La Rome des Savoie après l’Unité
p. 133-148
Texte intégral
1Il peut sembler paradoxal d’accoler le nom de Rome et celui de la Maison de Savoie, famille des souverains italiens à partir de 1861 : à première vue, le lien entre cette dynastie et la capitale italienne ne semble pas aller de soi. En effet, on parle de la Rome piémontaise, de la Rome libérale, de la Rome fasciste, mais on ne parle pas de la Rome des Savoie – ni même de la Rome royale alors que cette dénomination aurait pu faire pendant à celle de la Rome pontificale.
2On s’en souvient, les troupes italiennes – on dit souvent piémontaises, et ce n’est pas un hasard – entrèrent dans Rome le XX septembre 1870. Ce fut un événement d’une portée considérable, autant par l’entrée des Italiens que par l’expulsion du pape d’une ville qui incarnait totalement, jusqu’alors, le pouvoir temporel et spirituel du souverain pontife. L’un des enjeux de la transformation de la ville en nouvelle capitale fut un véritable enjeu d’occupation de l’espace et du temps entre les nouveaux arrivés et les papalini, défenseurs de Pie IX érigé en « prisonnier du Vatican ». Dans cette stratégie d’occupation spatiale et temporelle, la monarchie joua un rôle, joua son rôle serait-on tenté de dire. C’est cet aspect-là que je voudrais préciser, dans le cadre plus général de l’italianisation de la ville. Il importe en effet de noter que la chronologie de l’italianisation, qui voit un avant et un après 1876 (date de l’arrivée au pouvoir de la Gauche avec Depretis et de la mise en place d’une politique beaucoup plus agressive à l’égard de la Papauté) ne correspond pas exactement avec la chronologie de la monarchie pour laquelle les césures seraient davantage liées aux personnalités des souverains (donc 1878, date de la mort de Victor-Emmanuel II comme coupure, puis 1900, date de l’assassinat d’Humbert Ier).
3D’entrée de jeu, les obstacles à l’instauration de la monarchie dans Rome s’avérèrent pesants. D’abord, la rivalité entre Florence, Rome et Turin. Florence qui avait été capitale depuis 1865, berceau d’une classe politique modérée grande promotrice du mouvement unitaire et qui voyait avec réticence ce statut qui lui semblait bien naturel lui être arraché. Turin, berceau dynastique de la Maison de Savoie, qui estimait que la place de capitale lui revenait naturellement au nom de ses liens avec les souverains italiens. Rome, enfin, capitale symbolique au poids considérable, mais aisément contestable car petite, poussive, peu industrialisée et donc ne représentant pas les forces vives de la nation, et surtout également occupée par le Pape. Ce statut de double-capitale allait peser lourd1.
4Deuxième obstacle, le passé romain : la monarchie italienne, même représentée par l’une des plus anciennes familles régnantes de la péninsule, ne pesait pas très lourd face aux siècles de splendeur pontificale, après celle de l’Antiquité. Il y avait là un défi symbolique à relever, qui était aussi un défi politique2.
5On vient de l’évoquer, l’assimilation de Rome à la capitale nationale, mais aussi dynastique, s’est faite avec difficulté, mais il est aussi possible que, faute d’enquête sur la question, nous soyons aujourd’hui encore victime d’un effet d’optique qui tend à minimiser fortement le rôle de la monarchie dans la construction nationale italienne, et, de ce fait, également la place de la monarchie dans la capitale italienne. C’est cet effet de focale que nous voudrions tenter de corriger ici.
6Il convient de préciser d’entrée de jeu que la monarchie en tant qu’institution ne pouvait avoir que relativement peu d’influence sur les destinées urbanistiques ou monumentales de l’Urbs. En effet, les transformations de Rome résultaient d’un jeu complexe dans lequel entraient la municipalité – longtemps constituée d’une majorité philo-catholique –, le gouvernement (par le truchement du Préfet3 puis des lois sur Rome destinées à aider financièrement la Commune), les particuliers (associations, individus, banques, sociétés immobilières etc.) qui pesèrent lourdement et enfin le Vatican, par le bais de l’aristocratie noire, qui resta toujours présente et active. Le Roi, ou même la Cour, on le voit, sont singulièrement absents de ce panorama. Et pourtant, s’ils ne figurent pas parmi les décideurs, ils sont présents dans la ville, ils y résident, certains lieux leur sont explicitement consacrés ou associés. C’est donc davantage sur ce terrain qu’on se situera, celui de la représentation et de la symbolique de la monarchie dans l’espace romain, plutôt que celui de la monarchie comme acteur dans l’espace romain.
7Dans cet espace romain, jusqu’en 1870 entièrement consacré à la Papauté, que ce soit par le biais de l’administration des États pontificaux, des innombrables églises, couvents, lieux de culte, ou même par l’usage de l’espace (cérémonies, pélerinages, processions...), c’était une entreprise réellement complexe que de tenter de s’y imposer, d’autant plus que les marques symboliques précédentes restaient en place. En effet, à l’exception – certes significative – de nombreux couvents qui passèrent aux mains de l’État italien et furent transformés en ministères4, et jusqu’à la circulaire Nicotera de 1876 qui interdit les processions dans l’espace public – et qui fut appliquée de manière intermittente –, toutes les églises et lieux de culte restèrent en place, et de nouveaux furent construits essentiellement sous le pontificat de Léon XIII. Restaient donc, et c’était le plus facile, les espaces neufs gagnés sur la ville ou bien une politique agressive d’ocupation ou de détournement des lieux les plus significatifs du passé romain.
8Enfin, l’entreprise ne fut pas simplifiée par l’attitude ambiguë des souverains à l’encontre de Rome et, en particulier, par celle de Victor-Emmanuel II qui ne dissimula pas sa méfiance, voire sa répulsion – presque superstitieuse – à habiter dans Rome. On le sait, l’entrée de Victor-Emmanuel II dans Rome se fit tard, sans aucune cérémonie et son séjour fut bref : il pénétra dans l’Urbs le 31 décembre 1870 – soit plus de deux mois après la prise de Rome –, de nuit, pour visiter la ville dévastée pat les inondations du Tibre. Sa véritable entrée se fit le 2 juillet 1871 et Michelangelo Castelli, un proche du souverain, pouvait écrire : « Le roi est très content de s’être débarrassé de l’épine de son voyage à Rome. Maintenant que la glace est rompue, il dit qu’il s’adaptera de bon cœur à ce séjour. »5 Vœu pieux, si l’on en juge par cette lettre de Quintino Sella au Roi du 2 août 1872 :
« Ici à Rome la lutte fait rage pour les élections municipales. Les cléricaux gagnent du terrain. Et on comprend pourquoi. Outre le fait que la lune de miel est terminée et que l’on est entré dans l’époque des impôts, de la vie chère des vivres et des loyers etc., les cléricaux sont là tous les jours pour en tirer profit (...). Votre Majesté donne le mauvais exemple : elle ne reste que quelques jours et rarement à Rome, et s’en va. Même le prince Humbert, je ne sais pour quelle raison, n’est pas revenu à Rome où il a pourtant un commandement, après son voyage en Allemagne. Le Pape, lui, se prétend prisonnier (...). Paris vaut bien une messe disait Henri IV. Rome vaut bien quelque chose. Pour la dynastie de Votre Majesté, elle vaut désormais tout, car si elle perd Rome, elle perd tout, alors que si elle perdait quelqu ’autre chose, elle ne perdrait pas le reste. »6
9On met cette absence d’enthousiasme de Victor-Emmanuel à l’égard de Rome sur le compte de sa méfiance piémontaise à l’égard de la ville et de ses habitants, trop méridionaux ; sont également invoquées ses amours pour sa maîtresse la Bela Rosin, qui résidait en Piémont, ou, plus prosaïquement, pour la chasse qu’il préférait pratiquer dans les montagnes du Nord7. Plus profondément, sans doute, la superstition du Roi et sa volonté de ménager le pape. Ce point mérite que l’on s’y arrête un peu plus longuement car il faut bien voir que l’obstacle majeur à l’établissement des Savoie dans Rome, même après le XX septembre, résidait bel et bien dans la place prééminente de l’Église dans l’Urbs.
