L’étude techno-stylistique de la céramique incisée de Barajas
Un élément de réflexion sur les traditions céramiques du Bajío, Guanajuato, Mexique
p. 69-84
Résumé
Our doctoral research corresponds to the iconographic and technological study of the cerro Barajas’ incised ceramics, in Guanajuato, Mexico. This study belongs to the Barajas project, directed by Gregory Pereira (CNRS) since 1998. The Barajas massif is located in the Bajío and was occupied intensively during the Epiclassic (a.c. 650-950) and then abandoned in an organized way at the end of this period. It occupies a strategic geographic position in relation to the migratory questions, the main problematic for this area and period. In this context, how can we identify and culturally characterize the Barajas population? Very little studied, the incised ceramics constitute half of the decorated ceramics found in the Barajas’ sites and a great technical and iconographic heterogeneity characterizes its decoration. This techno-stylistic study of decorative themes aims to verify if various traditions of incised decorations exist. Do these traditions reflect cultural identities and the existence of interactions between them? The corpus analysis – still in progress – reveals the existence of 310 decoration themes and 7 incising technique which have been classified into 4 techno-stylistic groups. These observations raise new interrogations regarding the circulation of symbolic systems on a large scale, the understanding of the influences and imitation’ phenomena between ceramics groups, the circulation of the ceramics and also the cohabitation’s interpretation of different traditions in the same place, questions that provide a better perception of the cultural identity of the Barajas inhabitants.
Entrées d’index
Mots-clés : Mexique, céramique, épiclassique, iconographie, techniques, incision
Keywords : Mexico, ceramics, epiclassic, iconography, technics, incising
Note de l’éditeur
Abréviations :
CEMCA : Centre d’études mexicaines et centraméricaines.
ENAH : Escuela Nacional de Antropología e Historia.
IIA : Instituto de Investigaciones Antropológicas.
UNAM : Universidad Nacional Autonoma de México.
Texte intégral
Introduction
1Le concept de « Mésoamérique » est proposé par Kirchhoff (1943) pour désigner une vaste aire culturelle comprenant le Guatemala, une partie du Honduras, du Salvador et du Belize ainsi que les deux tiers sud du Mexique. Les civilisations qui se sont développées à l’intérieur de ce territoire partagent un ensemble de traits culturels qui les différencient des civilisations d’Amérique du Nord et de l’aire andine au sud. Or, depuis les travaux pionniers de Pedro Armillas en 1964, on sait que la frontière Nord de l’aire mésoaméricaine a connu des fluctuations. Au nord, les interactions entre les populations mésoaméricaines et chichimèques ont évolué au cours du temps. En effet, au xvie siècle, la frontière entre les deux aires est matérialisée par le cours du fleuve Lerma, alors qu’à la fin du premier millénaire, à la transition entre les périodes Épiclassique et Post-Classique (vers 1000 apr. J.-C.), elle se situait à plusieurs centaines de kilomètres plus au nord (fig. 1). Depuis, l’archéologie cherche à préciser les modalités de ce phénomène de « l’effondrement de la frontière Nord ». Les principales problématiques archéologiques du nord de la Mésoamérique – liées à l’émergence des civilisations toltèque, tarasque et aztèque – concernent l’évolution de cette frontière (Manzanilla 2005). Dans la région du Bajío, où se situent les sites du massif de Barajas, ce phénomène se traduit par des flux migratoires et des recompositions démographiques complexes. En effet, cette région se situe à la croisée de différentes sphères culturelles, sur un axe de communication reliant le Nord et l’Occident de la Mésoamérique au plateau central (Crespo 1996).
2Les sites du massif du Barajas font l’objet de campagnes de fouilles depuis 1998 dans le cadre du « Projet Barajas », dirigé par Grégory Pereira (CNRS). Ces sites connaissent une occupation principale durant l’Épiclassique, période à la fin de laquelle les territoires du nord du Mexique commencent à être abandonnés par les mésoaméricains, provocant de nombreux mouvements de populations, (Castañeda et al. 1989 : 329 et Braniff 1989 : 109). Les particularités architecturales et matérielles de Barajas, ainsi que ses modalités d’occupation et d’abandon par rapport à d’autres sites contemporains de la région, posent la question de l’origine et de l’identité culturelle de la population du massif (Pereira et al. 2001). Dans ce contexte particulier, l’étude des vases à décor incisé constitue un des thèmes de recherche sur les traditions céramiques, la caractérisation culturelle de cette population et les voies de communication du Bajío.
