Spiritualités en captivité et circulation d’écrits sur le cloître à l’époque moderne
p. 71-85
Résumés
On peut concevoir les couvents comme des endroits où, à l’époque moderne, des femmes ont bénéficié d’un accès privilégié à la culture et à des savoirs. Mais s’agissait-il aussi de savoirs spécifiques sur les rapports de genre, donc sur le rôle des femmes en tant que femmes, sur les rapports des femmes entre elles et sur les rapports entre hommes et femmes ?
Des recherches récentes émergent trois axes possibles d’une réponse à cette question. Tout en tenant compte du fait que les murs étaient perméables, on peut distinguer : des savoirs qui circulaient à l’intérieur des couvents et qui servaient à la création d’un comportement de moniale idéal ; des projections qui étaient activées dans la controverse religieuse qui attaquait la moniale en tant que femme ; et, enfin, des savoirs accumulés par des femmes qui ne passaient que très peu de temps à l’intérieur des couvents, mais contribuaient activement à la construction d’un imaginaire selon lequel le couvent ne pouvait pas servir à la perfection spirituelle.
Convents may be thought of as places where in Early Modem Europe women could benefit from a privileged access to culture and knowledge. But could we conceive this as a specific knowledge about gender? i.e. about the specific role of women, about the relationships between only women and between men and women?
From recent research three aspects emerge: we have to take into account the permeability of the convent walls, but it seems possible to distinguish a knowledge that circulated in between the walls of convents aiming at the creation of a perfect nun; then: projections that were activated in religious controversies were attacking the nun as a woman. Finally, we can speak of gender knowledge of women who passed only short time of their lives in convents, but who contributed actively to the construction of an imaginary. Their personal experience that they tried to circulate rather widely pushed them to sustain that convent live could not lead to spiritual perfection.
Texte intégral
1Le couvent de femmes de l’époque moderne, dans une société fortement structurée par l’appartenance à un genre, peut être compris et étudié comme lieu de production de savoirs spécifiques. Si les études des années 1990 se sont concentrées, dans une perspective foucaldienne, sur les dynamiques de répression des moniales dues au renforcement de la clôture exigé par le concile de Trente et sur des cas de rébellion individuelle, comme celui d’Arcangela Tarabotti1, un certain nombre de recherches soulignent, depuis lors, la porosité des murs, tout en considérant les couvents comme des « lieux d’affranchissement intellectuel et affectif2 ». Des recherches récentes reprennent également des pistes plus anciennes, montrant que les couvents de femmes ont fonctionné comme des « centres de culture3 » où se développèrent en particulier des savoirs médicaux et des pratiques thérapeutiques, mais aussi des arts – le théâtre, la musique, l’écriture ; ces connaissances et savoir-faire furent transmis à l’intérieur de murs qui certes enfermaient, mais protégeaient aussi et permettaient ainsi une transmission spécifique4. On peut donc concevoir les couvents, ou certains d’entre eux, comme des endroits où des femmes ont bénéficié d’un accès privilégié à la culture5. C’est ainsi que les couvents ont pu devenir des « lieux symboliques dans l’historiographie du genre6 », perspective ayant permis à l’historiographie consacrée à ce sujet de sortir du cadre confessionnel pour étudier les moniales dans le contexte plus ample du fonctionnement des pouvoirs familiaux et politiques. Or, comme l’on s’en doute, les savoirs dont purent bénéficier les moniales ne furent pas neutres, et l’accès à ceux-ci était réglé par des principes dépendant justement du « genre » de qui souhaitait se les approprier. Ainsi, par exemple, les conséquences de la quasi-exclusivité masculine du savoir théologique ont attiré l’attention des chercheurs et chercheuses. L’interdiction paulinienne selon laquelle les femmes ne peuvent pas prendre la parole en assemblée (1 Co 14, 34 : Taceat mulier in ecclesia), comprise ensuite comme l’impossibilité d’une prise de parole dans l’Église, a pesé lourdement. Cependant, au couvent, des exceptions à la règle du silence des femmes dans l’Église sont possibles et même prévues. Les institutions ecclésiastiques se sont souvent inquiétées du savoir des moniales parce qu’il se développe à l’écart et nécessite pour cette raison un contrôle majeur. Il suffit de rappeler à ce propos qu’en Italie, en réaction à la menace que faisait peser la Réforme, on en arriva même à interdire la lecture de la Bible en langue vernaculaire pour protéger les illettrés et les femmes. Cette interdiction concernait directement les moniales. Les lettres inquiètes adressées par plusieurs évêques italiens à la congrégation de l’index en 1596-1597 montrent bien les enjeux de cette interdiction7. Ils demandent des instructions pour pouvoir agir, puisque, comme ils l’expliquent, les couvents sont souvent trop pauvres ou trop éloignés pour s’offrir l’aide d’un prédicateur qui aurait la compétence nécessaire pour commenter les Écritures. Quant aux nonnes, elles ne savent pas le latin et, face à l’interdiction du texte biblique en langue vernaculaire, les supérieurs et les pères spirituels craignent alors pour leur culture religieuse. Des tentatives de censure des lectures des moniales peuvent être observées continuellement : mentionnons, par exemple, le chartreux dom Innocent Le Masson qui était si préoccupé face à la circulation de textes quiétistes dans les couvents de son ordre qu’en 1690 il demanda une dispense à Rome afin de pouvoir quitter exceptionnellement la Grande Chartreuse et ainsi vérifier personnellement in situ que tous les exemplaires du Cantique des cantiques avaient été effectivement brûlés8.
