Hôpital et règlement en Autriche à l’époque moderne
p. 131-152
Résumés
Les hôpitaux de la prémodernité constituaient dans de nombreuses villes, depuis le Moyen Âge central et tardif, l’« entreprise » communale la plus importante. Pour qu’un hôpital puisse exister, il était essentiel qu’il dispose d’une dotation suffisante, comprenant des propriétés, des revenus (par exemple ceux de taxes indirectes) et un cheptel. Les hôpitaux devaient en effet pouvoir subvenir à leurs propres besoins économiques ; c’est pourquoi leurs résidents étaient le plus souvent tenus de payer un droit d’entrée, et les possessions de l’établissement étaient exploitées avec méthode. Depuis la fin du Moyen Âge, on consacra beaucoup de soin, dans l’esprit de la « bonne police », à fixer par écrit les règlements, comme en témoignent ceux qui sont conservés dans les archives des hôpitaux autrichiens. Fidèle à l’idée de la « maisonnée », la « bonne ordonnance » de cet établissement multifonctionnel était également censée en soigner l’image à l’extérieur : le conseil de ville pouvait ainsi faire passer le message symbolique de son « bon gouvernement », les soins prodigués aux citoyens âgés étant en effet au cœur des obligations des dirigeants urbains. Par ce moyen, les autorités des villes signifiaient par écrit des règles et des instructions à l’usage aussi bien des résidents que des employés qui pouvaient être assez nombreux ; elles exerçaient également un contrôle précis sur la vie quotidienne de l’hôpital. Les normes étaient élaborées par une négociation triangulaire entre le corps de ville, les employés de l’hôpital et les résidents – ces derniers disposant toujours de la possibilité de se plaindre directement auprès du conseil de ville des ecclésiastiques et des administrateurs de l’hospice. Les princes territoriaux eux aussi cherchèrent à acquérir une influence accrue sur l’hôpital, à l’époque moderne, en multipliant les visites d’inspection. Le grand nombre de prières obligatoires, qui devaient être minutieusement observées chaque jour, revêtaient une importance cruciale : les résidents qui refusaient de s’en acquitter étaient contraints de quitter l’établissement. Conçu sur le modèle du monastère, l’hôpital servait d’« antichambre de la mort », les prescriptions normatives bannissaient querelles et disputes de ce lieu dont les portes étaient chaque soir fermées à double tour. Toutefois, dans la pratique, on peut voir que les hôpitaux abritaient de nombreux conflits autour des ressources disponibles et des positions sociales des uns et des autres.
A forthcoming edition of Austrian Hospital orders will show on the one hand conditions of the origin of this type of texts. A triangulation of powers (interacting empowerment) played an important role: the centre of administration (i. e. sovereign and his officers), local office bearer and the inmates were involved in establishing house orders. On the other hand different levels of order in these spiritual Houses are important: The order of clergy and clergymen (clerical order of the year) was in the wake of the house order (time regime, labour regime and the order of the house) and finally the material order of food (following Christian year, fasting period). Periodically the house orders were posted publicly, the master of the hospital had to proclaim the house orders in front of the inmates.
A system of checks and balances was the premiss for house orders in order to implement orders in everyday life of the inmates. Mutual control of inmates, but also mutual controls of secular and clerical attendants are characteristic of Austrian hospitals. Control of the material sources of Hospitals was a key function of the hospital master which was adjusted by written instructions and also by inventories. Especially the town council would observe all financial matters of the hospitals exactly. From the starting point of 18th century the early modern state tried to control the richness of hospital orders. New centralised house orders should establish centralised control in the Austrian hospitals, the Early Modern hospital were stronger influenced by governmental commissions.
Texte intégral
Les multiples fonctions de l’hôpital à l’époque moderne
1Antichambre de la mort, « auberge du Christ2 » offrant bien des ressemblances avec un monastère ou une confrérie, lieu de répartition des aumônes, mais aussi, pour une part modeste, prototype de la clinique : l’hôpital de la prémodernité exerçait toutes ces fonctions et, dans de nombreux bourgs et villes de l’actuelle Autriche, il constituait le plus important des établissements que possédait la municipalité. En lui venaient se fondre la sollicitude paternelle qu’entendait manifester le conseil de ville, qui adoptait de plus en plus les allures d’un petit gouvernement, et les compétences plus traditionnelles des cités envers les plus vieux et les plus pauvres de leurs membres3. La notice de dictionnaire « hôpital », que donne le Grand dictionnaire universel et complet de toutes les sciences et tous les arts de Johann Heinrich Zedler comporte une large palette d’éléments, dont trois sont présentés comme essentiels pour définir cette institution séculaire : un corps unique de bâtiment (avec une église ou une chapelle), des revenus permettant d’entretenir la maison et de subvenir aux besoins des vieux, des pauvres et des malades, ainsi qu’une forte différenciation régionale dans la sélection des résidents4.
2Possédant un champ de compétences très vaste (soins aux personnes âgées, aux malades et aux faibles d’esprit), l’hôpital de la prémodernité se répartit en plusieurs sous-types qu’il n’est pas toujours facile de distinguer. Outre les hospices destinés aux bourgeois et datant du Moyen Âge central5, il existait des maisons de confrères et de pauvres prévues pour les couches ne possédant pas le droit de bourgeoisie, des léproseries situées dans les faubourgs, des hospices d’incurables et des lazarets – quant aux maisons de correction et de travail, elles formaient un type particulier d’hôpital. En cas de besoin, on établissait des hôpitaux pour les syphilitiques ou les pestiférés afin de traiter les flambées épidémiques et les foyers d’infection ; dans la topographie de la ville, ils étaient rejetés en périphérie – à Vienne, par exemple, on les installait sur les îles parsemant les nombreux méandres du Danube. Après celle du Moyen Âge central, une nouvelle vague de fondations eut lieu à l’époque moderne. Ainsi, on estime que le nombre des hôpitaux dans la seule Styrie passa entre 1500 et 1750-1755 de 61 à 976. L’éventail plus ou moins large des aménagements et des prestations en faveur des personnes âgées, malades ou nécessiteuses dépendait en grande partie de la puissance économique et du statut juridique de la ville. La taille démographique ainsi que le niveau de centralité économique et politique de la cité influaient également sur le degré de spécialisation de ces institutions.
3Dans le contexte des confrontations confessionnelles entre les princes territoriaux et leurs villes, les autorités municipales firent de leurs hôpitaux, dans la seconde moitié du xvie siècle, de véritables bastions de la culture confessionnelle luthérienne : on y fit entrer des bénéficiaires protestants et célébrer l’office évangélique dans les églises des hôpitaux – ce qui contrastait avec l’aménagement de l’espace cultuel, demeuré catholique7. Ce n’est qu’avec les débuts de la confessionnalisation – après que les administrations urbaines protestantes eurent été remplacées par des catholiques, et les conseils municipaux forcés de changer de coloration religieuse – que les hôpitaux furent eux aussi progressivement recatholicisés, non sans conflits – on se battit par exemple pour savoir qui disposerait de la clef. Cette évolution entraîna des conséquences immédiates sur le profil des résidents. Pour compliquer encore un peu les choses, il faut prendre en compte les institutions qui avaient la responsabilité des hôpitaux : le conseil de ville n’était en effet pas toujours la seule instance à organiser, financer et contrôler les établissements ; il y avait aussi, surtout dans les villes incluses dans une seigneurie, ce qu’on appelait des hôpitaux seigneuriaux, destinés par le seigneur non seulement à la population de la cité, mais aussi aux pauvres, avant tout des ruraux, qui dépendaient de lui. Lorsque des ecclésiastiques possédaient des droits sur la ville, ils pouvaient en outre mettre en place des hospices combinant l’accueil des bourgeois et des moines, et destinés aussi bien aux serviteurs du monastère qu’aux habitants pauvres et très âgés de la localité.
