Chapitre III. L’appel au Prince
p. 143-156
Texte intégral
1Les pamphlets, textes contestataires, peuvent s’en tenir aux simples critiques anticléricales stéréotypées ou viser plus radicalement les concepts mêmes d’Église et de pouvoir temporel. Les revendications formulées ici tendent-elles à renverser un ordre politique, social ou religieux pour lui substituer un autre ordre ? Les quelques revendications « sociales » émises méritent à ce titre d’être rapprochées des déclarations de la Réforme radicale, ne serait-ce que pour préciser les rapports que l’auteur peut entretenir avec un tel mouvement. La réforme proposée passe par une intervention princière, en particulier dans les affaires de l’Église et, dans une moindre mesure, par quelques changements sociaux1.
1. Les formes de l’appel
2Formellement destinée au duc de Bavière Guillaume IV, la lettre se donne à lire a priori comme un appel au pouvoir en place, c’est-à-dire comme une forme de recours direct à une instance supérieure, en général motivé par une injustice. En appeler au Prince, c’est en appeler à sa justice et à son équité lorsque toute autre sollicitation est vaine. L’en-tête est identique à celle que Luther utilise dans De l’Autorité temporelle... pour s’adresser au duc de Saxe. Malgré le caractère conventionnel de la titulature, cette similitude peut inciter à s’interroger sur l’éventuelle dépendance d’Argula vis-à-vis des écrits du Réformateur. La forme de l’appel, le portrait du souverain et les limites du pouvoir temporel constituent trois directions de comparaison entre les deux textes2.
3En se présentant comme un membre de l’entourage proche du souverain et en instaurant avec le duc de Bavière un lien personnel, un lien de parenté, Argula se plaît à rappeler que ce n’est pas ici n’importe lequel de ses sujets qui fait appel à son Prince (§ 19). Ce passage, qui se caractérise par la profusion des « je », s’inscrit en rupture avec le reste du pamphlet. C’est alors et alors seulement que la baronne mentionne qu’elle est une femme, et ceci pour rappeler sa sujétion légale envers son tuteur (« je fus placée, en ma qualité de femme, sous l’autorité de Votre Grâce, mon très haut tuteur »), et sa qualité d’épouse et de mère3. La manière dont elle se définit ne témoigne que de sa soumission à l’ordre établi et à la hiérarchie des sexes. Si elle utilise son nom de jeune fille comme nom de plume, ce n’est sans doute pas pour marquer son indépendance vis-à-vis de son époux, mais parce qu’une certaine notoriété y reste attachée. Elle joue ainsi à la fois du prestige de son nom, de la respectabilité de son état de femme mariée et de mère. Cette soumission à la hiérarchie et aux critères de respectabilité du temps s’accompagne d’une soumission politique au Prince4.
4A aucun moment la baronne de Grumbach n’attaque de front son souverain et le vocabulaire qui qualifie le pouvoir temporel est rarement péjoratif, très en-deçà des expressions que peut employer Luther5. Certes, le besoin qu’éprouve notre auteur de faire serment d’allégeance au Prince a sans doute des causes conjoncturelles : les circonstances qui ont précédé son départ de la cour de Bavière ont peut-être frappé de discrédit l’ensemble de sa famille6.
5Plutôt que de dénoncer la politique du duc, elle se fait l’avocat d’un Prince trompé et calomnié. Se portant garant de son souverain face à une opinion qui lui est, dit-elle, hostile (§ 1), elle rejette la responsabilité des décisions sur des conseillers malveillants et prétend faire enfin connaître la « vérité ». Sachant ce que fut l’Affaire Seehofer, la baronne de Grumbach fait ici preuve, soit d’ignorance, soit de naïveté feinte. Il se peut aussi qu’elle exploite une idée politique populaire qui veut que la justice des princes soit entravée par leurs conseillers. Le thème du complot des clercs contre le souverain permet de proposer, non pas une réforme de l’ordre politique, mais une épuration des agents de cet ordre7. Le discours d’Argula ne vise donc pas à subvertir l’ordre politique. L’auteur se présente en outre comme un conseiller du Prince, guidé par le seul amour du prochain : il écrit au duc « comme à [son] frère en Jésus Christ » et ne lui veut « que du bien » (§ 19). Il paraît suivre ici un modèle prophétique qui a obtenu quelques succès aux derniers siècles du Moyen Âge : il exhorte le Prince, pour son salut et pour le bien commun, à prendre en main la réforme et à agir dans les limites de ses attributions8.
6En ce sens, Argula en appelle au pouvoir temporel mais chrétien qui s’incarne tout entier en une seule personne, le souverain de la principauté territoriale. Elle ne parle, en effet, ni de l’État, ni de l’Empire. Aussi se réfère-t-elle, plutôt qu’à une théorie politique, à des « figures du Prince », série d’images bibliques et populaires applicables à l’autorité civile. Elle tient à remercier un Prince nourricier pour la générosité dont il a fait preuve à son égard (§ 19 : « […] und uns auch unser kind bey e.f.g. dinst erheben und ernern »). Mais, au-delà de son entourage, c’est le pauvre qui doit être le bénéficiaire de la générosité princière. A l’inverse de Luther, Argula ne propose pas ici de faire de l’assistance aux pauvres l’une des tâches de l’autorité civile, mais leur soulagement doit être l’un des buts de sa politique (§ 17 : « […] afin que le pauvre ne soit pas accablé »).
