Procédure civile de séparation en haute robe parisienne à la fin du règne de Louis XIV
p. 167-184
Résumés
La justice du roi de France s’est peu à peu emparée des causes de séparation matrimoniales, de domicile et de biens. Le cas de l’action en justice (1704- 1709) intentée devant le parlement de Paris par madame de Pommereu, épouse d’un intendant disgracié, Jean-Baptiste de Pommereu, permet grâce à une documentation exceptionnelle (archives notariées, factums, archives judiciaires) de contextualiser ce procès. En situant les enjeux familiaux dans les difficultés de la transmission des positions sociales de leurs acteurs et les mutations de l’économie lignagère dont ils sont porteurs, l’analyse fait valoir la nouveauté et l’importance prise par l’expression en genre de ces problématiques dans le conflit de couple. La procédure accusatoire qui met aux prises chaque partie et médiatise ses plaidoiries en direction du public et des juges sert un dispositif judiciaire qui a sa propre logique de mise en forme des choses et permet un certain mode d’expression puis de résolution de la crise familiale vécue par les Pommereu.
The justice of the King of France gradually took upon itself to settle cases of legal separation involving the separation of persons and goods. The case brought to the Parliament of Paris by Mme de Pommereu in 1704-1709, the wife of Jean-Baptiste Pommereu, a former steward fallen out of favour, allows us to reconstruct, thanks to the wealth of documents that have been preserved (notarized deeds, speeches for the defense, judiciary records), the historical context of the case. A close analysis of the case shows what was really at stake: the growing difficulty to transmit one’s social position, and the mutations of an economy based on lineage. The judicial procedure through which husband and wife have to go sets them against each other and mediates their grievances which have to be addressed to the audience and judges. This judicial System has a logic of its own; but it also fosters, by causing things to be presented and organized in a certain way, a means to express, and eventually to solve, the family crisis experienced by the Pommereu.
Texte intégral
1Le colloque « Couples en justice » a réuni des spécialistes d’aires géographiques différentes, qui étaient autrefois soumises chacune à ses systèmes de droit spécifiques en fonction de l’histoire de l’élaboration, régalienne ou non, de celui-ci dans chacun de ces territoires. Il est d’abord nécessaire de situer cette étude de cas parisienne dans son environnement juridique. Ensuite, les enjeux de la séparation du couple en question, issu de la haute magistrature, seront relatés, en mettant l’accent sur les aspects familiaux et parentélaires de la genèse de la rupture ; lorsqu’un corpus d’archives peut être constitué, la mise en contexte sociale, économique, politique et culturelle de ces procès s’avère indispensable à leur description, à leur compréhension et à leur mise en perspective historique. De quoi s’agit-il lorsqu’un couple se sépare vraiment, et pas seulement en biens, à la fin du règne de Louis XIV ? Quel sens revêt une action en justice entreprise sous le chef de séparation de corps pour mauvais traitements ? Le corpus ici étudié repose sur l’étude de factums très volubiles à propos de la relation conjugale. Leur volumineuse existence atteste que le procès en question était devenu une affaire qui a mobilisé, parmi les élites, un embryon d’opinion publique. Il s’agit par conséquent de comprendre aussi les raisons du choix de cette stratégie de publicisation, de la part des acteurs. Dans cette perspective, l’analyse de la procédure civile permet de lire à nouveaux frais la littérature judiciaire, trop souvent considérée des seuls côtés de la création et de la fiction littéraires ; la présente approche (marquée par la sociologie pragmatiste) provoque à ce stade du travail tout à la fois des interrogations et des constats qu’il serait dommage d’esquiver : en histoire, il faut accepter que les données empiriques déroutent parfois les certitudes générales, dont les bornes ne sont jamais intangibles.
Le progressif traitement des séparations de couple par la justice du roi de France
2En pays soumis à la coutume de Paris, pour séparer les couples mariés, c’est l’officialité épiscopale qui a procédé, jusqu’à la fin du xve siècle, à la séparation de domicile, plus tardivement désignée comme séparation de corps, et prévue par le droit des canonistes. Jusqu’à cette date, il arrivait aussi à cette juridiction de traiter simultanément de la liquidation de la communauté de biens. À partir du xive siècle, les tribunaux ecclésiastiques avaient en effet admis de procéder à la séparation de biens pour protéger les propres féminins, dans l’idée que la situation financière du mari, administrateur de la communauté, pourrait s’améliorer par la suite et la communauté de biens être rétablie1.
3Au xve siècle, dans le mouvement de consolidation des prérogatives royales sous la monarchie des Valois, les juridictions laïques et prévôtales du Châtelet ont revendiqué le monopole de la juridiction sur les séparations de biens, laissant à l’officialité le soin de procéder à la rupture de domicile et de corps, puisque le mariage restait avant tout un sacrement relevant du magistère ecclésiastique. En dépit de la fréquente invocation au droit romain (qui admettait sous condition ce que les jurisconsultes modernes appelaient le « divorce parfait », c’est-à-dire la séparation complète du couple, par annulation de tous les effets du mariage), la législation laïque s’est longtemps montrée hostile à la séparation de corps, ainsi que le manifestent les grandes ordonnances royales du xvie siècle, qui ont constitué les jalons de ce que l’historienne Sarah Hanley a conceptualisé comme le « pacte État/famille », qui renforçait l’ordre lignager des familles d’officiers soutenant la monarchie2. Cependant, s’est amorcé en la matière un processus de codification qui a abouti aux dispositions du titre 20 de l’ordonnance de droit civil de mars 1667, nouveau cadre législatif pour la procédure disposant des séparations d’habitation.
4Dans ce processus, ce sont les juridictions séculières parisiennes qui ont entraîné la législation royale, en commençant à statuer sur la séparation de domicile (corps) dans la mesure où la séparation des biens, qui était primitivement de leur ressort, était préalablement nécessaire à la cessation de la vie commune. Elle a ainsi agi dans la logique d’une continuité procédurale. Au point d’articulation entre le mariage comme fondement du cadre de l’économie domestique et l’alliance, créant una caro, une seule chair, la justice du roi pouvait ainsi intervenir dans un domaine jadis réservé au for ecclésiastique. Domaine encore inconnu de l’historien il y a quinze ans, l’étude des ruptures de couple est aujourd’hui en plein essor, ainsi que l’atteste la tenue du présent colloque. Ce qui n’était, il y a peu, qu’une présomption commence à être étayé par divers travaux en cours, tous azimuts, qui montrent que le recours des couples à la séparation en justice est devenu de plus en plus fréquent en milieu urbain au cours du xviie siècle et cela dans une large partie de l’Europe occidentale. Le travail pionnier de Lawrence Stone concernant le royaume d’Angleterre a précédé bien d’autres études concernant l’Europe protestante, jusqu’à la très récente somme de Silvana Seidel Menchi et Diego Quaglioni3, qui couvre l’ensemble de la péninsule italienne ainsi que les Pays-Bas. Il en ressort, pour le xviie siècle, une évolution commune et peut-être « transconfessionnelle », selon l’expression d’Anna Bellavitis.