2Si nous disposons de quantités d’informations sur les savoirs dans les couvents féminins, s’agit-il pour autant de savoirs spécifiques sur le genre ? Ou encore est-il possible (bien avant l’usage de la terminologie d’aujourd’hui9) de trouver des savoirs spécifiques sur le rôle des femmes en tant que femmes, sur les rapports des femmes entre elles et sur les rapports entre hommes et femmes, donc sur des rapports sociaux de pouvoir, de domination et de soumission ? Peut-on parler d’une attention particulière à l’appartenance à l’un ou l’autre sexe dans l’interaction sociale, à une époque où il s’agissait avant tout d’une distinction sociale – et non pas d’une catégorie ancrée dans la différence biologique des sexes ? Dans le souci d’esquisser les contours de la question telle qu’elle a été approchée par de récentes études, ce qui mériterait certainement une analyse plus approfondie, je me concentrerai, de manière inévitablement schématique, sur trois aspects de la circulation de savoirs mis par écrit – en prenant appui sur quelques cas précis. Des femmes occuperont le centre de cette approche – non par souci d’exclusivité, mais parce qu’elles peuvent être considérées comme les marqueurs d’un fonctionnement social spécifique.
3Les savoirs sur les différences de genre peuvent être schématiquement regroupés selon trois axes : tout d’abord, des savoirs qui circulent à l’intérieur des couvents ; ensuite, des projections activées dans le cadre de la controverse religieuse et à l’intérieur d’une critique inter- et intraconfessionnelle ; enfin, des savoirs qui passent de l’intérieur des murs vers l’extérieur où ils sont alors réinvestis. Il va sans dire que ces trois aspects doivent être pensés en interrelation étroite, tout particulièrement si l’on veut tenir compte de l’hypothèse d’une grande perméabilité des murs de clôture.
À l’intérieur des couvents
4Règles et Constitutions donnent des directives très spécifiques au sujet du comportement des femmes. On peut y voir une continuité structurant la vie monastique selon des conceptions genrées. Ces textes normatifs qui devaient être lus régulièrement lors des repas communs contiennent, entre autres, des mises en garde envers les abus de la part de certains confesseurs ou encore des descriptions des comportements normés entre consœurs. Rappelons, dans ce même contexte, les « devoirs d’état » qui trouvent une expression de plus en plus articulée : il s’agit de manuels qui circulent au xviie siècle à l’intérieur comme à l’extérieur des couvents, et qui servent à déterminer la place sociale de chacun/e. En ce qui concerne plus spécifiquement la construction du modèle concret de vie des moniales, il convient de tenir compte des collections de nécrologes qui circulent souvent sous forme manuscrite à l’intérieur des couvents et peuvent aussi être imprimés pour être diffusés dans les différents couvents d’un même ordre. L’importance de ce genre de textes a été relevée, à juste titre, par Jacques Le Brun et par Marie-Élisabeth Henneau, pour ne citer que deux des chercheurs qui se sont occupés des biographies de moniales10. Or, la lecture intense de ces Vies exemplaires a toujours pour but d’orienter l’imitation de rôles précis, de comportements et d’attitudes spirituels et corporels, mais aussi l’imitation de l’écriture elle-même : Marie-Élisabeth Henneau évoque, à raison, des lectures la « plume à la main11 ». Le savoir sur le comportement attendu d’une moniale (qui se place à l’intérieur d’une configuration genrée) relèverait donc d’un imaginaire perpétué par des textes, réappropriés à plusieurs reprises, un savoir partagé et formé par des hommes et des femmes, par des directeurs spirituels autant que par des consœurs, un savoir le plus souvent formulé en langue vernaculaire12, mais aussi un savoir qui pouvait être répété comme une technique du corps13. Marcelline Pauper (1666-1708), Sœur de la Charité de Nevers, décrit ainsi, dans ses notes autobiographiques, le fait que Catherine de Sienne lui est apparue en vision en 1701 pour l’inciter à suivre le crucifié :
« Notre Seigneur me présenta à la sainte et me dit : “Ma fille, je te la donne pour modèle.” Je ne vis plus que la sainte qui commença à me parler en ces termes : “Ma sœur, il faut se munir d’un grand courage, car pour arriver au sein de la divinité et à Jésus-Christ glorieux, il faut passer par Jésus-Christ crucifié. Vous écoutez encore trop la prudence humaine ; il faut vous abandonner à la conduite de la grâce, autrement c’est lui manquer14.” »
5Pour suivre l’ordre donné par Catherine dans sa vision, Marcelline Pauper commence à lire sa Vie et la suit dans ses mortifications les plus dures : elle se flagelle trois fois par jour, elle dort sur une échelle en position de crucifiée, elle porte une couronne d’épines et une croix d’épines15. Elle s’inflige donc des douleurs atroces pour suivre Catherine et, ainsi, le Christ16, mais, en même temps, elle a du mal à se concentrer quand elle médite les stations de la Passion. Sur ordre de son confesseur, elle écrit un récit de confession qui sera conservé par la congrégation jusqu’au xixe siècle, époque de sa première publication. Marcelline produit donc un texte qui à son tour servira à la diffusion du savoir précis et nécessaire à une vie spirituelle exemplaire. Les moniales contribuent de la sorte au façonnement de leur historiographie, pour conserver la mémoire des religieuses et établir des identités collectives17. Ce savoir passe par des textes, mais aussi par des représentations iconographiques précises18.
6Les directeurs spirituels jouent – comme on le sait – un rôle fondamental dans la formation des comportements des moniales et forgent, dans des entretiens ou par l’échange de lettres spirituelles, des discours permettant de bien distinguer l’attitude à assumer devant une fille spirituelle, selon son genre spécifique, qui conseillent d’éviter tout comportement transgressif19. Dans ce contexte, les contemporains considéraient déjà comme plus approprié de parler de « filles » plutôt que de « femmes », donc de rendre plus complexe l’état de la religieuse en question (« fille » et non « femme ») et les rapports que l’on pouvait entretenir avec elle. La sexualité est évacuée en même temps que se posent les questions de dépendance. Le recours à l’état de « fille » s’avère fructueux, comme le montrent des analyses récentes20. Il permet notamment de suivre les pistes ouvertes par des études qui prennent en compte des relations sociales traversant les murs du cloître. Ces études redonnent à la moniale sa place dans les réseaux des familles aristocratiques et des patriciats urbains, dont les stratégies ne sont pas seulement visibles dans les monacazioni forzate21, mais dans la construction d’une ascension sociale grâce à l’apport des filles aux couvents22.
