sur celui, moins protecteur, des étrangers faisant l’objet d’une OQTF88. En se référant à l’avis contentieux Hammou et Benabdelhak du 19 octobre 2007 et Barjama du 28 novembre de la même année89, il avait alors répondu à la première question préjudicielle que : « l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, en prévoyant que ces décisions ‘n’interviennent qu’après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales […], ne saurait être utilement invoqué à l’encontre d’une décision portant obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement du I de l’article L. 511-1 du CESEDA, y compris à l’encontre d’un ressortissant communautaire, et même si celui-ci n’a pas sollicité la délivrance d’un titre de séjour ».90 Le Conseil d’État avait cependant ajouté que « si le préfet prend sur le fondement de l’article L. 121-4 du CESEDA une décision de refus de séjour, de refus de délivrance ou de renouvellement d’une carte de séjour ou de retrait, sans l’assortir d’une mesure d’éloignement à laquelle sont attachées les procédures spécifiques du livre V du CESEDA, une telle décision doit être assortie de la procédure prévue par l’article 24 de la loi du 12 avril 2000, dont les exigences, notamment de délai, dépendent des circonstances de l’espèce ». Il conviendra donc d’apprécier l’évolution de cette jurisprudence à la lumière des nouvelles dispositions légales et réglementaires…
43En outre, avec l’article R. 512-1-1 CESEDA, tel que modifié par le décret no 2011 du 8 juillet 2011, le droit au recours permettra à l’ensemble des étrangers auquel un délai de départ volontaire est imparti (et non plus seulement au ressortissant d’un État membre de l’Union européenne ou d’un État partie à l’accord sur l’Espace économique européen faisant l’objet d’un arrêté de reconduite à la frontière) d’exiger de l’administration que, la motivation de la décision, ou la lettre de notification qui l’accompagne, comprenne le délai fixé pour quitter le territoire, lequel, sauf en cas d’urgence, ne peut être inférieur à trente jours (art. L. 511-3-1 et R 522-9 en cas d’expulsion d’un citoyen de l’Union). Avant la réforme du CESEDA, le Conseil d’État avait déjà décidé que conformément au paragraphe 3 de l’article 30 de la directive n° 2004/38/CE du 29 avril 2004, le défaut d’une telle mention, qui n’est pas une mesure d’exécution de la décision d’éloignement mais un élément constitutif de la décision elle-même, entraîne l’illégalité de cette décision91 ; il s’est démarqué, en cela, de sa jurisprudence antérieure selon laquelle les conditions de la notification d’une décision étaient sans incidence sur sa légalité et n’avaient d’effet que sur son opposabilité et les délais de recours92.
44Le statut du citoyen de l’Union migrant en France n’est donc que partiellement assimilable à celui des nationaux. En droit interne, il reste davantage un étranger privilégié en vue de son intégration, plus ou moins étroite, à la communauté nationale que le détenteur d’un patrimoine juridique qui transcende pleinement les frontières et les clivages étatiques, renforce la solidarité européenne et préfigure l’émergence d’un demos européen. Mais, paradoxalement, le sort des sédentaires n’est pas toujours plus enviable : ils peuvent faire l’objet de discriminations à rebours93 qui se traduisent par une rupture de la solidarité européenne qui en résulte…
B – Le citoyen de l’Union français sédentaire, un national potentiellement discriminé
45La protection du droit communautaire, en général, et de son principe d’égalité de traitement, en particulier, reste, sauf exception, soumise à l’obligation de circuler et de franchir une frontière de l’Union ; en l’absence de ce caractère d’extranéité, c’est le droit interne qui prévaut avec une appréciation nationale de la notion de discrimination94. Sur ce point, le troisième considérant de la directive n° 2004/38/CE relative au droit de séjour généralisé des citoyens de l’Union reprend et encadre la jurisprudence Rudy Grzelczyk95 en précisant que « la citoyenneté de l’Union devrait être le statut de base des citoyens de l’Union lorsqu’ils exercent leur droit de circuler et de séjourner librement », il souligne l’obligation de déplacement et limite les effets de la citoyenneté de l’Union. Ces divergences potentielles entre les protections juridiques communautaires et nationales sont la source de discriminations à rebours, circonscrites mais certaines, à l’encontre des citoyens sédentaires. L’adoption d’un critère de résidence sur l’un des territoires des États membres, écartant l’obligation de franchir des frontières internes dont l’abolissement est proclamé, éviterait ces discriminations liées aux rapports de systèmes entre les ordres juridiques nationaux et européen. Joint au renforcement de la solidarité communautaire, ce critère permettrait de pallier au dumping social qui affecte la confiance des citoyens dans l’Union et ses politiques96. Les principales discriminations à rebours dont les citoyens de l’Union sédentaires peuvent encore être l’objet sont de nature civile et familiale (1). En revanche, les prestataires de services et agents économiques sédentaires semblent bénéficier d’un meilleur traitement jurisprudentiel (2).
1 – Le regroupement familial et le maintien des situations de droit interne au risque des discriminations à rebours
46En matière familiale, sur le fondement du règlement (CEE) n° 1616/68 du Conseil97, la Cour a, dès l’origine, contrôlé que le citoyen de l’Union « bénéficie lorsqu’il revient dans l’État membre dont il a la nationalité pour exercer une activité salariée ou non salariée, de facilités d’entrée et de séjour au moins équivalentes à celles dont il peut disposer, en vertu du droit dérivé, dans un autre État membre »98. En revanche, au regard du droit des étrangers et du regroupement familial, « le travailleur migrant peut se voir mieux traité que celui ressortissant de l’État où il exerce son activité, sans qu’il y ait (selon la Cour) discrimination à rebours puisque ce dernier, ne s’étant pas placé dans une situation régie par les dispositions du droit communautaire, ne peut en invoquer le bénéfice »99. Il reste que, faute de pouvoir faire prévaloir le droit de l’Union, le raisonnement de la Cour évite la confrontation des systèmes juridiques communautaire et nationaux pour s’en remettre aux États quant à la modification du droit applicable.
47Dans un arrêt du 5 juin 1997, la Cour relève en effet « que la citoyenneté de l’Union, prévue à l’article 8 (art. 20 TFUE) du traité CE n’a pas pour objectif d’étendre le champ d’application matériel du traité également à des situations internes n’ayant aucun rattachement au droit communautaire ». Si des discriminations à rebours existent, elles « doivent être résolues dans le cadre du système juridique interne dudit État »100. Et la jurisprudence Metock, du 25 juillet 2008101, ne renverse pas cet état du droit de l’Union. Certes au point 58, la grande chambre a reconsidéré sa jurisprudence Akrich, du 23 septembre 2003102 et dit pour droit que : « La directive 2004/38/CE (…) s’oppose à la réglementation d’un État membre qui exige du ressortissant d’un pays tiers, conjoint d’un citoyen de l’Union séjournant dans cet État membre dont il n’a pas la nationalité, d’avoir au préalable séjourné légalement dans un autre État membre avant son arrivée dans l’État membre d’accueil pour bénéficier des dispositions de cette directive » ; cependant, aux points 76 et 77 de l’arrêt, elle ajoute que plusieurs « gouvernements soutiennent encore que ladite interprétation de la directive 2004/38/CE aboutirait à une discrimination à rebours injustifiée, dans la mesure où les ressortissants de l’État membre d’accueil qui n’ont jamais exercé leur droit de libre circulation ne tireraient pas du droit communautaire des droits d’entrée et de séjour pour les membres de leur famille, ressortissants de pays tiers. À cet égard, il est de jurisprudence constante que les règles du traité en matière de libre circulation des personnes et les actes pris en exécution de celles-ci ne peuvent être appliqués à des activités qui ne présentent aucun facteur de rattachement à l’une quelconque des situations envisagées par le droit communautaire et dont l’ensemble des éléments pertinents se cantonnent à l’intérieur d’un seul État membre (arrêt du 1er avril 2008, Gouvernement de la Communauté française et gouvernement wallon, C-212/06, Rec. p. I-1683, point 33) ». Et la Cour d’en tirer pour conclusion au point 78 : « Dès lors, l’éventuelle différence de traitement entre ces citoyens de l’Union et ceux ayant exercé leur liberté de circulation, s’agissant de l’entrée et du séjour des membres de leur famille, ne relève pas du champ d’application du droit communautaire ».
