Les faux-semblants et les avatars de l’enfermement à l’époque moderne
p. 275-288
Résumé
L’enfermement à l’époque moderne a mauvaise réputation. En dénonçant pêlemêle et sans nuance l’absolutisme, le fanatisme et l’obscurantisme sous l’Ancien Régime, les philosophes des Lumières et les révolutionnaires ont imposé une vision négative et durable de la question. Théorisé dans les années 1960-1970 par M. Foucault, il fut ensuite perçu comme le système implacable d’un régime monarchique qui procède au grand renfermement des pauvres et des marginaux. Dans cette perspective, les hôpitaux ne sont que le « tiers ordre de la répression » et les autres structures d’enfermement, des institutions pour « surveiller et punir ». Aussi, toute mise au point passe-t-elle d’abord par une nécessaire révision historiographique afin de se dégager du carcan idéologique, de l’amalgame et des anachronismes. On n’insistera jamais assez sur la grande diversité des formes d’enfermement ainsi que sur leur rôle souvent équivoque, à l’image des contradictions de la société. Car c’est en croisant l’ensemble des sources disponibles et pas seulement des règlements que les historiens des couvents, des hôpitaux, des refuges ou des maisons de force sont parvenus à la constatation qu’il n’y a pas de système préétabli mais plusieurs types de prise en charge qui ont évolué en fonction des difficultés de financement et des attentes de la population.
Texte intégral
1Traiter de l’enfermement après Michel Foucault et ses disciples peut paraître inutile, et vouloir en montrer les faux-semblants ainsi que les avatars relever d’une entreprise iconoclaste et présomptueuse. Or, le croisement que je pratique depuis une trentaine d’années entre archives hospitalières, religieuses et sanitaires à l’époque moderne m’amène à constater, après de nombreux modernistes, que le schéma foucaldien est ahistorique, voire antihistorique de par la méthode et l’esprit de système. En effet, étudier le grand renfermement des pauvres à partir des dispositifs réglementaires sans en suivre les résultats, ni contextualiser en fonction des subtilités de la société de l’Ancien Régime et de ses tensions internes conduit à une approche partielle et partiale de la question. Il en résulte une vision restrictive et négative du renfermement qui ne rend pas compte de la pluralité et de l’ambivalence des formes d’enfermement1.
2Plus grave est l’affirmation sans nuances qu’on est en présence d’un système implacable imposé par l’absolutisme et le fanatisme religieux afin de « surveiller et punir ». Il serait à l’origine de l’idéologie totalitaire et concentrationnaire qui a fait tant de ravages au siècle dernier et qui a obsédé les intellectuels de la seconde moitié du xxe siècle. Seulement, cette machine de guerre contre l’Ancien Régime et l’ordre moral de la bourgeoisie prend tout son sens dans le combat libertaire de cette période. Instrumentalisée, l’histoire a servi de prétexte. L’amalgame et l’anachronisme ne sauraient tenir lieu de démonstration.
3 Sans insister davantage sur les polémiques, car les historiens ont mieux à faire, il faut néanmoins reconnaître à M. Foucault le mérite d’avoir attiré l’attention sur un problème majeur débattu dans les sociétés européennes dès la première modernité et d’en avoir fait un outil conceptuel qui peut encore stimuler la recherche, à condition de confronter avec prudence toutes les archives et de ne pas s’enfermer dans une grille de lecture. Malgré les fantasmes qu’il génère, l’enfermement n’est pas un mythe. Du coup, notre propos n’est pas de nier le phénomène mais d’essayer de le saisir dans sa diversité institutionnelle et culturelle en insistant sur le monde hospitalier2. N’est-ce pas l’arbre qui cache la forêt ? Au-delà des discours menaçants, que de situations intermédiaires et contradictoires où l’État n’intervient pas ! Aussi faudra-t-il s’interroger sur les usages sociaux de l’enfermement, de ses limites et finalement de ses avatars, quitte à ébranler quelques certitudes pour rester au plus près des réalités familiales, sociales et mentales de l’époque considérée.
Derrière une foison d’institutions, des types de prise en charge bien spécifiques
4Partons de la constatation que, dans le paysage institutionnel de l’Ancien Régime, les structures d’enfermement sont nombreuses, variées et souvent surajoutées les unes par rapport aux autres. Dans cet imbroglio administratif, la lisibilité n’est pas immédiate. Pourtant, à défaut de dresser un catalogue exhaustif des maisons qui renferment, je voudrais esquisser une typologie à partir de trois grands ensembles ; pour des raisons de clarté, on peut distinguer les établissements hospitaliers, religieux et punitifs, en précisant que la frontière est mouvante à cause de la grande diversité des situations autant en France que dans les pays voisins3.
Les institutions hospitalières, ou l’enfermement à des fins charitables et médicales
5En ce qui concerne l’équipement hospitalier de l’Ancien Régime sur lequel nous sommes bien informés4, on peut affirmer à la suite de Muriel Jeoerger que la France dispose d’un solide réseau de près de 2 000 établissements, soit deux fois plus qu’en Espagne et en Italie, implantés depuis longtemps le long des voies de communication, dans les villes et dans les régions favorisées par des fondations charitables. Les structures les plus « médicalisées », les hôtels-Dieu mais aussi des hôpitaux spécialisés pour accueillir des catégories de malades refusés par les hôtels-Dieu, tels que ceux fondés pour les incurables, les scrofuleux, les teigneux, les vénériens, les sourds et muets, les convalescents, les militaires, les pestiférés... ne sont pas des prisons. À la lecture attentive des sources, nous découvrons un monde hospitalier en perpétuel combat contre la misère, la souffrance, la maladie, les crises à répétition et l’insuffisance des revenus. La gestion de ces institutions autonomes à direction collégiale incombe à des administrateurs bénévoles et à des sœurs hospitalières soucieux de défendre le bien des pauvres et de promouvoir la mission charitable de l’établissement. Ils se méfient de toute ingérence extérieure5. Beaucoup d’hôpitaux à l’image de celui de Dijon6 ont refusé l’enfermement ou, quand ils acceptent d’être convertis en hôpitaux généraux, on s’aperçoit qu’ils se transforment très vite en hospices de vieillards et en orphelinats.