Polémiques
7En s’interrogeant sur les raisons pour lesquelles des moniales pouvaient devenir la cible de la dérision, Frances Dolan a montré que la disparition des couvents en Angleterre après la Réforme ne signifie pas celle de l’image de la moniale dans la culture populaire. Au contraire, ce changement a plutôt permis que le couvent devienne un espace d’imagination, a space of and for fantasy23. Or, dans le contexte anglais, les représentations des moniales sont toujours des représentations de catholiques et de femmes. Frances Dolan rappelle donc que les traits satiriques contre les moniales désignent des formes extrêmes qui valent pour tous les catholiques et pour toutes les femmes. La description des défaillances des moniales en tant que faiblesses spécifiquement féminines se fonde sur des idées bien ancrées à propos des femmes en général. On peut ainsi rappeler l’usage des métaphores de la clé, de la serrure ou de la clôture dans la description du corps féminin, auxquelles les contemporains recouraient pour décrire la violence faite aux femmes, en superposant les limites du foyer à celles du corps24. Il ne faut donc pas s’étonner si une perspective genrée y est utilisée pour attaquer les catholiques tout court. Dans les représentations publiées après la dissolution des couvents en Angleterre – et même s’il faut rappeler que 22 couvents de Dames anglaises sont fondés en exil entre 1591 et 1710, ces couvents installés sur le continent demeurant cependant bien lointains25 –, les moniales « fictives » sont des femmes qui aiment le loisir, des femmes de plaisir et toujours des femmes qui en font trop. Même lorsqu’elles vivent une vie de restriction, elles vont au-delà des règles pensées pour une femme mariée, exagérant ce qu’elles doivent à la chasteté et à l’obéissance, et quand bien même on continue de penser que, avec les femmes, les tentatives de restriction sont toujours vouées à l’échec. On voit alors comment, en partant du présupposé d’une impossible retenue corporelle, les murs du couvent deviennent simplement un obstacle au contrôle qui ne permet pas de renforcer la chasteté. Le secret, les portes fermées, les serrures deviennent des motifs de suspicion et non des moyens de protection26. Le récit apologétique donné par Hortense Mancini (1646-1699) dans ses Mémoires est de ce point de vue exemplaire : pour échapper à un mari trop sévère, Hortense finit au couvent et découvre que les restrictions y sont bien pires que celles imposées à la femme mariée qu’elle était. Exaspérée, elle commence à troubler la vie à l’intérieur du couvent avec des « histoires ridicules » : elle met de l’encre dans le bénitier, elle réveille les nonnes au milieu de la nuit et commet d’autres agissements comparables, mettant ainsi à l’épreuve le sens même des pratiques religieuses27.
8La mobilisation de cet espace imaginaire s’avère particulièrement prolifique dans des contextes de controverses confessionnelles. Pour changer de cadre géographique, on peut rappeler le cas de l’ex-jésuite Jean de Labadie, originaire du sud-ouest de la France, fondateur d’une communauté mixte à Amsterdam28 : « Labadie a établi chés soi une espèce de Couvent, [...] assurément composé des deux sexes29 », qui impliquait la pratique d’une vie quasi conventuelle, fondée sur la chasteté des deux sexes, mais qui se prêtait à maintes critiques et suscitait autant de doutes. C’est sur le terrain de la débauche que l’on attaque frontalement son projet qui se veut exclusivement spirituel. Ces attaques, qui font écho aux satires antijésuites bien connues30, évoquent des formes de direction spirituelle prétendument équivoques pratiquées par Labadie :
« Il apprend ses filles ou devotes ou repenties, à prattiquer l’usage de la contemplation & de l’oraison mentale ; Et on m’assure qu’en ayant obligé l’une a se mettre en devotion, il lui porta secrètement la main au sein, comme elle prioit : Dequoy se trouvant surprise, & lui disant, he ! Monsieur, que faites vous ! il lui repartit que c’étoit pour éprouver si elle étoit attentive à la priere & la censura de ce relachement, & protesta que pour lui cet attouchement l’emouvoit aussi peu que s’il eut mis sa main sur une piece de glace31. »
9Ces accusations font depuis longtemps partie du stéréotype négatif du discours antimystique, depuis la condamnation médiévale du Libre-Esprit jusqu’au paradigme quiétiste des années 168032. Bien entendu, les critiques interconfessionnelles ne produisent pas à elles seules ce genre d’imaginaire. La littérature érotique libertine produite entre 1670 et 1750 se sert massivement des stéréotypes sur les moniales en tant que figures de l’excès féminin33. Vénus dans le cloître ou la religieuse en chemise (1683), très probablement écrit par l’abbé Jean Barrin ou Chavigny de La Bretonnière, en est un bon exemple. Ce texte comporte six dialogues, publiés en 1683, les trois suivants ajoutés dans les éditions de 1685, 1696 et 171934. Le dialogue entre la sœur expérimentée Angélique et la jeune Agnès contient un véritable catalogue d’intertextes susceptibles de stimuler la perfection sexuelle plutôt que spirituelle : en recourant aux équivoques, le sacré est en mesure de susciter la concupiscence. La confession, centrale pour toute relation spirituelle, est ici dévoyée en un moment où le secret est exposé à un regard extérieur. Vénus dans le cloître pointe une obéissance exagérée, une submissivité acritique. Avec la moniale, ce sont tous les dévots qui sont la cible de la satire, parce qu’ils sont trop peu critiques, stupides, superstitieux, facilement influençables. Dans le même temps, le texte met en scène la dialectique entre les interdits formulés par l’Église et la transgression des règles établies, les premiers comme la seconde étant unis par des liens structurels qui produisent l’effet érotique35. Ces textes satiriques et misogynes, très probablement destinés à un lectorat essentiellement masculin36, recèlent un potentiel voyeuriste lié aux pratiques corporelles, comme la flagellation par exemple.