7D’autre part, le Prince, détenteur du « glaive temporel » (§ 15), c’est-à-dire du glaive de la justice, doit faire preuve d’équité et de clémence. Ainsi, dans le cadre de l’Affaire Seehofer, l’auteur interprète la libération du jeune Arsacius comme un geste de clémence princière. Que l’interprétation du comportement du duc dans cette affaire soit fausse importe peu. Ce qui compte est la volonté de l’auteur de mettre en avant l’équité du Prince. Cette qualité doit se retrouver chez ses serviteurs, qui ne peuvent être moins chrétiens que leur souverain (ainsi les offices seront-ils « pourvus conformément au conseil » de Paul). Il faut donc ériger un gouvernement chrétien.
8Enfin, le glaive temporel, arme du Prince combattant, doit s’abattre sur les Turcs. De défensif, celui-ci devient offensif face aux païens et le Argula s’éloigne en cela des positions de Luther. David constitue le modèle biblique du Prince combattant (§ 18, Ps 3) pour lequel la victoire est signe d’élection divine. Ce dernier thème apparaît à plusieurs reprises dans le pamphlet et la condition de cette élection est clairement formulée : le Prince doit à la fois se soumettre à la parole et la servir9.
9En fondant la légitimité du pouvoir temporel sur Romains 13, Argula ne fait preuve ni d’originalité, ni de créativité. Certaines omissions paraissent cependant révélatrices. D’une part, la crainte due aux autorités n’est pas citée, omission logique puisque l’auteur recommande quelques phrases plus haut de ne pas craindre « celui qui prend [le] corps sans pouvoir en faire davantage », en se référant à la violence dont toute autorité peut faire usage. La crainte, en somme, n’est due qu’à Dieu. D’autre part, les expressions allemandes traduites par « taxes, impôts et redevances » qui correspondent aux revenus du seigneur foncier ne sont pas précédées des dîmes ecclésiastiques (zunβ, dans la Bible de Coburg). Comme dans la traduction de Luther, Romains 13 se réfère donc uniquement à l’autorité temporelle, et non aux autorités ecclésiastiques10. Cette dernière est perçue avant tout comme autorité seigneuriale et la réalité de son pouvoir s’impose aussi par une perception fiscale. Or, le duc de Bavière, quoique grand seigneur foncier, ne tire pas tous ses revenus de ses seigneuries. La citation biblique masque ici la réalité économique, mais l’objectif du pamphlet n’est pas de rendre compte de l’état des finances de la principauté11.
10Elle peut en revanche fournir une arme théologique contre l’intrusion du pouvoir temporel dans la vie spirituelle. Argula, en effet, précise et complète la citation de Romains 13 en affirmant que l’obéissance est due aux autorités « même mauvaises » (§ 8). Elle établit, semble-t-il ici, une distinction entre une « mauvaise » autorité et une autorité qui « abuse » de son pouvoir (ir gewalt miβpraucheri). L’abus de pouvoir consiste à « s’arroger les pouvoirs de Dieu » et à « disposer de sa Parole » à laquelle le Prince se trouve « soumis », au même titre que chaque chrétien. L’ensemble des expressions qui qualifient l’abus de pouvoir permet de définir, dans un premier temps, cet abus comme une ingérence du pouvoir temporel dans les matières spirituelles, c’est-à-dire dans un ordre qui n’est pas le sien. On peut en ce sens rapprocher ces affirmations centrales du pamphlet des positions de Luther. De même, l’attitude à adopter face au tyran est celle que recommande le réformateur : la seule forme que puisse prendre la désobéissance est le martyre (« […] je ne tremblerai pas, je ne me tairai pas, dussé-je endurer mille morts […]. Ne crains pas celui qui prend ton corps sans pouvoir en faire davantage […] », § 7) et en aucun cas la rébellion armée12.
11Cependant Argula, contrairement à Luther, argumente peu son propos et semble adopter certaines conclusions sans juger utile de résumer son argumentation et sa démarche. Elle procède par accumulation de citations bibliques et utilise un vocabulaire peu conceptuel, qui rend difficile la comparaison avec les écrits du réformateur13. D’autre part, les rapports de Dieu et du Prince s’apparentent à ceux de deux parties liées par un contrat : le Prince doit être soumis à la parole, mais peut aussi espérer que cette soumission lui sera profitable. S’il accomplit la volonté de Dieu, il est récompensé ; s’il désobéit, il est puni. L’idée d’une rétribution immédiate et terrestre des oeuvres conformes aux impératifs divins est ici corrélative d’une théologie du Dieu de justice14.