4Voyons à présent comment ces hôpitaux étaient aménagés. Leur aspect révèle la genèse progressive d’un type caractéristique de construction : les bâtiments firent en effet l’objet de plusieurs agrandissements successifs, souvent sur une longue période, le noyau originel s’adjoignant d’autres maisons ou les absorbant. La disposition dominante, surtout dans les petits hôpitaux typiques des villes modestes d’Autriche, présentait un espace unique ou une enfilade couvrant plusieurs parties du bâtiment, ou encore des raccordements d’angle8. Seul l’hospice des bourgeois de Vienne – qui se situait ainsi à un niveau comparable à celui des villes d’Empire, comme Nuremberg ou Augsbourg – formait une véritable ville dans la ville. Mais c’est un cas plutôt à part dans l’espace danubien autrichien. Le cœur spirituel de ces établissements était assurément incarné par l’église ou la chapelle ; les divers pensionnaires devaient s’y acquitter de leur pensum de prières, répétées chaque jour avec monotonie, afin de rendre leurs devoirs à la mémoire des fondateurs et de se préparer à une « bonne mort ». Le cœur économique, dans les hôpitaux les plus importants, correspondait aux bâtiments agricoles où se trouvaient le bétail possédé par l’établissement (y compris le taureau municipal), les ustensiles pour le travail des champs et des vignes, et les réserves stockées dans la grange (céréales et viande). C’est également là que se tenait le personnel de l’hôpital.
5Intéressons-nous désormais aux dimensions des hôpitaux autrichiens : il nous apparaîtra vite que ces établissements étaient de taille très modeste. Alors que ceux des villes d’Empire hébergeaient un nombre important de résidents – plus de 150 en 1570 pour l’hospice Sainte-Catherine de Ratisbonne, très bien étudié9 ; 250 pour l’hôpital du Saint-Esprit à Augsbourg à la fin du XVe siècle ; 200 pour l’hôpital du Saint-Esprit de Nuremberg en 1339 – et que l’hôpital des bourgeois à Vienne en comptait plus de 1100 en 174210, la plupart des hôpitaux autrichiens se calquaient plutôt sur le nombre des Apôtres, douze, s’inscrivant ainsi symboliquement dans la succession du Christ. Il n’était pas rare de rencontrer des hospices de six à huit résidents dans les villes de moins de 1000 habitants, et ceux qui prenaient en charge entre douze et seize bourgeois représentaient des institutions déjà importantes, comme le montrent quelques exemples pris au hasard : la ville de Hall, au bord de l’Inn, dans le Tyrol (de 2500 à 3000 habitants entre 1629 et 1680), entretenait en tout et pour tout en 1553 dix prébendiers dans son hôpital, avec dix-sept employés pour s’en occuper11. La ville de Leoben en Styrie accueillait dans le sien en 1730 35 personnes pour une population en 1736 de 1934 habitants, plus 504 dans les faubourgs12. La ville de Zwettl en Basse-Autriche, directement administrée par le prince (253 feux en 1590), ouvrait en 1766 l’hospice des bourgeois à dix prébendiers réguliers13. Une estimation donne pour toute la Styrie (707000 habitants en 1750) un total de 1120 résidents répartis sur 96 hôpitaux, ce qui correspond à une moyenne d’une personne hébergée en hospice pour 530 habitants14.
Ill. 1 — L’hospice des bourgeois de Sankt Pölten

Fondé au xve siècle, l’hospice accueillait au xviiie siècle seize résidents (partie gauche de l’image). La chapelle était incorporée à l’établissement (Niederösterreichische Landesbibliothek St. Pölten, no 6044 [alt D XXI 267], lithographie coloriée, imprimée à Vienne en 1828).
Ill. 2 — L’hospice des bourgeois de Leoben

Situé au bord du fleuve, l’hospice des bourgeois de Leoben offre l’aspect d’un agrégat de maisons rassemblées au cours du temps. L’aile économique et l’aile résidentielle sont nettement séparées. L’établissement remonte au xive siècle et il accueillait environ trente personnes au xviiie siècle. Cette représentation iconographique a été réalisée autour de 1730 à l’occasion d’une visite d’inspection (Steiermärkisches Landesarchiv, Graz, Weltliche Stiftungsakten, 14, Karton 76, no 81).
Juridification et règlements : l’exemple des hôpitaux
6L’histoire de l’époque moderne est caractérisée par plusieurs processus : la genèse de l’État, la confessionnalisation, la modernisation, la sécularisation, mais aussi le processus de juridification (Verrechtlichung). C’est Winfried Schulze qui a élaboré ce concept en l’inscrivant dans une galaxie notionnelle due à Max Weber, celle de la « rationalisation occidentale », autrement dit de l’émergence de la fiabilité dans le comportement politique, social et économique. Le concept de juridification forgé par Schulze désigne le processus de longue durée par lequel l’agir économique, politique et social est indexé et même soumis au droit local, territorial et supraterritorial ainsi qu’à la jurisprudence15. À partir des XVe et XVIe siècles – et c’est à ce moment que les résistances contre cette évolution sont les plus vives –, les droits particuliers et les autonomies qui existaient jusque-là font l’objet de réglementations croissantes à une échelle qui dépasse celle de la petite région. C’est principalement dans le domaine de l’administration et de sa stabilisation dans la durée que cette promotion du normatif acquit l’importance la plus grande. On réglementa au moyen de traités internationaux16, de la mise par écrit devant les tribunaux des différences sociales17, de la fixation scripturaire des règles de « bonne police18 » et du renforcement des institutions. Le progrès de l’écrit toucha les ordonnances réglementant les cours19, les conseils, les chancelleries, la gestion des forêts20 ou encore les hôpitaux.
7Ces textes normatifs furent généralement mis au point par des commissions mixtes, et le rythme de leur promulgation s’accrut au tournant du Moyen Âge tardif21 et de l’époque moderne. Progressivement, il devint impossible de concevoir une action administrative sans réglementations fixées par l’écrit, et celui-ci, à partir de la fin du Moyen Âge, fit progresser le maintien de l’ordre en Europe centrale. La montée en puissance des législations est intimement liée à un genre en plein essor au cours du Moyen Âge tardif et du xvie siècle : celui des « ordonnances ». Dans l’esprit de la « bonne police », ce type de source généra des textes normatifs témoignant d’une « prétention qu’ont les autorités à administrer et à réglementer tous azimuts22 », mais également des règlements à visée plus ponctuelle. Les « problèmes pour maintenir l’ordre dans les grands agglomérats23 », comme les villes ou encore les corporations, par exemple, engendrèrent une première vague législatrice à la fin du Moyen Âge24. Cette poussée initiale de juridification et de scripturalisation fut suivie, si l’on s’en tient à la périodisation proposée par Peter Blickle, par une seconde phase, celle d’une législation de police d’Empire marquée par la Réforme et introduisant dans son argumentation un « adjuvant théologique », inspiré par les tenants d’un renouveau de l’Église, de quelque camp qu’ils soient.
8Au cours de l’époque moderne, le contexte d’une « imbrication entre la promotion de l’écrit, la hiérarchie et la complexité institutionnelle25 » détermina de plus en plus l’activité administrative reposant sur les règlements. L’espace juridique urbain joua dans cette évolution un rôle pionnier, au même titre que les appareils administratifs des princes territoriaux26. Les fonctionnaires urbains, du moins les premiers d’entre eux, durent désormais prêter serment envers le conseil de ville ; les formules de prestation se référaient, y compris dans le détail de leur contenu, aux lettres de nomination27, aux réglementations et aux instructions qu’ils avaient reçues.
