L’utilisation des CD-Roms de la Patrologie latine et des vidéodisques de la Bibliothèque Vaticane
Par les étudiants, les enseignants et les chercheurs du G.A.H.O.M
p. 91-95
Texte intégral
1Le Groupe d’Anthropologie historique de l’Occident médiéval (G.A.H.O.M.) est une équipe de recherches au sein du Centre de Recherches historiques, laboratoire mixte du Centre national de la Recherche scientifique et de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences sociales. Le G.A.H.O.M. dispose d’un centre de documentation spécialisé notamment dans l’image médiévale et les exempla et, à ce titre, il reçoit chaque année plusieurs dizaines de chercheurs et d’étudiants travaillant dans ce domaine et venant du monde entier. Mais si le nombre d’usagers n’est pas très élevé, le caractère pointu et exigeant de leurs recherches n’en nécessite pas moins une assistance constante, par exemple en ce qui concerne l’utilisation des CD-ROMs et des vidéodisques.
Les CD-ROMS de la Patrologie latine
2En fait de CD-ROMs patristiques, il ne sera pas question ici de l’édition électronique de l’intégralité de la Patrologie latine de Migne commercialisée par Chadwyck-Healey mais seulement de la troisième version de la CETEDOC Library of Christian Latin Texts éditée chez Brépols.
3Mais dans ce cas précis peut-on encore parler de patrologie ? Le manuel d’accompagnement du CD-ROM porte le sous-titre de Base de données pour la tradition occidentale latine qui correspond mieux à l’ensemble des textes offerts : des Pères de l’Eglise, certes, mais aussi la Vulgate et, dans la troisième version, des oeuvres franciscaines et un certain nombre de textes hagiographiques anonymes tirés des Monumenta Germaniae Historica1 des Acta sanctorum, etc... Toutefois les conditions de délimitation de ce corpus restent mal définies. On y retrouve bien sûr les volumes de la collection Corpus christianorum mais aussi des éditions diverses (Migne, Sources chrétiennes, etc...) sans bien discerner les critères de sélection. La création de cette base de données a une origine qui explique en partie ces choix mais il n’en est fait nulle mention dans le manuel d’accompagnement et, depuis l’ambition du CETEDOC s’est, heureusement, élargie à la réalisation d’une patrologie (au sens très large) informatisée allant du IIe au XVe siècle. Le danger pour un utilisateur consiste alors à oublier la non-exhaustivité, actuelle, de ce corpus tout en sachant, aussi bien grâce aux index de la base qu’à la liste du manuel, qu’y figurent les « principaux auteurs » de référence : Ambroise de Milan, Augustin, Bède, Bernard, Tertullien, etc...
4A propos de l’index des auteurs, quelques petites remarques doivent être faites. En effet certains auteurs, associés à d’autres comme Eterius Exomensis (et Beatus Liebanensis) ou Marcellinus (et Faustinus Luciferianus) n’ont pas de renvoi dans l’index informatisé alors qu’ils en bénéficient dans celui du manuel.
5Quant aux textes, l’usager ne doit pas perdre de vue qu’il est en face d’une édition sans aucun apparat critique et qu’il ne pourra que rarement se dispenser d’un recours à la publication sur papier. Ainsi c’est dans la préface, présente seulement dans l’édition sur papier, qu’il apprendra que le texte des Scivias d’Hildegarde de Bingen n’est connu aujourd’hui que par une copie beaucoup plus tardive.
6La dernière version, sous Windows, du logiciel, offre de nombreux avantages et une convialité plus grande que les précédentes versions sous DOS. Néanmoins la meilleure performance se réalise sous Windows 95. L’utilisation de la CLCLT-3 sous Windows 3.10 présente quelques inconvénients : par exemple l’impossibilité de faire disparaître le fond bleu sur lequel s’inscrivent les sententiae, qui diminue beaucoup la lisibilité des réponses même si l’on peut changer la police, la taille et la couleur des caractères. En outre l’habillage Windows prend de la place sur l’écran et réduit d’autant l’espace réservé aux réponses. Mais ce dernier inconvénient disparaîtra bientôt avec la généralisation des écrans 17 pouces.
