Transmission des archives et continuité du cérémonial, l’exemple des introducteurs des ambassadeurs, France-Angleterre (xviie-xviiie siècle)
p. 115-127
Résumés
Les introducteurs des ambassadeurs comptent au nombre de ces détenteurs d’offices cérémoniels à qui il incombait de veiller au respect des usages et de l’étiquette au sein des différentes cours européennes. Au cœur de ces normes complexes prenait place la notion de « précédent », point de référence déterminant le permis et l’interdit, fixant l’ordre établi. Conserver la mémoire de ces précédents, parfois vieux de plus d’un siècle, s’avérait indispensable. La trace écrite et, donc, l’archive s’imposaient dès lors comme l’unique recours possible. Pour cette raison, la charge d’introducteur des ambassadeurs offre un biais privilégié afin d’observer la lente émergence de la conception moderne de l’archive ; ce processus qui a vu le passage de l’archive, propriété de celui qui l’a élaborée et de ses descendants, à l’archive, ensemble de documents attachés non à une personne mais à une fonction. Entreprendre une comparaison franco-anglaise sur le long terme enrichit et nuance la compréhension que l’on peut avoir de ce phénomène. Face à la nécessité d’assurer la transmission d’un savoir, des solutions variées furent adoptées des deux côtés de la Manche, souvent plus empiriques qu’établies réglementairement. Un tel survol permet surtout de mesurer, en arrière-plan, la persistance de la vision traditionnelle de l’archive aux xviie et xviiie siècles.
Those who introduced ambassadors may be counted among ceremonial office-holders whose job was to see to the respect of usages and of etiquette in the various European courts. At the heart of those complicated standards, there was the notion of “precedent”, a point of reference which determined what was permitted and what was not, thus setting the established order. To remember these precedents, sometimes going back more than one century, proved an absolute necessity. A written trace (therefore, a record) then became the only possible resort. Therefore, the office of usher of ambassadors gives us a privileged approach to observe the slow emergence of the modem concept of records; this process saw the transition from records owned by the man who originated it and his descendants, to records which have become documents attached, not to a man but to an office. Undertaking a long-term Anglo-French comparison enriches and qualifies the understanding of this phenomenon. In view of the need to ensure the transmission of a given knowledge, different solutions were adopted on both sides of the Channel, often more practical than the result of regulations. Such a survey gives us, in the background, the possibility to assess the persistence of the traditional view of records in the 17th and 18th centuries.
Texte intégral
1Nul n’ignore que la notion d’archive publique était parfaitement étrangère aux hommes des xviie et xviiie siècles. On illustre en général le décalage entre notre conception actuelle des archives et celle qui prévalait alors par l’exemple des ministres, secrétaires d’État ou diplomates qui, à la fin de leur carrière, se retiraient et emportaient leurs papiers avec eux1. La présente étude se conçoit comme une analyse de cette réalité à travers la figure des introducteurs des ambassadeurs.
Archives et cérémonial: l’importance du précédent
2Faisons tout d’abord un sort à une ambiguïté terminologique en précisant que le pendant anglais du conducteur des ambassadeurs – qui devient « introducteur » sous le règne de Louis XIV2 – est le master of the ceremonies. Ce dernier était d’ailleurs appelé conductor dans la correspondance diplomatique espagnole3. S’il existe bien en France un grand maître et un maître des cérémonies, c’est plutôt le earl Marshall qui peut être présenté comme leur équivalent d’outre-Manche.
3On peut ramener les attributions des introducteurs, français et anglais, à trois points essentiels. Premier rôle, l’introducteur fait figure d’intermédiaire entre le roi et les ambassadeurs étrangers, il agit comme une sorte de porte-parole du souverain. Deuxième fonction, il est en charge de l’accueil des diplomates, supervisant entre autres tout ce qui concerne leur logement. Enfin, il est celui qui organise – souvent en collaboration avec le grand maître des cérémonies en France – les audiences des ambassadeurs.
4L’énumération de ces diverses missions permet de mieux comprendre combien la constitution d’archives conditionnait l’activité de ces personnages. À l’image de l’ensemble des offices cérémoniels, l’aptitude à connaître l’usage forme le cœur même de l’exercice de la charge d’introducteur. Idéalement, ce n’était pas seulement une trace de sa propre activité que tout introducteur aurait dû être en mesure de conserver mais une trace des actions et décisions de ses prédécesseurs. Les sujets de conflit étaient en effet infinis, tout ce qui se rapportait à l’accueil des ambassadeurs – où allait-on les rencontrer? seraient-ils défrayés? – ou au déroulement des audiences suscitait de multiples contestations. Breteuil [1698-1715] le déplore:
C’est le triste de notre métier que d’être obligés à être toujours en garde sur les petits avantages que des ministres [diplomates], presque toujours gens de beaucoup d’esprit, cherchent à prendre ou sur nous ou dans les audiences où nous les conduisons, mais on guérira plutôt tous les maux qu’on croit les plus incurables qu’on ne guérira l’esprit de la plupart des ambassadeurs et des envoyés sur les prétentions des prérogatives et des honneurs dus à leur caractère4.
5La capacité de l’introducteur à régler ces litiges reposait sur sa connaissance des précédents puisque la légitimité de la position de chacun se fondait sur l’usage établi. Or, le plus souvent, celui-ci ne pouvait être déterminé que par une preuve écrite: il fallait remonter le temps, parfois de nombreuses décennies, à la recherche de cas de figure identiques. En conséquence, l’habitude qui consistait, pour un officier ou sa famille, à considérer comme siennes les archives constituées dans le cadre de sa charge limitait la capacité de ses successeurs à remplir correctement leur mission. Certes, les registres pouvaient se révéler fautifs ou lacunaires5, mais le besoin de témoignages écrits était d’autant plus fort que les ambassadeurs disposaient parfois de documents pour étayer leurs réclamations6.
6Il s’agit donc de comprendre comment les introducteurs ont su s’accommoder de l’appropriation des archives par des particuliers. La volonté de résoudre les problèmes pratiques que posait cette appropriation s’est-elle traduite par des réponses similaires à Paris et à Londres? La mise en parallèle des situations anglaise et française nous conduira immanquablement à introduire un certain nombre de nuances au sujet d’une période durant laquelle émerge progressivement la conception moderne des archives.