48Dans l’affaire précitée, Gouvernement de la Communauté française et gouvernement wallon contre gouvernement flamand, concernant le régime d’assurance soins institué par une entité fédérée d’un État membre, à savoir la Belgique, la grande chambre s’était déjà prononcée sur le rôle respectif des juges nationaux et européens pour le traitement des discriminations à rebours. Après avoir rappelé au point 38 : « que le droit communautaire ne saurait être appliqué à de telles situations purement internes », elle a affirmé au point suivant : « À cette conclusion, il ne saurait être opposé, […], le principe de la citoyenneté de l’Union énoncé à l’article 17 TCE, laquelle inclut notamment, selon l’article 18 TCE, le droit de tout citoyen de l’Union de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres. La Cour a, en effet, jugé à plusieurs reprises que la citoyenneté de l’Union n’a pas pour objectif d’étendre le champ d’application matériel du traité à des situations internes n’ayant aucun rattachement au droit communautaire (voir, en ce sens, arrêts du 5 juin 1997, Uecker et Jacquet, C-64/96 et C-65/96, Rec. p. I-3171, point 23 ; du 2 octobre 2003, Garcia Avello, C-148/02, Rec. p. I-11613, point 26, et du 12 juillet 2005, Schempp, C--403/03, Rec. p. I-6421, point 20) ». En quelques mots, la Cour circonscrit son audace de l’arrêt Rudy Grzelczyk et ajoute, avec prudence, au point 40 qu’il : « convient néanmoins d’observer que l’interprétation de dispositions du droit communautaire pourrait éventuellement être utile à la juridiction nationale, y compris au regard de situations qualifiées de purement internes, en particulier dans l’hypothèse où le droit de l’État membre concerné imposerait de faire bénéficier tout ressortissant national des mêmes droits que ceux qu’un ressortissant d’un autre État membre tirerait du droit communautaire dans une situation considérée par ladite juridiction comme étant comparable (voir, en ce sens, ordonnance du 17 février 2005, Mauri, C-250/03, Rec. p. I-1267, point 21, et arrêt du 30 mars 2006, Servizi Ausiliari Dottori Commercialisti, C-451/03, Rec. p. I-2941, point 29) ». Dans le droit fil de l’arrêt Jean-Pierre Guimont, du 5 décembre 2000103, le juge national est ainsi « courtoisement » invité à prendre le relais du juge communautaire pour garantir la mise en œuvre du principe d’égalité de traitement sur la base des ordres juridiques nationaux et européens…
49Pourtant, dans ses conclusions présentée le 28 juin 2007, l’Avocat général, Mme Eleanor Sharpston a incité la Cour à une plus grande audace en soulignant fortement que la situation qui se présentait dans l’affaire C-212/06 était en l’occurrence « une version plutôt curieuse d’une ‘situation purement interne’ » (point 119) dans la mesure où la Flandre, en tant que région autonome, pouvait interdire aux habitants de la Wallonie travaillant sur son territoire de s’affilier à un régime flamand d’assurance soins alors qu’une telle situation heurterait clairement le traité si la Flandre était un État indépendant. Pour Mme Sharpston, il y a en effet « quelque chose de profondément paradoxal dans l’idée que, en dépit des efforts faits ces 50 dernières années pour abolir les barrières à la liberté de circulation entre États membres, des autorités décentralisées d’États membres puissent néanmoins réintroduire des barrières par la petite porte en les instaurant à l’intérieur des États membres. Quelle est, pourrait-on dire en forme de question rhétorique, quelle est donc cette Union européenne qui garantit la libre circulation entre Dunkerque (France) et De Panne (Belgique), mais pas entre Jodoigne et Hoegaarden ? » (point 116). Et l’Avocat général d’ajouter : « en pareilles circonstances, il me semble, à première vue, que le groupe de ressortissants belges n’ayant pas exercé de droits économiques classiques de libre circulation relève néanmoins en principe du champ d’application du droit communautaire et/ou est suffisamment affecté par son application qu’il doit lui aussi pouvoir invoquer le droit communautaire » et son principe de non discrimination104. L’article 18 TFUE comporte, en effet, « un principe de non-discrimination aux larges contours à l’égard de ce qui est couvert par le traité. On peut en trouver une autre manifestation à l’article 3, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1408/71. Le principe de non-discrimination est, bien sûr, un des principes fondamentaux du droit communautaire. Il exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié105. L’importance de la non-discrimination est soulignée par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (art. 21) et par l’initiative législative du Conseil qui a adopté deux directives majeures au titre de l’article 13 TCE interdisant différentes formes spécifiques de discrimination106 » (point 147). Sur le fond, ce raisonnement devrait trouver à s’appliquer, non seulement pour la mise en œuvre du marché unique107 mais, a fortiori, pour l’ensemble des composantes du statut des citoyens de l’Union.
50En l’état actuel du droit français, la position du législateur et Conseil d’État français reste bien plus réservée, comme en témoigne l’article L. 211-2 CESEDA et la jurisprudence M. Randrianantandro, du 10 décembre 2008108. Aux termes de l’article L. 211-2 CESEDA, dans sa rédaction applicable à l’espèce, « Par dérogation aux dispositions de la loi no 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public, les décisions de refus de visa d’entrée en France, prises par les autorités diplomatiques ou consulaires, ne sont pas motivées sauf dans les cas où le visa est refusé à un étranger appartenant à l’une des catégories suivantes et sous réserve de considérations tenant à la sûreté de l’État : 1° Membres de la famille de ressortissants des États membres de l’Union européenne et des autres États parties à l’accord sur l’Espace économique européen qui ne sont pas ressortissants de l’un de ces États, appartenant à des catégories définies par décret en Conseil d’État ; 2° Conjoints, enfants de moins de vingt et un ans ou à charge, et ascendants de ressortissants français ». Aussi le Conseil d’État statuant au contentieux, 10e et 9e sous-sections réunies, considère qu’il : « résulte de la combinaison des 1° et 2° de ces dispositions que les membres de familles de ressortissants français, qui sont spécialement visés par le 2°, n’entrent pas dans le champ d’application du 1°, qui ne s’applique par conséquent qu’aux membres de la famille de ressortissants d’États membres de l’Union européenne autres que la France ». Par conséquent, M. Randrianantandro, fils d’une ressortissante française, ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l’article L. 211-2 relatives aux membres de la famille de ressortissants des États membres de l’Union européenne pour soutenir que la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France a refusé de lui délivrer un visa aurait dû être motivée.
51Pour le rapporteur public, M. Julien Boucher, la réponse retenue « n’est pas évidente », d’autant que les 7e et 10e sous-sections jugeant seules, avaient, à deux reprises au moins dans les décisions Bousmela, du 22 août 2007, et Ould Hocine, du 19 décembre 2007, considéré que les membres étrangers de la famille des requérants de nationalité française entraient « dans l’une des catégories d’étrangers prévues à l’article susmentionné, pour laquelle le refus de visa est motivé en application des dispositions précitées ; que, n’ayant pas énoncé les considérations de droit et de fait constituant le fondement de la décision, la commission de recours contre les refus de visa d’entrée en France a par conséquent entaché son refus d’illégalité »109. Après avoir rappelé l’intention du législateur français, le rapporteur public se livre à une lecture attentive de la jurisprudence de la Cour de justice et de la directive n° 2004/38/CE. Il souligne que les règles et principes applicables à la libre circulation des personnes sont inapplicables lorsque la situation est purement interne ; il se réfère aux points 35 à 37 de l’arrêt Eind, rendu en grande chambre le 11 décembre 2007, qui énoncent que : « le ressortissant d’un État membre pourrait être dissuadé de quitter l’État membre dont il a la nationalité à fin d’exercer une activité salariée sur le territoire d’un autre État membre […] au regard de la simple perspective […] de ne pas pouvoir poursuivre, après son retour dans l’État membre d’origine, une vie commune avec ses proches parents, éventuellement commencée par l’effet du mariage ou du regroupement familial, dans l’État membre d’accueil. Les obstacles au regroupement familial sont donc susceptibles de porter atteinte au droit de libre circulation que les ressortissants des États membres tirent du droit communautaire, le retour d’un travailleur communautaire dans l’État membre dont il possède la nationalité ne pouvant pas être considéré comme une situation purement interne »110. En outre, il fait observer que le 1° de l’article L. 211-2 du CESEDA assure la transposition de l’article 3§1 de la directive du 29 avril 2004 qui « s’applique à tout citoyen de l’Union qui se rend ou séjourne dans un État membre autre que celui dont il a la nationalité, ainsi qu’aux membres de sa famille […] qui l’accompagnent ou le rejoignent ». L’invocation de l’article 211-2 CESEDA par M. Randrianantandro a donc été écartée, le requérant ne pouvant utilement se prévaloir de ces dispositions propres aux citoyens de l’Union voulant entrer en France.
