Esquisse d’une frontière culturelle entre l’Europe occidentale et le bassin oriental de la Méditerranée dans le développement de l’astronomie à l’âge du Bronze (2200-800 av. J.-C.)
Outline of a Cultural Border between Western Europe and the Eastern Mediterranean Basin through the Development of Astronomy during Bronze Age (2200-800 BC
Résumés
La question du développement de l’astronomie en Europe occidentale avant l’Antiquité est une lacune importante de l’histoire des sciences. Les données n’en existent pas moins. Cet article a pour but de présenter l’évolution des connaissances et des pratiques astronomiques au cours de l’âge du Bronze européen, ainsi que la part des influences contemporaines issues du Bassin oriental de la Méditerranée exercées dans ce processus. Dans cette perspective, nous cherchons à démontrer l’existence d’une frontière culturelle entre l’Europe occidentale et le Bassin Oriental de la Méditerranée au cours de l’âge du Bronze européen (2200-800 av. J.-C.) dans le développement et la pratique de l’astronomie par le biais de la confrontation des modèles contemporains en usage dans ces deux zones géographiques.
La frontière entre l’Europe occidentale d’une part, et l’Orient méditerranéen d’autre part, est de prime abord difficilement perceptible du fait de l’existence de conceptions et de modèles relativement proches issus d’échanges et de contacts au cours de l’âge du Bronze. En revanche, celle-ci apparaît clairement dès lors que l’on cherche à considérer l’évolution des pratiques et des connaissances : il est alors possible de souligner que la complexification de l’astronomie orientale est directement liée à l’utilisation de l’écriture et, par extension, à l’existence d’un système étatique appuyé sur une administration et une stricte répartition hiérarchisée des tâches. Les sociétés européennes, dépourvues de ces deux éléments, exploitent leurs connaissances en suivant une autre voie, tout à fait originale. De plus, les disparités et les originalités qui existent dans les pratiques astronomiques entre l’Europe occidentale et le Bassin oriental de la Méditerranée résultent, au moins en partie, de problématiques spécifiquement liées aux facteurs environnementaux à une échelle locale.
Une rupture est dès lors nettement perceptible entre une astronomie complexe dont le développement est favorisé par le comput systématique et la diffusion des éphémérides en Orient, et une astronomie d’observation plus limitée, mais néanmoins parfaitement intégrée dans les pratiques et la pensée des sociétés européennes.
There is an important shortcoming in Science history in regards to the study of the development of astronomy in Western Europe before Antiquity. Nonetheless, data do exist. This article aims to present the evolution of knowledge and of astronomical practices during European Bronze age, as well as the contemporary influences coming from the Mediterranean Bassin within this process. In this regard, we are seeking to demonstrate the existence of a cultural border between Western Europe and the Eastern Mediterranean Bassin in the development and the practice of astronomy during the European Bronze Age (2200-800 BC) through the confrontation of contemporary models within those two geographical zones.
The cultural border between Western Europe on one hand and Mediterranean Orient on the other hand seems difficult to see at first due to the existence of relatively similar conceptions and models focusing on trade and contacts during the Bronze Age. However, the border appears clearly when we consider the evolution of practices and of knowledge. It is therefore possible to note that the increased complexity of eastern astronomy is directly linked to the use of writing, and by extension, the existence of a state system supported by an administration and a strict hierarchical division of labor. European societies, lacking those two elements, exploited their own knowledge to go for a completely new and original way. Furthermore, disparities and singularities, existing in astronomical practices between Western Europe and the Eastern Bassin of the Mediterranean, are at least partly due to local issues related to environmental factors. Therefore, a certain division is clearly perceptible between a complex astronomy, which development is promoted by a systematic compute and the spread of ephemeris in the East, and a more limited observational astronomy, although perfectly well integrated into European societies’ practices and thoughts.
Entrées d’index
Mots-clés : Europe, bassin oriental de la Méditerranée, frontière culturelle, âge du bronze
Keywords : Europe, astronomy, cultural border, eastern Mediterranean bassin, Bronze Age
Texte intégral
Introduction : Ex Oriente Lux ?
