Après la QPC no 2010-6/7 du 11 juin 2010
Vers un droit de révocation populaire des élus ?
p. 145-153
Texte intégral
1Selon Transparency International, ONG qui a pour but de lutter, au niveau international, contre ce cancer des sociétés actuelles qu’est la corruption, la France dans le palmarès des nations pour le niveau d’honnêteté des gouvernants se situait en 2011 au 25e rang, très loin derrière les pays scandinaves, l’Allemagne, la Grande-Bretagne et le Japon, à un niveau proche de ceux du Qatar et des Émirats.
2On peut évidemment s’interroger sur la pertinence des critères retenus et contester l’enquête. Mais ce qui est absolument certain, c’est que la décision rendue par le Conseil constitutionnel, le 11 juin 2010, sur la QPC no 2010-6/7, ne va pas contribuer à améliorer ce résultat.
3Cette constatation navrée incite à nous interroger d’abord sur cette décision du Conseil constitutionnel, ensuite sur la possibilité d’un remède envisageable.
4Par cette décision no 2010-6/7 QPC du 11 juin 2010, le Conseil constitutionnel a annulé l’article 7 du Code électoral qui, à titre de peine complémentaire, frappait automatiquement d’inéligibilité pour cinq ans les élus condamnés pour différents délits de corruption ou prévarication. Pour le Conseil constitutionnel en effet, il ne peut y avoir de sanctions automatiques. En vertu du principe d’individualisation des peines, elles ne peuvent être prononcées que par un juge, qui « en tenant compte des circonstances propres à l’espèce », peut mesurer la gravité du délit et moduler la peine.
5Le principe d’individualisation des peines ne découle pas directement de la Constitution, mais d’une construction jurisprudentielle à partir de l’article 8 de la Déclaration de 1789 : « la loi ne doit établir que les peines évidemment et strictement nécessaires ».
6Cette construction jurisprudentielle peut certes être saluée comme un progrès vers l’humanisation de la justice, appelée à tempérer les rigueurs de la loi. Mais cet impératif d’humanisation de la justice avait déjà été réalisé par la réforme, en 1992, du Code pénal dont l’article 132-21 dispose : « L’interdiction de tout ou partie des droits civiques, civils ou de famille mentionnés à l’article 131-26 ne peut, nonobstant toute disposition contraire, résulter de plein droit d’une condamnation pénale.
7Toute personne frappée d’une interdiction, déchéance ou incapacité quelconque qui résulte de plein droit d’une disposition pénale, peut par le jugement de condamnation ou par un jugement ultérieur, être relevée en tout ou partie, y compris en ce qui concerne la durée, de cette interdiction, déchéance ou incapacité ».
8D’ores et déjà par conséquent, l’automaticité n’existait pas : non seulement, le juge était libre de prononcer ou non cette peine, mais encore il pouvait, sur le champ ou ultérieurement, relever le condamné de l’inéligibilité encourue ou moduler la durée de celle-ci ; et de trop nombreux et regrettables exemples montrent qu’il ne se privait pas d’user de ce pouvoir. Était-il nécessaire et moralement admissible que le Conseil constitutionnel aille beaucoup plus loin et que, sous le faux prétexte de supprimer une automaticité (qui n’existait pas), il annule, dans son principe, la peine d’inéligibilité elle-même)1 ?
9Sur le plan de la dissuasion, qui est un des buts, sinon le principal but du droit pénal, c’est une chose, pour un politicien tenté par la corruption, de savoir que, s’il est pris, la sanction sera automatique, et autre chose de penser que, s’il a l’improbable malchance de se faire prendre, il pourra avec succès plaider les circonstances atténuantes et faire intervenir ses puissants amis auprès du parquet. Que reste-t-il de la liberté d’appréciation donnée par la Constitution au législateur si, dans un domaine pour lui aussi sensible, on lui retire le droit de décider ce qui est évidemment et strictement nécessaire pour faire respecter la morale dans ses propres rangs ?
10Mais ce qui est pire encore dans cette décision, c’est son considérant no 6 : « Considérant que l’abrogation de l’article 7 du code électoral permet aux intéressés de demander, à compter du jour de publication de la présente décision, leur inscription immédiate sur la liste électorale dans les conditions déterminées par la loi ».
