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Chapitre 6. Art et culture dans les relations franco-soviétiques

p. 177-202


Texte intégral

1Moins quantifiables que les liens commerciaux, les relations culturelles occupent une place capitale dans l’histoire des échanges bilatéraux, car elles donnent la mesure d’une influence réciproque, d’une domination ou d’une résistance à celle-ci, elles mettent en jeu des préjugés idéologiques propres à chacun des deux pays et souvent, toute une mythologie, une imagerie populaires.

2Le cas franco-soviétique est à cet égard complexe car à travers des canaux patiemment forgés par les deux Etats, des relations se sont nouées, fragiles et difficiles, qui se sont heurtées du côté français à un mélange de fascination et de rejet et du côté soviétique, à une francophilie populaire qui contraste avec la prudence des autorités du Kremlin...

3Pour tenter d’étudier ces relations culturelles dans leur ampleur et leur complexité, l’on a tout d’abord tenté de cerner, au travers des déclarations et des communiqués, la place occupée par les relations culturelles dans la stratégie diplomatique de chacun des deux pays ; l’on s’est ensuite arrêté à l’étude des deux vecteurs privilégiés de la culture que constituent la « langue » et le « livre » : parce qu’elle est le témoignage d’une influence passée et le gage de toute influence présente et future, la diffusion d’une langue et sa popularité dans un pays constituent des baromètres essentiels pour mesurer l’ampleur du culturel dans toute politique extérieure. L’étude du livre, vecteur-clef de la communication et des échanges intellectuels, a permis de compléter cette approche et de la préciser. Enfin, dans un troisième temps, l’on s’est penché sur les autres formes de communication artistique et culturelle, plus immédiates et plus populaires que sont les arts décoratifs (peinture, scupture...), le théâtre, la danse, la musique et le cinéma...

I. – L’enjeu culturel

4De part et d’autre, le champ culturel est considéré depuis la fin des années 50, comme un instrument privilégié de rapprochement des deux blocs. Au tout début des années 60, cette analyse est reprise et accentuée.

La « diplomatie culturelle »1 soviétique

5Depuis 1955-56 en effet, l’U.R.S.S. s’est engagée dans une politique de rapprochement culturel qui vise à diffuser en Occident l’image d’un pays résolument pacifiste et progressiste, ouvert aux échanges artistiques et intellectuels.

6Les événements hongrois de 1956 et leur impact sur l’opinion occidentale contrarient pour un temps les desseins soviétiques mais dès 1957-58, l’« offensive culturelle » reprend et s’enrichit d’instruments nouveaux : le Comité d’Etat pour les Relations Culturelles avec les Pays Etrangers créé en mai 1957, l’Union des Sociétés Soviétiques d’amitié née en février 1958.

7Le statut même du Comité – il est directement rattaché au Conseil des ministres et organisé en sections nationales, agit en étroite collaboration avec le ministère des Affaires étrangères – souligne combien l’enjeu culturel fait alors l’objet des attentions particulières du pouvoir.

8Quant à l’Union des Sociétés Soviétiques d’amitié, dirigée par Nina Popova qui lui apporte son aura d’ex Présidente du Comité féminin antifasciste, elle est constituée en janvier 1959 de 35 sociétés nationales d’amitié qui, par leurs correspondantes en Occident (Italie-U.R.S.S., France-U.R.S.S.), travaillent à tisser un réseau favorable à la diffusion de la culture soviétique, mais aussi, par là, à celle de la propagande venue de Moscou...

9Dans cette offensive, la France, de par ses liens traditionnels avec Moscou et sa place sur le continent européen, tient une place importante qu’illustrent bientôt la variété et l’ampleur relative des échanges culturels franco-soviétiques marqués sous la IVe République par l’adoption d’un premier protocole bilatéral et la mise en place d’une commission mixte.

10Les problèmes coloniaux dans lesquels se débat l’Etat français, et en particulier la guerre d’Algérie, mettent toutefois un terme brutal à ce rapprochement et conduisent à une mise en sommeil du protocole de 1957 qui, à l’heure des violentes diatribes diffusées par la presse soviétique à l’encontre du gouvernement français, n’est plus de mise.

11Toutefois, au lendemain des accords d’Evian et plus encore à partir de 1964, les nouvelles autorités soviétiques renouent avec les principes khrouchtcheviens : à l’heure de la détente, qui voit, non pas l’extinction de la lutte entre l’Est et l’Ouest, mais le déplacement de cette dernière vers des champs nouveaux, la culture devient comme le souligne Albert Solon, un instrument privilégié de la diplomatie soviétique :

« ... L’action culturelle soviétique est la traduction et l’expression du défi économique et politique lancé par la « patrie » du socialisme : il s’agit toujours de démontrer la supériorité d’un système ; les objectifs culturels, idéologiques, politiques se confondent. »2

12C’est pourquoi, si à la fin de l’année 1964, la nouvelle troïka au pouvoir rompt avec certaines des orientations retenues par N. Khrouchtchev, elle ne remet en cause ni le principe de la « diplomatie culturelle » lancée par ce dernier ni les institutions créées en ce sens et elle s’inscrit au contraire dans cette double continuité.

13Or, au début des années 60, ces objectifs soviétiques coïncident avec la volonté française de donner une dimension nouvelle à la politique culturelle du pays.

Une politique culturelle de grandeur

14Au seuil des années 60, la politique culturelle de la France est, dans ses objectifs comme dans ses instruments, indubitablement liée aux grands principes de politique extérieure retenus par le général de Gaulle.

15Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale qui a écrasé l’Europe et l’a réduite à un objet de partage entre les deux super-Grands, qui a porté atteinte à la France en la reléguant dans le concert des puissances moyennes et miné le prestige de la langue française en réhaussant celui de l’anglais, la diplomatie gaullienne entreprend de lutter contre la décadence européenne et le déclin français, cherchant à affermir « une certaine idée de la France », plus conforme à son passé prestigieux.

16Dans l’optique de cette renaissance, voire de cette « résurrection » française, la culture qui a toujours constitué un atout pour la France, devient une arme privilégiée au service de la grandeur du pays. Le général de Gaulle assigne en effet à la pensée française « avant-garde ailée de la patrie »3, un but élevé puisqu’elle doit « contribuer à résoudre le grand problème politique, social, moral de notre temps, qui consiste à sauver et à faire vivre la liberté, à l’intérieur de l’organisation rigide et belliqueuse que le machinisme impose à la société. »4

17La culture française répond donc à un dessein messianique planétaire – l’élévation spirituelle et morale de tous les peuples, dans la tradition ouverte par la philosophie des Lumières et la révolution de 1789 – qui s’inscrit parfaitement dans le grand dessein diplomatique du général de Gaulle.

18Ces accents messianiques se retrouvent également dans la pensée et les déclarations d’André Malraux, ministre de la Culture de 1958 à 1969. En mars 1948, André Malraux écrivait dans son Appel aux Intellectuels :

« La France n’a jamais été plus grande que lorsqu’elle parlait pour tous les hommes. »5

19D’une manière plus concrète, l’élévation en 1958 au rang jamais égalé jusque-là de ministère d’Etat, de l’administration de la culture et la volonté nouvelle d’une planification des échanges culturels inaugurée également en 1958 par l’institution du premier plan quinquennal d’expansion culturelle apparaissent d’emblée comme les signes tangibles d’une véritable offensive visant à réhausser le prestige culturel de la France.

20Cependant, si cette offensive se veut planétaire, elle doit tout d’abord, d’après les priorités édictées dans les plans d’expansion, viser les zones traditionnelles de la francophonie, – Afrique et Europe –.