9Au xvie siècle, un règlement pouvait concerner une institution tout entière, tandis qu’une instruction ciblait le champ d’activité particulier d’un dignitaire. Les ordonnances urbaines – rassemblant en un seul et vaste écrit les prescriptions aux administrateurs et les règles juridiques en vigueur – accueillaient en leur sein des lois de toute nature, édictées soit par le conseil de ville, soit par le corps de ville, soit par les titulaires d’offices urbains, et très souvent enclines à placer la notion d’utilité publique au principe de tout agir administratif28. Conçues pour être le cœur de la documentation des administrateurs, les ordonnances urbaines combinaient de « solides hiérarchies administratives avec un organigramme complexe des bureaux et des compétences29 ». Destinées – dans un contexte de « centrage normatif30 » – à faciliter le pilotage institutionnel et à assurer pérennité et efficience accrue à l’administration31, ces ordonnances étaient édictées soit à l’avènement du prince ou lors du vote de renouvellement du conseil, soit, fréquemment, dans le sillage d’un programme réformateur, qu’il soit au stade de la planification ou à celui de la mise en œuvre concrète. Il convient de replacer ces textes dans le cadre d’une unification juridique allant du haut vers le bas, avec le droit d’Empire, ou profitant d’échanges horizontaux, avec le droit des territoires voisins. Lorsqu’on travaillait à leur rédaction, on avait recours depuis le Moyen Âge à des normes similaires venant d’autres villes, et l’on se servait de ces exemples comme modèles à retenir ou rejeter. Dans les villes comme ailleurs, les ordonnances formaient donc un genre marqué par une grande intertextualité. Enfin, elles étaient portées à la connaissance des sujets par affichage ou par lecture publique régulièrement répétée et, à la fin du Moyen Âge comme à l’époque moderne, elles disaient être avant tout au service de l’instauration ou de la restauration – au sens où l’entendent les réformes religieuses – du « bon ordre ».
10Alors que ces grandes ordonnances réglementaires avaient pour ambition de donner une base solide au bon gouvernement (police) dans un cadre institutionnel large, comme les ordonnances sur les chancelleries ou sur les prix par exemple, le genre des « instructions » quant à lui se donnait pour objectif d’indiquer à ceux qui travaillaient dans ces institutions le sens exact que chacun d’eux devait donner à sa fonction ; il s’agissait de les « instruire ». Les grands règlements difficiles à mettre en place et concernant tout le personnel furent de plus en plus grignotés par ces instructions particulières, dont le sommet de la hiérarchie peinait toutefois à garder une vue d’ensemble : il avait intérêt à bien tenir ses registres32. La compilation de ces textes particuliers, détaillés et prenant le dessus sur l’« ancienne coutume » des règlements valables pour tous, devint un nouveau genre documentaire, prenant progressivement place aux côtés des ordonnances générales plus anciennes, sans toutefois jamais les remplacer complètement. Jusqu’en plein xviiie siècle, on trouve fréquemment des ordonnances et des instructions au même niveau dans les rubriques de classification des documents. Parmi les règlements toujours plus vastes et plus diversifiés que produisirent la fin du Moyen Âge et le xvie siècle, on trouve aussi, l’un derrière l’autre, le détail de ce que devait faire chaque employé de l’office ou de l’institution – ce qui revient à dire qu’on y trouve des instructions. Les règlements de l’hôpital de Vienne (1551, 1568, 1632-1652) étaient aussi des « instructions33 » pour les pensionnaires comme pour les employés, et il était donc nécessaire de les relire régulièrement en présence de tous ou d’en afficher une version résumée, reprenant en priorité les points du règlement qui concernaient tout le monde34.
11L’hôpital urbain, pris dans les jeux de pouvoir entre les habitants, le conseil et le seigneur de la ville, faisait l’objet de l’attention la plus scrupuleuse. C’est en tout cas ce que montre une étude des règlements hospitaliers à l’échelle de toute l’Autriche35, qui porte sur 203 textes répartis entre les xvie et xixe siècles, et couvrant, d’ouest en est, l’ensemble du territoire de l’actuelle République autrichienne. On peut y voir s’exercer un contrôle très poussé sur l’hôpital, bien commun de la ville tiraillé entre les exigences des habitants en termes de prestations et celles du conseil de ville en termes de représentation.
12L’ensemble réglementaire le plus important pour l’établissement en tant que « maison commune36 » est l’« ordonnance hospitalière » édictée dans l’esprit de la « bonne police » ; elle se place en tête de la hiérarchie des textes normatifs dédiés spécifiquement à ce genre d’institutions. Concernant les hôpitaux autrichiens de l’époque moderne, on la repère à son titre – pour autant qu’il y en ait un – qui la présente comme « règlement de la maison confraternelle » (Bruderhaus-Ordnung) à Zell am See en 180037, comme « règlement pour l’hôpital » (Ordnung für das Spital) à Gleisdorf en 174338, comme « règle de l’hôpital » (Spitalregel) à Sankt Pölten en 175639, comme « règlement intérieur » (Hausordnung) à Knittelfeld en 182840, ou comme « instruction et règlement de l’hôpital » (Spitalinstruktion und Ordnung) à Wiener Neustadt en 162241. Comme ce genre normatif pouvait comprendre aussi bien des prescriptions au seul usage des hommes chargés de faire fonctionner l’établissement que des maximes de comportement pour les résidents, un grand nombre de textes réglementaires, le plus souvent subdivisés en paragraphes, essayaient d’emblée, par leur titre, de se situer dans ce spectre assez large : « règles et obligations des pauvres se trouvant dans l’hospice des indigents » à Graz en 172842, ou encore « règlement quotidien et hospitalier pour les hommes et femmes âgés » à Vienne en 174543. Plusieurs ont tenté de combiner le règlement interne avec les instructions destinées au directeur, comme le « nouveau règlement de l’hôpital et instruction pour le directeur » de Leoben en 169544. Si l’on voulait que le texte soit réellement appliqué, il était essentiel de le porter à la connaissance de tous les résidents : la plupart du temps, il était affiché en bonne place dans l’hôpital, voire dans chacune de ses pièces45. On le lisait en outre de manière claire et intelligible à chaque nouvel arrivant46, et une lecture publique avait de surcroît lieu régulièrement (soit une fois par trimestre, soit chaque premier dimanche du mois)47. Parfois, c’est de manière implicite qu’est abordé le problème de la publication : le règlement précise seulement qu’il doit être « respecté avec exactitude ».
13Le premier objectif des ordonnances hospitalières était de déterminer qui avait droit à une prise en charge et pouvait prétendre à une place à l’hôpital. Dans les territoires héréditaires et germaniques des Habsbourg, après la recatholicisation de la première moitié du xviie siècle, la « vraie » foi devint un critère primordial. Dans la ville de Laufen, au bord de la Salzach (principauté-archevêché de Salzbourg), le règlement de l’hôpital des bourgeois, rédigé vers 1618, place en tête cette prescription : « En premier lieu, les personnes accueillies dans cet hôpital doivent toutes posséder la bourgeoisie et être de foi chrétienne catholique48. » Dans la plupart des cas, les textes ne faisaient toutefois pas de référence précise au catholicisme romain ; ils avaient recours à des formulations plus générales : les futurs résidents devaient « craindre Dieu, être pieux et honnêtes49 », faire preuve d’un « mode de vie pieux et honnête50 » et être en « état de grâce51 » (« par une vie pieuse et chrétienne »). Obtenir une place dans un hôpital de la prémodernité représentait un véritable privilège, étant donné la capacité restreinte de ces établissements, et c’est pourquoi de nombreux règlements commençaient par restreindre le périmètre de ceux qui y avaient droit. Celui de l’hôpital des bourgeois de Steyr, en 1757, le fait explicitement en parlant des « bourgeois de ce lieu tombés dans la gêne » et des « enfants nécessiteux des bourgeois de ce lieu52 ». À l’époque moderne, les hôpitaux avaient pour principe de base de porter assistance aux habitants de la ville avant de songer aux étrangers. La plupart des ordonnances faisaient également porter l’accent sur l’incapacité des candidats-résidents à subvenir seuls à leurs besoins : ils devaient « être pauvres, nécessiteux, vieux, faibles ou souffrant d’autres maux, si bien qu’il leur est impossible de pourvoir seuls à leur subsistance53 ». Parmi ces critères ouvrant les portes de l’hôpital figuraient, outre l’âge, la faiblesse corporelle et l’indigence, les « mérites particuliers54 ». On attendait en général des pensionnaires qu’ils répondent aux œuvres de charité par leur propre « reconnaissance des pauvres55 ».