11Sous prétexte de proscrire l’automaticité de la sanction, le Conseil constitutionnel a d’abord aboli la sanction elle-même. Mais il va plus loin : l’effet paradoxalement automatique qu’il donne à cette abrogation est la réintégration d’office dans leurs droits civiques de tous les élus qui en avaient été privés en vertu de cet article 7, même si leur jugement de condamnation avait déjà aménagé la peine2…
12Lorsqu’on considère l’importance accordée par la Cour de cassation à l’irrévocabilité des arrêts investis de l’autorité de chose jugée, et son opiniâtreté à défendre ce principe contre une opinion publique portée au réexamen des affaires qui ont marqué l’histoire judiciaire, il est pour le moins étonnant que le juge constitutionnel se soit, sans vrais débats, donné le droit d’effacer d’office toutes les condamnations antérieurement prononcées par les juges sur la base de l’article 7. Et on s’étonnera, après cela, que la Cour de cassation ait fait preuve de tant de réticences face à la création des QPC !
13Au vu de cette décision déconcertante, il peut être utile de rappeler qu’il existe dans bon nombre de pays une institution qui permet aux électeurs d’exprimer leur dégout et de se faire justice eux-mêmes en révoquant le mandat de leurs élus. Sieyès, le fondateur du système représentatif, expliquait que, dans ce système, la confiance, condition nécessaire pour l’exercice légitime du pouvoir, ne pouvait venir que « d’en bas ». Puisqu’on ne permet plus aux juges de priver les prévaricateurs de leurs mandats, il serait normal que ce droit soit au moins reconnu à leurs électeurs.
14L’idée qu’il appartient aux citoyens de veiller sur la moralité de leurs élus est une idée ancienne. Elle avait été émise lors de l’élaboration de la Constitution de 1793, mais n’avait pas été retenue en raison de la brièveté des mandats qui ne devaient être que d’un an. Elle fut ensuite reprise avec force par la Commune de Paris, dont le contrôle permanent du peuple sur ses mandataires était une revendication emblématique.
15La révocation populaire des élus est de pratique relativement courante aux États-Unis où elle est inscrite dans la Constitution de dix-neuf États fédérés, et dans les lois ordinaires d’une dizaine d’autres, c’est-à-dire au total dans la majorité des États3.
16Le recall s’exerce ordinairement par voie de pétition. Ses initiateurs doivent se déclarer auprès du Bureau en charge des élections et obligatoirement motiver leur action. Dans sept États (l’Alaska, la Géorgie, le Kansas, le Minnesota, le Montana, le Rhode Island, et Washington) il leur faut articuler des faits précis. L’élu visé peut alors saisir la justice qui examine les griefs de ses opposants et apprécie si leur gravité justifie la poursuite de la procédure4.
17Dans les autres États, cette motivation peut être extrêmement générale : l’incompétence, l’inaction suffisent, et même à la limite une décision impopulaire : dans le Wisconsin en 2011, le projet du Gouverneur Scott Walker d’abaisser les salaires des fonctionnaires lui a été reproché comme le signe de son incompétence.
18Après déclaration de leur intention, les initiateurs sont enfermés dans des délais stricts pour recueillir les signatures. Pour faire le porte-à-porte, ils peuvent se faire assister par des collaborateurs, en principe bénévoles, auxquels ils délivrent une carte officielle d’accréditation établie par le Bureau des élections. Les signatures recueillies avant l’ouverture de la campagne ou après sa clôture ne sont pas retenues.
19L’élu visé peut participer à la campagne en réfutant les accusations formulées contre lui ; en Louisiane par exemple il est invité à présenter sa défense en un écrit qui sera diffusé par le Bureau des élections en même temps que le libelle de ses accusateurs.
20Seuls, en général, les électeurs ayant participé au scrutin qui a désigné l’élu visé peuvent signer la pétition de recall. Les Américains en effet ont du mandat une conception plus étroite que la nôtre : on ne peut valablement se plaindre d’un élu si l’on n’a pas personnellement participé à l’élection qui l’a désigné. La vérification des signatures, opérée par le Bureau des élections consiste donc en premier lieu dans la vérification de la présence des signataires sur les listes d’émargement de la précédente élection, puis dans des appels téléphoniques aux signataires qui devaient obligatoirement indiquer leur domicile et leur numéro de téléphone. Le nombre des signatures requises varie beaucoup selon les États : il est habituellement de 25 %, mais descend à 15 % dans l’Oregon et au Rhodes Island et monte à 40 % au Kansas et en Louisiane. La durée de la campagne est également très variable selon les États : 90 jours en général, mais 60 seulement au Colorado et au Nevada.
21Dans les États où il est prévu par la Constitution, le recall peut en principe frapper tous les titulaires d’un mandat électif ; mais six États (Alaska, Idaho, Kansas, Louisiane, Michigan et Washington) en excluent les juges. Dans les États où le recall a été institué par des lois ordinaires, il n’existe qu’à l’encontre des élus locaux. Mais partout en pratique, ce sont surtout les pouvoirs locaux qui sont mis en cause.