21En Europe, à l’heure de la coexistence naissante, il s’agit avant tout de faire des échanges culturels, un instrument de dialogue qui facilitera ensuite le dialogue politique. Cette préoccupation déjà présente sous la IVe République, s’accentue sous la présidence gaullienne. Le triptyque « entente, détente, coopération », prôné par la diplomatie du général, doit s’appliquer au champ culturel sans lequel la France ne saurait concevoir de véritable rapprochement avec aucune nation. L’ouverture culturelle devra favoriser l’ouverture politique.

22Ces principes, qui font de la culture un instrument privilégié au service de la grandeur française, prévalent également durant la présidence pompidolienne ; certes, les circonstances et les moyens retenus diffèrent : Jacques Duhamel n’a pas la personnalité de son brillant prédécesseur, le ministère de la Culture n’est plus un ministère d’Etat. Mais Georges Pompidou, amateur éclairé d’art, sera personnellement à l’origine du projet Beaubourg qui vise à faire de Paris un phare international de l’art contemporain et retrouve ainsi l’équation gaullienne « grande politique culturelle égale diplomatie de la grandeur ». Comme le général enfin, il se montre dans l’optique de la détente, soucieux de nouer avec l’Est européen et l’U.R.S.S. au premier plan, des relations culturelles étroites.

23Etat français et Etat soviétique accordent donc au début des années 60, une place très importante aux problèmes culturels. Ce souci partagé de promouvoir des échanges actifs suscite vite déclarations et prises de position officielles.

Reprise et essor des relations culturelles franco-soviétiques

24Le communiqué franco-soviétique publié à l’issue de la visite en U.R.S.S. de Maurice Couve de Murville en novembre 1965, marque officiellement la reprise des relations culturelles bilatérales, après le sommeil de la fin des années 50 :

« Les relations culturelles franco-soviétiques ont été examinées et l’importance que prend leur développement pour la compréhension mutuelle des deux pays a été soulignée. Il a été estimé que de nouvelles manifestations et de nouveaux contacts, destinés à resserrer les rapports de la France et de l’U.R.S.S. (...) devraient succéder dans les années à venir aux échanges de 1965. »6

25La déclaration franco-soviétique du 30 juin 1966 publiée lors du séjour à Moscou du général de Gaulle, confirme l’orientation précédemment adoptée puis, en juillet 1967, le voyage du premier ministre français permet de diversifier les domaines d’échanges : si dans le communiqué du 8 juillet, les deux pays réaffirment leur volonté de développer leurs relations, d’une manière plus nouvelle, le texte insiste concrètement sur la nécessité de l’apprentissage des langue russe et française.

26Au début de la période pompidolienne, les déclarations au sommet concernent essentiellement les domaines politique et économique, les marques d’attention accordées au culturel sont plus rares et il faut attendre la « déclaration » du 13 octobre 1970 pour qu’un paragraphe conséquent, invitant à une nouvelle dynamique et insistant particulièrement sur le champ scolaire et linguistique, soit de nouveau consacré au sujet.7

27L’énoncé des principes de la coopération bilatérale adopté le 30 octobre 1971 vient renforcer et élargir le texte précédent, marquant sans nul doute une évolution dans la démarche du gouvernement français : alors que cinq lignes seulement sont consacrées aux échanges économiques et commerciaux, (paragraphe 12) un très long article s’intéresse au culturel, privilégiant désormais la diffusion de l’information et la liberté des contacts et des échanges. Toutefois, à partir de 1973, les communiqués officiels témoignent d’un net refroidissement des relations culturelles bilatérales : les deux textes publiés à l’issue des sommets de 1973 et 1974 n’apportent rien de neuf aux échanges culturels : si l’importance attachée à ce domaine est toujours rappelée, le ton est désormais beaucoup plus formel, quasi « routinier » : en janvier 1973, les deux parties « estiment que la coopération, dans le domaine de la culture peut être élargie »8 ; en mars 1974, le communiqué conjoint se contente de rappeler l’importance que revêtent pour les deux pays, les textes précédemment signés ; la dynamique culturelle s’est à l’évidence essoufflée et les innovations sont dans ce domaine inexistantes ; les espoirs suscités par la conférence d’Helsinki semblent enterrés, alors même que l’Acte Final n’a pas encore été signé, témoignant ainsi d’un certain échec du processus...

28Ces communiqués ont donc défini des principes généraux. A partir de ces principes, des directives concrètes ont été arrêtées.

29Deux accords ont été conclus au cours de la décennie, tous deux à l’ère gaullienne.

30L’accord du 5 novembre 1966 conclu entre l’O.R.T.F. et la télévision soviétique constitue l’aboutissement logique de la politique de coopération bilatérale menée en matière de télévision en couleurs et de diffusion du procédé SECAM, puisque les deux parties s’y déclarent favorables à une coopération en matière de programmes télévisés. L’accord du 8 juillet 1967 a quant à lui établi de nouvelles relations bilatérales dans le domaine cinématographique, encourageant la coproduction et l’échange de films entre les deux pays.

31Pourtant, les deux accords signés ne sont que des accords « sectoriels ». Pourquoi cette « indigence » de textes au moment où l’U.R.S.S. et la France se déclarent largement favorables à une politique de rapprochement ?

32D’après les témoignages des acteurs privilégiés de la période, – les ambassadeurs feu Roger Seydoux et Jacques Vimont9 –, il semble que le gouvernement français ait souhaité la signature d’un accord culturel bilatéral sous la présidence du général de Gaulle, mais le prix à « payer » par les Soviétiques leur paraissait alors trop élevé en regard des avantages escomptés : la détente s’amorçait à peine, les autorités du Kremlin craignaient d’aller trop loin. Au contraire, au fil des années 70, les Soviétiques, rassurés sur le cours des événements – ils maîtrisent parfaitement l’ouverture à l’Occident –, proposent à leur tour la signature d’un accord, sans recevoir de Paris un écho favorable : à tout accord rigide, difficile à conclure, les autorités françaises préfèrent désormais la structure plus souple, plus négociable, du protocole d’accord...

33Formule privilégiée du dialogue, les protocoles culturels jalonnent donc l’histoire du rapprochement et ont donné aux échanges un cadre institutionnel que la bonne volonté et l’expérience mutuelle ont précisé et enrichi au fil des années. Préparés et rédigés par les instances diplomatiques des deux pays éventuellement conseillées par leurs spécialistes des ministères de la Culture, adoptés tous les deux ans, les protocoles d’accords bilatéraux ont ponctué le rythme des manifestations culturelles bilatérales ; ils n’ont pas eu force de loi et ont plutôt constitué une somme de directions et de recommandations que chacune des deux parties a pu ensuite appliquer ou non. Ils ont joué une double fonction, élaborant d’une part des principes devenus fondamentaux, – comme celui de la stricte réciprocité des échanges –, et arrêtant d’autre part des propositions concrètes de travail.

34D’après les divers documents adoptés au cours de la décennie, il apparaît clairement que les relations culturelles ont été l’objet de l’attention particulière des Etats français et soviétique, cette attention s’étant inscrite dans des protocoles et des accords régulièrement signés.

35Dans ce contexte, il convient d’observer maintenant la réalité concrète des relations culturelles bilatérales. Pour ce faire, l’on s’intéressera d’abord aux deux vecteurs privilégiés de la culture que constituent la « langue » et le « livre », avant d’en venir aux relations artistiques.

II. – Deux vecteurs privilégiés de la culture : la langue et le livre

La diffusion du russe et du français à l’ère de la détente

36La diffusion d’une langue peut exprimer un rapport de force ou d’intérêt entre deux nations (cas de nos anciennes colonies soumises à l’apprentissage du français ; cas des Démocraties Populaires où le russe a été obligatoirement enseigné comme première langue étrangère), mais il peut aussi traduire un attachement à la culture, aux valeurs de l’autre, comme le montre l’exemple de la noblesse russe des XVIIIe et XIXe siècles, argumentant en français dans ses salons.