Un espace disputé
10Durant la période qui nous intéresse, le principal obstacle à la consolidation symbolique de la Monarchie de Savoie dans l’Urbs demeura, au moins jusque dans les années 1911-1912, l’Église catholique. Dès le début de la période, la prise de Rome avait été présentée par Pie IX comme une catastrophe de caractère apocalyptique.
11Ce scandale avait eu comme conséquence, pour les catholiques les plus fervents, que la capitale avait été frappée directement par le fléau divin avec les inondations du Tibre à partir du 27 décembre 1870. Le 3 janvier 1871, l’Osservatore Romano publiait une lettre du Cardinal Vicaire Patrizi qui présentait l’inondation comme un châtiment divin destiné à punir les scandales horribles qui se déroulaient. Les journaux intransigeants reprirent ce thème, développé par Pie IX lui-même durant l’audience du 6 juillet 18738. Concrètement, après la loi des Garanties, refusée par le pape, Rome était coupée en deux, entre l’Etat du Vatican et la capitale italienne. Mais, comme on le mentionnait plus haut, les espaces sacrés restaient innombrables au sein même de la ville laïque. Par conséquent, les « stratégies » d’occupation de l’espace restèrent plurielles, oscillant entre l’imposition de la présence royale, soit dans des lieux autrefois liés au souverain pontife, soit d’évitement de l’affrontement en occupant (symboliquement) des lieux encore vides. Il est impossible de traiter ici de manière exhaustive le thème de la Rome des Savoie : on tentera donc d’évaluer, entre les traces laissées par les souverains dans Rome, et l’usage politique qu’ils firent de l’Urbs la place qu’ils y occupèrent.
12L’inscription représentait sans doute, pour l’Italie de la fin du xixe siècle, le vecteur encore privilégié de la communication politique9. Moment charnière, toutefois, où le placard et l’affiche commencent à s’imposer. La forme matérielle de l’inscription (gravée, dorée, mise en forme, etc.) tout autant que la forme littéraire très spécifique faisaient l’objet d’une attention minutieuse. Ainsi, pour les funérailles de Victor-Emmanuel II, on demanda à Cesare Correnti de rédiger les inscriptions qui devaient, de manière éphémère ou pérenne, accompagner le catafalque. Ou bien, détail significatif, au détour du journal de Giuseppe Manfroni, commissaire de police du Borgo, cette petite phrase au sujet de l’entrée de Victor-Emmanuel II dans Rome : « À Santo Spirito aussi, les médecins ont préparé une plaque pour rappeler que Victor-Emmanuel a loyalement honoré le vœu de Superga ; et ils espèrent que le roi viendra assister à l’inauguration. »10
13La Rome des Papes était une ville où l’inscription s’imposait majestueusement, aux frontons des églises et palais, aux angles des rues, objet d’un monopole public et donc soumise à un contrôle rigoureux. Il en fut de même après l’Unité et les formes de la commémoration s’inscrivirent dans une continuité formelle avec le passé. L’inscription constitua encore l’un des moyens les plus naturels pour marquer un territoire et pour conserver le souvenir d’un homme ou d’une action. Dans ce registre, les rois d’Italie furent honorés et il peut être intéressant de voir où et quand des inscriptions portant leurs noms furent apposées11.
14Si l’on fait une rapide synthèse, on voit que Charles-Albert eut droit à 4 inscriptions (2 à l’intérieur et 2 à l’extérieur), Victor-Emmanuel II à 15 inscriptions (5 en extérieur et 10 à l’intérieur) et le couple royal, Humbert Ier et Marguerite, à 31 inscriptions (dont 5 en extérieur). Il faut noter que les lieux où figurent ces inscriptions, rappelant parfois simplement le nom du roi, reprenant parfois des extraits d’un discours particulièrement important ou bien indiquant une inauguration ou une visite du souverain, sont assez différenciés. L’augmentation des inscriptions dédiées à Humbert et Marguerite correspond à une typologie beaucoup plus variée : à côté du Parlement, du Sénat, du Capitole et du Panthéon, relais obligés des inscriptions royales, on trouve également de nombreux lycées, orphelinats, écoles, témoignant soit de la présence du roi ou de la reine à l’inauguration, soit du financement lié à la bienfaisance des monarques. On voit donc en filigrane à travers ces inscriptions l’élargissement des fonctions royales et une trace de cette monarchie national-populaire voulue par Francesco Crispi. On pourrait en trouver d’autres exemples comme, par exemple, dans la multiplication des institutions portant le nom des souverains (asilo Savoia per l’infanzia abbandonata, Lycée Umberto I...).
15En plus de ces inscriptions « pour l’éternité », destinée à marquer l’espace romain, il faut mentionner les inscriptions et les symboles (écu de la Maison de Savoie, drapeau tricolore, portrait du roi ou bien la musique qui occupe une place essentielle dans les manifestations, en l’occurrence la Marche royale) qui apparaissent à l’occasion d’un événement, d’une manifestation, et qui prennent alors une couleur clairement politique ou, plutôt, partisane. Le Vatican y était d’ailleurs fort sensible puisque, parmi les éléments strictement contrôlés tout particulièrement lors d’un service religieux prononcé à la mémoire d’un personnage appartenant à l’Italie libérale, on trouve bien sûr les discours, mais aussi les inscriptions et les symboles12, souvent interdits. Il n’est sans doute pas indifférent que la rédaction des inscriptions devant figurer au Panthéon lors des funérailles de Victor-Emmanuel II ait été confiée au ministre de l’Instruction publique, proche du Roi, Cesare Correnti. Mais ce n’était pas seulement à l’occasion d’événements de cette ampleur que les symboles italiens prenaient toute leur importance : ainsi, exemple parmi d’autres, le 23 août 1871, à l’occasion d’une fête à Saint-Jean-de-Latran, « le long des rues parcourues par la population étaient affichées les armes de la Maison royale et le portrait lithographié du roi ». Les emblèmes furent lacérés par certains fidèles qui furent arrêtés. Des inscriptions en l’honneur de Pie IX figuraient également sur le parcours13. Quelques jours auparavant, à l’Assomption, le 16 août 1871, pour manifester contre la messe qui se déroulait à Sainte-Marie-Majeure, les maisons du Rione Monti étaient illuminées « principalement avec des ballons peints aux couleurs nationales et décorés de l’arme des Savoie. »14 On le voit, la présence de la Maison royale s’affirmait souvent dans Rome sous des formes éphémères dont seuls les rapports de police rendent compte, témoignant d’une forte conflictualité.