22 Quelque soit le mandat visé, les règles relatives au pourcentage de signatures et à la durée de la campagne sont ordinairement les mêmes au sein d’un État. Mais parfois, lorsqu’il s’exerce à l’encontre du gouverneur, de ses principaux collaborateurs élus (attorney général, trésorier général, chef du bureau de l’éducation…), des sénateurs de l’État et des membres des législatures, la procédure à mettre en œuvre est plus lourde : ainsi en Californie 12 % des électeurs suffisent pour les emplois subalternes, mais il en faut 20 % pour les fonctions supérieures. La durée de la campagne peut alors être plus longue : jusqu’à 320 jours au New Jersey. Exceptionnellement dans l’Illinois, il faut pour poursuivre la procédure contre le gouverneur, qu’outre la signature de 15 % des électeurs, une partie des membres de la législature ait donné la leur.
23Une fois atteint le nombre de signatures nécessaires, la suite varie selon les États. Dans certains, la procédure est brutale : on organise tout de suite une nouvelle élection ; l’élu révoqué doit s’y présenter ; en ce cas, sa réélection constitue le flagrant désaveu de ses accusateurs. Certains États, plus respectueux des droits acquis, organisent d’abord un référendum sur la révocation, et ensuite, si le résultat est positif, procèdent à l’élection du remplaçant. Mais en Californie, les deux opérations sont simultanées : le bulletin de vote comporte deux questions, l’une sur la révocation, l’autre sur le nom du remplaçant qui prendra la succession si la révocation est prononcée ; c’est ainsi qu’en 2003, Arnold Schwarzenegger a été élu en remplacement du Gouverneur Gray Davis au terme d’une campagne passionnée5 et déséquilibrée par la personnalité de l’acteur6.
24Le cas de Kansas est exceptionnel : si le référendum aboutit à la révocation, il n’y a pas lieu à nouvelle élection : usant de sa prérogative de pourvoir aux emplois électifs vacants, c’est le gouverneur qui désignera le successeur en le choisissant cependant dans le même parti. En toute hypothèse, le nouvel élu ne sera désigné que pour terminer le mandat interrompu pour ne pas bouleverser le sacro-saint calendrier électoral.
25Il est difficile d’avoir des statistiques sûres sur la pratique de l’institution révocatoire, mais dans son article précité, Denis Giraux, grand spécialiste de la démocratie semi-directe, cite ces chiffres : « 60,9 % des villes américaines disposent de la possibilité de recall… De janvier 1996 à fin 2001, il y a eu des initiatives de révocation contre 4,1 % des maires de ces villes et 5,3 % contre un membre du conseil communal. Dans 17,6 % de ces cas, les maires ont été révoqués et c’est 29,2 % pour les conseillers communaux mis en cause ».
26Un tel système de recall a été instauré aux Philippines en 1931 alors qu’elles étaient encore colonie américaine. Il a été introduit au Japon en 1947 par la loi no 67 sur l’autonomie locale, plus ou moins imposée par les États-Unis, alors puissance occupante ; le recall (les Japonais emploient ce mot) ne concerne que les mandats locaux, et peut viser l’assemblée toute entière (art. 76) ou chacun de ses membres (art. 80) ou encore les maires et les présidents des conseils régionaux (art. 81). Si la pétition recueille les signatures du tiers des électeurs inscrits, il y a lieu à référendum pour révoquer le mandat. Le cas c’est produit trois fois.
27Toujours à l’imitation des États-Unis, le recall a été introduit en 1995 par référendum dans la province canadienne de Colombie britannique7 : la constitution y prévoit que la pétition devra recueillir la signature de 40 % des électeurs et ne pourra être lancée que 18 mois après l’élection pour éviter les recours des « mauvais perdants ».