6La priorité des hospitaliers d’autrefois, qu’ils soient de confession catholique ou protestante7, est de secourir le prochain, de l’assister corporellement et spirituellement. Sous prétexte que la médicalisation n’est pas spectaculaire, il serait injuste de la minorer. La mise en quarantaine des pestiférés, le confinement des contagieux8, l’isolement et le traitement des fous, devenus la spécialité des frères de saint Jean de Dieu font partie de l’arsenal des moyens médicaux et sanitaires qui passent par des formes inévitables d’enfermement. Ce n’est pas une fin en soi mais une prise en charge pour assurer, selon les cas, protection, guérison et rééducation.
7D’ailleurs, dans l’agencement de l’espace hospitalier qui n’a jamais fait l’objet d’un modèle architectural de type asilaire9 à l’époque moderne, tout semble calculé ou réadapté pour qu’il y ait une bonne complémentarité et perméabilité entre les services internes. De même, la cléricalisation du personnel et la nécessité d’aménager des bâtiments conventuels pour la communauté n’ont pas, en général, gêné l’administration des soins. Portes et couloirs font communiquer ; cour et chapelle réunissent, et les murs ne font pas de l’hôpital un lieu clos, replié sur lui-même, dans la mesure où le modèle monastique s’adapte à la fonction hospitalière et que les relations avec l’extérieur sont plus importantes qu’on ne le croit (défilé de fournisseurs, d’ouvriers, de passants, de visiteurs10...).
8Si la tradition charitable perdure dans ces maisons et connaît un second souffle à la faveur de la réhabilitation des œuvres de miséricorde après le concile de Trente, elle ne paraît pas, en revanche, la principale finalité recherchée par les hôpitaux généraux, destinés à renfermer mendiants et vagabonds, et présentés trop souvent comme les symboles de l’infâme « renfermement des pauvres ». Cette nouvelle formule, nullement inventée par Louis XIV, est testée dès le xvie siècle en Espagne, aux Pays-Bas, en Angleterre, à Rome et dans d’autres villes en vue d’essayer de lutter contre le paupérisme et la mendicité. Pour des raisons financières et religieuses, car des théologiens et des apôtres de la charité (Vincent de Paul) refusent de cautionner le renfermement, les résultats ne sont pas à la hauteur des espérances affichées.
9On a beaucoup écrit sur la mise en place de l’Hôpital général de Paris11 en 1656, sur l’édit de 1662, sur la peur que suscitent après la Fronde les « mauvais pauvres ou gens sans aveu », sur les abominables cachots de Bicêtre12 et de la Salpêtrière, sans examiner toutes les contradictions inhérentes au « grand dessein ». Car, faute de système pénitentiaire et de moyens véritables, les gouvernants ont cherché à utiliser les hôpitaux à des fins de sûreté publique. Or, ils restent méfiants et n’aiment pas recevoir des ordres, surtout de cette nature. Finalement, une masse croissante de veuves, d’infirmes, d’indigents et d’orphelins, plus nombreux que les vagabonds qu’on a du mal à traquer, investissent les hôpitaux généraux et les transforment en asiles de nécessiteux. En cas de maladie, ils sont acheminés vers l’Hôtel-Dieu. Leur existence est rythmée par la prière, le travail13, la récréation, les repas dans les hôpitaux qui leur assurent le gîte et le couvert14. Visites et sorties sont attestées ainsi que la formation professionnelle des jeunes gens, particulièrement développée à la Charité de Lyon. Aussi, la fonction répressive de ces établissements (177 en France à la fin de l’Ancien Régime) est-elle au total très marginale.
Les maisons religieuses et le double sens de la clôture
10Du côté des milliers de maisons religieuses que comptent les pays catholiques à l’époque moderne, le procès est instruit depuis longtemps. Encore plus fortement condamné que l’enfermement hospitalier, le cloître a été assimilé à un lieu de contrainte et de perversion, la clôture à une pratique contre nature. Relisons Érasme, Luther, Montesquieu ou Diderot pour nous rendre compte de la virulence nouvelle de l’antimonachisme15. À la critique traditionnelle des abus commis par les moines et les moniales, s’ajoute désormais la condamnation théologique et philosophique des vœux monastiques tandis que les politiques redoutent l’extension des biens de mainmorte.