Potentiel de la céramique incisée
3Le corpus de la céramique incisée de Barajas, issu des différentes campagnes de fouilles et de prospection du projet, s’élève à environ 4 400 tessons. Nous avons 17 pièces entières et une centaine de profils reconstitués. Les datations radiocarbone et la typologie céramique préliminaire montrent que la céramique incisée est présente de 450 à 1100 apr. J.-C.1, c’est-à-dire durant toute l’occupation du massif. Ce groupe est caractérisé par un décor géométrique à base d’incisions, une pâte fine (entre 3 et 6 mm d’épaisseur, très peu de dégraissant à peine visible à l’œil nu) et dure, une cuisson globalement en atmosphère réductrice, un engobe allant de beige à noir et un polissage soigné. Il comprend des formes fermées de type jarre globulaire mais surtout des formes ouvertes, de type écuelle et bol2. Nous avons observé une grande diversité de motifs décoratifs et de techniques d’incisions au niveau des décors.
4La céramique de Barajas comprend deux types de décors : la peinture et les incisions. Alors qu’il existe 13 types peints différents, nous n’avons que trois types incisés : le Lupe Inciso, le Rojo Esgrafiado et le Café Fino Inciso. Le Lupe Inciso est un type provenant du Michoacán, présent en quantité infime à Barajas. Le Rojo Esgrafiado est un type bien défini, appartenant au groupe des pâtes semi-fines, avec un décor à base de gravure sur pâte cuite tout à fait caractéristique. L’essentiel de la céramique incisée est en fait constitué par le Café Fino Inciso, qui, comme nous l’avons précisé, se caractérise par une grande diversité interne, aussi bien au niveau des formes que des motifs et des techniques d’incisions. Selon les contextes, il représente 40 à 60 % de la céramique décorée. Notre analyse se base donc sur l’hypothèse que cette diversité interne puisse correspondre à différents types.
5Les contextes dans lesquels se trouve la grande majorité de ce matériel sont les constructions et résidences monumentales, ainsi que les sépultures. On le retrouve en moindre proportion dans les structures de stockage et l’habitat simple. Les pièces les mieux conservées, dont la majorité sont des jarres, proviennent des contextes funéraires. Cette céramique semble donc utilisée préférentiellement par l’élite locale, et en contextes rituels particuliers. Il est intéressant de noter que l’aspect formel spécifique aux sépultures semble refléter une caractéristique culturelle commune avec au moins un site voisin à l’est de Barajas : le Massif de Huanímaro, où l’on a retrouvé des jarres incisées déposées dans des sépultures (Mora 1973).
6La présence de vases à pâte fine et à décors incisés est en fait signalée dans toutes les études céramiques connues pour la région du Bajío. Les publications mentionnent une céramique fine à moyennement fine, brune, noire, beige ou grise, décorée par des incisions. Chaque auteur la désigne par un nom spécifique et mentionne les divers types auxquels elle pourrait correspondre ou ressembler. Il s’agit du Bayo Teotihuacano de Velázquez (1982), du Garita Black Brown B pour Snarskis (1985), du Café y Negro Pulido de Durán (1991), du Café Inciso Pulido de Saint-Charles (1990), du Café pulido inciso pour Sánchez Correa (1995), sans oublier le Cafipu variedad Inciso de Migeon – responsable de la typologie céramique du projet Barajas (2002). À ce propos, Migeon mentionne explicitement l’intérêt d’une étude plus approfondie de ce groupe, pour mieux comprendre sa diversité interne. Il n’est fait aucune mention des contextes. Ces auteurs signalent des correspondances entre tous ces types, mais en lisant les descriptions de chacun, un doute subsiste : s’agit-il d’un même type avec des variantes nommées différemment selon les publications ? Sommes-nous en présence d’un groupe composé de différents types stylistiquement similaires et techniquement différents, ayant engendré une confusion au niveau des définitions typologiques ? Les techniques de fabrication de cette longue tradition de décors évoluent-elles chronologiquement ?