10Il semble dès lors bien peu fructueux d’opérer une séparation radicale entre moniales fictives et moniales réelles, puisque les textes satiriques étaient reçus par les contemporains et suscitaient des réponses, directes ou indirectes, qui, d’une certaine manière, unissaient les unes et les autres en une même communauté. Ils créaient ainsi un horizon d’attente influençant également les pressions exercées par les familles. Ainsi, si l’on reprend l’exemple, cité précédemment, de la communauté mixte fondée par Labadie, ses détracteurs eux-mêmes ont pu gagner des sympathisants à sa cause. L’abbesse palatine Élisabeth aurait lu des pamphlets contre le groupe et les aurait considérés comme peu chrétiens ; à cause du Weltsinn (l’inclination mondaine) et de la Schmähsucht (la manie de vilipender) des pamphlétaires, elle se serait convaincue de la crédibilité de la communauté37. La lecture des pamphlets l’aurait donc paradoxalement poussée à accueillir le groupe des labadistes à Herford. D’une certaine manière, un traité légitimant et normatif sur la clôture des religieuses tel que celui rédigé par Jean-Baptiste Thiers en 1681 peut être interprété comme une réponse à ce genre de soupçon38.
11En ce qui concerne l’espace francophone, c’est surtout Barbara Woshinsky qui a attiré l’attention sur ces questions en reconstruisant l’imaginaire des espaces conventuels en France entre 1600 et 1800. Elle part du constat que la clôture est partie prenante de notre construction mentale et sociale du féminin : Endosure is built into our mental and social construction of the Jemale39. Et elle met l’accent sur les espaces fermés et les passages possibles entre la clôture et le monde extérieur mis en abîme dans les descriptions littéraires et théoriques de l’environnement cloîtré qui circulent à l’époque moderne. Ces descriptions sont souvent le fruit d’un regard extérieur et fortement critique40.
Publication d’écrits de moniales « à temps partiel »
12Le chercheur américain Thomas Carr a suggéré qu’il conviendrait de porter une attention plus soutenue aux écrits publiés par les nonnes françaises afin de parvenir à un mainstreaming convent writing41. Dans la liste qu’il en donne, on retrouve les publications de lettres spirituelles et de Vies. Bien souvent, ces publications ne sont pas autonomes parce que les écrits des moniales sont fréquemment cités à l’intérieur même de leurs Vies. La publication vise alors à faire connaître l’activité exemplaire d’une moniale elle-même exemplaire et à produire des modèles à imiter, pour ne pas employer le terme de « propagande » au sujet des congrégations ou ordres religieux. Dans ces publications, il est possible de trouver des descriptions détaillées des communautés et du comportement des religieuses à l’intérieur des couvents. C’est le cas d’une certaine carmélite de Bordeaux, sœur Marie de Sainte-Thérèse, sœur converse malgré son origine sociale élevée42. Elle était « si contente de se trouver hors du monde & dans la Maison de Dieu, qu’elle auroit volontiers baisé & embrassé toutes les murailles de la clôture, ne sçachant que faire ni comment s’y prendre pour reconnoitre envers Dieu cette faveur43 ». Son enthousiasme ne fut pas toujours partagé ni même compris par son entourage, comme elle l’indique elle-même44.
13Mais il existe aussi d’autres types de passeurs entre les mondes, des brokers soucieux d’informer leurs contemporains, qui trouvent un marché et qui sont lus, au moins en milieu dévot. Il s’agit de figures qui entrent et sortent du couvent, et illustrent bien la porosité de la clôture, à plusieurs égards. Antoinette Bourignon, Madeleine Vigneron, Jeanne Perraud, Jeanne Guyon et d’autres encore sont des mystiques plus ou moins connues, entrées en conflit avec l’autorité ecclésiastique à des degrés divers en raison de leur activité d’écriture dans la plupart des cas. Ces femmes connaissent le monde du couvent de l’intérieur, même si elles n’y demeurent pas durant toute leur vie. Elles estiment, dans la deuxième moitié du xviie siècle, que l’institution du couvent ne peut suffire à celles qui aspirent à une vie spirituelle véritable. Pour cette raison, mais peut-être aussi et surtout pour légitimer leur propre mode de vie, elles font, dans leurs écrits, une description fort sombre des conditions de la vie spirituelle au couvent et des allusions à la débauche qui y régnerait. Cependant, le plus éprouvant dans la condition des moniales semble bien être l’« entre-soi » féminin et les interactions qu’il induit.
14C’est ce que nous fait savoir la Lilloise Antoinette Bourignon (1616-1680), dont le père ne voulait pas qu’elle se fasse religieuse mais qui s’enfuit de la maison paternelle pour passer cinq mois chez les Augustines avant que l’on ne la ramène à la maison45 : « J’y fus reçue avec joye des religieuses, qui pensoient, que je venois estre des leurs46. » Après son retour forcé à la maison, la famille se réjouit qu’elle n’ait pas « rapporté des petits eremits47 ». Quant à la moniale manquée, elle se rassure :
Je demanday à Dieu, S’il estoit possible que de tant de monastères d’hommes de femmes qu’on voioit de divers ordres, personne n’observoit l’Esprit Evangelique ? Il me dit, Nuls. [...] Je ne savois comprendre comment il étoit possible qu’entre tant de religions de si étroites observances & austérité de vie, l’esprit evangélique n’y estoit observé48.
15La solitude devient donc son « Cabinet de délice ». Elle tente de s’y installer en construisant dans sa chambre un lieu de dévotion décoré de figures en cire des Pères du Désert. La nuit, elle dort dans un cercueil49 et s’attire les critiques. Même les autres filles dévotes ne la comprennent pas50, toute tentative de partager l’expérience solitaire avec d’autres étant vouée à l’échec. Elle essaie alors de fonder un ermitage avec trois autres sœurs, s’occupe d’une maison d’enfants abandonnés où entre aussitôt le diable. L’incompréhension des « autres », les problèmes créés par le fait que des clercs, des supérieurs essaient de régler les contacts sociaux se répètent. Le cas d’Antoinette est certainement très particulier. Mais il reste qu’elle est tout à fait consciente – tout en revendiquant sa solitude – de l’importance de la circulation des écrits, comme le prouve d’ailleurs le fait qu’elle possède une presse d’imprimerie et s’occupe de manière intense de la diffusion de ses écrits à travers lesquels elle dénonce l’insuffisance de l’institution du cloître.