1La question du développement de l’astronomie en Europe occidentale, avant la période grecque classique, est une carence importante de l’histoire des sciences (Ruggles et Cotte, 2010 ; Mathias, 2011). Il s’agit dans cet article de présenter les principaux aspects des connaissances et des pratiques astronomiques au cours de l’âge du Bronze européen, ainsi que la part des influences contemporaines issues du Bassin oriental de la Méditerranée susceptible d’y être identifiées.
2Ce thème de recherche est longtemps resté controversé et soumis à caution pour diverses raisons (Ziolkowski et Lebeuf, 1991). Il semblait en particulier improbable, pour une part importante de la communauté archéologique, que des sociétés anépigraphes et/ou anhistoriques issues des marges du monde méditerranéen aient pu faire preuve d’un développement intellectuel suffisant pour maîtriser une science telle que l’astronomie1. Tout résultat potentiellement recevable était dès lors considéré comme le produit d’une hypothétique importation orientale, permettant, ainsi, la survivance de théories primitivistes et s’écartant de possibles innovations autochtones (Montélius, 1899 ; Childe 1939). La rareté des sources textuelles constitue en cela un écueil majeur dans l’étude des peuples de la Protohistoire européenne, en particulier lorsque l’on cherche à appréhender certains aspects relevant par essence du domaine des catégories mentales. Cet état de fait a ainsi largement contribué à établir un clivage entre ces deux entités – le Bassin oriental de la Méditerranée d’une part, l’Europe septentrionale de l’autre – au point d’établir une distinction arbitraire, heureusement aujourd’hui en voie de disparition, entre une culture dite « classique » et une ou plusieurs dites « barbares » (Ibid. ; Kristiansen, 1996 ; Mathias, 2011 et 2012).
3Les données, pourtant, existent bel et bien (Fig. 1) et méritent d’être considérées, non plus à travers la lecture réductrice d’une nécessaire influence orientale sur le développement des sociétés européennes, mais selon une approche holistique de l’âge du Bronze où se manifestent le maintien de traditions locales et l’apport d’idées et de pratiques nouvelles, par le biais des échanges entre Orient et Occident (Mathias, 2011). Dans cette perspective, confronter les modèles astronomiques identifiés en Europe occidentale à ceux des principales cultures du Bassin oriental de la Méditerranée, pourra permettre l’identification d’une véritable frontière culturelle entre ces deux entités dans l’appréhension du ciel à l’âge du Bronze (Mathias, 2012).
Vers une astronomie protohistorique ?
Les sociétés européennes et le ciel à l’âge du Bronze (2200-800 av. J.-C.) : éléments de contexte
4À l’aube du IIe millénaire av. J.-C., une nouvelle dynamique s’impose en Europe occidentale avec l’apparition de la métallurgie du bronze. Le besoin régulier d’approvisionnement en matières premières, en particulier pour la production du métal, entraîne un élargissement des circuits d’échanges, parfois à très longue distance, où les biens matériels circulent autant que les idées (Kristiansen et Larsson, 2005). Dans ce contexte, les productions agricoles et la démographie présentent une évolution et une croissance en dents de scie qui contribue à favoriser l’accroissement des inégalités sociales et l’émergence de nouvelles formes de sociétés hiérarchisées, parfois proches de l’État2.