Un procès de séparation dans la haute robe parisienne et ses enjeux
5Pour sa part, le dossier présenté ici ressortit du cadre de la justice civile laïque : il consiste en 24 factums découverts à la BnF, qui documentent un procès en séparation (1704-1709), survenu dans le monde de la très haute robe parisienne, entre madame de Pommereu, née Marie-Michelle Bernard (1667-1747), et son mari l’intendant Jean-Baptiste de Pommereu (1656- 1732), lui-même fils d’un très grand commis d’État4. Alors que ce père révéré meurt en 1702 et que le fils entre en disgrâce, madame de Pommereu dépose une plainte le 28 avril 17045. Elle témoigne de :
6– mauvais traitements notoires depuis le début de leur mariage en 1682 ;
7– extorsion en janvier et en avril 1702 par monsieur de Pommereu, avec la complicité de ses propres parents et d’un notaire, alors qu’il était intendant de Châlons, en Champagne, de deux donations, la première de 150000 livres tournois (Lt) prélevés sur les propres de Marie-Michelle Bernard (qui étaient d’un montant total de 300000 Lt) en faveur de leur fils aîné Michel-Gervais-Robert, alors âgé de dix-sept ans. Cette somme était affectée par substitution au puîné Jean-André ; celui-ci fit l’objet de la seconde donation, d’un montant de 60000 Lt, elle aussi substituée au troisième fils du couple.
8– Puis elle affirme avoir été emmenée à Paris par ses beaux-parents qui l’ont séquestrée (sans lui laisser de carrosse ni de domestiques, c’est-à-dire en lui ôtant son autonomie) afin de lui extorquer la deuxième donation à la Pâques 17026.
9À l’automne 1702, la mort du père, conseiller d’État, entraîna la disgrâce du fils, qui fut démis de ses fonctions et se mit à persécuter dès lors quotidiennement son épouse, en plaçant notamment auprès d’elle une servante tortionnaire, la Macé, chargée de la surveiller. Le mari indigne incitait également leurs propres enfants à maltraiter leur mère. Tant et si bien que, révoltée et craignant pour sa vie, madame de Pommereu s’enfuit, le 19 avril 1704 à cinq heures du matin. Trouvant refuge à l’abbaye Notre-Dame-des-Prez, elle porta plainte auprès du commissaire Bizoton (quartier de Vaugirard à Paris), avant d’adresser à la justice une demande de séparation de biens et d’habitation7.
La nécessité de contextualiser l’étude d’une action judiciaire
10Tels sont les prodromes du procès, mais les factums contiennent autour de ces faits judiciaires toute une argumentation prise dans une fiction théâtralisée, qui présente un conflit d’interprétation de la vie et des actions du couple, et repose sur un dialogue judiciaire fictif entre les deux parties : certains textes sont même écrits à la première personne du singulier, comme si la plaideuse s’adressait directement aux juges et au public. Pourtant, l’écriture des plaidoiries du procès mobilise bien d’autres protagonistes et acteurs : une entité abstraite et de droit qui est le public, composé des lecteurs de ces factums ; leurs rédacteurs, des avocats qui se livrent un duel scripturaire à épisodes : l’un est un jeune loup du barreau (Louis Poynet de La Blinière) qui fait partie du réseau d’amis de la plaideuse, tandis que l’autre est une star reconnue du monde littéraire, Louis de Sacy (1654-1727), chancelier de l’Académie française, ami des belles-lettres, traducteur de Pline et habitué du salon de la marquise de Lambert. En 1724, il publia des Recueils de mémoires, factums et harengues, et y inclut un des factums de l’affaire Pommereu, affaire qu’il avait pourtant perdue, mais il expliquait placer son ouvrage sous l’empire de la raison (davantage que de la gloire de la victoire) et invitait son lecteur à se faire lui-même une opinion à la lecture du mémoire. À l’instar de la profession du médecin, lequel peut échouer à sauver son patient en se battant contre la maladie, était pointée la particularité du métier d’avocat, celle de pouvoir perdre une cause. Celui-ci ne pouvait donc être payé au résultat comme un artisan, mais pour la fin supérieure qu’il recherchait8. Dans un procès, chaque acteur mettait en œuvre de cette manière des stratégies aux raisons multiples, mais qui toutes avaient leurs raisons.
11Le lecteur l’aura compris, le parti a été pris d’étudier cette affaire sous l’angle microhistorique9. Il s’agit de voir, au moyen d’une étude de cas très contextualisée, ce que suscite l’action judiciaire engagée qui rassemble différents acteurs, les matériaux et tactiques qu’elle met en œuvre, et ainsi ce qui la favorise en tant qu’activation d’un dispositif par les groupes parentélaires et leurs réseaux sociaux. Dans une réévaluation parfois provocatrice des normes familiales, cette action mobilise et engage des moyens culturels qu’elle contribue à modifier ou à accréditer. On peut établir ce contexte par l’étude de sources complémentaires (actes notariés, dossiers de Hozier et imprimés) en ce qui concerne l’environnement social, mais aussi par une attention à tout ce que le texte des plaidoiries contient lui-même comme références « hors texte », en particulier pour aborder le problème de l’espace culturel. Certes, cela prend du temps que de partir dans cette quête documentaire, mais c’est le prix à payer pour cerner au premier chef la part des pressions, contraintes et possibilités offertes par l’économie domestique. Par l’examen des règles et modalités de transmission intrafamiliale, se mesurent le rôle de chaque membre du groupe familial face à ces droits, et les usages ou mésusages qui en sont faits et qui sont soumis à l’arbitrage du tribunal et de sa pratique. On le voit, au départ, cette approche s’est nourrie des notions venues de l’anthropologie historique de la parenté (appliquée au milieu de la robe) : les interrogations qui en sont issues comportent une forte capacité heuristique de compréhension des phénomènes sociaux, étant donné l’importance du cadre d’appartenance lignager à l’époque moderne. Celui-ci connaissait une importante remise en question depuis le début du xviie siècle, évolution marquée par la mise en avant du couple dans la sphère familiale10.
12Comme elles concernaient la transmission du patrimoine, donc les propres du père et ceux de la mère, et leur accord à ce sujet en tant que couple, les transactions mises en cause dans le procès, qui recouvraient des enjeux réels, ont passionné le public parisien, lui-même engagé dans le jeu social. Il est donc pris quelque distance de méthode avec l’approche brillante de Sara Maza, qui appréhende les factums comme des fictions littéraires ayant mobilisé l’opinion publique sur des enjeux prépolitiques durant le second xviiie siècle11.
Des projets de transmission successorale concurrents : une mutation structurale des rapports de parenté
13Les archives notariées et les actes de la pratique permettent de reconstituer les fronts de parenté concernés par cet effort de transmission collectif, qui composent le langage social que maîtrise le public qui suit le procès et choisit son camp : ainsi, Marie-Michelle Bernard était la petite-fille par alliance d’un défunt grand financier du réseau Colbert, Claude Coquille, avec lequel s’était remariée sa grand-mère12. Sur le point d’être acculé par ses créanciers, Coquille avait largement contribué à la constitution de la dot de la jeune fille par des donations entre vifs de 200 000 Lt, qui lui permirent ainsi de sauvegarder et transmettre une partie de ses avoirs. Par ses activités au sein du Conseil des finances, il partagea des affaires avec Pommereu père qui contribuait aussi éminemment aux réseaux de la finance d’État, quoiqu’il existât entre eux une différence de rang et de fortune, que tâchèrent d’exploiter les deux parties, dans des sens opposés, bien entendu : alors que le défendeur montrait que les Bernard-Coquille composaient une famille dévoyée, la plaideuse dénonçait le mépris, la superbe et la calomnie qui accablaient les siens.