37Les relations franco-soviétiques sous la Ve République ne se caractérisent ni par un rapport de force politique, ni par une dépendance économique d’un pays à l’égard de l’autre ; en ce sens, l’ampleur de la diffusion du russe en France et du français en U.R.S.S. paraît être un bon indice du rayonnement culturel exercé par chacun des deux pays sur l’autre...

38Dans cette étude, l’on s’est largement référé aux archives du ministère français de l’Education Nationale et aux dossiers que ce ministère a établis en collaboration avec le Quai d’Orsay10, évaluant pour la France puis l’U.R.S.S., la situation des langues russe et française.

L’enseignement du russe en France

39Dans la décennie de la détente, le russe, comme toutes les langues étrangères, n’est enseigné en France qu’à partir du cycle secondaire, en première ou seconde langue jusqu’en 1969, et en première, seconde ou troisième langue, à partir de cette date.11

40En 1961 -62, le nombre des élèves apprenant le russe dans l’enseignement secondaire ne représentait que 0,7 % de la population scolaire. Au cours des années 60, l’on observe une certaine progression des effectifs qui atteignent 1,6 % en 1969-1970, mais les années 70 marquent de nouveau un repli puisqu’on 1974, les « russisants » ne constituent plus que 0,9 % des effectifs globaux.12

41Le russe est donc resté en France, une langue marginale, peu prisée des collégiens français et de leurs familles.

42D’après l’étude de Jacqueline de Proyart13, des obstacles essentiellement psychologiques expliquent largement cette situation : réputée difficile, la langue russe apparaît aux familles françaises comme peu utile et dès lors que l’on n’est pas soi-même d’origine russe, comme peu attrayante, compte tenu de la distance qui sépare les deux pays et de l’absence de tourisme français en U.R.S.S. Elle semble d’autre part offrir des perspectives économiques et culturelles limitées, à la différence des langues occidentales – l’anglais, mais également l’allemand, l’espagnol ou l’italien – perçues comme des instruments indispensables, tant à l’heure de la construction européenne que de l’intensification de nos échanges avec les Etats-Unis –.

43Au mépris des liens culturels séculaires qui ont uni la France et la Russie, au mépris de la place politique et économique occupée par l’Union Soviétique sur la scène mondiale, la langue russe ne parvient donc pas dans les années 60-70 à capter l’intérêt des familles françaises.

44Expression d’un préjugé défavorable à ce qui n’est pas occidental, cette réalité nous semble très clairement illustrer la cassure de 1944-45 et le choix idéologique et culturel alors réalisé ; à l’heure de l’intensification des échanges culturels et humains, à l’heure de la détente et du rapprochement politique des deux Europes, l’U.R.S.S. communiste reste étrangère aux Français qui n’éprouvent ni le désir ni la nécessité d’apprendre le russe, confortés dans ce refus par l’apprentissage réputé difficile de cette langue et les faibles perspectives d’emploi offerts aux russophones.

45Retrouve-t-on en Union Soviétique, une même indifférence à l’égard du français ou le français est-il l’objet d’une engouement des Soviétiques ? A la lecture des archives françaises de la période, la situation semble en fait plus complexe.

Le français en Union Soviétique

46Pas plus qu’aujourd’ hui, le gouvernement soviétique n’a publié pendant la période de statistiques sur cette question, à l’exception de quelques chiffres communiqués par M. Elioutine, ministre de l’Enseignement Supérieur et Secondaire Spécialisé, dans un entretien accordé à Literatournaya Gazeta, le 10 mars 1976.

47Outre cette première source, les données que nous avons utilisées dans cette étude sont donc d’origine française et extraites des archives du ministère de l’Education nationale. Trois textes datés de 1972 ont principalement retenu notre attention : un rapport adressé à Maurice Schumann par les services culturels de l’Ambassade française à Moscou14, une note rédigée par le service des Relations Internationales du ministère de l’Education nationale à l’attention du ministre15 et un compte rendu de voyage établi par Georges Tallon, Inspecteur Général de l’organisation solaire, de passage à Moscou en mai16.

48En U.R.S.S., l’apprentissage de telle ou telle langue vivante est largement conditionné par le lieu de résidence de la famille, chaque établissement scolaire n’enseignant qu’une seule langue étrangère. La répartition nationale des langues enseignées est donc organisée, maîtrisée par l’Etat soviétique qui impose ses priorités, à la différence du système français où le choix appartient aux familles, plusieurs langues étant généralement proposées dans un même établissement. En conséquence, si en France, le rayonnement d’une langue dépend largement de l’opinion, en U.R.S.S., il reflète essentiellement les priorités édictées par l’Etat soviétique.

49La prépondérance de l’allemand – près de la moitié des effectifs – constitue le fait majeur révélé par ces données ; il s’explique sans nul doute par la nature spécifique de cette langue qui se trouve à l’intersection des deux systèmes socio-politiques européens : depuis les années 50, des liens politiques et économiques privilégiés unissant l’U.R.S.S. à la R.D.A. – son premier client et fournisseur – et au seuil des années 60, l’amorce d’un dialogue politique et l’intensification des échanges commerciaux ont conduit à un net rapprochement entre l’Union Soviétique et l’Allemagne Fédérale...

50A contrario, l’anglais et le français qui ne sont pas des instruments de communication à l’intérieur du bloc socialiste, sont moins enseignés : l’anglais qui occupe la seconde place ne concerne que 35 % des élèves et le français, à la troisième place, touche 14 % des adolescents soviétiques.

51Ce dernier pourcentage est relativement important, si l’on considère le poids respectif de la France et des Etats-Unis sur la scène internationale. Il s’explique largement par le souci soviétique de former des francophones – ingénieurs, techniciens et enseignants – destinés aux pays du Tiers-Monde – Afrique du Nord, Proche-Orient...) où l’U.R.S.S. tente, tout au long des années 60-70, d’accroître son influence politique, économique et idéologique.

52En 1972 comme durant toute la période, la bonne position du français dépasse donc le strict contexte des relations bilatérales et ne peut être simplement imputée à la santé, bonne ou mauvaise, des échanges franco-soviétiques.

53Cette répartition de l’enseignement des langues, valable pour l’ensemble du territoire soviétique, – prééminence de l’allemand, situation moyenne de l’anglais et du français –, est par ailleurs loin d’être uniforme :

54L’implantation de l’allemand est forte dans les petites écoles des campagnes et des villes de moyenne dimension alors que l’anglais et le français sont mieux représentés dans les capitales des républiques et à Moscou.

55Par ailleurs, en ce qui concerne les écoles secondaires de Moscou spécialisées dans l’enseignement des langues étrangères, l’anglais domine largement les autres langues puisque en 1972, l’on a la répartition suivante : 48 écoles enseignent l’anglais à 26 000 élèves

14l’allemand 6 250
13le français 6 000.

56Ainsi, dès lors qu’il s’agit de former des techniciens spécialistes d’une langue étrangère, l’anglais devient largement prépondérant ; par contre, dans le cadre d’un enseignement de type général, l’allemand reste au premier rang, tandis que le français occupe toujours la troisième place.

57La qualité de cet enseignement est incontestable aux yeux de tous les observateurs français ayant séjourné en U.R.S.S. Parmi eux, Georges Tallon, Inspecteur Général de l’organisation scolaire en visite dans la capitale soviétique du 3 au 7 mai 1972, insiste dans son rapport sur l’efficacité d’un enseignement pourtant traditionnel dans ses méthodes. Toutefois, cette bonne connaissance est acquise à travers un cadre idéologique qui d’après Georges Tallon et tous les observateurs français qui lui ont succédé à Moscou, ne favorise pas le développement du sens critique...