La tenue de registres, une obligation?
7C’est à Henri III que l’on doit l’instauration de la charge de conducteur à la cour de France. Cette innovation participe de l’effort de remise en ordre de la cour propre au dernier Valois. Dès 1578, dans le premier grand règlement de son règne, Henri III chercha à formaliser la prise en charge des diplomates et en confia la responsabilité à plusieurs officiers – gentilshommes de la Chambre, maître d’hôtel, grand maître de France... Le règlement de 1585 simplifia ces procédures en instaurant la charge de conducteur des ambassadeurs7. Le premier conducteur fut Jérôme de Gondi, de 1585 à 1604. Son fils Jean-Baptiste lui succéda puis, durant deux siècles, l’office connut un grand nombre de titulaires – il fut divisé en services par moitié en 16208.
8Les secrétaires ordinaires à la conduite des ambassadeurs, quant à eux, apparurent avec un léger contretemps. Ce n’est qu’en 1608 que cette simple fonction d’aide fut commuée en charge. Hubert Girault en fut le premier détenteur puis, de 1625 à 1697, ce fut au tour de son fils, René Girault9.
9Côté anglais, la décision de créer un master of the ceremonies revint à Jacques Ier. Sans doute s’agissait-il de rompre avec une pratique élisabéthaine changeante et complexe. Le 31 mai 1603, un warrant sous le sceau privé chargea sir Lewis Lewknor du soin des « ambassadeurs étrangers qui seront envoyés à sa Majesté10 ». Lewknor mourut en 1627 et John Finet, jusque-là son officer of assistance, le remplaça. Il resta en place jusqu’à son décès, en juillet 1641. Balthasar Gerbier avait obtenu la réversion de l’office mais il se peut qu’il ne l’ait jamais exercé et que son assistant Charles Cottrell l’ait suppléé. Cottrell suivit Charles à Oxford et, le 5 avril 1645, devint officiellement master of the ceremonies11. Il resta fidèle aux Stuart et fuit à Anvers en 1649. À la Restauration, en juin 1660, il prêta de nouveau serment comme master of the ceremonies et, jusqu’à la fin du xviiie siècle, ses descendants occupèrent ce poste.
10En diverses cours, il existait une tradition selon laquelle les hommes chargés de l’accueil des ambassadeurs se devaient de consigner dans un registre les événements auxquels ils prenaient part. C’était le cas à Byzance avec les magistri officiorum créés par Constantin et qui avaient pour rôle d’organiser les cérémonies de la cour, réceptions d’ambassadeurs incluses12.
11L’Italie de la Renaissance offre des exemples similaires. Ainsi, à la cour du pape, qui est souvent présentée comme le modèle ayant inspiré la création d’offices de maîtres des cérémonies dans toute l’Europe13. Le vocable – magistri cerimoniarum – s’y imposa au milieu du xve siècle: Agustino Patrizi, qui entra en fonctions en 1466, semble avoir été le premier à être désigné par ce titre14. Alors que le rôle initial des clercs des cérémonies se limitait à la chapelle pontificale, leurs attributions se sont progressivement élargies à l’ensemble des cérémonies de cour et en particulier à la réception d’ambassadeurs.
12La nécessité de fixer ce cérémonial par écrit se fit logiquement sentir et, dans la deuxième moitié du xve siècle, les maîtres des cérémonies prirent l’habitude de tenir des diaires. Le premier de ces ouvrages, ou du moins le premier dont l’existence nous soit connue15, fut celui de Jean Burchard – en poste de 1483 à 1506. Livre de notes prises au jour le jour, son journal manifeste un clair souci de fournir le plus de renseignements possible sur le protocole. À partir de Paris de Grassis, son successeur, la tenue d’un tel journal semble être devenue une obligation et, du xvie au xixe siècle, il existe une suite ininterrompue de diaires. Chaque maître des cérémonies était d’ailleurs en mesure d’utiliser les écrits de ses prédécesseurs puisque ceux-ci étaient conservés à la cour. Au milieu du xviie siècle, un catalogue des Diaria, organisé par ordre de matières, fut établi afin de faciliter les recherches16.
13Rome ne constitue pas un cas isolé. À Florence, un règlement de 1475 stipulait que le héraut – dont la tâche première était l’accueil des étrangers – devait tenir un livre et que ce livre devait être conservé à la chancellerie17. Des procédures semblables existaient à Venise au xvie siècle. Un maître des cérémonies organisait les audiences diplomatiques données par le Collège et il incombait à un secrétaire de chancellerie de rédiger un registre des cérémonies comprenant des comptes rendus des visites de tous les « princes et autres personnages ». Ce registre était gardé au sein du Collège18.
14Une double prescription se faisait donc jour: obligation de consigner le déroulement des cérémonies et mise en place de procédés assurant que les documents ainsi élaborés restent à la disposition des instances officielles.
15Une telle réglementation semble n’avoir jamais existé en Angleterre durant l’Ancien Régime. Lorsque James Howell publia une partie des notes de John Finet en 1656 sous le titre Finetti Philoxenis, il expliquait, dans sa brève préface:
Parmi différentes qualités que l’on savait être en ce valeureux chevalier, une était de coucher par écrit et de tenir un journal exact des choses qui se passaient en sa province, en tant que Maître des Cérémonies, conformément à la louable coutume des Italiens et transmises par eux aux ministres d’État hauts et bas Hollandais, entre autres19.
16L’application de Finet à consigner ses actions relevait d’un choix personnel et, jusqu’à la fin du xviiie siècle, aucune contrainte n’a été instaurée.
17En France, le règlement de 1585 n’imposait pas plus la constitution de registres. Contraste remarquable, ce même règlement, en instituant la charge de grand maître des cérémonies, précise que celui-ci:
[...] fera un registre fidèle non seulement à toutes les cérémonies qui se feront et de ce qui se passera mais aussi recherchera particulièrement toutes celles qui ont été faites par le passé pour les insérer audit registre afin que l’on puisse y avoir recours ainsy que besoin sera20.
