Introduction générale
Sources et données en histoire et en économie
p. 7-20
Texte intégral
Historique et contexte de la recherche
1Le but de l’école d’été tenue à Saint-Lambert-des-Bois et du séminaire qui l’a suivie était de réfléchir collectivement aux notions de sources et de données ainsi qu’à la conception différente qu’historiens et économistes pouvaient en avoir. Pour des doctorants souvent en cours de rédaction, cet exercice de réflexion ne pouvait qu’être utile, voire salutaire, la question des sources et celle de leur transformation en données étant centrale dans la constitution de l’histoire ou de l’économie comme sciences.
2La question initiale est, pour les économistes, de savoir d’où proviennent les données chiffrées qu’ils traitent : comment, et selon quels protocoles, ont-elles été rassemblées et traitées pour constituer les tableaux ou séries qu’ils manient ? Indices, pourcentages et autres produits sont déjà les résultats d’analyses, de mise en ordre et de calculs et proviennent d’une élaboration d’un matériau brut1. Pour les historiens, habitués dès le début de leur formation à considérer que la connaissance qu’ils ont du passé se fait par traces, la question des sources est consubstantielle à l’existence même de leur discipline et c’est autour de leur traitement que l’histoire a constitué autrefois sa vocation d’unification des sciences sociales autour d’elle-même2. Les positivistes, les tenants d’une histoire méthodique, pour lesquels l’histoire n’est pas une science mais un procédé de connaissance, une méthode qui privilégie le raisonnement pour arriver aux faits mettent évidemment la question des sources au centre de leurs préoccupations. Pour eux, la connaissance historique est toujours indirecte, les faits n’étant plus eux-mêmes observables et étant passés le sont définitivement sans pouvoir être réitérés3. Il y a cependant des procédures de connaissance qui font appel à des formes d’observation dérivées de l’observation empirique.
3Tel est le cas de l’histoire dite sérielle qui a mis au point des cheminements méthodologiques permettant d’observer, à travers la mise en nombre et la mise en courbes, la réalité du passé. En France, les méthodes consistant à ramener un phénomène (par exemple le développement des chemins de fer) à une série d’équations dont on peut faire varier les paramètres pour trouver ceux qui sont réellement signifiants n’ont jamais vraiment pris. L’analyse contrefactuelle qui proposait d’examiner les variations des phénomènes historiques en modifiant les variables d’équations n’a eu aucune retombée durable dans notre pays malgré les efforts des historiens de l’économie contemporaine4. La cliométrie, du moins dans ses formes extrêmes, n’a pas eu non plus grand succès du côté des historiens : la recherche du PIB d’un pays à travers la très longue durée (du vie siècle à nos jours) n’a pas convaincu, pour des raisons qui n’ont jamais été véritablement débattues au demeurant. Nos collègues anglo-saxons sont, pour leur part, plus sensibles à l’idée d’une mathématisation intégrale des données de l’histoire économique et l’analyse du PIB anglais du xie siècle à travers les données du Domesday Book ne choque pas5. Cela dit, une forme d’histoire qui construit des indicateurs réputés valides à travers la très longue durée (deux millénaires) pose véritablement le problème de la description du changement, qui devient imperceptible dès lors que variables et paramètres sont réputés faire partie des invariants de l’histoire. Si la méthode semble se rapprocher des méthodes expérimentales et traiter l’histoire des sociétés humaines comme une science de la nature, à l’aide d’indices stables, elle pose cependant de redoutables défis épistémologiques et notamment celui de savoir comment un système peut acquérir des propriétés neuves6.
4C’est parfaitement conscients de ces difficultés que les organisateurs, profitant de la présence dans une même université d’équipes d’économistes intéressés par la méthode historique et les problèmes épistémologiques et d’historiens versés au rebours dans l’étude de l’histoire économique, ont décidé de réunir cette école d’été et le séminaire qui l’a suivi.
5Il s’agissait là de questions anciennes, mais toujours centrales dans les pratiques de métier, portant sur le mode de connaissance en histoire et en économie et la discussion a tourné autour de questions traditionnelles mais essentielles : qu’est-ce qu’un fait, un document, une source, une donnée, une archive ? Le fait peut-il avoir le même statut en Histoire et en Économie, et qu’est-ce d’ailleurs qu’un fait scientifique pour un historien et pour un économiste ?
6Comment ces différents objets s’articulent-ils les uns sur les autres ou les uns par rapport aux autres ? Comment arrive-t-on à construire des descriptions, à élaborer des analyses et à produire des résultats qui permettent d’expliquer la réalité passée ou présente ? Une même méthodologie peut-elle être commune aux deux disciplines ? Le questionnement est celui proposé par l’école méthodique, critiqué par Simiand et l’école sociologique. Il a été profondément modifié par les pratiques des historiens des années 1940 à 1960 qui, suivant C.-E. Labrousse, ont placé les nombres mis en série au centre de leur réflexion et ont voulu de la sorte transformer le savoir historique en y introduisant la question de la mesure des phénomènes sociaux. Après les années 1960, la discipline historique a pris d’autres voies, donnant le primat à une anthropologie davantage culturelle que matérielle, s’orientant en tout cas, sauf dans quelques secteurs spécifiques, vers des méthodes qui n’impliquaient pas nécessairement le recours aux chiffres et aux statistiques7. On n’espérait pas renouveler ici le questionnement théorique mais préciser ce que, désormais, nous entendions par fait, expérience, vérification, test, régularités dans leur rapport à des constructions problématiques et comment cela s’appliquait dans les études doctorales8.