12Enfin, elle développe la notion de responsabilité du Prince dans le salut de ses sujets. Elle reprend ainsi une idée très répandue et chère aux prophétesses de la fin du Moyen Âge. Elle semble rendre légitime l’intervention du duc dans les affaires ecclésiastiques. Parce qu’il est responsable du salut de ses sujets, il se doit de veiller à la diffusion de la parole qui seule apporte la grâce. En ce sens, la Réforme de l’Église lui incombe comme un devoir15.
2. L’Église : amendement ou réforme ?
13La forme et le ton du pamphlet sont peu propices à l’exposé cohérent d’une ecclésiologie. Peut-on cependant percevoir, au-delà des stéréotypes anticléricaux, un véritable projet de réforme pour l’Église ou doit-on se contenter de grandes orientations en matière de morale ? Quoique le texte se caractérise essentiellement par un moralisme simple et radical, des propositions (parfois sous-jacentes) plus constructives surgissent ici et là. Celles-ci entretiennent un double rapport, d’une part avec la pensée de Luther et d’autre part avec les hérésies populaires de la fin du Moyen Âge, en particulier avec l’hérésie vaudoise. L’auteur souhaite en premier lieu imposer au clergé un modèle évangélique qu’il considère perdu. La référence à ce modèle a des incidences sur la définition même du clergé : le modèle évangélique ne peut-il pas s’appliquer aux laïcs et en particulier aux femmes ?
14Argula investit les clercs d’une mission apostolique qui va de pair avec un idéal de vie. Ce modèle évangélique, loin d’être l’exclusif du message luthérien, s’ancre dans une tradition médiévale qui, des Vaudois aux Franciscains, prône l’idéal du pauvre prédicateur. La vita apostolica exige dans un premier temps la moralisation du corps clérical qui se déduit a contrario des attaques menées contre ce corps. La condamnation de l’opulence cléricale est soutenue par trois arguments principaux. La pauvreté répond en premier lieu à l’idéal de vie évangélique car n’avoir « ni or, ni argent », c’est suivre l’exemple du Christ et des apôtres et être véritablement « le plus petit » (§ 15 et 20). En se conformant à cet idéal, le clergé rendra à la Parole le respect qui lui est dû. La pauvreté doit en outre différencier les clercs des autorités temporelles auxquelles appartiennent, non seulement « le glaive », mais encore « la bourse ». Parce qu’elle permet aux clercs de se détacher du monde, elle suscite une entière disponibilité pour l’oeuvre du Christ. Enfin, l’argent engendre le péché (la gloutonnerie, le concubinage) et ne pas en avoir permet de n’être point poussé au vice.
15Cependant, Argula ne préconise pas un appauvrissement radical du clergé : elle dénonce ainsi le cas des remplaçants de détenteurs de bénéfices qui « se garantissent à peine contre la faim » (§ 17). La disponibilité pour l’oeuvre du Christ implique que le prédicateur mange à sa faim. L’analogie avec le mouvement vaudois est ici à la fois éclairante et imparfaite ; imparfaite, parce que le prédicateur dont parle Argula n’est ni itinérant, ni radicalement pauvre ; éclairante, parce que l’ecclésiologie vaudoise est fondée sur l’idéal du pauvre prédicateur annonçant la parole de Dieu16.
16Le caractère apostolique de la mission cléricale réside en effet avant tout dans la prédication apostolique elle-même : « Il est de leur ressort d’annoncer la parole de Dieu » (§ 15). La prédication de la parole divine aux pauvres (§ 18), acte apostolique par excellence est, bien plus que la lecture, mise en avant. De fait, cette exigence correspond à la fois au modèle évangélique et aux réalités du début du XVIe siècle : malgré les progrès de l’imprimerie, la diffusion orale compte encore bien plus que l’écrit ; le mouvement évangélique ne s’est-il pas lui-même « imposé par la prédication encore plus que par l’écrit » ? La supériorité de la prédication, s’explique par le fait que « notre salut dépend entièrement de l’écoute de la parole de Dieu » ou, selon l’expression de Luther, par le fait que « la foi naît de la prédication ». Pourtant, le portrait que l’auteur trace du bon prédicateur permet de nuancer le lien de parenté qui peut l’unir à Luther17.
17« Il n’est pas d’homme plus estimable qu’un bon prédicateur, un prédicateur instruit dans l’ Esprit de Dieu et non dans la lettre. Il faudrait l’aller chercher même au bout du monde car notre salut dépend entièrement de l’écoute de la parole de Dieu » (§ 12). La prédication ne tient pas sa légitimité de l’érudition théologique du prédicateur mais de l’Esprit. En ce sens, elle s’apparente à une mission qui relève de Dieu. Il est difficile d’évaluer la portée de cette déclaration tant les indications fournies par le pamphlet sont minces et contradictoires. Tout homme (ou toute femme) qui se sent appelé par l’Esprit peut-il témoigner par la prédication ? Quelle est alors la place du clergé ? La distinction établie entre état ecclésiastique et état laïc s’en trouve-t-elle abolie ? L’auteur ne répond malheureusement pas clairement à ces questions parce qu’il ne pose pas les problèmes de cette manière. Le texte, qui n’oppose pas théoriquement les laïcs aux clercs, ne parle ni de sacerdoce universel, ni d’état clérical ; il manque en conséquence de clarté.