18Plus généralement, d’autres dispositions, adoptées en 1585, attestent d’un souci de la preuve écrite. On peut imaginer qu’Henri III y voyait un moyen de contrôle plus efficace sur l’ensemble de sa maison et sur sa cour en général21.
19Il est difficile de déterminer si cette absence d’obligation a perduré. On trouve des indications contradictoires. Dufort de Cheverny [1752-1764] dit que les introducteurs « devaient [...] tenir un registre22 ». On peut cependant supposer que le « devoir » est ici d’ordre seulement moral. Sur ce sujet, il paraît plus judicieux de se fier aux explicites paroles du chevalier de Sainctot [1709- 1752] qui, dans son Journal, affirme: « Je ne suits ny obligé ny payé pour escrire le cérémonial23. »
Registres, journaux et mémoires
20Pourtant, dans la pratique, les masters of the ceremonies et les introducteurs se sont rapidement astreints à « escrire le cérémonial ». Si Lewis Lewknor n’a laissé aucune archive, Finet a commencé ses carnets (note books) dès 1612 – date à laquelle il devint assistant – et l’a continué jusqu’à sa mort24. Charles Cottrell n’a laissé aucune note de son service sous Charles Ier – la perte de celles-ci s’expliquerait toutefois aisément. Après 1649, il n’a jamais réellement tenu de journal et s’est plutôt appliqué à collecter des pièces diverses et à composer des mémoires sur telle ou telle particularité du cérémonial. Ses successeurs adoptèrent une démarche comparable, certains tenant en outre des journaux25.
21En France, il ne reste aucune indication que les Gondi aient écrit la moindre ligne. Le document le plus ancien que nous ayons consiste en un mémoire de Guron [1632-1634] sur la réception d’un ambassadeur espagnol en 163226. Albert Loomie estime que Brûlon l’aîné [1634-1640 (?)] et Berlize [1635-1671] ont été les premiers à tenir des registres. Il est délicat d’être catégorique en la matière, ce sont en tous les cas les premiers dont les mémoires soient parvenus jusqu’à nous27. On sait que les Bonneuil, père [1659-1680] et fils [1680-1698], avaient eux aussi pris la plume mais nous ne disposons aujourd’hui que de fragments de leurs mémoires, passages relatant différentes réceptions, cérémonies ou audiences28.
22Les premiers pour qui d’amples volumes nous sont parvenus sont les Sainctot – Nicolas Sainctot [1691-1709] et son fils, le chevalier de Sainctot: les Mémoires du père comptent plus de 2000 feuillets, tout comme le Journal du chevalier, pour les seules années 1711-171629. Au même moment, le marquis de Breteuil rédigeait des Mémoires longs de 2600 pages manuscrites30.
23Cette rigueur dans la prise de notes n’a certainement pas été systématique au xviiie siècle. Il est vrai que les témoignages semblent s’accorder à considérer que – dès le règne de Louis XIV et peut-être avant – la tenue de registres relevait des attributions des secrétaires. Lorsque le chevalier de Sainctot explique qu’il n’est pas payé pour « escrire le cérémonial », il ajoute que « c’est l’affaire du secrétaire ordinaire à la conduitte des ambassadeurs31 ». Pourtant, si Girault a tenu des registres32, aucun de ceux-ci n’a subsisté. À l’inverse, le journal – très détaillé – de son successeur, Villeras [1699-1713], qui couvre l’intégralité de ses années en poste, se trouve aujourd’hui à la Bibliothèque nationale33. Au xviiie siècle, M. de La Tournelle [1741-1761] ou Leroi de Séqueville [1761-1792] se montrèrent eux aussi des scribes assidus34.
24Tout en faisant la part aux aléas de la conservation, on ne peut se départir du sentiment qu’au fil du siècle la tenue d’archives s’est faite plus régulière et plus suivie. Sans doute cette évolution est-elle allée de pair avec celle d’un cérémonial qui s’avérait de plus en plus élaboré et exigeant. Reste à savoir si ces manuscrits étaient mis à la disposition de ceux qui auraient, à leur tour, à assumer ces responsabilités.
Transmettre à ses successeurs
25Côté français, ce n’est qu’à partir du règne de Louis XIV que l’on peut repérer une circulation des documents. Breteuil disposait de textes des Bonneuil et de Nicolas de Sainctot. Les Verneuil, père [1736-1747] et fils [1747-1757], exploitaient à leur tour les papiers de Sainctot et y ajoutaient ceux de Breteuil35.
26Une certaine prise de conscience semble alors s’être esquissée. Déjà Breteuil affirmait s’atteler à ses Mémoires pour que les prochains introducteurs ne souffrent pas des difficultés qu’il avait lui-même endurées. Le chevalier de Sainctot paraît animé de sentiments similaires:
Je n’écrits que pour moy, pour la vérité et pour le soulagement de quiquonque sera mon successeur en ma charge36.
27Deux grandes solutions reviennent sous les plumes de ces officiers. Certains estimaient tout d’abord que la publication de leurs mémoires était souhaitable. C’est ce qu’ambitionnait Nicolas Sainctot. Dans la préface de son manuscrit, il s’adressait à Louis XIV:
Si Vostre Majesté juge à propos de faire imprimer mes mémoires ou de m’en donner la liberté, elle arrestera toutes les nouvelles prétentions des ambassadeurs causées souvent par l’infidélité des Relations que leurs prédécesseurs leur donnent. Le cérémonial n’estant plus dans l’incertitude, elle évitera par ce moien toutes les difficultés embarrassantes que l’ambition de s’élever fait naistre ordinairement37.
28Dufort de Cheverny, qui désirait procéder à une simplification de l’étiquette, avait rédigé un mémoire d’un « doigt d’épais », contenant « tout le cérémonial de France pour les étrangers » et qu’il pensait faire paraître. Celui-ci fut perdu de son vivant. « Tous les gens inutiles qui s’emploient à ces misères n’auraient plus rien à faire. Il était dangereux de le faire imprimer », ironise Dufort38. En somme, aucun ouvrage de la main des introducteurs n’a vu le jour durant l’Ancien Régime.
