La pêche dans les sociétés préhistoriques polynésiennes
Analyses d’hameçons et étude ethnoarchéologique
p. 13-46
Résumé
Our work focuses on fishing practices in ancient Polynesian societies, through the analysis of fishhooks found in archaeological excavations. The corpus includes two collections from archaeological sites in the Marquesas Islands (Ua Huka) and the Cook Islands (Mangaia). Typological and technological analysis of the fishhooks is combined with study of fish remains, observation of species currently present in these areas, and ethnographic fieldwork. As a result, various hypotheses can be put forward about the subsistence economy of prehistoric Polynesians.
Is variation in fishook shape related to the different environments of the two islands (a high island without a lagoon and a high island with a fringing reef)? Are the differences related to specific fish species? To what extent do the observed shapes reflect cultural tradition? Do these studies improve our understanding of early Polynesian fishing? These issues are discussed in detail, using the evidence from artefact analysis, fieldwork and the fish remains.
Entrées d’index
Mots-clés : îles Marquises, îles Cook, Manihina, pêche, ichtyoarchéologie, Polynésie, ethnoarchéologie, Tangatatau, hameçon
Keywords : Polynesia, Cook islands, Marquesas islands, ethnoarchaeology, Manihina, fishing, ichtyoarchaeology, fish-hook, Tangatatau
Remerciements
L’auteur tient à remercier les professeurs É. Conte (université de Polynésie française – UMR 7041) et P. Kirch (université de Berkeley, Californie), le GDR 2834 (Études interdisciplinaires sur les sociétés anciennes du Pacifique Sud) et l’UMR 7041 ArScAn, mais également le service de la Culture et du Patrimoine de Polynésie française, P. Ottino (IRD, UR 092 ADENTROH), H. Guiot (UMR 7041), É. Nolet (UMR 7041) et É. Dotte (UMR 7041). Aux îles Marquises, M. et D. Rootuehine, P. Fournier, ainsi que toutes les personnes de Hokatu et de Hane (à Ua Huka), P. Tetahiotupa (administrateur de Nuku Hiva), P. Teikitohe (adjoint au maire de Nuku Hiva), ainsi que toutes les personnes de Taiohae (à Nuku Hiva), sont vivement remerciés pour leur accueil et leurs précieux témoignages.
Texte intégral
Introduction
La pêche, un des principaux moyens de subsistance en Polynésie
1Les îles polynésiennes, comme toutes celles du Pacifique, offrent un large choix d’espèces marines vivant près de ces côtes. Ces espèces peuvent évoluer en haute mer, dans les lagons, vers les zones sablonneuses ou coralliennes, sur les tombants de récifs, dans les nombreuses anfractuosités des roches sous-marines. Les biotopes sont multiples et favorisent une grande variété de la faune.
2La mer représente une source d’approvisionnement alimentaire importante, voire indispensable, pour les populations vivant sur le rivage, en particulier sur certains types d’îles. Sur les atolls notamment, le lagon et le large fournissent une grande part des apports en protéine, leurs habitants étant plus dépendants des ressources marines que ceux des îles hautes. Lors du peuplement des îles polynésiennes, en même temps que certaines plantes (par exemple, le taro – Colocasia esculenta, et l’arbre à pain – Artocarpus altilis), seuls quelques animaux faisaient partie des déplacements maritimes des hommes de l’époque (notamment le cochon, le chien et le poulet) et n’étaient pas consommés fréquemment (Conte, 1999). La mer est fondamentale dans l’approvisionnement régulier en ressources naturellement présentes.
3La pêche est également une activité sociale omniprésente. Dans tous les archipels, de manière plus ou moins stricte selon le degré de hiérarchie sociale, la pêche était contrôlée, aussi bien pour les lieux où se rendre que pour les symboles et les rituels liés à sa pratique. Les espaces maritimes pouvaient être considérés comme des propriétés pour les classes sociales supérieures, propriétés dont la possession et l’exploitation pouvaient se transmettre. Jusqu’à une époque récente, certaines zones de pêche étaient rattachées à des familles de haut rang ; les chefs récupéraient, en retour de l’accord de celles-ci, comme un droit d’exploitation, une part des prises pêchées par les gens de classe inférieure (Handy, 1932). Dans les îles hautes, l’économie comprenait les échanges ainsi que des accords entre les populations vivant sur les côtes et celles vivant à l’intérieur des terres, dans les vallées (Robineau, 1985).
4Il y avait également certaines pêches et des mets (dont la tortue) qui étaient réservés à l’élite sociale. Les expéditions au large, important facteur de cohésion sociale, devaient avoir l’aval de spécialistes qui prenaient en charge leur organisation. Les pêcheurs se consacraient à des campagnes de pêche sous l’égide de maîtres spécialistes lors de périodes rigoureusement choisies. Ils se rassemblaient sur un lieu de résidence provisoire, où se trouvaient une ou plusieurs structures consacrées aux activités et rites liés à la pêche. Les pêches collectives étaient l’occasion de réunir les habitants des villages, aussi bien durant l’expédition même qu’après, lors du partage des poissons ou des repas.
5Une large connaissance empirique du monde maritime est une des principales caractéristiques des sociétés du Pacifique. L’installation sur des environnements insulaires réduits a obligé les Polynésiens à s’adapter aux conditions spécifiques, en observant le milieu naturel et les conditions géographiques et climatiques. Des calendriers étaient établis à partir d’observations de la lune et d’événements naturels, donnant des indications sur les moments les plus propices à la pêche, comme les saisons d’abondance, les périodes de frai1, les périodes de migration des poissons. Les Polynésiens avaient un savoir très poussé concernant la biologie des poissons, ainsi que sur les comportements et l’alimentation de chaque espèce.
6La pêche est restée une activité indissociable de la vie des Polynésiens d’aujourd’hui, à la fois par sa pratique fréquente, l’abondance et la qualité des ressources qu’elle procure et par la diversité des techniques employées (Lavondès, 1987).
Mieux connaître la pêche préhistorique polynésienne à travers les hameçons
7Les rares preuves matérielles de cette activité si présente, durant les périodes pré-européennes, sont en majorité les hameçons découverts sur les sites archéologiques. De nombreux sites d’habitat côtiers, qu’ils soient permanents ou temporaires, offrent une grande quantité de ces artefacts. Les hameçons ne représentent qu’une part visible et matérielle de la pêche ancienne car les techniques étaient nombreuses et certaines d’entre elles ne laissent pas de traces quant au matériel employé (la pêche au filet, au harpon, par empoisonnement, etc.). Il faut également préciser qu’ils peuvent servir de marqueur chrono-culturel en Polynésie orientale. En effet, contrairement à ce qui se passe en Mélanésie, aucune culture céramique n’y a été découverte. Ces artefacts pourraient alors servir de « fossiles directeurs », leurs formes évoluant dans le temps et dans l’espace. Les premières études concernant les hameçons polynésiens se sont ainsi focalisées sur ce point, jusqu’à mettre parfois en marge la reconstitution des gestes liés à leur utilisation (Emory et al., 1959 ; Sinoto, 1962).