18Certaines phrases pourraient évoquer le thème du sacerdoce universel : « Qui confesse le Christ est de Dieu […]. Il ne peut y avoir de chrétien qui ne fasse sienne cette parole » (§ 5). Si l’appel à confesser le Christ s’adresse à tous les chrétiens et que tous ont vocation au témoignage, quelle doit être la nature de celui-ci ? La prédication n’est-elle pas le témoignage par excellence ? Argula reconnaît que la prédication incombe aux clercs (§ 15), mais elle se sent elle-même investie d’une mission prophétique et exerce un ministère de la parole auprès du Prince. Elle justifie cependant sa propre intervention par la perversion de l’ordre des choses : si les clercs manquent à leur devoir, le laïc doit alors pouvoir prendre la parole afin d’assurer un prompt retour à l’ordre. De fait, donc, son projet de réforme ne vise pas à perturber la hiérarchie des ordres. Si son intervention témoigne du désir de certains laïcs d’assumer dans l’Église un rôle plus important, si elle témoigne aussi d’une exigence plus grande de moralité, elle ne propose que de rendre le clergé à ce que l’auteur estime être sa fonction originelle, et elle reconnaît ainsi que sa médiation est nécessaire.
19Argula n’appelle pas l’ensemble des laïcs à la prédication : elle ne souhaite que le retour à un ordre ancien, véritablement chrétien, et rejette en conséquence l’appellation nouvelle de « luthérien » (§ 2). Il se peut toutefois que ce refus soit motivé par les écrits de Luther lui-même. Le Réformateur incite en effet ses lecteurs, dans sa Sincère admonestation… à ne pas se proclamer luthériens. En ce sens, notre auteur et Luther partagent une même perception de la réforme, retour à une pureté évangélique primitive, à une Église véritablement « chrétienne »18.
20Ce retour passe par un certain nombre de réformes concrètes. Argula s’attaque en premier lieu au célibat des clercs et entre ainsi dans un débat qui a divisé les chrétiens bien avant que Luther ne prenne lui-même position. Une généralisation tout à fait abusive la conduit à revendiquer le mariage des prêtres et son raisonnement peut se résumer en ces termes : tous les prêtres sont concubinaires, donc tous les prêtres doivent se marier. L’exagération qu’engendre la polémique l’empêche non seulement de présenter une opinion nuancée, mais encore d’envisager sérieusement la question du célibat. Elle apporte un argument destiné à expliquer la généralisation du concubinage dans le clergé : tout homme est « tourmenté par le démon de la chair » et donc incapable de se soustraire au péché que constitue le désir sexuel (§ 15). Le mariage n’apparaît pas ici comme un état valorisant en soi, mais bien comme un garde-fou contre la débauche : la condition de la femme mariée ne se trouve pas revalorisée par la démarche d’Argula. La contestation anti-cléricale met de fait sur un pied d’égalité les clercs et les laïcs (ils sont en l’occurrence égaux dans le péché) et réfute a priori l’existence d’un état de perfection19.
21L’auteur s’en prend aux fondations, aux prières et aux messes. Est-ce l’institution qui est visée ou la pratique qui est jugée excessive ? Certes, l’excès paraît condamnable, tant pour ce qui est des fondations de messes que pour les établissements religieux. Cependant, cette condamnation résulte aussi du désir de voir les clercs revenir à leur fonction première, la prédication, seul office dont ils soient chargés par l’Évangile. En ce sens, Argula condamne les établissements des chanoines et des moines parce qu’ils sont inutiles au salut de la communauté : « Les fondations des chanoines et des prêtres […] ne servent, selon moi, qu’à entretenir un ramassis de voyous […] » (§ 14)20.
22Jusqu’à quel point cette remise en cause de l’efficacité des prières et du sacrement de la messe est-elle consciente ? L’auteur ne dit rien des autres sacrements dans le pamphlet. Rappelons une fois encore qu’elle n’est pas théologienne. La réforme qu’elle prône s’inspire avant tout d’un évangélisme des simples21.