16Prenons un autre cas : l’Aixoise Jeanne Perraud (1631-1676) entre et sort de divers couvents pour devenir tertiaire à la fin de sa vie. Au couvent des religieuses ursulines de Barjols, elle est tourière et occupe à ce titre une fonction clé au seuil du monastère51. Dans sa Vie rédigée par un augustinien qui tente de promouvoir sa cause de sainteté, elle apparaît plutôt adroite à se faire aimer de ses consœurs : « Elle sçavoit ménager les esprits si adroitement, & s’acommoder si bien à l’humeur de chacune des religieuses, qu’il n’y en avoit pas une qui ne fut très satisfaite de sa conduite52. » Elle quitte le couvent faute de dot pour y rester, puis y retourne néanmoins, à la grande joie des religieuses qui profitent alors de sa spiritualité. L’hagiographe de Jeanne Perraud considère utile de souligner que c’est elle qui apporte aux sœurs une forme d’instruction spirituelle :
« Si la sœur Perraud instruisoit [...] ces religieuses, elles l’instruisoient à leur tour, & pour des leçons spirituelles qu’elles en recevoient, elles luy apprenoient au moins a faire des ouvrages de main. En effet, elle apprit dans ce Monastere a travailler a la Broderie53. »
17Jeanne instruit les sœurs mais, dans ces quelques lignes, le monastère est réduit à une sorte de petite manufacture où les femmes apprennent la broderie, à un lieu de ressources économiques, fait non négligeable pour une femme qui ne peut payer sa dot.
18Madeleine Vigneron, quant à elle, passe neuf semaines dans un monastère bénédictin54. Elle y perçoit un démon caché, se fait ramener à la maison par son père et vit ensuite retirée du monde, tout en notant minutieusement ses expériences spirituelles.
19Dans ces quelques textes, les autres femmes rencontrées dans les couvents sont décrites comme une distraction dangereuse. Nous ne trouvons donc ni science exacte ni théorie des différences de genre dans ce type de textes visant à légitimer un choix de vie, mais des descriptions de scènes de vie plutôt denses. Loin de constituer des descriptions authentiques, elles contribuent – autant que les romans libertins – à forger l’idée qu’on pouvait se faire des communautés féminines au xviie siècle. Bien entendu, il s’agit là de sœurs et de pères qui agissent, et non de femmes et d’hommes tout court. Mais ces sœurs et pères sont et demeurent exemplaires. La quintessence de ces récits semble être la conviction que « l’enfer, c’est les autres ». Et ce sont les autres qui distraient de la vie spirituelle.
20Une option pour les « vraies spirituelles » est donc la vie de recluse ou, autre cas de figure, l’enfermement à l’intérieur même du couvent. Madame Guyon (1648-1717) est enfermée à plusieurs reprises, d’abord au couvent de la Visitation, ensuite à Vincennes, dans une maison religieuse de Vaugirard et enfin à la Bastille. Dans ses écrits de captivité, rédigés dans la perspective d’une circulation restreinte parmi ses disciples, mais également à l’étranger, elle décrit cet état d’enfermement comme un soulagement face aux distractions du monde et se place dans la tradition chrétienne des écrits de prison55. En se montrant satisfaite de la punition même, elle continue à décrire les interférences qu’elle subit en raison du comportement suspect des religieuses et servantes envoyées par des ecclésiastiques pour l’espionner et pour la provoquer par leurs mauvais traitements. Elle suit un mode de spiritualité invalidé dans l’Europe catholique après la crise du quiétisme. Mais ce modèle circule amplement dans le monde protestant, où il sert à légitimer la fondation de groupes quasi conventuels qui s’approprient l’idée selon laquelle la transformation du propre état de femme mariée en fille spirituelle ou du noble de province en fils ou frère spirituel est possible dès lors que l’on se protège et défend du reste de la société56. Il n’y a plus besoin de murs réels en ce cas.
Notes de bas de page
1 Voir le constat de Gabriella Zarri, « La clôture des religieuses et les rapports de genre dans les couvents italiens (fin xvie-début xviie siècles) », art. cité, « Clôtures », p. 37-60. Les références suivantes sont exemplaires pour ce type d’études : Francesca Medioli, « An Unequal Law : The Enforcement of Clausura before and after the Council of Trent », dans Christine Meek (dir.), Women in Renaissance and Early Modem Europe, Dublin, Four Courts, 2000, p. 136-152 ; Marie-Élisabeth Henneau, « Les débats relatifs à la clôture des moniales aux xviie et xviiie siècles. Discours croisés entre deux mondes », dans Isabelle Heullant-Donat, Julie Claustre et Élisabeth Lusset (dir.), Enfermements. Le cloître et la prison (vie-xviiie siècle), op. cit, p. 261-274. Je remercie Sophie Houdard et Isabelle Heullant-Donat pour leurs relectures attentives de ce texte.
2 Nicole Pellegrin, « De la clôture et de ses porosités. Les couvents de femmes sous l’Ancien Régime », dans Christine Bard (dir.), Le genre des territoires. Féminin masculin neutre, Angers, Presses de l’université d’Angers, 2004, p. 27-43, ici P- 27 ; voir aussi, sur l’idée de la perméabilité, Elizabeth A. Lehfeldt, Religious Women in Golden Age Spain. The Permeable Cloister, Aldershot, Ashgate, 2005. Strasser propose la métaphore de la « membrane » : Ulrike Strasser, « The Cloister as Membrane, Recent Convent Historiés », Gender and History, 19/2, 2007, p. 369-375.
3 Gianna Pomata et Gabriella Zarri (dir.), I monasteri femminili come centri di cultura fra Rinascimento e Barocco, Rome, Edizioni di Storia e Letteratura, 2005.