8Nous proposons, dans la présente étude, de comprendre quelle part occupaient les pêches utilisant des hameçons dans l’économie de subsistance de ces sociétés tournées vers la mer, et quels étaient les territoires utilisés selon la technique de pêche pratiquée.
9Nous nous pencherons, en premier lieu, sur l’étude de deux corpus provenant de fouilles archéologiques. Celles-ci ont mis au jour une quantité importante d’hameçons : plusieurs centaines ont en effet été découverts en deux ou trois campagnes de fouilles programmées dans les années 1990. L’analyse typologique des deux corpus nous renseignera sur les formes d’hameçon utilisées pendant la période d’occupation des sites, si celles-ci sont différentes ou communes et si elles peuvent nous informer sur les techniques anciennes.
10Ce dernier point est cependant délicat. En effet, l’interprétation de ces vestiges matériels est relativement complexe : la fonctionnalité de l’hameçon et le geste de l’homme sont difficilement accessibles à notre compréhension. Il nous manque incontestablement ce lien entre les hameçons, les techniques employées et, du même coup, les poissons. Comment sont utilisés les hameçons ? Pour quelle technique ? À quelles espèces les diverses formes d’hameçon sont-elles destinées ? Pour tenter de répondre à ces questions nous exposerons, en deuxième lieu, les résultats d’une mission ethnologique effectuée aux îles Marquises, portant sur les pratiques de pêches actuelles. Ce qui nous paraît évident c’est que, malgré la forte influence de la modernité, les pêcheurs marquisiens gardent en mémoire un large héritage de connaissances empiriques du milieu. Nous décrirons les techniques pratiquées de nos jours, les espèces pêchées, les conditions pour chaque technique et la part de la tradition ou de l’influence moderne dans les techniques.
11En dernier lieu, nous comparerons les données obtenues lors de l’analyse typologique des deux corpus avec les donnés ethnologiques, afin de tenter d’éclairer ces points en suspens. À quelle pêche ont pu servir les hameçons découverts sur les deux sites ? Ces techniques sont-elles semblables ou différentes ? Ces deux sites polynésiens se situant sur des îles aux environnements bien distincts, cette similitude ou différence serait-elle liée à l’environnement ? Les formes d’hameçon sont-elles influencées par les espèces présentes dans les biotopes différents ? La perspective de l’ajout de données archéo-itchyologiques permettrait de nous éclairer encore plus sur la pêche polynésienne à l’époque pré-européenne.
Le contexte environnemental et archéologique
12Le Pacifique sud se découpe en trois zones : la Mélanésie, la Micronésie et la Polynésie (fig. 1). Cette dernière comprend un grand nombre d’archipels et forme un ensemble que nous appelons communément le Triangle polynésien, délimité à ses sommets, au sud, par la Nouvelle-Zélande, au nord, par Hawaii et, à l’est, par l’île de Pâques.
13La recherche archéologique dans la région est récente et débute réellement vers les années 1950, avec des méthodes de fouilles modernes, mettant ainsi en place les principales problématiques de recherche actuelles, notamment celle du peuplement humain, ainsi que celle des interactions entre l’homme et son milieu (processus d’adaptation et impacts écologiques).
14Les deux sites archéologiques choisis se situent dans la zone appelée Polynésie orientale (fig. 1) : l’abri-sous-roche de Tangatatau, à Mangaia (îles Cook) et le site dunaire de Manihina, à Ua Huka (îles Marquises, Polynésie française). Ils ont tous deux fourni un abondant matériel lié à la pêche, en particulier de nombreux hameçons fabriqués en coquillage. Le choix de Mangaia et de Ua Huka a été effectué en fonction des critères suivants : ce sont toutes deux des îles polynésiennes, ayant un environnement et une géologie différents, un corpus d’hameçons important (plusieurs centaines de pièces) et des données de fouilles accessibles et complètes.
15Mangaia (de latitude 21° 55’ S et longitude 157° 55’ W) est une petite île de 52 km2 située dans l’archipel des Cook. Celui-ci se compose de quinze îles au total, réparties en deux groupes, nord et sud. Le climat des îles Cook est subtropical océanique, avec, dans le groupe sud, une pluviométrie relativement constante tout au long de l’année. Les effets d’El Niño se ressentent différemment dans les deux archipels : plus de pluies dans le groupe nord et moins dans le groupe sud (McCormack, 2005).
16Mangaia est la deuxième plus grande et la plus méridionale des îles du groupe sud. La morphologie générale de l’île se structure de façon concentrique, avec plusieurs parties imbriquées composant l’île entière. Celle-ci est totalement entourée d’un récif frangeant et d’une couronne de corail fossile appelée makatea, culminant parfois à plusieurs dizaines de mètres et cernant une formation volcanique centrale (Marshall, 1927) (fig. 1). Cette caractéristique géologique est très spécifique, il s’agit d’un soulèvement de l’île suite à un mouvement tectonique des plaques. Cette ceinture de calcaire soulevé est également observable dans d’autres îles des Cook (Atiu, Mauke et Mitiaro), mais aussi dans d’autres archipels.
17Il n’y a pas de réel lagon entourant l’île mais un étroit lagon à récif frangeant bordant directement les falaises de makatea. La mer est, de ce fait, difficile d’accès à cause de ces escarpements. De même, les espèces marines paraissent limitées tant dans leur variété que dans leur biomasse, notamment pour les poissons de rivage (Kirch et al., 1995). La pêche ne semble pas, de prime abord, offrir les mêmes possibilités favorables que dans les îles à lagon plus profond.
18La partie intérieure de l’île, séparée de la mer par ces masses de calcaire peu aisées à franchir, fait également face à un escarpement abrupt. Un bassin alluvial s’est ainsi formé contre ces falaises intérieures et est propice à l’horticulture, notamment celle de tubercules, comme le taro (Colocasia esculenta), base de l’alimentation des habitants de l’île et point central de leur économie (Kirch et al., 1992). Cette culture a entraîné de profondes modifications du paysage, avec la mise en place de larges systèmes de drainage, en mettant à profit le relief naturel, des vallées rayonnantes autour du sommet central, Rangimotia, qui culmine à 168 m d’altitude (Wood & Hay, 1970).
19La zone de makatea est trouée de grottes, qui ont pu servir de refuges ou d’emplacements pour déposer des biens ou des sépultures mais ne semblent pas avoir abrité de villages permanents. De nombreux abris-sous-roche sont visibles, dont Tangatatau, un abri situé au sud de l’île, près du lac Tiriara, entre la limite de la zone makatea et la zone volcanique.