16Autres marques spatiales, les noms de rue portant le nom des souverains. Rappelons d’abord qu’un quartier entier, près de la gare de Termini, voit son onomastique dédiée à l’histoire du Risorgimento et donc à la Maison de Savoie. Le cœur du nouveau quartier est constitué par la place Victor-Emmanuel d’où partent des rues portant les noms des principaux princes et rois de Savoie, depuis le Moyen Age jusqu’à Charles-Albert. Puis, rayonnant, les rues consacrées aux hommes politiques et héros du Risorgimento (U. Ratazzi, Cesare Correnti...), aux batailles (Palestro, Cerneria...). C’est dans ce quartier que Charles-Albert a la seule rue portant son nom dans Rome. Victor-Emmanuel, mieux loti, a donc la place principale de ce quartier, une rue très centrale (Corso Vittorio Emanuele II) tracée dans les années 1880 pour restructurer le quartier Renaissance de la ville et un pont. Quant à Humbert Ier, la villa Borghese porta son nom de 1900 à 1944, une rue Principe Umberto se trouve à l’Esquilin, un pont et un tunnel lui sont également dédiés. Marguerite quant à elle rassemble sous son nom un tunnel, un pont, une avenue et une place... Une toponomastique présente, donc, essentiellement dans le centre de la ville. Marque de la volonté du Conseil Municipal d’honorer les souverains qui l’avaient choisie comme capitale du Royaume.
17Le cas le plus clair d’occupation de lieux jusqu’alors liés à la papauté, consiste en la transformation du Quirinal en résidence royale et lieu de résidence de la Cour italienne15.
« Si jusqu ’en 1870 Rome voyait dans le Vatican le siège de toute puissance religieuse et politique, elle apprit vite à reconnaître le Quirinal comme siège de la puissance civile, fondée sur le droit du plébiscite. Les deux palais qui semblent avoir été construits à dessein l’un en face de l’autre, sur deux collines à droite et à gauche du Tibre, représentent deux principes différents, pour lesquels l’expérience a montré la possibilité de vivre au contact l’un de l’autre, sans s’affronter et sans entraver la liberté de leurs actions. Au Vatican apparaît dans toute sa grandeur solennelle le principe spirituel et religieux, qui se diffuse majestueusement de là vers le monde entier. Au Quirinal réside la grandeur du monarque constitutionnel qui a rendu possible l’unité et l’indépendance de l’Italie, s’incarnant dans trois générations d’une dynastie qui, depuis 1848, s’est sacrifiée à l’idée du sentiment national italien. »16
18Cette vision de la dualité romaine reste sans doute fort idéalisée, mais elle résume bien ce qui est sans doute l’ancrage le plus visible des Savoie dans l’espace romain. Pourtant, le Quirinal représentait, avec le Vatican, dans la Rome préunitaire, un lieu fortement lié au souverain pontife, et tout particulièrement à Pie IX, à la suite de la « révolution romaine » de 1846-48. Durant ces deux années, la place du Quirinal fut l’objet de fort nombreuses manifestations, spontanées – dans la limite de ce que peut être la spontanéité politique, mais en tout cas répondant à la canalisation par les chefs des rioni d’un désir populaire – ou bien de cortèges plus officiels. Le lendemain de l’élection de Pie IX – le 17 juin 1846 –, et le 1er janvier 1847, la foule se réunit sur la place pour acclamer le souverain pontife, obtenit une bénédiction et éventuellement entendre un discours ou une déclaration. Cette « occupation » de la place de Montecavallo connut un point d’arrêt le 1er janvier 1848 lorsque la foule qui se rendait comme l’année précédente place du Quirinal pour les vœux fut arrêtée par la police. Ce qui faisait du Quirinal un lieu sans doute plus complexe dans la mémoire romaine : attaché à la papauté, certes, mais aussi à un épisode de l’histoire de Pie IX fortement lié au Risorgimento, à l’époque où il aurait pu être concevable que le pape prît la tête du mouvement unitaire. Le Quirinal, donc, même lié à la Papauté, l’était aussi indirectement au Risorgimento. Et surtout, la place du Quirinal était l’un des lieux romains de manifestation publique à caractère non strictement religieux, mais aussi politique. Lieux qui s’étaient multipliés durant les événements de 1846-1848 mais qui étaient rares dans la Rome pontificale. Le Quirinal avait donc été saisi pat le gouvernement italien, en la personne du Lieutenant Général Alfonso La Marmora dès le 8 octobre 1870, dans la mesure où le palais appartenait au pape en tant que souverain temporel des États de l’Église, et qu’il ne tombait pas sous la protection de la loi des Garanties17. La première manifestation publique de soutien à Victor-Emmanuel II se déroula d’ailleurs sur la place le 31 décembre 1870, lors de son premier passage à Rome. Le Quirinal dut ensuite être restructuré pour accueillir, non pas le roi, assez peu présent, mais le prince héritier Humbert et sa jeune épouse la princesse Marguerite qui s’y installèrent le 23 février 1871. La transformation fut pour Rome d’importance : d’abord parce que s’installait dans la capitale une Cour qui n’avait tien à voir avec la Cour ecclésiastique du Vatican : Cour composée aussi de femmes, d’une partie de l’aristocratie romaine et italienne, mais aussi de la bourgeoisie libérale proche du gouvernement18. Cette Cour resta, de 1870 à 1900, date de l’assassinat d’Humbert Ier, sous l’influence de la future reine d’Italie, Marguerite de Savoie. Dans la mesure où Victor-Emmanuel II se refusa à habiter à Rome et par conséquent à s’entourer d’une Cour, c’est au jeune couple princier que cette tâche fut confiée. Et si l’on tient à la seule sociabilité de Cour – et non au tôle politique d’un « parti de Cour », sujet qui ne relève pas de notre propos –, les saisons au Quirinal furent, dès 1871, riches. Le premier événement « mondain » qui se déroula au Quirinal fut, le 14 avril 1871, une représentation théâtrale à laquelle plus de 200 personnes assistèrent. Ce fut le début d’une présence visible de la monarchie à Rome.
« Quand les princes partirent le 4 juin pour Monza, la plus grande partie de la population était désormais attachée à leurs personnes comme au sentiment patriotique qu’ils avaient su incarner d’une manière très bien acceptée. Les Romains n’avaient pas laissé passer l’occasion de manifester aux princes leur affection : et lorsqu ’ils partirent, malgré l’heure avancée dans la nuit, des milliers et des milliers de citoyens se pressèrent pour les saluer à la gare de Termini. »19
19S’il est difficile de confirmer les affirmations d’Ugo Pesci, ardent défenseur de la monarchie, quant à la popularité des jeunes princes à ce moment précis, les exemples abondent, tant dans les journaux que dans les archives, de marques d’enthousiasme général de la part des populations. En particulier, les retours des souverains de voyages soit à l’étranger, soit dans les provinces italiennes, étaient l’occasion d’accueils « enthousiastes » à la gare de Termini, ou place du Quirinal. Un exemple, rapporté par Pesci mais unanimement repris – à l’exception bien sûr de la presse catholique – est constitué par l’arrivée de Victor-Emmanuel II dans Rome le 2 juillet 1871, d’où il repartit 48 heures plus tard, avant de revenir en novembre.