4 Voir la synthèse de Silvia Evangelisti, Nuns. A History of Convent Life 1450-1700, Oxford, Oxford University Pres, 2007 ; Cordula Van Wyhe, Female Monasticism in Early Modem Europe. An Interdisciplinary View, Aldershot, Ashgate, 2008 ; pour les arts, voir Katharina Ulrike Mersch, Soziale Dimensionen visueller Kommunikation in hoch- und spätmittelalterlichen Frauenkommunitäten. Stifte, Chorfrauenstifte und Klöster im Vergleich, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2012 ; pour le théâtre, Elissa Weaver, Contient Theatre in Early Modem Italy. Spiritual Fun and Learniny for Women, Cambridge University Press, 2002 ; pour la musique, voir Craig Monson, Disembodied Voices. Music and Culture in an Early Mondern Italian Contient, Berkeley, University of California Press, 1995 ; Robert Kendrick, Celestial Strens. Nuns and their Music in Early Modem Milan, Oxford, Clarendon Press, 1996. Quant aux travaux qui concernent plus directement les moniales françaises et leurs activités culturelles, on lira : Elizabeth Rapley, The Devotes : Women and Church in Seventeenth-Century France, Londres, Mc Gill-Queen’s University Press, 1992 ; Barbara B. Diefendorf, From Penitence to Charity : Pious Women and the Catholic Reformation in Paris, New York, Oxford University Press, 2004 ; Mita Choudhury, Convents and Nuns in Eiyhteenth-Century French Politics and Culture, Ithaca, Cornell University Press, 2004 ; Laurence Lux-Sterritt, Redefining Female Religious Life : French Ursulines and English Ladies in Seventeenth-Century Catholicism, Aldershot, Ashgate, 2005.
5 Cette idée a déjà été soutenue par Linda Timmermans qui s’était intéressée à l’accès des femmes à la vie intellectuelle et au savoir, dans Linda Timmermans, L’accès des femmes à la culture, Paris, Champion, 1993. En suivant la même hypothèse, Barbara Steinke montre qu’à Nuremberg, au début du xvie siècle, le monde du couvent pouvait être vécu par les moniales comme un « jardin paradisiaque » et non comme une « prison », idée soutenue par les autorités municipales qui voulaient dissoudre les communautés, voir Barbara Steinke, Paradiesyarten oder Gefäny nis ? Das Nürnberyer Katharinenkloster zmischen Klosterreform und Reformation, Tübingen, Mohr Siebeck, 2006.
6 [I] chiostri femminili sono deuenuti luoghi simbolici nella storiografia del gender, précise Gabriella Zarri, « Presentazione », dans Ead. et Nieves Baranda Leturio (dir. J, Memoria e comunità femminili. Spagna e Italia, secc. XV-XVII, Florence, FUP, 2011, p. 1.
7 À ce propos, je me permets de renvoyer à Xenia von Tippelskirch, Sotto controllo. Letture femminili in Italia nella primo età moderna, Rome, Viella, 2011, p. 127 sq. Pour le contexte plus ample des résultats de l’interdiction des bibles en langue vernaculaire, voir aussi Gigliola Fragnito, Proibito copire. La chiesa e il volgare nella prima età moderna, Bologne, Il Mulino, 2005, p. 275-287.
8 Mgr Jacques Martin, Le Louis XIV des Chartreux. Dom Innocent Le Masson, Paris, Tequi, 1975, p. 46. Dom Innocent rapporte les ravages dans les couvents dans une lettre du 3 septembre 1696 à madame de Vancy : « Je connois de quoy est capable la Dame de Guyon et de nom et de doctrine, d’œuvre et mesme de visage [...]. Je connois, dis-je, de quoy elle est capable, car il a failly m’en couster bien quelque chose, son livre du cantique s’estant fouré et multiplié dans nos maisons de filles d’icy autour. J’y allay faire une visite par une disposition singulière de la Providence, j’en retiray tous ces livres des mains des filles et je les brulay » (cité par Jacques Martin, Le Louis XIV..., op. cit., p. 200).
9 Sur les « voyages » récents du concept en Europe, voir Xenia von Tippelskirch, s .v. « Genre », dans Olivier Christin, Dictionnaire des concepts nomades, Paris, Métailié, vol. 2, à paraître.
10 Jacques Le Brun, Sœur et amante. Les biographies spirituelles féminines du xviie siècle, Genève, Droz, 2013 ; Marie-Élisabeth Henneau, « Femmes en quête de rôles dans l’histoire du salut : biographies de religieuses et religieuses biographes », dans Sylvie Steinberg et Jean-Claude Arnould (dir.), Les femmes et l’écriture de l’histoire, 1400-1800, Mont-Saint-Aignan, Presses universitaires de Rouen et du Havre, 2008, p. 219-230 ; Ead., « Corps sous le voile à l’époque moderne », dans Cathy McClive et Nicole Pellegrin (dir.), Femmes en fleurs, femmes en corps. Sang, santé, sexualités, du Moyen Âge aux Lumières, Saint-Étienne, PUSE, 2010, p. 59-100.
11 Marie-Élisabeth Henneau, « Un livre sous les yeux, une plume à la main. De l’usage de la lecture et de l’écriture dans les couvents de femmes (17e- 18e siècles) », dans Isabelle Brouard-Arends (dir.), Lectrices d’Ancien Régime, Rennes, PUR, 2003, p. 69-80.
12 Sophie Houdard a montré les enjeux des langues différentes employées dans des affaires de possession qui ont eu pour cadre des couvents, voir Sophie Houdard, « Wer spricht da – Mädchen oder Teufel ? Das Theater der dämonischen Besessenheit in der Frühen Neuzeit », L’Homme, 26/1, 2015, Mit Sprachen, p. 25-43.
13 Le concept de « technique du corps » a d’abord été introduit par Marcel Mauss. Voir la reprise récente par Rebekka von Mallinckrodt (dir.), Beuregtes Leben. Körpertechniken in der Frühen Neuzeit, Wiesbaden, Harrassowitz, 2008.