28Le Président Hugo Chavez l’a introduit dans la Constitution « bolivarienne » du Venezuela en 1990. Là également, un délai est prévu par l’article 72 avant le lancement de la campagne pour que les électeurs aient pu juger de l’activité de l’élu : il ne peut avoir lieu qu’au terme de la première moitié du mandat. Toutes les fonctions électives sont concernées, y compris la présidence de la république. La signature de 20 % des électeurs suffit pour déclencher un référendum. Mais quand ce seuil est dépassé et que le nombre des signataires atteint 25 % du corps électoral, le mandat est révoqué de plein droit, et on procède aussitôt à une nouvelle élection. Il est possible que Chavez ait ensuite regretté cette réforme car elle a provoqué beaucoup d’agitation et a failli se retourner contre lui : une première campagne de recueil des signatures a été lancée en août 2003 et obtenu plus de trois millions de signatures ; mais le conseil électoral national les a déclarées invalides au motif qu’elles avaient été recueillies avant la mi-mandat. L’opposition a donc aussitôt déclenché une seconde campagne qui a permis de rassembler 3,6 millions de signatures en quatre jours. Face au danger, Chavez a répliqué en accordant la citoyenneté aux travailleurs étrangers jusque-là en situation irrégulière, ce qui a augmenté de 20 % le nombre des électeurs admis à participer au référendum. Celui-ci a lieu le 15 août 2004 et s’est terminé par le rejet de la tentative de révocation à la majorité de 59 %. Depuis, il semble qu’un bon nombre des signataires de la pétition qui travaillaient dans les entreprises nationalisées ont connu de graves ennuis.
29En Bolivie, le Président Morales, émule de Chavez, a introduit la revocatura dans la Constitution dite « multinationale » de 2009. Tous les mandats électifs peuvent être visés par une pétition. Il suffit, en vertu de l’article 240, qu’elle recueille 15 % des électeurs pour déclencher le référendum révocatoire.
30En Europe, c’est naturellement en Suisse, patrie de Jean-Jacques Rousseau, que la possibilité de révoquer les élus est d’abord apparue en tant que principe dans les années 1870 avant de s’exporter aux États-Unis. Aujourd’hui l’abberufungsrecht (droit de rappel) est prévu dans la constitution de huit cantons dont celui de Berne. Il ne s’exerce pas contre une personnalité particulière, mais soit contre l’assemblée cantonale, soit contre le conseil exécutif, soit contre les deux, dont on demande le renouvellement intégral ; il s’analyse donc comme un droit populaire de dissolution. Le nombre des signatures à recueillir, en général identique à celui exigé pour les initiatives cantonales en matière législative, n’est pas proportionnel à la population, mais fixé ne varietur par la constitution du canton : 1 000 seulement à Schaffouse (dont la Constitution remonte à 1876), 12 000 à Berne mais 15 000 dans le Tessin (où la procédure n’a été instaurée qu’en 1932). De mémoire d’homme, ces procédures n’ont jamais été mises en œuvre ; il ne s’ensuit pas qu’elles sont inutiles. D. Giraux observe à ce sujet qu’à Soleure en 1984, c’est à la suite du lancement d’une pétition tendant à la révocation de l’exécutif que furent traduits en justice les membres du conseil exécutif qui avaient accepté un voyage en Espagne offert par des industriels intéressés par la construction d’une centrale nucléaire8. Au niveau fédéral, il n’existe pas de procédure officielle de dissolution, mais en 1919, un référendum d’initiative populaire a dissous l’assemblée fédérale toute entière pour l’obliger à instaurer la représentation proportionnelle.
31En Pologne également, existe aujourd’hui, en vertu de l’article 170 de la Constitution de 1997, une possibilité de révoquer les titulaires électifs des fonctions locales, tant exécutives que délibérantes, au niveau de la commune, du district et de la province. La pétition doit réunir la signature de 10 % des électeurs. Un référendum est alors organisé, qui ne sera valable que si 30 % des électeurs ayant participé aux précédentes élections y prennent part. Si cette condition est remplie, il suffit de la majorité absolue des votants pour révoquer la personnalité ou l’assemblée visées. L’utilisation de ces procédures, relativement fréquente dans les années 1998-2003, a permis la mise à l’écart des personnalités compromises par l’ancien régime9. Elle est ensuite devenue plus rare, mais en janvier 2010 le maire de Lodz (troisième ville du pays, avec 750 000 habitants) a été ainsi révoqué.
32Le droit de révocation par voie de référendum était prévu dans la Constitution allemande de 1919 à l’encontre du Reich praesident, mais seulement sur une proposition du Reichstag, formulée à la majorité des deux tiers de ses membres. L’article 43 de la Constitution de Weimar précisait que, si le référendum était négatif, le Reichstag était ipso facto dissous, et que le Président recommençait un nouveau mandat de sept ans10. Le droit de dissolution populaire des assemblées des Länder était, à la même époque prévu dans les constitutions de plusieurs de ceux-là.
33Sous l’inspiration de la Constitution de Weimar, cette procédure de révocation populaire du Président a été introduite en Autriche en 1929 dans la Constitution de 1920, remise en vigueur en 194511. L’article 60 §6 de celle-ci dispose que le référendum révocatoire est décidé par l’Assemblée fédérale (réunion des deux Chambres) sur proposition du Conseil national (la Chambre basse) formulée à la majorité des deux tiers, et que l’échec du référendum vaut élection pour un nouveau mandat et dissolution du Conseil national.