14La lecture des archives permet donc de cerner la stratégie de reproduction sociale élaborée par les Pommereu, en reconstruisant les coordonnées du projet de dévolution successorale conçue dans l’urgence au moment de la disgrâce de Pommereu fils, en forçant plus ou moins le consentement de madame de Pommereu. Il s’agissait d’instituer un héritier préciputaire et de l’établir à l’avance, alors que Marie-Michelle Bernard, adepte d’un autre modèle de transmission, voulait reporter à plus tard un partage plus égalitaire, récompensant au seuil de l’âge adulte chaque enfant selon ses mérites et aptitudes. Mais ce faisant, les Pommereu restaient fidèles et renforçaient même des pratiques d’héritage dynastique qu’avaient instituées deux générations de pères avant Jean-Baptiste, soucieux d’établir l’aîné comme principal héritier, en réduisant les filles à leur légitime et les cadets au célibat13.
15Après une ultime procédure en appel de son mari, madame de Pommereu gagna définitivement son procès en 1709, avec la sympathie du public. Les juges cassaient donc le projet successoral de Pommereu. Le niveau des mariages ultérieurs des enfants en capital réel et symbolique atteste que le procès du couple ne nuisit en rien à la situation objective de la maison Pommereu, bien au contraire. Ici, la crise conjugale surgit à la faveur de la menace de déclin politique ; son traitement judiciaire et sa publicité semblent servir à préserver la puissance sociale de cette famille, en la médiatisant.
16Dans la même logique de contextualisation et de modélisation « longitudinale », cette affaire peut être saisie dans une série judiciaire concernant la même famille sur une durée de quatre générations. Cette répétition des conflits autorise une réflexion à partir du modèle proposé par l’historien Maurice Daumas, qui avait étudié les conflits de famille à partir des archives de la généralité de Besançon pour établir l’axe de conflictualité qui orientait leur dynamique14. Opposant de façon tendancielle les parents à leurs enfants lors de leur entrée dans l’âge adulte, ces différends portés en justice sont caractérisés par l’historien comme des « conflits sur le seuil ». Dans le cas Pommereu, l’analyse intergénérationnelle met en évidence qu’il s’agit bien de conflits conjugaux et de conflits d’interprétation autour de l’alliance, qui entraînent d’autres conflits dans la parenté, lesquels sont ensuite judiciarisés.
17Ainsi, le grand-père de monsieur de Pommereu, François, avait en effet perdu un procès en séparation contre sa brillante épouse, Denise de Bordeaux, elle aussi issue du monde de la finance15. La séparation du couple Marie-Michelle Bernard/Jean-Baptiste de Pommereu redoublait celle qui s’était produite quarante ans auparavant. L’issue du procès répétait la défaite de l’époux de jadis. Cet échec de Jean-Baptiste de Pommereu, pourtant magistrat, devant les tribunaux lui attira de nouvelles hostilités judiciaires, cette fois dues à ses beaux-frères, maris de ses sœurs, qui réclamaient une péréquation en lieu et place des légitimes féminines pour la succession de deux ascendants. Un arrêt du Parlement du 12 février 1732 leur donna raison. Cette nouvelle entraîna visiblement la mort de notre antihéros de la robe, qui se serait suicidé le même jour. Ensuite, le conflit s’était reporté entre les enfants du couple séparé, trois fils et une fille. En 1733, l’aîné, Michel-Gervais-Robert contestait devant le Parlement le testament de son père qui avantageait le second fils, procès qui finit par un pénible compromis, amélioré par la suite (1734) grâce à une alliance successorale entre la mère et ce fils aîné16.
18Enfin, la documentation fait état entre 1701 et 1709 d’un autre divorce simultané dans la parentèle des Pommereu, entre Jacques Ribier, sieur de Lissy, grand maître des Eaux et Forêts, et sa femme Catherine Charlet. Dans ses factums, Ribier accusait un autre allié redoublé des Pommereu, Charles Bouvard de Fourqueux, procureur général de la Chambre des comptes, d’être responsable des deux séparations en cours. Cependant, à la différence de Jean-Baptiste de Pommereu défendeur, Ribier était considéré comme quelqu’un d’extravagant par les juges du Parlement, qui ne donnèrent pas suite à son affaire, le parquet allant jusqu’à ordonner la destruction de ses libelles et factums.
19Quelles sont les leçons tirées de la prise en compte de ce contexte ? La constitution en maison dynastique des Pommereu ne tient pas parce que l’alliance n’y résiste pas et que l’institution judiciaire elle-même ne la soutient pas : Marie-Michelle Bernard est une héritière et est présentée comme appartenant simultanément à deux maisons antagonistes17. C’est ainsi que les rôles d’épouse et de mère sont désolidarisés. La tension dans le couple est ensuite réactivée sous forme de conflits entre frères, et entre sœurs et frères. Elle culmine en contestation de la hiérarchie dans la fratrie18. Elle est aussi élargie au cercle des alliés et peut-être d’ailleurs commence-t-elle là et par une plus grande incertitude sur la solidité du réseau de solidarité qui supportait le circuit des créances familiales.
La construction judiciaire d’une affaire centrée sur le couple
20Dans ce contexte, quel est le rôle de l’institution judiciaire saisie par les acteurs ? Dans le cas Pommereu, cela occasionne une sortie du conflit de parenté vers la forme affaire. On donne alors à ce terme affaire le sens que lui prêtent Luc Boltanski et Élisabeth Claverie au cours de deux études : l’une orientée vers l’étude des conflits pour la reconnaissance, portée par une démarche de sociologie pragmatiste ; l’autre, plus interdisciplinaire, réunit aussi des historiens de toutes périodes qui se sont penchés sur la comparaison et l’analyse des affaires, scandales et grandes causes19.
21Dans le cas du dossier Pommereu, la dimension « affaire de justice médiatisée » s’explique par l’extraction sociale des protagonistes du procès, qui sont parisiens, issus de la haute magistrature et de la finance, du personnel gouvernemental et de l’élite littéraire. Cette dimension publique est attestée par des épigrammes qui circulent dans les milieux mondains et qui pointent et ridiculisent les grands de l’affaire, à savoir l’intendant Pommereu et son avocat. En témoigne par exemple le début de ce poème satyrique dédié à Sacy :
À supputer voyant ta suffisance
Tout le monde à Paris
Te destine l’employ de resgler la despence des avares maris [...]
Tu peignis Pommereu magistrat magnifique
Et mary gratieux
La Justice insultée à ce portrait s’éveille20.