14 Marcelline Pauper, L’expérience mystique de Marcelline Pauper. Religieuse de la congrégation des Sœurs de la Charité et de l’instruction chrétienne de Nevers, A. Ravier (éd.), Nevers, Couvent Saint-Gildard, 1982, p. 57. Voir également A. Ravier, Pauper, dans Dictionnaire de spiritualité, Paris, Beauchesne, vol. XII, I, 1984, p. 611-613. Quant aux techniques apprises par la lecture de la vie de Catherine de Sienne, voir Xenia von Tippelskirch, « “Ma fille, je te la donne pour modèle”. Sainte Catherine de Sienne et les stigmatisées du xviie siècle », Archivio italiano per la storia della pietà, XXVI, 2013, p. 259-278.
15 Plus tard, Marcelline Pauper a critiqué ces mortifications, qui l’auraient distraite de l’expérience intérieure, voir Marcelline Pauper, L’expérience..., op. cit., p. 50.
16 À partir des notes qui se réfèrent à l’année 1697, elle parle de « conformité à Jésus crucifié ».
17 Voir Kate Lowe, Nuns’ Chronides and Convent Culture in Renaissance and Counter-Reformation Italy, New York, Cambridge University Press, 2003 ; Gabriella Zarri et Baranda Leturio, Memoria e comunità femminili, op. cit.
18 Voir, par exemple, Gwénaël Murphy, Le peuple des couvents. Religieuses et laïques du diocèse de Poitiers sous l’Ancien Régime, La Crèche, Geste Éditions, 2007, p. 163-167 ; Katharina Ulrike Mersch, Soziale Dimensionen, op. cit.
19 Voir Jodi Bilinkoff, Related Lives. Confessors and their Female Penitents, Ithaca, Cornell University Press, 2005 ; Patrick Goujon et Sophie Houdard, « Les “saintes liaisons” de Mme du Houx (1616-1677) : la direction spirituelle, un réseau de pratiques sociales », Dossiers du Grihl [mis en ligne le 16 juin 2015, consulté le 12 juillet 2015, http://dossiersgrihl.revues.org/6242].
20 Voir à ce propos Alain Cantillon, « Un lieu d’énonciation de la vérité : les religieuses hermaphrodites de Port-Royal en 1665 », L’Atelier du Centre de recherches historiques, 04, 2009 [mis en ligne le 26 juillet 2009, consulté le 3 juillet 2015, http://acrh.revues.org/1295].
21 Anne Jacobson Schutte, By Force and Fear : Taking and Breaking Monastic Vows in Early Modem Europe, Ithaca, Cornell University Press, 2011.
22 Voir Gabriella Zarri, « Prefazione », dans Alessia Lirosi, I monasteri femminili a Roma tra xvi e xvii secolo, Rome, Viella, 2012, p. 7-16, ici p. 9 sq. ; Silvana Raffaele, Aut virum aut murum. Matrimoni strateyici, serafiche nozze e mistici divorzi nella Sicilia moderna, Acireale/Rome, Bonanno, 2010 ; Jutta Gisela Sperling, Conuents and the Body Politic in Late Renaissance Venice, Chicago, University of Chicago Press, 2000.
23 Frances E. Dolan, « Why Are Nuns Funny ? », Huntington Library Quarterly, 70/4, 2007, p. 509- 535, ici P-510.
24 Voir Laura Gowing, Common Bodies : Women, Touch and Power in Seventeenth-century England, New Haven/Londres, Yale University Press, 2003, p. 99 sq. ; Garthine Walker, Crime, Gender and Social Order in Early Modem England, Cambridge, Cambridge University Press, 2003, p. 52-55.
25 Claire Walker, Gender and Politics in Early Modem Europe. Enylish Con vents in France and the Low Countries, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2003.
26 Dolan, « Why Are Nuns Funny ? », art. cité, p. 517.
27 Ses mémoires paraissent d’abord en français, ensuite en anglais, car son cas intéresse directement les Anglais (elle est l’amante supposée du roi Charles II), voir Hortense Mancini, Mémoires D.M.L.D.M., Cologne, P. Du Marteau, 1675 ; voir Elizabeth C. Goldsmith, Publishing Women’s Life Stories in France, 1647-1720 : From Voice to Print, Aldershot, Ashgate, 2001.
28 Voir sur ce cas Adelisa Malena et Xenia von Tippelskirch, « Le genre des “âmes élues”. Labadie et ses lectrices, entre attaques polémiques et héritage spirituel », dans Pierre-Antoine Fabre, Nicolas Fornerod, Sophie Houdard et Cristina Pitassi (dir.), Lire Labadie (1610-1674). Fondation et affranchissement, Paris, Classiques Garnier, à paraître.
29 Il y est question aussi du « nouveau cloître de Theleme ». Copie de deux lettres, qui se doivent joindre à l’histoire curieuse de la vie & des sentimens du Sr. de Labadie, tant pour le supplement de son tableau, que pour la correction de quelques fautes qui y sont survenuës, À La Haye, Chez Théodore D’uurcant, 1670, p. 3-5.
30 Le lien est explicité : « Instruit aux pieds des Gamaliels de l’Ordre de Loyola. » Histoire Curieuse de la vie, de la conduite, & des vrais sentimens du Sr. Jean de Labadie, dont le Nom et la Réputation, font tant de bruit parmy les Gens de bien, La Haye, chez Théodore D’uurcant, 1670, p. 9.
31 Copie de deux lettres..., op. cit., p. 4 sq.
32 Voir aussi Sophie Houdard, « Du sens virtuel des métaphores spirituelles : l’amour unitif et les “inclinations incarnées” », dans Libertinage et philosophie au xviie siècle, 13, « L’équivoque blasphématoire. Autour de Pierre Bayle », 2013, p. 67-78.
33 Domna Stanton, « Sexual Pleasure and Sacred Law : Transgression and Complicity in Vénus dans le cloître », L’Esprit créateur, XXXV, 2, 1995, p. 67-83.
34 Frances Dolan, « Why are Nuns funny ? », art. cité, p. 518 ; Domna Stanton, « Sexual Pleasure and Sacred Law... », art. cité, p. 69-77.