7Cette entreprise correspond aussi à des nécessités et à des logiques disciplinaires. La réflexion sur la constitution des statistiques à partir desquelles s’opèrent les calculs est un aspect du problème. Les données des économistes ont une histoire et, reposant sur l’enregistrement aussi bien que sur l’enquête, sont profondément insérées dans le tissu social comme elles sont intégrées aussi dans le mouvement des idées qui traverse la science économique, depuis les arithméticiens politiques jusqu’à Le Play et, au xxe siècle, Keynes ou Hayek. Elles font partie du dispositif de contrôle et de mise en sécurité sur lequel reposent nos États et, au bout du compte, l’équilibre de nos sociétés9. Elles participent à la recherche des informations nécessaires au fonctionnement de l’État et aux processus de prise de décision. Or, précisément, l’histoire est, dès son origine, liée à des dispositifs de contrôle du social par la restitution du passé : le temps et l’histoire, constitutifs de la conscience qu’ont d’elles-mêmes les sociétés humaines, sont des objets dont l’écriture comme l’étude et l’enseignement sont au cœur des dispositifs idéologiques qui les régissent et les font tenir debout. L’introduction des nombres cependant est récente et a visé à transformer le statut de ce savoir particulier, le faisant passer d’un exercice à visées morales et politiques à une science véritable susceptible de rendre compte du réel dans tous ses aspects. Encore les nombres ne sont-ils pas toujours considérés comme indispensables à une description et à une explication convenable de la réalité, l’histoire restant une discipline de mots dont les rapports avec le récit sont toujours importants.
8Ce sont là des enjeux dont chacun sait la portée immédiate dans notre société. Ceux-ci ont été récemment rappelés et précisés durant ces dernières années non seulement autour des débats portant sur le thème des relations entre l’histoire et la mémoire, mais aussi par une réflexion plus approfondie sur les techniques de gouvernement qui donnent une place privilégiée à la question des archives et, partant, à celle du statut des sources en histoire10. De façon plus quotidienne, la récurrence des débats sur l’enseignement de l’histoire en France, plus nombreux et violents, montre l’importance de cette question. Au demeurant, l’économie n’échappe pas à ces pressions, les critiques du patronat français sur la structure de l’enseignement de l’économie dans les lycées français montrant bien qu’il y a là un enjeu à la fois pratique (disposer d’un personnel dont la formation réponde aux besoins formulés par les entreprises) et idéologique, l’un des enjeux étant que la critique de l’économie politique marxienne ou marxiste soit reléguée au rang des accessoires démodés, inutiles et dangereux.
Archives, documents, sources, données
9Je voudrais, pour compléter la présentation de ce travail collectif, présenter quelques éléments de notre position à l’égard de notre objet. Les notions d’archives, de documents et de sources ont été abondamment travaillées ces dernières années et se trouvent au cœur de ce que l’on a appelé le « tournant documentaire » de l’historiographie11.
10Dès l’instant où nos sociétés ont placé l’écriture au cœur de leurs pratiques de gouvernement des hommes comme elles l’ont aussi mise au centre de l’administration des choses, pour reprendre une vieille formule, les traces documentaires, sous toutes leurs formes, doivent obligatoirement être au centre de la réflexion, qu’il s’agisse de science historique ou de science économique : les documents sur lesquels s’appuie le raisonnement sont des productions de l’expérience ou de la réflexion conceptuelle sur l’objet étudié. Ils ne sont jamais vraiment donnés, en fait : il faut d’abord les rechercher, les rassembler, les structurer en corpus, puis les interpréter. Ce travail n’est jamais définitif, les mêmes documents étant susceptibles d’une relecture faite en fonction des évolutions des problématiques. Un corpus fini peut ainsi être susceptible d’interprétations infinies. L’observation ou la lecture des documents n’est jamais totalement pure ou objective : le savant va à l’expérience avec tout son savoir, mais aussi avec tous ses préjugés qui préconditionnent son observation et les traitements qu’il fait subir aux données qu’il recueille. Lui-même, inséré dans une société, originaire d’un lieu et vivant à une certaine époque, ne peut pas s’en affranchir et ses questionnements sont ceux de son temps. Ils reflètent les préoccupations d’un moment, mais aussi l’évolution d’un savoir toujours en construction, dont l’évolution rend possible l’émergence de nouveaux problèmes. Depuis les années 1920 ou 1930, les faits, qui doivent cependant toujours être établis, sont en effet moins importants que les problèmes qu’ils permettent de poser et de résoudre : c’était là le cheval de bataille de Bloch et de Febvre, militant pour une histoire-problème contre une histoire-récit dite historicisante12. Le primat du problème concerne aussi bien l’historien que tout praticien des sciences sociales. Se libérer de ces préjugés et de tout ce qui contribue à construire socialement le résultat demande un long effort. Comme l’écrivait au début du siècle dernier François Simiand : « il y a un travail un et inséparable de recherche et d’élaboration, d’analyse et de constitution, d’information positive et de mise en œuvre inductive et systématique » à effectuer afin de parvenir à une connaissance qui soit véritablement scientifique13. Encore faut-il d’abord construire une méthode qui donne aux faits un statut permettant d’élaborer ensuite une véritable démarche scientifique. Il ne suffit pas de juxtaposer chronologiquement des faits, même vrais, pour obtenir une explication qui éclaire véritablement la réalité.