« Il n’est pas facile de décrire avec quel enthousiasme Victor-Emmanuel fut accueilli à Rome. Les habitants de la nouvelle capitale montrèrent qu’ils avaient compris toute l’importance historique d’un événement qui n ’a peut-être rien de comparable à l’époque moderne, avec l’établissement à Rome du premier roi d’Italie, avec l’assentiment de toutes les puissances européennes, ce qui mettait fin définitivement au Moyen Age et consacrait solennellement, après onze siècles, la fin de la puissance temporelle des papes. Sans entrer dans les détails de l’accueil, sans parler des banderoles, des milliers de drapeaux, des plus petites rues illuminées, il est légitime d’affirmer que chaque esprit impartial a pu apprécier l’universalité et la spontanéité du peuple, sans provocation inutile et superflue. »20
20Au Quirinal, se déroulaient bien sûr les réceptions officielles : réception du début d’année, puis les trois repas de gala offerts au Corps diplomatique, au Parlement et à l’armée. Lorsque Marguerite n’était encore que princesse, c’est elle qui donna les réceptions qui allaient permettre d’introduire la noblesse romaine qui n’était pas hostile au nouveau régime et la nouvelle classe dirigeante à la Cour. Inversement, les princes furent reçus dans les salons romains, dont le salon Caetani est le plus connu21. Le palais fut largement réaménagé après 1870 afin de le faire devenir un palais et une résidence adaptés à des fonctions bien différentes de celles d’un palais pontifical22. La Cour d’Italie mêla une étiquette, en théorie sévère, mais, en réalité, une grande ouverture et une certaine liberté, en particulier sous la houlette de Marguerite de Savoie :
« Aux côtés des princes étrangers accueillis à Rome, au patriciat « blanc », aux hautes charges du Quirinal, Leurs Majestés invitaient également le monde politique et toutes les personnes qui, par leur position dans la bureaucratie et dans la vie politique du pays, pouvaient aspirer à cet honneur éminent ; confronté à l’étiquette sévère, faisait souvent contraste, parfois même de manière éclatante, la qualité modeste des invités et leur absence de connaissance des usages du grand monde. »23
21Et Juliette Adam, chroniqueuse attentive de la vie romaine écrivait même que « la società nuova che si forma alla Corte appartiene essenzialmente alla democrazia24. Ce que le marquis Guiccioli traduisait avec un certain mépris : « Encore un bal à la Cour. Beaucoup de gens, beaucoup d’ennui, beaucoup de vulgarité dans la masse des invités. La démocratie est idiote quand elle vote, folle quand elle gouverne et dégoûtante lorsqu ’elle veut faire des mondanités. »25 Et on raconta que le fort austère, républicain et socialiste ministre de l’Intérieur, Nicotera, dansa avec la reine en 1875 et fit ensuite allégeance à la monarchie... Mais, plus important encore, pour notre propos, le fait que le Quirinal devint le lieu de rassemblement par excellence des événements politiques ou commémorarifs. Ainsi, le 27 novembre 1871, date de la première séance du Parlement italien tenu à Rome : le cortège royal sortit du Quirinal pour se rendre à Montecitorio (où l’hémicycle était encore provisoire, ce qu’il resta d’ailleurs fort longtemps) et à son retour « Au Quirinal devant lequel les sociétés ouvrières s’étaient rassemblées avec leurs drapeaux, les acclamations continuèrent jusqu’à ce que le roi se soit présenté au balcon, avec le prince Humbert et le prince de Carignan, y restant quelques minutes pour saluer la foule à plusieurs reprises, cette dernière semblant peu disposée à s’en aller. »26 En outre, raconte Manfroni, ce même jour « le miracle n’a pas manqué ; en plein jour on voyait briller sur le Quirinal une étoile éclatante ; Vénus en conjonction avec le soleil disaient les astronomes ; mais le peuple disait que l’étoile d’Italie illuminait le triomphe des idées unitaires. »27
22Le 23 mars 1874 correspondait au 25e anniversaire du règne de Victor-Emmanuel II À cette occasion, la Chambre des députés et la Municipalité de Rome approuvèrent un certain nombre de dispositions qui firent du Quirinal le cœur du dispositif « d’allégeance » : une députation de parlementaires se rendit au Quirinal afin de présenter ses compliments au souverain, suivie par les sénateurs et les maires des principales villes italiennes. Le conseil municipal de Rome pour sa part offrit au roi un parchemin et fit procéder à des illuminations dans les rues de la ville. Les représentants de tous les quartiers apportèrent chacun une adresse signée de milliers de personnes, et le même type d’hommage fut rendu par les étudiants romains et par les dames romaines. Le 23 au matin, 101 coups de canon furent tirés du Pincio. La place du Quirinal était bondée dès l’aube et avant même l’arrivée des délégations, le roi salua du balcon la foule amassée sous les fenêtres, à deux reprises. Autre exemple, le 3 juin 1877, jour de la fête du Statuto, qui correspondait à la date du jubilé épiscopal de Pie IX, la foule décida le soir, après les concerts donnés place Colonna (où l’on sonna trois fois la Marche Royale), d’aller saluer le roi au Quirinal : « Le troisième cri Au Quirinal, au Quirinal fut accueilli par une énorme acclamation. Un drapeau apparut, puis deux ou trois autres, et des milliers de personnes les suivirent se rendant au Quirinal par la rue dell’Umiltà et rue des Muratte. »28 Mais la foule enthousiaste fut arrêtée par la police qui prétexta ne pas vouloir réveiller le roi, déjà endormi.