5L’apport des données archéologiques témoigne, en outre, du développement croissant des croyances et des pratiques en lien avec le ciel à l’échelle de tout le nord-ouest de l’Europe, dès les premiers temps de l’âge du Bronze (Meller, 2004 ; Mathias, 2011). Il ne s’agit pas pour autant d’une réelle nouveauté, car celles-ci paraissaient déjà bien ancrées dans les traditions néolithiques, en particulier à travers les nombreux sites mégalithiques orientés, dont Stonehenge constitue encore aujourd’hui l’exemple le plus représentatif (Hawkins et White, 1965 ; Thom, 1967 ; Baity, 1973). La période charnière que constitue le passage du Néolithique final à l’âge du Bronze ancien est cependant marquée par l’abandon progressif des structures mégalithiques, au profit de nouvelles formes d’expression chargées d’illustrer l’intérêt porté au ciel par les sociétés européennes (Baity, 1973 ; Meller, 2004 ; Meller et Bertemes, 2011). Un culte centré, en particulier sur le Soleil, semble se développer à grande échelle et se caractérise par le recours à des méthodes et des symboles qui, malgré quelques variantes culturelles, restent assez semblables d’une société et d’une région à l’autre, de l’Europe du Nord au Bassin oriental de la Méditerranée (Kaul, 1998 et 2004). Ces similitudes sont soulignées par Joseph Déchelette dès le début du xxe siècle (Déchelette, 1909a et b). La découverte du disque de Nebra en 1999 dans un dépôt votif en Allemagne marque un tournant décisif dans la perception de l’astronomie protohistorique (Fig. 2). Daté de 1600 av. J.-C., il s’agit de la plus ancienne carte du ciel connue à ce jour. Son authenticité est aujourd’hui certaine, et s’il a été suggéré pendant un temps qu’il puisse s’agir d’une importation méditerranéenne, il est désormais clairement démontré que les matériaux nécessaires à sa fabrication proviennent du continent européen (Pernicka et al., 2003 ; Meller, 2004 ; Ehser, Borg et Pernicka, 2011 ; Meller et Bertemes, 2011). D’autres aspects suggèrent en revanche de probables interactions entre l’Europe et le bassin oriental de la Méditerranée : la technique du damasquinage3, en particulier, inédite en Europe à cette période, est au moins importée du monde mycénien (Ibid., Pernicka et al., 2003).
Définir l’astronomie aux âges des métaux
6Il apparaîtra, à la lecture de cet article, que l’utilisation du terme astronomie peut sembler anachronique. C’est effectivement le cas, dans une certaine mesure. Rappelons que, malgré la richesse des sources textuelles relatives aux phénomènes célestes héritées de l’Antiquité classique, l’astronomie, au sens scientifique du terme, n’est reconnue comme telle par les historiens des sciences qu’à partir du début du xvie siècle, avec les travaux de Nicolas Copernic. Parler ici d’astronomie relève donc essentiellement d’une commodité de langage, à défaut d’un autre terme plus à même de correspondre à nos besoins. Définir l’appréhension des phénomènes célestes par les sociétés protohistoriques se révèle en effet particulièrement complexe dans la mesure où il s’agit d’un domaine idéel par essence. À défaut de sources textuelles, cela amène à considérer un certain nombre d’éléments à partir de données essentiellement matérielles et iconographiques (Fig. 1). Les cosmologies, les croyances relatives à l’Univers, au Soleil, aux étoiles et aux planètes s’expriment à travers des constructions mythologico-symboliques qu’il faut analyser et déchiffrer pour en extraire des données astronomiques concrètes4 (Godelier, 2010 ; Mathias, 2011 et 2012). À cela vient s’ajouter une double approche du ciel faite par les sociétés protohistoriques : rationnelle d’une part – c’est-à-dire relative aux lois physiques régissant les objets célestes – et irrationnelle d’autre part, où les déterminations astronomiques sont exploitées à fin de prédiction et d’astrologie (Ruggles et Cotte, 2010). Enfin, la dimension religieuse de l’astronomie joue un rôle non négligeable à la période considérée, en témoigne le culte solaire développé tout au long du IIe millénaire en Europe (Déchelette, 1909a et b ; Kaul 1998 et 2004).