11L’un des axes utilisés pour ce faire est une critique renouvelée des sources. La diplomatique, conçue comme une science permettant l’établissement du vrai et du faux, de l’authentique et de l’inauthentique, du sincère ou du falsifié, a été le point de départ du mouvement qui a permis à l’histoire de se constituer en science en fixant les règles formelles de l’étude des documents ainsi que celle des conditions de possibilité de leur utilisation. Reposant sur la matérialité des documents autant que sur leur contenu, elle a ainsi servi de matrice à la méthode historique, lui permettant de construire un régime de preuve apte à lui faire quitter le seul registre du récit à visées édifiantes, moralisatrices ou politiques, pour accéder à un autre où le temps est pleinement inséré dans la connaissance du réel. La façon dont on accède à la connaissance historique, en s’appuyant sur des traces et des empreintes14, par opposition au savoir construit sur des expériences réitérables, est cependant un problème qui devrait éloigner l’histoire des autres sciences sociales et en particulier de l’économie.
12Les faits économiques sont mesurés par toutes sortes d’intervenants et d’administrations dont la fonction est de produire des nombres pour contrôler des processus (la production de biens) ou pour saisir des réalités (le chiffre du chômage). Censés encadrer la prise de décisions, ils ne parviennent pas cependant à rendre compte complètement des réalités en particulier sociales : les différentes courbes permettant d’évaluer l’évolution du nombre des chômeurs à l’intérieur d’une société forment de ce point de vue un exemple caractéristique sinon éclairant15.
13Les faits économiques observés par les historiens sont, quant à eux, reconstruits ou reconstitués à coups de maniement d’archives. Ils ne sont pas différents par nature de ceux étudiés par les économistes : dès l’instant que les chiffres entrent en jeu, le chercheur met de côté l’individuel pour chercher le général à travers le traitement d’indices ou de moyennes. Il est possible, par jeu, et cela a été fait, de reconstituer ainsi l’individuel : c’est alors d’individus sans chair ni conscience, sans histoire en fait, qu’il s’agit. La statistique peut leur rendre une histoire, du simple fait de leur historicité et de la puissance descriptive des moyennes et aussi du fait que simplement ils ont laissé une trace et une seule, celle de l’état civil qui donne leur nom, leur date et lieu de naissance et de mort16. Il s’agit cependant d’une histoire fictive qui n’est articulée sur aucun document reflétant l’existence singulière de l’individu qui perd alors toute identité et voit sa vie réduite à une succession de moyennes qui décrivent du vraisemblable et du possible et non à du réel. Le nombre, ici, créant de l’abstraction masque l’individu concret.
14La question de l’utilisation des statistiques par les historiens pour décrire le réel est un autre problème. Si la science économique récente repose en grande partie sur la mesure des phénomènes, les historiens pour leur part éprouvent quelque difficulté à concevoir la nécessité d’ajouter cette information supplémentaire, le nombre, à celle dont ils disposent déjà. Pourtant, situer un fait dans l’espace et dans le temps, c’est déjà introduire des paramètres numériques dans la réflexion, simplement en le dotant de coordonnées spatiales et temporelles, elles-mêmes susceptibles d’être l’objet d’un traitement statistique, même élémentaire, sous la forme, de recherche de régularités, par exemple dans la récurrence des donations faites à un monastère, soit par un individu, soit par les membres d’une communauté villageoise17.
15L’expérience que nous avons menée autour de l’économie et de l’histoire repose pour beaucoup sur la possibilité de construire un langage commun, c’est-à-dire, en fait, de rechercher à travers nos deux disciplines s’il était possible de construire, comme l’a écrit A. Guerreau voici plus de trente ans, une analyse formelle et numérique des phénomènes sociaux, ce qui serait la base de toute convergence disciplinaire18 : on a déjà tenté des expériences de cette nature sans peut-être les théoriser suffisamment, nous y reviendrons un peu plus loin : le dialogue entre histoire et économie existe et passe par des réalisations communes qui, franchissant la barrière des disciplines permet de retrouver sinon l’intégralité du moins une grande partie des buts poursuivis par les sciences sociales19.