11Grâce au renouveau de l’histoire monastique, nous disposons de travaux suffisamment solides et variés qui permettent de mieux comprendre les enjeux de la vie monastique et d’en finir avec les vieilles querelles entre les défenseurs inconditionnels de l’Église et les anticléricaux16. Malgré le choc de la Réforme, l’Église catholique bénéficie d’une tradition monastique quasi millénaire sur laquelle elle va rebâtir en réformant les ordres anciens et en favorisant la fondation de nouveaux ordres ainsi que l’expansion des instituts séculiers. Certes, prôner le retour à la régularité, renforcer la clôture, comme la papauté a pu le faire à maintes reprises, notamment au xiie siècle, cela n’est pas nouveau ; et, à chaque fois, on rappelle que le cloître est un espace clos et que la clôture correspond aux règles qui interdisent aux religieux de sortir de cette enceinte et aux étrangers d’y pénétrer17. Pourtant, les formes qu’emprunte la réforme monastique aux xvie et xviie siècles donnent une acuité nouvelle à l’enfermement religieux. On le détecte non seulement au niveau du soin méticuleux apporté à la rédaction de la règle, à la formation des novices, à la vérification de la vocation, à la régularité des revenus, mais surtout à propos du renforcement de la clôture féminine par les papes post-tridentins.
12Comme les spécialistes des moines et des moniales viennent de s’exprimer à ce sujet, je ne retiendrai que deux points ; le premier concerne la légitimité de cet engagement religieux sur la base d’un réel consentement qui porte le/ la profès/professe à mourir au monde pour s’unir à Dieu. On s’enferme pour mieux agir sur le monde. Beaucoup de religieuses, sans être des victimes ni des névrosées, l’ont parfaitement compris et se sont empressées au xviiie siècle de prononcer des vœux solennels. Le poids des contingences extérieures existe mais elles ne suffisent pas à expliquer la ruée vers les cloîtres jusque dans les années 1730.
13Le second point soulève la question du « bon usage » de la clôture dans les communautés hospitalières et enseignantes. Comment ces femmes cloîtrées peuvent-elles remplir leur mission ? Faut-il pour autant leur opposer la disponibilité des sœurs de charité qui appartiennent à des instituts séculiers ? Sans reprendre ce que j’ai écrit dans une publication de 2005 consacrée à « La femme dans la ville : clôtures choisies, clôtures imposées18 », je rappellerai volontiers que les religieuses hospitalières (augustines, saint Joseph de La Flèche...) et enseignantes (ursulines, congrégation Notre-Dame de saint Pierre Fourier...) ont su adapter la clôture au service hospitalier sans conflit majeur et que les séculières sont des « régulières dans le siècle », très attachées à l’esprit de clôture et soumises à leurs supérieurs ecclésiastiques. Du coup, en opposant le fanatisme des cloîtrées à l’utilité sociale des séculières, les beaux esprits du xviiie siècle sont à l’origine de stéréotypes tenaces sur la clôture. Finalement, ils n’ont pas compris que l’esprit de clôture qui habite les secondes était une autre façon de vivre et d’assumer pleinement l’enfermement religieux.
Autres lieux d’incarcération, entre expiation et rédemption ?
14Sous l’Ancien Régime, il n’est pas facile de repérer les « prisons » ou ce qui en tient lieu19. En effet, l’emprisonnement, tel que nous le connaissons, est une innovation du droit révolutionnaire. L’ancien droit ne connaît que la prison préventive. Les tribunaux ne prononcent pas de condamnations à la prison tant l’échelle des peines est large (mort, galères20, fouet, amende honorable, bannissement, pilori, flétrissure). Comme le soulignent les contemporains, « la prison n’est point un châtiment, elle ne doit être qu’un lieu de sûreté où l’accusé (c’est-à-dire le prévenu en attente de procès) doit être gardé jusqu’à ce qu’il soit jugé21 ». Seulement, dans ces maisons dites de force qui relèvent de diverses juridictions (royales, seigneuriales, ecclésiastiques et municipales), la condition des prisonniers est exécrable à cause de la promiscuité, de l’insalubrité et surtout de la corruption des geôliers, d’où les plaintes récurrentes contre ces mauvais traitements.
15Mais ce qui nous importe ici, c’est de savoir, au-delà du sordide, quels sont les autres usages qu’on attribue à ce genre de détention. Pourquoi laisser croupir les détenus dans des culs-de-basse-fosse sans occupation ni autre perspective que la mort, le désespoir ou la folie ? Parallèlement aux tentatives d’humanisation, l’idée forte du rachat et de l’enfermement rédempteur progresse. Elle s’est développée dans le droit de l’Église qui mise sur un nécessaire amendement et qui, au fil des siècles, a mis au point des prisons monastiques où l’esprit de pénitence est tourné vers la rédemption. Le beau texte de Mabillon (1632-1701), Réflexions sur les prisons des ordres religieux, rédigé vers 1692-1695 et publié en 1724 est très représentatif de la volonté de rééduquer le détenu et de donner un sens à sa captivité22. La Compagnie du Saint-Sacrement, Vincent de Paul et plus tard les philanthropes défendent les mêmes principes. Selon Mabillon, il faut prévoir promenades, visites, lectures et occupations. Il pense que les couvents pourraient se doter de cellules comparables à celles des chartreux, avec un laboratoire et un petit jardin. Les offices seraient suivis à partir d’une tribune séparée. Il donne à son texte une portée plus générale car il précise que « la justice qui se pratique dans les monastères contre les criminels doit imiter la conduite de l’Église. La dureté doit être bannie, tout y doit être paternel puisque c’est une justice d’un père à l’égard de son fils. Enfin l’esprit de charité et de miséricorde doit surtout présider dans ces jugements ».