52Depuis l’arrêt du 10 décembre 2008, l’article L. 211-2, 2° CESEDA a été modifié par la loi no 2011-672 du 16 juin 2011 afin de prendre en compte les « partenaires liés à un ressortissant français par un pacte civil de solidarité » ; néanmoins, cette réforme ne permettra pas d’éviter toute discrimination à rebours, notamment en matière de motivation des refus de visa, en faisant bénéficier la famille des ressortissants français de droits équivalents à ceux reconnus à la famille des autres ressortissants communautaires. En la matière, à titre d’exemple, le législateur belge a, dès 1996, modifié son code de la famille et la loi du 15 décembre 1980 pour que le statut des nationaux du Royaume ne soit pas discriminatoire, en matière de droit matrimonial, par rapport à celui des citoyens de l’Union résidant sur son territoire111… La situation des citoyens français sédentaire est donc troublante et pourrait faire l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité au regard du principe, interne, d’égalité de traitement. En outre, avec la décision Compagnie des architectes en chef des monuments historiques et autres du 6 octobre 2008, rendu également par les 10e et 9e sous-sections réunies deux mois avant l’arrêt Randrianantandro, le Conseil d’État a su faire preuve d’une plus grande audace pour éviter les discriminations à rebours dans le domaine des libertés économiques et de la prestation de services. Le rapprochement entre ces jurisprudences est d’autant plus pertinent que Mlle Célia Vérot, était commissaire du gouvernement tant dans l’affaire Compagnie des architectes en chef des monuments historiques et autres que dans celle du 19 décembre 2007, Ould Hocine : en vue d’éviter une discrimination à rebours comparable à celle de l’affaire Randrianantandro, le Conseil d’État avait alors considéré qu’un ressortissant français pouvait bénéficier des dispositions de l’article L. 211-2, 1° CESEDA visant les membres de la famille de ressortissants des États membres de l’Union européenne112.
2 – L’ouverture des professions réglementées et l’élimination jurisprudentielle des discriminations à rebours
53Si, la Cour de justice prend soin d’éviter que les citoyens de l’Union qui exercent leur liberté de circulation soient victimes de discriminations à leur retour dans leur État d’origine par suite d’un traitement moins favorable que celui des sédentaires113, ce problème réapparaît avec les sédentaires exerçant une profession indépendante, plus particulièrement en matière de reconnaissance de leurs qualifications et expériences professionnelles. Le citoyen actif qui exerce son activité dans un pays de l’Union autre que le sien est, en effet, en droit d’invoquer le bénéfice de la liberté d’établissement, ou de la libre prestation de service, pour revenir exercer sa profession dans son état d’origine : dès lors que les directives d’application ont été prises sur le fondement des articles 50 ou 59 TFUE (ex art. 44 ou 47 TCE), il bénéficie de la protection communautaire et échappera au traitement national applicable aux situations de droit interne. La Cour de justice a ainsi admis qu’un ressortissant néerlandais ayant exercé la profession d’installateur de chauffage et de plombier en Belgique puisse invoquer, dans son propre pays, le bénéfice de la directive du 7 juillet 1964 relative aux activités non salariées dans le secteur de l’industrie et de l’artisanat afin d’échapper aux rigueurs des dispositions applicables aux sédentaires114.
54Cette jurisprudence a été étendue, notamment, aux médecins et aux vétérinaires... Ces derniers firent l’objet de deux décisions complémentaires, prises à quatre années d’intervalle. M. Auer, travailleur indépendant, s’est vu successivement refuser115, puis accorder116 le bénéfice du droit communautaire pour exercer en France, son pays d’origine, la profession de vétérinaire après avoir été diplômé d’une université italienne. Entre les deux décisions, le Conseil avait pris une directive d’harmonisation obligeant les États membres à reconnaître l’équivalence des diplômes considérés. En outre, « un particulier peut se prévaloir devant le juge national des dispositions d’une directive communautaire non ou incomplètement exécutée par l’État membre concerné »117 car, conformément au principe de loyauté, un État ne peut pas se réfugier derrière l’absence de mesures d’application en droit interne pour suspendre l’exécution d’une directive après expiration des délais prévus. La Cour permet essentiellement aux États membres de se prémunir contre l’usage abusif d’un diplôme obtenu dans un autre État membre ; la directive n° 2005/36/CE du 7 octobre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles circonscrivant ces cas118.
55Il reste que les moyens tirés de la violation du traité de Lisbonne, en général, et de la libre prestation de service ou de la liberté d’établissement, en particulier, ne sont toujours pas opérants vis-à-vis des situations purement internes. La Cour de justice a rappelé cette limite dans trois affaires jointes tendant à obtenir une décision à titre préjudicielle dans le cadre d’une procédure pénale ; elle a alors dit pour droit que les dispositions des traités « relatives à la liberté d’ établissement ne s’appliquent pas à des situations purement internes à un État membre telles que celles de ressortissants d’un État membre exerçant, sur son territoire, une activité professionnelle non salariée pour laquelle ils ne peuvent se prévaloir d’aucune formation ou pratique antérieures dans un autre État membre »119. La Cour ne reste pas pour autant indifférente aux discriminations à rebours mais elle en appelle aux autorités et juridictions nationales pour les sanctionner. Dans l’affaire Guimont qui relevait de l’application du droit interne, elle a jugé utile de répondre à la question préjudicielle qui lui était adressée au motif qu’« il n’apparaît pas de manière manifeste que l’interprétation sollicitée du droit communautaire ne serait pas nécessaire pour le juge national. En effet, une telle réponse pourrait lui être utile dans l’hypothèse où son droit national imposerait, dans une procédure telle que celle de l’espèce, de faire bénéficier un producteur national des mêmes droits que ceux qu’un producteur d’un autre État membre tirerait du droit communautaire dans la même situation »120.
56En droit public économique, le Conseil d’État a d’abord encadré strictement ce dialogue juridictionnel. Dans l’affaire Syndicat national des fabricants de spiritueux consommés à l’eau, il a rejeté le motif tiré de la violation du principe d’égalité pour considérer que les exigences du traité CEE en matière d’aménagement des monopoles nationaux « n’ont d’autre objet que d’éliminer les discriminations défavorables aux ressortissants des autres États membres de la Communauté et qu’elles ne sauraient, en aucun cas, limiter les pouvoirs dont les autorités nationales sont investies a l’égard de leurs propres ressortissants »121. Il s’est ainsi éloigné des conclusions de son rapporteur public, Bruno Genevois, pour qui il paraissait indispensable que la théorie de l’acte clair ne devienne pas « le moyen pour le juge national d’affirmer un quelconque ‘nationalisme juridique’ face à un hypothétique ‘impérialisme juridique’ de la part du juge communautaire » et qui concluait à ce qu’il soit sursis à statuer jusqu’à ce que « la Cour de justice des Communautés européennes se soit prononcée sur la question de savoir si les stipulations du traité de Rome […] permettent aux autorités nationales d’exonérer les produits originaires des autres États membres de charges qui sont supportées par les produits nationaux similaires ». Près de trente plus tard, avec l’arrêt Guimont, la Cour de justice a, indirectement, répondu à la question de Bruno Genevois en invitant les juridictions nationales à devenir son « bras séculier » et à sanctionner elles-mêmes, sur le fondement du droit interne, les éventuelles discriminations à rebours. Prudemment, telle pourrait-être aujourd’hui la ligne jurisprudentielle du Conseil d’État.