7De très appréciables améliorations sur les versions précédentes facilitent les recherches. Ainsi on peut obtenir des statistiques sur la fréquence d’une forme avec une répartition entre la Patristique (P) proprement dite, la Bible (B) et les auteurs médiévaux (M) tandis qu’avant on obtenait un chiffre global. D’autre part lorsqu’on exporte, en imprimant ou sur disquette, un fichier en voulant conserver les mémentos, ceux-ci se placent automatiquement après chaque oeuvre ou auteur alors qu’avant sortait en premier toute la série des mémentos puis toutes les sententiae.
8Enfin il reste à constater la permanence de deux « défauts », dûs sans aucun doute à la grande érudition des concepteurs de la base de données. Le premier est le manque de hiérarchisation de l’index des oeuvres par rapport à celui des auteurs. Ainsi lorsqu’on a choisi dans le filtre Auctor par exemple Augustinus Hipponensis et que l’on se positionne sur le filtre Titulus, en appelant l’index des oeuvres, on obtient non pas la liste des oeuvres de saint Augustin mais celle, alphabétique, de tous les titres contenus dans le CD-ROM. Il est donc nécessaire soit de connaître les titres exacts en latin des oeuvres de l’auteur choisi soit de se reporter au manuel d’accompagnement qui donne la liste des auteurs avec pour chacun ses oeuvres. Or dans une bibliothèque les livrets d’accompagnement des CD-ROMs ont la fâcheuse habitude de s’égarer. On fera mention en outre de l’obligation de remplir les filtres les uns après les autres : par exemple il faut valider le filtre Auctor avant de pouvoir remplir le filtre Titulus, ce qui fait perdre un peu de temps à chaque fois.
9Le second « défaut » tient au fait que la troisième version de la CLCLT ne comporte plus un seul CD-ROM mais deux. Or tous les publics n’ont pas à leur disposition des tourelles permettant d’installer en permanence plusieurs disques et certains utilisent des lecteurs à un seul disque. Brépols a parfaitement bien prévu ce cas de figure et l’on peut poursuivre sa recherche sur le premier disque puis sur le second sans être obligé de recommencer son interrogation. Mais il aurait été plus simple et cela aurait évité des manipulations inutiles, d’indiquer dans l’index des auteurs si ceux-ci se trouvaient dans le volume 1 qui comprend la période patristique et donc la Vulgate, ou dans le volume 2 qui contient la période médiévale. Cette indication est donnée mais dans la liste de sélection que l’on obtient une fois qu’on a rempli le filtre Auctor. Et si un étudiant même moyen est capable de situer Tertullien ou saint Bernard, il y a peu de chance qu’il le soit pour un Philippe de Harvengt.
10En ce qui concerne l’utilisation de la CLCLT-3, il faut bien se rendre compte que ce CD-ROM très performant, malgré quelques petites imperfections, est loin d’être exploité selon toutes ses possibilités par les étudiants ou les chercheurs. En effet, lire le manuel d’accompagnement, quand par chance il se trouve avec les CD-ROMs, demande du temps. Il est du reste à noter que la troisième édition est d’une remarquable clarté.
11Alors la plupart du temps, c’est le documentaliste ou le bibliothécaire qui « initie » brièvement aux fonctions principales quand lui-même a pris le temps de lire le manuel d’accompagnement et la rubrique d’aide (d’une très grande clarté elle aussi mais qui ne comporte pas moins de 16 écrans de lecture) et de tester le logiciel. Au G.A.H.O.M., on a même refait un mini-manuel d’utilisation de trois pages qui commence par la mise en route de l’ordinateur.
12Faute de temps pour maîtriser une syntaxe complexe qui risque d’entraîner du bruit mais surtout du silence, les interrogations se limitent donc le plus souvent aux formae (lupus, atrium, votum, etc...) avec quelquefois l’utilisation du filtre Auctor. Il y a là un risque de réponse sous forme de « puzzle » avec une série de phrases, mises bout à bout et sorties de leur contexte bien que le simple fait d’actionner la touche « entrée » donne accès à l’intégralité du texte. Il faut donc constamment veiller à ce qu’une forma soit située non seulement dans un texte mais aussi dans l’ensemble des oeuvres d ’un auteur. Il est bien évident qu’un CD-ROM n’est pas conçu pour une lecture continue et qu’il convient de se reporter à l’édition sur papier.