23Humbert Ier et Marguerite, plus que Victor-Emmanuel II, parcoururent l’Italie afin de rencontrer leurs sujets, de s’en faire connaître, dans une claire volonté d’établissement de ce qu’on a pu appeler une monarchie national-populaire29. Si l’on considère que Rome est bien le centre d’où partent ces voyages et déplacements, ce thème ne nous intéresse que dans la mesure où départs et retours des souverains donnent lieu à des manifestations de la population, avec une topographie précise. Autrement dit, les retours établissent, à Rome même, une topographie fortement liée à la monarchie que l’on peut esquisser ici. En fait, deux lieux se dégagent clairement : la gare de Termini et la place du Quirinal. Saluer le roi à son arrivée en gare de Rome constitue l’un des points forts de l’occupation de l’espace : ainsi, en 1871 « Les habitants du Borgo, voulant saluer le roi, se sont rendus en masse avec les drapeaux à la gare, laissant ici les prêtres et la domesticité du Vatican. »30
24L’un des retours royaux les plus enthousiastes que connut Rome fut sans doute celui d’Humbert Ier, le 19 novembre 1878. En effet, lors de son premier voyage officiel en tant que Roi, qui le mena du 9 juillet au 17 novembre de La Spezia à Turin, puis à Milan, Venise, Brescia, Mantoue, Vérone, enfin Plaisance, Parme, Bologne et Florence avant de rejoindre les Marches, puis les Pouilles et Naples le 17 novembre. Naples où Passanante, un cuisinier plus déséquilibré qu’anarchiste, tenta d’assassiner le souverain. Dès le 20 octobre, bien avant l’attentat, la Municipalité et les associations avaient commencé à établir un programme pour célébrer le retour du jeune roi, parti depuis juillet. Place Termini, un amphithéâtre provisoire fut édifié afin d’y écouter les nombreuses fanfares qui s’étaient portées volontaires pour honorer les souverains. Il est intéressant de constater qu’à l’annonce de l’attentat, et en l’absence du roi à Rome, le point de référence des milliers de manifestants qui se réunirent pour protester contre le « geste odieux » fut le Capitole, d’où le maire Emanuele Ruspoli dut calmer la foule. Mais le soir du 18, c’est sur la place du Quirinal qu’une foule compacte se retrouva avec fanfares, drapeaux et « fiaccole » pour aller défiler au Capitole et se disperser place Navone. Attentat de 1878 contre Humbert Ier (Passanante à Naples) :
« Hier soir, à peine la nouvelle de l’attentat infâme contre la sacrée personne du roi s’était-elle répandue, tous les théâtres furent fermés au son de la Marche royale et aux cris de Vive le roi, Vive la reine et Mort à l’assassin. La population se réunit entre-temps sur le Corso et place Colonna, et grossie par le flot des spectateurs sortis des théâtres se formèrent en une impressionnante manifestation scandant les acclamations mentionnées ci-dessus, avec lanternes et drapeaux, parcourant en une masse imposante les principales rues de la ville et se rendant par deux fois au Capitole où le maire harangua la foule protestant au nom de la population contre le délit scélérat. Les fenêtres furent illuminées et décorées de drapeaux et sont encore ornées de drapeaux en signe d’exécration contre le méfait. »31
25Puis le 24, jour du retour d’Humbert Ier et Marguerite à Rome, ce lut après le spectacle de l’amphithéâtre de la place Termini un véritable bain de foule qui les accompagna jusqu’au Quirinal où ils durent saluer à diverses reprises, « il y avait du monde partout, sur la vasque, sur la base de l’obélisque, sur les deux chevaux, jusque sur l’écu en marbre de la famille Corsini au dessus du portail de la Consulta. ».32 On pourrait multiplier les exemples de ce basculement de l’espace romain : aux catholiques, le Vatican et quelques églises « marquées » comme Saint-Ignace ou le Gesù. Aux Romains, en l’absence du roi, le Capitole, siège de la Municipalité. Et, nouvel espace « italianisé », le Quirinal. À cet effet, le 25e anniversaire du règne, en 1874, que nous avons évoqué, est intéressant symboliquement car on voit se diriger vers le Quirinal une « représentation » de l’Italie dont l’ordre n’est pas indifférent : d’abord les chevaliers de l’Ordre de l’Annunziata puis les sénateurs (nommés par le Roi) et les députés. Ensuite les grands corps de l’État, les commandants des corps d’armée. Ensuite, la représentation « géographique » de l’Italie, pourrait-on dire : les maires des chefs-lieux de province. Enfin les écoles, les corporations et les Gardes nationaux et les corps élus des différentes provinces.
26Les déplacements des souverains dans Rome se faisaient apparemment de manière simple, sans apparat particulier : Victor-Emmanuel II se promenait sur la via del Corso ou au Pincio, tout comme Humbert et Marguerite. Ainsi, « La princesse Marguerite, écrit Manfroni en 1875, passe fréquemment place Rusticucci et par les rues du Borgo pour se rendre villa T’amphili les jours où elle est ouverte au public (...) Le roi Vittorio passe rarement pas le Borgo et, lorsque cela arrive, il reste inaperçu tant son équipage est modeste. »33 Ils participaient également, aussi longtemps qu’il eut lieu, au Carnaval de Rome et à la fameuse Corsa dei Barberi, course de chevaux qui se déroulait sur la via del Corso et qui faisait, chaque année, quelques morts et blessés.
27Les souverains apparaissaient également au théâtre où leur arrivée était alors prétexte à des manifestations d’enthousiasme souvent aux dépens de la pièce ou de l’opéra interprété : « Le théâtre Apollo, le soir, était plein à craquer. Le roi y arriva au milieu du second acte des Due Foscari et dut se lever par trois fois pour saluer le public. ».34
28L’ostentation dans les fonctions religieuses était, bien entendu, un élément important dans l’affrontement Église/État. De ce point de vue, l’intransigeance du Vatican permit en fait indirectement à la famille royale de se montrer dans l’exercice de ses dévotions. En effet, en 1871, le chapelain de Cour, Monseigneur Anzino, qui était également chargé des chapelles royales, désireux de célébrer la messe pour les jeunes princes à l’intérieur du Quirinal, se vit signifier par la Secrétairerie d’État que, le lieu étant interdit, il était impossible d’y officier. Dès lors, les princes durent aller à Sainte-Marie-Majeure afin d’assister à la messe (ce qui donna d’ailleurs lieu à l’incident des coussins, révélateur des tensions entre le Vatican et la Monarchie, le Vatican interdisant au clergé de la basilique de fournir des coussins aux princes...). Cette « publicité » involontaire fit que « beaucoup de monde se rendait à cette heure dans la basilique pour voir la jeune princesse qui priait Dieu sans se soucier des tracas qui lui étaient faits. »35 Ensuite, Victor-Emmanuel fit restaurer la petite église du Saint-Suaire, dite église des Piémontais, qui appartenait à la Maison de Savoie et que Monseigneur Anzino, chapelain de Cour, reconsacra le 15 novembre 1871. Ce ne fut que sous Léon XIII que les souverains d’Italie purent assister à la messe à l’intérieur du Quirinal. Mais dans certains cas il pouvait arriver que la reine – car c’est bien à Marguerite que revint le rôle de courroie de transmission pour les relations avec l’Église, tant pour sa réputation de piété que par ses pratiques dévotionnelles – pénètre dans des espaces « réservés ». Ainsi, lors de la Semaine sainte, elle se rendait à la basilique Saint-Pierre pour l’adoration des Sépulcres. Elle n’avait droit à aucun égard particulier et sa venue constituait d’ailleurs un indicateur des relations entre l’Église et la Monarchie. Giuseppe Manfroni relate bien dans son journal, pour l’année 1878 – Marguerite est désormais Reine d’Italie et non plus princesse héritière – combien la venue de la souveraine fut ignorée et qu’elle ne fit l’objet d’aucun signe de révérence lié à son rang alors que, écrit le commissaire, « on pouvait faire pour elle au moins ce qu’on avait fait récemment pour des souveraines déchues, pour des reines non catholiques, pour de simples princesses du sang. »36 Ce manque de respect envers la souveraine entraîna une manifestation de protestation populaire. On le voit, dans cet espace romain politiquement divisé, les points de contact restaient nombreux entre souverains et pontife, même s’ils ne se tencontrèrent jamais. Et les territoires restent contestés, donnant prétexte à des manifestations de populations dont il est difficile de dire quelle forme elles prirent et si elles furent effectivement spontanées.
Mort du roi
29Pour les souverains italiens, le temps des deuils permit une appropriation plus claire et plus forte de la ville, tant par les marques d’affection ou de deuil que par l’investissement de lieux hautement symboliques comme le Panthéon (Santa Maria ad Martyres) ainsi que par le prolongement qui fut donné à ces événements lors d’anniversaires plus ou moins d’envergure.
30À cet égard, la mort de Victor-Emmanuel II constitua sans doute l’une des démonstrations les plus imposantes de la présence dans la ville de la dynastie italienne37. Il s’agit en effet d’un renforcement de la Rome laïque : « Un plus grand prestige pour Rome devenue, avec la sépulture de Victor-Emmanuel au Panthéon, le symbole vivant de l’unité italienne. »38 D’autant que la mort de Victor-Emmanuel II précéda de peu celle de Pie IX et entraîna une claire partition de l’espace.