57Pour Mme Célia Vérot, rapporteur public dans les affaires jointes Compagnie des architectes en chef des monuments historiques et autres et Association « Architectes du patrimoine », « le moyen tiré de la violation du principe d’égalité, principe général de droit interne, pose une véritable difficulté. Conformément à votre jurisprudence, une différence de traitement peut être instituée sans méconnaître le principe d’égalité soit entre des personnes placées dans des situations différentes, soit lorsqu’un motif d’intérêt général le justifie, à la condition que la différence de traitement soit en rapport avec la différence de situation ou le motif d’intérêt général poursuivi. […] Ainsi, en imposant, outre des conditions de qualification, l’exigence que les professionnels habilités à exercer la maîtrise d’œuvre soient établis dans un État membre autre que la France, le pouvoir réglementaire a introduit une discrimination contraire au principe d’égalité »122. Suivant les conclusions de son rapporteur public, le Conseil d’État a censuré la rupture du principe d’égalité résultant de cette discrimination à rebours au motif « qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que des raisons d’intérêt général suffisantes justifient la différence de traitement qu’instituent les dispositions précitées au détriment des professionnels établis en France ». Il reste que cette jurisprudence a un champ d’application circonscrit et, qu’à titre d’exemple, elle ne s’applique pas en matière de regroupement familial…
58D’autres éléments essentiels caractérisent le statut civil européen des citoyens de l’Union, qui mériteraient d’être développés à la lumière des jurisprudences européenne et nationale. Ils tiennent, notamment, à liberté d’accès à l’emploi et à sa mise en œuvre dans le cadre des périodes transitoires auxquelles sont assujettis les nouveaux États membres123 ; à l’accès à la fonction publique avec la prise en compte des activités professionnelles antérieures124 ; au droit de bénéficier des bourses d’enseignement supérieur pour les étudiants125 ou encore à l’encadrement du droit européen de l’asile…126 L’ensemble de ces droits et libertés témoigne du statut privilégié des citoyens de l’Union mais ne permet pas, en droit interne, d’extraire définitivement celui-ci du droit des étrangers pour le reconnaitre, pleinement, comme une composante européenne intégrée à la citoyenneté française. L’article 10 TUE, selon lequel « la citoyenneté de l’Union s’ajoute à la citoyenneté nationale et ne la remplace pas » prendrait alors pleinement son sens.
59Dans ce contexte, les droits civiques des citoyens de l’Union focalisent les réticences et limites nationales127. Ces dernières tendent à « sanctuariser » l’exercice de la souveraineté du peuple128 alors même que l’article 10 du traité sur l’Union européenne énonce : « les partis politiques au niveau européen contribuent à la formation de la conscience politique européenne et à l’expression de la volonté des citoyens de l’Union » et que le règlement (CE) no 2004/2003 du Parlement et du Conseil du 4 novembre 2003 définit, selon son article premier, « les règles relatives au statut et au financement des partis politiques au niveau européen »129. Outre-Rhin, la jurisprudence récente de la Cour constitutionnelle fédérale en offre une redoutable illustration, qu’il s’agisse de l’arrêt du 30 mai 2009 relatif au traité de Lisbonne130 ou du 7 septembre 2011 portant sur les mesures d’aides à la Grèce131. Or, selon le rapport 2010 de la Commission européenne sur la citoyenneté de l’Union, « le taux de participation aux élections n’a cessé de diminuer depuis les premières européennes au suffrage direct, en 1979. Le taux de participation général était de 43 % lors des dernières élections de juin 2009, confirmant cette tendance. Une enquête récente a révélé que plus de huit citoyens de l’Union sur dix estiment que le taux de participation augmenterait si les partis politiques leur transmettaient davantage d’informations sur leurs programmes et l’impact de l’UE sur leur vie de tous les jours »132.
60Face aux multiples défis que doit relever l’Union, le scepticisme des citoyens européens appelle des mesures ambitieuses, inspirées du souffle fédéraliste des pères fondateurs des institutions européennes, des mesures qui confortent le fondement démocratique des partages de souveraineté déjà consentis entre les peuples des États membres. Fondamentalement, ces réformes conduisent à définir la citoyenneté européenne comme une composante de la citoyenneté nationale, à l’abstraire du droit des étrangers et à supprimer les différences de traitement qui en découlent. Certes, la constitution des États-Unis d’Europe qui en résulterait est aujourd’hui illusoire entre les Vingt-sept parmi lesquels prédominent, au moins, deux visions de l’avenir de l’Europe, l’une intégrée et l’autre confédérale. Elle n’est pas pour autant impossible grâce à un premier cercle d’États volontaires pour qui l’ambition d’une Union constituée n’a pas perdu son sens.
61Pour que l’art du contrepoint honore « l’hymne à la joie » !
Notes de bas de page
1 CJCE 20 septembre 2001, Rudy Grzelczyk, aff. C-184/99, Rec. p. I-6193, pt 31. La formule a, depuis, été régulièrement reprise par la Cour, notamment dans les arrêts : CJCE 11 avril 2002, gr. ch., Baumbast, aff. C-413/99, Rec. p. I-7091 ; CJCE 11 juillet 2002, D’Hoop, aff. C-224/98, Rec. p. I-6191 ; CJCE 2 octobre 2003, ass. pl., Garcia Avello, aff. C-148/02, Rec. p. I-11613, pt 22 ; CJCE 23 mars 2004, ass. pl., Collins, aff. C-138/02, Rec. p. 2703, pt 61 ; CJCE 24 avril 2004, Pusa, aff. C-224/02, Rec. p. I-5763, pt 16 ; CJCE 19 octobre 2004, Chen, aff. C-200/02, Rec. p. I-9925, pt 25 ; CJCE 15 mars 2005, gr. ch., Bidar, aff. C-209/036, Rec. p. I-2119, pt 31 ; CJCE 12 juillet 2005, gr. ch., Schempp, aff. C-403/03, Rec. p. I-6421,pt 15 ; CJUE 20 mars 2010, gr. ch., Janko Rottmann, aff. C-135/08, pts 43 et 56 ; CJUE 8 mars 2011, gr. ch., Geraldo Ruiz Zambrano, aff. C-34/09, pt 41 ; CJUE 12 mai 2011, Runevič-Vardyn et Wardyn, aff. C-391/09, pt 60.
2 http://epp.eurostat.ec.europa.eu/portal/page/portal/population/introduction.
3 Rapport COM(2010) 602 de la Commission de la Commission du 27 octobre 2010 au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen établi en application de l’article 25 TFUE concernant les progrès réalisés sur la voie de l’exercice effectif de la citoyenneté de l’Union pendant la période 2007-2010, p. 17.
4 « Discrimination à rebours. Effet paradoxal (pervers ?) consistant en ce que le traitement réservé aux ressortissants d’un État membre de l’Union européenne est moins favorable que celui dont bénéficient ceux des autres États, en application du droit communautaire », dans G. Cornu, Vocabulaire juridique, Paris, PUF, 2003, p. 305.
5 Voir Conseil d’État, Rapport public 2007 : l’administration française et l’Union européenne. Quelles influences ? Quelles stratégies, Études et documents no 58, Paris, La Documentation française, 2007.
6 « Considérant que la transposition en droit interne des directives communautaires qui est une obligation résultant du Traité instituant la Communauté européenne, revêt, en outre, en vertu de l’article 88-1 de la Constitution, le caractère d’une obligation constitutionnelle ; que, pour chacun de ces deux motifs, il appartient au juge national, juge de droit commun de l’application du droit communautaire, de garantir l’effectivité des droits que toute personne tient de cette obligation à l’égard des autorités publiques » (CE Sect. 30 octobre 2009, Mme Emmanuelle Perreux, no 298348, concl. M. Guyomar ; S.-J. Liéber et D. Botteghi, « Chronique », AJDA, 2009, p. 2391 ; Th. Rambaud, A. Roblot-Troizier, « Chronique de jurisprudence – Droit administratif et droit constitutionnel », RFDA, 2009, p. 1269 ; P. Cassia, « Une nouvelle étape dans l’Europe des juges, l’effet direct des directives devant les juridictions administratives françaises », RFDA, 2009, p. 1146 ; M. Canedo-Paris, « Le double apport de l’arrêt Mme Perreux : invocabilité des directives, charge de la preuve », RFDA, 2010 p. 126 ; G. Calvès, « « De manière générale... » : le Conseil d’État face au droit communautaire de la non-discrimination », D., 2010 p. 553 ; D. Ritleng, « L’arrêt Perreux ou la fin de l’exception française », RTDE, 2010, p. 223.
7 Voir la Déclaration des chefs d’État ou de gouvernement de la zone euro et des institutions de l’Union européenne concernant la gouvernance économique, Bruxelles, 21 juillet 2011.
8 C. Boutayeb (dir.), préface J.-C. Masclet, La solidarité dans l’Union européenne. Éléments constitutionnels et matériels, Paris, Dalloz, 2011.
9 J. Cloos, G. Reinesh, D. Vignes et J. Weyland, Le traité de Maastricht. Genèse, analyse et commentaires, Bruxelles, Bruylant, 1994, p. 55.
10 Voir G. Vandersanden, préface, dans P. Dollat, La citoyenneté européenne. Théorie et statuts, Bruxelles, Bruylant, 2008, p. vii et viii.