3. Aspects populistes de la réforme
23Argula von Grumbach soumet au Prince deux propositions de réforme sociale qui concernent l’impôt et la justice. Loin de mettre à mal les hiérarchies, son projet les occulte en les déplaçant. La perception de la société est un bon exemple de ce phénomène. Le titre de promotion, qui destine la lettre à « tous les états chrétiens ainsi qu’aux autorités » rejoint le contenu du pamphlet. Il établit une distinction entre les Obrigkeiten (autorités) et les Stendt (états), c’est-à-dire entre les dirigeants laïcs et l’ensemble des chrétiens, laïcs et ecclésiastiques, placés sous la domination du Prince22. Le fossé entre les autorités et les sujets se creuse lorsque, s’adressant au Prince, l’auteur oppose constamment le « vous » au « nous », « le pays et les gens » (land und leute) à « Votre Grâce ». En ayant recours au « nous » pour exprimer une opinion ou un désir général, il se présente comme le porte-parole auprès du Prince de l’ensemble de ses sujets. Il passe ainsi insensiblement du « je » au « nous » : le « ich » a parfois une valeur tout à fait générale et inversement, le « wir » n’exprime parfois qu’une opinion personnelle qu’Argula estime partagée par tous23.
24L’idée d’un unanimisme de l’opinion se double du thème populaire du bien commun. Cette expression qui fut l’un des maître-mots de la pensée politique médiévale est, au début du XVIe siècle, passée dans le domaine public. La volonté de voir préservé le bonum communis répondrait pour certains à la crise urbaine et serait une vision compensatrice et utopique24. En l’occurrence, l’idée du bien commun nie l’existence d’intérêts particuliers inconciliables et crée un illusoire unanimisme social. En outre, l’emploi d’un vocabulaire biblique occulte la réalité sociale du temps. « Le peuple », « le troupeau du Christ » sont synonymes de troisième ordre et s’opposent aux clercs. Ce peuple est avant tout un peuple souffrant, opprimé (§ 23). L’oppression n’est donc pas un phénomène interne à la communauté des croyants : si l’auteur parle des pauvres (thème évangélique par excellence), ce n’est point pour dénoncer les riches marchands, mais pour s’en prendre au clergé exploiteur25.
25A plusieurs reprises est souligné le lien de cause à effet entre la richesse des clercs et la pauvreté des gens. En ce sens, si les clercs ont un devoir de pauvreté, c’est parce qu’ils doivent être « les plus petits d’entre tous », la paupérisation de l’Église institutionnelle visant ainsi à la dépaupérisation des pauvres. Pour faire respecter cette règle évangélique, l’auteur expose un projet d’imposition du clergé dont l’objectif est double. Il a d’une part pour but de faire participer les clercs à l’effort général de la croisade contre les Turcs, ce qui correspond à une ancienne revendication allemande26. L’éradication de l’hérésie, si elle doit être le fait de l’autorité temporelle armée du glaive doit aussi être soutenue financièrement par l’Église. Il s’agit d’autre part d’employer l’excédent des revenus du clergé « pour le bien commun, afin que le pauvre ne [soit] pas accablé » (§ 17). La proposition n’est pas d’elle même explicite. On peut s’interroger sur l’aune à laquelle Argula prétend juger des « excédents » des revenus cléricaux. Qu’entend-elle ensuite par l’expression « bien commun » ? S’agit-il de confier au Prince les revenus excédentaires de l’Église afin qu’il les utilise au profit d’une juste cause, en réduisant du même coup le poids de la fiscalité sur ses autres sujets ? Le projet d’imposition s’apparente-t-il pour autant à une forme de prélèvement proportionnel à la fortune de chacun ? L’idée de bien commun rejoint sans doute la revendication d’une participation cléricale à l’effort de guerre ; agir pour « le bien commun » consiste à répartir cet effort de manière plus équilibrée qu’auparavant. Il est difficile d’affirmer que ce projet s’apparente à un « impôt proportionnel au revenu » parce que ce n’est pas la répartition entre les laïcs, mais l’excessive perception cléricale, qui est ici en cause.
26Argula propose en outre de convoquer au tribunal les sujets du Prince. Le but de cette manoeuvre est obscur. Soit les habitants doivent porter témoignage des revenus du clergé (ils leur versent impôts et redevances et sont donc à même de préciser quels sont ces revenus) ; soit ils doivent déclarer le montant de leurs revenus à l’aune duquel on établira leur imposition. On peut cependant comprendre la proposition différemment : les revenus excédentaires de l’Église pourraient être répartis dans chaque circonscription territoriale, au tribunal, avec le concours des habitants des communautés, seuls capables d’utiliser ces revenus pour le « bien commun ».
27Reste une troisième proposition concernant les revenus ecclésiastiques : « Si une paroisse manque de revenus, qu’on lui en donne ; si elle en a trop, qu’on lui en prenne. Ainsi agira-t-on pour le bien commun » (§ 18). Il s’agit ici de redistribuer les revenus afin d’assurer une plus grande égalité entre les paroisses. Cependant, le mode de cette redistribution n’est pas précisé : serait-ce là l’office du Prince ou de l’évêque ? Ce qui importe davantage ici est le souci constant de retrouver un équilibre, une plus juste répartition des richesses. Argula ne remet pas en cause l’ordre social de son époque, mais en dénonce les injustices les plus criantes. Plus que l’inégalité, elle combat l’excès ; plus que l’égalité, elle défend l’équilibre. Tel est encore le fondement de son argumentation lorsqu’elle s’attaque aux juges.
