Conclusion
Bilan de la troisième Journée Doctorale d’Archéologie
p. 251-253
Texte intégral
1À l’instar des première et deuxième Journées doctorales d’archéologie (2006 et 2007), cette troisième journée se voulait révélatrice de la diversité des problématiques de recherche menées, au sein de l’École doctorale d’archéologie de l’université Paris 1, par des doctorants dont les travaux couvrent un champ d’investigation très large, tant du point de vue chronologique que géographique. Organisée autour du thème : « Les images : regards sur les sociétés », cette journée a donné lieu à une douzaine de communications dont dix ont abouti aux articles regroupés dans ce volume.
2Cette année, Luc Bachelot, Directeur de recherche au CNRS, responsable de l’équipe « Histoire de l’Archéologie et de l’Orient cunéiforme » (UMR 7041-ArScAn) et animateur, au sein de la même UMR, du thème « Images, textes et sociétés » (voir Cahiers des thèmes transversaux ArScAn 2003-2007), a accepté de conduire les débats et de les enrichir de sa longue familiarité avec le sujet.
3Aujourd’hui, l’image occupe une place considérable dans nos sociétés, grâce à sa diffusion massive rendue possible par les technologies modernes de la communication. La bibliographie, abondante et diversifiée sur ce thème, est sans cesse enrichie par les nouvelles voies d’interprétation et méthodes d’analyse. Les images sont des productions qui nous renseignent sur la façon dont les sociétés, actuelles ou passées, perçoivent le monde et se perçoivent elles-mêmes. Nous souhaitions, lors de cette rencontre, nous intéresser aux images dans la mesure où elles reflètent les aspects les plus divers des sociétés et de leur fonctionnement, aussi bien pratique que symbolique, leurs techniques bien sûr, mais aussi leur mode de vie, leur système de croyances ou de valeurs. Les doctorants ont largement répondu à la complexité de la thématique, comme en témoignent les articles présentés dans ce volume.
4E. Honoré, utilisant des méthodes propres à l’archéologie – la stratigraphie –, propose un phasage chronologique des peintures rupestres du Gilf-el Kebir dans le Sahara égyptien. Elle tente de leur attribuer une datation relative susceptible de mieux nous faire comprendre l’économie de ces sociétés pastorales. M. Louka tente pour sa part de comprendre en quoi le bijou est un marqueur social de la femme dans la Grèce de l’époque archaïque et comment ce dernier est retranscrit dans l’iconographie de l’époque. E. Cavanna utilise le potentiel de la carte et du plan ancien pour mettre en évidence des pratiques sociales et culturelles de l’espace, en l’occurrence celles des élites médiévales et modernes dans l’ouest du Bassin Parisien. L’auteur envisage la carte comme une image construite de l’espace passé à un temps T, porteuse d’informations quand à la société qui l’a produite. L. Gilaizeau va à la rencontre de l’archéologie japonaise et de l’image qu’elle véhicule dans la société contemporaine. Ici, l’auteur opère un retournement de la question de l’image puisque c’est l’archéologie qui est productrice d’images sur la société japonaise actuelle. A. Le Maillot s’interroge sur les tendances aniconiques en Mésopotamie antique et replace ce phénomène dans l’évolution du processus de représentation divine. A. Le Bihan dresse une typologie de deux catégories de représentations divines au Proche-Orient romain, les bétyles et les enseignes religieuses, s’interrogeant sur la survivance, à travers elles, d’un passé préromain rendu ainsi très présent. E. Ferran s’attache à montrer la multiplicité des regards que l’on peut porter sur un objet iconique, les stèles mayas, dont le contexte socio-culturel a été en grande partie perdu. Elle s’interroge sur les regards et les discours qu’une image peut engendrer chez ses contemporains (les Mayas), leurs « successeurs » (les missionnaires espagnols), ou encore chez les chercheurs qui les étudient des siècles plus tard. S. Girond s’intéresse aux représentations figurées des dieux et des ancêtres dans la cité des Bituriges Cubes, qui semblent révéler les pratiques religieuses gauloises évoluant sous l’influence grandissante de la société romaine. D. Seigneuret compare l’imagerie extérieure des temples nabatéo-romains de Khirbet Edh-Dharih (Jordanie) à leur architecture intérieure : la première est caractérisée par des scènes mythologiques, inspirées pour la plupart du langage commun gréco-romain, tandis que la seconde est entièrement déterminée pas les besoins d’un culte local et quasiment dépourvue d’influences gréco-romaines. Enfin, K. Abdallah se penche sur les mosaïques de Syrie du Nord à l’époque byzantine pour proposer de nouvelles hypothèses quant à l’interprétation des scènes de poursuite ou d’affrontements inégaux entre prédateurs et animaux domestiques ou inoffensifs. Il propose une interprétation précise, socio-historique, d’un ensemble d’images jusqu’à présent considérées comme ornementales ou interprétées de façon très vague et générique.
5Ces articles montrent la multiplicité des supports iconographiques étudiés (peintures rupestres, cartes, stèles, parure…) et des méthodes d’analyse (typologie, analyse spatiale, stratigraphie…) pour répondre aux problématiques liées à l’image. Ils renouvellent les approches et les réflexions sur le sujet en soulevant de nombreuses questions : comment interpréter des productions iconographiques passées à travers le filtre de notre regard actuel, ou de celui d’autres populations non contemporaines ou étrangères à celles qui ont produit l’image ? L’image, en tant que production artistique, est-elle une représentation fidèle, partielle ou encore déformante de la réalité ? Au-delà d’une interprétation simplement ornementale, l’iconographie aborde les grandes questions de l’archéologie : chronologie, phénomènes de contacts, processus d’acculturation, fonctionnement du pouvoir, anthropologie religieuse, questions funéraires ou économiques. A ce titre, l’iconographie fait partie intégrante de l’archéologie. Et, comme tout autre vestige matériel, l’image constitue, malgré les difficultés de mise en contexte et d’interprétation qui lui sont inhérentes, un outil d’une valeur inestimable pour la compréhension des sociétés du passé.
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