16Il n’en demeure pas moins que la constitution du groupe de Saint-Lambert, des historiens spécialisés en histoire économique et des économistes, de même que les points qui ont été discutés continuent de soulever un certain nombre de problèmes qui doivent être sans cesse débattus. À la question de savoir de quoi sont faites les statistiques, qu’elles soient utilisées par les historiens ou par les économistes, correspond celle de savoir ce que sont les phénomènes que l’on prétend mesurer, les faits auxquels on voudrait donner un statut scientifique20. Il faut pour cela revenir sur des notions qui peuvent, à certaines conditions, être communes aux historiens et aux économistes, comme d’ailleurs à l’ensemble des sciences de l’homme. Je veux désigner ici, au-delà de la question des faits, les documents, textes, sources, données, archives qui forment le lot quotidien des historiens mais qui sont aussi une préoccupation des économistes.
L’évident et l’invisible
17L’historiographie de ces dernières années a insisté sur la construction sociale et culturelle que sont les documents mis à la disposition des chercheurs par les institutions que chaque pays ou chaque communauté entretient (ou pas)21. Écrire, c’est-à-dire laisser une trace sur un support, procède en effet d’une prise de décision dont les raisons profondes peuvent être étonnamment complexes et ne vont assurément pas de soi. L’écriture peut être, comme le disait C. Lévi-Strauss dans Tristes Tropiques, un moyen d’assurer la domination d’un chef sur un groupe en convoquant la magie de signes compris de quelques-uns seulement. On peut aussi écrire pour se souvenir et, en particulier, se souvenir des faits renvoyant à des quantités, à des volumes et à des valeurs, ou fixant des obligations. Les tablettes mésopotamiennes servent ainsi de support à une mémoire d’interactions souvent simples, mais impliquant un accord entre les parties comme le rappelle Louise Quillien22. Ces documents décrivant les transactions dont il faut faire mémoire pour éviter les fraudes et pour contrôler leur bonne exécution ne doivent pas nécessairement être conservés. Une fois les produits rapportés au temple et l’obligation mentionnée remplie, il faut de bonnes raisons pour conserver les documents. Dans le cas des temples mésopotamiens, cela implique la construction d’espaces de stockage importants étant donné le volume physique de documents produits ; cela implique aussi des procédures de rangement, l’élaboration de cadres de classement nécessaires à la recherche de ce que l’on a décidé de conserver. Ce problème est bien connu des médiévistes qui réfléchissent depuis longtemps à la question de la constitution des archives comme espaces de conservation et de consultation23 et donc comme institutions qui déjà opèrent des tris, c’est-à-dire classent et mettent en ordre, rangent matériellement dans des sacs ou des armoires et, surtout, se dotent de procédures d’indexation et de guides afin de retrouver ce qui a été non pas simplement entreposé, mais rangé selon un ordre pensé qui n’est pas sans effet sur ceux qui ont à utiliser de tels instruments. Un grand nombre de faits, économiques ou non, ne donnent pas lieu à une mise en écriture et, au rebours, les traces écrites ne sont pas toutes destinées à la conservation et encore moins à une transmission. On pense ainsi à la multiplicité des transactions de la vie quotidienne qui, lorsqu’elles sont payées en numéraire, ne laissent pas de trace documentaire, du moins pas avant l’apparition des caisses enregistreuses et l’accroissement des exigences du contrôle fiscal. Les transactions plus importantes, qui impliquent la définition ou la transmission d’un droit sont, pour leur part, plus aisément conservées. Encore le sont-elles parfois pour des raisons adjacentes ou connexes au droit qu’elles documentent : détenir un diplôme impérial est, pour un monastère du haut Moyen Âge, un signe de prestige et de statut attestant de la réalité du lien entre le souverain et l’institution, et ce lien peut être plus important pour elle que le droit ou les biens donnés en cadeau24. De ce fait, les documents dérivés des archives, en particulier les cartulaires médiévaux qui sont souvent tout ce qui nous reste d’elles, doivent être examinés et compris en fonction des choix opérés par ceux qui les ont manipulés. Avant de devenir une source pour les historiens, ils ont exercé des fonctions multiples, ont servi à protéger des droits mais aussi à se souvenir du passé ou à le monumentaliser s’agissant de registres souvent épais, complexes à mettre en œuvre et coûteux à réaliser. Considérer un cartulaire simplement comme une carrière où l’on pourrait venir choisir ce que l’on veut en fonction du propos est, de ce fait, une erreur méthodologique. Il doit être considéré, en dehors de son contenu, comme une construction de l’esprit, comme un travail de reconstruction opéré par son ou ses auteurs et non pas comme un simple recueil de documents reflétant la structure des archives et où chacun pourrait piocher ce qui l’intéresserait.
18Les cartulaires constituent des cas extrêmes puisqu’ils sont par définition construits et qu’ils résultent d’une sélection ce qui signifie choix et classement. Un cas plus ordinaire est constitué par le cadre de classement des archives, qui s’interpose comme une interface nécessaire entre l’utilisateur ou le lecteur et la documentation qu’il utilise. Les documents sont accessibles selon un ordre qui a été pensé par un archiviste ou un gestionnaire en fonction de visées qui sont souvent remarquablement loin des préoccupations de l’historien. La collecte des données brutes par une entreprise en guerre soumise au double contrôle de l’administration civile et de l’autorité d’occupation n’est pas du tout une affaire simple, dans la mesure où il faut satisfaire à des injonctions contradictoires induites par les exigences allemandes, celles du rationnement imposé par Vichy et la recherche des moyens de faire survivre malgré tout l’entreprise. Ces injonctions paradoxales cachent, sous l’apparente et froide objectivité des chiffres mis en tableau, des visées pratiques vitales pour les dirigeants comme pour les consommateurs. Sans que les statistiques soient truquées, elles sont alors organisées de telle sorte que ces impératifs contradictoires soient satisfaits dans la plus grande mesure possible25.
