Préface
p. 9-10
Texte intégral
1Ce livre est l’aboutissement d’une aventure dans laquelle se sont lancés en 1998 trois doctorants de Paris I, Séverine Brondel, Norbert Foulquier et Luc Heuschling, auxquels les directeurs du Centre de recherche de droit constitutionnel – Jean Gicquel et Didier Maus – et du Centre d’analyse comparative des systèmes politiques – Françoise Dreyfus – ont accordé avec enthousiasme leur soutien matériel et leur parrainage intellectuel.
2Cette ambitieuse aventure consistait à organiser (et donc à choisir les intervenants et le sujet précis de leur exposé), pendant une année universitaire, un séminaire international mensuel se concluant par une journée entière réunissant dans une table ronde des enseignants mais aussi des juges. En effet, les inventeurs du projet, faisant encore preuve d’audace, avaient choisi de consacrer ce séminaire au thème « Gouvernement des juges et démocratie ». Sujet difficile, quand l’on sait que d’aucuns s’interrogent sur la réalité de l’existence d’un gouvernement des juges, alors que l’expression est utilisée dans le langage commun, celui des journalistes, mais aussi celui des hommes politiques qui, de manière périodique, en France, accusent les juges constitutionnel, judiciaire et administratif de se comporter comme des juges qui gouvernent.
3Le premier défi consiste donc à analyser cette notion d’un point de vue scientifique et à déterminer le sens qu’elle peut revêtir tant pour les juristes que pour les politistes ; le deuxième défi consiste à établir le lien avec la démocratie et plus particulièrement à déterminer si ce lien est positif ou négatif. La question se pose de manière d’autant plus aiguë qu’elle concerne la place qu’occupe le juge constitutionnel et le rôle qu’il joue en tant qu’instance décisionnelle jugeant de la correction juridique de l’action du législateur, démocratiquement élu, voire – comme l’a montré l’exemple de l’élection présidentielle américaine, en 2000, postérieurement au déroulement du séminaire – lorsqu’il se prononce en matière de contentieux électoral. La problématique est donc large et elle concerne les juridictions tant nationales que supranationales.
4 Sans doute, la manière dont s’établit et est perçu le rapport entre l’action de juge et son impact dans un système démocratique varie-t-elle en fonction de divers facteurs, au rang desquels la spécificité du système juridico-politique de chaque pays tient une place décisive.
5L’intérêt du sujet en débat commandait donc, dans un premier temps, de s’interroger sur la notion de « gouvernement des juges », tâche à laquelle ont été conviés M. Troper, O. Pfersmann et L. Pech ; dans un deuxième temps, le soin d’appréhender dans une démarche phénoménologique les pratiques des juges britannique, israélien, américain, russe a été confié aux professeurs C. Harlow, C. Klein, G. Scoffoni et A. Kovler, tandis que M. de la Torre réfléchissait à la figure du juge selon les traditions du Rechsstaat et de la démocratie française et È. Picard au rapport entre démocratie locale et justice supranationale. Enfin, l’approche eût été incomplète si la parole n’avait pas aussi été donnée, dans la table ronde, aux acteurs – les juges R. Badinter, J.P. Costa, J.P. Puissochet et C. Starck – avant de faire clore le débat théorique par L. Favoreu, G. Timsit, D. de Béchillon, B. François, A. Pizzorusso et D. Rousseau.
6La confrontation des points de vue fait la richesse de cet ouvrage. D’une part, sur le plan théorique, l’approche des tenants des écoles positiviste, réaliste, jusnaturaliste est radicalement différente à l’égard de la problématique faisant l’objet du séminaire ; d’autre part, il apparaît clairement que la question du gouvernement des juges et de la démocratie revêt des significations différentes non seulement en fonction du système politico-juridique dans lequel elle est posée mais encore en fonction de la position, juges ou universitaires, qu’occupent ceux auxquels elle est posée.
7Pour conclure, l’heureuse initiative de Séverine Brondel, Norbert Foulquier et Luc Heuschling a donné l’occasion à deux centres de recherche relevant de deux U.F.R., « Droit, administration et secteur publics » d’un côté, « Science politique » de l’autre, d’unir leurs efforts pour la faire aboutir ; mais surtout elle a permis de mener un vaste débat sur une question, dont l’actualité n’est jamais démentie sans que pour autant juristes et politistes soient respectivement unanimes sur la manière de l’aborder.
Auteurs
Directeur du département de science politique de l’Université Paris I, directeur du CACSP
Professeur à l’Université Paris I
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