14Les règlements hospitaliers de l’époque moderne s’organisent selon plusieurs domaines thématiques, abordés dans les sous-chapitres suivants : le règlement intérieur concernant le fonctionnement de l’établissement côtoie les règles organisant la succession des activités spirituelles et temporelles ; dans certains cas, les ordonnances comprennent également des instructions et des dispositions concernant la nourriture et l’approvisionnement.
Le règlement intérieur
15L’hôpital comme « maisonnée » fait, dans de nombreux règlements, l’objet de dispositions très précises. À cette époque, l’hôpital ne devait pas être un « lieu de querelles » ; les résidents, vivant en quelque sorte dans une confrérie hospitalière, étaient au contraire tenus de « vivre dans la crainte de Dieu, avec de bonnes mœurs et dans l’honnêteté les uns envers les autres, comme des frères et sœurs56 ». Ils devaient mener une existence « soignée, présentable, pacifique, édifiante et sans difficultés, et aussi […] tout à fait propre57 ». Les principes directeurs étaient le calme, la paix et l’ordre qui devaient régner dans l’établissement – la « paix et l’union des pauvres58 ». Les règlements consacraient beaucoup de soin à fixer par écrit les hiérarchies, précisant qui pouvait donner des ordres et à qui. Ils insistaient sur le « respect » dû à l’administration de l’hôpital59, le devoir d’obéissance60 envers la direction, ainsi que la nécessité d’accepter par avance la gamme de punitions infligées par le « père ou la mère de maison61 » ou les « pères » et « mères de chambrée » (placés à la tête de chacune des pièces)62. Inversement, l’administrateur se devait de contrôler l’ensemble de la maisonnée63. Une attention particulière était portée à la propreté, exigée par des clauses explicites et répétitives64. On trouve dans ces textes l’écho des nombreuses querelles qui ont dû éclater au sujet des vols de bois65 et plus généralement de la « pénurie de bois66 », caractéristique de l’époque moderne. Des stratégies sont développées pour économiser le combustible (invitations à gérer avec le plus grand soin le bois à brûler)67. Le feu – grand architecte des villes d’Ancien Régime – n’est pas oublié : on ne cesse d’inciter à manier les luminaires avec précaution68. Le résident de l’hôpital n’est pas autorisé à « manipuler des copeaux de bois dans les chambres ou dans tout autre recoin69 ». Il faut plutôt effectuer les tâches que l’on a à faire « à la lumière de la chandelle qui brûle pour tous dans la pièce commune70 », et non pas dans les chambres à coucher plus petites. Dans certains cas, le règlement ajoute, à la prescription de l’ordre, de l’obéissance envers la direction, du maintien de la propreté dans la maison71 et de la bonne entente réciproque, une maxime supplémentaire : celle de la tempérance.
16Aucun résident, lorsqu’il entrait dans un hôpital de l’époque moderne, n’était autorisé à passer sous silence son état de fortune. « Chaque personne doit faire à l’administrateur une déclaration sincère de ses biens, et ne rien en cacher, afin qu’après son décès rien ne puisse échapper à la fraternelle maison72. » S’ils en avaient la possibilité, les pensionnaires devaient apporter leurs draps de lit et leur vaisselle (écuelles et assiettes) qui, après leur mort, devenaient la propriété de l’hôpital73. On retrouve sans cesse la clause obligeant explicitement les résidents à tester en faveur de l’établissement74. De nombreux hôpitaux fournissaient également un habillement uniforme aux plus pauvres de ceux qu’ils accueillaient. Hommes et femmes étaient revêtus du même bleu, la couleur de la pauvreté75.
Les travaux, les prières et les jours
17La première disposition touchant l’emploi du temps était d’affirmer qu’il fallait vraiment le respecter : « En ce qui concerne l’ordonnancement de la journée, il faut qu’il soit appliqué exactement comme il a été mis par écrit76. » Ceci concernait la succession quotidienne des activités temporelles, par exemple l’heure du lever, fixée pour tous aux premières heures du matin : « Aucun résident n’a le droit de se lever plus tôt ou plus tard77. » Chacun devait ensuite faire son lit. On précisait par écrit toutes les étapes de la journée, les prières communes, les repas, l’heure de la messe et l’heure à laquelle tous devaient se coucher – ainsi que les punitions sanctionnant toute entorse à cet emploi du temps. À l’hôpital des bourgeois de Laufen par exemple, au début du XVIIe siècle, on respectait encore le rythme ancien des deux repas par jour : le matin vers 9 heures 30 et le soir vers 17 heures 3078. Tout montre que l’établissement était coupé du monde extérieur. Nul ne pouvait quitter la « maison spirituelle » sans en informer auparavant le directeur79 ; il était en règle générale interdit de fréquenter les tavernes, de même qu’était prohibée la consommation excessive d’alcool (l’« avinage » – das Überweinen)80. Personne n’était en outre autorisé à passer la nuit dehors et, en règle générale, il n’était pas permis d’offrir le gîte à des étrangers81 ; selon la saison, il existait un horaire d’été et un horaire d’hiver82 pour la fermeture des portes de l’hôpital. Les douceurs du commerce charnel étaient elles aussi interdites dans la maison spirituelle : « Aucun homme ne devra être surpris en compagnie d’une femme dans des coins reculés et douteux ou dans une des chambres83. »
18Afin d’assurer le fonctionnement d’un hôpital d’Ancien Régime – surtout dans le cas des hospices de bourgeois, de taille modeste –, il était indispensable d’avoir recours à la collaboration active des résidents ; mais le travail à l’hôpital doit également être interprété à la lumière de catégories religieuses et morales84. Les textes mettent en relation les capacités corporelles et la masse de travail à fournir :
« Pour les travaux courants de la maison, chaque résident de l’hôpital est tenu d’effectuer, en fonction de ses forces, les tâches qui lui seront confiées par l’administration ; mais on ne pourra employer personne au-dessus de ses capacités corporelles et nul ne pourra faire faire son travail par d’autres85. »
19Afin de « ne pas employer son temps à l’oisiveté, tous les résidents de l’hôpital doivent travailler86 ». Nul n’était autorisé à se soustraire aux tâches prescrites par le père de maison. Ceux des pensionnaires qui étaient encore capables de travailler ne pouvaient couper aux tâches domestiques (porter l’eau ou le bois, par exemple) aussi longtemps qu’ils y étaient physiquement aptes87. La mendicité – une forme de travail charitable – était interdite88, mais de nombreux hôpitaux avaient installé, sur l’un des murs de l’établissement ou dans l’espace relevant juridiquement de la cité, un ou plusieurs troncs incitant à verser un soutien financier à l’hôpital89. Il arrivait fréquemment qu’ils reçoivent des dons de nourriture ; le père de maison était alors tenu de les répartir équitablement90. Des quêtes en faveur de l’hôpital étaient également organisées régulièrement dans tout le ban de la ville91. Parfois, les résidents étaient aussi autorisés à travailler pour leur propre compte92, ce qui entraînait des conflits récurrents avec les artisans de la cité. La période d’activité la plus intense était celle des récoltes, pendant laquelle les habitants de l’hôpital devaient eux aussi effectuer les corvées pour le seigneur des lieux93. Mais le travail qui prenait la plus grande place dans la vie des résidents était sans aucun doute celui qui consistait à soigner les autres. C’est pourquoi les règlements hospitaliers abordent fréquemment le travail en tant que facteur d’ordre et critère de distinction entre les résidents sains et les malades. En raison du manque quasi total de personnel, les « sains » étaient tenus d’apporter des soins aux malades, « par amour et miséricorde94 ». Il était rare que les directions des hôpitaux aient recours à une véritable garde-malade pour les résidents les plus atteints. On n’en employait une que dans les cas d’urgence, et elle était chargée de « veiller » le malade, de prendre en charge le nettoyage de sa chambre et, lorsqu’il s’agissait d’un mourant, de le « préparer » à recevoir les derniers sacrements95.