19Avant de pouvoir considérer les documents comme fournissant des données s’imposant à l’observation, il faut donc d’abord élaborer et retracer le cadre à l’intérieur duquel ces documents ont été recueillis et classés. Le ou les collecteurs d’informations ont, dans la plupart des cas, suivi dans leurs dépouillements le cadre que leur fournissait l’ordre établi par les archivistes. Les données ne sont donc pas là, coulant de source au sens propre. Les documents ne deviennent donnée qu’au prix d’une analyse qui rende compte du comportement de ceux qui les ont collectés et leur ont donné la forme sous laquelle ils nous sont parvenus, chartrier monastique ou seigneurial, fonds recomposé par le travail des archivistes, transformation en séries statistiques. Le travail d’élaboration qui suit est un travail de mise à distance du cadre de classement des archives (ou du cartulaire) afin de transformer le document brut en une matière mesurable, une matière apte à soutenir la description chiffrée. Il y a donc loin de la production du document à la possibilité de le mobiliser.
20Prenons un exemple, dérivé de l’article de P. Lefeuvre et qui est un cas désormais classique26. Le fonds appelé Diplomatico de l’Archivio di Stato de Florence rassemble et met en ordre strictement chronologique l’ensemble des chartes et documents conservés dans les monastères toscans et transférés à l’institution au début du xixe siècle au moment de leur suppression. Il en résulte une série documentaire impressionnante par sa masse – plusieurs dizaines de milliers de documents – et sa continuité, du viiie au xixe siècle. Utiliser ce fonds de façon indiscriminée précisément comme une gigantesque série homogène et continue est impossible. D’abord, le fonds est hétérogène, une assez vaste gamme typologique de documents y étant représentée. Ensuite, les documents proviennent d’un ensemble d’institutions qui toutes ont leurs spécificités et leur histoire, y compris archivistique : on ne conservait pas la même chose dans tous les monastères et les techniques de conservation pouvaient varier d’un établissement à l’autre. Dans ces conditions, établir des classes qui permettent de comparer les objets n’est pas possible : il faut d’abord briser l’unité factice du fonds pour restituer les « unités de production et de conservation », celles instituées par les monastères pris individuellement qui seules peuvent donner lieu à des traitements statistiques. Sans cette précaution, on créerait une catégorie factice sans existence réelle ni pertinence historique et l’on écrirait par conséquent l’histoire d’un objet inexistant, celui du monachisme toscan, alors que seuls les établissements monastiques doivent être pris en considération en tant que sujets d’histoire, du moins tant qu’il n’existe pas d’ordre structuré, c’est-à-dire jusqu’au xiie siècle.
21De ces archives, donc, il faut examiner les documents. Les règles qui s’appliquent à leur critique interne ou externe sont bien connues et sont rappelées à tous les historiens. La matière et la forme comptent. Un document, c’est d’abord cela, de la pierre gravée, du parchemin ou du papier sur lequel sont couchés les mots de la transaction, quelle qu’elle soit, un support qui est préparé, avec plus ou moins de soin, une page réglée ou non et sur laquelle les lignes s’étirent de manière plus ou moins régulière. S’il s’agit d’un registre, sa décomposition en cahiers comportant un certain nombre de feuillets est un fait essentiel. Les cahiers sont des unités qui peuvent être déplacées par accident ou volontairement au cours d’une reliure. L’ordre dans lequel apparaissent les documents ou les notices n’est donc pas nécessairement le même que celui de la composition de l’ouvrage. Il faut en tenir compte : le manuscrit, quel qu’il soit, a une histoire. Il peut être démembré, aussi, et ses feuillets remployés comme couvertures. L’encre utilisée, la main qui a écrit tout cela aussi est un objet d’histoire et qui n’est pas secondaire, comme ne sont pas non plus secondaires les ajouts, annotations et corrections qui peuvent avoir été faits longtemps après27. Le document a également un contenu dont la critique interne examine la forme afin de le dater et de le localiser avec précision, il est rédigé selon un certain ordre, comportant des passages obligés qui en assurent la validité, laquelle est confirmée par les signes d’authentification, présents et utiles s’il s’agit d’originaux ou de copies effectuées par des notaires et pouvant servir de preuves en justice, inutiles s’il s’agit de documents internes à une institution, comme souvent les comptabilités.
22Cela n’empêche pas que ces dernières doivent suivre une forme. Même : le développement de l’État et la recherche de données homogènes et comparables amène à modifier les techniques de collecte. Alors que les enquêteurs médiévaux, lorsqu’ils cherchent à établir des droits ou les montants de redevance, ont une assez large marge de manœuvre dans l’élaboration et surtout la mise en œuvre de leur questionnaire, il n’en va plus de même à l’époque moderne et contemporaine où il s’agit de répondre à des questionnaires précisément destinés à élaborer des statistiques. Le recours à des formulaires imprimés dans lesquels il faut remplir des cases et compiler des questionnaires répond à ces exigences28.