20Cette région sud de l’île a été choisie pour les recherches archéologiques pour plusieurs raisons : un système intense d’irrigation dans le bassin alluvial pour la culture du taro, des traces d’installations humaines (des structures d’habitat et rituelles ont été découvertes aux alentours), la proximité du lac Tiriara propice à un échantillonnage de pollen et, dernier point, Tangatatau est le plus grand abri-sous-roche de la zone (environ 225 m2 de sol abrité) (Kirch et al., 1995).
21Les fouilles ont été conduites sur deux saisons au début des années 1990, par P. Kirch (université de Berkeley, États-Unis), et s’inscrivent dans un vaste programme de recherche interdisciplinaire sur les interactions entre l’homme et son environnement, en tentant de reconstruire le paléoenvironnement de Mangaia et de saisir l’impact de l’installation des hommes et de l’exploitation des ressources naturelles (Kirch, 1996). Les datations montrent une occupation du site depuis 1000 AD jusqu’à 1750, avec une couche supérieure contenant des artefacts de la période historique (Kirch et al., 1992). Les fouilles ont couvert au total 29 m2, découvrant dix-neuf unités stratigraphiques et cinquante-huit structures (en particulier de combustion). Un riche matériel a été mis au jour : des ossements d’oiseaux (parmi eux, certaines espèces éteintes), de rats et de poissons, des échantillons de charbon, des herminettes complètes ou partielles (avec des ébauches et des éclats) et, ce qui nous intéresse dans la présente étude, des hameçons. La stratigraphie de Tangatatau est, à ce jour, la plus riche et la mieux documentée que nous avons à notre disposition pour l’île de Mangaia.
22Le deuxième corpus que nous intégrons dans l’étude provient des îles Marquises. Archipel plus jeune que celui des Cook, les Marquises sont situées plus au nord dans la zone polynésienne. L’archipel est également divisé en deux ensembles, avec sept îles principales : au nord, trois îles avec Nuku Hiva, Ua Huka et Ua Pou (et trois îlots, dont Eiao), et, au sud, quatre îles, auxquelles s’ajoutent des îlots secondaires, des rochers et des hauts-fonds.
23Le climat tropical y est néanmoins plus sec et chaud qu’aux îles Cook, étant donné sa situation plus septentrionale, vers l’équateur, et les saisons moins différenciées sont décalées par rapport au reste de la Polynésie française. Cette région est également touchée par les effets d’El Niño, avec un accroissement important des pluies et une hausse des températures de la mer et de l’air (Merle, 1995).
24Ua Huka (de latitude 8° 56’ S et longitude 139° 32’ W) est, comme Mangaia, une île de taille modeste, avec 77 km2, mais elle présente un environnement totalement différent : les Marquises possèdent en effet des côtes fortement découpées par l’érosion marine, avec alternance de falaises et de baies encaissées, ainsi qu’une absence apparente de récifs coralliens. Celle-ci pourrait s’expliquer par la survenance d’un choc thermique vers 18 000 BC et par la lenteur de la reconstruction de ces récifs (Brousse et al., 1990), mais de nombreuses autres hypothèses sont également proposées : de fortes houles empêchant la formation du récif, un écosystème planctonique suppléant un système algo-corallien, etc. (Planes et al., 1995). Une plateforme corallienne fossile entourant l’île a cependant été observée et pourrait correspondre à un ancien niveau marin, sans doute une sorte de « lagon fossile » qui bordait ces îles lorsque le niveau de la mer était plus bas (Richer de Forges & Laboute, 1998). La profondeur des eaux littorales entraîne la proximité de certaines espèces benthiques et pélagiques2 près des côtes (Rolett, 1989). La faune marine environnante est caractérisée par une diversité réduite et un fort taux d’endémisme, étant donné l’isolement géographique de ces îles (Planes et al., 1995).
25La morphologie de Ua Huka est concave (fig. 1). Deux volcans s’imbriquent, un ancien volcan externe et un volcan plus récent interne, légèrement excentré vers l’est (Brousse et al., 1990). Avec le pourtour constitué de falaises (dont la hauteur moyenne est de 100 m), les seules zones littorales aisément accessibles sont les embouchures des rivières, qui forment des baies plus ou moins étroites. Ces caractéristiques, ajoutées à des contraintes d’ordre climatique (par exemple, les tsunamis), donnent à Ua Huka, comme aux autres îles de l’archipel, un environnement plus propice à une installation à l’intérieur des terres, dans les vallées ou sur les plateaux, tandis que le rivage serait davantage occupé de manière occasionnelle par les pêcheurs échangeant leurs produits avec les gens des vallées (Conte, 1999). Certaines grandes baies peuvent cependant offrir un espace protégé et favorable à un établissement à plus long terme.
26L’île a fait l’objet, dans les années 1990, d’un programme de recherche incluant des sondages sur des sites anciens, des fouilles plus étendues, des prospections et un inventaire des monuments de surface, ainsi que des études ethnographiques (Conte, 2002).
27Le site de Manihina se trouve dans une des cinq baies ensablées de Ua Huka, au débouché de la vallée du même nom. Haute d’environ 8 m, une grande dune de sable clair fait face à la baie, un petit cours d’eau intermittent la contournant. La baie, peu profonde, est protégée par un îlot qui lui fait face, mais elle reste soumise à une forte houle d’est et de sud-est (Planes et al., 1995). La dune, sondée dans les années 1960 par Y. H. Sinoto, a été fouillée sur trois campagnes par É. Conte (université de Polynésie française) et P. Sellier (UMR 5809 du CNRS) dans les années 1990. Des structures apparaissant au sommet de la dune, une superficie de plus de 90 m2 y a été dégagée. On a ainsi mis au jour des pavages, des structures de combustion, de nombreux artefacts, notamment du matériel lié à l’exploitation des ressources marines, ainsi que des squelettes humains et animaux. La couche la plus ancienne d’une des sections fouillées a été datée de 590 (±100) BP, l’occupation se prolongeant jusqu’à des couches datées de 480 (±100) BP, niveau qui correspond aux squelettes (Conte, 2002). Les tombes datant de la période pré-contact montrent des pratiques funéraires très complexes et suggéreraient une réutilisation du site, qui était initialement un lieu d’habitat de bord de mer, comme espace funéraire et lieu de culte important (Sellier, 1998). L’intense activité de pêche est attestée par la quantité importante d’hameçons et d’ébauches d’hameçons.
28L’abondance du matériel de pêche suggère une spécialisation des deux sites, la grande quantité d’ébauches indiquant en outre la présence d’un atelier de fabrication in situ. Ces deux îles présentent deux environnements distincts, avec pour l’une un lagon à récif frangeant difficile d’accès de l’intérieur des terres, et pour l’autre une absence de lagon mais une baie donnant directement sur le large. Ces deux systèmes écologiques suggèrent deux types de biotopes où évoluent les espèces marines. L’activité de pêche des périodes pré-contact se refléterait dans les traces matérielles laissées par les hommes durant l’occupation des deux sites. Nous proposons, en premier lieu, d’étudier en détail les hameçons.