20Dans le domaine spirituel, l’emploi du temps donne le sens de l’interaction religieuse et s’organise selon deux domaines : celui de la prière, comme forme de piété personnelle et intériorisée, et celui de la fréquentation de la messe, comprenant le cas échéant la confession et la communion. Rien ne paraissait plus naturel que la présence dans toutes les pièces de l’hôpital, et d’abord dans les chambres à coucher, de crucifix et de bénitiers96. Les agissements superstitieux et les « bavardages inutiles » n’avaient pas leur place à l’hôpital97. Le déroulement des journées y apparaît saturé de prières : tout au long du jour, les pensionnaires devaient s’acquitter d’actions de grâces, de remerciements (envers ceux qui avaient fondé l’hôpital et ceux qui le maintenaient en activité, comme envers le prince du territoire98) et de demandes d’intercession. On leur inculquait l’obligation d’assister « avec zèle aux prières prescrites99 ». Ils étaient tenus – tant que leur état physique le permettait – de se présenter chaque jour de l’année, en tout cas au moins pour les offices solennels, dans l’église paroissiale et de « faire dévotement le sacrifice de leurs prières au Tout-puissant100 ». Le matin, le midi et le soir101, il leur fallait dire une prière, soit (rarement) individuellement dans leur chambre devant l’image du Christ, soit (plus souvent) en commun dans la grand-salle de l’hôpital102. Le lieu où avait lieu la prière commune était variable : en été, elle était souvent organisée sur les bancs de l’église de l’hôpital, plus fraîche ; en hiver, on préférait la chaleur de la « pièce commune », dans laquelle on s’agenouillait103.
21Il n’était pas rare que les règlements hospitaliers donnent le détail des oraisons à effectuer, toujours à haute voix :
« Tous les dix résidents de l’hôpital doivent faire ensemble et à haute voix, à l’aube en se levant et le soir avant de se coucher, et devant l’autel à l’intérieur de la maison, la prière du matin et celle du soir, qui consistent en cinq Notre Père et cinq Ave Maria ainsi qu’une litanie. Avant et après chaque repas, une prière commune doit avoir lieu, comportant un Notre Père et un Ave, et cet ajout, prononcé à voix haute : “Seigneur, donne-leur la paix éternelle et que la lumière éternelle les éclaire ; Seigneur, fais qu’ils reposent en paix, Amen”104. »
22Outre le Notre Père, l’Ave et les litanies de Lorette, le rosaire, par son caractère répétitif et rimé, contribuait lui aussi fortement à rythmer la journée. Un nombre important de règlements prescrivaient un rosaire par jour comme expression de reconnaissance envers Dieu et envers les fondateurs de l’hôpital105.
23Toutefois, les obligations en matière de prières variaient d’un établissement à l’autre. Ainsi, les hôpitaux seigneuriaux des Esterhazy, dans la partie orientale de l’Autriche, ordonnaient trois rosaires par jour : le premier devait être dit le matin en faveur de Paul Esterhazy, le fondateur ; le deuxième l’après-midi pour la famille Esterhazy en général ; et le troisième le soir pour les pauvres âmes du Purgatoire106. Mais les résidents des hôpitaux Esterhazy n’en étaient pas quittes pour autant de leur corvée de prières : à l’aube, il leur fallait prononcer cinq Notre Père et cinq Ave en l’honneur de Sébastien, saint protecteur contre la peste, et, lorsque la cloche leur en donnait le signal le matin, à midi et le soir, ils devaient dire la salutation angélique – en comparaison de ce pensum, les messes quotidiennes semblent presque quantité négligeable107. Encore faut-il y ajouter les grâces avant et après chaque repas108. Pendant que l’on mangeait, et dans la tradition monastique, une lecture était faite : à Mühldorf am Inn par exemple, en 1667, un prébendier sachant lire était chargé de donner aux autres le plaisir d’entendre le petit catéchisme, publié en 1566, de Pierre Canisius (1521-1597)109.
24En dehors des différentes prières, c’est l’assistance à la messe110 qui se voyait accorder l’importance la plus grande : il fallait aller à l’église en rangs, deux par deux111. Les résidents des hôpitaux devaient assister chaque jour à une messe112, écouter les sermons des dimanches et jours fériés, et pratiquer confession et communion au moins une fois par mois, afin d’avoir « Dieu constamment devant les yeux113 ».
25Les spécificités cultuelles de chaque région se reflétaient dans les règlements hospitaliers. À l’hôpital des bourgeois de Sankt Pölten, les résidents devaient assister chaque vendredi dans l’église de l’établissement à une messe organisée pour l’exposition de la relique de la Sainte-Croix et à une lecture spirituelle dans l’après-midi114. Outre les messes quotidiennes, on célébrait les messes de fondation d’anniversaire ainsi que les offices mensuels pour les défunts115 ; et, lors de l’enterrement d’un résident, tous les habitants de l’hôpital devaient bien sûr participer aux funérailles116. Une grande importance était accordée à la confession fréquente pour la rémission des péchés et à la communion qui la suivait. Pâques117, fête de la conversion des pécheurs, était une date privilégiée pour se confesser, mais la Pentecôte, l’Assomption, la Toussaint et Noël jouaient aussi ce rôle118. Ces cinq dates clés pour la confession et la communion pouvaient dans certains règlements hospitaliers être complétées par les plus importantes des fêtes de la Vierge et des Apôtres119. On se plaisait également à faire ces dévotions le jour de l’An120.
Les instructions
26À partir du xvie siècle, de nombreuses instructions fixèrent par écrit la gamme d’activités attendues de tous ceux qui étaient immédiatement employés par les hôpitaux : les directeurs ou « maîtres » (Spitalmeister), les gardes-malades (quand il y en avait) ou encore, par exemple, l’ecclésiastique attaché à l’établissement. Le nombre de ces instructions s’accrut aux xviie et xviiie siècles. Une proportion importante d’entre elles n’étaient destinées qu’à un usage interne, les titulaires des fonctions dirigeantes étant souvent les seuls à recevoir des instructions particulières. L’instruction et la prestation de serment semblent avoir été souvent perçues comme deux composantes d’une seule et même procédure. Le palefrenier ou la vachère, en revanche, ne se voyaient pas remettre d’instructions pour préciser leurs fonctions, ce qui tient aussi sans doute au faible degré d’alphabétisation du petit personnel. Contrairement aux règlements intérieurs étudiés plus haut, les instructions n’embrassaient pas toute la vie de l’établissement, mais se concentraient sur une catégorie précise d’activité. Elles la fixaient par écrit, à l’usage de celui qui devait la mettre en œuvre aussi bien que de ceux qui exerçaient un contrôle sur lui, et elles permettaient au titulaire de la fonction, au moment où il entrait en charge, d’en prendre connaissance. Nombre de ces textes, jusqu’en plein xviiie siècle, continuaient toutefois à imbriquer les lois générales ou les ordonnances de police avec les indications précises sur les tâches à effectuer ou au contraire à ne pas entreprendre. Des notions comme celles d’« ordre », de zèle ou d’exactitude y tenaient une place centrale, mais on y faisait aussi obligation de posséder certains savoirs généraux. Les titulaires de ces fonctions étaient en outre tenus de transmettre fréquemment des inventaires sur les réserves de céréales et de vin, de visiter régulièrement les chambres et, surtout, de présenter à la date prescrite les comptes annuels de l’hôpital. Ils avaient pour devoir de faire preuve d’ordre et de bonnes mœurs, en faisant parfaitement leurs prières et en menant une vie exemplaire. Une des raisons d’être des instructions était de bien situer l’activité en question dans la hiérarchie de l’hôpital et d’établir la chaîne des subordinations. Elles se terminaient souvent par de longues formulations passe-partout, incitant par exemple l’employé à entreprendre tout ce qui était du ressort d’un « bon directeur d’hôpital » ou d’un « bon aumônier ».