22Mais ces grands (du point de vue de la stature sociale) sont cependant des défendeurs, le restent et ne deviennent jamais des plaideurs. En ce sens, il n’y a donc pas d’inversion des termes victimes/accusateurs, propre à la forme affaire (comme dans l’affaire Calas), même s’il y a un net brouillage des identifiants de la supériorité sociale : la Petite est telle parce que femme, issue des milieux de la finance, que ses principaux témoins sont d’autres femmes, et majoritairement des domestiques ou des officiers subalternes, alors que les témoins de monsieur de Pommereu sont des hommes et des officiers provinciaux qu’il a côtoyés dans l’exercice de ses fonctions. Cependant, quelques dignitaires ecclésiastiques ou femmes de qualité plaident en faveur de madame de Pommereu. Puis il y a le pôle du pouvoir monarchique qui joue le rôle déterminant : monsieur de Pommereu est disgracié au moment où sa femme porte plainte ; l’opposition feutrée au roi (formée par les grands et le vieux prince de Conti) s’intéresse au procès et soutient vraisemblablement Marie-Michelle Bernard qui peut ainsi accéder au prétoire. Il s’exerce ensuite une sorte de montée de généralité, sous la forme d’une discussion nourrie, développée dans les mémoires judiciaires au sujet des compétences de père et de mère, d’époux et d’épouse, et de la réflexivité de ces termes ou non. C’est-à-dire qu’une réflexion en réalité collective est développée sur les compétences du couple. L’avocat de madame de Pommereu fait ainsi dire à sa cliente qu’il s’agit d’« une affaire qui ne doit estre uniquement qu’entre lui [mon mari] et moi », sans le reste de la famille et de la parentèle.
23Le couple est en effet une idée neuve, affirmée au cours du xviie siècle, qui désigne un nouveau modèle social de relation à deux21, certes né dans la prolongation du débat sur le mariage qui existe depuis le xvie siècle, mais qui s’en démarque aussi. En effet, le couple ainsi compris n’est pas tout à fait synonyme de mariage ni d’union matrimoniale car il comporte une nette dimension de relation privilégiée affectant d’abord deux individus. Ce n’est plus tant la conformité qui le définit que la spécificité des êtres qui le composent. Et par le biais du procès s’ouvre un espace d’exposition de cette intersubjectivité : que chacun s’exprime donc devant la barre pour justifier sa conception des droits et devoirs du mariage et de la transmission, des obligations de la vie mondaine et des manquements à l’honneur, des preuves d’amour et des marques de haine.
24Les épreuves de déconstruction judiciaire des compétences de chacun attestent d’un nouveau discours féministe critique, auquel participe la mobilisation littéraire des affects : le pathétique est le fait de madame de Pommereu, que son avocat fait parler à la première personne, la victime dont la sincérité et le naturel sont les marqueurs et identificateurs. Le ridicule et le maniement de la farce et de l’ironie dédaigneuse sont le fait de la partie de monsieur de Pommereu, le chef de famille qui assume en partie l’artifice et le volontarisme de sa situation. Dans les partitions théâtrales jouées par les factums, ces motifs de fiction codifiée sont ponctués d’un leitmotiv sado-masochiste ou, si l’on préfère : un affect se donne en excès, pour lequel il reste à trouver des instruments d’analyse, envisageables plutôt du côté de la psychanalyse couplée à l’anthropologie que de la seule sociologie culturelle.
25Dans le livre collectif mentionné plus haut, Luc Boltanski recommande aux historiens de retenir « toutes les versions de l’affaire », y compris dans des commentaires érudits postérieurs... à la façon dont Claude Lévi-Strauss recommande de traiter toutes les versions d’un mythe, qui se déploie dans toutes ses variations « et toutes les interprétations dans lesquelles il se prolonge et se déploie, sans exclure celles des anthropologues ni les siennes propres ». Un ensemble de textes imprimés (factums, mémoires, satires) montrent que le procès s’intégre lui-même à la construction d’une sorte de mythe familial singulier, qui puise ses racines au moins quarante ans auparavant22, dont un des épisodes a été décrit ci-dessus, qui concerne l’histoire de Denise de Bordeaux, épouse Pommereu.
26C’est la raison pour laquelle, tout en l’inscrivant comme on vient de le voir dans une interrogation sur les rapports de genre et l’élaboration d’un discours féministe, il serait réducteur d’inscrire l’étude de l’affaire Pommereu sous la rubrique trop actuelle (hélas) des dossiers de femmes battues23. On entend profiter aussi des leçons données par le Linguistic Turn, qui incitent à une nécessaire prise de distance vis-à-vis des dispositifs d’écriture des factums et du « chaudron émotionnel » qu’ils font bouillir, non pour les ignorer mais pour les circonscrire et les historiciser. Il reste donc ici en bonne logique à recourir à l’analyse de la procédure judiciaire pour sonder l’économie interne des scénarios et des séquences d’écriture qui se succèdent jusqu’au terme du procès. Il s’agit ainsi d’appréhender le processus de la qualification des faits retenus par la justice et de réfléchir ainsi sur son rôle et celui des acteurs qui la constituent. En ce sens, la constitution du dossier des arrêts et actes pris par la 2e Chambre des requêtes, juridiction chargée de mener le procès à son terme, permet de relire les factums à nouveaux frais.
Les caractéristiques de la procédure accusatoire
27Seule, une dizaine d’actes ont été retrouvés dans la série X du Parlement, mais ils suffisent à circonscrire l’intégralité de la procédure. La connaissance des actes de procédure permet d’établir une meilleure critique de ces sources judiciaires que sont les factums. Cela restitue au dossier de la Bnf son caractère de documents intégrés à la procédure, mais aussi compilés et sélectionnés par un collateur (puisque tous les factums du procès ne figurent pas dans le dossier bleu ou dans le catalogue de Corda).
28Rappelons que l’objectif d’un factum est de contenir, selon Ferrière, « sommairement le fait sur lequel la contestation est intervenue entre les parties, avec les moyens sur lesquels on fonde sa prétention & les réponses à la prétention et aux droits prétendus des parties adverses24 ». Alors que l’on dispose de la sentence contradictoire appointant les parties (avril 1705) et de l’arrêt terminal (dictum) établi en juillet 1709 par les juges, la comparaison du discours des deux types d’écrits, factums et écritures, permet de dégager les raisons qui ont motivé les décisions des juges de la 2e Chambre des requêtes. Lorsqu’ils ont établi un premier jugement en adoptant la requête de la plaignante (sentence contradictoire), les magistrats ont opéré une sélection parmi tous les faits que ses mémoires ont présentés et les ont parfois retenus exactement tels quels, tout en retranchant certains des moyens que la plaideuse entendait employer pour prouver sa demande25. Au terme du procès, les factums demeurent plus romancés que l’ensemble des faits finalement retenus par les juges pour justifier leur verdict. Les libelles ont tendance à isoler les héros de leurs récits et à accentuer les affects et la dramaturgie entourant leurs actes, en prouvant la plausibilité du fait par la complexion morale de la personne, ainsi que par son extraction sociale. Centrées sur des personnalités en action l’une contre l’autre, les plaidoiries se situeraient à ce titre dans une logique de traque de l’aveu formulé à l’égard des juges qui surplombent le tribunal et l’ensemble de la procédure. Mais on peut formuler l’hypothèse que l’action menée au moyen des factums se situe aussi bien dans la tradition de procédure accusatoire sur laquelle repose la justice civile comme construction d’une tradition argumentative. Tout en insistant sur la raison des faits avancée par les acteurs, les mémoires jouent sur la variabilité de ces raisons et les intentions de ces faits, en les décrivant avec une minutie analytique extrême, en déconstruisant les ressorts et la rationalité de chaque argument, de chaque témoignage oral, dans de longs discours de la méthode qui destinent le public à exercer son jugement à l’égard des faits avancés et décrits comme relevant de versions alléguées de façon équivalente par les parties26. À ce titre, l’affaire, avec toute sa dimension critique, jouerait « encore » en ce début de xviiie siècle sur une connivence entre le juge, qui appointe l’enquête des parties en retenant la version sur laquelle elle est ordonnée, et le public, qui appuie et amplifie le jeu de la confrontation, mais encourage aussi celle des parties qui a été défendue initialement par les juges27. Comme le juge et avec celui-ci, le public, instance de droit, qui use de son « devoir de remontrant », exerce une sorte de ministère qui juge des réputations.