Les hameçons de Tangatatau et de Manihina
29Comment les hameçons peuvent-ils nous renseigner sur les techniques de pêche ? L’analyse de leur forme, de leur taille et de certains détails (notamment la forme de leur tête qui sert à l’attache de la ligne) permet de voir qu’une grande variété d’hameçons était employée. Celle-ci reflète la variété même des techniques et aussi celle des poissons pêchés. Une relation spécifique existe entre les hameçons, les techniques et les poissons. Le choix d’une technique, et donc d’un hameçon, est influencé par l’espèce que le pêcheur désire pêcher. Nous retiendrons trois facteurs :
le comportement alimentaire du poisson : le fait qu’il soit carnivore ou herbivore fera que le pêcheur décidera d’un appât ou d’un leurre. Il choisira une technique particulière, un hameçon de forme et de taille précise ;
la taille et la force du poisson : les hameçons sont adaptés au gabarit du poisson. Par exemple, pour un prédateur pélagique, les pêcheurs utilisent préférentiellement un hameçon de grande taille ;
l’habitat du poisson : la zone dans laquelle celui-ci évolue (près des rochers, dans le lagon ou au large) et surtout la profondeur où se trouve la proie quand on veut la pêcher.
30Ces paramètres nous permettent de proposer plusieurs interprétations, au-delà de la simple typologie, sur un aspect fonctionnel. La dimension et la forme de l’hameçon seront ainsi choisies en fonction des critères associés aux poissons et aux conditions de pêche.
31Nous effectuerons, dans un premier temps, une stricte analyse typologique des deux corpus à notre disposition. Les données chronologiques ne seront pas abordées, le présent article étant focalisé sur l’aspect fonctionnel des hameçons et l’exploitation globale des ressources marines sur les deux sites.
32Deux grands groupes se distinguent parmi les hameçons retrouvés : les hameçons simples et les hameçons composés. Les premiers sont fabriqués d’une seule pièce et les seconds en plusieurs pièces ajustées les unes aux autres, souvent faites de matériaux différents (Garanger, 1965).
33Les hameçons composés concernent, entre autres, les hameçons pour pêcher les bonites (leurres à bonite) (fig. 2b) ou ceux pour pêcher les poulpes (leurres à poulpe). Cette catégorie d’hameçons est toutefois relativement peu représentée dans les corpus en question. En effet, treize pièces ont été retrouvées sur le site de Manihina et seulement deux à Tangatatau. Cette faible part des hameçons composés reflète une activité de pêche au large peu intense durant l’occupation des deux sites. Sans être pour autant négligeable, l’analyse de ces hameçons ne sera pas abordée dans le présent article, afin de nous focaliser sur l’ensemble le plus représentatif des deux corpus.
34Les hameçons simples sont, en effet, les plus fréquents dans les deux sites concernés. À Manihina, 480 pièces ont été découvertes et, à Tangatatau, 259 pièces. Ces deux corpus sont exceptionnels, car la plupart des fouilles mettent au jour seulement quelques pièces, voire quelques dizaines et, plus rarement, une centaine.
35Dans la plupart des sites de Polynésie orientale, les hameçons sont fabriqués dans des valves de nacre3, ou pinctada margaritifera, employée pour ses qualités physiques. Nous retrouvons, dans les deux corpus étudiés, deux coquillages utilisés : la nacre et le turbo setosus. Alors qu’à Manihina, la totalité des hameçons est en nacre, à Tangatatau, ils sont en nacre (216 pièces) et en turbo setosus (44 pièces). Nous mettons de côté, dans la présente étude, l’analyse de la matière première et de l’évolution chronologique de son utilisation – ce qui n’ôte évidemment rien à l’intérêt du sujet – à cause des nombreuses questions relatives à l’exploitation des matières locales ou importées pour la fabrication des hameçons.
Réviser la méthodologie
36Les études d’hameçons sont nombreuses depuis le début de la recherche archéologique dans le Pacifique (notamment Emory et al., 1959 ; Suggs, 1961 ; Garanger, 1965 ; Davidson, 1971 ; Rolett, 1989 ; Ottino, 1992a, 1992b) mais, malgré leur fréquence et l’intérêt que les hameçons suscitent, rares sont celles qui proposent une réelle méthodologie systématique. En effet, les études sont souvent ponctuelles et se focalisent sur les spécificités des pièces provenant des sites étudiés.
37L’ensemble des résultats constatés dans ces études nous a amené à réfléchir sur la base même de ces méthodes (Carlier, 2002). Nous exposerons une méthodologie se voulant objective et applicable à toutes les formes d’hameçons connues. Nous proposons, en premier lieu, de mettre en place une nouvelle méthode de mesure, puis de réviser les méthodes de classification et, en dernier lieu, de tester un procédé d’identification des hameçons à partir des fragments.
Les méthodes de prises de mesure
38Décrivons brièvement, tout d’abord, les différentes parties composant un hameçon simple : la tête (qui sert à l’attache de la ligne), la hampe, la courbure et la pointe, qui peut être parfois munie d’un ardillon (fig. 2a).
39Les méthodes classiques de prise de mesure révèlent parfois certaines marges d’erreurs, notamment en fonction de la forme de la hampe. En effet, lorsqu’il s’agit d’un hameçon à hampe droite, la mesure ne pose pas de problème étant donné qu’il se positionne selon l’axe vertical (y), la courbure posée sur l’axe horizontal (x) (fig. 3a-1). Mais lorsqu’il s’agit d’un hameçon à hampe courbée, cela devient plus problématique car, selon le positionnement de l’hameçon, la hauteur de sa hampe est variable (fig. 3a-2).
40Nous avons ainsi testé une nouvelle méthode de mesure qui se veut moins subjective et applicable à des formes plus variées. Il s’agit de positionner l’hameçon en mettant l’angle intérieur de la tête sur le point zéro des deux axes et le bout de la pointe (le dard) en contact avec l’axe (y) (fig. 3b). On peut ainsi tracer plusieurs lignes indiquant les mesures de l’hameçon : une ligne partant du point zéro (donc de la tête) vers la tangente de la courbure ( = la hauteur de l’hameçon ou la longueur de la hampe) ; cette première ligne et la tangente permettent d’insérer l’hameçon à l’intérieur d’un cadre définissant ses différentes mesures essentielles ( = la longueur de la courbure et la hauteur de la pointe). Les deux points fixes (tête et dard) permettent de systématiser les prises de mesure, l’un et l’autre étant inhérents à tous les hameçons, quelle que soit leur forme.