58Cette rigidité de l’enseignement et ce manque d’esprit critique expliquent largement la nature des traductions littéraires effectuées par la suite par ces élèves devenus des professionnels de la langue française : Lily Denis, elle-même traductrice de romans soviétiques, impute à l’enseignement reçu, l’académisme des traductions d’œuvres romanesques qui s’en trouvent affaiblies et appauvries, alors que les techniques de la langue française sont parfaitement acquises...17

59Ainsi, alors qu’en France le choix du russe a essentiellement répondu à des critères « privés », propres aux familles, en Union Soviétique l’apprentissage du français a été essentiellement subordonné aux priorités fixées par l’Etat. Si l’enseignement du russe en France est très marginal, (1 % des effectifs), loin derrière l’enseignement des autres langues européennes, en Union Soviétique, le français, avec 14 % des effectifs, occupe la troisième place, derrière l’allemand et l’anglais. L’on observe donc là un très grand contraste, les Soviétiques se montrant beaucoup plus attachés au français que les Français au russe. Toutefois, dans les deux pays, la diffusion du russe et du français est restée très en retrait par rapport à d’autres langues jugées plus directement utilitaires...

60Au-delà de ce constat brutal, les questions linguistiques ont tout de même pu favoriser le rapprochement des deux peuples grâce à l’institution en 1957 de « lecteurs » et d’« assistants » qui a permis d’établir des contacts entre individus et d’échanger des points de vues. Mais, de par les faibles effectifs concernés – une cinquantaine de personnes de part et d’autre –, et en l’absence de tout autre relais, – le tourisme franco-soviétique reste très marginal –, les échanges linguistiques n’ont pas été porteurs d’une véritable dynamique.

61A l’ère de la détente, la langue n’a donc pas été un vecteur culturel privilégié entre Français et Soviétiques, comme elle avait pu l’être au XVIIIe et XIXe siècles entre élites françaises et élites russes...

62Qu’en a-t-il été du livre ? A-t-il constitué, dans sa version originale ou traduite, un vecteur dynamique du rapprochement bilatéral ou retrouve-ton au contraire, une situation mitigée, comme dans le domaine des échanges linguistiques ? C’est ce bilan qu’il convient maintenant de dresser.

Livres et littérature dans les échanges franco-soviétiques

63Alors que la population soviétique est cinq fois plus nombreuse que la population française, la France importe à l’ère de la détente, près de deux fois plus d’ouvrages qu’elle n’en exporte : en 1969 par exemple, la valeur globale des importations représentait 1,2 millions de francs, alors que les exportations n’atteignaient qu’une valeur de 700 000 francs.18

64Parmi les livres importés, et d’une manière constante tout au long de la période, environ 25 à 30 % sont constitués par des livres scientifiques, techniques et professionnels et le reste, environ 60 %, par des ouvrages de lettres et sciences humaines (dont un tiers est constitué par des ouvrages de littérature générale).

65A contrario, la nature des livres exportés par la France est radicalement différente, comme en témoigne le rapport de Claude Payement adressé au Conseil Economique et Social19. Cette étude met tout d’abord en valeur la très faible part détenue par les « humanités classiques » : littérature générale, sciences humaines et beaux-arts ne représentent que 14 % du total en 1972 et 16 % en 1974 ; en 1973, la part des livres techniques, scientifiques et professionnels est onze fois plus élevée que celle des ouvrages de littérature générale ! D’une façon générale, le pourcentage dérisoire obtenu par ces derniers (moins de 4 % en 1972, 0,6 % en 1973, 7 % en 1974) semble indiquer qu’en dépit d’un discours officiel soviétique proclamant le goût des peuples de l’U.R.S.S. pour la littérature française, cette dernière, du moins en version originale, se vend très peu en Union Soviétique.

66Le problème du sensible déficit enregistré par la France dans le domaine du livre et de la quasi-absence des ouvrages littéraires a très vite suscité le mécontentement des autorités françaises20, mais ce fort déséquilibre perdure tout au long de la période. Il s’explique d’abord par la nature des besoins de l’U.R.S.S. qui, en plein effort de modernisation industrielle, préfère acquérir des produits techniques, immédiatement opérationnels, plutôt que des livres de littérature ou d’art considérés comme moins utiles et nécessitant un contrôle idéologique plus strict à l’entrée en Union Soviétique.

67La troisième place occupée par le français dans l’enseignement des langues étrangères en U.R.S.S., – derrière l’allemand et l’anglais – est un autre facteur non négligeable.

68Enfin, ce déséquilibre s’explique également par le régime de la propriété intellectuelle et de la traduction en vigueur en Union Soviétique :

69Jusqu’en 1973, l’Etat soviétique n’adhère pas aux conventions internationales en matière de propriété intellectuelle et de droits d’auteur, ce qui lui a permis aisément de bafouer ces derniers et d’« utiliser » à sa guise, voire de « malmener » les textes étrangers.

70En particulier, l’Etat soviétique, troisième « traducteur » mondial en 1973 derrière la R.F.A. et l’Espagne21 a eu pendant toute la période massivement recours à la traduction d’ouvrages français de littérature. Mais ces traductions ont été d’une manière quasi-systématique effectuées par des maisons d’édition soviétiques : achetant de nombreux droits de traduction, l’Etat soviétique a encouragé et promu la diffusion en russe d’ouvrages français, mais cette diffusion ne s’est traduite par aucun courant d’importation en provenance de la France.

71Enfin, ce régime de la traduction a de toute évidence permis à l’Etat soviétique de maîtriser le processus dans ses aspects économiques et idéologiques, lui laissant en particulier le choix des ouvrages à traduire et privant ainsi la partie française (auteurs et éditeurs) de toute initiative.

72Ainsi, bien que la population soviétique ait exprimé un fort intérêt pour la littérature française, (dont témoigne le volume important des traductions effectuées par l’U.R.S.S. au cours de la décennie à partir d’œuvres françaises), cet intérêt ne s’est pas traduit par un véritable courant d’échanges, largement en raison du régime de la traduction en vigueur en Union Soviétique. D’autre part, et d’une manière plus générale, les livres sont restés très marginaux dans nos exportations vers l’U.R.S.S., l’Etat soviétique ayant plutôt privilégié des importations techniques, – plans industriels, produits graphiques –...

73En dépit des volontés politiques exprimées de part et d’autre, aucune dynamique d’échanges n’est donc parvenue à se créer dans le secteur du livre. Dans cet échec, il faut voir l’indifférence du public français aux « produits intellectuels » soviétiques, qu’ils soient littéraires ou scientifiques, et la volonté soviétique de privilégier des achats techniques, plus « opérationnels » et moins « subversifs ».

74La faiblesse de ces échanges intellectuels (qu’ils relèvent du secteur du livre ou de la langue) atteste largement de la difficulté des Français et des Soviétiques à partager leur culture et à communiquer entre eux au moyen de cette culture. La réalité des faits contraste donc fortement avec les souhaits et objectifs formulés tout au long de la période.

75Ce bilan sans appel est toutefois resté l’apanage des échanges linguistiques et intellectuels. A travers les autres formes d’expression artistique que sont le théâtre, la danse, la musique, ou bien encore les arts plastiques, une certaine communication s’est établie, qui a conduit à des manifestations nombreuses, reflet d’une bonne volonté partagée. Toutefois, là encore, les réalisations ont considérablement varié d’un domaine à l’autre.

III. – Les relations artistiques : prestige et académisme

76Les relations artistiques offrent à l’ère de la détente un bilan très contrasté : au succès manifeste des spectacles ou des expositions présentés de part et d’autre, s’opposent les difficultés rencontrées par le cinéma et cela en dépit des efforts consentis dans ce domaine par les deux Etats.

De nombreuses manifestations artistiques

77Parmi les manifestations artistiques organisées au cours de la période l’on distingue au premier plan, des opérations de prestige, ponctuelles, à vocation non commerciale – expositions de grande envergure, tournées de troupes nationales –, qui ont débuté à l’ère gaullienne et se sont succédées, au rythme d’une exposition le plus souvent biennale, parfois annuelle, et d’un échange annuel de troupes.