11 V. CONSTANTINESCO, Vers un droit constitutionnel européen, quel droit constitutionnel ?, RUDH, 1995, p. 371 ; S. Pierré-Caps, « L’Union européenne, démos et légitimité : de l’État-nation à la multi-nation », dans Civitas Europa, no 1, septembre 1998, p. 45 et s ; S. Pierré-Caps, « La Constitution démotique ou les mutations de la Constitution au seuil du xxie siècle », dans Mélanges en l’honneur du Professeur François Borella, 1999, p. 405 et s ; F. Borella, « Réflexion sur la question constitutionnelle aujourd’hui », dans Civitas Europa, no 5, septembre 2000, p. 14 ; V. CONSTANTINESCOet S. Pierré-Caps, « Le démos, substrat humain de l’État », dans Droit constitutionnel, Paris, PUF, 2004, p. 291 et suiv.
12 P. Pescatore, Le droit de l’intégration. Émergence d’un phénomène nouveau dans les relations internationales selon l’expérience des Communautés européennes, Bruxelles, Bruylant, 2005, réimpression de l’ouvrage publié chez A. W. Sitjhoff-Leiden en 1972.
13 S. de Beauvoir, Pour une morale de l’ambiguïté, Paris, Gallimard, 1947, 2003.
14 M. Poiares Maduro, Contrapunctual Law : Europe’s Constitutional Pluralism in Action, dans N. Walker(dir.), Sovereignty in Transition, Oxford, Hart Publishing, 2003, p. 501 ; Interpreting European Law : Judicial Adjudication in a Context of Constitutional Pluralism, EJLS, no 2, 2007.
15 D. Ritleng, « L’arrêt Perreux ou la fin de l’exception française », RTDE, 2010, p. 223.
16 Communication de la Commission du 10 juin 2009 au Parlement européen et au Conseil, Un ELSJ au service des citoyens, COM(2009) 262 final, p. 1.
17 Conseil européen, Le programme de Stockholm - une Europe ouverte et sûre qui sert et protège les citoyens, JOUE C 115 du 4 mai 2010, p. 4.
18 Commission européenne, Plan d’action mettant en œuvre le programme de Stockholm, COM(2010) 171 final, 20 avril 2010, p. 3.
19 Voir également : communication de la Commission européenne du 2 juillet 2009 de la Commission au Parlement européen et au Conseil concernant les lignes directrices destinées à améliorer la transposition et l’application de la directive n° 2004/38/CE relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leur famille de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, COM(2009) 313 final ; Rapport de la Commission du 27 octobre 2010 au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen établi en application de l’article 25 TFUE concernant les progrès réalisés sur la voie de l’exercice effectif de la citoyenneté de l’Union pendant la période 2007-2010, COM(2010) 603 final ; Rapport de la Commission du 27 octobre 2010 sur l’élection des membres du Parlement européen (acte de 1976 tel que modifié par la décision n° 2002/772/CE, Euratom) et sur la participation des citoyens de l’Union européenne aux élections au Parlement européen dans l’État membre de résidence (Directive n° 93/109/CE), COM(2010) 605 final.
20 Article IV of Confederation and Perpetual Union between the States of New Hampshire, Massachusetts Bay, Rhode Island and Providence Plantations, Connecticut, New York, New Jersey, Pennsylvania, Delaware, Maryland, Virginia, North Carolina, South Carolina and Georgia, dans G. W. Carey et J. Mc Clellan (dir.), The Federalist by Alexander Hamilton, John Jay and James Madison, Indianapolis, The Gideon Edition/Liberty Fund Inc., 2001, p. 501.
21 Amendement XVI de la Constitution des États-Unis, adopté par le Congrès le 13 juin 1866, 1866. Ratifié le 9 juillet 1868, dans ibid., p. 545-546.
22 Concernant les étudiants : CJCE 20 septembre 2001, Rudy Grzelczyk, aff. C-184/99, Rec. p. I-6193 ; CJCE 11 juillet 2002, D’Hoop, aff. C-224/98, Rec. p. I-6191 ; CJCE 15 mars 2005, gr. ch., Bidar, aff. C-209/03, Rec. p. I-3209 et les demandeurs d’emploi : CJCE 23 mars 2004, ass. pl., Collins, aff. C-138/02, Rec. p. I-2703 ; CJCE 7 septembre 2004, gr. ch., Trojani, aff. C-456/02, Rec. p. I-7573.
23 CJUE 23 mars 2004, ass. pl., Collins, op. cit., pt 50 ; CJUE 4 juin 2009, Vatsouras et Koupatantze, aff. jtes C-22/08 et C-23/08, Rec. p. I-4585 et concl. D. Ruiz-Jarabo Colomer, présentées le 12 mars 2009, pt 62.
24 CJCE 15 mars 2005, gr. ch., Bidar, op. cit., pt 63 et 2 du dispositif.
25 Cour constitutionnelle fédérale 30 juin 2009, 2 BvE 2/08, 2 BvE 5/08, 2 BvR 1010/08, 2 BvR 1022/08, 2 BvR 1259/08 et 2 BvR 182/09, http://www.bverfg.de ; voir H. Dumont, « La légitimité européenne dans la doctrine de la Cour constitutionnelle allemande. Un regard critique », dans C. Chenevière et G. Duchenne (dir.), Les modes d’expression de la citoyenneté européenne, Louvain-la-Neuve, Presses universitaires de Louvain, 2011, p. 11-29 : « La démocratie serait en péril s’il fallait penser, comme la Cour allemande le suggère, que sa figure idéale postule soit le contexte d’un micro-État mononational, soit celui d’un hypothétique macro-État mononational européen » ; F. C. Mayer, « Rashomon à Karlsruhe », RTDE, 2010, p. 77 ; J. Ziller, « Le dialogue judiciaire et la Cour de Karlsruhe. Quelques réflexions à propos du jugement de la Cour constitutionnelle fédérale allemande concernant le traité de Lisbonne », RTDE, 2010, p. 93 ; J. Ziller, « The German Constitutional Court’s Friendliness Toward European Law. On the Jugement of the Bundesverfassungsgericht over the Treaty of Lisbon », European Public Law Journal, (vol. 16) 1, 2010, p. 53.
26 F.-X. Priollaud, D. Siritzky, Le traité de Lisbonne. Texte et commentaires article par article des nouveaux traités européens, Paris, La Documentation Française, 2008, p. 53.
27 CJUE 2 mars 2010, gr. ch., Janko Rottmann, aff. C-135/08.
28 CJUE 22 décembre 2010, Ilonka Sayn-Wittgenstein, aff. C-208/09.
29 CJCE 24 novembre 1998, Bickel et Franz, aff. C-274/96, Rec. p. I-7637, pt 17.
30 CJCE 2 octobre 2003, Garcia Avello, aff. C-148/02, Rec. p. I-11613, pt 25.
31 CJCE 12 juillet 2005, Schempp, aff. C-403/03, Rec. p. I-6421, pt 19.
32 CJCE 12 septembre 2006, Espagne/Royaume-Uni, aff. C-145/04, Rec. p. I-7917, pt 78.
33 P. Lagarde, « Retrait de la nationalité acquise frauduleusement par naturalisation », RCDIP, 2010, p. 540.
34 CJUE 22 décembre 2010, Ilonka Sayn-Wittgenstein, pt 34, op. cit., « Il convient par conséquent de répondre à la question posée que l’article 21 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à ce que les autorités d’un État membre puissent, dans des circonstances telles que celles au principal, refuser de reconnaître, dans tous ses éléments, le nom patronymique d’un ressortissant de cet État, tel qu’il a été déterminé dans un second État membre, dans lequel réside ledit ressortissant, lors de son adoption à l’âge adulte par un ressortissant de ce second État membre, lorsque ce nom patronymique comprend un titre de noblesse qui n’est pas admis dans le premier État membre au titre de son droit constitutionnel, dès lors que les mesures prises par ces autorités dans ce contexte sont justifiées par des motifs liés à l’ordre public, c’est-à-dire qu’elles sont nécessaires pour la protection des intérêts qu’elles visent à garantir et proportionnées à l’objectif légitimement poursuivi ».
35 CJCE 14 octobre 2008, gr. ch., Grunkin et Paul, aff. C-353/06, Rec. p. I-7639 « L’article 18 CE s’oppose, dans des conditions telles que celles de l’affaire au principal, à ce que les autorités d’un État membre, en appliquant le droit national, refusent de reconnaître le nom patronymique d’un enfant tel qu’il a été déterminé et enregistré dans un autre État membre où cet enfant est né et réside depuis lors et qui, à l’instar de ses parents, ne possède que la nationalité du premier État membre ».
36 CJCE 2 octobre 2003, ass. pl., Garcia Avello, op. cit. « Les articles 12 CE et 17 CE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à ce que, dans des circonstances telles que celles de l’affaire au principal, l’autorité administrative d’un État membre refuse de donner une suite favorable à une demande de changement de nom pour des enfants mineurs résidant dans cet État et disposant de la double nationalité dudit État et d’un autre État membre, alors que cette demande a pour objet que ces enfants puissent porter le nom dont ils seraient titulaires en vertu du droit et de la tradition du second État membre ».