Les méthodes de classification
41La plupart des études d’hameçons s’appuient sur une description typologique, basée sur une énumération des formes étudiées et souvent focalisée sur des collections spécifiques (Suggs, 1961 ; Rolett, 1989 ; Ottino, 1992a et b). Certains auteurs proposent toutefois des classifications plus systématiques, comme Sinoto (1975) qui présente une classification basée sur deux critères morphologiques : la hampe et la pointe, ainsi que la forme de la courbure ; et Allen (1996) qui propose un système de code lié à une caractéristique, comme la forme de la hampe et celle de la pointe.
42L’objectif premier de la méthode de classification que nous proposons est de hiérarchiser l’ensemble des formes observées dans notre corpus. Les critères nécessaires à l’identification typologique sont étudiés sur les hameçons entiers et partiels4 qui possèdent toutes les composantes morphologiques nécessaires (hampe intégrale et courbure).
43Le premier critère que nous proposons est la forme de la hampe. Employée dans les classifications classiques, cette distinction entre les hameçons dits directs (à hampe droite) et indirects (à hampe courbée) nous paraît pertinente et efficace car, comme elle est liée à l’aspect fonctionnel de l’hameçon, le mécanisme d’action de celui-ci est fortement influencé par la forme de la hampe. D’autre part, elle nous informe sur une majeure partie de l’aspect général et sa longueur permet aussi de définir la taille générale de l’hameçon. Le deuxième critère est la forme de la pointe (incurvée ou droite, parallèle ou divergente par rapport à la hampe), également liée au mécanisme d’action de l’hameçon.
44Avec l’ajout de détails morphologiques, nous obtenons un système de hiérarchisation des critères (fig. 4) pouvant être appliqué à plusieurs corpus, étant donné le caractère global et évolutif de la méthode (ajout ultérieur possible des formes). Cette méthode a été testée sur les collections de Manihina (Carlier, 2002) et de Tangatatau. Au final, trois formes principales se dégagent, permettant d’établir trois grands types : le type I (hampe droite), le type II (hampe courbée) et le type III (hampe coudée).
Les méthodes d’identification à partir des fragments
45Ce système de classification typologique sert également à mettre à profit les informations provenant des fragments, souvent considérés comme non étudiables et mis de côté lors des analyses. Pourtant, à Tangatatau, ces derniers représentent 75 % des hameçons finis et, à Manihina, presque 80 %. Cette partie de l’analyse est inédite car il s’agit ici d’identifier et de reconstituer les hameçons à partir des fragments. Les hameçons entiers et partiels servent de référents. Leurs caractéristiques morphologiques sont comparées à celles conservées sur les fragments, ce qui nous renseigne sur la forme originelle de l’hameçon (fig. 5). Nous appliquerons cette méthode aux deux corpus et verrons si elle est ou non pertinente et efficace.
Résultats de l’analyse des corpus
46Après avoir exposé ces nouvelles méthodes de prises de mesure, de classification et d’identification, nous allons analyser plus en détail les hameçons de Tangatatau et Manihina. Les prises de mesure sur les pièces entières et partielles ont permis de voir que la majeure partie des hameçons possède une taille comprise entre 13 et 21 mm pour Tangatatau (89 %) et entre 15 et 25 mm pour Manihina (75 %) (fig. 6a et 6b). Les hameçons provenant de Manihina semblent légèrement plus grands que ceux de Tangatatau mais, dans l’ensemble, ils s’inscrivent tous dans les mêmes gabarits : n’excédant pas 25 mm, ce sont essentiellement de petits hameçons.
47En observant leur morphologie, la même homogénéité se ressent dans chaque corpus, mais les types ne s’y répartissent pas de la même manière. Les hameçons de Tangatatau sont principalement de type II (hampe courbée), tandis que ceux de Manihina sont majoritairement de type I (fig. 6a et 6b). On a pu déterminer 34,5 % des fragments pour Tangatatau et 91,1 % pour Manihina. Concernant Tangatatau, les résultats sont mitigés, d’une part, à cause de l’état de conservation plus dégradé des pièces (souvent retrouvées dans des structures de combustion) ; d’autre part, des fragments sont fabriqués en turbo setosus, coquillage estimé de qualité plus fragile et friable que la nacre (Allen, 2002).
Au final, à Tangatatau, les hameçons de type II constituent toujours la majorité (70,3 %) tandis qu’à Manihina ce sont les hameçons de type I (91 %).
48Les diverses analyses des deux corpus nous ont permis au final d’obtenir une vision complète et intéressante à plusieurs titres. Premièrement, il s’agit d’hameçons de petite taille pour la plupart ; deuxièmement, la distribution typologique des deux corpus nous incite à nous interroger sur les modes d’exploitation du milieu marin sur les deux sites. Les pêches visaient-elles des poissons différents ? Les formes des hameçons sont-elles liées aux conditions environnementales différentes ? Quel est le lien entre les formes d’hameçons et les poissons pêchés ? Pour nous aider dans cette réflexion, nous avons effectué une mission ethnologique aux îles Marquises, notamment Ua Huka, où se situe le site de Manihina. Il s’agit de mettre en place une réflexion ethnoarchéologique, en nous aidant de l’observation et du recensement des diverses techniques de pêche pratiquées encore de nos jours et de l’inventaire des espèces pêchées. Il est également intéressant de tester l’efficacité des données ethnologiques dans une réflexion archéologique : peuvent-elles nous permettre de mieux comprendre le lien qui nous manque entre les techniques, les hameçons et les restes osseux de poissons ?
Étude de la pêche traditionnelle actuelle : résultats d’une mission ethnologique aux îles Marquises
49Comprendre la relation entre le matériel archéologique et les vestiges osseux, trouvés conjointement, permettrait de mieux connaître la relation que les anciens Marquisiens avaient avec leur environnement, à travers l’exploitation des ressources marines. Plusieurs études ethno-archéologiques abordent cette problématique, notamment Kirch et Dye (1979) à Niuatoputapu, Conte (1988) aux Tuamotu, et Rolett (1989) à Tahuata (îles Marquises), en observant les diverses techniques de pêche traditionnelles actuelles associées aux biotopes environnant l’île ainsi que les espèces capturées. Ces travaux furent approfondis par des fouilles archéologiques, qui ont fourni des restes osseux et des artefacts découverts conjointement. Cette approche a permis d’utiliser les analyses ichtyologiques et de les mettre en relation avec les artefacts, ceux-ci n’étant plus considérés comme de simples objets typologiques. L’archéo-ichtyologie est une discipline très récente dans le Pacifique (Leach, 1986 ; Butler, 1994 ; Davidson et al., 1998).