78Coups d’éclat médiatiques, ces manifestations ont largement contribué à faire connaître à chacun des deux peuples le patrimoine culturel de l’autre, mais ont peut-être également contribué à le figer dans quelques images bien définies.

Les grandes expositions de la période

79Le tableau ci-dessous témoigne du rythme très soutenu des expositions organisées de part et d’autre, conformément aux protocoles bilatéraux.

80A l’exception de l’exposition consacrée au cinquantenaire des relations bilatérales qui rencontre un échec patent et de celle portant sur l’art arménien marquée par un accueil mitigé, toutes ces expositions ont connu de francs succès populaires. Toutefois, elles n’ont été présentées que dans les capitales des deux pays, parfois dans une ville de province, et en cela, leur succès ne reflète qu’une opinion publique urbaine. Malgré cette réserve, la profonde différence de nature entre les deux régimes socio-politiques ne semble pas avoir été un obstacle à la découverte de l’autre : les liens traditionnellement étroits entre les deux peuples ont donc subsisté et la curiosité pour le patrimoine de l’autre est restée entière.

81D’autre part, ces expositions se sont déroulés à un rythme régulier, sans connaître aucune perturbation : si la crise internationale d’août 1968 a entraîné un refroidissement dans les relations bilatérales, « l’incident de parcours » n’a pas suscité de remise en cause du programme culturel franco-soviétique et seul le faste entourant les réalisations de 1968 s’est trouvé amoindri. Le rythme inauguré par la période gaullienne a donc été respecté.

82Enfin, la qualité – inégalée jusque-là – des œuvres obligeamment prêtées par l’U.R.S.S. témoigne du traitement de faveur réservé à la France et illustre le rang détenu par cette dernière dans la diplomatie culturelle soviétique.

83Au-delà de ces succès, quelques réserves s’imposent toutefois.

Les grandes expositions franco-soviétiques, rythme et nature

DateLieuSujet
1965Paris : BordeauxChefs d’œuvre de la peinture française dans les musées soviétiques
Moscou Leningrad52 chefs d’œuvre français et étrangers venus de France
1966Moscou LeningradRodin et son temps
1967ParisL’art russe, des Scythes à nos jours
1968Moscou LeningradLe Romantisme français au
XIXe siècle
1969ParisL’œuvre de Pirosmanichvili
1970ParisLenine (commémoration du centenaire de sa naissance)
ParisL’art géorgien de l’Ourartou à nos jours
1971Moscou LeningradL’impressionisme français
ParisPicasso dans les Musées soviétiques
1972MoscouLe visage de la France : exposition de photographies françaises
1973ParisLes grandes traditions du bois sculpté de la Russie ancienne et moderne
Kiev Leningrad MoscouL’art de la tapisserie en France
1974Paris MoscouCinquante ans de relations diplomatiques bilatérales
MoscouLa Joconde

Archives du ministère des Affaires culturelles, dossiers U.R.S.S. 1961-1974, passim et Archives de l’Action Française d’Action Artistique, passim.

84Si la bonne volonté et l’intérêt mutuel sont indéniables, la longueur de la préparation nécessaire à chaque exposition a contribué à ralentir la fréquence des réalisations. En moyenne, une année au moins s’écoule entre l’accord de principe et l’effective réalisation de l’exposition. Proposée au gouvernement soviétique par l’intermédiaire de notre ambassade à Moscou et acceptée par ce dernier en février 196 522, l’exposition Rodin et son temps n’a lieu qu’au printemps 1966. De même, l’exposition Pirosmanichvili, proposée par Elisabeth Fourtseva à André Malraux en mars 1968 et confirmée par lettre le 18 mars 1968, est inscrite au protocole bilatéral en décembre 1968,23 mais n’est montée qu’en mars-avril 1969.

Pourquoi cette lenteur ?

85Dans la plupart des cas, la préparation matérielle de l’exposition est précédée de négociations interminables quant à la nature des œuvres qui seront exposées, comme en témoigne la note du 2 février 1965, adressée par le ministère des Affaires étrangères au ministère des Affaires culturelles :

« Prévoyant que les autorités soviétiques demanderont à discuter du principe d’échanges d’expositions, j’ai prié notre Ambassade à Moscou de me faire savoir si le gouvernement soviétique accepterait d’accueillir en 1966 une exposition de sculptures françaises contemporaines de « Rodin à nos jours ».
Notre Ambassade à Moscou vient de m’informer que les autorités soviétiques compétentes seraient en principe intéressées par une telle suggestion, à condition toutefois que le nombre d’œuvres abstraites soit limité à 1/5e de la collection ».24

86Les impératifs idéologiques de l’Etat soviétique ont donc affecté la nature des œuvres françaises exposées en U.R.S.S., n’autorisant que la présentation de certaines toiles ou sculptures considérées comme peu subversives. Au contraire, l’art abstrait, jugé décadent et inutile, n’a été montré qu’à dose « homéopathique »...

87Du côté français, aucune proposition soviétique n’a essuyé de refus ; cependant, l’accueil parfois mitigé, voire indifférent du public français est apparu comme un verdict et a souligné deux faits prééminents : l’art soviétique, dès lors qu’il n’est pas russe, suscite en France un faible intérêt ; les thèmes politiques ne rencontrent aucun succès... Ainsi, si l’organisation de ces expositions de prestige a rencontré un grand succès populaire, elle s’est toutefois heurtée à une double résistance, l’une venue des autorités soviétiques et l’autre, du public français.

88Des résistances similaires ont affecté les échanges de troupes de théâtre, de musique et de danse.

Théâtre, musique et danse à l’ère de la détente

89Théâtre, musique et danse ont fait à l’ère de la détente, l’objet d’échanges effectués par l’intermédiaire des autorités gouvernementales (c’est le cas lors de tournées des grandes troupes nationales de théâtre ou de danse) ou par le biais d’agences privées, commerciales comme l’Agence Littéraire et Artistique Parisienne ou par le canal de l’Association France-U.R.S.S.25

90L’ensemble de ces données26 permet de dénombrer, en moyenne annuelle, et de 1964 à 1974, cinq déplacements de troupes. Or, pour la période 1953- 1987, l’on ne dénombre qu’une moyenne annuelle de trois déplacements. La décennie 1964-1974 a donc, du point de vue de la fréquence de ces tournées, constitué une période privilégiée.

91L’on observe par ailleurs une très grande disproportion dans ces échanges : 33 troupes soviétiques sont venues en France durant la décennie de la détente et y ont effectué 52 tournées, alors que 24 troupes françaises se sont produites en U.R.S. S, au cours de 32 tournées. Si à ces tournées, l’on ajoute les tournées dites « locales » organisées par l’association France-U.R.S.S. et non comptabilisées par les archives de l’A. LA. P., la disproportion en faveur de l’U.R.S.S. est encore plus grande.

92Les spectacles soviétiques présentés en France au cours de la décennie de la détente sont dominés par les « ensembles populaires de chants et de danses », – Choeurs et Danses de l’Armée Soviétique, Ballets Moisseiev – essentiellement attachés au folklore traditionnel de la Russie et de l’Union Soviétique, qui représentent le tiers des troupes soviétiques venues se produire en France. Viennent ensuite dans une proportion égale les Ballets Classiques (Ballet du Bolchoï, Ballet du Kirov) et les formations musicales et lyriques, tandis que les troupes de théâtre et de cirque sont très faiblement représentées.

93Cette répartion s’explique tant par la volonté des autorités soviétiques que par le goût du public français : si les faveurs des autorités soviétiques se sont majoritairement portées vers des formes d’expression artistique peu subversives (comme le folklore), l’insuccès du théâtre soviétique en France s’explique clairement par l’obstacle de la langue (le russe, comme nous l’avons vu précédemment, est marginal en France). Enfin, malgré la présence prestigieuse du Cirque de Moscou, l’insuccès relatif du cirque en France est dû au déclin très net que connaît alors en Occident ce type de spectacle.