16Paradoxalement, l’arbitraire royal a utilisé la prison à d’autres fins. Pensons aux personnes arrêtées par ordre du roi, internées à la Bastille, à Vincennes, à Bicêtre ou chez les correctionnaires de Saint-Lazare23, rendues à la liberté après une captivité plus ou moins longue. Pratiques et idées ont ainsi peu à peu préparé la naissance du système pénitentiaire. Le succès de deux types d’établissements à la fois punitifs et charitables au xviiie siècle semble typique de la recherche de nouvelles formules adaptées à l’accueil de catégories difficiles à corriger, à savoir les mendiants et les prostituées, que les hôpitaux et les couvents répugnent à recevoir massivement car ils estiment que ce n’est pas conforme à leur vocation et qu’ils manquent de place et de moyens.
17Dans les années 1770, près de 80 dépôts de mendicité ont utilement déchargé les hôpitaux généraux. En revanche, faute d’étude d’ensemble, on ne sait pas combien la France compte de refuges : sûrement plus d’une centaine car, comme dans les pays voisins, il en existe au moins un par ville qui renferme de gré ou de force prostituées et femmes séduites24. Pénitentes, Repenties, Madelonnettes, Bon Pasteur... voici autant de termes qui portent la marque d’un projet charitable fondé sur une théologie de l’expiation et de la rédemption, alors que les qualificatifs de recluses et de forcées renvoient à des établissements spécifiques, souvent annexes d’hôpitaux généraux. Par exemple, la force de Sainte-Pélagie à Paris dépend de l’Hôpital général, ce qui ne remet pas en cause la présence du refuge fondé par Mme de Miramion25. Selon la clientèle (volontaires, forcées, sans oublier les indécises et les récidivistes), ces maisons prévoient un traitement différencié. Le refuge fermé autant pour des raisons spirituelles que matérielles, afin d’éviter les effets dévastateurs des entrées et des sorties incontrôlées, se veut d’abord une retraite réparatrice. Cependant, c’est sous la pression des municipalités et des familles que beaucoup de ces institutions se sont éloignées de la charité initiale des premiers fondateurs. C’est le sens de cette évolution qu’il convient maintenant d’aborder à travers les avatars de l’enfermement au xviiie siècle.
Paradoxes et réorientations des pratiques d’enfermement au xviiie siècle
18En dépit des apparences de routine ou de sclérose administrative, l’histoire de ces maisons n’est pas immobile ; mais il n’est pas aisé de suivre l’évolution et le fonctionnement de la plupart tant elles ont été éprouvées par l’effondrement du système de Law dans les années 172026. Aléas de toute nature et émergence de nouveaux besoins au sein de la société poussent ces établissements à diversifier les offres et même à redéfinir leurs pratiques d’enfermement.
Échec de l’enfermement hospitalier
19C’est net en matière d’enfermement hospitalier, qui se solde dès la fin du xviie siècle par un échec. Les créations ex nihilo sont rares. Les établissements reconvertis en hôpitaux généraux n’appliquent pas à la lettre les consignes de l’édit de 1662. À défaut de traquer et d’enfermer les vagabonds, ils reçoivent une majorité de vieillards et d’orphelins. Même à l’Hôpital général de Paris, réputé coercitif, l’étude de la clientèle dès 1701 montre que les délinquants sont minoritaires (moins de 16 %, contre 47 % d’enfants, 20 % de malades, paralysés et insensés27).
20À quelques nuances près, les hôpitaux généraux de province deviennent de vastes hospices, de plus en plus réservés aux gens du cru, où la direction est obligée de porter l’âge d’admission à 65/70 ans pour ne pas être submergée. De sorte qu’Isaac Girard, pensionnaire de l’hôpital général de Blois, admis en 1725 à l’âge de 55 ans, n’est pas mécontent d’être secouru ; en effet cet ancien horloger seul et infirme rend quelques services à l’hôpital et il bénéficie en conséquence d’un traitement de faveur. Il a laissé, ce qui est exceptionnel pour l’époque, un journal, conservé à la bibliothèque municipale de Blois, où il a noté d’une façon décousue mais émouvante des observations sur la météorologie, les cadeaux qu’il reçoit à l’occasion de visites qui diminuent, ses sorties en ville, le dévouement du personnel, les décès de ses compagnons... Bref, dans ce témoignage poignant, aucune plainte contre un quelconque enfermement de l’hôpital mais l’expression du désarroi d’un vieil homme fatigué qui sent la mort arriver à grands pas28.
21L’autre argument de cet échec patent est à rechercher dans la législation du règne de Louis XV qui répète et renforce les dispositions de lutte contre la mendicité et le vagabondage29. La Déclaration de 1724, à l’origine d’un second renfermement, vise à augmenter le nombre des hôpitaux généraux et à les impliquer davantage dans le confinement des vagabonds30. Les résultats sont si décevants que la commission Laverdy prépare en 1764 une nouvelle déclaration dont la grande nouveauté est d’ouvrir des dépôts de mendicité dans toutes les généralités et de les placer sous l’autorité de l’intendant.
Dépôts de mendicité et velléités punitives
22Créés dans l’improvisation, les dépôts de mendicité ressemblent à des prisons de travail où sont jetés des vagabonds, des filles publiques, des libertins, des veuves, des enfants... Il ne s’agit pas d’en faire l’historique31, de retenir les incohérences gouvernementales et la tentative médiatique de Necker de faire du dépôt de Soissons un « modèle32 », mais d’attirer l’attention sur une rupture. Le gouvernement reconnaît enfin, et sans doute à regret, que les hôpitaux ne sont pas des instances répressives. Dans l’arrêt du Conseil du 21 octobre 1767, l’aveu est clair : « Les hôpitaux ne sont pas suffisamment rentés et ils n’ont pas de lieux de force assez sûrs pour recevoir des vagabonds condamnés à y être enfermés » !