28A la fin de l’ouvrage (§ 21 et 22), l’auteur dresse un réquisitoire contre l’ensemble des gens de justice. Quoique la liste des personnes incriminées commence par le trinôme pfaffen, münch, nunnen, il ne semble pas que son attaque vise exclusivement la justice ecclésiastique. Les « procureurs, avocats et juristes » dont il est ensuite question peuvent être des juges exerçant leur fonction, tant pour un seigneur ecclésiastique que pour un seigneur laïque27. Incitant le duc à prendre en main la justice et à la confier à des gens « compétents », Argula souhaite voir cette fonction incomber à des hommes raisonnables (yernüftig) et pénétrés de l’Esprit de Dieu qui « est miséricordieux, patient, pudique […] ». Elle exige en somme des juges qu’ils fassent preuve de moralité, c’est-à-dire qu’ils se comportent en chrétiens. Ce modèle de justice ne tend-il pas vers un légalisme biblique qui vise à appliquer dans le domaine temporel les lois de l’Évangile, à identifier le droit humain à la règle évangélique ? L’auteur paraît échapper à ce travers, dans la mesure où ses revendications concernent le personnel juridique et la manière d’appliquer les lois humaines plus que le contenu même de ces lois28.
29Il dénonce enfin les manoeuvres procédurières des mauvais juges, qui font traîner en longueur les procès pour s’enrichir, et leur rapide ascension sociale (§ 22)29. Ce thème se trouve développé à l’aide d’un exemple tiré de son expérience personnelle et d’une comparaison avec Fortunatus, récit anonyme de 150 pages, paru pour la première fois en 1509. Il conte l’histoire d’un jeune homme pauvre qui reçoit successivement une bourse dont le contenu se renouvelle de lui-même et un chapeau (Wunschhüetlein) qui le transporte là où il le souhaite. Le thème du Glückssäckel (la bourse qui ne désemplit pas) est connu avant la parution de ce récit et évoque sans doute quelque souvenir dans l’esprit des lecteurs du pamphlet. Fortunatus est peut-être une figure du parvenu mais l’introduction de ce personnage vise ici à susciter davantage le rire que l’indignation30.
30La dénonciation des inégalités sociales est en définitive limitée à une critique des fortunes rapidement accumulées. Elle ne touche ni les hommes d’affaires qui ont su profiter du capitalisme naissant, ni les seigneurs dont la perception fiscale est loin d’être négligeable. La défense de l’homme du commun (der arme Mann) ne passe donc pas par une remise en cause de la hiérarchie des fortunes.
Notes de bas de page
1 Sur l’aile gauche de la Réforme, on peut se reporter à l’article de Richard Stauffer, « L’ aile gauche de la Réforme » ou la « Réforme radicale ». Analyse et critique d’un concept à la mode », dans Interprètes de la Bible. Étude sur les réformateurs du Seizième siècle, Paris, 1980, p. 31 à 41. Nous donnons un sens restreint à l’expression qui désigne ici les mouvements prônant un renversement des ordres sociaux, par la force si nécessaire. Voir G.H. Williams, The Radical Reformation, Philadelphia, 1962.
2 Il faut noter ici l’ambiguïté de la démarche d’Argula : certes, son pamphlet est destiné au duc de Bavière ; mais il est avant tout adressé à l’ensemble des états chrétiens. VoirDe l’autorité temporelle et dans quelle mesure on lui doit obéissance, in Joël Lefèbvre (trad.), op. cit., p. 66.
3 Tout au long du paragraphe 19 s’accumule le vocabulaire destiné à souligner ce lien de parenté : « mes parents », « mon tuteur », « votre mère », « il serait mon père », « mon enfant ». En Bavière, la femme n’est pas libre juridiquement. Elle ne peut donc signer aucun acte sans l’accord de son tuteur (de son père ou de son époux). Cette sujétion légale n’est pas strictement respectée, tant au moyen-âge qu’au début de l’époque moderne. Argula, cependant, semble toujours avoir été placée sous l’autorité d’un tuteur : en 1516, à la mort de son oncle Hieronymus von Stauf, c’est le Duc de Bavière qui exerce cette autorité. Voir Horst Rabe, op. cit., p. 46-48.
4 La famille des von Stauffen fait partie des plus nobles familles de Bavière, ce qui n’est pas le cas des Grumbach. Le fait que ce soit une « honorable femme de la noblesse » qui écrive n’est pas indifférent ; le titre de promotion témoigne lui aussi de la manière dont Argula est présentée au public du pamphlet. La soumission de la femme à son époux apparaît souvent, à l’époque moderne, comme une garantie de la soumission politique de l’ensemble des sujets. Voir Natalie Zemon Davis, op. cit., Paris 1979, p. 214-215.
5 Les attaques de Luther sont en général beaucoup plus violentes, en particulier dans De l’autorité temporelle in Joël Lefèbvre (trad.), op. cit., p. 65 à 175.