94La nature des spectacles français présentés sur le territoire soviétique est très différente : l’on ne recense aucun ensemble populaire, reflet du faible engouement des Français pour leur folklore, et un équilibre s’établit entre les troupes de théâtre, les formations musicales et chorales et les orchestres de chambres. Cet équilibre s’explique par la popularité du théâtre classique (la langue française, répandue en U.R.S.S., n’est pas un obstacle) et de la musique française (en particulier contemporaine). A contrario, les ballets sont très faiblement représentés, ce qui peut sembler paradoxal compte tenu du goût affirmé des Soviétiques pour cette forme d’expression artistique. En fait, cette situation s’explique par le refus répété des autorités moscovites d’accueillir des troupes de danses modernes ne répondant pas aux critères esthétiques « classiques » des écoles soviétiques de danse...

95Un refus identique a touché d’autres formes d’expression artistique : de 1964 à 1974, aucune troupe théâtrale d’avant-garde française n’est admise sur le territoire soviétique, où l’on accueille au contraire des troupes offrant des répertoires « classiques » – Molière, Diderot –, auxquels s’ajoutent, plus proches de notre sensibilité contemporaine, Giraudoux et Anouilh, tandis qu’au contraire, Ionesco, alors en faveur sur les scènes françaises, n’est pas proposé au public soviétique...

96Les spectacles français n’ont donc pu échapper aux normes esthétiques et morales imposées par le système soviétique et comme en témoigne la note du 7 février 1974, émanant de la Direction Générale aux Expositions et aux Echanges Culturels, « ... le champ d’action artistique s’est trouvé ainsi considérablement limité, donnant de l’art français une image sans doute figée et partielle. »27

97Plus nombreuses que les prestations françaises, les prestations soviétiques reproduisent des rigidités voisines.

98Des spectacles populaires sont montés : durant l’hiver 1969-70, le Bolchoï, avec ses 400 exécutants, présente sur la scène du Théâtre National de l’Opéra, Boris Godounov, La Khovantchina, Le Prince Igor, Eugène Onéguine et La Dame de Pique ; le Cirque de Moscou se produit également plusieurs fois au cours de la période, en 1965, 1967, 1969 et 1973. D’une façon générale, ces productions coûteuses conquièrent les spectateurs français, impressionnés par la perfection des exécutions et séduits par « l’exotisme » du folklore russe. Mais si l’ensemble de ces productions a plutôt satisfait le public français, certaines, et notamment celles du Bolchoï, déçoivent par leur académisme, comme en témoignent les réactions souvent mitigées de la presse parisienne.

99Les manifestations artistiques – expositions, spectacles d’art lyrique, de théâtre ou de danse – ont donc été nombreuses et régulières, attestant d’une bonne volonté mutuelle et de l’efficacité des protocoles bilatéraux : par la dynamique qu’ils ont suscitée, ces protocoles ont, – au moins au plan quantitatif –, permis la réalisation de grandes manifestations, sans qu’aucun essouflement ne s’observe au cours de la période.

100Chaque pays s’est ainsi assuré dans l’autre une présence, un rayonnement culturels qu’aucune période n’avait pu lui offrir jusque là et que la dégradation des relations politiques dans la seconde moitié des années 70 remettra progressivement en cause. La période 1966-74 constitue donc, par le rythme et le succès des manifestations artistiques, une véritable embellie.

101Au-delà de ces apparents succès, des réserves s’imposent toutefois dès que l’on évoque la nature et non plus seulement la fréquence de ces manifestations ; un certain académisme s’observe dans les spectacles soviétiques présentés en France : toujours luxueuses, ces productions – Cirque de Moscou, Ballets du Bolchoï, Choeurs et Danses de l’Armée Rouge – changent peu au cours de la période, offrant de l’Union Soviétique l’image d’un pays attaché à un art parfait dans son exécution, mais routinier, sans recherche esthétique.

102Ces mêmes canons esthétiques et idéologiques ont déterminé la nature des œuvres présentées en U.R.S.S., imposant à l’art français une véritable censure : aucune troupe chorégraphique d’avant-garde, aucun peintre abstrait, aucun auteur moderne de théâtre ne sont admis en Union Soviétique, ce qui a contribué à donner de la culture française une image excessivement figée, au moment même où, paradoxe, les autorités – avec le projet Beaubourg en particulier – encouragent l’innovation créatrice.

103En contrepartie, les autorités françaises ont en plusieurs occasions dissuadé les responsables soviétiques de présenter leurs productions d’art contemporain, par crainte d’un rejet du public français réticent devant la propagande politique.

104A cause de la censure d’une part, et des goûts du public français d’autre part, les manifestations artistiques inspirées et encadrées par les protocoles intergouvemementaux sont donc restées pendant toute la période éloignées de l’art contemporain et attachées à des thèmes classiques, considérés comme plus sûrs ; mais leur fréquence et leur nombre impressionnants attestent dans ce domaine d’une véritable dynamique.

105En revanche, dans le secteur du cinéma où les protocoles n’ont joué qu’un rôle mineur et où l’initiative principale relève, du côté français, du domaine privé, les réalisations ont été beaucoup plus modestes.

Cinéma et coopération franco-soviétique

106Plusieurs éléments auraient pu à l’ère de la détente, favoriser le développement des échanges dans le domaine cinématographique.

Un contexte favorable

107Le pays qui a vu naître l’industrie cinématographique et qui abrite l’un des festivals les plus prestigieux du septième art, se montre toujours, à l’ère de la détente, « amateur » et « consommateur » de longs métrages. Dans les années 60-70, le nombre annuel de spectateurs dans les salles françaises de cinéma approche les 180 millions28, (soit 3,6 films par habitant) et 40 à 50 % des entrées concernent des films étrangers, ce qui traduit un goût prononcé pour les cultures autres qu’hexagonale, augure apparemment favorable pour la diffusion du cinéma soviétique en France.

108De même, pour des raisons à la fois politiques et culturelles, – dès les années 20, le cinéma a constitué en Russie Soviétique un instrument privilégié d’éducation et de communication dans ce pays qui se voulait neuf –, cet art connaît toujours un engouement extrême et fait partie intégrante du système socio-culturel...

109Par ailleurs, depuis le 8 juillet 1967, un accord bilatéral29, souhaitant favoriser le développement des échanges bilatéraux, a fixé un cadre et donné des moyens précis à ces échanges :

110Signé à Moscou par Olivier Wormser, alors ambassadeur de France et M. Romanov, président du Comité pour la Cinématographie auprès du Conseil des ministres de l’U.R.S.S., l’accord est à l’origine conclu pour trois années, renouvelable annuellement par tacite reconduction.

111Deux volets essentiels ont été distingués dans cet accord : la coproduction (articles 1 à 12) et l’échange de films (articles 13 à 19).

112En ce qui concerne l’échange de films, les deux parties affirment qu’elles accorderont « de la manière la plus libérale les autorisations nécessaires à l’importation, à la distribution et à l’exploitation des films de long et court métrage originaires de l’autre partie. » (article 13)

113Pour assurer au texte un retentissement minimal et protéger les films qu’il concernera à l’avenir, l’article 14 précise que « toutes les mesures seront prises pour que le nombre de ces films annuellement importés de part et d’autre soit supérieur à dix », tandis que l’article 18 énonce que « les films acquis ne devront subir aucune altération, adjonction ou coupure, sans l’accord préalable des producteurs intéressés. Cette clause s’applique indistinctement à chaque élément du film : image, commentaire, dialogue, musique, son. »

114Enfin, l’article 21 institue une commission mixte chargée de veiller à l’application de l’accord et devant se tenir au moins une fois par an.