Les vidéodisques de la Bibliothèque vaticane
13Les trois vidéodisques de la Bibliothèque vaticane constituent une banque d’images renfermant l’intégralité des miniatures des manuscrits des fonds latins de la Reine, du duc d’Urbino et les deux mille premiers environ du Vatican. Le logiciel d’exploitation conçu spécialement permet de trouver une série d’images répondant à un ou plusieurs critères. Ce qui est pris en compte ici c’est l’image et non le manuscrit bien que les miniatures soient enregistrées les unes à la suite des autres comme elles se présentent dans les manuscrit en partant du manuscrit numéro un et ainsi de suite.
14L’inconvénient du vidéodisque est qu’il nécessite un matériel plus important, donc plus onéreux et plus encombrant, qu’un CD-ROM. En effet, il faut avoir non seulement un ordinateur pour se servir du logiciel d’interrogation mais aussi un lecteur de vidéodisque et un écran de télévision. Cela dit, cet inconvénient est aussi un avantage. Le nombre d’images emmagasinées sur un vidéodisque (environ 25.000 vues pour 2.000 manuscrits) est sans commune mesure avec la capacité d’un CDROM (souvent un seul manuscrit comme celui du Psautier d’Utrecht ou du De natura rerum de Raban Maur du Mont-Cassin) qui doit en outre comporter le logiciel d’exploitation. A cela s’ajoute le confort visuel : on peut regarder une image en plein écran et lire, sur un autre écran, la fiche descriptive. Tandis que dans le cas d’un CR-ROM classique on a soit l’image en plein écran et donc on ne peut lire en même temps la notice, soit on a les deux mais dans ce cas l’image est réduite. Il reste alors à naviguer sans arrêt de l’image à la fiche.
15Le logiciel d’exploitation est d’une grande convivialité. La grille d’interrogation comporte plusieurs champs qui peuvent être tous remplis en même temps, affinant d’autant la réponse. En outre pour chaque champ de la partie catalographique, un index est accessible et pour la partie portant sur l’indexation de l’image un thésaurus2 a été introduit. Chaque utilisateur a la possibilité de constituer son fichier propre. De plus les moyens techniques actuels permettent d’exporter les images. Reste à chacun de gérer les problèmes de droit de reproduction...
16Comment sont utilisés les vidéodisques de la Bibliothèque vaticane ? Les usagers recherchent des images de funérailles ou des miniatures représentant des artistes à l’oeuvre, par exemple. Peu de recherches portent sur la totalité d’un manuscrit. Là aussi, il faut sans cesse rappeler à l’utilisateur qu’une image fait partie d’un ensemble, le manuscrit, et qu’elle ne peut être isolée. Toutefois, il arrive que ces banques d’images soient interrogées par des éditeurs (scientifiques ou commerciaux) pour trouver la « bonne » illustration de la page de couverture d’un livre, etc... Quant à un visionnage intégral des vidéodisques, en trois ans d’exploitation, cela n’est arrivé que deux fois ! Dans les deux cas, il s’agissait d’une recherche quasiment exhaustive sur des objets (les objets agricoles, les objets en terre cuite) difficilement repérables dans le thésaurus. En effet l’intérêt d’un thésaurus et de regrouper des termes plus ou moins proches afin de faciliter l’interrogation. Mais alors on perd en précision ce qu’on gagne en généralité.
17En conclusion, les techniques actuelles permettent de récolter facilement des données textuelles ou iconographiques mais il faut apprendre à les replacer dans leur contexte sous peine de florilèges désordonnés.
Notes de bas de page
1 Brépols publie d’autre part un CD-ROM des Monumenta Germaniae Historica (première version 1996) mais pour le moment il n’y a pas de doublet avec la CLCLT-3.
2 Ce thésaurus élaboré par le Groupe Images a été publié en 1993 par Le Groupe d’Anthropologie historique de l’Occident médiéval sous le titre : Thésaurus des images médiévales pour la constitution de bases de données iconographiques.
Auteur
CNRS
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