Une nourriture bien réglée
27Dans toutes les institutions communautaires d’Ancien Régime, et donc aussi dans les hôpitaux, des textes réglementaires établissaient des normes en matière de nourriture et de ravitaillement. Elles fixaient la ration individuelle en fonction des hiérarchies sociales et fonctionnelles au sein de l’hôpital, et comportaient non seulement des prescriptions touchant la préparation des aliments, mais aussi des règles concernant la facturation, les repas de fête et les temps de jeûne121. Il s’agissait souvent de textes autonomes, mais la ration alimentaire des résidents et du personnel était parfois précisée dans le règlement général de l’hôpital122. À Steyr, l’hôpital des bourgeois prévoyait en 1757 pour ses trente-deux résidents le régime suivant : chacun devait recevoir chaque semaine du pain pour une valeur de huit kreuzer et chaque jour une livre de viande de bœuf accompagnée de chou et de raves. Lors des jours maigres, la soupe était accompagnée d’une bouillie au lait et de légumes. Lors des principaux jours fériés, au contraire, on servait du rôti et des plats à base de saindoux. Chaque résident avait droit par ailleurs à une certaine quantité de vin123. Toutes ces dispositions donnaient une expression visible à l’ordre social (par exemple, les clauses déterminaient la place que chacun devait occuper à table), mais des considérations de diététique et de justice sociale n’en étaient pas absentes : les malades recevaient par exemple, en comparaison des résidents « sains », une nourriture de meilleure qualité, adaptée à leur état124. Le directeur n’avait pas seulement à assurer l’approvisionnement régulier des pensionnaires, il était également tenu de faire respecter l’égalité dans la répartition des victuailles. Celui de l’hôpital des bourgeois de Kefermarkt par exemple était obligé en 1607 d’utiliser une règle en bois sur laquelle mesurer au moyen d’une encoche la quantité de viande distribuée aux résidents.
Vue d’ensemble de l’hôpital comme espace réglé
28L’histoire des règlements intérieurs des institutions de bienfaisance pendant toute l’époque moderne est caractérisée par deux tendances : d’une part, les administrations des princes territoriaux s’immiscent de manière croissante dans les hôpitaux des villes et des seigneuries ; d’autre part, l’appareil normatif est de plus en plus réglé et standardisé. Les princes territoriaux de l’époque moderne ont donc exercé une influence toujours plus grande sur les réglementations locales des hôpitaux. De manière un peu rapide, on pourrait dire que les princes ont pris la place des fondateurs locaux. Au fil du temps, les prières qui formaient l’activité quotidienne des résidents étaient moins destinées au fondateur de l’hôpital qu’au bien du prince et de l’État. Tandis que, au début de l’époque moderne, les conseils de ville étaient les maîtres d’œuvre des règlements qu’ils faisaient édicter pour les hôpitaux destinés à leurs propres bourgeois et qui se négociaient entre le conseil et le directeur de l’établissement, l’État absolutiste, dans son désir de réforme, chercha par la suite à s’arroger une position dominante dans ces négociations.
29Pour que l’hôpital puisse bien fonctionner, il était essentiel que les normes soient portées à la connaissance des résidents. Si l’on voulait parvenir à les faire prévaloir – alors que le personnel était très limité –, il apparaissait indispensable de recourir à la collaboration de tous ainsi que de susciter une surveillance réciproque, chacun des résidents contrôlant les autres, le personnel contrôlant les résidents et ceux-ci contrôlant le personnel. Pour ce faire, ils avaient la possibilité de se plaindre auprès du directeur ou même directement au conseil de ville. Les résidents devinrent ainsi un facteur non négligeable dans les relations de pouvoir entre le conseil et l’hôpital, d’autant que les visites d’inspection des autorités princières – au cours desquelles on interrogeait les pensionnaires – se multiplièrent et que la direction de l’hôpital était tenue de rendre des comptes, en fournissant par exemple toutes les factures.
30Au temporel comme au spirituel, la vie intérieure des hôpitaux faisait dans la plupart des cas l’objet de réglementations très détaillées. Alors que ceux qui se trouvaient dans les maisons de travail et de correction n’avaient pas choisi d’être là, les résidents des hôpitaux s’y rendaient volontairement. Pourtant, la comparaison entre les règlements des maisons de correction et ceux des hôpitaux fait ressortir un nombre surprenant de similitudes125. La primauté donnée au travail sur l’oisiveté et à la prière sur les heures béatement passées sur une chaise, l’exactitude de l’emploi du temps quotidien et la multitude de prières et d’offices religieux font apparaître les résidents des hôpitaux comme les rouages surveillés de près d’un dispositif de contrôle – dont il reste toutefois à voir s’il ne s’avérait pas, en pratique, beaucoup plus coulant.
Notes de bas de page
2 Hippolyt Guarinonius, Die Grewel der Verwüstung Menschlichen Geschlechts, 2, Ingolstadt, Angermayr, 1610, p. 1313.
3 Maike Rotzoll, Wolfgang Eckart, « Hospital », dans Friedrich Jaeger (dir.), Enzyklopädie der Neuzeit, Stuttgart, Metzler [désormais EN], vol. 5, 2007, p. 651-655.
4 Johann Heinrich Zedler, Grosses vollständiges Universallexicon aller Wissenschaften und Künste, Leipzig, Zedler, vol. 13, 1739, col. 971 [http://mdz10.bib-bvb.de/ffizedler/zedler2007/index.html, 3. April 2012].
5 Voir par exemple Artur Dirmeier, « Hospitalanlagen in der Stadt – Bürgerspitäler in Bayern », dans Id. (dir.), Organisierte Barmherzigkeit. Armenpflege und Hospitalwesen in Mittelalter und Früher Neuzeit, Ratisbonne, Pustet, 2010, p. 37-67, ici p. 64 (première mention d’hôpitaux en Bavière) ; Thomas Just, Herwig Weigl, « Spitäler im südöstlichen Deutschland und in den österreichischen Ländern im Mittelalter », dans Andrea Sommerlechner, Martin Scheutz, Herwig Weigl, Alfred Stephan Weiss (dir.), Europäisches Spitalwesen. Institutionelle Fürsorge in Mittelalter und Früher Neuzeit, Vienne, Oldenbourg, 2008 (Mitteilungen des Instituts für Österreichische Geschichtsforschung, Ergänzungsband, 51), p. 149-184, ici p. 151-161.
6 Carlos Watzka, Arme, Kranke, Verrückte, Hospitäler und Krankenhäuser in der Steiermark vom 16. bis zum 18. Jahrhundert und ihre Bedeutung für den Umgang mit psychisch Kranken, Graz, Verlag des Steiermärkischen Landesarchivs, 2007 (Veröffentlichungen des Steiermärkischen Landesarchivs, 36), p. 28-29.
7 Josef Moser, Barbara Weber, Martin Scheutz, Waidhofen an der Ybbs und Steyr im Blick. Die « Annalen » (1590-1622) des Schulmeisters Wolfgang Lindner in deutscher Übersetzung, Sankt Pölten, Verein für Landeskunde von Niederösterreich, 2012 (Forschungen zur Landeskunde von Niederösterreich, 35), p. 114, 391, 444-445.
8 Emanuel Braun, « Die mittelalterlichen Spitalskirchen in Altbayern. Studien zur Typologie und zum Verhältnis von Bauaufgabe und Architektur », Jahrbuch des Vereins für Christliche Kunst, 13, 1983, p. 23-38.
9 Ces chiffres et ceux qui suivent proviennent d’Artur Dirmeier, « Hospitalanlagen… », art. cité, p. 61.
10 Karl Weiss, Geschichte der öffentlichen Anstalten, Fonde und Stiftungen für die Armenversorgung in Wien, vol. 1, Vienne, Kraumüller, 1867, p. 95.