Astronomie de position et mécanique céleste à l’âge du Bronze
7L’essentiel des pratiques astronomiques de l’âge du Bronze, tant en Orient qu’en Occident, repose sur l’observation du ciel afin de mesurer le temps à plus ou moins grande échelle en se basant sur le mouvement apparent des corps célestes. Il s’agit donc, de fait, d’une astronomie de position essentiellement empirique, par opposition à l’astronomie de calcul développée postérieurement (Pichot, 1991 ; Schlosser et Cierny, 1997 ; Kelley et Milone, 2005). Dans ce cas, l’horizon sert d’axe référentiel à partir duquel les observations peuvent être menées. La reconnaissance de phénomènes cycliques dans le déplacement des astres sur la sphère céleste – en particulier les solstices, les équinoxes solaires et les phases de la Lune – jouaient alors un rôle essentiel dans la détermination des saisons pour les sociétés de la protohistoire. Cela se trouve confirmé par les orientations astronomiques de nombreux sites mégalithiques ou funéraires européens, mais aussi par des textes grecs plus tardifs, comme les Travaux et les Jours d’Hésiode, datés de la fin du viiie siècle av. J.-C. (Ibid. ; Baity, 1973 ; Neugebauer, 1983 ; Meller, 2004 ; Mathias, 2011).
8En astronomie, les solstices désignent la période de l’année où la position apparente du soleil sur la sphère céleste atteint son point extrême septentrional ou méridional. L’astre semble alors se lever et se coucher suivant une déclinaison constante durant une courte période, avant de redevenir mobile sur l’horizon jusqu’au solstice suivant. Par conséquent, le solstice d’hiver est le moment de l’année où la durée du jour est la plus courte et, de fait, où la nuit est la plus longue. Mais on peut également l’interpréter comme un marqueur calendaire non négligeable pour des sociétés agricoles, lequel indique que les jours vont rallonger et que l’on s’achemine vers la saison propice aux travaux des champs (Schlosser et Cierny, 1997 ; Meller, 2004 ; Mathias 2011 et 2012).
9Les observations des étoiles de faible magnitude5 dans le ciel nocturne, plus complexes, constituent en outre des marqueurs temporels plus nombreux et plus précis pour l’élaboration d’un calendrier. En Égypte, c’était le premier lever annuel de l’étoile Sirius sur l’horizon qui annonçait la crue prochaine du Nil et le début de la saison agricole (Neugebauer, 1942 ; Clagett, 1995).
Un cas pratique : le disque de Nebra
10Le disque de Nebra est un exemple des plus intéressants, de par sa facture et son décor, pour appréhender l’astronomie à l’âge du Bronze. Il s’agit d’un disque de bronze d’environ 32 cm de diamètre portant 37 éléments de décor en feuille d’or damasquinée sur sa face avant. On y reconnaît :
Un disque et un croissant symbolisant vraisemblablement la pleine Lune et le premier croissant ;
32 points figurant des étoiles, parmi lesquels une rosace de sept points caractéristiques de l’amas des Pléiades (Fig. 3) ;
deux « horizons » latéraux ;
un croissant horizontal pouvant représenter une barque solaire (Meller, 2004).
11Ce disque peut être interprété sommairement de la manière suivante : aux alentours de 1600 av. J.-C., les Pléiades sont très proches de l’équinoxe vernal6. Par conséquent, elles étaient à l’exact opposé du soleil : elles se levaient lorsqu’il se couchait, et inversement. Ce phénomène acronyque avait vraisemblablement attiré l’attention des hommes de l’âge du Bronze, car il marquait le début et la fin de la période agricole en Europe durant toute la Protohistoire7, ce qui donnerait au disque une fonction astronomique proche de celle d’une éphéméride (Schlosser et Cierny, 1997).
12Les deux « horizons » latéraux sur le disque forment quant à eux un angle au centre de 82°, ce qui correspond parfaitement à l’angle formé par les lignes solsticiales à leurs maxima pour un observateur situé approximativement à 70 km au nord de la latitude de Nebra (Meller, 2004, p. 44). À l’âge du Bronze, le solstice d’été était marqué par le lever du Soleil derrière le mont Brocken, haut de 1142 mètres et visible depuis la colline du Mittelberg où a été découvert le dépôt (Fig. 4). Cela implique par conséquent que les concepteurs de ce disque étaient, d’une part, capable de calculer cet angle avec précision à l’échelle d’un territoire relativement vaste, et d’autre part, de réduire cette échelle pour la représenter sur cet analogon portatif.