29L’autre solution avancée, qui connut plus de succès, était de procéder au dépôt des registres. Breteuil en était partisan:
Je suis le premier introducteur des ambassadeurs qui ait remis entre les mains de Sa Majesté la copie de ses mémoires et je l’ay fait parce que j’ay l’expérience que les héritiers de ceux qui meurent en charge recelent les mémoires qu’ils trouvent après la mort de ceux qui les ont exercées. [...] En sorte que pour épargner à ceux qui viendront après moy les peines que j’ay eues et que j’ay encore tous les jours, j’ay présenté au Roy les mémoires pour qu’ils soient conservez dans le même lieu ou le ministre des affaires étranges conserve les lettres que Sa Majesté écrit à ses Ambassadeurs et envoyez et qu’elle reçoit d’eux39.
30Ces propos s’accordent avec une période où différents fonds prenaient forme, en particulier celui du secrétaire d’État aux Affaires étrangères. Dans les faits, doit-on pourtant déceler chez Breteuil la réticence traditionnelle à se départir de ses papiers? Il se contenta en effet de verser le premier tome de ces Mémoires au Vieux Louvre40.
31Les Sainctot sont à l’origine d’un legs beaucoup plus vaste. Sur les 77 volumes constituant l’actuelle série « Protocole et Cérémonial » des « Mémoires et documents. France (et suppléments) » du ministère des Affaires étrangères, trente et un proviennent du fonds Sainctot. Ce corpus rassemble de nombreuses copies datées du xviiie siècle. Rappelons que le grand-oncle et le grand-père du chevalier furent maîtres des cérémonies, de même que son père, avant qu’il ne devienne introducteur. Les pièces qu’abrite aujourd’hui le Quai d’Orsay couvrent toute l’époque moderne, voire au-delà, et portent sur des points de cérémonial divers: titres, préséances, audiences, baptêmes, mariages41... Seule une minorité de documents concernaient les introducteurs. Leur intérêt n’en était pas moindre et parmi ceux-ci on trouvait notamment l’une des versions des Mémoires de Sainctot42.
32Dernier exemple. Dufort de Cheverny écrit de M. de La Tournelle, « son » secrétaire, qu’ « il tenait un registre de toutes les cérémonies, de tous les jours où le roi recevait les ambassadeurs, des présentations qu’on faisait ». Or, selon Dufort, ce texte « devait être déposé, à la mort du titulaire ou à sa retraite, dans le dépôt des Affaires étrangères et dans celui de la maison du roi43 ». Ces pièces sont toutefois manquantes sans que l’on sache pourquoi. Seul le Journal de Leroi de Séqueville, dernier secrétaire à la conduite de l’Ancien Régime, est conservé au ministère des Affaires étrangères44.
Transmettre à ses héritiers
33Ces initiatives demeuraient encore timides, les vieilles habitudes avaient la vie dure: le peu de registres présents dans les quelques dépôts du temps en attestent. Breteuil s’en plaint:
Je n’ay pu ramasser que peu de Mémoires du passé quelqu’argent que j’aye employé pour en avoir, en sorte qu’il n’est pas possible que je ne sois souvent dans l’incertitude.
34Ces mots visent madame de Bonneuil, qui refusa de laisser consulter les papiers de son mari, et Nicolas de Sainctot, qui ne communiqua pas ses archives à son collègue45.
35Dufort de Cheverny dut faire face aux mêmes embûches. Selon lui, son collègue, le marquis de Verneuil, ne voulait rien lui communiquer alors qu’il avait « fidèlement écrit »; « Fier, haut, vaniteux, il se gardait bien de rien montrer; il voulait être mentor d’un jeune camarade, que tout dépendit de lui46. » Remarque qui tranche avec les paroles dudit Verneuil qui, dans son Journal, prétendait être désireux de pallier les lacunes des registres précédents et avoir opté pour la forme du journal afin de multiplier les exemples et établir de cette façon la source la plus exhaustive possible47. Dufort parvint toutefois à surmonter l’obstacle: « M. de Bonneuil, conseiller au parlement, de mon âge et mon ami, me donna les mémoires de ses ancêtres48. » La détention des archives par des particuliers fournissait parfois l’antidote aux difficultés quelle suscitait.
36En plein milieu du xviiie siècle, malgré de beaux discours et quelques signes de bonne volonté, un double problème dans la transmission des archives perdurait donc: entre l’officier et celui qui prenait sa suite d’une part, entre les deux titulaires de la charge d’autre part.
37Outre-Manche, on estimait tout autant que les manuscrits étaient la propriété de leurs auteurs – par testament John Finet légua tous ses papiers à son fils William49 – mais, dans la pratique, cela n’entravait pas le travail des masters of the ceremonies puisque les Cottrell demeuraient inamovibles. Les carnets (note books) de Finet étant tombés en leur possession50, cette famille disposait d’un fonds qui, à la fin du xviiie siècle, couvrait une période de cent cinquante ans. Le monopole des Cottrell était d’autant plus complet que, contrairement à la France, les masters of the ceremonies exerçaient leur office à l’année et non par semestre.
38En France, on n’avait pas totalement ignoré cette solution « dynastique »: les Sainctot ont détenu l’office d’introducteur de 1691 à 1752 et les Bonneuil de 1659 à 1698. Quant aux Girault, ils ont occupé le poste de secrétaire plus de cent ans à eux deux51. L’utilité de cette stabilité était évidente aux yeux des contemporains. À plusieurs reprises, dans ses journaux, le chevalier de Sainctot souligne qu’il s’adresse à son père afin de ne pas commettre d’erreur52.
39On peut supposer que les monarques anglais avaient maintenu leur confiance aux Cottrell parce qu’ils s’estimaient satisfaits de ces serviteurs et jugeaient que cette lignée était dépositaire d’un savoir et d’un savoir-faire – leur vaste fonds d’archives y contribuait. Fondamentalement, la confiscation de la charge par une seule famille ne modifiait en rien, bien au contraire, le statut traditionnel des archives. L’éventuelle transmission de celles-ci à une tierce personne était un cas de figure qui n’avait pas lieu d’être envisagé. Lorsqu’en 1796 Clement Cottrell-Dormer abandonna sa fonction et que son cousin, Stephen Cottrell, prit sa suite, l’ancien master of the ceremonies,
[...] considérant tous les livres de sa famille être une propriété privée, [...] conserva en sa possession tous les carnets [note books] et mémoires de cérémonie de ses prédécesseurs53.