29La comparaison avec les actes de la procédure fait donc ressortir l’aspect technique des factums, qui établissent une discussion des tactiques procédurières : nature et qualité des preuves employées, fiabilité des témoins réquisitionnés et de leurs dires, commentaires des dispositions des lois et des ordonnances. Voilà pourquoi Isabelle Carrier avait pu remarquer qu’ils ne se distinguent pas véritablement des autres écritures des parties, sauf en cela qu’ils ont une portée plus générale et moins spécifique28. On trouve ici le médium de la montée en généralité, déjà évoquée, des thèmes abordés pendant le procès. Elle est permise par un type de procédure choisi, la justice civile, qui met aux prises deux parties prenant l’initiative de l’action en justice ; ces acteurs contribuent largement à déterminer l’orientation de la procédure ; les juges établissent in fine un arbitrage, bien davantage que des sanctions, arbitrage qui est le point d’aboutissement de débats entre les parties, qui sont relayés par le public, instance auxiliaire des juges dépositaires de la justice des rois29.
30Ce rituel judiciaire a connu trois phases. Le moment décisif est d’abord celui du dépôt de plainte, car la plainte établit la nature des faits incriminés et la procédure suivie. Après le choix de la juridiction, la 2e Chambre des requêtes du Parlement, la sentence contradictoire du 4 avril 1705 acceptait la qualification proposée par les avocats de la plaignante ainsi que sa requête de « jouir par elle à part et divis de ses biens et droits » et de récupérer tous ses propres avec intérêts à partir du jour de la demande. Ce verdict ouvrait l’instruction proprement dite du procès, en ordonnant l’ouverture d’une enquête. Seize audiences permettraient aux parties en présence d’être entendues contradictoirement. Deux cent neuf témoins (chiffre énorme) furent ensuite auditionnés dans trois villes et chefs-lieux différents du royaume, où Pommereu avait exercé ses commissions d’intendant. Le rapport de force qui découla de l’enquête se révéla favorable à Marie-Michelle Bernard, qui fut en mesure de déposer, au printemps 1706, une nouvelle requête demandant la division et le partage de la communauté des biens. C’était une nouvelle étape, car cela signifiait qu’elle savait ne plus tomber sous le chef d’abandon de domicile ou autre tort grave qui lui aurait fait perdre sa part de communauté. L’acceptation par les juges de la demande de provision de 10000 Lt au même moment revenait aussi à prendre en compte les préjudices par elle subis.
31Puis, entre 1706 et 1708, s’étendit une période de chicanes judiciaires et d’amplification publique de ce qui devint alors une affaire. C’est en effet pendant cet intervalle chronologique que la production et la publication des factums démarrèrent et s’intensifièrent rapidement. Tactiquement, il s’agissait pour le défendeur, monsieur de Pommereu, de faire durer la procédure.
32Enfin, la dernière phase fut amorcée, celle de l’issue du procès qui se joua entre 1708 et 1709. On s’attardera ici davantage sur cette séquence (entrecoupée par l’ultime et malheureux appel de monsieur de Pommereu). La sentence par forclusion du 29 août 1708, confirmée par l’arrêt de confirmation du 4 juillet 1709, vint clore le procès30. L’acte pris par les magistrats récapitulait l’ensemble de la procédure, comme autant de parties qui avaient ponctué l’action judiciaire, en étant sanctionnées chacune par des arrêts ou des sentences ; au terme de ce récapitulatif, intervenait le dictum de la Cour qui ordonnait la séparation de biens et d’habitation ; Pommereu était condamné aux dépens et à l’amende (12 Lt), au rapport des propres de sa femme avec intérêts à compter de 1704, et recevait l’ordre de partager la communauté (80000 Lt) devant le conseiller Fagon, à en restituer la part de son épouse portée à son montant de 1704 (année du dépôt de plainte). La sentence n’agissait pas sur la donation. Les juges ne pouvaient statuer à ce sujet puisque l’acte était intangible en droit coutumier : Donner et retenir ne vaut. La jurisprudence des parlements n’y pouvait rien. Si une épouse qui avait subi des sévices pouvait révoquer les avantages faits à son mari lors de son contrat de mariage, la donation mutuelle entre vifs, non révocable en droit coutumier, ne pouvait être annulée que par lettres de chancellerie du Parlement, appelées lettres de rescision. Elles étaient adressées au nom du roi au juge et furent publiées le 24 septembre 1709.
33La sortie de procès définitive eut également lieu en septembre : le 19 de ce mois, sous la présidence du prévôt des marchands, Charles-Denis de Bullion, et du lieutenant particulier du Châtelet, Proust du Martray, un conseil de famille s’était réuni autour de Jean-Baptiste de Pommereu. À la suite de la publication des lettres de chancellerie, une nouvelle assignation, déposée par Marie-Michèle Bernard aux Requêtes, venait d’être signifiée à ce dernier. Les parents réunis évoquèrent alors tous les risques qu’un nouveau procès, nécessaire pour maintenir la validité des donations de 1702, ferait encourir aux enfants Pommereu :
[...] pourquoy il faudrait métré lesd. mineurs en cause [...] quelque événement
que ce procez put avoir, c’etoit leur faire un tort considérable pour leur établissement de les forcer de plaider contre ladite dame leur mère31.
34C’est pourquoi, en vue de proposer un compromis à la partie adverse, une médiation d’amis communs était décidée. Selon ses termes, l’épouse de monsieur de Pommereu récupérerait tous ses biens, mais acceptait que la somme de 73 000 Lt 10 sols soit soustraite de la communauté « pour être distribués [à ses enfants] par led. sieur de Pommereu comme il le jugera », celui-ci étant chargé de la garde des enfants du couple. Il s’agissait d’un mode usuel de compensation par l’épouse séparée, usuel en cas de rupture de la communauté ; en l’espèce, elle indemnisait l’annulation des donations. Cette transaction facilita l’exécution du reste des décisions de justice et reçut l’acceptation de Marie-Michelle Bernard, avec qui toutes ces propositions avaient dû être négociées au préalable. Le conseil de famille put procéder à l’élection d’un tuteur pour administrer les biens des mineurs, et ce tuteur confirma les lettres de rescision. C’en était fini du procès entre les époux Pommereu.