23D’une certaine façon, ils prennent le relais des hôpitaux généraux, comme autrefois ces derniers avaient recueilli le trop-plein des hôtels-Dieu. À travers ces avatars, on s’achemine vers la mise en place de nouvelles structures punitives en marge de l’hôpital33. Cependant, autant fondés sur l’assistance par le travail que sur l’emprisonnement, les dépôts de mendicité n’ont jamais acquis un statut définitif ; pis-aller sans cesse critiqués, ils ont été abolis par Turgot puis sous la Constituante avant d’être rétablis par Napoléon.
24Dans le même ordre d’idée, il n’est pas sûr que les hôpitaux à la fin de l’Ancien Régime aient pu se débarrasser massivement des fous et des prostituées, mal séparés des autres patients34. Pourtant, le traitement des aliénés n’a pas attendu le geste libérateur de Philippe Pinel ni la loi du 30 juin 1838 pour faire l’objet de recherches constantes35 et tenter d’améliorer le sort de ces malheureux. Bien que la folie fasse peur, qu’on n’en comprenne pas toutes les causes et que les traitements restent dérisoires, elle est peu à peu appréhendée comme une maladie. À l’insensé, « privé de sens », se substitue la notion d’« aliéné », c’est-à-dire de l’étranger qu’il faut s’efforcer de ramener au sens commun. La tradition charitable des frères de saint de Dieu36 et la philanthropie des Lumières convergent sur la nécessité de créer des hôpitaux spécialisés et médicalisés qu’on appellerait « asiles37 ». Si la médicalisation tarde à changer radicalement les réalités de l’enfermement, les besoins éducatifs, en revanche, ont joué le rôle d’un puissant levier pour transformer beaucoup d’institutions en maisons d’éducation.
Besoins éducatifs
25Ils se mesurent d’abord dans les progrès significatifs de l’alphabétisation38, dans le succès des congrégations enseignantes, mais surtout dans la très forte demande urbaine. Mimétisme social, désir de promouvoir les enfants et de placer les plus difficiles dans une institution spécialisée amènent petite et moyenne bourgeoisies à miser sur l’éducation. Ainsi, beaucoup de familles sont en mesure de verser des pensions annuelles comprises entre 300 et 600 livres39. Selon les ressources de la ville, elles envoient le garçon au collège et la fille chez les ursulines ou dans un pensionnat du même genre40. Du coup, de nombreux couvents développent leur pensionnat de façon à offrir aux filles les connaissances de base, les bonnes manières et ce qui est nécessaire à la formation d’une future mère de famille pieuse et responsable. Dans cette clientèle, on trouve aussi des jeunes filles ou jeunes femmes libertines, simplettes ou infirmes que l’institution accepte moyennant finances versées par les familles qui préfèrent cette solution discrète et feutrée à l’hôpital ou à la maison de force.
26C’est sur le sort mal connu des refuges que j’insisterai pour finir. Même s’ils sont différents les uns des autres dès les origines, la vocation charitable des fondateurs, des bienfaiteurs et des visiteurs va être mise à dure épreuve par l’insuffisance de revenus et la volonté de combattre le désordre des familles41. Les refuges qui résistent le mieux à la fin de l’Ancien Régime sont ceux où la proportion des pensionnaires l’emporte sur celle des repenties, comme au Bon Pasteur, au Sauveur et à Sainte-Valère à Paris. Les Madelonnettes de Paris, de Bordeaux et à Rouen se transforment aussi en pensionnats payants pour libertines et filles mères qui évitent l’infamie ou la prison. Concernant Sainte-Pélagie, le guide de Thiery42 confirme sa division en trois parties : la première réservée aux femmes et aux filles qui y sont par ordre du roi, la seconde qui correspond à une pension d’éducation pour les jeunes demoiselles et la troisième où l’on reçoit femmes et filles qui s’y retirent de bonne volonté ; comme si le repentir cédait la place à un enfermement utile fondé sur un projet éducatif de réinsertion.
27Ironie de l’histoire, c’est dans ce même lieu de Sainte-Pélagie transformé en prison pendant la Révolution que madame Roland (Manon Phlipon) se remémore en août 1793 son passage au couvent des sœurs de la Congrégation Notre-Dame du faubourg Saint-Antoine :
« Je m’étais fait du cloître, de sa solitude et de son silence les idées grandes ou romantiques que mon active imagination pouvait enfanter. Plus son séjour était auguste, plus il convenait aux dispositions de mon âme touchée [elle demande à ses parents d’aller au couvent et la famille peu dévote mais nullement hostile au désir de Manon cherche une maison]... On se rappelle que mon maître de musique avait cité un couvent où il enseignait de jeunes demoiselles, et on décide que l’on fera des informations. Il résulta de celles-ci que la maison était honnête, l’ordre peu austère ; les religieuses passaient en conséquence pour n’avoir point de ces excès, de ces momeries qui caractérisaient leur plus grand nombre. D’ailleurs elles faisaient profession d’instruire la jeunesse, elles tenaient des écoles externes ou d’enfants du peuple qu’elles enseignent gratis pour accomplir leurs vœux, et qui se rendaient du dehors à cet effet dans une salle qui leur était consacrée ; mais elles avaient séparément un pensionnat pour les jeunes personnes dont on voulait leur confier l’éducation. Ma mère fit les démarches et, après m’avoir conduite en visite chez tous mes grandsparents en leur annonçant ma résolution qu’ils applaudirent, elle me mena chez les dames de la congrégation, rue Neuve-Saint-Étienne, faubourg Saint-Marcel, bien près du lieu où je suis actuellement renfermée [...]. C’était le 7 de mai 1765, j’avais alors 11 ans et deux mois. Comment du fond d’une prison, au milieu des bouleversements politiques qui ravagent mon pays et entraînent tout ce qui me fut cher, rappeler et peindre aujourd’hui ce temps de calme et de ravissement ? Quelle fraîcheur de pinceau peut rendre les douces émotions d’un jeune cœur sensible et tendre, avide de bonheur, commençant à sentir la nature et n’apercevant que la divinité43 ? »
28Une relecture du phénomène d’enfermement à l’époque moderne à travers ses faux-semblants et ses avatars nous conduit à formuler trois types de remarques.