Le ciel entre Orient et Occident : connaissances et représentations
13Les sociétés de Mésopotamie, d’Égypte et d’Europe septentrionale ont chacune développé une forme d’astronomie propre. Confronter ces différents modèles permet d’en faire ressortir les similitudes et les disparités.
Mésopotamie
14L’appréhension des phénomènes célestes par les Mésopotamiens peut se diviser schématiquement en deux périodes chronologiques successives. La première débute probablement avec l’invention de l’écriture et se poursuit jusqu’au milieu du viiie siècle av. J.-C. Il s’agit essentiellement d’une phase de découverte et de comput de données astronomiques. Les unités de mesure prennent forme, ainsi que les différents procédés permettant de suivre le déplacement des corps célestes et de les localiser les uns par rapport aux autres. La seconde marque les débuts d’une astronomie de calcul (Pichot, 1991 ; Kelley et Milone, 2005). Les Mésopotamiens avaient commencé à observer les éclipses au moins à partir du IIe millénaire (Ibid.). Ces relevés étaient précieusement conservés par la suite, copiés, largement diffusés, et indispensables pour permettre des mesures ultérieures.
15Les sources textuelles montrent par ailleurs un ordonnancement précoce du ciel nocturne en différentes sections et constellations afin d’en faciliter la lecture. Le catalogue d’étoiles dit MUL.APIN (IIe-Ier millénaire av. J.-C.) présente ainsi 60 constellations réparties sur trois cercles concentriques définis comme des « chemins » stellaires portant le nom de divinités : Enlil, Anu et Ea. Il mentionne également 6 constellations circumpolaires8, 5 planètes (Jupiter, Vénus, Mars, Mercure, Saturne) et 18 constellations réparties sur un quatrième « chemin », celui de la Lune (Sîn), prémices du futur Zodiaque. Le récit cosmogonique Enūma eliš (fin du xiie siècle av. J.-C.), explique comment la voûte céleste est découpée en 12 sections correspondant aux 12 mois solaires, et décrit les trois chemins précédemment évoqués (Hunger et Pingree, 1989).
16Le but premier de cette exploitation systématique des données astronomiques par les Mésopotamiens était la divination. La cour de chaque souverain disposait d’un collège de prêtres spécialisés dans la pratique oraculaire. Ce sont ces derniers qui étaient chargés d’observer, de mesurer et d’enregistrer les mouvements des corps célestes. Chaque phénomène était ainsi considéré comme un signe envoyé par les dieux, qu’il fallait interpréter afin de prévenir le roi – et plus largement l’empire – contre tout évènement fâcheux. Il est bien difficile de distinguer l’astronomie de l’astrologie dans le monde mésopotamien, précisément parce que la frontière entre les deux domaines est bien trop ténue pour être mise en évidence. La rupture entre les sciences concrètes, la religion et la magie n’est pas encore consommée (Neugebauer, 1983 ; Pichot, 1991 ; Rochberg 2004).
Égypte
17L’astronomie égyptienne est bien plus difficile à cerner, car, à de rares exceptions près9, les données font presque complètement défaut. Par ailleurs, l’astronomie arithmétique ne semble pas avoir été maîtrisée en Égypte avant la domination grecque (Kelley et Milone, 2005, ch. 8.1).