Analyse techno-stylistique des décors
7Pour commencer à répondre à toutes les questions que pose la céramique incisée, nous avons effectué une analyse techno-stylistique des décors, dont nous présentons ici les premiers résultats. Nous avons commencé par enregistrer tous les décors selon une codification précise : nous avons un total de 310 thèmes complets, issus de la combinaison de 56 motifs basiques différents. La composition interne des thèmes est toujours la même : répétition d’un ou plusieurs motifs disposés en bande horizontale sur le pourtour du vase, au niveau du bord pour les formes ouvertes et de l’épaule pour les formes fermées. La position et l’agencement des décors ne variant pas, nous avons directement utilisé les motifs pour établir la classification des décors (fig. 2). Cette classification est organisée en arborescence, avec un codage hiérarchisé des motifs et des thèmes :
1 – À la base de l’arbre, nous avons d’abord distingué 9 familles de décors, en fonction du type de motifs (codées A à G, plus R et Z) :
A : combinaison de lignes droites, ondulées et frise supérieure de motifs simples
B : motifs en L et S
C : motifs en spirales
D : motifs de groupement de lignes verticales « pendentifs »
E : motifs en triangles
F : motifs élaborés avec composition interne complexe
G : motifs en chevrons
R : motifs de remplissage
Z : motifs exception0nels
2 – Ensuite, chaque famille est organisée en sous-familles en fonction du nombre de motifs utilisés, mais aussi de la complexité de la composition. Par exemple :
F1 : bande à remplissage géométrique
F2 : motifs solaires et motifs à cornes
F3 : motifs géométriques et/ou symboliques posés sur des lignes horizontales
F4 : bande avec motifs élaborés et composition complexe
F5 : bande avec motifs élaborés et composition complexe, plus une frise externe posée sur le bord inférieur de la bande
F6 : bande double avec motifs simples
F7 : bande double avec motifs élaborés et composition complexe dans le registre supérieur et motifs simples dans le registre inférieur
F8 : motifs élaborés encadrés par deux bandes à remplissage interne
3 – Et si nécessaire, en sous-sous-famille en fonction du type de composition (classification utilisée pour les A2 et C5 uniquement), par exemple :
– A2-101 : juxtaposition de lignes droites et série de demi-cercles
– A2-201 : juxtaposition de lignes droites et ondulées
– A2-250 : lignes droites et ondulées intercalées
– A2-300 : lignes droites juxtaposées/intercalées avec lignes à grandes ondulations angulaires
– A2-400 : juxtaposition de lignes droites et de motifs simples
8Trois familles principales se détachent : A, C et D, qui représentent respectivement 41, 25 et 14 % des décors complets enregistrés. L’iconographie utilisée est quasi exclusivement composée de motifs géométriques, et sur l’ensemble des décors enregistrés, un seul correspond avec certitude à une représentation figurative (un scorpion). Concernant l’univers géométrique des incisés, tous les champs possibles ont été exploités, allant du plus simple au plus complexe, du plus épuré au plus chargé, du plus neutre au plus connoté symboliquement. Il est intéressant de noter que la famille A, qui est la plus utilisée, est constituée des décors ayant les compositions et les motifs les plus simples, alors que la famille F, qui est une des moins utilisées, rassemble les décors les plus complexes.
9Parmi les motifs enregistrés se trouvent la « grecque scalaire » ou « xicalcoliuhqui » et la « coiffe à corne » (fig. 3), connus dans d’autres régions (Michoacán, vallée de Mexico), voire utilisés à l’échelle de la Mésoamérique entière à différentes époques (Braniff 1995). De ces données découlent deux champs de recherche en cours : d’une part, l’exclusivité d’une iconographie géométrique implique un choix culturel et idéologique de la part de la population de Barajas. En effet, la présence d’une représentation figurative au sein du corpus montre bien qu’ils n’ignorent pas l’existence de ce type de représentation, mais qu’ils ont bien, volontairement, opté pour un certain « iconoclasme ». D’autre part, la présence de registres iconographiques à la fois locaux et extrarégionaux pose la question des aires de diffusion des motifs.
10Nous avons également mis en évidence 7 techniques d’incision différentes (fig. 3). Chaque technique correspond à un moment précis du temps de séchage et à l’outil choisi par le potier pour décorer son vase. Ces variations temporelles au sein de la chaîne opératoire nous obligent à préciser les définitions des techniques d’incision, afin d’éviter des confusions trop fréquentes.
