Matérialité et formes
p. 29-30
Texte intégral
1Cette première partie intitulée « Matérialités et formes » propose une série de communications qui décrivent les dispositifs visuels et textuels permettant d’agréger les éléments que la liste dénombre. Elle présente donc une exploration des fondements matériels de l’efficience de cette dernière comme forme logico-graphique, ainsi que des lieux, des espaces graphiques et des contextes de la mise en signes de l’énumération.
2Le terme « lieux » de la liste désigne le support matériel de l’écriture, mais également le lieu social de l’installation scripturale, qu’il s’agisse d’un objet ou d’un monument. La localisation et les conditions concrètes de mise en place de la liste forment à la fois un contexte de production singulier et un protocole de réception inscrit dans la matérialité même de l’objet : elles circonscrivent par conséquent une efficacité sociale. Si les choix des lieux et des matières mobilisés entraînent des changements dans la configuration et dans les usages des listes, les textes présentés ici s’efforcent d’examiner également la permanence formelle des compositions face aux phénomènes de copie des textes ou de leur transfert d’un support à l’autre. Ces réflexions viennent enrichir l’état de l’art concernant le développement graduel d’une grammaire de la lisibilité – pour reprendre l’expression de Malcolm Parkes1 – et de formes de tabularité entendues comme une aptitude à spatialiser l’information sur un support, selon des types d’ordonnancement et de hiérarchie graphiques qui peuvent s’incarner dans des listes ou des diagrammes (Ayelet Even-Ezra).
3L’analyse de corpus qui incluent des changements de lieux – supports ou lieux sociaux – permet d’en observer les effets induits, en particulier lorsqu’ils affectent un même texte matérialisé dans les différents témoins de sa tradition manuscrite. Ces transformations peuvent intervenir au long des étapes de la genèse d’un texte – passage du brouillon à une première version stabilisée, transcription de supports éphémères sur des supports pérennes, etc. –, ou lorsqu’un texte est transcrit dans un nouveau contexte codicologique ou inscrit sur un nouveau support. Les écrits exposés constituent de ce point de vue un domaine d’investigation fécond, en particulier lorsque les textes épigraphiques sont conservés sous d’autres formes matérielles – statuts communaux, listes de biens patrimoniaux, etc. – à partir desquelles les transformations successives opérées par les mises en liste peuvent être établies (Elisa Pallottini, Stefano Riccioni). Tout en impliquant des pratiques d’autographie et de délégation d’écriture propres aux scripteurs et aux institutions, elles résultent de la résistance du support, du statut particulier des textes et des manuscrits lié à la distribution de leurs usages sociaux, mais également du mode d’insertion de la liste dans le réseau textuel et sémantique qui l’enserre.
4Les communications regroupées dans les pages qui suivent analysent enfin les moyens et les dispositifs employés pour mettre en forme la liste afin qu’elle soit conçue, lue et utilisée en tant que telle. Cela concerne aussi bien la mise en page que les choix de graphies, l’usage des signes diacritiques, le rapport entre surface d’écriture et surface écrite, etc. Au-delà du lieu singulier de chaque liste, les cas analysés permettent de saisir le fonctionnement réticulaire de l’écriture qui s’étend d’un support à l’autre au gré des mises en liste. Les connecteurs utilisés pour agréger les items sont très variés. Ils peuvent être linguistiques ou graphiques, textuels ou visuels, des mots, des signes et des dispositions graphiques dans la page pouvant jouer une fonction analogue de topogrammes. Certaines listes rencontrées font également fonctionner un système de classement arborescent avec des niveaux hiérarchiques distincts. Les analyses de ces formes particulières de listes-diagrammes proposent un relevé des systèmes linguistiques et visuels utilisés pour produire classement et hiérarchie, ainsi qu’une description des connecteurs et des mises en page dont elles font usage.
Notes de bas de page
1 Malcolm B. Parkes, Pause and Effect: an Introduction to the History of Punctuation in the West, Berkeley/Los Angeles, University of California Press, 1993.
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