50Sur un site, l’ichtyofaune ne représente pas forcément et globalement tous les poissons pêchés avec des hameçons, ce qui peut entraîner une certaine marge d’erreur dans les interprétations. Certaines techniques de pêche ne laissent pas forcément de trace. Une part des poissons dont les squelettes sont retrouvés peut avoir été pêchée, par exemple, au filet, à l’empoisonnement végétal, etc. Comparer des données actuelles et les données plus anciennes permettrait de pallier cette lacune, en nous interrogeant aussi sur l’apport de telles données et sur leur efficacité dans la réflexion ethnoarchéologique. Une enquête donnerait la possibilité de jeter un pont entre les deux matériels, de fournir les clés pour l’interprétation fonctionnelle des vestiges, les hameçons et l’ichtyofaune (Conte, 2000).
51Nous partons de deux postulats : 1) une permanence des espèces de poissons, en sachant que cette permanence n’est pas une certitude étant donné que des changements climatiques ont pu se produire et affecter la faune ; 2) une survivance des pratiques est, visible dans la transmission des connaissances relatives à la pêche et au monde marin. Il ne faut évidemment pas négliger la part due à la modernisation technique et matérielle, qui a entraîné une certaine déformation ou altération des pratiques ou des savoirs.
52L’objectif de la mission était double : d’une part, recenser les techniques de pêche pratiquées encore de nos jours, qu’elles soient traditionnelles ou influencées par les techniques modernes ; d’autre part, établir un inventaire le plus exhaustif possible des espèces pêchées et consommées, en notant le lien entre les techniques et les poissons. L’enquête a été effectuée auprès des pêcheurs sur deux îles de l’archipel des Marquises, Ua Huka et Nuku Hiva5. Un travail préliminaire, inscrit dans le programme de recherche ethnoarchéologique cité précédemment, a été effectué par É. Conte sur le sujet, à Ua Huka (Conte et al., 2001). Nous avons pu observer deux grands types de pêche utilisant un hameçon : la pêche avec un appât et la pêche avec un leurre. Nous allons exposer succinctement ces techniques, afin de discuter des résultats dans une perspective ethnoarchéologique.
La pêche avec un appât
53La pêche avec un appât consiste à mettre au bout de la ligne, sur l’hameçon, de la chair de crustacé, de pieuvre ou de poisson, selon le type de poisson que le pêcheur désire prendre. Il s’agit de la pêche la plus quotidiennement pratiquée par les Marquisiens. Deux techniques utilisent un appât : la pêche avec une canne, près des rochers, et la pêche avec une ligne tenue à la main, au large.
54La première ne se fait que le jour, aux heures les plus fraîches. Se pratiquant près des rochers (dans les petits bassins naturels du littoral ou les baies), elle permet de capturer des poissons de faible gabarit (moins de 30 cm), comme des cirrhitidés, des labridés, des lethrinidés, des lutjanidés, des mullidés, des pomacentridés et des petits serranidés (fig. 7). Les hameçons utilisés sont, de ce fait, de petite taille (moins de 30 mm).
55La deuxième, employant une ligne tenue à la main, se pratique le jour ou la nuit. C’est une pêche de fond, qui se déroule au large et concerne essentiellement les poissons du large et pélagiques, atteignant parfois plus d’un mètre de long, comme les carangidés, scombridés (fig. 7) et même de très gros serranidés. Jusqu’à trois hameçons peuvent être mis sur la même ligne (il faut, dans ce cas, un plus gros nylon), avec des hameçons de plus de 50 mm de haut. Cette pêche est plus productive si elle est pratiquée la nuit, les prédateurs marins sortant à ce moment-là pour chasser.
La pêche avec un leurre à plume
56Les pêcheurs marquisiens se souviennent parfaitement de ces dispositifs, qu’ils appellent avaika huu, même s’ils ne les utilisent plus guère. Actuellement remplacés de manière fréquente par des leurres modernes en plastique, les leurres traditionnels sont fabriqués à partir de plumes d’oiseaux marins ou terrestres. Trois types de techniques utilisant un leurre à plume sont répertoriés :
57Près des rochers, la pêche à la traîne consiste à lancer la ligne légèrement plombée au loin et à la ramener vers soi en la traînant sur l’eau, ainsi de suite, jusqu’à ce qu’un poisson morde. Elle concerne particulièrement des caranguidés et utilise un leurre à plume verte de ptilope des Marquises (Ptilinopus dupetithoursis) et brune de noddi brun (Anous stolidus) (fig. 8c), et un hameçon de taille comprise entre 30 et 40 mm. Au large (en pirogue ou en bateau), elle permet d’attraper des poissons de gros gabarit, plus prestigieux que les poissons des côtes, car plus difficiles à pêcher. Les leurres traditionnels sont fabriqués avec des plumes de plusieurs couleurs. Des scombridés, mais également des belonidés, des caranguidés et des sphyrenidés, peuvent être pêchés avec des hameçons de grande taille (plus de 50 mm).
58La pêche utilisant un leurre en plume blanche ne se pratique que la nuit ; les plumes proviennent de deux oiseaux, la gygis blanche (Gygis alba) et le phaéton à brin rouge (Phaethon rubricauda) (fig. 8a et 8b). Cette pêche nocturne vise essentiellement, en nouvelle lune, les rougets (Myripristis spp. ) et, durant les nuits sans lune, les chinchards adultes (Selar crumenophtalmus) (fig. 7). La première (pour les rougets) emploie une canne et se fait sans lune (la lumière les fait fuir) près des rochers. La deuxième vise les chinchards adultes et la lumière (naturelle ou artificielle) paraît nécessaire afin d’attirer le zooplancton à la surface de l’eau, nourriture des chinchards.
59La pêche utilisant un leurre en plume colorée, près des rochers, se pratique également avec une ligne tenue à la main et la nuit. Les plumes sont multicolores, sans que nous ayons pu avoir d’informations précises sur les couleurs. Les lutjanidés, les serranidés et certains caranguidés font partie des prises courantes pêchées avec ce leurre, à l’aide d’hameçons de petite et moyenne taille (entre 20 et 40 mm), plusieurs pouvant se trouver sur la même ligne.
60Au final, nous avons recensé plusieurs techniques, se déclinant selon les conditions (lieu et moment) et surtout selon les espèces visées. Nous avons également récolté 167 noms de poissons pêchés, ainsi que les informations associées à ces espèces, comme par exemple les conditions idéales pour partir effectuer une pêche spécifique, et de nombreuses connaissances empiriques liées au monde marin.
Les pêches n’employant pas d’hameçon
61Néanmoins, dans notre objectif de comprendre l’exploitation des ressources marines sur les sites archéologiques, il est également important d’inclure les pêches n’utilisant pas d’hameçon. Ces pêches ne laissent aucune trace archéologique et, de ce fait, sont impossibles à identifier sur un site, excepté à travers les restes fauniques. Nous exposerons brièvement les techniques sans hameçon en mentionnant les espèces concernées.