6 Argula se garde bien ici de mentionner l’exécution de son oncle, Hieronymus von Stauffen, en place publique. Elle ne parle jamais que des « bontés » du duc.
7 La rhétorique soutient ici efficacement l’accusation : – le sie sans qualificatif (les « ils » se réfèrent en fait aux théologiens), désigne un ennemi masqué – l’usage redoublé des formes passives tend à dénoncer la manipulation dont le Prince est la victime.
8 Ce courant féminin, prophétique et visionnaire se développe au XIVe siècle et se poursuit jusqu’au début de l’époque moderne. Toute une série de femmes (telles Catherine de Sienne ou Brigitte de Suède) cherche alors à promouvoir une réforme par le haut, en s’adressant aux souverains auxquels elles prodiguent leurs conseils et auprès desquels elles exercent un ministère de la parole. Voir André Vauchez, « Prophétesses visionnaires et mystiques aux derniers siècles du Moyen-Age », dans Bernard Chevalier (dir.), op. cit., p. 65-73 et Les laïcs au Moyen-Age, Paris, 1987, p. 239-287.
9 La différence entre les propos tenus par Argula et ceux de Luther est ici très nette. Luther en effet, jusqu’aux années 1530, refuse l’idée d’une croisade armée contre les musulmans et recommande de convertir les infidèles par la prédication qui est la seule manière efficace de combattre l’erreur religieuse. Voir Marc Lienhard, op. cit., p. 242 et s.
10 § 8 : « Respectez qui doit l’être, donnez les taxes, les impôts, les redevances […] et obéissez aux autorités, même mauvaises, car tout pouvoir vient de Dieu ». Le verset complet s’énonce ainsi : « Rendez à chacun ce qui lui est dû : l’impôt, les taxes, la crainte, le respect, à chacun ce que vous lui devez » (Traduction Oecuménique de la Bible, p. 486). L’équivalent du vocabulaire utilisé par Argula (zol, rent, gült) est, dans la traduction de Luther, le suivant : Schoβ (qui ne se rapporte pas à une taxe ecclésiastique et qui signifie, « tribut »), Zoll, Furcht, Ehre et, dans la Bible de Coburg, : zunβ (dîme), zol, vorch, ere. L’utilisation du terme Schoβ en place et lieu du terme Zunβ (dîme) corrobore cette interprétation. Voir Marc Lienhard, op. cit., p. 247 et article Rente, dans Jacob et Wilhelm Grimm, op. cit. : in älterer Sprache auch an den ertrag gebundene abgabe ; renten : die Einkünfte des Landeshernn. Grimm signale également l’association courante rent und gült pour désigner les redevances seigneuriales.
11 Les ducs de Bavière tirent de plus en plus leurs revenus de l’imposition de leurs sujets (Besteuem der Untertanen) par l’intermédiaire des États. Voir Max Spindler (éd.), op. cit., p. 588-590. La volonté de ne pas faire état de cet impôt s’explique peut être par l’impopularité de cette perception fiscale.
12 De l’Autorité temporelle […] : « […] Si le pouvoir temporel a la prétention d’imposer des lois à l’âme, il empiète sur le royaume de Dieu et ne fait qu’égarer et corrompre les âmes […]. Quand on impose à l’âme une loi humaine, lui enjoignant de croire de telle ou telle façon indiquée par cet homme, il ne s’agit certainement pas de la parole de Dieu […]. Car Dieu veut que notre foi soit fondée purement et simplement sur sa parole divine […]. ». In Joël Lefèbvre (trad.), op. cit., p. 117 et suivantes.
13 Si, comme Luther, Argula refuse à l’autorité le droit de donner des ordres dans le domaine spirituel et si elle utilise, comme lui, Ac 5,29 pour soutenir son affirmation, elle n’a en revanche pas recours à la théorie des deux règnes pour soutenir son propos. Luther distingue le règne temporel auquel tous (chrétiens et non chrétiens) sont soumis, du règne spirituel auquel seuls les chrétiens sont soumis. Si tous les hommes étaient chrétiens, le règne spirituel pourrait être établi sur terre ; mais comme les hommes ne sont pas tous chrétiens, Dieu a institué le pouvoir temporel pour châtier les méchants. Voir De l’Autorité temporelle […], dans Joël Lefèbvre (trad.), op. cit., 1953.
14 Argula parle d’une soumission du Prince à la « loi évangélique », ce qui n’est pas sans rappeler les limites fixées au pouvoir du souverain au Moyen Âge : la loi de Dieu à laquelle on ajoutait ordinairement la loi humaine antérieure, la coutume. Voir Bernard Guenée, L’Occident aux XIVe et XVe siècles. Les États, Paris, 1971.
15 § 20 : « C’est à vous que Dieu réclamera les âmes de vos sujets et de vos mains qu’il les recevra ».
16 Jean Gonnet et Amedeo Molnar, op. cit., p. 371-424.
17 Luther va jusqu’à identifier la parole de Dieu et la parole prêchée. Les deux citations sont extraites de Marc Lienhard, op. cit., p. 195-197.