11On parle d’incision lorsque l’action consiste à couper la pâte avec un outil, sans retirer de matière. Le terme de gravure, lui, est employé lorsqu’il y a enlèvement de matière sur le support, ce qui est le cas lorsque la pâte est sèche ou cuite (Balfet H., Fauvet-Berthelot M.-F., Susana Monzon 2000 : 85, 93). Toutefois, nous considérons que le geste technique effectué par le potier est le même, qu’il s’agisse d’incision où de gravure, puisque seul le moment choisi pour procéder à l’incision est en cause dans la différence des résultats. En fait, parler de gravure ou d’incision sur pâte sèche ou cuite revient techniquement au même. Donc, pour des raisons de cohérence vis-à-vis du geste technique, nous avons choisi de garder l’expression d’incision sur pâte sèche ou cuite, ce qui nous permet également d’homogénéiser le vocabulaire employé.
Selon le taux d’humidité du vase, nous avons observé :
12■ sur pâte fraîche (fort taux d’humidité, quand le vase vient juste d’être façonné) :
1 – des incisions profondes à section en U et V
2 – des incisions avec un outil très fin (moins d’un ½ cm de largeur), sans doute un éclat d’obsidienne
3 – des incisions superficielles à section en U
13■ sur pâte cuir (le vase a commencé à sécher mais garde suffisamment d’humidité pour pouvoir être incisé facilement) :
1 – des incisions profondes et régulières à section en U et V qui, du point de vue esthétique, sont celles qui ont un meilleur rendu puisqu’il n’y a pas de formation de bourrelets comme sur pâte fraîche, ni d’écaillure comme sur la pâte sèche et cuite
14■ sur pâte sèche (le vase est entièrement sec) :
1 – des incisions moyennement profondes à section en U et V
2 – des incisions superficielles
15■ sur pâte cuite (après la cuisson du vase) :
1 – des incisions superficielles, qui du point de vue de l’exécution du trait, sont moins bien contrôlées
16Nous avons pour l’instant choisi de regrouper le matériel selon 4 techniques : pâte fraîche, cuir, sèche et cuite, afin de les confronter à la classification iconographique des décors. Le premier graphique (fig. 4) nous permet d’observer une répartition inégale de ces techniques : les techniques sur pâte fraîche et cuir sont majoritaires, alors que la technique sur pâte sèche occupe une position intermédiaire ; en dernière position, la technique sur pâte cuite est très peu présente au sein du corpus. L’étude physico-chimique de la composition des pâtes nous permettra ultérieurement de préciser nos hypothèses sur cette répartition particulière.
17Le deuxième graphique (fig. 5) nous permet d’observer, pour chaque technique d’incision, la répartition en pourcentage des familles de décors. Tout d’abord apparaît l’absence de contrastes forts entre les techniques : nous observons une même décroissance de l’utilisation des décors (dans l’ordre : A, C, D, B, puis E et F qui sont les moins utilisées) toutes techniques confondues. Toutefois, la technique pâte fraîche utilise le plus de décors de la famille D, alors que la technique pâte sèche représente le plus de spirales (famille C). Ainsi, nous distinguons des décors « préférentiels » pour trois techniques :
pâte sèche : famille C
pâte fraîche : famille D
pâte cuite : familles B et E
18La mise en évidence de ces différences, même si elles ne sont pas très marquées, prouve qu’il existe bien une relation spécifique permettant de corréler ces techniques d’incision à une famille de décors en particulier. Cette corrélation nous permet d’aller au-delà d’une simple distinction technique et de considérer que nous sommes bien en présence de « traditions techniques ».
19Seule la technique sur pâte cuite se détache des autres par l’absence de deux familles : D et F, et une plus grande utilisation des familles B et E. Le fait que cette technique d’incision spécifique soit très peu présente à Barajas semble correspondre à une origine extérieure, ce qui expliquerait également la particularité de ses influences iconographiques.
20Concernant la répartition des décors de la technique pâte cuir, elle est très similaire à celles sur pâte fraîche et sèche, ce que nous pourrions interpréter comme des phénomènes d’influence et d’imitation entre ces techniques. Les potiers qui ont exécuté ces décors selon leur propre technique ont certainement eu connaissance du travail des autres, soit parce qu’ils ont fabriqué leurs vases au même endroit, soit parce que ces vases ont circulé. À ce stade de notre étude, nous pouvons d’ores et déjà constater que toutes ces techniques d’incision partagent un même fond iconographique commun. La base de ce fond est constituée par les familles A et C, auxquelles viennent se superposer les autres familles de décors (B, D, E et F), à travers des phénomènes d’influences et d’imitations.