31Le 9 janvier 1878 à 14 heures 35, le roi s’éteignit après une brève agonie. Immédiatement, le drapeau italien qui flottait sur le Quirinal fut mis en berne et à 16 heures, tous les magasins de Rome étaient fermés. Immédiatement, la place du Quirinal s’emplit d’une foule immense et silencieuse. Dès 19 heures, une affiche du Préfet annonça officiellement le décès du souverain. « La douleur de Rome fut grande, impressionnante, émouvante : je n’aurais jamais cru que les Romains se soient autant pris d’affection pour le roi en quelques années. Le spectacle de la véritable et sincère douleur de toute une ville, à l’exception des cléricaux intransigeants, – naturellement – a été immense » écrivait, presqu’avec surprise Giuseppe Manfroni dans ses mémoires. Il est vrai qu’en sept ans et demi, l’arrivée d’une forte population extérieure à la capitale avait renversé la proportion entre les « vieux Romains », fidèles au Pape-Roi, et les nouveaux arrivants favorables à l’Italie unifiée et à Rome capitale39. Cet attachement des Romains au roi, on le lit indirectement dans cette lettre de Quintino Sella à son épouse Clotilde, en date du 16 janvier 1878 (la veille des funérailles du Roi) : il explique entre autres la relative souplesse du pape dans les tractations suivant la mort du roi « par peur d’une explosion de colère du peuple romain. Explosion qui serait terrible car les esprits sont exaltés. »40
32Dès la mort du roi, deux problèmes majeurs furent soulevés : d’abord, savoir si le roi avait reçu les sacrements, s’il s’était confessé et si, à cette occasion, il s’était réconcilié avec l’Eglise et donc rétracté (il avait été excommunié par l’encyclique du 1er novembre 1870 qui condamnait les auteurs du « vol » (rapina) des territoires pontificaux sans toutefois nommer personne)41. Ensuite, de savoir où le roi serait enterré, à Rome ou à Turin, berceau de la dynastie. Le premier point, qui nous intéresse peu ici, a fait l’objet de différentes mises au point. Si la presse libérale affirma que le roi ne s’était jamais rétracté, il aurait toutefois fait dire au pape par Monseigneur Anzino « qu’il mourait en catholique, qu’il lui demandait pardon des dégoûts qu’ils lui avaient donnés et qu’il se repentait du mal qu’il avait fait. »42 Ce problème de la rétractation du roi n’aurait pas une d’importance particulière pour notre propos si la Congrégation des Affaires Ecclésiastiques extraordinaires n’avait été interrogée dès le 10 janvier sur les problèmes posés au Saint-Siège par la mort du roi43. Or la Congrégation se mit d’accord sur trois points : d’abord, que des funérailles religieuses ne soient autorisées que si le roi avait formulé une rétractation explicite, ensuite que le corps du roi soit transporté à Turin et enfin que c’était un simple fidèle qui serait porté en terre, et non le roi d’Italie, et qu’à ce titre toute cérémonie particulière était interdite. Toute messe au Quirinal restait interdite, aucun évêque ou religieux ne pouvait être présent, aucune confrérie, personne d’autre que les officiants de la paroisse Saint-Vincent et Saint-Anastase, dont dépendait le Quirinal. Deux changements majeurs allaient intervenir : d’abord la décision obtenue par Cesare Correnti, ministre de l’Instruction publique et de Francesco Crispi, ministre de l’Intérieur, d’enterrer le roi à Rome et non à Superga. Et entre-temps, à la suite d’une déclaration orale d’Humbert Ier certifiant la rétractation de son père, le 12 janvier, Pie IX permit que les obsèques se déroulent dans n’importe laquelle des églises romaines à l’exception des basiliques majeures44. Ce fut donc le Panthéon qui fut choisi, Santa Maria ad Martyres : les funérailles se déroulèrent triomphalement, le cortège passant du Quirinal, via XX settembre, Quattro Fontane, Piazza Barberini, via del Tritone, Piazza di Spagna, via del Babbuino, piazza del Popolo, via del Corso, piazza del Collegio Romano, piazza della Minerva, piazza del Pantheon. A l’exception du tracé de la via XX settembre, c’est véritablement un investissement de la Rome pontificale qu’accomplit le cortège qui parcourut, quatre heures durant, les rues de Rome : plus de 100 000 personnes, sous le coup de l’émotion, regardèrent passer la dépouille du roi et l’impressionnant cortège qui rassemblait un condensé de la nouvelle Italie45. La cérémonie avait été préparée avec minutie par Crispi et Correnti, ne négligeant aucun détail, bien convaincus l’un et l’autre que « ces occasions solennelles, si elles ne parlent ensemble aux sens et à l’imagination sont une imposture et une fantaisie. »46
33À cette consolidation de la dynastie allait toutefois répondre, quelques jours plus tard, la mort de Pie IX, le 9 février 1879. Si la foule qui se rassembla à Saint-Pierre était sans doute plus nombreuse que celle du 17 janvier, il n’y eut pas de cortège et, fait notable, le service d’ordre fut assuré par les forces italiennes : « Sur la place Saint-Pierre et, nous pouvons dire dans tout Rome, la surveillance de la Questure et l’attitude des troupes furent telles qu’elles remplirent très bien les exigences de la loi des Garanties » pouvait écrire L’Osservatore Romano le lendemain... Hélas, cette sérénité était davantage liée à l’ordre public qu’à celui des esprits : le 12 juillet 1881, lors du transport nocturne des cendres de Pie IX de la basilique Saint-Pierre à la basilique de Saint-Laurent-hors-les-murs, un groupe attaqua le cortège et jeta le corps dans le Tibre.
34Il est sûr que la décision d’enterrer le roi à Rome et non à Turin constitua un acte politique de la plus haute importance : ce que le monde catholique comprit parfaitement, d’ailleurs. Les incidents provoqués dans les années suivantes au Panthéon par les pélerins catholiques furent nombreux, témoignant d’un sentiment d’usurpation exacerbé.