291) Au titre des certitudes quasi établies, il est clair que le renfermement des pauvres qui obsédait tellement les gouvernants de la première modernité a largement échoué. La monarchie faute de moyens a cherché à se décharger sur les hôpitaux et les couvents dans l’espoir de purger la société à bon compte. C’était minimiser leur capacité de résistance et, à travers elle, mépriser leur finalité charitable et religieuse. Fidèles à leur vocation initiale, hôpitaux, couvents et refuges ont toutefois évolué ; médicalisation, spécialisation et besoins éducatifs sont à l’origine de nouvelles pratiques d’enfermement.
302) Parmi les interrogations qui demeurent, liées en partie à l’imbroglio administratif et à la confusion des genres qui en découle, il y a celle qui porte sur les origines du système pénitentiaire et asilaire que les spécialistes situent avant la Révolution. L’avènement de la médecine clinique44, les nouvelles préoccupations de santé publique et l’humanitarisme des Lumières accélèrent la prise de conscience en faveur de traitements différenciés. L’idée progresse de ne plus mélanger fous, libertins, infirmes et prostituées, mais pendant longtemps les moyens financiers et thérapeutiques manqueront pour les traiter dignement.
313) C’est pourquoi des recherches centrées sur la Révolution et l’Empire mais surtout sur une période plus large de 1750 à 1850, voire au-delà, permettraient de mieux comprendre la mise en place des prisons et des asiles et pourquoi on aspire tant à en faire des « laboratoires de perfection d’où sortirait l’homme nouveau ». Quelle est la part de l’utopie et du réalisme dans ce genre de projet ?
Notes de bas de page
1 Réfutation amorcée par J.-P. Gutton, La société et les pauvres dans la généralité de Lyon (1534- 1789), Paris, 1971, « Enfermement et charité dans la France de l’Ancien Régime », Histoire, économie et société, 1991, p. 353-358 ; J. Imbert, Le droit hospitalier de l’Ancien Régime, Paris, 1993, et surtout J. Leonard, « L’historien et le philosophe. À propos de Surveiller et punir ; naissance de la prison », dans dir. M. Perrot, L’impossible prison, Paris, 1980, et J. Depauw, Spiritualité et pauvreté à Paris au xviie siècle, Paris, 1999. Élargissement des perspectives dans Religion et enfermements (xviie-xviiie siècle), dir. B. Delpal et O. Faure, Rennes, PUR, 2005.
2 M.-C. Dinet-Lecomte, Les sœurs hospitalières en France aux xviie et xviiie siècles. La charité en action, Paris, 2005.
3 J.-P. Gutton, La société et les pauvres en Europe, xvie-xviiie siècle, Paris, 1974 ; M.-C. Dinet-Lecomte, « Les pauvres et la société en Angleterre, en Espagne et en France au xviie siècle », dans Les sociétés anglaise, espagnole et française au xviie siècle, dir. H. frechet, Nantes, 2006, P- 39-79. On tirera profit des travaux suivants qui restituent à l’enfermement hospitalier sa finalité charitable, bien que la sécularisation et les Poor Laws aient contribué à changer l’assistance dans les pays protestants et en Angleterre en particulier : W.-K. Jordan, Philanthropy in England, 1480-1660. À Study of Changing Pattern of English Social Aspirations, Londres, 1958 ; P. Slack, Poverty and Policy in Tudor and Stuart England, Londres-New York, 1988 ; R. Jutte, Poverty and Deviance in Early Modern England, Cambridge, 1994 ; M. Flynn, Sacred Charity : Confraternities ans Social Welfare in Spain, 1400-1700, Londres, 1989 ; L. Martz, Poverty and Welfare in Habsburg Spain. The Exemple of Toledo, Cambridge, 1983 ; O. Hufton, The Poor of 18th Century France, 1750-1789, Oxford, 1974 ; C. Jones, The Charitable Imperative. Hospitals and Nursing in Ancien Regime and Revolutionary France, 1989 ; B. Pullan, Poverty and Charity : Europe, Italy, Venice, 1400-1700, Norfork, 1994 ; J. Henderson, The Renaissance Hospital. Healing the Body and Healing the Soul, New Haven-Londres, 2006 ; pour la Suisse, on retiendra M. Louis-Courvoisier, Soigner et consoler. La vie quotidienne dans un hôpital à la fin de l’Ancien Régime : Genève, 1750-1820, Genève, 2000.
4 M. Jeorger, « La structure hospitalière de la France sous l’Ancien Régime », Annales ESC, 32/5 (1977), p. 1025-1051, parvient à l’estimation de 1960 hôpitaux après avoir opéré une péréquation entre les chiffres de Tenon (2326) et ceux de Necker (770).