35 [T]he veiled nun’s enclosure rnithin a walled, guarded, secret/sacred space, unprofaned by seculargazes, creates an “excessive” set of obstacles that stimulate male phantasms of transgression, penetration and profanation/pleasure. Stanton en propose une lecture qui suit Bataille sur ce point, ibid., p. 69.
36 Ibid., p. 69.
37 Anna Maria von Schurman, EUKLERIA oder Erählung des besten Theils. Eine Schrift, die zugleich, einen kurzen Abriβ ihres Lebens enthält..., Dessau/Leipzig, Buchhandlung der Gelehrten, H, 1783, p. 241.
38 Jean-Baptiste Thiers, Traité de la clôture des religieuses, Paris, A. Dezallier, 1681.
39 Barbara Woshinsky, Imagining Women’s Conventual Spaces in France, 1600-1800. The Cloister Disclosed, Aldershot, Ashgate, 2010, p. 30.
40 Pour le xviiie siècle, voir Barbara Thums, « Das Kloster als imaginierte Heterotopie um 1800 », dans Jörn Steigerwald et Rudolf Behrens (dir.), Räume des Subjekts um 1800, Wiesbaden, Harrassowitz, 2010, p. 37-51 ; Hans Wolf Jäger, « Mönchskritik und Klostersatire in der deutschen Spätaufklärung », dans Id., Vergnügen und Engagement. Ein gutes Dutzend Miszellen, Brême, Lumière, 2001.
41 Thomas M. Carr, From the Cloister to the World. Mainstreaming Early Modem French Convent Writing. An État Présent, Charlottesville, 2007.
42 Charles de Brion, La vie de la très-sublime contemplative Sœur Marie de Sainte Thérèse, Carmélite de Bordeaux, Paris, N. Le Clerc, 1720, p. 71.
43 Ibid., p. 88.
44 Ibid., 170.
45 Sur la Vie de cette mystique, voir Xenia von Tippelskirch, « Antoinette Bourignon. Légitimation et condamnation de la vie mystique dans l’écriture (auto) biographique : enjeux historiographiques », dans Sylvie Steinberg et Jean-CLaude Arnould, Les femmes et l’écriture de l’histoire, op. cit., p. 231-248 ; sur l’historiographie, voir Ead., « L’échec d’une prophétesse : l’exemple d’Antoinette Bourignon dans Chrétiens sans Église de Leszek Kolakowski », Archives de sciences sociales des religions, 166, 2014, p. 129-142.
46 Antoinette Bourignon et Pierre Poiret, La vie de Damlle Antoinette Bourignon, écrite partie par elle-même, partie par une personne de sa connaissance (Pierre Poiret), Amsterdam, J. Riewerts et P. Arents, 1683, t. 1, II, p. 27.
47 Ibid., p. 28.
48 Ibid., p. 43.
49 « Je me plaisois de plus dans la solitude [...], trouvant plus de recœuillement dans ma chambre, où je fis un petit enclos, remply de grottes, qui representoient le desert, où estoient representés en personnages de cire, St. Antoine, la Magdeleine, & tous les mysteres de la Passion. [...] Je fis aussi faire ma tombe, dans laquelle je reposois de nuit. Je trouvois en cette chambrette tel contentement, que je croyois n’estre plus au monde. Toutes les creatures m’estoient des empechemens. Je ne me plaisois plus qu’en la solitude & au silence », ibid., 31,33.
50 Ibid., p. 114.
51 Voir [P. Raphaël] Augustin, La vie et les vertus de la sœur Jeanne Perraud, dite de l’Enfant Jésus, religieuse du Tiers-Ordre de saint Augustin..., Marseille, C. Garcin, 1680 ; Marcel Bernos, s. v. « Perraud, Jeanne de l’Enfant-Jésus », Dictionnaire de spiritualité ascétique et mystique, t. XII, 1983-1984, col. 1172-1174 ; Dinah Ribard, « Religieuses philosophes, religieuses sans clôture, ermites et vagabondes : appartenances et dissidences au xviie siècle », L’Atelier du Centre de recherches historiques [mis en ligne le 4 septembre 2009].
52 La vie et les vertus, op. cit, p. 50.
53 Ibid., p. 56-57.
54 Madeleine Vigneron, Vie et conduite spirituelle de la damoiselle Madeleine Vigneron, soeur du tiers-ordre de S. François de Paule, suivant les mémoires qu’elle en a laisses par l’ordre de son directeur. Le tout recueilli par les soins d’un religieux Minime, Bonaventure Le Brun, 1679, p. 118-120. Sur l’écriture de sa vie, voir Dinah Ribard, « Radicales séparations. Ermitages et guerres de plume à la fin du xviie siècle », Archives de sciences sociales des religions, 150, avril-juin 2010, p. 117-133, ici p. 125-127.
55 Voir pour ce texte les interprétations lucides et complémentaires de Rosellini et Houdard : Michèle Rosellini, « Les récits de captivité de Jeanne-Marie de la Mothe Guyon ou les contrariétés du désir de prison », Dossiers du Grihl, 2011-01 2011 [mis en ligne le 28 décembre 2011, consulté le 18 octobre 2013. http://dossiersgrihl.revues.org/4993;DOI:10.4000/dossiersgrihl.4993] ; Sophie Houdard, « Spiritualités et prisons au xviie siècle », Dossiers du Grihl, 2011- 01 | 2011 [mis en ligne le 26 décembre 2011, consulté le 18 octobre 2013. http://dossiersgrihl.revues.org/4951;DOI:10.4000/dossiersgrihl.4951].
56 Voir Xenia von Tippelskirch, « Die Gesellschaft der Kindheit Jesu-Genossen ans geschlech-tergeschichtlicher Perspektive », dans Pia Schmid (dir.), Gender im Pietismus. Netziverke und Geschlechterkonstruktionen, Halle (Hallesche Forschungen, 40), 2015, p. 177-196.
Auteur
Humboldt-Universität zu Berlin
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