Calendrier
35De la même manière que l’espace romain commença à être occupé par des monuments, noms de rues, inscriptions rappelant la présence des souverains italiens dans la capitale, le calendrier fit également l’objet d’une entreprise concurrente du calendrier liturgique. Fête du plébiscite, fête du Statuto, anniversaires du Roi et de la reine, autant d’occasions de célébrer la famille régnante. Deux points sont ici importants pour notre propos : d’abord, la mise en place d’une sphère politique liée à la dynastie et à la nation de manière autonome par rapport à l’Eglise. S’il est sûr que l’affrontement entre les deux puissances restait sous-jacent, la mise en place d’une « religion politique » permettait à la nation de s’autocélébrer davantage sur le mode du rassemblement que sur celui de l’opposition. Les anniversaires du plébiscite qui avait consacré le triomphe à Rome du oui, de la volonté d’appartenir au royaume d’Italie, qui se déroulaient le 2 octobre, constituaient une célébration relativement discrète et essentiellement « auto-centrée ». Cet anniversaire donnait lieu, en général, à des illuminations dans les principales rues de Rome (via del Corso, Piazza Colonna, Piazza Navona, Piazza Scossacavalli et place Sainte-Marie du Trastevere), au Capitole et à des concerts. Souvent, c’était l’occasion de décerner des prix aux élèves des écoles communales, association qui indique le lien établi, dans l’esprit des organisateurs, entre la Patrie et l’école : « La nobile iniziativa meritava di essere seguita », déclarait l’Onorevole Finocchiaro-Aprile le 2 octobre 1890, à l’occasion du 2e anniversaire du plébiscite romain. « La noble initiative méritait d’être poursuivie. Associer l’école aux fêtes de la Patrie est une pensée digne des éducateurs et des patriotes. Honorer la victoire des libertés en célébrant la culture populaire, qui est la base de la culture nationale, est une œuvre sage et prévoyante, de conservation et de progrès, et, en même temps, consécration de la fin suprême de l’école, la patrie. »47 Même esprit à partir de 1898 avec la distribution des médailles pour les actes de bravoure civique. Moins que la monarchie, c’est la ville de Rome dans son lien avec l’Italie, qui est au cœur de la fête. En revanche, la monarchie est plus clairement au cœur des célébrations liées au Statuto48, ou bien aux différents anniversaires et fêtes des souverains : 20 novembre, anniversaire de naissance de la Reine, 14 mars anniversaire de naissance du Roi, 20 juillet fête de la Reine, 11 novembre anniversaire de la naissance du Prince de Naples. Ces fêtes sont célébrées avec plus ou moins de decorum dans l’ensemble de l’Italie. Pour le Statuto, Ilaria Porciani a justement indiqué que le monarque est véritablement au centre du rituel, essentiellement dans ses attributs militaires au cours d’une revue49. À Rome, le roi est le plus souvent présent pour la revue des troupes qui se déroule au Macao, un peu en dehors de la muraille aurélienne, vers Castro Pretorio. Même empreinte militaire pour l’anniversaire de la naisance du roi. La reine, quant à elle, est surtout présente dans les cérémonies de remise de prix et médailles dans les écoles. À Rome, des concerts se déroulaient, les rues étaient illuminées et, pour la fête du Statuto se déroulait la fameuse « girandola » au cours de laquelle une architecture éphémère était enflammée par un feu d’artifice le soir. Pour routes ces cérémonies, le cœur de la commémoration se tient bien à Rome où se trouve la famille royale mais se répand, en simultanéité, dans l’ensemble de l’Italie. Cette concomitance est essentielle dans la constitution d’un espace national, et la centralité de Rome est tout à la fois le résultat et la condition de son statut de capitale. Quant à la fête du XX septembre, pourtant symbole de l’entrée des Piémontais dans Rome, il est frappant de constater que le souverain est quasi toujours absent à l’exception des grandes cérémonies de 1895, marquant le vingrième anniversaire de la Brèche de Porta Pia. À cette occasion, la famille royale assista à l’inauguration des statues de Garibaldi, de Cavour et de Minghetti. Et ce n’est qu’à partir de cette date que le XX septembre devint une fête célébrée dans toute l’Italie50, mais en conservant une forte dimension anticléricale.
36En théorie, liturgies politiques et monumentalité publique sont deux phénomènes liés, tant la polysémie des monuments exige qu’un sens leur soit imprimé par des cérémonies, des discours, des évocations et des hommages. Mais, de ce point de vue, les monuments aux rois d’Italie furent construits bien après leurs morts : le monument à Charles-Albert (sculpté par Romanelli), situé près du Quirinal, date de 1900 (inauguré en 1898, pour le cinquantième anniversaire du Statuto) ; celui à Victor-Emmanuel II (G. Sacconi) fut commencé en 1885, inauguré en 1911 et totalement achevé en 192151 ; enfin, le monument à Humbert Ier fut érigé dans la villa Borghese – qui s’appelait alors villa Umberto- seulement en 1923 (D. Calandra et E. Rubino). En réalité, le seul de ces trois monuments qui ait pu cristalliser quelque chose de la monarchie est l’imposant Vittoriano, mais il fut très vite récupéré par le régime fasciste qui en fit la scène idéale de ses cérémonies politiques en l’honneur de la Patrie et du Régime, bien plus que des Savoie.
Conclusion
37Il n’est sans doute pas surprenant de constater que l’expression « Rome des Savoie » n’ait pas eu de postérité. La famille régnante italienne n’a sans doute pas eu le temps de s’installer dans l’Urbs, ville symboliquement dévorante. Ils furent sans doute les premiers responsables de cet effacement : souvent absents, ils délaissèrent la capitale pour leurs terres, Turin, Greyssoney, Venise, Naples aussi à laquelle Victor-Emmanuel III resta attaché. Ou pour de fort longs déplacements en Italie ou bien à l’étranger. Ce qui reste de leur présence symbolique dans la ville est assez maigre en comparaison des marques de l’Église, ou de l’histoire de Rome, à l’exception du mastodontique monument à Victor-Emmanuel II, décrié et polysémique. Donc, si l’on se place du point de vue de ce qui reste de la dynastie, on pourrait trop vite conclure à un échec de l’enracinement des souverains dans Rome. Mais ce serait oublier des traces aujourd’hui disparues de l’attachement des Romains à leur roi et surtout à Marguerite. Les manifestations fréquentes face au Quirinal, en l’absence d’autre représentation symbolique des souverains, les traces d’attachement à la monarchie, les émotions fortes soulevées par la mort de Victor-Emmanuel II ou l’assassinat d’Humbert Ier, en 1900, tout ce qui fait qu’une population fait sienne de nouveaux arrivés, sans compter l’élargissement de la Cour sont à notre avis une marque de l’existence d’une Rome des Savoie. Pour l’aristocratie romaine, de plus en plus prête à ouvrir ses palais – quand ce n’était à vendre ses villas aux spéculateurs -, pour une bourgeoisie de commerçants qui profitait autant des pélerins que de l’explosion démographique de la ville umber-tienne, pour les fonctionnaires souvent venus du Piémont (les Monsù Travet) attachés à la dynastie, et même pour le popolino romain qui, de plus en plus nombreux, participait aux différentes festivités autour de la monarchie, il y eut bien une Rome des Savoie.
Notes de bas de page
1 A. Caracciolo, Roma capitale dal Risorgimento alla crisi dello Stato liberale, Rome, 1956.
2 On renverra pour ces aspects à F. Chabod, Storia della politica estera italiana dal 1870 al 1896, 2 vol. , Rome-Bari, 1976 (3e éd.), vol. 1, p. 304 sq. ; C. Brice et P. Boutry, « Du spirituel au temporel, renaissance d’une capitale : Rome italienne » dans C. Nicolet, J. Ch. Depaule, R. Ilbert, (dir.), Mégapoles méditerranéennes, Paris, 1999, pp. 351-375.
3 Voir M. De Nicolo, La prefettura di Roma (1871-1946), Bologne, 1998.
4 Sur les couvents expropriés en 1870, voir C. Pavone, « Alcuni aspetti dei primi mesi di governo italiano a Roma e nel Lazio », dans Archivio storico italiano, CXV, 1957, pp. 299-346 ; CXVI, pp. 346-380 et F. Bartoccini, Roma nell’Ottocento, 2 vol. , Bologne, 1988.
5 M. Castelli, Carteggio politico (édité par L. Chiala), Turin, 1891, tome 2, p. 508. Lettre de Castelli à Dina, Moncalieri, 13 juillet 1871.
6 Archivio di Stato di Torino, Primo versamento, Legato Umberto II, mazzo 15, fasc.10.
7 Même si la Couronne décida de faire l’acquisition de terrains autour de Torvaianica près de Rome pour en faire des réserves de chasse...
8 P. G. Camaiani, « Castighi di Dio e trionfo della Chiesa. Mentalità e polemiche dei cattolici temporalisti nell’età di Pio IX », dans Rivista storica italiana, anno LXXXVIII, fasc. 1, 1976, pp. 721-722.