5 D. Hickey, Local Hospitals in Ancien Regime France. Rationalization, Resistance and Renewal, Montréal, 1997.
6 C. Lamarre, L’hôpital de Dijon au xviiie siècle, Langres, 2004.
7 Dir. J.-P. Gutton, Les directeurs d’hôpitaux dans la France de l’Ancien Régime, Lyon, 1999, Les directeurs d’hôpitaux dans l’Europe moderne, Lyon, 2002.
8 F. Hildesheimer, Le bureau de la santé de Marseille sous l’Ancien Régime. Le renfermement de la contagion, Marseille, 1980.
9 Les murs de l’a folie : utopies asilaires et architectures psychiatriques, Revue de la Société française d’histoire des hôpitaux, 130 (2008), en particulier P.-L. Laget, « Utopie asilaire : une conception architecturale bercée par l’illusion d’un effet bénéfique sur des esprits dérangés », p. 38-51.
10 Évoqué dans notre article, « La cléricalisation du personnel hospitalier aux xviie et xviiie siècles », dans Religion et enfermements..., p. 115-129.
11 Outre J. Imbert et J. Depauw cités, voir J.-P. Gutton, Dévots et société au xve siècle. Construire le ciel sur la terre, Paris, 2004, et Tim Mac Hugh, Hospital Politics in 17th Century France. The Crown, Urban Elites and the Poor, 2007.
12 P. Bru, Histoire de Bicêtre (hospice-prison-asile), Paris, 1890 ; C. Quetel, Les évasions de Latude, Paris, 1986 ; emprisonné trente-cinq ans pour un complot imaginaire contre madame de Pompadour, Danry dit « Latude » (1725-1805) fut détenu à Vincennes, à la Bastille puis à Charenton avant de connaître l’« enfer » de Bicêtre, d’être libéré en 1784 et présenté par les révolutionnaires conne une victime du despotisme.
13 L’assistance par le travail est liée aux conceptions mercantilistes de l’époque. Le travail dans les workhouses en Angleterre, mis en place à la fin du xviie siècle par les puritains, est une forme d’expiation et de rachat. Efficacité et culture du résultat sont recherchées.
14 G. Désert et P. Chaunu ont montré que les hôpitaux fonctionnent comme des secteurs abrités.
15 G. May, Diderot et La Religieuse, Yale-Paris, 1954 ; J. Ponton, La religieuse dans la littérature française, Québec, 1969 (analyses de la formation des stéréotypes sur la religieuse).
16 Parmi d’autres, on retiendra D. Dinet, Vocation et fidélité’. Le recrutement des réguliers dans les diocèses d’Auxerre, Langres et Dijon (xvii’-xviiie siècle), Paris, 1988 ; Religion et société. Réguliers et vie régionale dans les diocèses d’Auxerre, Langres et Dijon (fin xvie-fin xviiie siècle), Paris, 1999, 2 volumes ; l’étude porte sur l’ensemble des communautés d’hommes et de femmes des trois diocèses.
17 Dom J. Prou, La clôture des moniales, Paris, 1996.
18 « Du bon usage de la clôture et de l’enfermement dans les établissements charitables aux xviie et xviiie siècles », Histoire, économie et société, 3 (2005), p. 355-372.
19 À peine évoquées dans les ouvrages sur les institutions de la France moderne et même dans ceux consacrés à l’histoire de la délinquance, les prisons retiennent surtout l’attention des historiens du droit, A. Laingui, Histoire du droit pénal, Paris, 2e éd. 1993 ; on ajoutera aussi P. Deyon, Le temps des prisons. Essai sur l’histoire de la délinquance et les origines du système pénitentiaire, Éd. universitaires de Lille 3, 1975 ; M. foucault, Surveiller et punir. La naissance de la prison, Paris, 1975 ; J.-G. Petit, Ces peines obscures : la prison pénale en France, 1780-1875, Paris, Fayard, 1990 ; B. Garnot, Normes juridiques et pratiques judiciaires du Moyen Âge à l’époque contemporaine, Dijon, 2007.
20 M. Vigie, Les galériens du roi, 1661-1715, Paris, 1985 ; A. Zysberg, Les galériens : vies et destins de 60 000 forçats sur les galères de France, 1660-1748, Paris, 1987. L’enfermement des galériens et leur prise en charge à l’hôpital des galériens méritent une approche spécifique.
21 P.-J. Guyot, Répertoire universel et raisonné de jurisprudence civile, criminelle et bénejiciale, Paris, 1784-1785 ; j. Howard, État des prisons, des hôpitaux et des maisons de force, Paris, 1788, t. 1, p. 40.
22 Mabillon, Œuvres posthumes, éd. dom V. Thuillier, Paris, 1724, t. 2, p. 331-335 ; J.-P. Gutton, « À propos de la prison ecclésiastique sous l’Ancien Régime », dans Mélanges offerts à R. Sauzet. Foi, fidélité, amitié en Europe à l’époque moderne, Tours, 1995, t. 1, p. 201-209.
23 Dr J. Vie, Les aliénés et les correctionnaires de Saint-Lazare aux xviie et xviiie siècles, Paris, 1930.
24 M.-C. Dinet-Lecomte, « Diversité et ambiguïté des refuges dans les villes de l’époque moderne », dans Les passions d’un historien : mélangés en l’honneur de J.-P. Poussou, dir. R. Abad, J.-P. Bardet et al., Paris, 2010, p. 1473-1485.