21Finalement, nous sommes en présence de décors incisés correspondant à quatre traditions techniques différentes, mais qui partagent globalement une riche tradition iconographique commune. Ces résultats posent la question suivante : Quelles implications culturelles peut-on déduire de l’existence de ces différentes traditions qui s’influencent sur le plan iconographique ?
Nouvelles hypothèses de travail
22La mise en évidence de ce patron techno-stylistique forme la première étape de notre analyse de la céramique incisée. Ces résultats doivent être complétés avec, d’une part, des croisements à des échelles plus fines au niveau des groupes de décors et d’autre part, les données morphologiques et techniques des vases, afin de reconstituer l’ensemble des chaînes opératoires. En effet, nous avons observé des différences dans les techniques de montage (colombin et moulage), ainsi que dans des détails morphologiques tels que la finition des bords – détails qui se révèlent parfois utiles pour identifier une tradition technique. Cette seconde étape de notre étude aura pour objectif de vérifier les premières tendances dégagées par l’analyse des incisions, et de voir dans quelle mesure les traditions de décors sont partagées ou au contraire limitées à des types morpho-technologiques distincts.
23D’après Sugiura (2005), un contexte d’instabilité et de pression démographique pousse les populations à accentuer leurs signes identitaires, afin de renforcer la cohésion du groupe face aux autres. Cette réflexion semble bien correspondre à la période de l’épiclassique dans le Bajío. En effet, les caractéristiques architecturales, rituelles et iconographiques de Barajas laissent penser que la population du massif se distingue de la population des sites contemporains voisins3. Dans ce contexte, nous pourrions supposer que les différentes traditions techniques mises en évidence ci-dessus soient le reflet de signes identitaires.
24À terme, l’objectif de notre recherche doctorale sera d’interpréter à une échelle régionale l’existence de ces différentes traditions d’incisions, et d’expliquer les modalités de la cohabitation de ces traditions sur le site de Barajas. L’étude morpho-technologique complète de notre corpus ainsi que l’analyse comparative régionale devrait en effet nous permettre de confirmer ou d’infirmer l’hypothèse des signes identitaires, en termes de lieux de productions et d’aires de diffusions des groupes.
Conclusion
25Les premiers résultats issus de notre analyse techno-stylistique des décors incisés de la céramique de Barajas mettent en évidence l’existence d’un vaste répertoire iconographique à base de compositions géométriques et symboliques. Nous avons classé les décors en 9 grandes familles. Ensuite, nous avons établi l’existence de 7 techniques d’incision. Les résultats préliminaires de l’analyse techno-stylistique des décors nous ont permis de définir pour l’instant 4 traditions techniques différentes. La diversité interne de la céramique incisée de Barajas n’est donc pas le fait d’un seul type, mais correspond bien à l’existence d’au moins 4 groupes distincts. Ces résultats nous permettent de formuler un certain nombre de nouvelles hypothèses : existe-t-il une différence dans les chaînes opératoires de fabrication (préalables à l’exécution du décor) de ces groupes ? Dans quelle mesure ces groupes correspondent-ils à une production locale ou à des réseaux d’échanges ? Les phénomènes d’influence et de partage de l’iconographie reflètent-ils le partage d’un même espace culturel, dans lequel chaque acteur affirmerait sa propre identité ?
26La présence de différentes techniques de décors incisés à Barajas implique une pluralité de traditions décoratives. Celles-ci posent à la fois la question de leur cohabitation sur un même ensemble de sites et de possibles réseaux d’échanges. Comment doit-on, dans ce cas, considérer cette information dans le contexte de l’Épiclassique et quelles sont les interprétations possibles par rapport à la problématique des recompositions démographiques liées à l’effondrement de la frontière nord de la Mésoamérique ? Sur la base de ces nouvelles hypothèses, nous espérons à terme que notre étude permette de compléter notre connaissance de l’identité de la population de Barajas à travers la spécificité des céramiques incisées du Bajío.
Bibliographie
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Notes de bas de page
Auteur
Docteur, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne – UMR 8096 : Archéologie des Amériques. Sujet : La céramique du Bajío, Guanajuato, Mexique, sous la direction de Brigitte Faugère.
Thèse soutenue en décembre 2008.
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