9 Voir A. Petrucci, Jeux de lettres. Formes et usages de l’inscription en Italie (11e-20e siècles), trad. frse, Paris, Éditions de l’E.H.E.S.S., 1993.
10 G. Manfroni, Sulla soglia del Vaticano (1870-1901), dalle memorie di Giuseppe Manfroni, Bologne, 1920, tome 1, p. 73.
11 Iscrizioni della città di Roma dal 1871 al 1920, raccolta di Luigi Huetter, Rome, 1959, tome 2, p. 323 sq.
12 Ainsi, jusqu’à la guerre de Libye, il fut interdit d’exposer le drapeau italien dans les églises, même s’il s’agissait d’une messe à caractère militaire destinée à honorer le souvenir des morts. D’où, durant la fête du Statuto, l’usage de la messe militaire en plein air dite par un chapelain militaire. Pour une approche plus exhaustive, voir G. Formigoni, « Simboli religiosi e tricolore nel movimento cattolico dall’unità alla conciliazione », dans Gli Italiani e il tricolore. Patriottismo, identità nazionale e fratture sociali lungo due secoli di storia (dir. F. Tarozzi et G. Vecchio), Bologne, 1999, pp. 263-293, ainsi que L’Italia dei cattolici. Chiesa e nazione dal Risorgimento alla Repubblica, Bologne, 1998.
13 Archivio di Stato di Roma, Questura di Roma, busta 8, fasc. 36.
14 Id.
15 G. Martina, Pio IX (1867-1878), Rome, 1990.
16 U. Pesci, I primi anni di Roma capitale, 1870-1878, Rome, Milan, Pise, 1907, p. 91.
17 Voir E. Morelli, « Il Palazzo del Quirinale da Pio IX a Vittorio Emanuele II », dans Archivum Historiae Pontificiae, 8, 1970, pp. 239-300.
18 Voir l’article de C. M. Fiorentino, « La corte e la monarchia dei Savoia in età liberale (1861-1900). Fonti a stampa e osservazioni bibliografiche », dans Annali di storia moderna e contemporanea, 4, 1998, pp. 427-443. Cette recension est une première étape d’un travail sur la Cour à la période libérale.
19 U. Pesci, op. cit., p. 64.
20 U. Pesci, op. cit., p. 65.
21 Sur la Cour, on dispose encore de relativement peu de travaux. Pour un premier jalon, voir C. Fiorentino, art. cit.
22 M. Mureddù, Il Quirinale del re. Milan, 1970.
23 C. Casalegno, La Regina Margherita, Turin, 1956, p. 64.
24 P. Vasili (pseudonyme de J. Adam), Roma umbertina, Rome, rééd., 1968. Voir sur la Cour, E. Perodi, Roma italiana, 1870-1895, édité par B. Brizzi, Rome, 1980 (1896), ainsi que C. Hugo, Rome en 1886, Rome, 1886.
25 A. Guiccioli, Diario di un conservatore, Rome, 1973, p. 93 (14 février 1882).
26 U. Pesci, op. cit., p. 537.
27 G. Manfroni, op. cit., vol. l, p. 86.
28 Pour tous les épisodes cf. U. Pesci, op. cit., pp. 534-580.
29 F. Luciani, « La "Monarchia popolare". Immagini del re e nazionalizzazione delle masse negli anni della Sinistra al potere », Cheiron, a. XIII, 25-26, 1997, pp. 141-189 et C Brice, « La monarchie, un acteur oublié de la nationalisation des Italiens ? » Revue d’histoire moderne et contemporaine, 45-1, janvier-mars 1998, pp. 149-169.
30 G. Manfroni, op. cit., vol. 1, p. 72.
31 Archivio storico dei Carabinieri, busta 93, rapport du 18 novembre 1878 du Commandement de Rome.
32 U. Pesci, op. cit., p. 644.
33 G. Manfroni, op. cit., vol. 1, p. 203.
34 U. Pesci, op. cit., p. 547.
35 U. Pesci, op. cit., p. 69.
36 G. Manfroni, op. cit., vol. 1, p. 377.
37 Voir, entre autres, B. Tobia, Una patria per gli Italiani, Rome-Bari, 1992.
38 G. Martina S. I, La morte di Vittorio Emanuele e di Pio IX, Rome, 1978, p. 24.
39 Voir G. Martina S. I, La morte di Vittorio Emanuele e di Pio IX, op. cit., p. 13, ainsi que F. Bartoccini, La Roma dei Romani, Rome, 1971.
40 Cité dans P. Pirri, « Pio IX e Vittorio Emanuele II dal loro carteggio privato », dans Miscellanea Historiae Pontificiae, XXV, vol. III-II, 1961, p. 444.
41 Voir Pio IX e Vittorio Emanuele dal loro carteggio privato negli anni del dilaceramento (1865-1878), a cura di Paolo della Torre, Rome, 1970, p. 67.
42 G. Martina, S. I, « Pio IX (1857-1878) », dans Miscellanea Historiae Pontificiae, 58, 1990, p. 515. Sut ce problème, voir A. Ricci, « Una morte di Stato. La relazione del capellano maggiore Valerio Anzino sulle ultime ore del re Vittorio Emanuele II », in Contemporanea, anno III, n° 2, aprile 2000, pp. 275-289 avec le texte de la relation écrite par Anzino.
43 Archivio segreto vaticano (ASV), Affari Ecclesiasticistraordinari (AAEESS), Italia, pos. 247, fasc. 57-58 et 59. ainsi que G. Martina, op. cit., p. 516 sq.
44 Dalla circolare della Segretaria di Stato : « non si è inteso di vietare assolutamente nella presente congiuntura funzioni di esequie, purché non si pretende di dare alle medesime il carattere di funzione politica » : ma non sembra opportuno che Tautorità ecclesiastica ne prendesse l’iniziativa o vi prendesse parte » dans P. Pirri, « Pio IX e Vittorio Emanuele II dal loro carteggio privato », dans Miscellanea Historiae Pontificiae, XXV , vol. III-II, 1961, p. 441.
45 Voir U. Pesci, op. cit., p. 601 sq.
46 Cesare Correnti a Crispi, Rome, s. d. in F. Crispi, Carteggi politici inediti, 1860-1900, a cura di T. Palamenghi Crispi, Rome, 1912, pp. 348-349.
47 Archivio capitolino, Gabinetto del sindaco, posizione 70, anno l890.
48 Voir I. Porciani, La festa della nazione, Bologne, Il Mulino, 1997.
49 I. Porciani, op. cit., pp. 152-153.
50 I. Porciani, « Lo Statuto e il Corpus Domini. La festa nazionale dell’Italia liberale », dans Il Mito del Risorgimento nell’Italia unita, Actes du colloque de Milan, 9-12 novembre 1993, Il Risorgimento, a. XLVII, n° 1-2, 1995, pp. 124-149, et I. Porciani, « Stato, statue, simboli : i monumenti nazionali a Garibaldi e a Minghetti del 1895 », in « Storia, Amministrazione, Costituzione », Annali ISAP, 1, 1993, p. 220 sq.
51 Voir C. Brice, Monumentalité publique et politique à Rome. Le Vittoriano, Rome, École Française de Rome, 1998 ; B. Tobia, L’Altare della Patria, Rome-Bari, 1998.
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