35On le voit, le recours à un mode de règlement infrajudiciaire permit de clore le cycle judiciaire ; cela donne raison à l’historien moderniste Hervé Piant qui montre qu’il est vain d’opposer l’infrajudiciaire au judiciaire, dans la mesure où cette dernière institution ne donne pas de solution « clefs en main » aux justiciables, mais leur en offre le chemin avec sa propre logique. Hormis les cas mettant en cause les fondements de l’ordre social, l’auteur affirme que cette justice laissait une grande place à la négociation des parties, qui s’imposait de facto aux juges32. On peut observer aussi que la justice royale était relayée par la justice locale et lignagère.
36Dans le cas Pommereu, la négociation finale est orientée en faveur de l’avenir de la lignée et s’interdit de faire du tort aux mineurs. Ainsi, l’hyper-conflictualité caractérisant l’histoire des Pommereu, couples puis fratries, s’interrompait lorsque les intérêts vitaux de cette maison étaient directement menacés. De quoi penser que les pulsions agressives, sadiques ou refoulées que Lisa Lavoir prêtait aux membres de cette famille, semblables à des prototypes « Grand Siècle » des personnages damnés du grand film de Visconti, étaient encadrées tout à la fois par une pensée symbolique, des intentions stratégiques et des instances régulatrices.
37Le procès Pommereu a donc mis en œuvre un conflit de personnes juridiques, qui procèdent à une discussion des compétences conjugales, et effectuent une remise en cause sévère de l’administration du père qui, en droit coutumier, n’est pas souverain-le gouvernement domestique n’est qu’analogiquement rapporté au pouvoir monarchique par les jurisconsultes –, observation qui tempère la tendance qu’avait observée Roland Mousnier, pour les xviie et xviiie siècles, d’une puissance croissante du père de famille sur le ménage33. Ce que le père a en puissance, le roi l’a en acte. Plutôt, l’absolutisme du second mène incontestablement à la critique du premier, comme l’a montré Sarah Hanley34. L’étude du procès Pommereu suggère que la maison est gouvernée en dernière instance par la justice du roi, même si celle-ci a une tout autre forme que la toute-puissance qu’on pourrait lui supposer, en étant dupe d’un mirage absolutiste construit par l’historiographie35. Si, par la volonté de favoriser un héritier par primogéniture masculine, se manifeste dans ces familles de la robe une nette volonté d’imitation sociale de la part des chefs de maison, de la dévolution en succession de la dignité royale, ce probable mimétisme nobiliaire ne peut recevoir de justification juridique totale. Pour Domat, célèbre jurisconsulte « jusnaturaliste » du xviiie siècle, la société est constituée de liaisons naturelles d’engagements entre hommes et femmes, parents et enfants36. « Ces engagements impliquent l’État. Il y a d’abord les engagements entre les citoyens et ensuite l’État en sort, car ses engagements demandent l’usage d’un gouvernement qui contienne chacun dans l’ordre des siens. C’est pour ce gouvernement que Dieu a établi l’autorité des puissances nécessaires pour maintenir la société. » Ainsi, il existe un espace public dans lequel l’individu existe comme sujet de droit (Grotius évoque la qualitas moralis persona), qu’il soit homme ou femme, père ou mère. Sujet, c’est-à-dire aussi assujetti à la justice du roi37. Celle-ci, qui existe par le puissant appareil des cours souveraines, médiatise ses arbitrages par un dispositif de publicisation favorisé par la procédure civile d’origine accusatoire, qui met en face-à-face plaideur et défendeur. À cet égard, avec d’autres spécialistes, Hervé Piant souligne qu’il s’agit d’une justice qui fait l’objet d’un choix délibéré par les justiciables38... À condition qu’ils soient en mesure de le faire, comme le montre la genèse sociale et politique de l’affaire Pommereu. Dans cette dernière, l’action en justice, dans sa logique procédurale, a amené l’institution familiale à œuvrer dans le sens d’un apaisement pour inciter les parties divisées à ne pas aller jusqu’au bout de leurs positions et à transiger. Cela afin de préserver l’avenir de la lignée. Il reste que, dans et grâce à ce procès, se construit une forme de discours féministe qui, par le jeu de tensions des contraires ainsi mobilisés, véhicule aussi une capacité critique dont il reste à explorer les tours et méandres.
Notes de bas de page
1 F. Olivier-Martin, Histoire de la coutume de la prévôté et vicomté de Paris, Paris, 1972, t. 2, p. 208, 239-242 ; N.-J. Guyot, Répertoire universel et raisonné de jurisprudence civile, canonique et bénéficiale, Paris, 1775-1783, t. 16, article « Séparation ».
2 S. Hanley, « Engendering the State : Family Formation and State Building in Early Modem France », French Historical Studies, 16, 1989, p. 4-27, éd. française, Politix. Revue des sciences sociales du politique, 32,1995, p. 45-65.
3 L. Stone, Road to Divorce, 1530-1987, Londres, 1990 ; S. Seidel Menchi, D. Quaglioni (dit.), I tribunali del matrimonio (secoli xv-xviii), Bologne, 2006. Compte rendu d’Anna Bellavitis à paraître dans la Revue d’histoire moderne et contemporaine. Sans pouvoir établir une liste intégrale des publications sur le sujet de la séparation de couples, citons pour la France : J. Coudert, « Mariages et divorces dans le diocèse de Toul au xvie siècle », Annales de l’Est, 3, 1952, p. 61-92 ; P. Darmon, Le tribunal de l’impuissance, Paris, 1979 ; A. Lottin, La désunion du couple sous l’Ancien Régime : l’exemple du Nord, Paris, 1975 ; J. Hardwick, « Early Modem Perspectives on the Long History of Domestic Violence : The case of Seventeenth-Century France », The Journal of Modem History, 78, 2006, p. 1-36 ; voir, pour la bibliographie plus récente et à échelle européenne, le numéro spécial Familles et justice dans l’Europe moderne, dans Annales de démographie historique, 2, 2009. Pour l’Espagne, voir A. Stella, Amours et désamours à Cadix aux xviie et xviiie siècles, Toulouse, 2008.
4 Bibliothèque nationale de France (désormais BnF), Cabinet des manuscrits, dossiers bleus (désormais DB) 532, dossier Pommereu. Voir aussi les analyses de Lisa Lavoir, qui a traité de l’affaire Pommereu dans une perspective d’histoire des mentalités : L. Lavoir, Factums et mémoires d’avocats, un regard sur une société, thèse de doctorat, histoire et sociologie politique, université Paris 4, Lille, 1988 (ANRT). Auguste-Robert de Pommereu, sieur de La Brétèche (v. 1630-1702), père de Jean-Baptiste, fut maître des requêtes, président du Grand Conseil, plusieurs fois intendant, prévôt des marchands de Paris et conseiller d’État, conseiller au Conseil des finances. Il transmit sa charge de maître des requêtes à son fils Jean-Baptiste, qui fut intendant d’Alençon (1689) puis de Châlons-en-Champagne (1689-1702).