62Trois techniques se démarquent, dont deux sont moins pratiquées aujourd’hui du fait de la réglementation actuelle. La pêche au filet est la première6, elle permet de capturer en quantité intéressante des petits poissons vivant près des côtes. La pêche par empoisonnement est strictement interdite de nos jours, mais les méthodes anciennement pratiquées sont encore fortement ancrées dans les mémoires des pêcheurs marquisiens. Il s’agit d’utiliser des plantes ichtyotoxiques afin d’immobiliser des poissons présents sur le littoral. Ils meurent souvent par asphyxie, avec l’ingestion de toxines présentes dans des graines, des fruits ou des feuilles. La pêche sous-marine est, par contre, largement pratiquée de nos jours. Elle exige très peu de moyens et permet de capturer des poissons difficilement pêchés à la ligne, qui mordent peu, comme les espèces herbivores (dont les scaridés et les acanthuridés) ou qui sont très offensifs et évoluent plus au large (dont les Tylosurus crocodilus, les Platybelone argalus et argalus platyura, et les Hyporhamphus sp.). Bien sûr, cette technique ne laisse aucune trace archéologique, seuls les témoignages ethnographiques permettent d’attester sa pratique à l’époque des premiers contacts européens.
Synthèse des données : l’apport de l’ethnoarchéologie
63Les pêches les plus quotidiennement pratiquées et citées systématiquement dans les témoignages recueillis viennent d’être exposées. Selon les zones géographiques, les techniques s’adaptent suivant les espèces et les conditions différentes, divisant ainsi les espaces maritimes :
Près des rochers : avec une canne à pêche, essentiellement pour les petites espèces. Les pêcheurs utilisent des hameçons de 20 à 30 mm, des appâts (le jour) pour les petits poissons qui se nourrissent d’invertébrés benthiques et des leurres multicolores (la nuit) pour les grosses prises, ou à plume blanche pour la pêche aux rougets.
Au large : avec une ligne tenue à la main et des hameçons de plus de 50 mm. Les appâts sont des poissons pour attirer des grosses proies. La pêche nocturne aux chinchards est la seule pêche associant une ligne tenue à la main et un leurre (avec des petits hameçons d’environ 30 mm).
La pêche à la traîne peut se pratiquer aussi bien près des rochers (les prises sont des caranguidés pour la plupart) ou au large (pour des grosses prises plus variées) mais vise des prédateurs volontiers attirés par le mouvement vif du leurre près de la surface de l’eau. Les hameçons sont moyennement grands (de 30 à 40 mm).
64Malgré l’abondance de données récoltées durant l’enquête, nous nous heurtons à une limite méthodologique. En effet, les hameçons actuels, en métal, possèdent tous des formes standardisées qui ne nous permettent pas une analyse comparative morphologique directe entre les hameçons archéologiques et les hameçons utilisés de nos jours – sans aborder en détail la question de la résistance des matériaux (le métal permet d’utiliser un hameçon plus petit que celui fait en matériau traditionnel pour la capture d’un poisson d’un poids équivalent).
65Il reste néanmoins un point intéressant à développer : les tailles des hameçons actuels restent tout de même liées aux techniques et aux poissons. Nous savons que les hameçons de petite taille (inférieurs à 30 mm) sont destinés essentiellement à pêcher des petits poissons à la canne, près des rochers, tandis que ceux de grande taille (supérieurs à 40 mm) sont destinés à la pêche de poissons du large.
66Si nous observons en détail les compositions des deux corpus, nous pouvons avancer plusieurs hypothèses préliminaires. À Manihina, 95 % des hameçons simples entiers et partiels ont une hauteur inférieure à 30 mm, à Tangatatau, 84 % ont une hauteur inférieure à 20 mm. Ces petites dimensions concernant une si large portion des deux corpus nous incitent à penser que la majeure partie des hameçons retrouvés sur ces sites étaient destinés à pêcher des espèces ne dépassant guère 40 cm de longueur, voire bien plus petits pour la plupart, et suggèrent donc une pêche centrée essentiellement sur le littoral.
67Ces premières interprétations sont basées sur une comparaison dimensionnelle et non morphologique. En prenant en référence certaines études ethnologiques antérieures, nous pouvons utiliser les informations liées à la forme des hameçons. Il est communément admis que la forme de l’hameçon influence l’action mécanique de celui-ci : le mouvement produit ne sera pas le même si la hampe est droite ou incurvée. Un hameçon possédant une hampe droite s’enfoncera directement à la verticale dans la gueule du poisson, alors que les hampes courbées agissent en tournant sur leur propre axe, en se fichant dans la gueule du poisson, minimisant les risques qu’il se libère (Nordhoff, 1930 ; Garanger, 1965).
68Les petits hameçons droits sont souvent associés à la pêche le long du littoral, en général avec une canne car celle-ci permet de tirer la ligne d’un coup rapide et de ficher l’hameçon promptement dans la gueule de la proie. Les hameçons courbés sont associés soit à la pêche dans des zones de grands fonds, au large (Métraux, 1940 ; Garanger, 1965 ; Ayres, 1979), soit à la pêche dans des endroits peu profonds, avec du courant ou avec la présence de pâtés de coraux ou de rochers immergés abondants (Johannes, 1981).
69En examinant plus en détail les corpus concernés, deux distributions typologiques se différencient. À Manihina, 90 % des hameçons simples sont de type I, alors qu’à Tangatatau, 68,6 % sont de type II. Selon les connexions énoncées précédemment entre la typologie et la fonctionnalité, nous pouvons avancer que, pour le cas de Manihina, il s’agirait d’hameçons plutôt utilisés dans des eaux peu profondes (près du littoral), éventuellement avec une canne, et, pour le cas de Tangatatau, ils seraient plutôt utilisés dans des eaux profondes, ou peu profondes mais présentant un fond encombré de pâtés coralliens. Cette dernière possibilité semble plus adéquate, étant donné l’environnement de Mangaia, avec un lagon peu profond et un récif frangeant. Cette interprétation place l’utilisation des hameçons de Tangatatau également sur le littoral ; elle rejoint et corrobore ce que nous avons formulé précédemment lors de la comparaison des tailles d’hameçons.
70Il nous faut toutefois garder une certaine réserve sur le cas de Tangatatau, étant donné la proximité du lac Tiriara. Celle-ci induit une présence de poissons d’eau douce, notamment d’anguilles, et ajoute d’autres possibilités de pêches dont nous ne connaissons pas les détails. La présence de formes plus variées à Tangatatau pourrait donc être liée à un environnement mixte.
Conclusions et perspectives : une interdisciplinarité
71En révisant au préalable les différentes méthodes d’analyse d’hameçons, nous avons pu obtenir un grand nombre de données objectives et fiables qui nous permettent de comparer de manière égale les deux corpus à notre disposition. En effet, les méthodes employées se veulent systématiques et adaptables à n’importe quel type d’hameçon.