37 CJUE 8 mars 2011, gr. ch., Geraldo Ruiz Zambrano, aff. C-34/09l.
38 CJCE 19 octobre 2004, ass. pl, Zhu et Chen, aff. C-200/02, Rec. p. I-9925 : « L’article 18 CE et la directive 90/364/CEE du Conseil, du 28 juin 1990, relative au droit de séjour, confèrent, dans des circonstances telles que celles de l’affaire au principal, au ressortissant mineur en bas âge d’un État membre qui est couvert par une assurance-maladie appropriée et qui est à la charge d’un parent, lui-même ressortissant d’un État tiers, dont les ressources sont suffisantes pour que le premier ne devienne pas une charge pour les finances publiques de l’État membre d’accueil, un droit de séjour à durée indéterminée sur le territoire de ce dernier État. Dans un tel cas, ces mêmes dispositions permettent au parent qui a effectivement la garde de ce ressortissant de séjourner avec celui-ci dans l’État membre d’accueil ».
39 Directive n° 2003/109/CE du Conseil du 25 novembre 2003 relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée, JOUE L 16 du 23 janvier 2004.
40 Règlement (CE) no 859/2003 du Conseil du 14 mai 2003 visant à étendre les dispositions du règlement (CEE) no 1408/71 et du règlement (CEE) no 574/72 aux ressortissants de pays tiers qui ne sont pas déjà couverts par ces dispositions uniquement en raison de leur nationalité, JOUE L 124 du 20 mai 2003.
41 Directive n° 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives n° 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE, JOUE L 158du 30 avril 2004, art. 27 : Principes fondamentaux, §1 : « Sous réserve des dispositions du présent chapitre, les États membres peuvent restreindre la liberté de circulation et de séjour d’un citoyen de l’Union ou d’un membre de sa famille, quelle que soit sa nationalité, pour des raisons d’ordre public, de sécurité publique ou de santé publique. Ces raisons ne peuvent être invoquées à des fins économiques » ; directive n° 2003/109/CE du Conseil du 25 novembre 2003 relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée, art. 17 §2.
42 CJCE 12 septembre 2006, Eman iii, aff. C-300/04, Rec. p. I-8055.
43 Communication de la Commission européenne du 10 juin 2009, Un espace de liberté, de sécurité et de justice au service des citoyens, COM(2009) 262 final, pt 2.1.
44 CJUE 5 mai 2011, Shirley Mc Carthy, aff. C-434/09.
45 CJUE 21 juillet 2011, Maria Dias, aff. C-325/09.
46 CJUE 5 mai 2011, Shirley Mc Carthy, op. cit.
47 CJCE 12 juillet 2005, Schempp, aff. C-403/03, Rec. p. I-6421, pt 22.
48 CJUE 21 juillet 2011, Maria Dias, op. cit.
49 CJUE 7 octobre 2010, Lassal, aff. C-162/09.
50 Ibid.
51 CE 21 mai 1980, Ministre de l’intérieur c/ MM Smara, nos 22083 et 22252, concl. M.-A. Latournerie.
52 J. Prévert, « Être ange, c’est étrange », dans Fatras, Paris, Gallimard, 1966.
53 CE 26 novembre 2008, M. Ali Silidor, no 315441, concl. M. Guyomar.
54 CJCE 20 septembre 2001, Rudy Grzelczyk, op. cit., pt 29 : « Le fait que M. Grzelczyk n’est pas de nationalité belge constitue l’unique obstacle à l’octroi du minimex à ce dernier et, dès lors, il est constant qu’il s’agit d’une discrimination opérée sur la seule base de la nationalité ».
55 CC 13 août 1993, no 93-325 DC, Loi relative à la maitrise de l’immigration et aux conditions d’entrée, d’accueil et de séjour en France, cons.no2, RFDA, 1993, p. 871, obs. Genevois ainsi que CC 15 décembre 2005, no 2005-528 DC, Loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, cons.no14, RFDA, p. 2006. 126.
56 JORF 18 août 1993, p. 11735.
57 CC 15 janvier 1975, no 74-54 DC, Loi relative à l’interruption volontaire de grossesse : « 3. Considérant que, si ces dispositions confèrent aux traités, dans les conditions qu’elles définissent, une autorité supérieure à celle des lois, elles ne prescrivent ni n’impliquent que le respect de ce principe doive être assuré dans le cadre du contrôle de la conformité des lois à la Constitution prévu à l’article de celle-ci » ; confirmée en matière de question prioritaire de constitutionnalité avec la décision no 2010-605 DC du 12 mai 2010, Loi relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne.
58 CC 13 août 1993, no 93-325 DC, op. cit.
59 P. Dollat, « L’indivisibilité de la République : de l’État unitaire à l’État uni ? », RFDA, 2003, p. 670 ; P. Dollat, « La citoyenneté française, une superposition de citoyennetés », RFDA, 2005, p. 69.
60 C. Boutayeb, « La solidarité, un principe immanent au droit de l’Union européenne – Éléments pour une théorie », dans La solidarité dans l’Union européenne. Éléments constitutionnels et matériels, op. cit., p. 5-37.
61 Libre circulation : une action déterminée de la Commission a permis de résoudre 90 % des dossiers ouverts en matière de libre circulation, IP/11/981, 25 août 2011.
62 D. Dero-Bugny, « L’étranger », dans J.-B. Auby (dir.), L’influence du droit européen sur les catégories du droit public, Paris, Dalloz, 2010, p. 377-388.
63 CJCE 15 juillet 1964, Costa c/ ENEL, aff. C-6/64, Rec. p. 1141 : « Attendu qu’à la différence des traités internationaux ordinaires, le traité de la CEE a institué un ordre juridique propre, intégré au système juridique des États membres lors de l’entrée en vigueur du traité et qui s’impose à leurs juridictions ».
64 CC 19 novembre 2004, no 2004-505 DC, Traité établissant une constitution pour l’Europe, pt 11. On notera que dans l’arrêt CE Ass., 9 décembre 2011, M. Eduardo José Kandyrine de Brito Paiva, no 303678, concl. J. Boucher, le Conseil d’État qualifie également l’Union européenne d’ordre juridique intégré.
65 CC 10 juin 2004, no 2004-496 DC, Loi pour la confiance dans l’économie numérique.
66 CE Ass, 8 février 2007, Sté Arcelor Atlantique et Lorraine e.a., no 287110, concl. M. Guyomar.
67 CE Ass, 30 novembre 2011, Ministre de la défense et Ministre de l’économie, des finances et de l’industrie c/ M. Diop, no 212179, concl. J. Courtial ; AJDA, 2001, p. 1039, Chron. M. Guyomar et P. Collin.
68 CE 15 mars 2000, Préfet des Pyrénées-Atlantiques c/ Jésus Maria Bidaola Achega, no 199758, concl. L. Touvet.
69 CE 9 octobre 2006, M. Mbarek, no 280348, concl. I. de Silva.
70 CE 12 janvier 2009, M. Claudiu VADUVA et Mme Speranta LAZAR, ord. nos 323854 et 323855.
71 CE, avis, 28 novembre 2008, Alin Silidor, op. cit.
72 CE 19 mai 2008Association SOS Racisme et Ligue des Droits de l’Homme e.a., nos 301813 et 307022concl. F. Lenica
73 CJCE 19 octobre 2004, Chen., op. cit. ; CJUE gr. ch., 8 mars 2011, Zambrano, op. cit.
74 CJCE 23 mars 2006, Commission c/ Royaume de Belgique, aff. C-408/03, Rec. p. I-2647.
75 CJCE 10 avril 2008, Commission c/ Royaume des Pays-Bas, aff. C-398/06, Rec. p. I-56.
76 CE Alin Silidor, op. cit.
77 Ibid.
78 Ibid.
79 CE Préfet des Pyrénées-Atlantiques c/ Jésus Maria Bidaola Achega, op. cit.
80 Voir CE Alin Silidor, op. cit.
81 CE Sect. 4 février 2000, Mouflin, no 213321, A, concl. G. Goulard.
82 CJCE 28 octobre 1975, Roland Rutili c/ Ministre de l’intérieur, aff. C-36/75, Rec. p. 1219 ; CJCE 27 octobre 1977, La Reine c/ Pierre Bouchereau, aff. C-30/77, Rec. p. 1999 ; CJCE 27 avril 2006, Commission c/ Allemagne, aff. C-441/02, Rec. p. I-3449, pt 39.