5 Archives nationales (désormais AN), X 3 1801,04/04/1705, sentence contradictoire de la Cour, f°10 : « Elle rendit sa plainte de la plus grande partye des faits contenus en sa requête. »
6 AN, Y 275, f°184 et suiv., Boscheron, 23/01/1702 ; ibid., f° 208 et suiv., Boscheron, 30-31/01/1702, Laguilie et Regnault, Châlons, 27/01/1702. Ces donations s’intégraient à un aménagement global de la succession des grands-parents Pommereu et à ce que les factums de M. de Pommereu appellent un « concert de famille » : trois mois plus tard, Auguste-Robert et son épouse effectuèrent une donation de 80000 Lt au puîné de leurs petits-fils, avec clause de substitution pour le cadet : AN, Y 275, f°300 et suiv., Boscheron, 05/04/1702.
7 AN, X 3b 1801, 04/04/1705, sentence contradictoire de la Cour.
8 Louis de Sacy, Recueil de mémoires, factums et harengues, Paris, P.-J. Bienvenu, 1724. Voir S. Cerutti, « Faits et “faits judiciaires”. Changements dans le statut de la preuve à Turin au xviiie siècle », Cahiers du Centre de recherches historiques, 45, 2010, p. 151-180, part. 179, note 89, citant l’ouvrage de G. Pomata, La promessa di guarigione. Malati e curatori in Antico Régime, Bari, 1994. Le factum, comme écriture juridique, est historiquement lié à l’affirmation du rôle de l’avocat dans la procédure criminelle, alors qu’il y était marginalisé par les progrès d’une procédure de plus en plus inquisitoire : J.-M. Carbasse, Histoire du droit pénal et de la justice criminelle, Paris, 2006, p. 211, note 1. Je remercie Pierre Bonin de m’avoir indiqué cette référence.
9 Cette démarche semble, encore aujourd’hui, peu pratiquée, au vu de la récente livraison des Annales de démographie historique, bien qu’aussi nécessaire que les approches sérielles : Annales de démographie historique (voir supra n. 3).
10 Voir M. Nassiet, Relations et violence en France. La violence, une histoire sociale, France, xvie-xviiie siècle, Paris, 2011. À partir de l’étude de lettres de rémission, l’auteur formule l’hypothèse que, au cours du second xviie siècle, l’institution de la parenté entra en crise, mais que, au sein de celle-ci, le lien conjugal se renforça.
11 S. Maza, Vies privées, affaires publiques. Les causes célèbres de la France prérévolutionnaire, Paris, 1997 [1965], qui précise ainsi sa démarche : « Il s’agit moins d’une étude des affaires elles-mêmes – Que s’est-il passé ? Qui est coupable ? – que de la publicité les entourant », p. 8. Ici, il s’agit aussi de penser le lien entre ces deux ordres de fait à travers donc l’étude des enjeux et de la procédure établissant le fait judicaire et la publicité du procès.
12 La notion de front de parenté a été élaborée par G. Levi, Histoire d’un exorciste dans le Piémont du xviie siècle, Paris, 1989. Pour la genèse sociale de l’affaire, je me permets de renvoyer à C. Chatelain, « Le mari violent et la femme insoumise : entre conflits d’intérêts et théâtralité des genres, le procès Pommereu », dans R. Descimon, É. Haddad (dir.), Épreuves de noblesse. Les expériences nobiliaires de la haute robe parisienne (XVIe-XVIIIè siècles), Paris, 2010, p. 125-155 ; pour la biographie de Claude Coquille et l’étude des réseaux de financiers, cf. D. Dessert, Argent, pouvoir et société, Paris, 1984, notice 127, p. 562-563.
13 Sur la tendance des lignées de la robe parisienne à obéir durant le xviie siècle au primat dynastique en primogéniture masculine, tout à fait contraire à l’esprit égalitaire de la coutume, et pour la bibliographie afférente, je me permets de renvoyer à C. Chatelain, Chronique d’une ascension sociale. Exercice de la parenté chez de grands officiers parisiens (xvie-xviie siècles), Paris, 2009 ; pour une réflexion d’ensemble sur l’évolution du système de parenté de l’Europe occidentale, G. Delille, « Parenté et alliance en Europe occidentale. Un essai d’interprétation générale », L’Homme, 193, 2010, p. 75-135.
14 M. Daumas, L’affaire d’Esclans. Les conflits familiaux au xviiie siècle, Paris, 1988.
15 François de Pommereu, président du Grand Conseil, avait été séparé, à sa requête, de sa seconde épouse Denise de Bordeaux en 1652, car elle donnait au futur cardinal de Retz, alors coadjuteur de Gondi, ce que celui-ci appela dans ses Mémoires des « leçons de chasteté », et avait conçu une fille de cette liaison. C’étaient là des pratiques de filles héritières, issues des milieux de la finance, qui ridiculisaient le monde de la robe (comme le montrent maints portraits savoureux dressés par Tallemant des Réaux). À la mort de François, ce fut Auguste-Robert de Pommereu, père de Jean-Baptiste, à qui revint la tâche de finir le procès avec sa belle-mère, entre 1652 et 1654, cette dernière en tirant un véritable rétablissement de ses droits matrimoniaux.
16 Michel-Gervais-Robert – celui qui avait fait l’objet des donations rescindées de 1702 – remettait par testament l’ensemble de ses biens à sa mère – celle-là même que l’on avait jadis dépouillée de ses propres en sa faveur : LXXXVHI-544, dépôt Bronod 10/06/1735 ; Pau 26/12/1734 ; contrôlé Auch 30/12/1734, insinué 31/12/1734. Le but était de favoriser un partage égalitaire et d’avantager le dernier fils des Pommereu, Alexandre-Jacques, comme le souhaitait sa mère, pour lui permettre de s’établir (dans une carrière militaire et par un mariage endogame).
17 Sur l’importance de la position d’héritière, voir M. Nassiet, Parenté, noblesse et États dynastiques, xve-xvie siècle, Paris, 2000, et G. Delille, « Les filles uniques héritières », dans id., Histoire des familles, de la démographie et des comportements, en hommage à Jean-Pierre Bardet, Paris, 2007, p. 405-420.
18 Il faut donc s’intéresser de près aux dynamiques intergénérationnelles et transindividuelles qui amènent les acteurs à reconduire et faire avec, ou manipuler voire détruire les identifications, qui sont affectées aux rôles tenus dans la parenté et qui font l’objet d’élaborations collectives, sous forme de ce qu’on pourra appeler une mythologie des familles. C’est pour cela qu’on ne peut isoler le conflit dans l’alliance de ses suites parce que celles-ci donnent rétroactivement un éclairage puissant sur les enjeux et les composantes du conflit originaire premier. En ce sens, la temporalité de la psyché n’est pas équivalente à la temporalité historique.
19 L. Boltanski, L’Amour et la Justice comme compétences. Trois essais de sociologie de l’action, Paris, 1990 ; L. Boltanski, É. Claverie, N. Offenstadt, S. Van Damme (dir.), Affaires, scandales et grandes causes : de Socrate à Pinochet, Paris, 2007. La forme affaire, disent-ils, commence par un scandale qui porte devant l’institution judiciaire une accusation étayée par la rumeur publique (fama) sur laquelle il y a accord unanime à voir dans l’accusé un coupable parce qu’il a transgressé gravement une norme commune. L’interrogation analytique naît autour de ce dernier terme et de l’activité critique alors engagée par les acteurs, L’affaire, au sens que lui donnent ces auteurs, survient lorsque les termes du processus précédent sont inversés au cours d’une scission du jugement de l’« opinion publique » : le coupable est désormais considéré comme une victime, et l’accusation se porte contre l’instance judiciaire, en opérant une montée en généralité pour défendre désormais non plus un cas mais une cause.