40Certes, conscient de la gêne que sa décision risquait de susciter, Clement Cottrell-Dormer fit recopier des extraits des livres de son père et de son grand-père « pour l’usage de ses successeurs ».
41Il est vrai que l’introducteur disposait, outre sa propre familiarité avec la cour, de plusieurs sources afin de compenser les lacunes de sa documentation. Les différents fonds qui prenaient alors forme pouvaient lui venir en aide.
D’autres ressources au service des introducteurs
42Traditionnellement, les introducteurs pouvaient trouver conseil auprès de divers personnages versés dans les arcanes du protocole. Le premier d’entre eux était bien sûr le roi lui-même. Les Mémoires de Berlize citent une anecdote où, en 1663, Louis XIV se réfère au comportement d’Henri IV pour calquer sa conduite sur celle de son aïeul54: « Le roi, qui sait parfaitement l’usage du cérémonial de sa cour, m’a permis de m’adresser à lui dans les doutes importants et c’est ce que je ne manque pas de faire », dit Breteuil à propos du Roi-Soleil55. Quelques décennies plus tard, Dufort de Cheverny s’attarde sur la bonté de Louis XV à son égard. Le roi l’avait rassuré: « En général, si vous n’avez pas de note de Sainctot, vous pouvez vous adresser à moi56. » Grand ordonnateur de la cour, le souverain tranchait les litiges et se permettait à l’occasion d’introduire de l’inédit. En dehors du monarque, d’autres officiers – tel le grand maître des cérémonies – disposaient de la science requise – et de leurs propres documents – pour secourir leur collègue. Encore fallait-il que les rivalités de personnes n’empêchent toute collaboration.
43L’utilité des sources publiées n’était pas non plus à négliger. Le Cérémonial français de Godefroy consacre un chapitre, bref il est vrai, à la réception des ambassadeurs, chapitre qui repose notamment sur des passages de Brûlon et Berlize57. On sait que Breteuil disposait de cet ouvrage. Des périodiques comme le Mercure François ou la Gazette recelaient aussi de nombreux détails relatifs au protocole. Breteuil possédait 21 volumes du premier et 16 volumes de la seconde58.
44Pour remédier au manque d’informations, les introducteurs allaient aussi pouvoir de plus en plus compter sur des recueils constitués et préservés dans des structures institutionnelles. En Angleterre, à partir du règne de Charles II, les Precedent Books furent établis sous l’autorité du lord Chamberlain. Ces livres comprenaient des textes variés relatifs à l’étiquette et au cérémonial, réceptions d’ambassadeurs comprises59. En France, des efforts plus systématiques furent entrepris au dépôt des Affaires étrangères. Au xviiie siècle, les secrétaires d’État prirent l’habitude de confier aux chefs du dépôt le soin d’effectuer des recherches sur des sujets donnés – tel grand traité, telles négociations – et de rédiger des mémoires rendant compte de ces événements60. Le plus prolifique de ces archivistes fut sans conteste Nicolas-Louis Le Dran. Il fut l’auteur d’un nombre considérable de mémoires, dont bon nombre portaient sur le cérémonial61. Un règlement de septembre 1767 stipulait que les premiers commis devaient superviser la réalisation de recueils « sur les cérémonials et les titulatures62 ».
45Le développement des dépôts, en particulier celui des Affaires étrangères, a pu fournir aux introducteurs quelques outils de travail63. Nous ne savons pas s’ils les ont effectivement utilisés, il n’en reste pas moins que des fonds utiles aux introducteurs se constituaient en dehors d’eux et demeuraient publics.
46À la cour des Bourbons, les introducteurs, se heurtant aux lacunes de leur documentation, ont dû parer à ces manques. Décisions personnelles ou pratiques communes, mesures empiriques ou consacrées par un règlement, les remèdes ont été multiples et la relation aux archives a évolué sous leur influence. Pour autant, dans le cas de ces officiers, aucune procédure de conservation réellement systématique ou institutionnalisée n’a vu le jour. À travers eux, on retrouve à la fois le phénomène général des constitutions de fonds et les hésitations qui les accompagnaient.
47En Grande-Bretagne, la présence de la dynastie Cottrell a occulté les problèmes posés par la transmission des archives. La recherche de solutions n’avait donc pas de raison d’être. Il fallut attendre le xixe siècle. En 1818, Stephen Cottrell mourut et Robert Chester, son cousin et assistant, prit sa suite. Stephen Cottrell avait commencé à rassembler un ensemble de notes et de mémoires à partir de 1782 – date à laquelle il n’était encore qu’assistant – et jusqu’en 1812. Il comptait les réunir en un livre mais ne mena finalement pas ce projet à bien. Il laissa l’ensemble de ce corpus à Robert Chester. Celui-ci « mit en forme les notes, les fit copier et les relia dans [un] in-folio64 ». Chester jugea en outre insatisfaisant le travail réalisé en 1796, les extraits réunis s’avéraient incorrects et trop peu nombreux. En 1826, il obtint de la famille Cottrell-Dorrner qu’elle lui expédie ses archives afin de corriger les copies dont il disposait et d’en augmenter le nombre65. Il en profita pour confectionner un outil de travail de meilleure qualité en organisant chronologiquement ces textes et en réalisant un index66. Cette fois, lorsque Robert Chester décéda, ses livres restèrent en possession du département du lord Chamberlain67. Le temps où les masters of the ceremonies ne différenciaient pas leurs archives personnelles des archives attachées à leur office était révolu.
Notes de bas de page
1 J. Favier, Les archives, Paris, 2001, p. 18-23.
2 Albert Loomie date ce changement d’appellation entre 1666 et 1686. Cf. A. Loomie, « The Conducteur des Ambassadeurs in Seventeenth Century France and Spain », Revue belge de philologie et d’histoire, 53, n° 2, 1975, p. 344. Nous utiliserons ici le plus souvent le terme d’ « introducteur », y compris pour le début du xviie siècle et parfois à propos de la Grande-Bretagne.