18Le lien entre religion, mythologie et astronomie semble ici bien plus important qu’il ne l’était en Mésopotamie à la même époque. L’existence dissociée de textes astronomiques et religieux dans cette dernière région participe peut-être de cette impression. La conception nilotique de l’Univers est ici encore purement imaginaire (Godelier, 2010) : suivant une démarche identique à celle de la pensée mésopotamienne, les planètes et certaines étoiles se voient associées à des divinités du panthéon égyptien, voire en sont les incarnations. Une attention particulière était portée aux phénomènes cycliques – plus spécifiquement celui de l’alternance jour/nuit et, par extension, celui des saisons – dans lesquels se trouvait cristallisée une part essentielle des croyances égyptiennes relatives à la vie après la mort et à la résurrection et à la renaissance. La géographie de l’Égypte se prêtait particulièrement bien au développement de tels concepts : seules les rives du Nil se montraient fertiles, tandis qu’au-delà s’étendaient des déserts inhospitaliers. Le fleuve pourvoyeur de vie occupait donc une place centrale dans le quotidien des Égyptiens et avait été divinisé au même titre que les corps célestes annonciateurs de saisons d’abondance ou de calamités. Cet état de fait explique également la place prépondérante occupée par Osiris dieu de l’agriculture et inventeur de la religion, mais également fils de Nout (le Ciel) et Gheb (la Terre), dans la pensée nilotique (Maspéro, 1895).
19Le texte de l’Amduat, retrouvé en particulier sur le mur de la chambre funéraire du pharaon Touthmôsis III (XVIIIe dynastie), dans la Vallée des Rois, décrit ainsi comment les douze heures de la nuit correspondent au passage de l’âme du souverain décédé qui traverse l’au-delà pour ensuite renaître à la vie, comme le Soleil. Il s’agit d’une manière de retranscrire la réalité du cycle solaire en termes imaginaires et mythologiques – rendue ainsi intelligible pour toutes les classes de la société (Pichot, 1991).
20Outre le Soleil et la Lune, les Égyptiens avaient aussi appris à utiliser les étoiles pour marquer et compter le temps. Ils ont ainsi créé un « catalogue » regroupant 36 astérismes, et que l’on connaît sous le nom de « décans ». On ne considèrera pas ici l’année de 365 jours, mais celle de 360 jours, découpée en 36 décades. Au cours d’une décade, les 12 heures de la nuit se voient chacune associée à un décan, c’est-à-dire une étoile ou une constellation dont l’heure de lever est précisément relevée et permet ainsi de mesurer l’écoulement du temps. Dans le cas présent, le découpage de la voûte céleste ne s’est pas fait par section précise de 10° (comme en Mésopotamie, par exemple). Seul semble avoir été considéré l’intervalle d’une heure entre le lever de chaque objet, quelle que soit sa position dans le ciel. Ces observations étaient ensuite enregistrées dans un calendrier diagonal ou une horloge stellaire dès la fin du IIIe millénaire av. J.-C. (Clagett, 1995 ; Gadré, 2008).
Europe septentrionale
21Les expressions d’une astronomie européenne pour la période concernée sont bien plus difficilement perceptibles que précédemment, dès lors que nous sommes confrontés à des sociétés anépigraphes. De plus, l’appréhension des phénomènes célestes, ici résolument indissociable de la sphère imaginaire et symbolique, apparaît retranscrite de manière cryptique dans l’iconographie et la culture matérielle (Kaul, 1998 et 2005 ; Randsborg, 2009 ; Mathias, 2011).
22D’après la récurrence de certaines orientations vers les points remarquables de lever et de coucher du soleil observées sur certains sites mégalithiques (Hawkins et White, 1965 ; Thom, 1967 ; Baity, 1973), les sociétés européennes avaient vraisemblablement compris dès le Néolithique que celui-ci évoluait sur une orbite fixe et que le mouvement de la lune était oscillatoire dans le temps. Cependant, ces connaissances, bien qu’elles aient recelé des aspects éminemment pratiques pour la gestion d’une forme de calendrier et des productions agricoles, devaient servir avant tout à la conception et à l’entretien d’un système de pensée religieuse encore difficile à percevoir dans son intégralité aujourd’hui (Kaul, 2005).