20 BnF, Cabinet des manuscrits, DB 532, dossier Pommereu, f°41-43.
21 Ainsi, le Dictionnaire de Nicot (1606) ignore le terme couple et ne connaît que le mot féminin couple qui désigne « deux choses de même espèce qu’on met ensemble », comme « une couple de chapons » ; le Dictionnaire de l’Académie de 1694 introduit le terme au masculin et au sens actuel en expliquant : « Se dit aussi de deux personnes unies ensemble par amour ou par mariage. [...] Beau couple, heureux couple, couple fidele. » Au sens anthropologique et symbolique, le terme prend en charge l’union non plus des semblables (en espèce), mais des contraires (en sexe). Voir aussi les ouvrages d’A. Burguière, C. Klapisch-Zuber, F. Zonabend, Histoire de la famille, Paris, 1985 ; F. Ronsin, Le contrat sentimental ; débats sur le mariage, l’amour, le divorce, de l’Ancien Régime à la Restauration, Paris, 1990 ; A. Walch, Histoire du couple en France de la Renaissance à nos jours, Rennes, 2007 ; A. Burguière, Le mariage et l’amour en France de la Renaissance à la Révolution, Paris, 2011.
22 Par exemple, les affaires Pommereu sont évoquées par Tallemant des Réaux et ses commentateurs. Tout d’abord, Denise de Bordeaux, dans ses démêlés conjugaux déjà mentionnés ; passage auquel s’ajoute celui du commentateur de la 3e édition de 1856 (Monmerqué et Paulin), affirmant que le divorce de Jean-Baptiste le maltraitant avait secoué toute la France ; Saint-Simon fait une excellente publicité à monsieur de Pommereu père, mais ne souffle mot du procès du fils, sans doute pour l’épargner. Les Mémoires du marquis de Sourches sous le règne de Louis XIV font état de la mort de monsieur de Pommereu père sans souffler mot non plus de l’affaire du fils. Voir C. Chatelain, « Divorce à la française ! Factums et scandale conjugal dans la haute robe parisienne à la fin du règne de Louis XIV », dans A. Walch (dir.), La médiatisation de la vie privée, xvie-xxe siècle, actes du colloque de novembre 2010, à paraître aux éditions de l’université d’Artois. Les arrêts du procès entre époux Pommereu font jurisprudence et sont évoqués dans le recueil : Causes célèbres, curieuses & intéressantes de toutes les cours souveraines du royaume, avec les jugements qui les ont décidées, Paris, 1773-1786, t. 17, p. 83 ; et dans Le grand vocabulaire françois, Hôtel de Thou, Paris, 1771, t. 15, p. 485.
23 Voir par exemple, J. Hardwick, « Early Modem Perspectives » ; en contrepoint, sur l’encadrement collectif de la violence conjugale, voir A. Farge, C. Dauphin (dir.), De la violence et des femmes, Paris, 1997. L’historiographie de la violence de genre est en plein renouvellement.
24 Cité par D. Duton, Le plaidoyer de l’âge classique : Olivier Patru, Antoine Le Maistre et Claude Gaultier, Paris, 2007, p. 46.
25 AN, X 3b 1801, 04/04/1705, sentence contradictoire de la cour.
26 H. Piant, Une justice ordinaire. Justice civile et criminelle dans la prévôté royale de Vaucouleurs sous l’Ancien Régime, Rennes, 2006, p. 268, observe à ce propos : « À la fin de l’Ancien Régime, période la mieux étudiée, la concurrence entre l’État et le justiciable pour le contrôle de la procédure a abouti à un modus vivendi imparfait. L’autonomie du plaideur est à peu près garantie au civil, qui a conservé la procédure accusatoire. »
27 Ibid., p. 50.
28 I. Carrier, Virtuosité procédurière : les procédures judiciaires à Montpellier au Grand Siècle, thèse de doctorat, Montréal, Mc Gill University, 2004, téléchargeable sur le site de l’université.
29 H. Piant, « Des procès innombrables. Éléments méthodologiques pour une histoire de la justice civile », Histoire et mesure. Déviances, justice & statistiques, 22, 2007, p. 13-38, observe : « La procédure civile est, si l’on veut bien accepter le terme, à géométrie variable. Et ce sont les plaideurs eux-mêmes qui, dans une large mesure, en déterminent le cours : personne, ni le juge, ni le ministère public, ne réalisera les actes à leur place. À toutes ses étapes, le procès est bien un acte volontaire, géré par des parties qui en sont les principaux acteurs. » Même remarque d’Isabelle Carrier, Virtuosité procédurière..., op. cit., p. 63 : « Les deux parties se soumettent non pas tant à la décision d’un juge mais à une entente entre eux. » Néanmoins, Hervé Piant, Une justice ordinaire..., op. cit., p. 234, observe que les juges agissent comme garants d’un « certain ordre normatif ». On pourra dire là que la procédure est inquisitoire parce que les juges portent des jugements en conscience, en prenant des décisions sur la procédure en fonction d’un ordo juris et en réaction aux initiatives, heureuses ou malheureuses, prises par les parties...
30 AN, X 3b 825,23/08/1708, sentence par forclusion de la Cour ; X 1b 421, arrêt de confirmation de la Cour. Contrairement à la sentence qui se borne à énumérer les dispositions du jugement, l’arrêt énumère ses attendus.
31 AN, MC LXXXVIII-386, 19/09/1709, conseil de famille Pommereu.
32 H. Piant, Une justice ordinaire..., op. cit., p. 244, 264-265.
33 R. Mousnier, Les institutions de la France sous la monarchie absolue, Paris, 1974,1.1, p. 76, qui cite tous les jurisconsultes anciens ligueurs à la rescousse d’une doctrine absolutiste de la paternité.
34 Voir S. Hanley, « Social sites of political practice in France : Lawsuits, civil right and the separation of powers in domestic and State governement 1500-1800 », The American Historical Review, 102,1997, p. 27-52.
35 F. Cosandey et R. Descimon, L’absolutisme en France. Histoire et historiographie, Paris, 2002.
36 R. Mousnier, Les institutions de la France..., op. cit., p. 33-38, citant Domat, Les lois civiles dans leur ordre naturel et le droit public, 1689-1997.
37 Sur les processus sociaux et culturels instituant le sujet en même temps que son propre assujettissement, voir la réflexion que Thierry Wanegffelen, Le roseau pensant. Ruse de la modernité occidentale, Paris, 2011, avait amorcée par un essai posthume.
38 H. Piant, « Des procès innombrables... », art. cité.
Auteur
Chargée de recherches au CNRS, rattachée au laboratoire de l’IRHIS-Lille 3, spécialiste d’histoire moderne, Claire Chatelain étudie les milieux des élites urbaines (parenté, famille, genre) dans leurs différentes dimensions (sociales, économiques, culturelles), particulièrement les séparations de couple. Elle a publié : Chronique d’une ascension sociale. Exercice de la parenté chez de grands officiers parisiens (xvie-xviie siècles), Paris, Éditions de l’EHESS, 2009.
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