25 Abbé de Choisy, Vie de Madame de Miramion, Paris, 1706 ; Marie Bonneau (1629-1696), veuve de M. de Miramion dès 1645, met sa fortune au service des grandes causes charitables du moment (création du Refuge et de Sainte-Pélagie, de la communauté de la Sainte-Famille réunie aux filles de sainte Geneviève ou Miramionnes...).
26 Stabilisation de la livre tournois en 1726 et mise en place de la Commission des secours en faveur des maisons religieuses (Archives nationales, G 9,1727-1789).
27 J. Depauw, Spiritualité et pauvreté à Paris au xviie siècle, Paris, 1999, p. 333-334 ; composition de la population de l’Hôpital général en décembre 1701.
28 Extraits présentés et commentés dans notre article, « La vie des personnes âgées à l’hôpital de Blois d’après le journal d’Isaac Girard (1722-1725) », Vieillir et mourir. Annales de démographie historique, 1985, p. 311-321.
29 Ch. Paultre, De la repression de la mendicité et du vagabondage en France sous l’Ancien Régime, Paris, 1906.
30 J.-P. Gutton, L’État et la mendicité dans la première moitié du xviiiesiècle, Saint-Étienne, 1973.
31 J. Imbert, Le droit hospitalier..., op. cit.
32 C. Bloch, L’Assistance et l’État en France à la veille de la Révolution (généralités de Paris, Rouen, Alençon, Châlons, Soissons, Amiens), 1764-1790, Paris, 1908 ; G. thuillier, Un observateur des misères sociales, Leclerc de Montlinot, 1732-1801, Association pour l’étude de l’histoire de la sécurité sociale, 2001.
33 Voir notre article, « Les hôpitaux et la justice sous l’Ancien Régime : histoire d’une collaboration discrète et distanciée », dans Mélanges offerts à Maurice Gresset. Des institutions et des hommes, Presses universitaires de Franche-Comté, 2007, p. 83-92.
34 J. Tenon, Mémoires sur les hôpitaux de Paris, Paris, 1788 : « La Salpêtrière est le plus grand hôpital de Paris et peut-être de l’Europe ; cet hôpital est en même temps une maison de femmes et une maison de force ; on y reçoit des femmes et des filles enceintes, des nourrices avec leurs nourrissons, des enfants mâles depuis l’âge de 7 à 8 mois jusqu’à 4 et 5 ans ; de jeunes femmes à toute sorte d’âges ; de vieilles femmes et de vieux hommes mariés, des folles furieuses, des imbéciles, des épileptiques, des paralytiques, des aveugles, des estropiées, des teigneuses, des incurables de toute sorte, des enfants avec des humeurs froides. Au centre de cet hôpital est une maison de force pour femmes, comprenant quatre prisons différentes : le commun destiné aux filles les plus dissolues, la correction à celles qu’on juge ne s’être pas autant oubliées, la prison réservée aux personnes retenues par ordre du roi et la grande force aux femmes flétries par la justice », p. 88.
35 J. Vie, op. cit. ; H. Bonnafous-Serieux, La Charité de Senlis, Paris, 1936, et surtout C. Quetel et P. Morel, Médecines de la folie, Paris, 1985, Nouvelle histoire de la psychiatrie, Paris, 1994.
36 A. Chagny, L’ordre hospitalier de saint Jean de Dieu en France, Lyon, 1951 et 1953, 2 volumes ; à la tête de 33 maisons ou asiles dont celui de Charenton. O. Bonnet, « Servir Dieu, servir les fous. Les religieuses dans les asiles d’aliénés au xixe siècle », dans Religion et enfermements, op. cit., p. 131-151 ; H. Guillemain, « Le traitement de la folie dans les asiles de l’ordre de saint Jean de Dieu (1830-1860) », Le mouvement social, 215 (2006), p. 35-49.
37 J. Colombier et F. Doublet, Instructions sur la manière de gouverner les insensés et de travailler à leur guérison dans les asyles qui leur sont destinés, Paris, 1785.
38 R. chartier, M.-M. Compere et D. Julia, L’éducation en France aux xvie, xviie et xviiie siècles, Paris, 1976 ; F. Furet et J. Ozouf, Lire et écrire. L’alphabétisation des Français de Calvin à J. Ferry, Paris, 1977.
39 D’après J. Vie, op. cit., parmi les 18 pensionnats destinés à enfermer les jeunes libertins à Paris, Saint-Lazare est le plus connu, recevant des jeunes de « bonnes maisons » capables de verser une pension annuelle de 600 livres.
40 M. Sonnet, L’éducation des filles au temps des Lumières, Paris, 1987.
41 A. Farge et M. Foucault, Le désordre des familles : lettres de cachet des Archives de la Bastille au xviiie siècle, Paris, Gallimard, Julliard, 1982 ; E.-M. Benabou, La prostitution et la police des mœurs au xviie siècle, Paris, 1987.
42 L.-V. Thiery, Guide des amateurs et des étrangers voyageurs à Paris, Paris, 1787, t. 2, p. 169.
43 Madame Roland, Mémoires, édition présentée et annotée par P. de Roux, Mercure de France, 1966, p. 222-223.
44 O. Keel, L’avènement de la médecine clinique moderne en Europe, 1750-1815. Politiques, institutions et savoirs, Presses universitaires de Montréal, 2001.
Auteur
Université de Picardie Jules-Verne, Amiens
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