83 CJCE 5 mars 1980, Pecastaing c/ État belge, aff. C-98/79, Rec. p. 691 ; concl. F. Capotorti.
84 J. LEPERS, « L’expulsion d’un citoyen de l’Union européenne fondée sur l’atteinte à l’ordre public et à la sécurité publique », AJDA, 2008, p. 308 et suiv.
85 CJCE 18 mai 1982 Rezguia Adoui c/ État belge et Cornuaille c/ État belge, aff. jtes C- 115/81 et C-116/81, Rec. p. 1665 ; G. Druesne, RTDE, 1982, p. 706 ; P. Demaret, CDE, 1983, p. 261.
86 Ibid.
87 CJCE 5 mars 1980, Pecastaing, op. cit.et CJCE 7 juin 2007, Commision c/ Royaume des Bas-bas, aff. C-50/06, Rec. p. I-4383 : « les États membres doivent prendre toutes les dispositions en vue d’assurer, à tout ressortissant d’un autre État membre frappé d’une mesure d’éloignement, la jouissance de la sauvegarde que constituent pour lui, les dispositions de cette directive ».
88 CE Alin Silidor, op. cit.
89 CE 2/7 SSR 19 octobre 2007, Hammou et Benabdelhak, nos 306821 et 306822, A, concl. F. Lenica ; CE 2/7 SSR 28 novembre 2007, Barjamaj, no 307999, A, concl. F. Lenica.
90 L’article L 511-1 CESEDA a lui aussi été modifié par la loi no 2011-672. Il prévoit que « La décision énonçant l’obligation de quitter le territoire français est motivée ». Cependant, « elle n’a pas à faire l’objet d’une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour » en cas de refus de délivrance ou de retrait du titre de séjour ou encore « Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l’autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l’étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé ».
91 CE 8/3 SSR 13 janvier 2010, Ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire c/ Rostas, no 316488B, concl. N. Escaut.
92 CE 7 mai 1952, Kaddour, no 9768, Lebon p. 224.
93 Voir D. Simon, « Pourrait-on en finir avec les discriminations à rebours ? », Europe, novembre 2008, p. 1 ; Niamh Nic Shuibhne, « Free Movement of Persons and the Wholly Internal Rule : Time to Move On ? », CMLR, 2002, p. 731-771.
94 CJCE 28 juin 1984, Moser, aff. C-180/83, Rec. p. 2539 ; P. Dollat, La citoyenneté européenne. Théorie et statuts, op. cit., p. 43 et suiv.
95 CJCE 20 septembre 2001, Rudy Grzelczyk c/ Centre public d’aide sociale d’Ottignies-Louvain-la-Neuve, aff. C-184/99, Rec. p. I-6193.
96 CJCE 11 décembre 2007, The International Transport Workers’ Federation & The Finnish Seamen"s Union c/ Viking Line ABP & OÜ Viking Line Eesti, aff. C-438/05, Rec. p. I-10779 et CJCE 18 décembre 2007, Laval un Partneri Ltd c/ Svenska Byggnadsarbetareförbundet e.a., aff. C-341/05, Rec. p. 11767. Dans cette seconde affaire, la Cour rappelle que « le droit de mener une action collective ayant pour but la protection des travailleurs de l’État d’accueil contre une éventuelle pratique de dumping social peut constituer une raison impérieuse d’intérêt général justifiant une restriction à l’une des libertés fondamentales garanties par le traité », en l’occurrence, la liberté de prestation de services (pt 103). Toutefois, la Cour a estimé que ce n’est pas le cas dans l’affaire Laval. Cette décision soulève de vives inquiétudes de la part de la Confédération européenne des syndicats car elle « impliquera de revoir la mise en œuvre de la directive sur les travailleurs détachés dans ces pays (directive n° 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services, JOCE L 18 du 21 janvier 1997, p. 1). L’interprétation étroite de la directive sur les travailleurs détachés pourrait avoir des implications négatives pour les systèmes d’autres pays (que la Suède). Et elle pourrait aussi avoir des conséquences sur la capacité des syndicats à encourager l’égalité de traitement et la protection des travailleurs quelle que soit leur nationalité. En outre, d’aucuns craignent que la capacité des syndicats à garantir ces objectifs soit menacée par le principe de la libre circulation des services » sur http://www.euractiv.fr/europesociale/article/syndicats-inquiets-arret-cour-travailleurs-detaches-00583.
97 Règlement (CEE) no 1616/68 du Conseil du 15 octobre 1968, relative à la suppression des restrictions au déplacement et au séjour des travailleurs des États membres et de leur famille à l’intérieur de la Communauté, JOCE L 257 du 19 octobre 1968, p. 13.
98 CJCE 7 juillet 1992, Surinder Singh, aff. C-370/90, Rec. p. I-4265, pt 19.
99 G. Druesne, « Chronique sur la liberté de circulation des personnes », RTDE, 1984, p. 293.
100 CJCE 5 juin 1997, Uecker et Jacquet, aff. C-64/96 et 65/96, Rec. p. I-3171, pt 23.
101 CJCE gr. ch., 25 juillet 2008, Metock, aff. C-127/08, Rec. p. I-6241.
102 CJCE 23 septembre 2003, Secretary of State for the Home Department c/ Akrich, aff. C- 109/01, Rec. p. I-9607.
103 CJCE 5 décembre 2000, Jean-Pierre Guimont, aff. C-448/98, Rec. p. I-10663, pt 23 ; note A. Rigaud, Europe, février 2001, p. 17 ; F. Picod, « Libre circulation et situation interne », RAE, 2003-2004, p. 47.
104 CJCE 28 juin 1978, Kenny, aff. C-1/78, Rec. p. I-1489, pts 16 à 21.
105 CJCE 12 septembre 2006, Eman et Sevinger, aff. C-300/04, Rec. p. I-8055, pt 57 ; CJCE 15 mars 2007, Reemtsma Cigarettenfabriken, aff. C-35/05, Rec. p. I-2425, pt 44 ; CJCE 3 mai 2007, Advocaten voor de Wereld, aff. C-303/05, Rec. p. I-3633, pt 56.
106 Directive n° 2000/43/CE du Conseil du 29 juin 2000, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique, JOUE L 180 du 19 juillet 2000, p. 22, et directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, JOUE L 303 du 2 décembre 2000, p. 16.
107 Le 28 juin 1994, l’Avocat général Guiseppe Tesauro soulignait déjà, dans ses conclusions présentées dans l’affaire Lancry e. a., « le paradoxe d’un marché unique dans lequel sont interdits les obstacles aux échanges entre le Portugal et le Danemark, alors que les obstacles aux échanges entre Naples et Capri ne sont pas pris en considération », CJCE 9 août 1994, Lancry., aff. jtes C-363/93, C-407/93 à C-411/93, Rec. p. I-3957. Suivant ces conclusions, la Cour « statuant sur les questions à elle soumises par la cour d’appel de Paris, par arrêt du 7 juillet 1993, et par le tribunal d’instance de Saint-Denis, par jugements du 23 août 1993, dit pour droit : 1) Une taxe proportionnelle à la valeur en douane des biens, perçue par un État membre sur toutes les marchandises introduites dans une région de son territoire, constitue une taxe d’effet équivalant à un droit de douane à l’importation, non seulement en tant qu’elle frappe les marchandises introduites dans cette région en provenance d’autres États membres, mais également en tant qu’elle est perçue sur les marchandises introduites dans cette région en provenance d’une autre partie de ce même État ». Voir également dans le même sens, CJCE 9 septembre 2004, Carbonati Apuani Srl c/ Comune di Carrara, aff. C-72/03, Rec. I- 8027, concl. M. Poiares Maduro ; la Cour (première chambre) a dit pour droit : « Une taxe proportionnelle au poids d’une marchandise, perçue seulement dans une commune d’un État membre et frappant une catégorie de marchandises en raison de leur transport au-delà des limites territoriales communales, constitue une taxe d’effet équivalent à un droit de douane à l’exportation au sens de l’article 23 CE, en dépit du fait que la taxe frappe également les marchandises dont la destination finale se situe à l’intérieur de l’État membre concerné ».
108 CE 10/9 SSR 10 décembre 2008, M. Randrianantandro, no 289258, B, concl. J. Boucher.
109 CE 7e SS 22 août 2007, M. et Mme Bousmela & Mlle Bousmela, nos 290585, 290586, 290954, 290955, C, concl. N. Boulouis ; CE 10e SS 19 décembre 2007, M. Ould Hocine, no 289106, C, concl. C. Verot.