23Lire et transcrire, pour un historien, cela revient à collecter des données brutes. Il faut ensuite les collationner, c’est-à-dire les disposer différemment, soit en classant des fiches, soit en construisant une base de données qui permette de parvenir plus rapidement à un résultat plus élaboré. Cette étape implique de décomposer les informations données par le document d’archive en une multitude de rubriques, de catégories ou de classes qui formeront alors des données dont le maniement permettra de compter et de procéder aux calculs, parfois élémentaires, parfois complexes, sur lesquels pourront reposer l’explication du problème posé puis la description de la réalité que l’historien veut atteindre.
24Pour l’historien de l’économie, le traitement des informations tirées des documents doit avoir pour but la recherche de régularités, le classement des données à l’intérieur d’ensembles homogènes qui permettent d’effectuer des comparaisons, l’établissement d’hypothèses vérifiables ou réfutables. On est loin alors du simple établissement de faits à agencer les uns par rapport aux autres. On n’est pas non plus dans une logique de récit, mais dans un autre rapport à la vérité qui passe par la recherche d’indicateurs qui permettent de décrire le réel passé par les nombres. Les phénomènes sociaux se mesurent, en effet, et si l’on ne peut réduire leur description à cela, la mesure est toutefois une nécessité pour leur intelligibilité.
25Les économistes doivent résoudre des problèmes de même nature lorsqu’ils s’interrogent sur la question de la provenance des données qu’ils manipulent et à partir desquelles ils établissent leurs calculs. L’introduction de Michel Armatte à la seconde partie montre toute la complexité des questions qui se posent à eux mais demeurent cependant souvent informulées. Les données sont, pour beaucoup d’économistes, du déjà-là, sur la pertinence de quoi il n’y a pas lieu de s’interroger. Les conditions de production des chiffres maniés ne sont pas ou rarement mises en cause. Les chiffres relèvent de l’évidence. Ils sont pourtant eux-mêmes des produits parfois assez complexes et ne répondant pas toujours aux mêmes interrogations et aux mêmes nécessités. Or, le travail de réflexion sur la construction des données n’est pas toujours satisfaisant : la question de la mesure du chômage en France, qui produit deux chiffres selon que l’on a recours aux statistiques de l’Insee ou à celles du ministère de l’Emploi, montre qu’une même réalité peut être perçue différemment en fonction des raisons pour lesquelles on en mesure les éléments. L’histoire des statistiques du commerce intérieur de la France après la Seconde Guerre mondiale montre également à quel point la condition d’élaboration des données est aussi socialement et, dans ce cas, politiquement déterminée. Ce sont en effet les grands distributeurs qui, en l’absence de chiffres fournis par l’État, ont élaboré les instruments de mesure et les indices qui servent à mesurer et à estimer le commerce intérieur. Ces mêmes chiffres ont ensuite servi de point d’appui aux décisions politiques, sans que l’on ait beaucoup réfléchi au simple fait que la provenance des statistiques devait avoir pour effet presque mécanique, sans que cela ait été nécessairement voulu, d’orienter ces mêmes prises de décision. Il y a donc, du point de vue des économistes, des évidences rarement remises en cause alors qu’elles cachent du réel. Le travail sur les sources demeure souvent invisible. Pour les historiens, en revanche, pour qui le travail sur les sources est consubstantiel à leur métier, rien n’est évident mais rien non plus n’est invisible, parce que tout est construit. Cette constatation, qui est à l’origine de la possibilité même d’écrire l’histoire, demeure cependant enfouie pour beaucoup d’économistes : la confrontation entre historiens et économistes avait pour but de préciser quelles étaient les attitudes mentales à l’égard de leurs données qui devraient orienter aussi le travail de ces derniers. Un regard critique sur les chiffres implique une réflexion sur les sources qui permettent de produire des données afin de savoir simplement ce l’on fait en calculant. L’expérience de la critique doit autoriser une meilleure compréhension des phénomènes décrits, ainsi qu’une description plus aiguisée du réel.
Histoire et économie
26La question centrale posée par une entreprise de cette nature est celle de la possibilité de faire converger deux disciplines à l’intérieur du cadre proposé par les sciences sociales. L’expérience, menée au niveau des études doctorales, c’est-à-dire au moment où se cristallisent chez les chercheurs leurs modes de pensée, est, quant à elle, nouvelle et a été en l’espèce, nous l’espérons, formatrice. Elle a en tout cas été menée dans l’esprit de confronter des méthodologies ainsi que des épistémologies différentes à travers l’exposé de pratiques en cours de construction.
27La démarche a été construite en trois temps, qui constituent les trois parties inégales de cet ouvrage. Nous voulions voir comment, dans l’une et l’autre discipline, on passait de l’observation du réel à sa mise en écriture par la médiation de l’élaboration du document, quelle qu’en soit la nature. Cette réflexion converge avec les directions de travail prises par les médiévistes qui accordent une attention renouvelée à la matérialité du document, c’est-à-dire aux conditions concrètes de son élaboration ainsi qu’à celles de sa conservation et de sa transmission (I. Construire les données : acteurs et processus).
