Antoine-Gabriel Devercy, un homme de loi pendant la révolution
p. 109-110
Texte intégral
1Voici le second itinéraire, celui d’un homme de loi Antoine-Gabriel Devercy. Résumer les étapes de la vie d’Antoine-Gabriel Devercy, c’est retrouver le portait d’un homme issu de la bourgeoisie administrative provinciale d’Ancien régime.
2Il naît en 1756 à Péronne dans le futur département de la Somme. Son père Nicolas-Emilien Devercy est contrôleur des Fermes du roi à la douane de Péronne. La formation intellectuelle de Devercy pèse de façon déterminante sur sa carrière : il s’instruit au droit et entre comme clerc dans une étude de notaire. A l’age de 21 ans il quitte sa famille pour s’installer à Paris où il achève ses études. En 1782, il se rend possesseur d’un office de procureur au Chatelet de Paris.
3Sa situation professionnelle assurée, il épouse la fille d’un marchand mercier : Jean-Louis Béraud. Les parents de la jeune épouse constituent en dot à leur fille Madeleine, la somme de 25 000 Livres. Après avoir donné naissance à deux filles, les époux Devercy divorcent sous la Terreur. Et Madeleine Béraud, épouse divorcée Devercy, de réclamer sa dot...
4Que devient-il pendant la Révolution ? Le procureur Devercy demeure rue Mazarine, section des Quatre-Nations, ancienne partie du faubourg Saint-Germain. Il est porté aux différentes fonctions électives de sa section. Au mois de juin 1791, il est élu par l’assemblée primaire, assesseur du juge de paix, et nommé 23ème des 29 électeurs de la section des Quatre-Nations. Devercy appartient au club de la Sainte-Chapelle. La même année, il devient propriétaire de terrain en Seine-et-Oise, à Poissy, ville qui occupera une place privilégiée dans son itinéraire.
5Il semblerait que Devercy ait été inquiété par les autorités révolutionnaires pendant la Terreur, mais nous n’avons pas pu retrouver trace formelle de son arrestation.
6Une fois supprimées les anciennes organisations des procureurs, de 1792 à 1808, il exerce les fonctions d’avoué, ce qui l’inscrit dans une continuité professionnelle.
7Le 30 mai 1808, il écrit au ministre de la Justice : "La suppression des avoués au tribunal de 1ère instance de Paris me laisse sans état après 26 années d’exercice. Père de 2 filles en age de se marier et n’ayant que 3 mille francs de revenu, je supplie votre Excellence de me présenter à sa Majesté pour remplir les fonctions de juge à Paris". L’excellence se tait. Devercy comparait alors devant l’assemblée de la Chambre des notaires du département de Seine-et-Oise. Il est admis à la fonction de notaire et exerce à Andrésy de 1808 à 1813.
8Le jeune clerc de Péronne est devenu un notable. Position consolidée par sa nomination de maire de Poissy de 1809 jusqu’en 1813. Il est également propriétaire d’une manufacture de poudres à Poissy qui emploie 9 ouvriers. Notre homme de loi s’éteint en 1832, agé de 76 ans. La maison où il résidait est adjugée par la mairie de Poissy, pour la somme de 24 000 francs.
9Quelle conclusion tirer de l’itinéraire de cet homme de loi pendant la Révolution ? Il est sûrement caractéristique d’un personnel rompu aux affaires administratives, compétent et expérimenté.
10Les changements de régime et les bouleversements législatifs successifs afférents à la Révolution, ne semblent pas avoir déstabilisé l’homme de loi Devercy dans sa pratique. Devercy réussit à se tenir à l’écart des luttes politiques, se consacrant aux taches administratives. Son rapport à la loi se situe sans faille, dans l’exercice scrupuleux de sa profession. Il est "homme de loi" en ce sens qu’il se voue à l’exercice de son application, quelque soit l’autorité politique en place. Peut-être cet itinéraire est-il le reflet de la montée du fonctionnarisme, dont Balzac, constate en 1838, la réalité sociologique et la portée politique en parlant d’un "pouvoir gigantesque mis en mouvement par des nains".
Auteur
I.H.R.F.
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