34Ce dispositif a également été repris en 1991 sous une forme légèrement différente par l’article 95 de la Constitution de la Roumanie, et a donné lieu à deux épisodes singuliers, très révélateurs du discrédit de la classe politique en ce pays. En avril 2007, le Président Traian Basescu a été suspendu de ses fonctions par le Parlement, à une majorité proche des trois quarts (322 voix contre 108) pour 19 violations alléguées de la Constitution, et un référendum a été en conséquence organisé pour prononcer sa destitution. Mais ce référendum qui s’est tenu en mai a confirmé Basescu dans ses fonctions, à la même majorité de 74,5 % ! On peut regretter que cet article n’ait pas prévu qu’un tel échec entraîne automatiquement le renouvellement du Parlement. Cela l’aurait sans doute dissuadé de récidiver en Juillet 2012… avec le même résultat, le référendum révocatoire ayant été annulé par la Cour constitutionnelle faute d’une participation suffisante…
35 Au total, on s’aperçoit que le droit de révocation populaire a donné lieu à une grande diversité dans ses applications. L’imagination fertile des constitutionnalistes français devrait permettre d’en trouver d’autres qui n’auraient pas les inconvénients qu’on a pu identifier. Mais il suffit de voir les conditions que le nouvel article 11 (alinéas 6 à 10) de la Constitution met à l’exercice du nouveau droit d’initiative minoritaire pour être certain que la classe politique française saura nous préserver de tout excès de démocratie !
Notes de bas de page
1 Au moins pouvait-on espérer que la jurisprudence du Conseil constitutionnel en la matière soit constante. Or dans une autre QPC n° 2010-41 du 29 septembre 2010 – trois mois après celle-ci - il a jugé que la peine complémentaire de publication du jugement de condamnation pour publicité mensongère n’était pas contraire à la Constitution parce que le juge peut en fixer les modalités et « ainsi en faire varier l’importance et la durée », ce qui est aussi le cas ici. Selon que vous serez élu ou misérable électeur, …
2 Voir B. Perrin, « L’absolution », AJDA, 2010, p. 1849 ; et contra R. Ghévontian, « La fin d’une incongruité juridique », Constitutions, 2010, p. 454, et W. Benessiano, RFDC, 2010, p. 830.
3 Voir D. Giraux, « La révocation populaire aux États-Unis, une procédure démocratique méconnue », dans B. Owen (dir.), Le processus électoral. Permanence et évolution, Levallois-Perret, Studyrama, p. 92 et suiv.
4 En Virginie, le succès de la pétition oblige le parquet à enquêter et à poursuivre. C’est le Tribunal, et non l’électeur, qui prononce la déchéance. De ce fait, la Virginie n’est pas considérée comme un « État à recall ».
5 Une cinquantaine de candidats tentaient leur chance ; l’un d’eux a dépensé un million de dollars dans sa campagne ; il a obtenu la révocation de Davis, mais n’a pas été élu à sa place…
6 C’était, dans l’histoire des États-Unis, le second gouverneur révoqué par recall, après Lynn Frazier au North Dakota en 1921. Mais en 1988, la procédure engagée contre Ewan Mecham, gouverneur de l’Arizona, avait dû être abandonnée, celui-ci ayant été entre temps destitué par impeachment.
7 Le recall avait été introduit dans la Constitution de l’Alberta en avril 1936, mais supprimé dix-neuf mois plus tard, ayant provoqué la révocation du gouverneur. Une proposition de loi tendant à le rétablir a été votée en première lecture en 2010.
8 D. Giraux, Les procédés d’initiative populaire dans l’administration locale suisse, thèse Paris II, 1993, p. 423.
9 On notera qu’en Hongrie, en 1988, peu de temps avant l’effondrement du système communiste, dix-huit députés avaient été amenés à démissionner par une initiative sauvage de pétition tendant à la révocation de leurs mandats.
10 Sur le modèle allemand, la Constitution de 1931 de la deuxième et éphémère République espagnole prévoyait aussi en son article 82 une révocation en deux temps du président de la République : les Cortès proposaient cette révocation à la majorité des trois cinquièmes ; puis l’Assemblée électorale qui l’avait désigné, elle-même élue au suffrage universel direct, statuait sur son sort à la majorité absolue, et, le cas échéant, élisait son successeur.
11 Voir C. Grewe, H. Ruiz Fabri, Droits constitutionnels européens, Paris, PUF, 1995, p. 487.
Auteur
Professeur émérite de l’Université Paris-Descartes
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