11 Klaus Brandstätter, Ratsfamilien und Tagelöhner. Die Bewohner von Hall in Tirol im ausgehenden Mittelalter, Innsbruck, Wagner, 2002 (Tiroler Wirtschaftsstudien, 54), p. 219.
12 Norbert Weiss, « Den Kranken zum Heile ». Geschichte des Landeskrankenhauses Leoben, Leoben, Landeskrankenhaus, 2003, p. 22-30.
13 Wilfried Gramm, « Das Zwettler Bürgerspital in der Frühen Neuzeit », dans Friedel Moll, Martin Scheutz, Herwig Weigl (dir.), Leben und Regulieren in einer kleinen Stadt. Drei Beiträge zu Kommunikation, Fürsorge und Brandgefahr im frühneuzeitlichen Zwettl, NÖ, Sankt Pölten, Verein für Landeskunde von Niederösterreich, 2007 (Forschungen zur Landeskunde von Niederösterreich, 32), p. 207-309, ici p. 269-270.
14 Carlos Watzka, Arme, Kranke, Verrückte…, op. cit., p. 35.
15 Winfried Schulze, Einführung in die Neuere Geschichte, Stuttgart, Ulmer, 2004, p. 78-82.
16 Milos Vec, « Intervention/Nichtintervention. Verrechtlichung der Politik und Politisierung des Völkerrechts im 19. Jahrhundert », dans Ulrich Lappenküper, Reiner Marcowitz (dir.), Macht und Recht. Völkerrecht in den internationalen Beziehungen, Paderborn, Schöningh, 2010, p. 135-160.
17 Barbara Stollberg-Rilinger, « Rang vor Gericht. Zur Verrechtlichung sozialer Rangkonflikte in der frühen Neuzeit », Zeitschrift für Historische Forschung, 28, 2001, p. 385-418.
18 Karl Härter, « Die Verwaltung der “guten Policey” : Verrechtlichung, soziale Kontrolle und Disziplinierung », dans Michael Hochedlinger, Thomas Winkelbauer (dir.), Herrschaftsverdichtung, Staatsbildung, Bürokratisierung. Verfassungs-, Verwaltungs- und Behördengeschichte der Frühen Neuzeit, Vienne, Böhlau, 2010 (Veröffentlichungen des Instituts für Österreichische Geschichtsforschung, 57), p. 243-269.
19 Jakob Wührer, Martin Scheutz, Zu Diensten Ihrer Majestät. Hofordnungen und Instruktionsbücher am frühneuzeitlichen Wiener Hof, Vienne, Böhlau, 2011 (Quelleneditionen des Instituts für Österreichische Geschichtsforschung, 6).
20 Christoph Sonnlechner, « Frühneuzeitliches Waldmanagement im Erzbistum Salzburg. Drei Instruktionen aus der Regierungszeit Wolf Dietrichs von Raitenau », Salzburg Archiv, 27, 2001, p. 175-197.
21 Christian Lackner, « Die Entwicklung der landesfürstlichen Räte, Kanzleien und Verwaltungsapparate im Spätmittelalter und an der Wende zur Neuzeit in den österreichischen Ländern », dans Michael Hochedlinger, Thomas Winkelbauer (dir.), Herrschaftsverdichtung, op. cit., p. 395-406.
22 JosefPauser, « Landesfürstliche Gesetzgebung (Policey-, Malefiz- und Landesordnungen) », dans Id., Martin Scheutz, Thomas Winkelbauer (dir.), Quellenkunde der Habsburgermonarchie (16.-18. Jahrhundert). Ein exemplarisches Handbuch, Vienne, Oldenbourg, 2004, p. 216-256, ici p. 221 ; Gerd Hofmann, Wolfgang Tschan, « Bergordnungen – eine exemplarische Quellenbeschreibung anhand der historischen Bergbauregion Tirol », dans ibid., p. 257-267 ; Christoph Sonnlechner, « Waldordnungen und ergänzende Quellen », dans ibid., p. 268-277.
23 Peter Blickle, Das Alte Europa vom Hochmittelalter bis zur Moderne, Munich, Beck, 2008, p. 236.
24 Gerhard Dilcher, « Die stadtbürgerliche Gesellschaft und die Verrechtlichung der Lebensbeziehungen im Wandlungsprozeß zwischen Mittelalter und Neuzeit », dans Hartmut Boockmann (dir.), Recht und Verfassung im Übergang vom Mittelalter zur Neuzeit 1, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1998, p. 93-114.
25 Mark Hengerer, « Instruktion, Praxis, Reform : Zum kommunikativen Gefüge struktureller Dynamik der kaiserlichen Finanzverwaltung (16. und 17. Jahrhundert) », dans Stefan Haas, Id. (dir.), Im Schatten der Macht. Kommunikationskulturen in Politik und Verwaltung 1600-1950, Francfort-sur-le-Main, Campus, 2008, p. 75-104, ici p. 83.
26 Martin Scheutz, « Bürgerliche Argusaugen auf städtische Ämter und Bedienstete in der Frühen Neuzeit », dans Anita Hipfinger et al. (dir.), Ordnung durch Tinte und Feder ? Genese und Wirkung von Instruktionen im zeitlichen Längsschnitt, Vienne, Böhlau, 2012 (Veröffentlichungen des Instituts für Österreichische Geschichtsforschung, 60), p. 299-335.
27 Stefan Brakensiek, Fürstendiener – Staatsbeamte – Bürger. Amtsführung und Lebenswelt der Ortsbeamten in niederhessischen Kleinstädten (1750-1830), Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 1999 (Bürgertum. Beiträge zur europäischen Gesellschaftsgeschichte, 12), p. 125.
28 Une introduction générale dans Winfried Schulze, « Vom Gemeinnutz zum Eigennutz. Über den Normenwandel in der städtischen Gesellschaft der Frühen Neuzeit », Historische Zeitschrift, 243, 1986, p. 591-626 ; au sujet des champs anciens ou nouveaux couverts par les ordonnances au xvie siècle, voir Thomas Simon, « Gute Policey ». Ordnungsleitbilder und Zielvorstellungen politischen Handelns in der Frühen Neuzeit, Francfort-sur-le-Main, Klostermann, 2004 (Studien zur Europäischen Rechtsgeschichte, 170), p. 253-306.
29 Christoph Sonnlechner, « Frühneuzeitliches… », art. cité, p. 177.
30 Berndt Hamm, « Normative Zentrierung städtischer Religiosität zwischen 1450 und 1550 », dans Andreas O. Weber (dir.), Städtische Normen – genormte Städte. Zur Planung und Regelhaftigkeit urbanen Lebens und regionaler Entwicklung zwischen Mittelalter und Neuzeit, Ostfildern, Thorbecke, 2009 (Stadt in der Geschichte, 34), p. 77-96 ; Id., « Normative Zentrierung im 15. und 16. Jh. Beobachtungen zu Religiosität, Theologie und Ikonologie », Zeitschrift für Historische Forschung, 26, 1999, p. 163-202.
31 L’exemple des ordonnances forestières permet de bien observer ce phénomène : Christoph Sonnlechner, Verena Winiwarter, « Recht und Verwaltung in grundherrschaftlichen Waldordnungen Niederösterreichs und Salzburgs (16.-18. Jahrhundert) », Jahrbuch für Europäisc he Verwaltungsgeschichte, 11, 1999, p. 57-85, ici p. 62.
32 Sur la mutation conduisant du « règlement » à l’« instruction », voir Dietmar Willoweit, « Allgemeine Merkmale der Verwaltungsorganisation in den Territorien », dans Kurt G. A. Jeserich (dir.), Deutsche Verwaltungsgeschichte, 1 : Vom Spätmittelalter bis zum Ende des Reiches, Stuttgart, Deutsche Verlagsanstalt, 1983 (Deutsche Verwaltungsgeschichte, 1), p. 289-383, ici p. 298-300 ; sur la relation tendue entre partisans du bottom up et du top down, voir Gisela Drossbach, « Haec sunt statuta », dans Id. (dir.), Von der Ordnung zur Norm : Statuten in Mittelalter und Früher Neuzeit », Paderborn, Schöningh, 2010, p. 369-385.