18 Sincère admonestation à tous les chrétiens […] : « Qu’on ne cite pas mon nom et qu’on se dise chrétien, non luthérien. », dans Joël Lefèbvre (trad.), op. Cit., p. 55 et 57. Voir aussi, Jean Delumeau, op. cit., p. 69 et s.
19 A partir des années 1470 se développe dans les milieux intellectuels un débat autour du mariage. La discussion s’étend au Seizième siècle. On peut citer ici les prises de positions d’Erasme ou de Luther (son Sermon sur le mariage date de 1519). Une autre pamphlétaire prend position peu après la parution de l’ouvrage d’Argula : Katharina Zell fait paraître en 1524 à Strasbourg son Entschuldigung für Matthes Zellin, vien Eegemahel. Elle utilise le même type d’arguments que la baronne de Grumbach mais valorise davantage l’état de la femme mariée. Voir Miriam U. Chrisman, op. cit, p. 143-168. La question de savoir si le luthéranisme a contribué à valoriser l’état de mariage reste posée. Pour Luther, le mariage n’est plus un sacrement mais il est « le lieu où s’accomplit l’oeuvre du Dieu créateur » et doit donc être « reçu et vécu dans la foi ». Voir Marc Lienhard, op. cit., p. 227-231 et Rosemary Radford Ruether, Religion and Sexism, New York, 1974, p. 292-318. Dans ces deux ouvrages, les auteurs mettent en avant la valorisation du mariage à laquelle conduit la théologie luthérienne.
20 § 18 : « vil Meβlesen » (force messes) se rapporte ici aux fondations de messes, pour les morts par exemple, et non à la célébration de la messe en général et dénonce l’excès de ces pratiques.
21 Dans la lettre adressée à Adam von Törring cependant, Argula semble remettre en cause l’efficacité du sacrement du baptême. Voir Paul Russell, op. cit., 1986, p. 198.
22 Le mot « état » ne désigne vraisemblablement pas l’institution politique des États territoriaux. Les États territoriaux, en Allemagne, réunissent traditionnellement les trois ordres (noblesse, clergé et représentants des villes) et disposent d’un pouvoir comparativement beaucoup plus important qu’en France. Ils sont réunis régulièrement et représentent un contrepoids efficace au pouvoir du prince (notamment en matière de fiscalité). Voir Heinrich Lutz in Max Spindler (éd.), op. cit., p. 572 s.
23 § 13 : « Es ist gleych so ich gelobet keüscheit, als ich gelob mit eynem finger ann hymel zu ruern oder zu fliegen » (« Faire voeu de chasteté équivaut à vouloir toucher le ciel du doigt ou à voler »).
24 Paul Russell, op. cit., p. 218.
25 On peut ici souligner la disparité entre le discours de Luther et celui d’Argula. Luther s’en prend parfois violemment au luxe vestimentaire de ses contemporains, aux manifestations excessives de la richesse des laïcs. Dans Maurice Gravier (trad.), op. cit., p. 24 1 et s.
26 Helmut Claus dans Adolf Laube (dir.), op. cit., p. 925.
27 Une attaque contre la seule justice ecclésiastique peut encore avoir un sens en Allemagne. Celle-ci y conserve en effet un certain poids. Voir Bernard Guenée, op. cit., p. 240.
28 Le légalisme biblique répond, selon Luther, à un contresens sur l’interprétation de l’Évangile. La règle évangélique doit être respectée entre les chrétiens mais dans le monde, on ne peut prétendre gouverner selon l’Évangile car tous les hommes ne sont pas chrétiens. Voir De l’Autorité temporelle..., dans Joël Lefèbvre (trad.), Op cit., p. 87 : « […] Commence par faire que le monde soit plein de chrétiens avant de prétendre gouverner chrétiennement et selon l’Évangile ».
29 « N’admettez pas Votre Grâce, que les petits enfants comparaissent encore en justice sans jamais pouvoir obtenir de sentence » : Helmut Claus pense qu’Argula dénonce ici les juges qui prononcent à dessein d’injustes sentences dans l’attribution des héritages afin que la partie spoliée engage un autre procès. Voir Adolf Laube (dir.), op. cit., tome 2, p. 926.
30 Les critiques allemands ont successivement parlé à propos de Fortunatus de Volksbuch (livre populaire) puis de Bürgerlicher Prosaroman (roman bourgeois). Pour Walter Raitz, l’ouvrage est beaucoup trop long pour être qualifié de récit populaire. Voir Walter Raitz, Zur Soziogenese des bürgerlichen Romans. Eine literatursoziologische Analyse des « Fortunatus », Düsseldorf, 1973, p. 125 s. Voir aussi l’introduction de Peter Suchsland dans Nationale Forschungs und Gedenkstatten der Klassischen Deutschen Literatur in Weimar (éd.), Deutsche Volksbücher, Berlin et Weimar, 1982, tome 1.
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