28D’autre part, sachant bien que la réalité n’est pas épuisée par la description économique, nous avons voulu insister sur la contextualisation, dans l’idée de renforcer l’importance de la temporalité dans les analyses que nous menions. L’idée sous-jacente est celle que la recherche de régularités rend difficile voire impossible la perception ou la mesure de changements structurels et l’introduction de nouveaux faits ou de nouveaux acteurs. Dans les optiques choisies par les uns comme par les autres, il s’agit de faire en sorte que les déterminants économiques soient considérés comme une part importante de la causalité historique, de l’apparition de phénomènes nouveaux voire de changements structurels. Importante mais bien sûr non exclusive (II. Contextualiser les données).
29Enfin se pose la question de savoir comment il est possible de passer du réel à sa représentation, de penser la réalité à travers les nombres recueillis ou plus souvent construits pour donner une explication aux phénomènes observés à travers la documentation. Une fois compris et intégré ce qui constitue le contexte, c’est-à-dire tout ce qui pourrait brouiller l’homogénéité des ensembles ainsi constitués, il reste à se servir des séries constituées pour donner une explication au réel. La question du nettoyage des fichiers et de l’élimination de tout ce qui est « en plus » est essentielle. Ce supplément est en effet traité comme du superflu, alors qu’il fournit au contraire les éléments explicatifs les plus importants, parce qu’il permet d’inférer les comportements sociaux en partant de la mesure de ceux-ci ou, du moins, de ce qui en est perceptible. C’est à des exemples développés autour de ce point qu’est consacrée la troisième partie de l’ouvrage (III. Sérier les données).
Notes de bas de page
1 Bonne position du problème, et résultats dans C. Diebolt, G. Franzmann, R. Hippe et J. Sensch, « The Power of Big Data : Historical Time Series on GermanEducation », Journal ofDemographic Economics, 2017, p. 1-48. Je remercie Agnès Gramain pour cette référence, l’article posant bien les problèmes communs auxquels sont confrontés ou peuvent être confrontés historiens et économistes. Il s’agit ici de donner une profondeur historique (deux cents ans de vie des institutions scolaires et universitaires allemandes) à une recherche statistique à visée économique.
2 Voir en dernier lieu sur cette question fondamentale, l’important article de J. Morsel, « Traces ? Quelles traces ? Réflexions pour une histoire non passéiste », Revue historique, 680, 2016, p. 813-868.
3 C. Seignobos, La méthode historique appliquée aux sciences sociales, Paris, 1901, p. 5-7 ; A. Prost, Douze leçons sur l’histoire, Paris, 1996, p. 64-67.
4 J. Heffer, « Une histoire scientifique : la nouvelle histoire économique », Annales. Économies, sociétés, civilisations, 32/4, 1977, p. 824-842.
5 N. Mayhew, « La richesse de l’Angleterre médiévale dans ses rapports à la masse monétaire », dans L. Feller, A. Rodriguez (dir.), Objets sous contrainte. Circulation des richesses et valeur des choses au Moyen Âge, Paris, 2013, p. 197-213 ; B. M. S. Campbell, « National Incomes and Economic Growth in Pre-industrial Europe : Insights from Recent Research », Quaestiones medii aevi novae, 18, Kings in Captivity. Macroeconomy. Economic Growth, 2014, p. 167-196.
6 Voir là-dessus J.-Y. Grenier, B. Lepetit, « L’expérience historique. À propos de C. E. Labrousse », Annales. Économies, sociétés, civilisations, 44/6, 1989, p. 1337-1360.
7 On pense ici à la sémantique historique qui, proposant une analyse formalisée des textes renouvelle assez profondément la lecture et l’interprétation des textes, même comptables : A. Guerreau, L’avenir d’un passé incertain. Quelle histoire du Moyen Âge au xxie siècle ?, Paris, 2001 ; on trouve un bon exemple des résultats de ces méthodes dans F. Madeline, Les Plantagenet et leur empire. Construire un territoire politique, Rennes, 2014.
8 J.-Y. Grenier, B. Lepetit, « L’expérience historique », art. cité.
9 M. Foucault, Sécurité, territoire, population. Cours au Collège de France (1977-1978), Paris, 2004.
10 Pour s’en tenir à quelques références importantes : É. Anheim, O. Poncet, « Fabrique des archives, fabrique de l’histoire », Revue de synthèse, 5, 2004, 1-14 ; P. Chastang, La ville, le gouvernement et l’écrit à Montpellier, Paris, 2013 ; J. Morsel, « Du texte aux archives : le problème de la source », Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre, hors-série 2, 2008, http://cem.revues.org/4132 (consulté le 3 janvier 2019)
11 Ces réflexions partent de la lecture de J. Goody, La raison graphique. La domestication de la pensée sauvage, Paris, 1979. Elles incluent, entre autres, les travaux récents de Pierre Chastang : P. Chastang, « Écrire, remployer, archiver. Quelques remarques sur l’évolution de la culture de l’écrit au Moyen Âge central », dans La cultura en la Europa del siglo XIII (XX semana de estudios medieval), Estella, 2013, p. 135-156, ainsi que ceux de L. Kuchenbuch, « Source ou document ? Contribution à l’histoire d’une évidence méthodologique », Hypothèses 2003. Travaux de l’École doctorale d’histoire de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2004, p. 287-315.