110 CJCE gr. ch., 11 décembre 2007, Minister voor Vreemdelingenzaken en Integratie c/ Eind, aff. C-291/05, Rec. p. 10719.
111 Pour Philippe de Bruycker : « Le droit belge va même au-delà de ce que prescrit le droit communautaire en étendant le droit au regroupement familial au conjoint des descendants et ascendants de l’étranger CE » : Ph. De Bruycker, « L’impact du droit européen sur la loi du 15 décembre 1980 », RDE, 1996, no 91, p. 707.
112 CE M. Ould Hocine, op. cit., ainsi que CE M. et Mme Bousmela, op. cit.
113 CJCE 11 juillet 2002, Marie-Nathalie Hoop c/ Office national de l’emploi, aff. C-224/98, Rec. p. I-1961, pts 30 et 31 : « Dans la mesure où un citoyen de l’Union doit se voir reconnaître dans tous les États membres le même traitement juridique que celui qui est accordé aux ressortissants de ces États membres se trouvant dans la même situation, il serait incompatible avec le droit de la libre circulation qu’il puisse se voir appliquer dans l’État membre dont il est ressortissant un traitement moins favorable que celui dont il bénéficierait s’il n’avait pas fait usage des facilités ouvertes par le traité en matière de circulation. Ces facilités ne pourraient en effet ne produire leurs pleins effets si un ressortissant d’un État membre pouvait être dissuadé d’en faire usage par les obstacles mis, à son retour dans son pays d’origine, par une réglementation pénalisant le fait qu’il les ait exercées ». Cet arrêt confirme la jurisprudence du 7 juillet 1992, Surinder Singh, aff. C-370/90, Rec. p. I-4265, pt 19.
114 CJCE 7 février 1979, Knoors, aff. C-115/78, Rec. p. 1129. On notera que la directive du 7 juillet 1964 a été consolidée une première fois, ainsi que neuf autres directives sectorielles, par la directive n° 1999/42/CE du 7 juin 1999 relative à la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles, JOUE L 201 du 31 juillet 1999, p. 77. Depuis le 20 octobre 2007, cette dernière et quatorze autres seront remplacées par la directive no 2005/36/CE du 7 octobre 2005 mettant en œuvre un nouveau système général de reconnaissance des formations professionnelles, JOUE L 255 du 30 septembre 2005, p. 22.
115 CJCE 7 février 1979, Ministère public c/ Auer, aff. C-136/78, Rec. p. 437.
116 CJCE 22 septembre 1983, Auer, aff. C-271/82, Rec. p. 2727. Cet arrêt confirme celui du 6 octobre 1981, Broekmeulen, aff. C-246/80, Rec. p. 2311.
117 CJCE 15 décembre 1983, Rienks, aff. C-5/83, Rec. p. 4233.
118 P. Dollat, La citoyenneté européenne. Théorie et statuts, op. cit., p. 327 et suiv.
119 CJCE ord. 3 octobre 1990, Eleonora Nino e. a., Rinaldo Prandini et Bruna Goti & Pier Cesare Pierini, aff.jtes C-54/88, C-91/88 et C-14/89, Rec. p. I-03537.
120 CJCE 5 décembre 2000, Jean-Pierre Guimont, aff. C-448/98, op. cit.
121 CE Ass. 27 juillet 1979, Syndicat national des fabricants de spiritueux consommés à l’eau, no 09664, A, concl. B. Genevois.
122 CE 10/9 SSR 6 octobre 2008, Compagnie des architectes en chef des monuments historiques e. a., nos 310146 et 311080, A, concl. C. Verot, RFDA, 2009, p. 132.
123 CE 2/7 SSR 19 mai 2008, Association SOS Racisme, no 305670, B ; CE 2/7 SSR 23 octobre 2009, GISTI, nos 314397, 314854 et 314854, B.
124 CE 4/6 SSR 13 mars 2002, M. Courbage, no 209938, A et CE 4/5 SSR 15 novembre 2010, Ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche c/ Dudzinski, no 332218B.
125 CE 4/5 SSR 15 juillet 2004, M. Docquier, no 245357, A et CE 5 février 2005, no 257984, B.
126 CE 10/9 SSR2009, Office français de protection des réfugiés et apatrides c/ Covaciu, no 305226B.
127 CE ¼ SSR 3 juillet 1996, Meyet, no 158537, A ; CE 8/3 SSR 8 juillet 2002, M. Smit, Préfet du Cher, nos 240269, 240369 B ; 4/6 SSR 12 juillet 2002, Élections municipales de Champigny-sur-Marne e.a., nos 239083, 239148, 239175, 239197, 239247, B ; 7/2 SSR 15 septembre 2004, Jay e.a., nos 260716 et 260749, A ; mais on notera plus récemment : 10/9 SSR2010, Darup, no 307053A : « Il résulte clairement de la directive n° 94/80/CE prise pour l’application du traité sur l’Union européenne signé le 7 février 1992, auquel se réfère expressément l’article 88-3 de la Constitution, que la disparition d’une commune par suite d’une modification statutaire et sa substitution sur son territoire par une autre collectivité n’est pas, en soi, de nature à supprimer le droit pour les ressortissants de l’Union européenne de participer aux élections locales qui se déroulent sur ce territoire ».
128 CE 10/9 SSR 8 décembre 2000, Parti Nationaliste Basque ERI-PNB, no 212044, A : « Les dispositions de l’article 11-4 de la loi du 11 mars 1988 portant interdiction pour les personnes morales de droit étranger de financer un parti politique français et qui ont pour objet de soustraire les partis politiques français dans l’exercice de leur mission à tout lien de dépendance vis-à-vis d’un État étranger ou d’une personne morale de droit étranger, ne sont pas incompatibles avec les stipulations de l’article 191 du traité ». Voir note M. Verpeaux, « C’est néanmoins par une construction audacieuse que le Conseil d’État rattache la conception profonde de la loi à la “défense de l’ordre”. Il estime en effet qu’en voulant éviter un lien de dépendance des partis et groupements politiques français à l’égard de “l’étranger”, qu’il soit constitué des États ou des personnes morales, le législateur a entendu protéger l’expression de la souveraineté nationale, ce qui permet au Conseil d’État de se rattacher habilement à l’article 4 de la Constitution. On voit mal cependant où se trouve ici l’ordre, à moins de donner à ce mot des significations qui dépassent le sens commun de l’expression », M. Verpeaux, « Le financement des partis politiques : la loi nationale et l’Europe. À propos de l’arrêt du Conseil d’État, 8 décembre 2000, Parti nationaliste basque », RFDA, 2002, p. 59 et suiv.
129 Règlement (CE) no 2004/2003 du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 relatif au statut et au financement des partis politiques au niveau européen. On notera que, selon l’article 6 : « Les cotisations des partis politiques membres d’un parti politique au niveau européen sont admissibles. Elles ne peuvent pas excéder 40 % du budget annuel de celui-ci ».
130 http://www.bundesverfassungsgericht.de/pressemitteilungen/bvg09-072en.html.
131 http://www.bundesverfassungsgericht.de/pressemitteilungen/bvg11-054.html.
132 Commission européenne, Rapport 2010 sur la citoyenneté de l’Union. Lever les obstacles à l’exercice des droits des citoyens de l’Union, COM(2010) 603 final, 27 octobre 2010, p. 19 et suiv. et Eurobaromètre flash 292, Electoral rights of citizens of the EU, mars 2010. Ces résultats ont été confirmés par ceux de l’enquête qualitative Eurobaromètre d’août 2010 intitulée European Union citizenship – cross-border mobility.
Auteur
Maître de conférences (hors classe) - Université de Strasbourg
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Environnement et santé
Progrès scientifiques et inégalités sociales
Maryse Deguergue et Marta Torre-Schaub (dir.)
2020
La constitution, l’Europe et le droit
Mélanges en l’honneur de Jean-Claude Masclet
Chahira Boutayeb (dir.)
2013
Regards croisés sur les constitutions tunisienne et française à l’occasion de leur quarantenaire
Colloque de Tunis, 2-4 décembre 1999
Rafâa Ben Achour et Jean Gicquel (dir.)
2003
Itinéraires de l’histoire du droit à la diplomatie culturelle et à l’histoire coloniale
Jacques Lafon
2001
Des droits fondamentaux au fondement du droit
Réflexions sur les discours théoriques relatifs au fondement du droit
Charlotte Girard (dir.)
2010
François Luchaire, un républicain au service de la République
Jeannette Bougrab et Didier Maus (dir.)
2005