33 Martin Scheutz, Alfred Stephan Weiss, « Die Spitalordnung für die österreichischen Hofspitäler im 16. Jahrhundert », dans Martin Scheutz et al. (dir.), Quellen zur europäischen Spitalgeschichte in Mittelalter und Früher Neuzeit/Sources for the History of Hospitals in Medieval and Early Modern Europe, Vienne, Böhlau, 2010 (Quellenedition des Instituts für Österreichische Geschichtsforschung, 5), p. 299-349.
34 Martin Scheutz, Alfred Stephan Weiss, « Die Spitalordnung… », art. cité, p. 347 (ill.). À propos du règlement interne de l’hôpital de Knittelfeld, qu’il fallait lire régulièrement en public, voir Maria Gröchenig, Das Bürgerspital in Knittelfeld (1429-1784), mémoire de diplôme, Graz, 1992, p. 95-99.
35 Martin Scheutz, Alfred Stephan Weiss, Österreichische Spitalordnungen und Instruktionen der Neuzeit, Vienne, Böhlau, 2014 (Quelleneditionen des Instituts für Österreichische Geschichtsforschung) (en préparation) ; cité dorénavant sous la forme Scheutz et Weiss, Spitalordnung.
36 Falk Bretschneider, « Das “gemeinsame Haus”. Personal und Insassen in den Zuchthäusern der Frühen Neuzeit », dans Id., Martin Scheutz, Alfred Stephan Weiss (dir.), Personal und Insassen von « Totalen Institutionen » – zwischen Konfrontation und Verflechtung, Leipzig, Leipziger Universitätsverlag, 2011 (Geschlossene Häuser, 3), p. 157-195, ici p. 162-169.
37 Scheutz et Weiss, Spitalordnung, no 38.
38 Ibid., no 54.
39 Ibid., no 127.
40 Ibid., no 65.
41 Ibid., no 136.
42 Ibid., no 55.
43 Ibid., no 144.
44 Ibid., no 66.
45 Ibid., no 144.20.
46 Ibid., no 90.3.7.
47 Ibid., no 28.14.
48 Ibid., no 27.1 [1618].
49 Ibid., no 89.1.
50 Ibid., no 38.1.
51 Ibid., no 127.1.
52 Ibid., no 113.3.
53 Ibid., no 27.2 [1618].
54 Ibid., no 90.1 [1762].
55 Ibid., no 125.2.
56 Ibid., no 28.2.
57 Ibid., no 54.4.
58 Ibid., no 125.3.
59 Ibid., no 28.11.
60 Ibid., no 125.1.
61 Ibid., no 55.1 ; no 90.3-4.
62 Ibid., no 55.2 ; no 143.7.
63 Ibid., no 113.13-14.
64 Ibid., no 55.11.
65 Ibid., no 125.
66 Dietmar Bleidick, « Holz », dans EN, vol. 5, 2007, p. 61-619.
67 Scheutz et Weiss, Spitalordnung, no 143.2.
68 Ibid., no 125, supplément ; no 127.6.
69 Ibid., no 89.6. Dispositions similaires : no 90.3.3.
70 Ibid., no 38.5.
71 « Propreté des salles communes et des chambres » : ibid., no 28.10.
72 Ibid., no 38.3.
73 Ibid., no 27.8.
74 Ibid., no 55.10.
75 Ibid., no 54.5.
76 Ibid., no 55.6.
77 Ibid., no 144.1.
78 Ibid., no 27.9.
79 Ibid., no 127.7.
80 Ibid., no 144.18.
81 Ibid., no 125.7.
82 Ibid., no 27.10.
83 Ibid., no 90.3.3.
84 Josef Ehmer, Edith Saurer, « Arbeit », dans EN, vol. 1, 2005, p. 507-533, ici p. 509-510.
85 Scheutz et Weiss, Spitalordnung, no 144.13.
86 Ibid., no 55.7.
87 Ibid., no 38.6.
88 Ibid., no 125.5 ; no 144.16 ; no 192.6.
89 Un tronc apposé à l’établissement : ibid., no 27.12.
90 Ibid., no 55.9.
91 Ibid., no 113.6.
92 Ibid., no 144.6.
93 Ibid., no 125.6.
94 Ibid., no 28.12.
95 Ibid., no 90.3.6.
96 Ibid., no 28.7-8.
97 Ibid., no 28.8.
98 Ibid., no 27.4.
99 Ibid., no 127.3.
100 Ibid., no 27.3.
101 Ibid., no 143.1 : l’hôpital des bourgeois à Zwettl prévoit une prière à 6 heures du matin, à midi, et à 6 heures du soir ; ibid., no 144.2-9 : l’hôpital des bourgeois de Vienne prescrit une prière le matin dans la grand-salle (à 6 heures en été, 7 heures en hiver), à 9 heures une messe avec rosaire récité à haute voix, à 10 heures une prière à table, à 11 heures le rosaire dans la grand-salle, une bénédiction dans l’église paroissiale avec rosaire et litanies de Notre-Dame de Lorette à 15 heures 30 en hiver et 16 heures en été, une prière à table à 16 heures en hiver et 17 heures en été, et enfin, à 18 heures en hiver et 19 heures en été, la prière du soir comportant sept Notre Père et sept Ave ; le dimanche, la litanie angélique, le samedi, le rosaire marial.
102 Ibid., no 28.3.
103 Ibid., no 90.3.1.
104 Ibid., no 54.3.
105 Ibid., no 28.1.
106 Ibid., no 192.2.
107 Ibid., no 192.3-5.
108 Ibid., no 27.5.
109 Ibid., no 28.4.
110 À propos de la « pompe sacrale » catholique étudiée à l’exemple de la messe, voir Peter Hersche, Muße und Verschwendung. Europäische Gesellschaft und Kultur im Barockzeitalter, Fribourg/ Bâle/Vienne, Herder, 2006, p. 580-587.
111 Scheutz et Weiss, Spitalordnung, no 144.3.
112 Ibid., no 28.5.
113 Ibid., no 127.2
114 Ibid., no 127.4.
115 Ibid., no 90.3.
116 Ibid., no 38.2.
117 Ibid., no 27.7.
118 Ibid., no 28.6.
119 Ibid., no 54.2. Voir la partie « Édition », no 192.1 : Beicht- und Kommunions-zeiten : Ostern, Pfingsten, Weihnachten und Christtag, Dreifaltigkeitstag und die sieben Frauentage.
120 Ibid., no 55.5.
121 Barbara Krug-Richter, « Gemeinschaftsverpflegung », dans EN, vol. 4, 2006, p. 406-409.
122 Scheutz et Weiss, Spitalordnung, no 54.6 ; no 90.
123 Ibid., no 113.2
124 Ibid., no 38.8.
125 Voir, entre autres, Gerhard Ammerer, Alfred Stephan Weiss (dir.), Strafe, Disziplin und Besserung, Österreichische Zucht- und Arbeitshäuser von 1750 bis 1850, Francfort, Lang, 2006, p. 252- 266 (règlement de la maison de correction d’Innsbruck en 1769), ici p. 274-277 (établissement pénitencier de Linz) ; Bernard Stier, Fürsorge und Disziplinierung im Zeitalter des Absolutismus. Das Pforzheimer Zucht- und Waisenhaus und die badische Sozialpolitik im 18. Jahrhundert, Sigmaringen, Thorbecke, 1988 (Quellen und Studien zur Geschichte der Stadt Pforzheim), p. 97-158 ; Falk Bretschneider, Gefangene Gesellschaft. Eine Geschichte der Einsperrung in Sachsen im 18. und 19. Jahrhundert, Constance, UVK, 2008 (Konflikte und Kultur, 15), p. 70-102, 128-167.
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