3 A. Loomie, « The Conducteur des Ambassadeurs... », op. cit., p. 352.
4 Cité par L. Delavaud et A. Boppe, Les introducteurs des ambassadeurs, Paris, Alcan, 1901, p. 7.
5 Saint-Simon, dans une remarque que l’on peut, sans le trahir, extrapoler aux introducteurs des ambassadeurs, estimait que les registres étaient souvent défectueux et rédigés par des incompétents. Saint-Simon (duc de), Mémoires, tome I, 1691-1701,Y. Coirault (dir.), Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1982, p. 450-452, p. 538.
6 S. Brouillet, La tyrannie du cérémonial, Nicolas de Sainctot introducteur de Louis XIV (1711-1716), mémoire de maîtrise sous la direction de J. Cornette, université Paris 8,2001, p. 129.
7 On trouve le règlement de 1578 à la Bibliothèque nationale [BNF], ms. fr. 4258, fol. 51-54. Eugène Griselle a publié l’intégralité du règlement de 1585 et signale que la partie concernant le conducteur des ambassadeurs – « L’ordre que le Roy veut estre tenu par celuy qui conduit les ambassadeurs » – figure à part: E. Griselle, Supplément à la Maison du roi Louis XIII, comprenant le Règlement général fait par le roi de tous les états de sa maison et l’état général de paiement fait en 1624, Paris, P. Catin, 1912, p. 1-59.
8 Étienne Chabenat II, comte de Bonneuil, réunifia l’office en 1671 puis la division par semestre reprit quand Michel Chabenat, sieur de Bonneuil, vendit, en 1691, une de ses deux charges à Nicolas de Sainctot. Nous indiquons entre crochets les dates d’exercice pour chacun des introducteurs mentionnés. Les dates variant quelque peu selon les ouvrages consultés, nous avons principalement suivi A. Loomie, « The Conducteur des Ambassadeurs... », op. cit., p. 355, et l’ensemble des informations données dans Delavaud et Boppe, Les introducteurs des ambassadeurs... op. cit.
9 Bibliothèque de l’Arsenal [Arsenal], ms. 3860 (Mémoires de Breteuil, t. II), p. 242-246. J. Baillou (dir.), Les Affaires étrangères et le corps diplomatique français, t. I: De l’Ancien Régime au Second Empire, Paris, Éditions du CNRS, 1984, p. 243.
10 National Archives (ancien. Public Record Office) [TNA: PRO], SP 14/16, fol. 26; Thomas Rymer, Foedera, Conventiones, Literae... Reges Angliae, 20 volumes, Londres, 1704-1735,VII.2, p. 144.
11 TNA: PRO, LC 5/2, note introductive de Robert Chester [1818-1848], non foliotée. Chester dit que Balthasar Gerbier n’a, dans les faits, jamais exercé la fonction de master of the ceremonies. H. R. Williamson estime toutefois que Balthasar Gerbier a effectivement exercé cette charge mais ne cite aucune source: Four Stuart Portraits, Londres, 1949, p. 44. Il en va de même dans J. Wood, « Gerbier, Sir Balthazar (1592-1663/1667) », dans Oxford Dictionary of National Biography, H. C. G. Matthew et B. Harrison (dir.), Oxford, 2004.
12 M.-L. Nguyen, Les grands maîtres des cérémonies et le service des cérémonies à l’époque moderne 1585-1792, mémoire de maîtrise sous la direction de L. Bély, université Paris-Sorbonne (Paris 4), 1999, p. 13.
13 Ainsi R. Trexler dans son introduction à The Libro Cerimoniale of the Florentine Republic by Francesco Filarete and Angelo Manfidi, Genève, Droz, 1978, p. 17-18.
14 G. Constant, « Les maîtres de cérémonies du xvie siècle. Leurs diaires », Mélanges d’archéologie et d’histoire, École française de Rome, 23,1903, p. 161-162. Richard Trexler signale toutefois une occurrence remontant au début des années 1450 dans son introduction à The Libro Cerimoniale of the Florentine Republic..., op. cit., p. 18, n. 25.
15 G. Constant affirme qu’il s’agit du premier diaire jamais rédigé, ibid., p. 319. Cf. Le Journal de Jean Burchard..., traduction, introduction et notes par J. Turmel, Paris, 1932. Marc Dykmans estime pour sa part qu’Antoine Rebiol et Agostino Patrizi l’avaient devancé mais que leurs manuscrits ont été perdus: « Cérémonial pontifical », dans Dictionnaire historique de la papauté, Paris, Fayard, 2003, p. 324.
16 Constant, « Les maîtres de cérémonies... », op. cit., p. 324-339.
17 Trexler, The Libro Cerimoniale of the Florentine Republic..., op. cit., p. 53.
18 E. Muir, Civic Ritual in Renaissance Venice, Princeton, 1981, p. 187-188.
19 Among other parts of industry which were known to be in that Worthy Knight, one was, to couch in writing, and keep an exact Diary of what things had passed in his Province, as Master of the Ceremonies according to the laudable Custome of the Italians, and transmitted by them to the high and low Dutch Ministers of State, with others. Préface de James Howell à Finetti Philoxenis. Some Choice Observations of Sr John Finett Knight and Master of the Ceremonies to the Two Last Kings..., Londres, 1656.
20 Cité par M.-L. Nguyen, Les grands maîtres des cérémonies..., op. cit., p. 16.
21 On imposa par exemple aux maîtres d’hôtel de noter tous les achats, et il était clairement entendu qu’Henri III pourrait ainsi demander des comptes: E. Griselle, Supplément à la Maison du roi Louis XIII..., op. cit., p. 9.
22 Dufort de Cheverny (Jean Nicolas, comte), Mémoires sur la cour de Louis XV, texte établi, présenté et annoté par J.-P. Guicciardi, Paris, Perrin, 1990, p. 92.
23 S. Brouillet, La tyrannie du cérémonial..., op. cit., p. 45.
24 L’ouvrage Finetti Philoxenis, déjà mentionné, correspond aux notes prises par Finet de 1612 à 1627. Récemment, Albert Loomie a édité la suite de ce journal: Ceremonies of Charles I. The Note Books of John Finet 1628-1641, New York, Fordham University Press, 1987.