12 A. Prost, Douze leçons, op. cit., p. 88-92.
13 F. Simiand, « Méthode historique et science sociale. Étude critique », Revue de synthèse historique, 6/1 et 2, 1903, p. 1-22 et 129-157, ici p. 150.
14 Quelque scrupule que l’on ait à utiliser le mot après l’étude décapante de Joseph Morsel citée plus haut : « Traces ? Quelles traces ?… », il est nécessaire de s’en servir ici.
15 En juin 2017, en France, la ministre du Travail a décidé de ne plus commenter les chiffres de l’emploi tant les données sont complexes et parfois même contradictoires, selon la définition du chômage retenue par les administrateurs ou les politiques ou selon les catégories démographiques examinées.
16 A. Corbin, Le monde retrouvé de Louis-François Pinagot. Sur les traces d’un inconnu (1798-1876), Paris, 1998.
17 A. Guerreau, « Raymond Aron et l’horreur des chiffres », Histoire et mesure, 1/1, 1986, p. 51-73, ici p. 64 et 53 n. 6, à propos des incidences de l’usage de l’informatique.
18 Ibid.
19 L. Feller, A. Gramain, F. Weber, La fortune de Karol. Marché de la terre et liens personnels dans les Abruzzes au haut Moyen Âge, Rome (Collection de l’École française de Rome, 347), 2005.
20 J. Demade, « Produire un fait scientifique. La méthodologie de l’histoire des prix entre structures académiques et enjeux intellectuels (milieu xixe-milieu xxe) », http://lamop.univ-paris1.fr/IMG/pdf/Demade_1.pdf, 2011 (consulté le 14 février 2018).
21 Depuis longtemps, en fait depuis Michel Foucault et Michel de Certeau, on utilise volontiers le mot « archive » (au singulier). Dans la plupart des cas, cet emploi est simplement synonyme de « document », mot que nous préférons utiliser pour désigner les traces du passé, qu’elles soient ou non écrites. Un document archéologique peut aussi être désigné comme une archive du sol, ce qui a un effet rhétorique mais vient en contresens de l’emploi scientifique du mot « archive » qui renvoie à une définition matérielle (un lieu de stockage) et institutionnelle (des hommes et des femmes qui gèrent des dépôts et mettent au point des procédures de classement). Là-dessus voir J. Morsel, « Du texte aux archives… », art. cité.
22 Voir ici même la contribution de L. Quillien, « Produire, transmettre et utiliser les données des textes cunéiformes… », p. 53-72.
23 M. Clanchy, From Memory to Written Record. England, 1066-1307, Londres, 1979.
24 P. Chastang, Lire, écrire, transcrire. Le travail des rédacteurs de cartulaires en Bas-Languedoc (xie-xiiie siècle), Paris (CTHS-Histoire), 2001.
25 Voir ici D. Kemache : « Les chiffres : arme de négociation d’une entreprise de l’énergie pendant l’Occupation », p. 137-158.
26 Voir ici P. Lefeuvre, « Comment passer de l’acte écrit au fait ? Une source produite collectivement du xiiie siècle à nos jours », p. 37-52.
27 O. Guyotjeannin, Les sources de l’histoire médiévale, Paris, 1998 ; O. Guyotjeannin, J. Pycke, B.-M. Tock, Diplomatique médiévale, Turnhout, 2006.
28 F. Simiand, « Méthode historique et science sociale », art. cité ; A. Guerreau, « Raymond Aron et l’horreur des chiffres », art. cité.
Auteur
Lamop (UMR 8589 CNRS, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Enfermements. Volume II
Règles et dérèglements en milieu clos (ive-xixe siècle)
Heullant-Donat Isabelle, Claustre Julie, Bretschneider Falk et al. (dir.)
2015
Une histoire environnementale de la nation
Regards croisés sur les parcs nationaux du Canada, d’Éthiopie et de France
Blanc Guillaume
2015
Enfermements. Volume III
Le genre enfermé. Hommes et femmes en milieux clos (xiiie-xxe siècle)
Isabelle Heullant-Donat, Julie Claustre, Élisabeth Lusset et al. (dir.)
2017
Se faire contemporain
Les danseurs africains à l’épreuve de la mondialisation culturelle
Altaïr Despres
2016
La décapitation de Saint Jean en marge des Évangiles
Essai d’anthropologie historique et sociale
Claudine Gauthier
2012
Enfermements. Volume I
Le cloître et la prison (vie-xviiie siècle)
Julie Claustre, Isabelle Heullant-Donat et Élisabeth Lusset (dir.)
2011
Du papier à l’archive, du privé au public
France et îles Britanniques, deux mémoires
Jean-Philippe Genet et François-Joseph Ruggiu (dir.)
2011