23De la retranscription du culte solaire ressortent des créatures – cheval, oiseau aquatique, dragon ou poisson – que l’on trouve régulièrement associées à l’astre lui-même et qui jouaient vraisemblablement un rôle essentiel dans la succession des jours et des nuits tout au long de l’année (Kaul, 1998). Le disque solaire tiré par un cheval retrouvé en 1902 dans une tourbière de Trundholm, au Danemark, illustrerait ainsi ce principe avec deux faces ornées, l’une dorée, l’autre en bronze, que l’on peut interpréter comme figurant respectivement la partie diurne et la partie nocturne de la journée (Fig. 5). Dans ce modèle, le bateau, d’abord considéré comme un symbole de pouvoir au début du Bronze ancien, évolue peu à peu en véhicule porteur de l’astre solaire sur l’eau au cours de la nuit. Ce modèle cosmologique est alors analogue à son homologue égyptien, sans qu’il soit pour autant possible d’établir une réelle influence nilotique dans son développement en Europe. À défaut de source écrite, il est cependant possible de reconstituer les différentes étapes du « voyage » circadien du soleil d’après les décors de plus de 400 rasoirs et ornements en bronze retrouvés au Danemark et datés de la fin du Bronze final (Ibid., 2004) (Fig. 6).
24Le disque de Nebra pourrait bien quant à lui synthétiser, aussi bien des savoirs et des croyances liés aux mouvements du Soleil et de la Lune hérités du Néolithique et perpétués à l’âge du Bronze, que de nouvelles connaissances à travers la représentation de l’amas des Pléiades, inédite en Europe septentrionale (Schlosser et Cierny, 1997 ; Meller, 2004 ; Meller et Bertemes, 2005). Cette dernière, sous la forme d’une rosace de sept points est en outre identique à celle que l’on peut trouver sur les sceaux-cylindres mésopotamiens de la même époque ce qui, associé à l’apparition du damasquinage, suggère l’introduction et l’adoption d’un savoir-faire oriental en Europe à cette période (Ibid.) (Fig. 3).
Perception une frontière culturelle dans le développement de l’astronomie à l’âge du Bronze
25Les formes de société qui voient le jour en Europe au début de l’âge du Bronze se développent selon un fragile équilibre répondant à deux impératifs distincts : d’une part la nécessité économique de maintenir ouverts les couloirs d’échanges dans lesquels circulent le métal et les informations, d’autre part le besoin culturel et social de maintenir des traditions locales et régionales sans céder à l’acculturation (Kristiansen et Larsson, 2005). Mais où situer l’astronomie dans ce contexte ?
26Le savoir astronomique, en Orient comme en Occident, n’était vraisemblablement maîtrisé que par un nombre très réduit de personnes dans la société, lesquelles appartenaient à une ou plusieurs classes de la plus haute élite politique, guerrière et religieuse en constante interaction les unes avec les autres à grande échelle (Fig. 7). Ces derniers s’imposaient au reste de la société comme les « maîtres » du Temps et de l’Espace, soit par leurs pouvoirs propres, soit par leur capacité à « communiquer » avec les puissances surnaturelles (Frankfort, 1978 ; Godelier, 2010 ; Mathias, 2011 et 2012). L’expression de ce savoir à l’attention du peuple devait se trouver formalisée par le biais du mythe, que nous estimons pouvoir notamment considérer comme un outil pédagogique de légitimation du pouvoir en place.
27De cette brève réflexion nous pouvons tirer un postulat théorique selon lequel le degré maximal de savoir et de compétences astronomiques se trouve entre les mains du plus petit nombre, lequel correspond aux instances politiques et religieuses les plus puissantes de la société. Dans le cas du Proche-Orient, on constate en revanche que le savoir astronomique n’était pas vraiment maîtrisé par le chef suprême, mais plus vraisemblablement par un collège intermédiaire chargé de lui transmettre le résultat de leurs observations (Pichot, 1991 ; Rochberg, 2004) (Fig. 8).