25 TNA: PRO, LC 5/2, note introductive par Robert Chester, non foliotée. Cf. Historical Manuscripts Commission, Second Report. Appendix, 1871, p. 82-84.
26 « Arrivée a Paris de Dom Gonzalez de Cordoüe Ambassadeur Extraordinaire d’Espagne le 14e Mars 1632 » [copie], Arsenal, ms. 3859 (Mémoires de Breteuil, t. I), p. 24-39.
27 A. Loomie, « The Conducteur des Ambassadeurs... », op. cit., p. 343. Archives du ministère des Affaires étrangères [A. E.], Mémoires et Documents [M. et D.], France, 395, « Réception des Ambassadeurs et Princes Estrangers en France [...] depuis l’an 1634 jusques a 1640 » [Mémoires de Brûlon, copie du xviie siècle], fol. 301-313. Concernant les Mémoires de Berlize, le manuscrit original est conservé à la bibliothèque de Lille. Dans les deux cas, il s’agit de notes succinctes, qui ne visent absolument pas à l’exhaustivité. P. Baertsoen, Mémoires de monsieur de Berlize, mémoire de maîtrise sous la direction de L. Bély, université Charles-de-Gaulle – Lille 3, 1991, 2 vol. Le deuxième volume consiste en une transcription de ces Mémoires.
28 « Les Bonneuil ont rédigé des mémoires dont on trouve des fragments aux archives du ministère des Affaires étrangères, fonds France, n° 1835, et à l’Arsenal, 4230 et 3859. Un manuscrit, sorte de traité de la conduite des ambassadeurs, a paru dans deux ventes (catalogue Béhague, n° 267; catalogue Morgand et Fatout, novembre 1880, n° 6449) »: L. Delavaud, A. Boppe, Les introducteurs des ambassadeurs..., op. cit., p. 50-51.
29 BNF, ms. fr. 14117-14120 ( « Mémoires de M. de Sainctot, introducteur des ambassadeurs »). Le Journal du chevalier de Sainctot pour son semestre [juillet-décembre] des années 1711-1716 est conservé au musée Condé, ms. 1202-1207.
30 Arsenal, ms. 3859-3865.
31 Cité par S. Brouillet, La tyrannie du cérémonial..., op. cit., p. 44. Ce genre d’affirmation ne constitue pas une preuve, un introducteur peut avoir ses propres idées sur les attributions de son secrétaire, et être dans l’erreur. Il peut aussi s’agir d’un usage et non d’une obligation.
32 Une copie anglaise d’un mémoire de Bonneuil indique que Girault tenait « un registre de toutes les cérémonies ». TNA: PRO, LC 5/2, p. 218. En revanche Breteuil affirme que Girault « n’a jamais rien noté », Arsenal, ms. 3860 (Mémoires de Breteuil, t. II), p. 143. Breteuil ne paraît pas s’étonner qu’un secrétaire se soit soustrait à ses soi-disant obligations. Doit-on en conséquence mettre en doute l’existence même desdites obligations, au moins au xviie siècle? M.-Th. Denis-Combet explique cependant que « les secrétaires ordinaires à la conduite des ambassadeurs étaient chargés spécialement de porter sur un registre en forme de journal les décisions du roi et le cérémonial exact sur tout ce qui avait rapport aux fonctions de l’introducteur », J. Baillou (dir.), Les Affaires étrangères..., op. cit., 1.1, p. 243.
33 BNF, N. A. F. 3123-3130. Villeras n’a pas succédé immédiatement à Girault, le poste est resté vacant entre 1697 et 1699.
34 Cf. infra. Les dates données ici sont tirées de J. Baillou (dir.), Les Affaires étrangères..., op. cit., p. 243.
35 Arsenal, ms. 3859 (Mémoires de Breteuil, t. I), p. 257 et suiv., p. 317 et suiv.; L. Delavaud, A. Boppe, Les introducteurs des ambassadeurs..., op. cit., p. 9-10.
36 Cite par S. Brouillet, La tyrannie du cérémonial..., op. cit., p. 45.
37 BN, Ms français 14118, fol. D. Son fils partageait cet avis: « La bonne et heureuse chose que ce seroit pour l’introducteur sy le cérémonial estoit imprimé et sy bien resglé qu’il n’y eut plus de moyen aux estrangers de chercher à former de nouvelles et que trop souvent ridicules prétentions », cité par S. Brouillet, La tyrannie du cérémonial..., op. cit., p. 38. Le chevalier n’a cependant jamais tenté de faire publier son journal.
38 Dufort de Cheverny, Mémoires, p. 285.
39 Arsenal, ms. 3860 (Mémoires de Breteuil, t. II), p. 295-296.
40 A. E., M. et D., France, 1851. Cf. Les archives du ministère des Relations extérieures depuis les origines, tome I, Histoire, ministère des Relations extérieures, Paris, Imprimerie nationale, 1984, p. 133.
41 A. E., M. et D., France, 1814-1849.
42 A. E., M. et D., France, 1831 . Villeras, parlant de la copie qu’il fit des Mémoires de Sainctot, écrit: « Tout ce qui est marqué de la lettre F. soit dans cette copie soit dans les additions qui la suivent, a esté adjouté et corrigé de la main de M. de Sainctot dans la copie destiné pour le Marquis deTorcy, M. le Baron de Breteuil Introducteur et moi Secrétaire ordinaire du Roi a la conduite des Ambassadeurs estant présents lorsque M. de Sainctot a fait ces additions et corrections a Fontainebleau durant le séjour que le Roi y a fait en 1708 », BNF, NAF 3132, préambule, non paginé.