115Ce cadre privilégié, – création d’une commission mixte, encouragement donné à la coproduction et aux échanges de films – pouvait apparaître comme un facteur extrêmement favorable au développement des échanges cinématographiques. Pourtant, à l’ère de la détente, ces derniers sont restés très limités.

Des échanges restés limités

116Alors que l’accord de 1967 prévoyait l’achat annuel de dix films pour chacune des deux parties, ce nombre n’a pas toujours été atteint, et a fortiori dépassé : les Soviétiques ont acheté dix films français en 1972, sept en 1973 et 1974 alors qu’aux mêmes dates, la France a importé d’U.R.S.S., vingt, onze et quatre films. Le constat est donc net : d’une part, l’accord de 1967 n’a pas réussi à créer une dynamique d’achat ; d’autre part, au seuil des années 70, un déséquilibre s’observe en défaveur de la France qui achète plus qu’elle ne vend.

117Comment s’explique cette double situation ? A quoi l’imputer ? L’étude qualitative des films échangés livre quelques premiers éléments de réponse.

118Parmi les films achetés de part et d’autre de 1967 à 1974, c’est-à-dire au lendemain de la signature de l’accord bilatéral, beaucoup sont des classiques, véritables phares du septième art : Quai des Brumes30, Jeux Interdits31, La Mère,32 et La Ligne Générale33. Mais appartenant davantage au domaine des cinémathèques qu’à celui de l’« industrie du cinéma »34, ils ne sont pas susceptibles de susciter un véritable courant commercial entre les deux pays.

119En ce qui concerne les films nouveaux, « commerciaux », importés de France, les autorités soviétiques ont privilégié dans leur choix, les films de divertissement, les comédies faciles, – la série des Gendarmes, avec Louis de Funès, a été régulièrement achetée pendant toute la période à l’exception de... Rabbi Jacob jugé indésirable ! – alors que les « films à thèse », les films psychologiques, tout comme les films politiques étaient minoritaires dans leurs achats.

120La nature des films soviétiques achetés par le C.N.C. apparaît comme beaucoup plus variée et traduit un jeu d’équilibre entre la nécessité de répondre favorablement aux propositions du gouvernement soviétique et celle de répondre à l’attente du public français.

121La plupart des grands films soviétiques de la période, en particulier les longs-métrages primés à Cannes, – Andreï Roublev, Solaris –, ont été régulièrement achetés par le C.N.C., à l’exception notable de Sayat-Nova de Serguey Paradjanov35, de La gare de Biélorussie36 d’Andreï Smimov et de Pas de gué dans le feu37 de Gleb Panfilov, dont l’absence ne s’explique que par une erreur d’appréciation du Centre...

122Toutefois, ces 27 longs-métrages de qualité ne représentent qu’une petite part des 68 visas d’exploitation accordés de 1968 à 1974 par la France à l’Union Soviétique. Des œuvres destinées aux enfants (comme Les Aventures de Pinocchio) ou des films considérés comme mineurs ou de propagande (La Famille Oulianov, Lenine, pages de vie, Récits sur Lenine) complètent cette distribution. Dans le cas des courts-métrages, les achats de circonstance sont encore plus nets : sur les dix-huit acquisitions du C.N.C., cinq ont trait à la vie de Lenine ou à la révolution d’Octobre !

123La sélection effectuée par le C.N.C. reproduit donc les caractères majeurs du cinéma soviétique de la période : une production sociale de masse, conforme aux critères de goût et de moralité dictés par l’Etat socialiste et une minorité de chefs d’œuvres, porteurs d’une esthétique nouvelle qui s’attachent à saisir l’individu dans sa complexité sans délivrer de message social.

124Pourtant, ces derniers films, a priori plus aptes que les films de propagande à séduire le public français, n’ont été achetés par le C.N.C. que plusieurs années après leur réalisation. Si Andreï Roublev, primé à Cannes au printemps 1969, reçoit son visa d’exportation dès le mois de novembre, Solaris, primé en 1972 n’est acheté qu’en 1974 ; quant au film d’Andreï Mikhailkov-Kontchalovski, Un nid de gentilshommes, produit en 1969, il n’est présent sur les écrans français qu’en 1973. Cette lenteur a deux causes essentielles : l’inertie traditionnelle des circuits d’exportation soviétique, mais également l’indifférence des professionnels français du cinéma, peu intéressés par un marché qu’ils jugent de faible rendement.

125Or, ce jugement sans appel, quelque sommaire qu’il soit, est largement étayé par les statistiques de la période : ces chefs d’œuvre, réputés difficiles, sont très peu prisés d’un public français alors mal préparé à la lecture d’un Tarkovski ou d’un Paradjanov. Cette double réalité – une production de masse qui paraît relever de la propagande et un cinéma intellectuel, réputé difficile –, explique la faible audience en France du cinéma soviétique et contraste avec la popularité du cinéma français en Union Soviétique.

Des échanges très contrastés

126Dans les années 60-70, les films venus d’Union Soviétique attirent en moyenne 30 à 40 000 spectateurs38, ce qui représente moins de 0,2 % des entrées annuelles dans les salles françaises, alors qu’a contrario, la situation du film français en U.R.S.S. apparaît comme beaucoup plus florissante : d’après le rapport du Conseil Economique et Social consacré en 1976 à « l’exportation et à l’importation des produits culturels », l’Union Soviétique représente annuellement entre 4 et 10 % des recettes cinématographiques françaises.39

127La situation catastrophique du film soviétique et ce très net déséquilibre en faveur de la France ont peu à peu suscité une vive réaction des autorités du Kremlin, attachées au principe de la réciprocité des échanges40. Mais la bonne volonté des autorités françaises s’est heurtée aux strictes lois du marché...

128Dans le domaine cinématographique, les échanges franco-soviétiques ont donc été décevants, et les efforts des deux gouvernements n’ont pas abouti, se heurtant à l’indifférence tant des professionnels que du public français.

129En ce qui concerne le volet de l’accord de 1967 qui souhaitait un développement des coproductions franco-soviétiques, l’on observe une situation voisine :

130Trois coproductions ont été réalisées sous la Ve République ; Normandie-Niemen en 1959, La Nuit des Adieux de J. Dreville en 1965 et Un Amour de Tchekov de S. Jutkevitch en 1968. Une seule réalisation est donc postérieure à l’accord de 1967 qui n’a pas réussi à instaurer de véritable collaboration dans ce domaine.

Pourquoi cet échec ?

131Dans l’entretien qu’il accorde au journal Le Monde en février 197541, Pierre Viot, directeur du Centre National de la Cinématographie, apporte quelques éléments de réponse : au-delà du choix du scénario qui déjà, pose problème, – l’U.R.S.S. refusant tout film où « violence, racisme, pathologie sexuelle... sont le moteur de l’action » –, des difficultés financières majeures ont contribué à entrâver tout projet de coproduction : disposant de budjets beaucoup plus importants et d’un personnel salarié d’Etat42, les cinéastes soviétiques tournent souvent plus lentement que les français pressés par le coût représenté par la présence prolongée des acteurs et des techniciens. De nouveau, se pose ici un problème suscité par le statut du cinéma, différent de part et d’autre...

132Parce que le marché soviétique n’est pas considéré comme « porteur » par les producteurs français et parce que le cinéma soviétique ne répond pas aux goûts du public français, les échanges cinématographiques sont donc restés de faible ampleur, marqués par un net déséquilibre au détriment de l’U.R.S.S. La bonne volonté des deux gouvernements et l’existence d’un cadre institutionnel n’ont donc pas permis de rapprocher efficacement les points de vue et les intérêts, par trop différents...