28Comparer les pratiques astronomiques entre Europe et Orient nous permet par ailleurs de remarquer que seules les civilisations les plus développées dans ce domaine, la Mésopotamie et l’Égypte, entretenaient une longue tradition de comput des cycles célestes (Neugebauer, 1983 ; Pichot, 1991 ; Clagett, 1995 ; Rochberg, 2004 ; Kelley et Milone, 2005). Ces informations, recueillies parfois durant plusieurs centaines d’années, permirent d’élaborer des méthodes de plus en plus complexes qui conduisirent, à terme, à l’apparition de l’astronomie arithmétique en Mésopotamie, au tournant du viie siècle av. J.-C. Aucune forme de comput n’est attestée en Europe, ce qui s’explique par l’absence de l’écriture dans cette région. Si l’on suppose certains comptages possibles à l’aide de méthodes rudimentaires, un tel système ne pouvait pas se maintenir dans la durée sans système d’archives centralisées et des lieux de connaissances identifiés. Le rôle potentiel joué par l’écriture dans le développement d’une astronomie complexe impliquerait l’existence d’une classe particulière en charge de l’observation et du comput et une organisation suffisamment structurée pour garantir la conservation, l’enregistrement, la diffusion et l’exploitation de ces données. Un modèle sociétal hiérarchisé et structuré, maîtrisant l’écriture et disposant d’une administration, serait donc un prérequis au développement d’une forme complexe d’astronomie. En somme, l’État serait indispensable au développement d’une astronomie complexe. Ce postulat implique, par conséquent, que les savoirs issus du bassin oriental de la Méditerranée n’ont pas pu prendre racine en Europe occidentale à l’âge du Bronze, même si des contacts et des échanges sont attestés (Kristiansen, 2011 ; Kristiansen et Larsson, 2005).
Conclusion
29L’ensemble des éléments évoqués dans cet article ne vont donc pas contre l’existence d’une astronomie propre aux sociétés occidentales, mais plutôt vers l’émergence d’une frontière culturelle perceptible dans le développement de l’astronomie européenne à l’âge du Bronze. De fait, cette thématique de recherche offre de nouvelles perspectives pour appréhender certains aspects idéels méconnus des sociétés protohistoriques européennes à travers leur culture matérielle et dans leur intégration au sein de couloirs d’échanges à longue – voire très longue – distance entre Orient et Occident à l’âge du Bronze. Si les influences orientales sont bien présentes, il n’en reste pas moins que l’astronomie se développe de manière résolument originale en Europe occidentale, et ce jusqu’à la Conquête romaine.
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Notes de bas de page
1 Elizabeth Baity a résumé de manière très complète le long débat entre archéologues et astronomes qui a vu naître l’acceptation contemporaine de l’astronomie, sinon protohistorique dans son ensemble, du moins au temps des mégalithes (Baity et alii, 1973).
2 La définition de l’Etat répond ici à deux aspects proposés par Alain Testart : une organisation de la violence à part du reste de la société et une conception unique et indivisible de la souveraineté. En l’absence d’un de ces deux aspects, il s’agit d’un semi-État (Testart 2005).
3 Le damasquinage consiste à former un dessin dans une surface métallique par incrustation martelée d’or, de cuivre ou d’argent.
4 Par exemple, le « voyage » du soleil tiré par un cheval dans le ciel se comprend comme la transcription mythologique des phénomènes physiques bien réels que sont le cycle circadien et l’alternance jour/nuit.
5 C’est à dire les étoiles les plus brillantes, et donc facilement visibles à l’œil nu.
6 Le point vernal marque l’intersection entre le plan de l’écliptique, dans lequel évoluent le Soleil et les planètes, et celui de l’équateur céleste. L’équinoxe vernal correspond au moment où le Soleil atteint précisément ce point.
7 Le lien entre les Pléiades et la saison agricole est déjà souligné par Hésiode dans Les Travaux et les Jours (vers 383-391).
8 Une constellation circumpolaire est toujours visible de par sa proximité au pôle céleste et ne se couche jamais sur l’horizon.
9 Marshall Clagett a réuni les sources textuelles principales relatives à l’astronomie égyptienne dans le deuxième volume de Ancient Egyptian Science (Clagett, 1995). Amanda-Alice Maravelia a étudié la mention des astres dans trois textes religieux égyptiens : le Texte des Pyramides, le Texte des Sarcophages et le Livre des Morts pour la période pharaonique (2800-1200 av. J.-C.) (Maravelia, 2006).
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Archéologie de la frontière
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