43 Dufort de Cheverny, Mémoires, p. 92.
44 A. E, M. et D., France, 1858, « Journal de M. de La Tournelle sur les cardinaux » (1742-1749); A. E., M. et D., France, Supplément, 1974 (années 1761-1764), 384 fol., 1975 (années 1769-1775, 343 fol.)– 1976 (années 1776-1786, 373 fol.); « Journal de Séqueville ». Certains introducteurs décidèrent aussi d’offrir le manuscrit de leurs Mémoires au souverain. C’est ainsi qu’une autre mouture des Mémoires de Nicolas de Sainctot et ceux deVerneuil gagnèrent les rayons de la bibliothèque royale. BNF, ms. fr. 14117- 14120 [Mémoires de Sainctot]; NAF 1111-1115 [Mémoires concernant la charge d’introducteur des ambassadeurs, présentés à Louis XV par M. le marquis de Verneuil]. Ces volumes pouvaient y être consultés.
45 Arsenal, ms. 3860 (Mémoires de Breteuil, t. II), p. 143. Peut-être Breteuil a-t-il acquis – acheté? – ultérieurement les pièces mentionnées plus haut. Villeras précise, à propos d’un Mémoire touchant l’introduction des ambassadeurs: « Ce Mémoire m’a esté donné par M. le baron de Breteuil. Il l’a tiré du cabinet de feu M. Bonneuil et il croit que M. Bonneuil le père l’a fait pour l’instruction de son fils. J’ai rendu l’original a M. de Breteuil. » BNF, NAF 3133 (Mémoires divers relatifs au cérémonial de l’introduction des ambassadeurs [réunis par Villeras]), fol. 45. On retrouve cette formulation dans les Mémoires de Breteuil. Arsenal, ms. 3859 (Mémoires de Breteuil, t. I), p. 257: « J’ay tiré du Cabinet de feu M. de Bonneüil mon prédécesseur dans la charge d’introducteur des ambassadeurs, le mémoire cyjoint et tous ceux qui le suivent jusqu’à la page [blanc]. »
46 Dufort de Cheverny, Mémoires, p. 92.
47 Cité par Delavaud et Boppe, Les introducteurs des ambassadeurs..., op. cit., p. 9.
48 Ibid.
49 I doc will unto my sayd sonne William Finet all my bookes, paper books, papers, letters and coppies of letters. Seuls les papiers à caractère financier (reconnaissances de dettes...) furent légués à sa femme. TNA: PRO, PROB 11/187, Testament de Sir John Finet, 26 novembre 1641.
50 On ne sait à quelle date ni de quelle façon les Cottrell en firent l’acquisition. En 1698, ils étaient déjà en possession de ces documents. TNA: PRO, LC 5/2, p. 218.
51 « Giraut qui par sa longue expérience et sa grande mémoire étoit un Recüeil vivant. » Arsenal, ms. 3860 (Mémoires de Breteuil, t. II), p. 143.
52 S. Brouillet, La tyrannie du cérémonial..., op. cit., p. 37.
53 Considering all the books of his farnily to be private property, he retained in his possession ail the note books and memoranda of Ceremony of his predecessors. Ces propos sont de sir Robert Chester. Pour l’ensemble de ce passage, nous suivons les explications que ce dernier donne dans ses introductions aux différents volumes des copies des note books de la famille Cottrell (TNA: PRO, LC5/2-5).
54 P. Baertsoen, Mémoires de monsieur de Berlize, II, p. 153.
55 Arsenal, ms. 3860 (Mémoires de Breteuil, t. II), p. 144.
56 Dufort de Cheverny, Mémoires, p. 107.
57 Denis Godefroy, Le cérémonial français, Paris, 1649, p. 771-807.
58 Introduction d’Évelyne Lever aux Mémoires du baron de Breteuil, Paris, François Bourin, 1992, p. 34.
59 TNA: PRO, LC 5/201 (années 1660-1689)-LC 5/204 (années 1740-1819). Sur l’accueil ou le défraiement des ambassadeurs, voir par exemple: LC 5/201, p. 273, 393.
60 Jean-Pierre Samoyault, Les bureaux du secrétariat d’État des Affaires étrangères sous Louis XV, administration, personnel, Paris, Pédone, 1971, p. 100-101. Le Dran semble s’être intéressé au cérémonial surtout sous le ministère de Chauvelin (1727-1737). Les archives du ministère des Relations extérieures..., p. 94. Citons, à titre d’exemple: A. E., M. et D., France, 1852, « Fonctions de l’introducteur, preuves extraites de MM. de Breteuil et de Sainctot (1733) ».
61 On pourrait établir un parallèle entre les travaux de Le Dran et les documents collectés et rédigés par Joseph Williamson, conservateur des State Papers de 1661 à 1702. La comparaison n’est toutefois pas réellement pertinente. Ce n’est qu’à sa mort que les archives de Williamson – dont beaucoup traitaient du cérémonial diplomatique – ont intégré, voire réintégré le State Papers Office. Cf. WN. Sainsbury, « Calendar of Documents Relating to the History of the State Paper Office to theYear 1800 », dans Deputy Keeper of Public Records, Thirtieth Report, Appendix, Londres, 1869, p. 214 et suiv.
62 Les archives du ministère des Relations extérieures..., op. cit., p. 133.
63 Un officier pouvait consulter ces archives sans difficulté. Samoyault, Les bureaux du secrétariat d’État..., op. cit., p. 104-105.
64 Arranged the notes, had them copied and bound up in this folio. NA: PRO, LC 5/5, note introductive de Robert Chester, non foliotée. L’ensemble de ce paragraphe s’appuie sur le récit de Chester (TNA: PRO, LC 5/2-5. Se reporter aux notes introductives).
65 The extracts werefound to be extremely incorrect, as well as scanty [...]. I have now corrected them, and have added considerably to them by an appendix, front the original mss books which I borrowed of my cousin’s family for the purpose. NA: PRO, LC 5/3, note introductive par Robert Chester, non foliotée.
66 The correction I have been abled to make & the additions in appendix are partly front the original books sent to me for the purpose; but the greater part of the appendix consists of original documents which I found here among Sir Stephen Cottrell’s papers left to me at his death. TNA: PRO, LC 5/4, note introductive par Robert Chester, non foliotée.
67 On trouve les différents note books de Robert Chester aux National Archives. TNA: PRO, Note Books de Chester: LC 5/7 [comme assistant] (1796-1811), LC 5/8 (1812-33), LC 5/9 (1835-41) et LC 5/10 (1842-6).
Auteur
Centre d’études supérieures de la Renaissance, Tours
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