72L’étude préliminaire de la typologie des deux corpus nous révèle deux distributions typologiques distinctes : une forte majorité des hameçons provenant de Manihina présente des hampes droites, une plus faible majorité de ceux de Tangatatau des hampes courbées. De plus, l’ensemble des deux corpus présente une grande majorité d’hameçons de petite taille (inférieurs à 30 mm), particulièrement ceux de Tangatatau dont 89 % n’excédent pas 21 mm.
73Par-delà l’analyse brute du matériel, nous avons voulu intégrer les informations liées à la pêche actuelle, grâce à une mission ethnologique effectuée sur deux îles marquisiennes, et les données provenant d’études réalisées en Polynésie ou dans d’autres archipels du Pacifique. Nous avons obtenu un inventaire des techniques de pêche communes aux deux îles et représentatives des pêches les plus fréquemment pratiquées de nos jours. Ces informations nous servent à confronter les données actuelles de la pêche et celles de l’archéologie sur les hameçons et les vestiges osseux.
74Les hameçons archéologiques ayant une hauteur inférieure à 30 mm, nous pouvons les associer à des pêches visant essentiellement des espèces de petite taille et donc à des pratiques de pêche de proximité, sur le littoral. Toutefois, comme nous l’avons exposé, il a fallu nous servir d’autres études ethnologiques pour exploiter les données liées à la morphologie même des artefacts, les hameçons modernes ayant des formes standardisées qui ne semblent plus correspondre à des usages anciens. La corrélation directe entre les deux types de données est, de ce fait, problématique. Nous pouvons cependant relier les hameçons de Manihina à une pêche en zone peu profonde, souvent associée à une canne à pêche – la ligne peut rester tendue sans courant (Allen, 1996) –, et ceux de Tangatatau à une pêche en eaux peu profondes également mais avec la présence de pâtés coralliens, proposition appropriée étant donné l’environnement de Mangaia. Ces critères (littoral, petits poissons, petits hameçons) suggèrent des pêches à caractère quotidien avec peu de moyens à fournir et une facilité d’accès aux lieux de pêche, ce qui concorde avec l’environnement immédiat de Manihina, dans une baie avec un pourtour rocheux, et de Tangatatau, proche du lagon à récif frangeant.
75L’homogénéité des formes d’hameçons, reflétant une diversité apparemment réduite des stratégies de pêche, a aussi été observée sur d’autres îles, dont Tahuata, aux îles Marquises, avec le site d’Hanamiai (Rolett, 1989), et à Aitutaki, aux îles Cook (Allen, 2002).
76Si les stratégies d’acquisition, au moment de l’occupation des deux sites, sont liées au littoral, il existe cependant des différences morphologiques entre les hameçons. Deux approches peuvent être envisagées : une approche environnementale, où les formes peuvent être liées à l’environnement différent des deux îles et s’adaptent aux conditions du milieu ; une approche plus sociale, où les formes suggèrent une spécialisation du groupe installé sur le site, avec une activité de pêche centrée sur le littoral. Les femmes sont fréquemment associées à ces pêches de proximité. Le territoire occupé par un groupe humain est ainsi divisé selon les spécialisations techniques et la séparation des genres : l’exploitation des ressources du littoral, comme la cueillette des algues ou le ramassage des coquillages, est le fait des femmes, contrairement aux pêches plus prestigieuses réservées aux hommes, comme celle des thons ou des tortues, qui s’effectuent dans des territoires maritimes plus éloignés. D’après les observations ethnographiques lors des premiers contacts, il était interdit aux femmes de pêcher sur une pirogue et elles ne devaient pas toucher certains instruments de pêche7 (Lavondès, 1987).
77Les interprétations exposées sont évidemment préliminaires, puisque plusieurs données nous manquent encore, comme les informations issues de l’étude des vestiges ichtyologiques. Sur le site Manihina, ces analyses sont en cours ; sur celui de Tangatatau, elles ont été effectuées (Butler, 2001 ; 2004). Si les données ethnologiques et archéologiques étaient complétées par les données ichtyologiques, il serait alors possible d’établir des parallèles entre les vestiges osseux archéologiques et la faune actuelle pêchée, et également de mieux connaître la part des espèces pêchées sans hameçon, à l’aide de techniques ne laissant pas de traces. Les résultats de telles analyses refléteraient un mode de subsistance soit lié spécifiquement au littoral (si la faune correspond aux espèces pêchées à l’hameçon), soit plus varié (si la faune est diversifiée et correspond à des espèces du littoral et du large, cela suggérerait l’emploi d’autres techniques ne laissant pas de traces archéologiques).
78Au final, intégrer plusieurs données acquises selon des méthodes différentes permettrait de mieux comprendre d’une manière globale l’exploitation des ressources marines et les stratégies d’acquisition au moment de l’occupation des deux sites, sur des territoires bien distincts et spécifiques.
Bibliographie
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10.1080/00288306.1967.10423227 :Notes de bas de page
1 Pendant la période de frai, les poissons se regroupent pour se reproduire.
2 Les espèces benthiques vivent dans la zone de fond marin, soit à proximité du fond (dont les organismes vagiles), soit directement sur le substratum (épibenthique), soit même dans celui-ci (endobenthique). Les espèces pélagiques vivent, quant à elles, dans l’ensemble des eaux qui surmontent les fonds ; elles sont associées au large (Weinberg, 2004).
3 Les hameçons en matière coquillée ou osseuse se conservent relativement bien à long terme (dans les sols non acides) et représentent donc une large part des hameçons retrouvés sur les sites archéologiques. Il ne faut pas négliger d’autres matériaux périssables, comme le bois (informations obtenues d’après les observations ethnographiques).
4 La hauteur globale des hameçons entiers et partiels est conservée, de même que les caractéristiques principales pour la classification : la hampe et la courbure.
5 La mission, effectuée fin 2006, s’est inscrite dans le cadre du GDR 2834 du CNRS, Études interdisciplinaires sur les sociétés anciennes du Pacifique Sud, créé en janvier 2004, et a fait l’objet d’un rapport de mission (Carlier, 2007).
6 La réglementation concerne le maillage des filets, qui doit être supérieur à 40 mm et dont la longueur cumulée ne doit pas dépasser 50 m.
7 De nos jours, les femmes sont encore parfois exclues de certaines pêches, au large. Les pêches à la ligne sont considérées comme des activités de femmes ou de personnes âgées.
Auteur
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne – UMR 7041 : Archéologie et sciences de l’Antiquité.
Sujet de thèse : Les hameçons polynésiens : analyse typologique, technologique et fonctionnelle. La pêche en Polynésie orientale – Étude comparative. Directeur : É. Conte.
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