133Le bilan de ces relations artistiques apparaît donc comme très contrasté, alors même que l’art, dans sa version « populaire » (expositions, grands spectacles, cinéma) pouvait apparaître comme un vecteur relativement facile de communication et de rapprochement entre Français et Soviétiques ; certes il a conduit à de grandes réalisations communes et a permis une meilleure diffusion du patrimoine culturel des deux pays mais il a rencontré de sérieuses difficultés liées à l’existence tant de normes morales et de critères esthétiques dissemblables, que d’un statut de l’art et de la culture très différent de part et d’autre... D’autre part, ces échanges culturels n’ont conduit à aucune ouverture de l’Etat soviétique qui n’ait été voulue et maîtrisée par lui : ni le projet français d’ouvrir une salle de lecture à Moscou, ni la volonté, également française, de faciliter les échanges de personnes, n’ont en fait abouti, témoignant ainsi de fortes résistances soviétiques et de l’impuissance française à les remettre en cause...

Notes de bas de page

1 Ce concept a été établi par Frederik BARGHOORN, in The Soviet Cultural Offensive. The Role of Cultural Diplomacy in Soviet Foreign Policy. Princeton, New Jersey, Princeton University Press, 1960, 353 p.

2 SALON Albert, L’action culturelle de la France dans le monde, analyse critique, tome 1, p. 63.

3 DE GAULLE Charles, Discours et Messages, tome I, p. 355.

4 DE GAULLE Charles, Discours et Messages, tomel, p. 501.

5 Cité par GARCIN – ABOU YEHIA Martine, in Le ministère Malraux et la politique artistique de la France dans le monde, p. 42.

6 Communiqué publié le 2 novembre 1965, in Les Relations franco-soviétiques, version en français, p. 10.

7 La déclaration franco-soviétique du 13 octobre 1970 précise ainsi : « Les deux parties se sont également déclarées résolues à développer les relations culturelles entre la France et l’U.R.S.S. Se félicitant des résultats déjà obtenus dans ce domaine, elles sont tombées d’accord pour rechercher les moyens d’approfondir la coopération dans le domaine de l’éducation, de l’enseignement, de l’art, de la radio, de la télévision, du cinéma, du sport et d’autres formes d’échanges en accordant une attention particulière à l’étude de la langue française en U.R.S.S. et de la langue russe à Paris », in Déclaration franco-soviétique du 13 octobre 1970, in Les Relations franco-soviétiques, version en français, p. 89.

8 Communiqué franco-soviétique du 12 janvier 1973, in Les Relations franco-soviétiques, version en français, p. 116.

9 Au cours des entretiens qu’ils nous ont accordés.

10 Voir en particulier dans les archives du ministère de l’Education nationale, les dossiers F 17 bis 29 554 et F 17 bis 21 081.

11 La création de la troisième langue en classe de Seconde date de 1965 ; toutefois, le russe n’est proposé au choix des élèves qu’à partir de 1969.

12 Archives du ministère de l’Education nationale, passim.

13 Archives du ministère de l’Education nationale, Rapport de Jacqueline de Proyart, présidente de la Société des Professeurs de russe, 1973, F 17 bis 29 554.

14 Archives du ministère de l’Education nationale, Annexe à la lettre de Roger Seydoux, adressée le 9 février 1972 à Maurice Schumann, n° 268 RC, D. G.R.S.T., F 17 bis 29 554.

15 Archives du ministère de l’Education nationale, Note pour le ministre rédigée par Max Delacquis, chargé des Relations Internationales au Ministère de l’Education Nationale, MD GG n° 2 688, 2 août 1972, dossier 1972, F 17 bis, 21 081.

16 Archives du ministère de l’Education nationale, Compte rendu d’un voyage effectué à Moscou du 3 au 7 mai 1972, par Georges Tallon, Inspecteur Général de l’organisation scolaire, dossier 1972, F 17 bis, 21 081.

17 Entretien avec Lily Denis, 14 octobre 1987.

18 Source : Statistiques annuelles du Commerce extérieur français.

19 PAYEMENT Claude, L’exportation des productions littéraires et artistiques françaises, Rapport au Conseil Economique et Social, 1976. Les données que nous avons utilisées dans ce tableau figuraient en valeurs absolues dans le rapport de C. Payement ; nous les avons exprimées en pourcentages.

20 Ainsi par exemple lors de la réunion franco-soviétique préparatoire à la signature du procès-verbal de janvier 1973, in Archives du ministère des Affaires culturelles, Procès-verbal du protocole de janvier 1973, 9e session de la Commission mixte pour les relations culturelles, III, 20, « livre », dossier201 U.R.S.S., 1961-1973, carton 412.

21 Source : Annuaire statistique de l’U.N.E.S.C.O., 1973.

22 Archives du ministère des Affaires Culturelles, lettre du ministère des Affaires étrangères, Direction Générale des Affaires Culturelles et Techniques, Echanges Artistiques, n° 382/ACT, 4a, 24/2/1965, au ministère des Affaires culturelles, FG/CP, dossier 201 U.R.S.S., 1961-19731, carton 412.

23 Archives du ministère des Affaires culturelles, Sous-dossier Commission mixte franco-soviétique, Moscou 16-20/12/1968 : bordereau du ministère des Affaires étrangères, ML/JB, Direction Générale des Relations Culturelles, Service des échanges culturels et scientifiques, n° 20 RC/EC/Ei/PE, 6/1/1969, dossier 201 U.R.S.S., 1961-1973, carton 412.

24 Archives du ministère des Affaires Culturelles, lettre du ministère des Affaires étrangères, Direction Générale des Affaires Culturelles et Techniques, Echanges artistiques, n° 382/ACT, 4a, 24/2/1965 au ministère des Affaires culturelles FG/CP, dossier 201 U.R.S.S., 1961-1973, carton 412.

25 Sur le rôle de l’Agence Littéraire et Artistique Parisienne et de l’Association France-U.R.S.S., voir le chapitre consacré aux relais privés.

26 Ces statistiques ont été établies à partir des archives de l’Agence Littéraire et Artistique Parisienne.

27 Archives du ministère des Affaires culturelles, Note annexe à la note du 7 février 1974, « note sur les échanges artistiques avec l’U.R.S.S. », dossier 20, U.R.S.S., échanges culturels et divers, Direction Générale aux Expositions et aux Echanges Culturels, carton 142.

28 Archives du Centre National de la Cinématographie, statistiques.

29 Accord franco-soviétique du 8 juillet 1967, archives du Centre National de la Cinbé-matographie, dossier U.R.S.S.

30 De Marcel Carné, tourné en 1938 et acheté par l’U.R.S.S. en 1971.

31 De René Clément produit en 1951 et vendu aux Soviétiques en 1972.

32 De Vsevolod Poudovkine, tourné en 1926, et acheté par l’Etat français en 1973.

33 De Serge Eisenstein, film réalisé en 1929, et acheté par l’Etat français en 1973.

34 ZAND Nicole, « Le cinéma français à Moscou », Le Monde, 13 février 1975.

35 Son titre en français est « La couleur de la grenade » ; il a été réalisé en 1969.

36 Le film est tourné en 1970.

37 Le film est réalisé en 1968.

38 PAYEMENT Claude, L’exportation des productions littéraires et artistiques françaises, Rapport au Conseil Economique et Social, p. 135.

39 Ces pourcentages ont été établis d’après les données chiffrées figurant dans le rapport de Claude Payement : 4,5 % en 1971, 9,3 % en 1972, 5,3 % en 1973, 9,8 % en 1974, in PAYEMENT Claude, L’exportation des productions littéraires et artistiques françaises, Rapport au Conseil Economique et Social.

40 Le problème est largement évoqué lors de l’entretien du 22 juillet 1971 entre Jacques Duhamel et Elisabeth Fourtseva, in Archives du Centre National de la Cinématographie, dossier « Echanges franco-soviétiques ».

41 Le Monde, 9 février 1975.

42 Pierre Viot précise à ce sujet : « Les conditions de travail sont très différentes : coûts de production élastiques, temps de tournage presque illimité, masse de figurants inépuisable à des prix défiant toute concurrence... » in Le Monde, 9 février 1975.

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